Art. additionnels après l'art. 19
Dossier législatif : projet de loi relatif à la politique de santé publique
Art. additionnel avant l'art. 20 ou après l'art. 20

Article additionnel avant l'article 20

M. président. L'amendement n° 312, présenté par Mme Beaudeau, M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Avant l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Après l'article L. 122-2-1 du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - La sous-traitance en cascade et l'emploi de personnel à contrat à durée déterminée par les entreprises sous-traitantes sont interdits dans les établissements comprenant au moins une installation figurant sur la liste prévue au IV de l'article L. 515-8 du code de l'environnement.

« Le chef d'établissement de l'entreprise utilisatrice veille au respect par les entreprises extérieures des mesures prévues au titre III du code du travail. En cas d'accident, la faute inexcusable de l'employeur est réputée établie à l'encontre du chef d'établissement qui n'aurait pas fait respecter ces mesures. »

La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Source majeure d'accidents dans les entreprises à risque, la sous-traitance en cascade doit plus que jamais faire l'objet d'une interdiction stricte.

Le présent amendement vise donc à interdire cette sous-traitance et à en tirer les conséquences en établissant la faute inexcusable de l'employeur lorsqu'un chef d'établissement n'a pas respecté cette interdiction.

La catastrophe d'AZF a confirmé un constat pourtant déjà ancien et récurrent, celui de la montée des risques et des facteurs de risque, dont font notamment partie, d'une part, l'automatisation des tâches au détriment des hommes et de leur savoir-faire et, d'autre part, la gestion purement comptable des risques. Cette gestion se traduit par un accroissement des externalisations, de la sous-traitance, du recours au travail intérimaire, de l'exigence sans cesse renforcée d'une polyvalence des salariés sans accompagnement de formation. Même si la formation est prévue, nous le savons, à l'article L. 213-3-2 du code du travail - et c'est essentiel -, même si elle est un pan de la prévention des risques, elle ne constitue pas, en tant que telle et à elle seule, une véritable assurance contre les accidents.

Souvent, l'expérience, le savoir-faire des salariés sauvent la situation et évitent l'accident. Toutefois, lorsque ces salariés sont occupés à des tâches trop nombreuses et trop diversifiées ou lorsqu'un nombre important d'intervenants sur le site sont des sous-traitants, cet évitement des risques est souvent remis en cause.

Seule une solution générale de prévention des risques peut assurer la sécurité des personnels.

Cette solution se déclinerait en trois points : d'abord, identifier et éliminer ou réduire au minimum les dangers, mais aussi les facteurs de risque ; ensuite, maîtriser les risques qui subsistent, c'est-à-dire leur concrétisation ; enfin, se préparer à faire face à la concrétisation des risques pour en limiter les conséquences et les circonscrire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Giraud, rapporteur. Il s'agit sans doute d'éviter de faire courir des risques à des salariés recrutés en CDD, que l'on suppose, de ce fait, mal informés, et qui sont affectés à des postes dangereux dans des installations classées au titre de la protection de l'environnement.

L'interdiction pure et simple du recours à la sous-traitance et du recrutement de personnels en CDD par les entreprises sous-traitantes semble tout à fait excessive, car le code du travail prévoit déjà des dispositions en la matière.

Il convient, en effet, de rappeler que le code du travail, dans son article L. 122-3, interdit déjà de recruter un salarié sous contrat à durée déterminée pour effectuer des travaux particulièrement dangereux. Lorsque l'activité exige simplement des précautions pour éviter des risques particuliers pour la santé, ledit salarié doit bénéficier d'une formation de sécurité renforcée.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Le Parlement s'est déjà prononcé sur ce thème dans le cadre de l'examen de la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques. Des modalités particulières de contrôle et de responsabilisation de l'entreprise utilisatrice ont été introduites.

Parallèlement, un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, élargi aux salariés des sous-traitants, a été institué.

Cet amendement ne me paraît donc pas nécessaire et le Gouvernement y est défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour explication de vote.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le rapporteur, notre proposition, loin d'être irréaliste, correspond à un choix sociétal tout à fait rentable.

C'est un choix rentable pour l'entreprise elle-même, qui prend sa source dans une approche nouvelle de l'organisation du travail et de la conception de la production.

Le recours à la sous-traitance en cascade conduit à la prise de risques et donc, à terme, à l'accident majeur.

Qui fait quoi ? Avec quelle formation, quels équipements de sécurité, quelles procédures de vérification des postes de travail, des installations et des pratiques ? La sous-traitance en cascade laisse toutes ces questions en suspens, aboutissant à des activités cloisonnées et mal suivies et, par conséquent, dangereuses.

Il est donc nécessaire d'installer au sein des entreprises une chaîne de sécurité claire, permettant la détermination des responsabilités de chacun, en gardant à l'esprit que le donneur d'ordre doit avoir en permanence - j'insiste sur ce point - la responsabilité de la maîtrise globale du risque industriel sur le site dont il a la charge.

