LA LÉGISLATION AMÉRICAINE ET LES ÉVOLUTIONS PRÉVISIBLES EN MATIÈRE DE CLONAGE ET DE RECHERCHE SUR LES CELLULES EMBRYONNAIRES

MME LORI ANDREWS - PROFESSEUR DE DROIT À L'UNIVERSITÉ DE CHICAGO

Que deviennent les principes de la Révolution Française d'égalité, de fraternité et de liberté, au regard des évolutions des thérapies géniques et cellulaires ? Aujourd'hui, il arrive de plus en plus souvent que des citoyens américains se voient refuser un travail ou une assurance en raison de prévisions génétiques négatives les concernant. La fraternité est mise en cause par les perspectives d'améliorations génétiques et le clonage humain. A l'avenir, seuls les riches auront la possibilité d'améliorer la constitution génétique de leurs enfants. Finalement, deux espèces humaines apparaîtront. Cette vision est rejetée par bon nombre d'européens. En Europe, la protection est plus grande contre la discrimination génétique. En outre, la loi française de 1994 interdit de modifier les caractéristiques génétiques pour modifier la descendance d'une personne. Une personne qui se livre à des pratiques eugéniques visant l'organisation de la sélection des personnes est sanctionnée par la loi.

Aux Etats-Unis, ce type de réglementation est rejeté. Les couples ont la possibilité de commander du « sperme intelligent » dans une banque de spermes dont les donateurs sont des prix Nobel. Ils peuvent participer à des enchères sur Internet pour acquérir des ovules de mannequins et utiliser certaines méthodes pour choisir d'avoir un garçon ou une fille. Les groupes anti-avortement s'opposent à toute technologie génétique et à la reproduction des embryons dans un but de recherche. Ils ont empêché l'utilisation de fonds fédéraux de recherche pour la technologie de la reproduction. En outre, ils ont fait adopter une loi qui interdit la création d'embryons à des fins de recherche. Paradoxalement, le règlement de protection des êtres humains dans la recherche ne s'applique aux Etats-Unis que si la recherche bénéficie de fonds fédéraux. En revanche, les chercheurs financés par le secteur privé peuvent travailler sur la technologie de la reproduction. Ainsi, Geron est spécialisé dans la recherche sur le vieillissement.

En France, l'interdiction de recherche sur les embryons s'applique que la recherche soit financée par des fonds privés ou par des fonds publics. La loi de 1994 prévoit qu'un embryon humain ne peut pas être conçu ou utilisé à des fins commerciales ou industrielles, et que toute expérimentation sur les embryons doit être interdite.

Comme nous l'ont expliqué les précédents intervenants, il existe trois manières d'obtenir des cellules embryonnaires. Les deux premières ont été longuement évoquées. La troisième a été révélée par un groupe de chercheurs de l'Université du Massachusetts. Un scientifique a prélevé une cellule de sa joue qu'il a intégrée dans une cellule de boeuf. Il a prétendu avoir réussi ainsi à obtenir des cellules ES. Monsieur GEARHART et Monsieur WILMUT ont parlé avec un certain mépris de cette expérience. Or ils sont liés au Groupe Geron, alors que les chercheurs de l'Université du Massachusetts appartiennent à un groupe concurrent. J'ai été récemment à une conférence organisée par ce second groupe. Ses représentants étaient assez optimistes quant à l'issue de l'expérience menée sur le boeuf.

Les discours que nous avons entendus aujourd'hui étaient optimistes. Mais aux Etats-Unis, il existe un grand nombre de chercheurs sceptiques. En 1979, on avait annoncé que ces techniques allaient permettre de soigner le cancer. Ce n'est malheureusement pas arrivé. Sur 3 000 Américains qui ont subi des essais de thérapie génique, aucun n'a fait état d'une amélioration de sa santé. Les Instituts nationaux qui surveillent ces protocoles se sont aperçus que la recherche sur les nouvelles thérapies empêchait que des axes plus classiques de recherche soient poursuivis. Une personne est morte aux Etats-Unis alors qu'elle suivait un traitement de thérapie génique. Des singes sont également décédés suite à des expériences. Cela n'a pas empêché la recherche de continuer.

