II. QUELS ARBITRAGES POUR L'ÉQUILIBRE À LONG TERME DES RÉGIMES DE RETRAITE ?

Les projections des régimes de retraite à l'horizon 2040 permettent de mettre en évidence que le financement à long terme des régimes de retraite repose sur un arbitrage entre niveau de vie des retraités, niveau de vie des actifs et âge de la retraite.

Les compromis possibles sont évoqués ci-après, le plus souvent sous forme de questions, à partir des constats et des pistes de réflexion proposées par le rapport CHARPIN.

A. LE NIVEAU DE VIE DES RETRAITÉS

• Il faut tout d'abord souligner que le rapport CHARPIN insiste très largement et très clairement sur le constat de succès du système français de retraite par répartition .

Il rappelle ainsi, à partir des évaluations réalisées par l'INSEE, que le niveau de vie des retraités (mesuré par le revenu disponible par unité de consommation 76( * ) ) est équivalent à celui des actifs.

Cette situation résulte de la forte progression du pouvoir d'achat des retraités entre 1970 et aujourd'hui, sous l'effet de la hausse des salaires, de l'augmentation des qualifications et de l' allongement de la vie active des femmes .

Comme le souligne une étude de l'INSEE 77( * ) , malgré une réglementation désormais moins favorable, l'augmentation du niveau de vie des ménages de retraités se poursuivra au cours des prochaines années, essentiellement du fait de l'augmentation de la participation des femmes au marché du travail et de l'amélioration de leurs carrières salariales.

• Ces considérations sur le niveau de vie des retraités appellent trois précisions :

- La parité entre revenu des retraités et revenu des actifs est atteinte grâce aux revenus du patrimoine des retraités qui représentent 25 % de leurs revenus contre 10 % pour celui des actifs. Hors revenus du patrimoine, le revenu disponible des retraités par unité de consommation est inférieur de 17 % à celui des actifs.

- La parité entre revenu des retraités et revenu des actifs résulte de la forte progression en moyenne du niveau de vie des retraités depuis 1970. La prise en compte d'une évolution moyenne ne permet pas toutefois de percevoir clairement l'évolution des situations individuelles . En effet, globalement, le pouvoir d'achat de la retraite moyenne augmente car les nouveaux retraités ont des pensions plus importantes que les sortants mais, individuellement, chaque retraité peut considérer que le montant de sa pension n'évolue pas aussi favorablement, en particulier du fait des règles d'indexation des pensions sur les prix.

- Le rapport de la Commission de concertation montre que " les jeunes retraités ont un niveau de vie supérieur à celui des jeunes actifs " et que " les plus de 60 ans sont à l'origine de transferts privés importants vers les ménages jeunes ". On peut se demander toutefois si une situation dans laquelle les retraités inactifs aident les actifs est satisfaisante, tant sur un plan économique que social.

• Le maintien des règles actuelles d'indexation des pensions (indexation sur les prix des salaires portés au compte et des pensions du régime général liée à la réforme de 1993 ; valeur d'achat du point indexée sur les salaires et valeur de liquidation du point indexée sur les prix pour les régimes complémentaires , dans le prolongement des accords de 1996) est l'hypothèse centrale des projections des régimes de retraite présentées par le rapport CHARPIN. Cette hypothèse se traduit par une divergence marquée entre l'évolution du pouvoir d'achat des retraites (+ 1,1 % par an pour les retraites du régime général et + 0,3 % par an pour celles des régimes complémentaires) et celle des salaires nets (+ 1,45 % par an 78( * ) ).

Faut-il s'inquiéter de l'écart, mis en évidence par ces projections, entre l'évolution du niveau de vie des retraités et celui des actifs (le taux de remplacement brut de l'ouvrier type baisserait en effet de 25 % et celui du cadre type de 39 %) ou, au contraire, se satisfaire de la progression du niveau de vie des retraités ainsi projetée (+ 60 % entre 1998 et 2040 pour le régime général et + 12 % pour les retraites complémentaires servies par l'ARRCO) ?

C'est une question que devront trancher les débats à venir. Le rapport CHARPIN, en évaluant l'impact financier des mesures d'indexation plus favorables (cf. Chapitre VII) ou en posant le problème de la validation des périodes de chômage non indemnisées et, ainsi, de la " mémoire longue " des régimes de retraite qui pénalisent ceux qui ont connu des carrières chaotiques, y apporte une contribution utile.

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