Selon un rapport du Conseil économique et social de mars 2003 sur le thème Prévention et gestion des risques technologiques et industriels, « ces exigences n'apparaissent pas compatibles avec l'utilisation [...] d'une main-d'oeuvre précaire dans le cadre d'une sous-traitance en cascade ».

Madame la secrétaire d'Etat, vous m'avez rappelé les dispositions législatives qui ont été introduites à la suite de l'accident de Toulouse, mais elles sont largement insuffisantes : le travail précaire existe toujours et, si j'en crois la mission décidée par M. le ministre du travail, on se dirige de plus en plus vers les contrats à durée déterminée, vers l'intérim, c'est-à-dire vers une augmentation considérable du nombre des postes que l'on ne pourra plus contrôler.

Il y a là, selon moi, une question de société : vous faites le choix d'une société, nous faisons le choix d'une autre !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 312.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnels avant l'art. 20
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Art. additionnels avant l'art. 20

Article additionnel avant l'article 20

ou après l'article 20

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 170, présenté par Mme Blandin, M. Chabroux, Mme Campion, MM. Cazeau et Godefroy, Mme Printz, M. Vantomme et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Après l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« La première phrase du dernier alinéa (2°) de l'article L. 122-3 du code du travail est complétée par les mots : "ainsi que pour tous les travaux exposant à des agents cancérigènes, y compris pour les contrats à durée de chantier". »

L'amendement n° 314, présenté par Mme Beaudeau, M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Avant l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« La première phrase du dernier alinéa (2°) de l'article L.122-3 du code du travail est complétée par les mots : "ainsi que pour tous les travaux exposant à des agents cancérogènes, y compris pour les contrats à durée de chantier". »

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 170.

Mme Marie-Christine Blandin. Il y a quelques années, un accident de maintenance au contact de matériaux irradiés fut l'occasion de révéler le sort très différent d'un salarié en contrat de longue durée et de deux salariés précaires. L'un était suivi dans son entreprise, équipé d'un dosimètre, immédiatement alerté, pris en charge et décontaminé, tandis que les deux intérimaires affectés pour une simple opération de nettoyage sur ce chantier à risque n'étaient ni protégés ni avertis, que ce soit avant ou après l'incident. C'est le hasard d'une information lue, mise en rapport avec des traces de brûlures suspectes, qui leur permit, et tardivement, de se manifester ; chacun des employeurs, d'ailleurs, voulut s'exonérer de toute responsabilité.

Ce triste fait divers est éloquent.

Plus que d'autres, les travailleurs précaires, particulièrement les salariés en contrat à durée déterminée, sont exposés aux risques professionnels. Le travail de nuit, les horaires atypiques, l'excès de bruit, les risques chimiques et biologiques sont particulièrement fréquents sur leurs postes de travail. Dans le cadre d'une politique de prévention, il serait donc de bon sens de prendre particulièrement en compte cette situation.

Cela est d'autant plus vrai que l'on nous annonce la prochaine présentation au Parlement d'un nouveau type de contrats, dits « contrats de mission », qui seraient simplement la généralisation des contrats à durée déterminée, sur le modèle de ce qui se fait aujourd'hui pour les contrats de chantier. La fin programmée du contrat à durée indéterminée doit conduire le législateur à savoir anticiper.

Tel est l'objet de notre amendement, qui tend à compléter la liste des interdictions frappant les contrats à durée déterminée. Nous demandons que tous les travaux exposant à des risques cancérogènes soient prohibés.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour présenter l'amendement n° 314.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement vise, d'une part, à ajouter une restriction aux conditions actuelles d'utilisation des contrats de travail à durée déterminée et, d'autre part, à préciser que cette restriction s'applique aux contrats à durée de chantier.

Le présent amendement améliore la rédaction de la fin du 2° de l'article L. 122-3 du code du travail en précisant que les travailleurs sous contrat à durée déterminée ne peuvent être exposés à des produits cancérogènes. Ce n'est actuellement pas toujours le cas, l'arrêté visé par le code du travail étant très incomplet et laissant subsister de nombreux produits cancérogènes.

L'amendement étend, par ailleurs, cette disposition aux salariés sous contrat à durée de chantier.

Pour illustrer mon propos sur la nécessité d'interdire tout poste de travail exposant des salariés sous CDD à des agents cancérogènes, je rappellerai l'exemple des soustraitants du nucléaire. Une étude avait clairement démontré, il y a quelques années, que ces salariés étaient non seulement exposés à de dangereux rayonnements pour la maintenance des centrales nucléaires, mais qu'ils étaient même sciemment utilisés par EDF à ces postes et dans des conditions de travail imposant des doses de radiations très largement supérieures aux maxima fixés par les normes en vigueur.

Nous proposons donc, par cet amendement, mes chers collègues, de garantir qu'aucun salarié précaire ne puisse être exposé à ces produits, qu'il soit embauché sous CDD ou sous contrat à durée de chantier.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Giraud, rapporteur. La liste des travaux particulièrement dangereux, fixée par arrêté du ministre du travail ou, le cas échéant, du ministre de l'agriculture, tient d'ores et déjà compte des risques liés à l'exposition à des agents cancérigènes.