Je crois que le but d'une réunion comme celle-ci est de contrebalancer l'optimisme des scientifiques par un réalisme nécessaire. Il a été dit que les cellules cultivées devraient être testées afin que l'on s'assure qu'elles ne transmettent pas des maladies. Mais il n'est pas possible, aux Etats-Unis, de pratiquer un nombre illimité de tests sur chaque cellule, en raison des problèmes de financement du système de santé. Les donneurs de spermes ne sont pas suffisamment soumis à des tests. Des bébés sont nés avec des maladies infectieuses parce qu'il avait été estimé que tester les donneurs coûtait trop cher.

Ces questions s'ajoutent aux questions éthiques et morales soulevées par les nouvelles thérapies cellulaires. Les tribunaux américains ont estimé que les fonds publics ne devaient pas être utilisés pour pratiquer des prélèvements embryonnaires qui impliqueraient une destruction de l'embryon. En revanche, il est possible d'utiliser des cellules embryonnaires provenant du secteur privé, ce qui suscite une violente opposition de la part des groupes anti-avortement. Aujourd'hui, les nouvelles voies de recherche suggèrent des méthodes alternatives pour guérir les tissus humains. La question de l'utilisation des embryons se pose donc avec moins d'acuité. Au mois d'avril 1999, des recherches ont été menées en France sur l'utilisation de cellules provenant de la moelle épinière et du cordon ombilical. Il est apparu que certaines cellules de la moelle épinière pouvaient être utilisées pour former des tissus osseux ou cartilagineux.

Au cours de l'année passée, la Commission de bioéthique a beaucoup réfléchi aux questions soulevées par la recherche sur les cellules embryonnaires. Elle a fait des recommandations pour que les cellules ES de tissus foetaux morts soient utilisées. L'utilisation du tissu foetal cadavérique est permise par la loi. Mais les donneurs n'ont pas la possibilité de choisir le receveur.

Il existe des réglementations au niveau de chacun des cinquante Etats des Etats-Unis. Les lois varient beaucoup d'un Etat à l'autre. Dans douze Etats, les foetus peuvent être utilisés à condition qu'ils ne proviennent pas d'un avortement volontaire. Cependant, des difficultés pratiques se posent pour obtenir du tissu foetal provenant d'avortements spontanés. En général, la recherche sur les cellules embryonnaires n'utilise pas le tissu foetal provenant d'avortements spontanés. Elle utilise le tissu d'embryons IVF. Dans neuf Etats, les embryons in vitro sont totalement interdits. La sanction peut aller, dans certains Etats, jusqu'à la prison. Dans d'autres Etats, les restrictions concernent les foetus qui proviennent d'avortements. Si le Professeur GEARHART travaillait dans l'un de ces Etats, ses recherches seraient passibles de poursuites.

Les pratiques commerciales sont très fortement régulées. Dans treize Etats, le paiement des embryons éprouvettes est puni. Dans vingt-et-un Etats, l'achat de tissu foetal est interdit, même s'il est utilisé pour des transplantations. Dans d'autres Etats, la législation a été modifiée de sorte que la vente des embryons soit interdite mais la vente d'une lignée de cellules permise. Dans certains Etats, la recherche va beaucoup plus loin. Les couples qui suivent des traitements de fertilisation sont informés de la possibilité de faire don des embryons non utilisés à la recherche. Ces couples sont précisément informés de l'utilisation qui sera faite de l'embryon donné et ont la possibilité de refuser telle ou telle utilisation. Certaines personnes n'accepteraient pas que l'on utilise des cellules humaines pour les traiter. Il est nécessaire d'étudier toutes les alternatives possibles.

