Gérard DELFAU Sénateur de l'Hérault

Je remercie Gérard Larcher pour avoir organisé ce colloque passionnant. Je constate une large convergence entre l'analyse qu'il a développée dans son discours introductif et celle que je fais moi-même de la situation actuelle du marché postal. Les solutions que nous préconisons sont par contre légèrement différentes. Une chose me paraît cependant certaine : il est temps d'engager une discussion sur une grande loi qui s'inscrirait dans le prolongement de celle de 1990.

Pour revenir au sujet que vient de traiter François-Xavier Bordeaux, je pense que l'on ne peut plus s'interroger sur La Poste sans tenir compte de son rôle de médiateur principal d'accès aux services financiers de base. Sans cet accès, il n'y a pas de réelle citoyenneté. Hier, à la poste de Vichy, j'ai encore vu un client retirer 60 francs sur son livret de caisse d'épargne. Lorsque j'ai interrogé le guichetier, il m'a expliqué que certaines personnes venaient parfois retirer 2 francs pour acheter une baguette.

Dans Le Monde, j'ai lu l'article passionnant de Daniel Lebègue, Directeur Général de la Caisse des Dépôts et Consignations qui indiquait qu'au moins 6 millions de français n'avaient plus accès aux services financiers de base. Daniel Lebègue plaidait pour la création d'un nouveau système bancaire capable de rebancariser ces personnes. Je pense comme François-Xavier Bordeaux qu'il est déjà trop tard pour le faire et qu'il faut reconnaître que ce rôle est déjà assuré essentiellement par La Poste. Cela ne signifie pas qu'elle doive se concentrer sur ce secteur : elle doit s'intéresser aux nouvelles technologies et à l'internationalisation. Mais je crois que ce service bancaire minimum doit être intégré dans les missions de service public.

Imaginons par exemple que La Poste n'assure plus le versement du RMI, comment pourrait-on alors toucher 2 millions de français ? Pour la remplacer, il faudrait des fonctionnaires se déplaçant en voiture blindée avec des vigiles et utilisant un local municipal mis à disposition. La première fois, cela se passerait sans doute sans problème. Au bout de deux ou trois fois, la voiture serait attaquée. A la sixième, il y aurait une tentative de hold-up... Il faut donc se montrer lucide et admettre que La Poste est un acteur privilégié pour assurer certaines missions de service public dont nul autre organisme ne pourrait se charger de façon aussi efficace.

Cette dimension sociale de La Poste me paraît encore plus importante dans les quartiers dits sensibles et pour les populations marginalisées des villes et des campagnes. Je pense que l'intervention de François-Xavier Bordeaux a soulevé une question fondamentale qui devrait faire l'objet d'une réflexion approfondie. Je ne doute pas de la capacité de toutes les formations politiques à dépasser leurs oppositions pour assurer ce qui me semble être un devoir social national.

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