L'arrêté du 8 octobre 1990, dont la dernière mise à jour remonte à 1998, exclut ainsi des activités pouvant donner lieu à contrat à durée déterminée l'ensemble de celles qui comportent une exposition à l'amiante, aux métaux lourds et aux rayonnements ionisants. L'exclusion d'autres agents cancérigènes relève à l'évidence de la voie réglementaire.

L'avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Les contrats à durée déterminée sont d'ores et déjà interdits pour les travaux les plus dangereux.

La liste de ces travaux figure dans l'arrêté du 8 octobre 1990 et comporte la plupart des agents cancérigènes. Elle a été modifiée à plusieurs reprises, notamment pour qu'y soient introduits les travaux exposant le plus à l'amiante et aux rayonnements ionisants.

Le décret du 31 mars 2003 relatif à la protection des salariés contre les rayonnements ionisants prévoit des mesures renforcées pour tous les salariés, mais plus particulièrement pour ceux qui sont en CDD et ceux qui sont en intérim.

Quant aux contrats dits à durée de chantier, qui sont des contrats à durée indéterminée adaptés à la nature de l'emploi, ils n'ont pas vocation à entrer dans ce cadre.

Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 170.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 314.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles additionnels avant l'article 20

Art. additionnel avant l'art. 20 ou après l'art. 20
Dossier législatif : projet de loi relatif à la politique de santé publique
Art. 20

M. le président. L'amendement n° 315, présenté par Mme Beaudeau, M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Avant l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Après les mots : "maladie professionnelle", la fin du dernier alinéa de l'article L. 231-8 du code du travail est ainsi rédigée : "affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité". »

La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Le code du travail prévoit actuellement que la faute inexcusable de l'employeur n'est présumée établie pour les salariés en CDD et les salariés intérimaires victimes d'un accident que lorsque ceux-ci, exposés à des risques particuliers pour leur santé ou pour leur sécurité, n'ont pas bénéficié de la formation à la sécurité renforcée prévue à l'article L. 231-3-1 du code du travail.

Or maintenir la nécessité d'une absence de formation à la sécurité pour reconnaître la faute inexcusable de l'employeur en cas d'accident d'un salarié en CDD ou intérimaire tend le plus souvent à ouvrir la voie à une déresponsabilisation des employeurs.

De plus, le maintien en l'état de cette législation est contraire à la jurisprudence de la Cour de cassation, qui, le 28 février 2002, a rendu vingt-neuf arrêts de principe dans lesquels la notion de faute inexcusable est appréciée de façon nouvelle.

A l'occasion de l'examen des dossiers de faute inexcusable de l'employeur concernant des victimes de l'amiante, la Cour de cassation a en effet jugé que pèse sur tout employeur une obligation de sécurité à l'égard de ses salariés et que cette obligation est assortie d'une obligation, non pas de moyen, mais de résultat.

Dès lors, au vu de cette jurisprudence, et qui plus est au vu de la situation de précarité des salariés employés en CDD et en intérim, il paraît nécessaire de modifier le code du travail en ne liant plus la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur au fait, pour lesdits salariés, d'avoir été privés de toute formation renforcée à la sécurité.

C'est d'autant plus important que, de plus en plus fréquemment, et en dépit des articles du code du travail qui interdisent expressément le recours au CDD et à l'intérim pour effectuer les travaux particulièrement dangereux, les exceptions à cette interdiction se développent du fait d'une possibilité de dérogation par le directeur départemental du travail et de l'emploi.

Ainsi, l'arrêté du 8 octobre 1990 interdit que ces salariés soient employés pour « des travaux exposant à l'inhalation de métaux durs ». Or, parmi les métaux durs, figure notamment le chrome, qui est un composant particulièrement nocif et classé comme cancérogène catégorie I du ciment, ce qui signifie que des cas de cancers dus à un contact avec ce produit ont déjà été répertoriés chez l'homme. Il faudrait donc déduire de cet arrêté que les métiers au contact du ciment - les métiers du bâtiment et des travaux publics, de maçons, de carreleurs, de plâtriers, etc. - devraient être formellement interdits aux intérimaires.

Or, vous le savez, de nombreux salariés en CDD et en intérim, souvent sans aucune formation à la sécurité renforcée et en absence de tout équipement de sécurité, sont chargés d'effectuer de tels travaux en contact avec le ciment.

Dès lors, il convient de prévoir qu'en cas de maladie ou d'accident du travail la faute inexcusable de l'employeur sera directement présumée et établie à son encontre.

Cette mesure, vous l'avez compris, se veut dissuasive et ne devrait pas être appliquée si chaque employeur participait véritablement et pleinement à la formation à la sécurité et à la protection des salariés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Giraud, rapporteur. Le code du travail prévoit actuellement que la faute inexcusable de l'employeur ne peut plus être présumée dès lors qu'il a fait suivre aux salariés une formation de sécurité renforcée.