Si les embryons acquièrent une grande valeur pour la recherche, les médecins seront tentés d'augmenter les doses dans les traitements pour la fertilité. Certaines cliniques voudront à tout prix obtenir des résultats élevés dans la fécondation in vitro. Après l'annonce de l'isolation des cellules ES dans les embryons, le responsable d'une clinique m'a appelé pour m'informer qu'il disposait d'un grand nombre d'embryons non utilisés, donnés par des couples qui avaient utilisé la fécondation in vitro... Les abus sont nombreux aux Etats-Unis. Il est possible de déposer un brevet pour une lignée cellulaire. Les cellules sont transformées en des produits commerciaux.

Il n'existe pas d'interdiction fédérale du clonage. Certains Etats ont condamné les expériences sur les embryons sans interdire le clonage. Les deux procédures ne sont pas forcément liées. Le Président CLINTON a interdit l'usage de fonds fédéraux pour le clonage humain. Cette interdiction n'a pas eu beaucoup d'effets sur les cliniques de fécondation privées. Pendant vingt ans, le gouvernement fédéral a refusé de financer les fécondations in vitro, mais cela n'a pas empêché 300 cliniques de créer des dizaines de milliers de bébés. Le Président ne pourra pas empêcher les scientifiques qui désirent le faire de poursuivre la recherche sur le clonage avec des fonds privés. Certains groupes religieux ont proposé des fonds à des scientifiques pour qu'ils développent la recherche sur l'infertilité. Une recherche a eu lieu notamment sur le clonage à destination des couples homosexuels qui souhaitent avoir un enfant issu de l'un d'entre eux. Un couple de milliardaires texans a donné 2,3 millions de dollars à des scientifiques pour qu'ils clonent son chien. Non seulement le clonage humain est permis dans un grand nombre d'Etats américains, mais il existe très peu d'obstacles au clonage de personnes contre leur volonté. Que se passerait-il si un barbier prélevait sur un poil de barbe d'un de ses clients très riches une cellule pour créer un clone ? Actuellement, la loi ne permet pas aux personnes d'avoir le contrôle de l'utilisation du tissu de leur corps une fois que le tissu a été prélevé. Dans l'Université de Californie, un patient s'est aperçu que l'on avait utilisé ses tissus contre son gré. Mais il n'avait aucun moyen de se défendre. Si Bill GATES voulait se cloner, il choisirait peut-être de le faire en une version plus grande, plus robuste. Il ne serait pas reconnu comme le parent légal du clone dans certains Etats, dans lesquels les parents légaux seraient les vrais parents de Bill GATES. Le clone serait alors le frère de Bill GATES. Dans d'autres Etats, le clone serait considéré comme l'enfant de la mère porteuse. Dans de nombreux Etats, on n'a pas encore déterminé les règles à appliquer en matière de clonage.

Le clonage humain doit-il être permis ? Certaines cliniques de fécondation appliquent actuellement un moratoire volontaire sur le clonage humain. Elles savent que les taux de succès sont faibles. Si un musicien célèbre était cloné, la pression sur l'enfant serait terrible. Si une personne atteinte du cancer se faisait cloner, son clone ne réussirait sans doute pas à se faire assurer aux Etats-Unis. Le clonage entraîne toutes sortes de complications. Nous sommes dans un pays de marché libre. Mais nous ne pouvons pas accepter que les enfants deviennent des produits de consommation. Certains parents feraient n'importe quoi pour donner de nouveaux gènes à leurs enfants. Une enquête a montré que 42 % des parents souhaiteraient, s'ils le pouvaient, utiliser les thérapies géniques sur leurs enfants pour les rendre plus intelligents. Ainsi, 43 % des parents souhaiteraient utiliser ces thérapies pour améliorer le physique de leur enfant.

En France, la structure d'un gène ne peut pas être brevetée comme elle peut l'être aux Etats-Unis. Le régime de la propriété intellectuelle interdit de breveter un produit de la nature et une formule. Or les gènes appartiennent à ces deux catégories. Le brevetage de gènes a beaucoup fait évoluer la biologie. Le travail d'un scientifique aujourd'hui est plein d'ambiguïtés. Il est difficile pour un scientifique de rester neutre. Tous les scientifiques sont contactés par des sociétés de biogénétique. Sur 34 des 789 rapports biomédicaux publiés par l'Université de Massachusetts, au moins un des auteurs attendait une rétribution de la découverte dont il faisait état dans son rapport. De nombreuses questions se posent aujourd'hui au sujet des technologies reproductives. Elles nous concernent tous.

