12. Traité sur la Charte européenne de l'énergie - Intervention de M. François LESEIN, sénateur (RDSE) (Vendredi 27 juin)

Le rapport rappelle que, en décembre 1991, 51 Etats ont adopté la Charte européenne de l'énergie qui vise à faciliter la coopération dans le domaine de l'énergie entre des Etats autrefois séparés par le rideau de fer. Cette Charte a donné naissance à un instrument juridique contraignant en droit international, le Traité sur la Charte de l'énergie ouvert à signature en décembre 1994.

Ce texte vise à améliorer la sécurité énergétique en Europe, à stimuler le commerce et le transport d'énergie à échelle du continent et à promouvoir la reprise et la croissance économiques dans les pays d'Europe centrale et orientale et dans la CEI. Il a été signé, depuis lors, par 49 Etats ainsi que par l'Union européenne.

Le Traité sur la charte de l'énergie constitue un progrès majeur dans la réglementation d'activités du secteur énergétique comme l'investissement (surtout ceux déjà réalisés), le commerce et le transfert des bénéfices, ainsi que dans l'élaboration d'un mécanisme consacré au respect des obligations et au règlement des différences (il octroie explicitement des droits aux entreprises au dépend des Etats et les obligations entre ces derniers sont également contraignantes).

Le Traité reconnaît explicitement les droits souverains des Etats sur les ressources énergétiques, tout en proposant un système d'investissement ouvert dans le secteur de l'énergie.

Il donne un cadre juridique à la coopération paneuropéenne Est-Ouest dans un secteur qui revêt une importance capitale pour l'économie et la politique mondiales. Il doit néanmoins être ratifié par 30 Etats pour entrer en vigueur et, actuellement, seulement 18 ont mené à terme le processus de ratification. Des négociations ont par ailleurs été entamées et progressent dans des domaines complexes qui ne sont pas suffisamment réglementés par la Traité tels que l'environnement ou les équipements liés à l'énergie.

Les politiques énergétiques peuvent jouer un rôle prépondérant dans la maintien de la paix et de la stabilité en Europe et c'est pourquoi il est urgent que ce Traité soit appliqué. Le rapport de M. Tomas Olrich invite donc les Etats membres du Conseil de l'Europe à renforcer leur collaboration dans le secteur énergétique, aussi bien dans le cadre du Traité qu'en dehors de celui-ci. Il appelle les Etats à ratifier le Traité et à mettre pleinement en oeuvre ses dispositions afin de parvenir à une plus grande cohérence des politiques énergétiques.

M. François LESEIN, sénateur (RDSE), intervient en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers Collègues, je veux, bien sûr, féliciter notre collègue, M. Olrich, pour le travail approfondi dont rendent bien compte le rapport et son annexe.

Si les effets sur la santé humaine de l'accident de Tchernobyl sont, dix ans après, mesurables - sinon hélas ! toujours curables - qui peut en évaluer les effets sur l'environnement dans toute la région ? Mais il est un effet de l'accident de Tchernobyl plus difficile encore à cerner : l'irruption violente, dans le débat politique, de l'impératif international de la protection de l'environnement.

La charte signée en 1991 par cinquante et un Etats tend à organiser la coopération dans le domaine de l'énergie, c'est-à-dire dans un domaine capital pour la vie économique mais, nous le savons également désormais, extrêmement sensible pour la protection de l'environnement, non seulement dans l'immédiat, mais aussi pour les générations à venir.

J'y vois un texte exemplaire qui concilie des mesures de libéralisation du marché, de sécurité des investissements et des approvisionnements, et la protection de l'environnement. D'ordinaire, ces impératifs font l'objet de textes distincts quand ils ne sont pas présentés comme antagonistes.

Je me félicite donc que notre Assemblée vienne appuyer cette charte dont la procédure de ratification est précisément en cours devant le Parlement français. Je partage également le souci de notre rapporteur de voir ratifier simultanément le protocole annexé à la charte. Il précise des dispositions visant à l'efficacité énergétique et impose le respect des aspects environnementaux.

Pour que ce traité produise tous les effets bénéfiques qu'en attendent aussi bien les consommateurs que les investisseurs ou encore les Etats producteurs d'énergie, il manque sans doute encore un texte complémentaire assurant la protection des investissements, notamment pendant la phase dite de préinvestissement particulièrement importante dans le développement des projets d'exploitation d'énergie.

Je me réjouis également de la constitution d'un espace de solidarité à l'échelle de tout le continent européen et même d'une large partie de l'Asie, qui devrait, à terme, ne constituer qu'un seul grand marché de l'énergie régi non seulement par les règles de transparence, d'ouverture et de concurrence qui doivent assurer la stabilité des approvisionnements et l'offre au meilleur prix, mais également par les mêmes règles de respect de l'environnement.

Je voudrais cependant évoquer les questions connexes auxquelles la charte, dans son état actuel, n'apporte pas encore les réponses nécessaires.

Tout d'abord, le fait que ni les Etats-Unis ni le Canada n'adhèrent au traité me semble préoccupant. En effet, il s'agit d'un texte de libéralisation économique et l'on ne peut que s'étonner de voir certains champions de la libre concurrence et de la globalisation invoquer la protection de leurs intérêts nationaux pour refuser leur signature.

Là encore, risque de se poser le problème de la réciprocité des avantages dans les relations entre un espace où la libre concurrence va devenir effective et un espace, quoi qu'on en dise, toujours protégé.

Enfin, le relatif échec de la récente Conférence des Nations Unies qui devait faire le point sur les engagements de " l'Agenda 21 " adopté à la Conférence mondiale de Rio montre bien que le problème d'une gestion rationnelle de l'énergie et particulièrement des énergies fossiles, donc non renouvelables, reste entier. D'autant plus que la mesure précise des pollutions créées par telle ou telle sorte d'énergie reste à inventer.

Il y a là un défi que notre Assemblée s'attachera certainement à relever pour développer une culture de l'efficacité énergétique permettant un développement durable, culture qui se diffusera à travers tous les parlements du continent européen représentés ici à Strasbourg.

Lorsque l'on sait que le continent européen représente près du quart de la consommation mondiale d'énergie, un consensus sur une vision à long terme de la gestion des approvisionnements énergétiques et des effets sur l'environnement peut être un élément d'entraînement pour les zones où l'on refuse encore cette prise de conscience.

Je souhaite donc que notre Assemblée continue d'étudier ces questions déterminantes pour notre avenir commun et qu'elle soit le creuset du nécessaire consensus paneuropéen ".

La résolution 1131, contenue dans le rapport 7838, amendée, est adoptée à l'unanimité.

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