Une amélioration de l'indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles est sans doute nécessaire. Le recours systématique à la faute inexcusable de l'employeur pour obtenir une réparation intégrale ne saurait cependant, de manière durable, en être l'instrument.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. L'alinéa qu'il est proposé de modifier par cet amendement a très précisément pour objet d'assurer une protection renforcée pour les salariés sous CDD ou pour les intérimaires affectés à certains postes à risque.

Votre amendement, madame Beaudeau, vise, au contraire, à exclure les salariés sous CDD ou les intérimaires de ces postes.

Il est illusoire de croire réduire le risque par cette exclusion.

La politique du Gouvernement vise, elle, à renforcer les mesures de prévention sur la base de l'évaluation du risque. C'est pourquoi l'article L. 231-8 du code du travail, aux termes duquel l'entreprise est forcée de former les salariés soumis à des risques particuliers, nous paraît correct sans avoir besoin d'être modifié.

L'avis du Gouvernement est donc défavorable.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. Mme Beaudeau, forte de sa parfaite connaissance de tous ces problèmes, formule des propositions visant à prévenir les utilisations abusives des contrats précaires.

Pour ma part, je serais curieux de connaître celles que formule M. le rapporteur pour faire avancer les choses !

Ce que nous voulons, c'est prévenir l'utilisation abusive des contrats précaires permettant de contourner la législation protectrice en matière d'hygiène et de santé. Cela se justifie d'autant plus que le Gouvernement s'apprête à franchir une étape supplémentaire dans le démantèlement du code du travail et la déréglementation. Nous pensons au rapport - nous n'avons pas encore pu le lire, mais toute la presse en fait ses choux gras - remis ce jour à M. François Fillon par M. de Virville, proposant la généralisation d'un nouveau type de contrat à durée déterminée sur le modèle des contrats de chantier : les contrats de mission.

Nous aurons l'occasion de revenir sur ce débat car, de toute évidence, la réalité des situations que vivent les employés des entreprises à risque n'est pas prise en compte de façon concrète.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 315.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 316, présenté par Mme Beaudeau, M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Avant l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Dans les premier, deuxième, quatrième, cinquième et sixième alinéas de l'article L. 236-1 du code du travail, les mots : "cinquante salariés" sont remplacés par les mots : "vingt salariés". »

La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement vise à abaisser de cinquante à vingt salariés le seuil au-delà duquel la création dans une entreprise d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou CHSCT, est obligatoire.

Actuellement, seules 73 % des entreprises soumises à cette obligation ont mis en oeuvre cette mesure légale. Par ailleurs, 6,8 millions de salariés travaillent dans des entreprises de moins de cinquante salariés.

Dans l'agroalimentaire, seules 7 % des entreprises comptant de vingt à quarante-neuf salariés disposent d'un CHSCT. Ce taux est de 2 % dans le commerce, de 13 % dans le secteur du bâtiment et des travaux publics et de 7 % dans les transports. Or ce sont des secteurs d'activité particulièrement exposés aux accidents du travail et maladies professionnelles.

Il est nécessaire, au vu de la forte dégradation des conditions de travail, de lier la constitution d'un CHSCT non à l'importance de l'effectif employé, mais à l'accroissement des risques encourus dans l'entreprise. Les établissements utilisant par exemple des éthers de glycol ne sont pas que de grandes entreprises comme IBM, ce sont également souvent des petites et moyennes entreprises, par exemple des ateliers de sérigraphie, aux effectifs réduits.

Le code du travail dispose que le CHSCT a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et à la sécurité des salariés de l'établissement et de ceux qui sont mis à disposition par une entreprise extérieure, y compris les travailleurs temporaires.

Je souhaite attirer votre attention, mes chers collègues, sur le rôle des CHSCT en matière de protection de la santé mentale des travailleurs.

Entre 1997 et 2002, les arrêts de maladie ont considérablement augmenté et les dépenses d'indemnités journalières ont progressé de 46 %. Il faut savoir que les accidents de travail et les maladies professionnelles sont pour beaucoup dans l'augmentation des arrêts de maladie.

Le Gouvernement s'est empressé de voir, dans cette augmentation, des arrêts de complaisance de travailleurs enclins à la paresse. Quelle conclusion hâtive !

Si les congés de maladie ont tant augmenté, c'est avant tout parce que les Français ont vieilli. Plus âgés, il sont plus fragiles, atteints de maladies graves impliquant de longs arrêts.

La loi portant réforme des retraites ne fera qu'aggraver cette situation. En effet, à partir d'un certain âge, le travail ne se fait plus dans les mêmes conditions que lorsqu'on est plus jeune. Il faudra regarder ce que sera la vie de ces salariés déjà âgés, qui devront rester plus longtemps en activité.