Questions de la salle

Claude HURIET

Compte tenu de la diversité des lois des Etats fédéraux, est-il envisageable qu'une loi fédérale soit instituée ?

Lori ANDREWS

Je ne le pense pas. La seule réglementation qui existera au niveau fédéral concernera l'utilisation des fonds fédéraux. En matière de médecine, la réglementation applicable incombe à chaque Etat.

Jean-Paul RENARD

A l'avenir, les instituts de la santé américains vont probablement financer la recherche publique. Une homogénéisation des lois dans les différents Etats ne sera-t-elle pas nécessaire dans le domaine de la recherche médicale ? En tant que juriste américain, quel est votre point de vue sur la situation législative en Europe ?

Lori ANDREWS

L'homogénéisation des lois dans les différents Etats n'est pas intervenue dans le passé. Même si des instituts américains financent la recherche publique, les approches resteront différentes à l'avenir selon les Etats.

Il me semble que le cadre juridique français est excellent en ce qui concerne les questions de bioéthique. Si vous décidez d'amender la loi de 1994 et d'autoriser certaines recherches embryonnaires, il vous faudra réfléchir au type de consentement que vous vous voudrez obtenir de la part des participants à la recherche. Vous devrez également déterminer si l'utilisation des cellules embryonnaires peut avoir d'autres fins que la médecine régénérative.

Claude HURIET

Dans certains Etats, la commercialisation de certains produits est interdite. En France, si les restrictions actuelles de la loi étaient maintenues, la question se poserait de savoir si les malades français pourraient bénéficier des traitements issus d'expérimentations réalisées dans d'autres pays. En l'état actuel de la législation, cette interdiction de commercialisation est-elle effective ? Quels effets pourrait-elle avoir, s'il est possible d'obtenir dans un Etat ce que l'on ne peut pas obtenir dans un autre, dont la législation est plus restrictive ?

Lori ANDREWS

Dans certains Etats américains, il est interdit d'être mère porteuse, mais dans d'autres non. Il existe donc un trafic commercial important entre les Etats. Au Royaume-Uni, le paiement des donneuses d'ovules n'est pas autorisé, alors qu'il l'est aux Etats-Unis.

Jean-François MATTEI

Vous avez indiqué que le vivant faisait désormais partie du marché. Au moment où nous allons devoir nous entendre au sein de l'Organisation Mondiale du Commerce, les produits commercialisés à partir du vivant ont-ils leur place dans les négociations ? Nous vivons une période de mondialisation. Il est relativement facile, par télépaiement, d'acquérir sur Internet, un enfant, des ovules ou des spermatozoïdes. Sur le site de la secte raëlienne, il est possible de s'inscrire sur une liste d'attente pour le clonage, moyennant une somme qui n'est pas mince. Légiférer à l'intérieur de frontières est donc probablement vain. La seule solution ne serait-elle pas une solution à l'échelle planétaire ? Les valeurs qui sont en cause dépassent de loin les seules valeurs marchandes. Ce qui relève des valeurs humaines ne peut pas être régulé par des seuls traités économiques. Nous avons commencé à nous mettre d'accord pour renoncer à acheter des produits dont nous savons qu'ils ont été fabriqués par des enfants. Ne pourrait-on pas, au niveau international, tenter de s'engager dans une démarche pour créer un label éthique, préservant la dignité du vivant ? Cette proposition me paraît susceptible de faire avancer le débat.

