24. PROFESSEUR MICHEL GOOSSENS, DIRECTEUR DE L'UNITÉ U 468 " GÉNÉTIQUE MOLÉCULAIRE ET PHYSIOPATHOLOGIE " À L'HÔPITAL HENRI-MONDOR DE CRÉTEIL

Le professeur GOOSSENS précise qu'il est professeur de génétique, spécialiste du diagnostic moléculaire des maladies héréditaires, ancien membre de la CNMBRDP, et qu'il participe, au plan européen, à la mise en place de guides de bonnes pratiques en matière génétique.

Les dispositions de la loi relatives au diagnostic prénatal sont encore marquées par une vision historique de la génétique, très liée à la pédiatrie, qui ne prend pas suffisamment en compte les bouleversements apportés par la génétique moléculaire et les techniques modernes d'investigation foetale (notamment d'imagerie) depuis le début des années 80. Même si un consensus se crée progressivement, des divergences d'écoles sur la façon de concevoir cette discipline restent sensibles entre les tenants d'une génétique pédiatrique et ceux qui souhaitent développer une vision plus large, prenant en compte l'expertise des différentes spécialités.

Le débat s'est retrouvé au stade de l'élaboration des décrets d'application, les obstétriciens et les échographistes insistant, face aux généticiens pédiatriques, sur la nécessité -qui n'a pas été admise- de resituer le DPN dans le contexte de la médecine foetale et de prendre en considération son caractère pluridisciplinaire. Si la consultation préalable de conseil génétique est assurément utile, elle devrait être associée à celle du spécialiste de la pathologie en cause. De plus en plus de maladies ont une origine génétique. Il faut donc que généticiens et spécialistes travaillent ensemble dans des consultations jointes.

S'agissant des centres de DPN pluridisciplinaires, le professeur GOOSSENS s'interroge sur la portée du terme " établissements ". Pourra-t-il s'agir à Paris de l'AP-HP, d'un CHU ou d'un simple hôpital ? En tout état de cause, le travail en réseaux transhospitaliers doit s'imposer en Ile-de-France.

Se pose en outre le problème de la composition et des moyens de la CNMBRDP, sachant que ses avis feront autorité auprès du ministère de la Santé : l'évaluation des établissements candidats à l'agrément impose une visite des sites et une expertise menée par des spécialistes, toutes choses qui sont impossibles actuellement. De même, pour ce qui concerne le DPI, le praticien responsable doit justifier d'une expérience particulière dans le prélèvement embryonnaire appréciée par la CNMBRDP. Encore faudrait-il que cette appréciation soit faite par des experts ayant eux-mêmes l'expérience d'une pratique dans ce domaine, or ils sont très peu nombreux aujourd'hui car cette expérience (recherche à des fins médicales sur l'embryon humain) ne peut, pour respecter la loi, être obtenue qu'à l'étranger. Enfin, il convient de veiller à organiser les délibérations de la commission de sorte que ses membres n'apparaissent pas comme juges et parties.

L'organisation du DPN reste marquée par les orientations données à l'origine par l'Association française pour le dépistage et la prévention des handicaps de l'enfant (AFDPHE). Il est anormal que des actions de santé publique aient pu être, et soient encore en partie (pour certains dépistages), conduites par une association privée.

Le troisième alinéa de l'article L. 162-17 relatif aux conditions auxquelles est subordonnée la mise en oeuvre du DPI (identification préalable et précise, chez l'un des parents, des anomalies susceptibles de provoquer chez l'enfant une grave maladie génétique) ne semble pas laisser ouvert, comme cela serait souhaitable, le choix entre le diagnostic direct (cas où l'on analyse précisément l'anomalie génotypique) et le diagnostic indirect à l'aide de marqueurs génétiques du gène anormal (cas où l'on ne peut analyser l'anomalie génotypique d'une affection héréditaire identifiée).

En ce qui concerne enfin la terminologie employée en matière de médecine prédictive, il serait préférable de réserver les vocables " identification " et " empreintes " au domaine judiciaire et de n'utiliser, en matière médicale, que celui de " caractéristiques génétiques ".

Le professeur GOOSSENS insiste, pour conclure, sur l'importance du contrôle de qualité qui doit être exercé sur les actes techniques de laboratoire ou d'imagerie grâce, notamment, à la tenue de registres de conservation des données. En cours d'évaluation au plan européen, l'assurance qualité en génétique moléculaire et chromosomique (qui nécessite quelques moyens financiers) n'est pas véritablement mise en oeuvre en France. Ce problème renvoie à celui, déjà évoqué, des moyens et de l'expertise de la CNMBRDP.

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