Les spécialistes du vieillissement au travail n'ont pas été étonnés par cette hausse. Elle correspond, en effet, à la diminution drastique du nombre des préretraites sur la même période. Faute de volonté de reclassement par les employeurs, les salariés atteints de maladies chroniques sont le plus souvent contraints de rester en congé de longue durée.

Mais les nouvelles conditions de travail, l'aggravation des contraintes et des charges de travail conduisent au développement de pathologies, même chez les plus jeunes.

Les deux premiers motifs médicaux qui entraînent des arrêts supérieurs à deux semaines sont les états anxiodépressifs et les pathologies dorso-lombaires.

Il faut y voir une corrélation très nette avec l'intensification du travail, que de nombreuses enquêtes officielles, nationales et européennes, ont souligné depuis une quinzaine d'années.

Le CHSCT est à cet égard un relais d'alerte, qui permet de déceler les risques et les atteintes à la santé physique et mentale des salariés et d'en faire part aux médecins et inspecteurs du travail, notamment.

Nous vous invitons donc, mes chers collègues, à élargir l'obligation de création de ce comité à toutes les entreprises de vingt salariés au moins.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Giraud, rapporteur. La fixation à cinquante salariés du seuil à partir duquel la constitution d'un CHSCT est obligatoire est liée à la composition de celui-ci.

Il est notamment composé de membres du comité d'entreprise, dont l'existence - je vous le rappelle - est obligatoire à compter de cinquante salariés.

La modification de ce seuil n'est donc pas détachable de l'ensemble de la question des effets de seuil engendrés par la réglementation du travail, que le Gouvernement s'est engagé à rationaliser lors du vote de la loi portant habilitation à simplifier le droit.

D'ailleurs, le code du travail permet déjà une protection satisfaisante des salariés. Ainsi, l'inspecteur du travail peut imposer la création d'un comité dans les établissements employant moins de cinquante salariés en cas de nécessité liée, notamment, à la nature des travaux.

Enfin, en l'absence de CHSCT, les missions de celui-ci sont reprises par les délégués du personnel.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. L'amendement proposé vise à modifier le seuil de création des CHSCT dans les entreprises. Ce thème excède, me semble-t-il, la portée du débat actuel relatif à la santé publique et relève très précisément du ministère en charge du travail.

Ce seuil de cinquante salariés est par aillleurs ainsi fixé pour être cohérent avec celui du comité d'entreprise.

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour explication de vote.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Madame la secrétaire d'Etat, je trouve votre réponse un peu curieuse !

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Elle est claire !

Mme Marie-Claude Beaudeau. Pour notre part, nous estimons que la santé au travail fait partie de la santé publique et, s'agissant de la santé au travail, personne ne nie plus l'importance du rôle des CHSCT. Quand on sait que 73 % des entreprises seulement sont dotées de ces comités, on est obligé de considérer que les mesures nécessaires à la diminution des accidents du travail et des maladies professionnelles, dont tout le monde reconnaît qu'ils sont en forte augmentation, ne sont pas prises et qu'il faut agir pour inverser cette tendance.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 316.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 317, présenté par Mme Beaudeau, M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Avant l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Le premier alinéa de l'article L. 236-5 du code du travail est ainsi rédigé :

« Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail comprend le chef d'établissement ou son représentant et une délégation du personnel dont les membres sont élus, d'une part, par les ouvriers et employés, d'autre part, par les ingénieurs, chefs de services, techniciens, agents de maîtrise et assimilés sur des listes établies par les organisations syndicales représentatives pour chaque catégorie de personnel. Les membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail bénéficient des dispositions des articles L. 436-1, L. 436-2 et L. 436-3. »

La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.

Mme Marie-Claude Beaudeau. A l'occasion de l'examen en seconde lecture du projet de loi relatif aux risques naturels et technologiques, nous avions déposé un même amendement proposant une élection directe des membres des CHSCT et de leurs suppléants. Vous l'avez rejeté, chers collègues de la majorité, mais nous vous proposons d'examiner de nouveau cette proposition, qui correspond à une revendication récurrente des organisations syndicales et qui permettrait une amélioration de la situation de la santé des salariés en entreprise.

Le code du travail prévoit que les membres de la délégation du personnel au CHSCT sont désignés par un collège constitué par les membres élus du comité d'entreprise ou d'établissement et les délégués du personnel.

Par ailleurs, la législation actuellement en vigueur ne prévoit pas l'élection de suppléants aux membres titulaires de la délégation du personnel au CHSCT.

Cet amendement vise à faire en sorte que, dans toutes les entreprises qui comptent au moins vingt salariés, les membres de la délégation du personnel au CHSCT soient directement élus par les salariés ou, à défaut, que l'élection reflète fidèlement les résultats de la consultation la plus récente.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Giraud, rapporteur. Cet amendement tire en réalité la conséquence de la modification du seuil de création obligatoire des CHSCT proposée à l'amendement n° 316, amendement auquel la commission a donné un avis défavorable.

Par coordination, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. L'amendement proposé vise à modifier les conditions de désignation des représentants du personnel. Ce thème relève du ministère chargé du travail.

