Art. 8
Dossier législatif : projet de loi de sauvegarde des entreprises
Art. 10

Article 9

L'article L. 611-12 est ainsi rédigé :

« Art. L. 611-12. - L'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire met fin à l'accord homologué en application du II de l'article L. 611-8. En ce cas, les créanciers recouvrent l'intégralité de leurs créances et sûretés, déduction faite des sommes perçues, sans préjudice des dispositions prévues à l'article L. 611-11. »

M. le président. L'amendement n° 18, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Après les mots :

met fin

 rédiger comme suit la fin de la première phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 611-12 du code de commerce :

de plein droit à l'accord constaté ou homologué en application de l'article L. 611-8.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement a pour objet d'étendre l'effet extinctif de l'ouverture d'une procédure collective à l'égard de l'accord de conciliation, que ce dernier ait fait l'objet d'une simple constatation par le président du tribunal ou, au contraire, d'une homologation par le tribunal.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. C'est l'évidence. Je suis donc tout à fait favorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié.

(L'article 9 est adopté.)

Art. 9
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Art. additionnels après l'art. 10

Article 10

Les articles L. 611-13, L. 611-15 et L. 611-16 sont ainsi rédigés :

« Art. L. 611-13. - Les missions de mandataire ad hoc ou de conciliateur ne peuvent être exercées par une personne ayant, au cours des vingt-quatre mois précédents, perçu, à quelque titre que ce soit, directement ou indirectement, une rémunération ou un paiement de la part du débiteur intéressé, de tout créancier du débiteur ou d'une personne qui en détient le contrôle ou est contrôlée par lui au sens de l'article L. 233-16, sauf s'il s'agit d'une rémunération perçue au titre d'un mandat ad hoc ou d'une mission de règlement amiable ou de conciliation réalisée pour le même débiteur ou le même créancier. La personne ainsi désignée doit attester sur l'honneur, lors de l'acceptation de son mandat, qu'elle se conforme à ces interdictions.

« Les missions de mandataire ad hoc ou de conciliateur ne peuvent être confiées à un juge consulaire en fonction ou ayant quitté ses fonctions depuis moins de cinq ans.

« Art. L. 611-14. - Supprimé

« Art. L. 611-15. - Le débiteur consulté, le président du tribunal fixe les conditions de rémunération du mandataire ad hoc et du conciliateur, lors de la désignation de l'intéressé, en fonction des diligences nécessaires à l'accomplissement de sa mission. Sa rémunération est arrêtée par ordonnance du président du tribunal à l'issue de la mission.

« La contestation de ces décisions peut être portée devant le premier président de la cour d'appel dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat. 

« Art. L. 611-16. - Toute personne qui est appelée à la procédure de conciliation ou à un mandat ad hoc ou qui, par ses fonctions, en a connaissance est tenue à la confidentialité. »

M. le président. L'amendement n° 348, présenté par MM. Badinter,  C. Gautier,  Yung,  Frimat et  Peyronnet, Mme Bricq, MM. Charasse et  Guérini, Mme M. André, MM. Collombat,  Courrière,  Dreyfus-Schmidt,  Mahéas,  Sueur,  Sutour et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 611-13 du code de commerce, après les mots :

de l'article L. 233-16,

insérer les mots :

ou de toute personne appelée à la procédure de conciliation,

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Le texte proposé par l'article 10 pour l'article L. 611-13 du code de commerce prévoit que les missions de mandataire ad hoc et de conciliateur ne peuvent être exercées par une personne ayant reçu une rémunération de la part du débiteur intéressé, de tout créancier du débiteur ou d'une personne qui en détient le contrôle ou est contrôlée par lui, au sens de l'article L. 233-16.

Le texte ne précise pas suffisamment le régime des incompatibilités. Il convient donc d'ajouter que la fonction de conciliateur ne peut être exercée par une personne qui a perçu, au cours des vingt-quatre derniers mois, un paiement ou une rémunération d'une personne appelée à la procédure de conciliation.