Je trouve étonnant qu'un pays laïc comme la France se pose ce type de questions, alors qu'un pays dans lequel le Président prête serment sur la bible adopte d'autres références... C'est que notre sujet sort du domaine strictement religieux pour entrer dans celui de la dignité humaine. Aux Etats-Unis, les situations sont différentes d'un Etat à l'autre. Les pays européens connaissent également des divergences de politiques entre eux. Mais l'argument selon lequel les recherches sur l'embryon humain doivent être autorisées pour qu'un pays ne soit pas en retard par rapport aux autres ne me paraît pas recevable. Je reviens d'un long voyage en Chine. Nous avons des difficultés à nous mettre d'accord entre Européens et Américains. Mais lorsqu'on aborde les questions éthiques avec les Chinois, on est véritablement stupéfait. Les Chinois viennent d'adhérer à l'OMC. Pourrons-nous un jour trouver des règles communes pour l'ensemble de la planète ? Cela semble difficile aujourd'hui.

Alain CLAEYS

Dans notre premier rapport, nous avons proposé d'instituer le droit d'ingérence. Je crois qu'il est nécessaire. Mais nous ne devons pas, en tant qu'Européens, nous placer dans la position des donneurs de leçons. Le principe de subsidiarité est appliqué en Europe. Nous ne recherchons pas actuellement une position commune. Les droits nationaux sont automatiquement mis en avant. Avant de réfléchir à une harmonisation mondiale, peut-être devons-nous commencer par modifier notre démarche au niveau européen.

Lori ANDREWS

L'idée d'un label éthique me convient tout à fait. Je crois qu'elle pourrait découler de la Déclaration de l'Unesco sur le génome humain, ou de la Convention des droits de l'homme et de la biomédecine du Conseil de l'Europe. Tony Blair et le Président CLINTON ont indiqué que les organismes vivants ne pouvaient pas être brevetés. Les brevets ne peuvent être déposés qu'à un certain moment du développement, lors d'un test de diagnostic. Un brevet sur un gène ferait obstacle à des développements ultérieurs entre des laboratoires concurrents. Actuellement, les services de pathologie dans les hôpitaux et les différents organismes de santé publique disposent de différents échantillons de tissus, qui sont vendus à des sociétés de biotechnologie sans autorisation des personnes. Ce n'est pas normal. Il faudrait demander le consentement de l'individu dont les tissus sont utilisés à des fins de recherche. Aujourd'hui, on envisage de créer une banque de tissus nationale. Les scientifiques pourraient accéder à ces tissus sous réserve de l'autorisation des donneurs. Les femmes ont servi de modèles pour les fécondations in vitro, et non les primates. La dignité humaine doit être respectée. L'utilisation de cellules embryonnaires devrait être présentée comme un dernier recours, alors que d'autres voies sont étudiées pour l'expérimentation.

Professeur DUPRAT

J'aimerais connaître la réaction du Professeur GEARHART et du Professeur WILMUT sur ces constats et ces perspectives.

John GEARHART

Mes sentiments sont mélangés. Nous savons bien qu'il y a eu des abus dans le domaine de la fertilisation in vitro. J'y vois davantage le reflet d'une absence de réglementation fédérale qu'un complot mené par les acteurs d'un marché dérégulé. Les juristes ont parfois tendance à peindre un tableau très sombre à partir d'avancées scientifiques intéressantes. Les scientifiques américains ont mis au point des formulaires de consentement éclairé. Les juristes d'universités et d'hôpitaux sont à l'origine de la rédaction de ces premiers formulaires.

Qu'est-ce que la science ? Selon moi, elle ne ressemble en rien à ce qu'elle paraît dans les articles du New York Times. Notre préoccupation au sujet des recherches réalisées à l'Université du Massachusetts est liée à notre manque d'information sur ces recherches. Pourquoi les chercheurs n'ont-ils pas publié le résultat de leurs recherches dans des publications scientifiques reconnues ? J'ai passé un accord de recherche avec Geron. Mais le Groupe n'a jamais fait pression sur moi pour que j'oriente mes recherches en fonction de ses intérêts.

S'agissant du coût des tests que nous effectuons sur les lignées de cellules que nous cultivons, il ne constitue pas un vrai problème. Les tests ne durent qu'une trentaine de minutes. Pour les lignées cellulaires utilisées dans le cadre de greffes, la FDA exige que les receveurs soient informés de la provenance des tissus qu'ils reçoivent. Nous suivons les directives de la FDA. Nous respectons cette loi fédérale.