Par ailleurs, la disposition visée est une disposition à laquelle les partenaires sociaux sont attachés et qui permet notamment de maintenir une compétence élevée des membres du CHSCT.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Nous ne nous satisfaisons pas de la réponse qui consiste à dire : « cette disposition relève du ministre du travail ». En effet, ce projet de loi aborde très largement le code du travail et le modifie article par article, fragment de texte par fragment de texte, et ce sur l'initiative du Gouvernement. Alors il faut savoir : soit on aborde le code du travail, soit on ne l'aborde pas du tout !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 317.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Motion d'ordre

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, je voudrais faire savoir à nos collègues que, conformément aux voeux de la conférence des présidents, qui a fixé au lundi 18 janvier la suite de la discussion de ce projet de loi, l'examen de l'article 18 quater interviendra finalement dans le courant de l'après-midi de ce même jour, ce qui permettra à tous ceux qui le souhaitent de participer au débat.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Cette proposition me semble tout à fait sage. Nous débattrons, par conséquent, de l'article 18 quater lundi après-midi, en son temps, mais en tout cas avant la nuit ! (Sourires.)

M. le président. Il en est donc ainsi décidé.

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Article 20

Après le deuxième alinéa de l'article L. 1413-4 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour améliorer la connaissance et la prévention des risques sanitaires en milieu de travail, les entreprises publiques ou privées fournissent également à l'institut toutes informations nécessaires à l'exercice de ses missions. L'institut contribue à la mise en place, dans ces entreprises, de surveillances épidémiologiques. »

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, sur l'article.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet article vise à imposer aux entreprises la transmission à l'Institut national de veille sanitaire des informations nécessaires à l'exercice de ses missions. Il prévoit également la contribution de l'institut à la mise en place d'une surveillance épidémiologique au sein de ces entreprises.

Il s'agit, nous l'avons déjà dit, d'une initiative intéressante, dont se félicitent les professionnels de la santé au travail.

Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, nous avions rappelé que l'absence de données épidémiologiques suffisantes et d'accès à certaines informations en matière de produits chimiques ou dangereux, dans les entreprises conduisait les unités de veille sanitaire à ne réaliser que des études partielles.

Dans son rapport de mars 2003, Estimation du nombre de cas de certains cancers attribuables à des facteurs professionnels, le docteur Ellen Imbernon, responsable de l'unité santé-travail de l'INVS, écrivait : « Malgré l'importance des maladies professionnelles, on ne dispose dans la littérature internationale et encore moins en France que de très rares informations visant à évaluer quantitativement la proportion et le nombre de maladies attribuables à des facteurs professionnels. Ceci est d'autant plus dommageable que ce type de données peut contribuer de façon importante à l'élaboration des priorités de prévention, en indiquant l'origine et la contribution des principaux facteurs de risque associés à de nombreux problèmes de santé publique. »

Le rapport 2003 de l'IGAS faisait, je l'ai dit lors de mon intervention sur l'article 10 A, le même constat.

Sur le principe, nous sommes satisfaits. Cependant, une fois encore, la question du financement se pose sans que vous y apportiez la moindre réponse, monsieur le ministre.

Comment l'INVS pourrait-il utiliser avec profit ces données transmises par les entreprises et assurer la mise en place d'un dispositif de surveillance épidémiologique dans toutes les entreprises sans que ces moyens, en personnel notamment, soient renforcés ?

Je rappelle que le département santé-travail de l'institut comprend en tout quatorze personnes, quand celui des maladies chroniques en compte trente, et celui des maladies infectieuses une centaine !

Nous sommes, bien sûr, tout à fait favorables à l'octroi à ces deux derniers services d'importants moyens financiers et humains, mais nous nous interrogeons : pourquoi la santé au travail ne bénéficierait-elle pas également d'effectifs dignes des enjeux majeurs qu'elle représente ? Je n'ai guère entendu de votre part, monsieur le ministre, d'engagements en la matière. Quand cette unité et, plus largement, l'institut bénéficieront-ils d'une dotation leur permettant de mettre en oeuvre leurs missions actuelles et les missions nouvelles que leur confie ce projet de loi ?

Ce que vous m'avez indiqué lorsque nous avons examiné l'article 10 A ne m'a pas totalement satisfaite. Nous ne savons toujours pas à quel moment l'INVS sera doté des moyens suffisants.

Par ailleurs, l'article 20 ne vise pas les CHSCT, pourtant concernés au premier chef par la question de la surveillance épidémiologique.

L'institut ne peut, c'est évident, mettre un chercheur dans chaque établissement, mais il pourrait profiter de la connaissance du terrain et de l'expérience des membres des CHSCT pour orienter avec efficacité les actions de surveillance épidémiologique et de prévention des risques professionnels.

Enfin, je souhaite revenir sur la question du secret industriel.

