2. 1982-1988 : une " déconcentration " totale du jugement des comptes aux chambres régionales des comptes rapidement contestée

La réforme instituée par le loi de 1982 a eu un double effet , puisque pour les petites collectivités, d'une part , elle substituait à l'apurement administratif, un contrôle juridictionnel assuré par les chambres régionales des comptes et que pour les grandes collectivités, d'autre part , elle procédait à une déconcentration du jugement des comptes de la Cour des comptes aux chambres régionales des comptes.

A cet égard, il faut rappeler que l'article 100 de la loi du 2 mars 1982 disposait que les premiers comptes de gestion de receveurs des collectivités locales et de leurs établissements publics soumis au jugement des chambres régionales des comptes, seraient ceux de la gestion 1983. Les premiers jugements provisoires des chambres régionales des comptes dans ce domaine ne sont donc intervenus qu'à partir du début de l'année 1985.

A compter de cette date, l'immense majorité des comptables publics des collectivités locales , qui n'avaient jusqu'alors connu que l'apurement administratif, mis en oeuvre par leur propre hiérarchie, "découvrent" le contrôle juridictionnel des comptes exercé par les toutes récentes chambres régionales des comptes .

A cette novation s'ajoutent les exigences du décret n o 83-16 du 13 janvier 1983 fixant la liste des pièces justificatives sur lesquelles devaient dorénavant être appuyés les mandats de paiement.

Enfin, cet ensemble était complété par l'attribution aux ordonnateurs, en vertu de l'article 15 de la loi n o 82-213 du 2 mars 1982, d'un pouvoir de réquisition qui n'était pas sans susciter une certaine inquiétude chez les comptables publics locaux.

Les comptables des collectivités locales

et des établissements publics locaux

Si les collectivités ont en leurs présidents ou maires des ordonnateurs propres, leurs comptables sont, de droit, des comptables du Trésor.

Les comptables des régions et des départements étaient, jusqu'à la loi du 2 mars 1982, les trésoriers-payeurs généraux. Depuis lors, ce sont des comptables du Trésor affectés à titre principal à ce service, dénommés payeurs régionaux ou payeurs départementaux.

Les communes ont eu longtemps l'option d'avoir des comptables propres ou de laisser assurer leur services par les comptables subordonnés du Trésor. Depuis la loi du 14 septembre 1941, les comptables subordonnés du Trésor sont de droit comptables des communes, soit à titre principal, soit plus fréquemment à titre accessoire.

Les comptables des établissements publics locaux sont soit des fonctionnaires de l'Etat qui assurent ce service à titre principal ou accessoire, soit des comptables propres à ces établissements désignés, sur la proposition des conseils délibérants et après avis des trésoriers-payeurs généraux, par les préfets.

Source: Jacques Magnet, "Les comptables publics" aux éditions LGDJ.

a) Une lourde tâche pour les chambres régionales des comptes

La "montée en charge" de cette compétence a rapidement été à l'origine d'une très lourde tâche pour les chambres régionales des comptes, sa mise en oeuvre ayant elle-même été à l'origine de contestations.

Ainsi, de moins de 9.500 jugements portant sur 5.800 comptes, rendus en 1985, les chambres régionales des comptes sont passées à 28.354 jugements "principaux" et 5.353 jugements "de suite" portant sur plus de 50.000 comptes en 1989.

Les jugements rendus sur les comptes des comptables locaux
de 1985 à 1989

1985

1986

1987

1988

1989

9.332

14.795

22.319

29.186

33.707

(Source : Cour des comptes )

Les chambres régionales des comptes se sont donc trouvées très rapidement confrontées à une forte progression du niveau de leur activité juridictionnelle, qui a été multipliée par plus de trois en quatre ans.

Ainsi, dès la fin de l'année 1986, plus de 150.000 comptes se trouvaient en instance de jugement, sachant que l'objectif de périodicité retenu par les juridictions financières en matière de jugement des comptes était de quatre ans.

Il apparaissait donc clairement que, si les chambres voulaient éviter d'être prises dans une situation de retards cumulatifs, il fallait qu'elles satisfassent un objectif moyen annuel d'au moins 25.000 jugements portant sur quatre exercices cumulés.

Les chambres régionales des comptes ont donc vu une grande part de leur capacité d'action être "absorbée" par l'exercice de leurs fonctions juridictionnelles.

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