B. LE CHEMINEMENT VERS L'AVÉNEMENT D'UNE ENTREPRISE UNIQUE

Le processus devant aboutir à la création de l'EADC a fait l'objet de trois scénarios différents : la « fusion en l'état », la démarche par étapes et le scénario « Airbus plus ».

La « fusion en l'état » d'Aérospatiale, BAe, CASA et Dasa serait effectuée en une seule opération, chaque partie prenante apportant la totalité de ses activités actuelles dans le cadre convenu d'EADC, en excluant éventuellement les activités vendues au préalable. En ce qui concerne les activités hors « coeur de métier » apportées à EADC, elles auraient, dans le scénario de fusion en l'état, un statut transitoire, les partenaires qui n'y seraient pas impliqués dans l'immédiat devant être protégés contre les effets financiers défavorables pour eux qui pourraient en découler Des aménagements seraient définis dans des accords liant juridiquement les parties : ces accords auraient une durée limitée et définie et couvriraient, entre autres, les droits de vote et les droits économiques durant la période transitoire.

Airbus SCE serait la filiale d'avions civils d'EADC, l'éventuelle extension à d'autres parties prenantes se produisant ultérieurement, en un certain nombre d'étapes distinctes.

La démarche par étapes verrait la constitution d'une société holding au départ. Aérospatiale, BAe, CASA et Dasa continueraient d'exister et d'agir temporairement comme actionnaires d'EADC. Les filiales des secteurs d'activités seraient mises en place successivement ou en parallèle, en impliquant éventuellement différents partenaires puis, une fois prêts, apportés à EADC.

« Airbus plus » suivrait la démarche par étapes, mais la société Airbus serait la société holding et intégrerait successivement ou en parallèle des lignes d'activités supplémentaires, probablement sous forme de filiales.

Face à ces scénarios, les attitudes des industriels ont révélé des divergences résumées dans le tableau qui suit .




 

Aérospatiale

BAe

CASA

Dasa

« Fusion en l'état »

- Accord sur le principe

- Sous réserve de la faisabilité et de la preuve de création de valeur.

- Doit inclure la totalité des actifs/activités britanniques, français, allemands et espagnols liés aux avions de combat.

- Accord sur le principe en tant que seul schéma possible pour BAe

- sous réserve de la protection suffisante des actionnaires de BAe

- Accord sur le principe en tant que schéma préféré


- Sous réserve de solutions aux problèmes liés à la structure de l'actionnariat et aux droits des actionnaires

- Accord sur le principe en tant que schéma préféré


- Sous réserve du maintien d'un niveau d'influence propor-tionnel aux apports.

- Sous réserve de la preuve de création de valeur

Démarche par étapes

- Possible

- Nécessité d'un accord sur l'objectif de structure, le domaine d'application, les tiers à impliquer, le modèle d'actionnariat.

- Les avions militaires doivent être inclus en une seule étape

- Non acceptable

- N'est pas une alternative industrielle crédible ni une proposition acceptable pour les actionnaires de BAe.

- Considéré comme défavorable

- Considéré comme défavorable

Airbus plus

- Possible

- Non acceptable

- Considéré comme défavorable

- Non acceptable

Le consensus s'est ainsi porté sur le scénario de la « fusion en l'état », Aérospatiale étant la seule entreprise à envisager avec faveur les deux autres modalités d'intégration. Les entretiens que votre rapporteur a conduits pour préparer cette étude montrent que les positions des partenaires ont considérablement évolué par rapport à ce consensus.

Un schéma d'évolution à partir d'une société Airbus paraît désormais accepté par tous, ce qui semble ouvrir la gamme des possibilités.

Les divergences, au fond mineures, reposaient, semble-t-il, sur une évaluation contrastée des différents scénarios.

S'agissant de la « fusion en l'état », les avantages identifiés par les industriels sont liés à :

- la relative simplicité et la rapidité de la transaction de fusion en une seule étape, évitant les problèmes des transactions sectorielles, c'est-à-dire les dispositions relatives au contrôle, la résolution des conflits entre blocs d'actionnaires, l'identification des périmètres des activités et des droits de propriété intellectuelle (les dispositions de non concurrence, etc... ;

- l'accès total et immédiat aux bénéfices de la consolidation : synergies industrielles, techniques et de commercialisation, assise et maîtrise financière fortes, possibilités de rationalisation ;

- l'occasion d'opérer une rationalisation sur l'ensemble des gammes d'activités, et donc de permettre d'atteindre les équilibres nationaux à travers plusieurs secteurs ;

- l'absence d'atteinte portée aux synergies existant à l'intérieur des sociétés ;

- la construction d'un pôle d'attraction fort pour les tierces parties.

S'agissant de la démarche par étapes , il était jugé qu'elle pouvait tirer parti de ce que la consolidation par secteur est plus facile. En outre, elle permettrait d'atteindre une masse financière critique en cas d'inclusion d'Airbus et des avions militaires, et pourrait faciliter l'entrée de tiers.

Cependant, la longueur du processus, sans garantie que l'objectif final serait atteint, la possibilité de conflits d'intérêts entre les actionnaires, qui pourraient aussi compromettre la réalisation de la structure cible, une complexité accrue du fait des différents tiers impliqués dans les différents secteurs, et du fait du besoin d'un consensus entre les partenaires vis-à-vis des tiers, la perspective d'évolutions des participations des partenaires en cas d'ajout de nouveaux secteurs, l'affaiblissement possible des positions financières de chaque partenaire et l'accès moins rapide aux bénéfices de la future entité, du fait en particulier de la limitation des occasions de rationalisation, ont, semble-t-il, compromis l'attrait de cette démarche aux yeux de la majorité des industriels.

La solution « Airbus plus » a pu être considérée comme présentant les mêmes inconvénients, à quoi il faut ajouter que les règles de gestion de l'entreprise en cours de définition pour la SCE Airbus pourraient ne pas être adaptées à EADC, la SCE perdant en outre sa focalisation sur le marché des avions civils.

Un consensus ambigu s'étant dessiné en faveur d'une fusion des actifs des industriels en une étape unique, ceux-ci ont alors précisé les problèmes à résoudre par les pouvoirs publics afin de placer la future EADC dans une situation de compétitivité favorable.

*

* *

Le cheminement vers des projets communs de meilleure structuration de l'industrie aéronautique européenne a connu un élan qu'il faut saluer avec l'implication des plus hautes autorités politiques européennes.

La formalisation de projets concrets par les industriels a constitué un progrès prometteur.

Il reste à évaluer les prolongements de ces processus porteurs de beaucoup d'espoirs.

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