Si le décret du 28 juillet 2003 organise les conditions de transmission d'informations relevant du secret industriel, en revanche, les salariés n'ont aucune possibilité d'être tenus informés de la composition de certains produits ou mélanges toxiques qu'ils manipulent pourtant chaque jour. Les membres des CHSCT sont ainsi privés d'une information primordiale et ne peuvent mettre en oeuvre des propositions et des actions de prévention des risques. Dans ces conditions, comment faire reconnaître l'origine professionnelle d'une maladie due à un produit pur ou mélangé dont la composition ne peut être révélée ?

Nous proposerons, par un amendement à l'article 20, d'organiser avec plus d'efficacité, d'une part, la transmission des informations à l'INVS, d'autre part, la surveillance épidémiologique au sein des entreprises.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 92, présenté par M. Lorrain, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi cet article :

« 1° La dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 1413-4 du code de la santé publique est ainsi rédigée : "Les services de santé au travail ou, pour les données personnelles de santé, les médecins du travail, fournissent à l'institut les informations nécessaires à l'exercice de ses missions, dans les conditions de confidentialité mentionnées à l'article L. 1413-5."

« 2° Apres le deuxième alinéa du même article, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour améliorer la connaissance et la prévention des risques sanitaires en milieu de travail, les entreprises publiques et privées fournissent également à l'institut, à sa demande, toutes informations nécessaires à l'exercice de ses missions. L'institut contribue à la mise en place, dans ces entreprises, de surveillances épidémiologiques. »

Le sous-amendement n° 355, présenté par M. Chabroux, Mmes Blandin et Campion, MM. Cazeau et Godefroy, Mme Printz, M. Vantomme et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Compléter le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 92 par les mots : "en lien notamment avec les services de santé au travail". »

L'amendement n° 313, présenté par Mme Beaudeau, M. Fischer, Mme Demessine, MM. Muzeau, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour insérer un alinéa après le deuxième alinéa de l'article L. 1413-4 du code de la santé publique.

« Pour améliorer la connaissance de la prévention des risques sanitaires en milieu de travail, les entreprises publiques ou privées ainsi que les services de santé au travail fournissent également à l'institut toutes les informations nécessaires à l'exercice de ses missions. L'institut contribue à la mise en place, dans ces entreprises, de surveillances épidémiologiques en lien avec l'Agence française de sécurité sanitaire et les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Cette surveillance est confiée au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail lorsqu'il existe, à défaut, au délégué du personnel ou, le cas échéant, à un salarié élu chargé de cette mission. »

L'amendement n° 267, présenté par Mme Blandin, est ainsi libellé :

« Après la première phrase du deuxième alinéa de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée : "L'institut centralise les statistiques sur les accidents du travail, les maladies professionnelles, les maladies aggravées par certaines pratiques professionnelles, les maladies déclarées non reconnues et les plaintes reçues par l'inspection du travail." »

La parole est à M. Francis Giraud, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 92.

M. Francis Giraud, rapporteur. Cet amendement a un triple objet.

D'abord, il tire la conséquence de la transformation des « services de médecine du travail » en « services de santé au travail », prévue par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002.

Ensuite, il vise à améliorer la mise en oeuvre de la transmission à l'INVS des données détenues par les services de santé au travail.

Enfin, il précise que les données complémentaires fournies par les entreprises à l'institut le sont à sa demande : l'INVS peut, en effet, estimer nécessaire d'avoir accès à des informations plus précises ou liées de façon indirecte à l'évaluation des risques, mais qui ne figurent pas dans les données transmises par les services de santé au travail. Ces dernières informations ne peuvent, à l'évidence, être transmises de façon systématique.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Chabroux, pour présenter le sous-amendement n° 355.

M. Gilbert Chabroux. Nous proposons de compléter l'amendement de la commission afin de garantir que les services de santé au travail participeront réellement à la surveillance épidémiologique. Mieux vaut le préciser dans le texte.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour présenter l'amendement n° 313.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement vise, d'une part, à associer véritablement les services de santé au travail à la transmission à l'INVS de toutes les informations nécessaires à l'exercice de ses missions, d'autre part, à confier la surveillance épidémiologique au sein des entreprises au CHSCT, quand il existe, au délégué du personnel ou à un salarié élu chargé de cette mission.

Il faut tout d'abord noter que l'INVS ne dispose actuellement que des informations sanitaires transmises par les services de santé au travail. Or, comme le relève le rapport écrit, non seulement ces données sont parcellaires, mais leur transmission par les services de santé au travail « reste défaillante, car le décret d'application prévu par l'article L. 241-5 du code du travail pour organiser le fonctionnement de ces services n'a jamais été publié ».

Si la fourniture d'informations par les entreprises est particulièrement utile et donc nécessaire, celle qui est prévue pour les services de santé au travail ne doit pas pour autant être abandonnée. Ces deux sources de données sont complémentaires et seule leur association permettra à l'INVS de bénéficier de renseignements pertinents et exhaustifs sur les risques professionnels dans les entreprises.