Après une fausse couche, 80 % des foetus conçus sont perdus au cours des premières semaines. Ils ne peuvent donc pas constituer une matière première pour la recherche. Dans toutes les lignées cellulaires que nous avons cultivées, l'empreinte était satisfaisante. Nous nous sommes donné beaucoup de mal pour aboutir à ce résultat. Nos recherches sur les neurones de l'animal ont pour objectif d'établir qu'il est possible de parvenir à une bonne conductibilité des neurones pour différentes maladies. Mais ces recherches prendront du temps. Je crois que nous avons suffisamment prouvé la validité du concept. Je ne fais pas du sensationnalisme. Je suis très conservateur sur le plan scientifique. Ce qui a été fait par les centaines de chercheurs qui travaillent sur les cellules souches d'embryons de souris a prouvé que la technologie développée permettrait sans doute de combattre efficacement les maladies humaines et les troubles dégénératifs. Le Comité national de bioéthique réfléchit aux questions éthiques posées par la recherche sur les embryons. Je crois que nous devons investir dans la recherche sur les cellules embryonnaires. Je ne suis pas venu ici aujourd'hui pour réclamer de l'argent, ou pour en tirer un profit personnel. Je suis venu informer le public de l'évolution de la recherche sur les thérapies cellulaires.

Ian WILMUT

Madame ANDREWS est experte en droit. Son exposé m'a rendu particulièrement heureux d'être européen...

Simon BEST

L'un des trois Etats des Etats-Unis qui interdisent formellement le clonage humain est la Californie, dans lequel est situé le Groupe Geron. En pratique, l'exposition massive à des procès limite les abus.

Lori ANDREWS

Le Professeur GEARHART a indiqué que les journalistes commettaient souvent des erreurs dans leurs articles sur les avancées scientifiques. Les articles sont souvent assez peu réalistes parce que les chercheurs espèrent obtenir des financements. Je pense que les scientifiques et les médias doivent travailler ensemble pour élaborer le contenu des articles de journaux. L'Université Johns Hopkins met en oeuvre le principe du consentement éclairé, mais ce n'est pas le cas dans la plupart des institutions américaines. Les réglementations de la FDA ne fournissent aucune protection aux donneurs dans le cadre de recherches sur les cellules souches embryonnaires.

Professeur DUPRAT

Un avis récent rendu par le Groupe européen d'éthique indique que l'Union européenne n'a pas de compétences dans le domaine de la protection du vivant. Mais elle ne peut pas se désintéresser de la question. Le Groupe européen d'éthique va donc en débattre. Il me paraît intéressant qu'une institution dans la mouvance de la Commission européenne formule des normes qui ne pourront pas être ignorées dans la mise en oeuvre des programmes européens de recherche financés par des fonds communautaires. Dans le domaine du génie génétique, j'ai toujours été frappé de la superposition des normes aux Etats-Unis entre les Etats. Les normes fédérales s'ajoutent aux normes des Etats fédérés, qui s'ajoutent aux normes locales du comté ou de la municipalité. Dans le domaine des thérapies cellulaires, pensez-vous que des normes pourront être édictées au niveau local ?

Lori ANDREWS

Les normes locales actuelles sont des normes datant des années 70. Elles portent sur la protection de l'environnement. Il n'existe pas de normes locales pour les thérapies géniques et cellulaires. De manière générale, les autorités locales et nationales s'inclinent devant les réglementations fédérales.

Alain CLAEYS

Monsieur Gordon DUNSTAN est professeur émérite de théologie morale et sociale au King's College de Londres. Le Révérend DUNSTAN a été notamment membre du Nuffield Council on Bioethics de 1991 à 1995. Il a publié plusieurs ouvrages sur le statut de l'embryon. Dans son exposé, il apporte un éclairage éthique sur les positions qui se développent actuellement à ce sujet dans le monde anglo-saxon.

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