d) La question des coopérations renforcées

La possibilité pour certains Etats membres de réaliser ensemble, sans esprit d'exclusive, un approfondissement de la construction européenne dans un domaine déterminé, paraît un instrument essentiel pour concilier élargissement de l'Union et poursuite de l'intégration européenne. Sans une certaine différenciation, une Europe de vingt-cinq Etats membres risque d'être condamnée à s'aligner sur les Etats les moins en mesure, ou les moins désireux, d'aller de l'avant.

La formule des coopérations renforcées a donné lieu à un large et long débat au sein de la CIG. Celui-ci a abouti à l'introduction, dans le traité d'Amsterdam, de conditions précises au lancement d'une coopération renforcée. Ces conditions sont, pour la plupart, des précautions utiles : une coopération renforcée doit toujours rester ouverte aux Etats membres ayant la volonté et la capacité de s'y joindre ; elle ne doit pas pouvoir conduire à une remise en cause de l'acquis communautaire, ou à une fragmentation du marché intérieur. Mais, si le traité prévoit que l'autorisation de lancer une coopération renforcée est accordée par le Conseil statuant à la majorité qualifiée, il précise également que, dès lors qu'un Etat le demande en invoquant une raison de politique nationale importante, aucune décision ne peut être prise. Ce schéma revient à reconnaître un droit de veto à tout Etat membre.

Ainsi, en pratique, le lancement d'une coopération renforcée risque de réclamer de difficiles marchandages, ce qui pourrait dissuader de recourir à ce nouvel instrument. Ce risque, à l'évidence, ira en s'aggravant à chaque élargissement de l'Union. Or, s'il est normal que les membres fondateurs d'une Union d'Etats puissent s'opposer à ce que cette Union prenne des dimensions imprévues à l'origine et ne correspondant pas à leurs attentes, en revanche il ne paraît pas acceptable que de nouveaux membres puissent empêcher des membres plus anciens de développer une intégration plus étroite, dès lors que celle-ci est conçue dans un esprit d'ouverture et non d'exclusion.

Il paraît donc nécessaire de revenir sur le droit de veto introduit par le traité d'Amsterdam, les sécurités mises en place par ce même traité à l'égard des coopérations renforcées paraissant une protection suffisante contre les risques, mis en avant par certains Etats, que celles-ci fassent apparaître de nouvelles barrières entre les Etats membres.

L'hypothèse d'une " Europe à plusieurs vitesses ", a priori non souhaitable, ne saurait être écartée si elle constituait la seule formule permettant d'avancer. Les Etats membres qui entendent exploiter ensemble toutes les potentialités de l'idée européenne devraient-ils être empêchés de le faire sous prétexte que quelques-uns de leurs partenaires auraient une conception plus restrictive des finalités de l'Union ? Un tel alignement systématique sur le " moins-disant européen " ne pourrait conduire qu'à la stagnation. Des dispositions plus favorables aux coopérations renforcées doivent donc, pour votre rapporteur, être un des aspects nécessaires du préalable institutionnel.

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