La première phrase de notre amendement, relative à la participation des services de santé au travail à cette transmission, a donc pour objet de rappeler l'obligation de prendre les mesures nécessaires à la mise en oeuvre d'une information systématique de l'INVS par ces services.

A cet égard, l'amendement n° 92 a de quoi étonner.

Il me semble monsieur le rapporteur que vous prenez le problème à l'envers. En effet, plutôt que de préconiser une augmentation des effectifs de l'INVS, ayant constaté le manque de moyens dont souffre celui-ci, vous proposez une solution de repli qui manque singulièrement d'ambition en matière de santé au travail.

De même, monsieur le rapporteur, l'idée selon laquelle les entreprises ne doivent fournir des informations à l'INVS qu'à sa demande nous semble hors de propos.

Comment l'INVS peut-il demander des informations sur des produits dont il ne connaît pas la composition ou des mélanges dont il ignore l'existence ? Comment peut-il savoir que telle PME ou tel atelier utilise tel produit ou aménage des postes de travail de telle façon ?

S'agissant de la seconde phrase proposée par notre amendement, elle vise à confier la surveillance épidémiologique au sein des entreprises au CHSCT, lorsqu'il existe, à défaut au délégué du personnel ou à un salarié élu. En effet, si l'article 20 prévoit que l'INVS « contribue à la mise en place » de cette surveillance, sa pérennité ne fait en revanche l'objet d'aucune précision.

Nous sommes convaincus que seuls les représentants des salariés, au fait des questions de santé au travail, pourront constituer un relais efficace de l'INVS sur le terrain, au sein des entreprises, au plus près des salariés et de leurs conditions de travail ainsi que des transformations de l'organisation du travail ou des produits utilisés.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 267.

Mme Marie-Christine Blandin. Je propose que l'INVS puisse centraliser les statistiques concernant non seulement les accidents, les maladies aggravées et les maladies professionnelles, mais aussi les plaintes reçues par l'inspection du travail. C'est en effet d'un faisceau d'indices et de renseignements que nous avons besoin.

Souvenez-vous de la catastrophe de l'amiante : elle a manifesté la faillite de notre système sanitaire et l'incurie du système de prévention comme du système de réparation des risques professionnels.

Certains connaissaient les dégâts potentiels de l'amiante, mais ils se sont tus. Certains se sont même organisés pour retarder le plus possible les décisions de santé publique qui s'imposaient.

Une enquête du ministère de l'emploi et de la solidarité, rendue publique le 3 août 1998, avait fait notamment ressortir que, pour les produits banalisés, pas nécessairement identifiés, les mesures de prévention n'étaient pas toujours mises en oeuvre.

Je pense qu'il faut expliciter les missions de l'INVS pour améliorer le dispositif de prévention. Il faut regrouper et améliorer tous les outils statistiques sur les accidents du travail, sur les maladies professionnelles, reconnues ou non, de manière à mettre en évidence la globalité des risques, tous régimes confondus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Giraud, rapporteur. La commission est favorable au sous-amendement n° 355.

L'amendement n° 313 appelle deux remarques.

D'une part, la transmission d'informations à l'INVS par les services de santé au travail est déjà prévue par l'article L. 1413-4 du code de la santé publique.

D'autre part, s'agissant de la surveillance épidémiologique, il convient de préciser que l'épidémiologie est une discipline médicale et que les personnes responsables de ce dispositif de surveillance seront en priorité les médecins du travail ou, à défaut, une personne ayant les connaissances scientifiques requises.

L'institut pourra, bien entendu, décider au cas par cas si le CHSCT doit être associé d'une façon plus particulière. Il paraît toutefois difficile de confier à lui seul la surveillance épidémiologique.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

Pour ce qui est de l'amendement n° 267, la préoccupation de Mme Blandin est satisfaite par l'article 10 A du projet de loi, qui confie déjà un rôle de centralisation de ces statistiques à l'INVS. En outre, l'amendement n° 77 de la commission précise que le champ de ces statistiques s'étend non seulement aux maladies professionnelles reconnues, mais également à celles qui sont présumées telles.

La commission a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-François Mattei, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 92 ainsi que le sous-amendement n° 355.

Pour les raisons que M. le rapporteur vient d'énoncer, il donne un avis défavorable sur les amendements n°s 313 et 267.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 355.

(Le sous-amendement est adopté à l'unanimité.)

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l'amendement n° 92.

M. Guy Fischer. Les sénateurs du groupe CRC voteront également cet amendement dans la mesure où le sous-amendement de M. Chabroux permet de faire une partie du chemin vers la participation active des services de santé au travail à la surveillance épidémiologique.

Cela étant, la rédaction que nous proposons est beaucoup plus globale, car l'intervention du CHSCT permettrait d'avoir une connaissance beaucoup plus exacte et précise des conditions de travail dans l'entreprise. En outre, l'Agence française de sécurité sanitaire a une vision plus globale sur le plan environnemental.

M. le président. Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 92.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 20 est ainsi rédigé et les amendements n°s 313 et 267 n'ont plus d'objet.