Il importe donc de préciser le régime des incompatibilités du mandataire ad hoc et du conciliateur, afin qu'ils offrent des garanties d'impartialité.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cette précision semble inutile et surabondante. Le dispositif proposé permet déjà de viser, nommément et de façon précise, l'ensemble des personnes appelées à la conciliation.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Le Gouvernement est cent fois d'accord avec l'inspiration de votre amendement, monsieur le sénateur, mais l'article 10 fournit déjà les précisions que vous souhaitez ajouter. Par conséquent, votre amendement est satisfait.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 348.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune et présentés par MM. Badinter,  C. Gautier,  Yung,  Frimat et  Peyronnet, Mme Bricq, MM. Charasse et  Guérini, Mme M. André, MM. Collombat,  Courrière,  Dreyfus-Schmidt,  Mahéas,  Sueur,  Sutour et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

L'amendement n° 349 est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 611-13 du code de commerce par deux alinéas ainsi rédigés :

« Elles ne peuvent également être exercées par un administrateur judiciaire ou un mandataire judicaire au redressement et à la liquidation des entreprises en fonction ou ayant quitté ses fonctions depuis moins de cinq ans. 

« Elles ne peuvent être également exercées par une personne qui, en raison de sa fonction, est susceptible d'intervenir ultérieurement en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, ou de redressement ou de liquidation au bénéfice du débiteur.

L'amendement n° 350 est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 611-13 du code de commerce, par un alinéa ainsi rédigé :

« Elles ne peuvent également être exercées par un administrateur judiciaire ou un mandataire judicaire au redressement et à la liquidation des entreprises en fonction ou ayant quitté ses fonctions depuis moins de cinq ans.

L'amendement n° 351 est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 611-13 du code de commerce par un alinéa ainsi rédigé :

« Elles ne peuvent être également exercées par une personne qui, en raison de sa fonction, est susceptible d'intervenir ultérieurement en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, ou de redressement ou de liquidation au bénéfice du débiteur.

La parole est à M. Richard Yung, pour présenter ces trois amendements.

M. Richard Yung. L'article L. 611-13 du code de commerce prévoit que les missions de mandataire ad hoc ou de conciliateur ne peuvent être exercées par une personne ayant perçu une rémunération de la part du débiteur intéressé, de tout créancier du débiteur ou d'une personne qui en détient le contrôle ou qui est contrôlée par lui, au sens de l'article L. 233-16 dudit code. Le texte ne précise pas suffisamment le domaine des incompatibilités.

Par cohérence avec l'alinéa précédent, il convient de compléter les incompatibilités entre les fonctions de mandataire ad hoc ou de conciliateur et celles d'administrateur judiciaire ou de mandataire judiciaire au redressement et à la liquidation des entreprises.

Il importe donc de prévoir que la fonction de conciliateur ne peut pas être exercée par une personne qui, en raison de sa fonction, est susceptible d'intervenir ultérieurement en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation au bénéfice du débiteur.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Comme d'autres professionnels, les administrateurs judiciaires et les mandataires judiciaires ont toute capacité pour exercer les fonctions de mandataire ad hoc ou de conciliateur. Rien ne justifie une incompatibilité de principe.

Le second cas d'incompatibilité que tendent à instaurer ces amendements est curieux. En effet, une personne déterminée ne pourrait pas être nommée mandataire ad hoc ou conciliateur en raison de son éventuelle intervention, dans plusieurs mois ou plusieurs années, en cas d'ouverture d'une procédure judiciaire.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 349, 350 et 351.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Monsieur Yung, il est clair que vous vous inspirez de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui vise le droit à un procès équitable.

En l'espèce, il n'est pas question de juger. Est en cause un mandataire, un administrateur, un conseiller de gestion. S'il devait participer à la procédure de conciliation, il serait sans doute mieux préparé pour mener à bien la mission qui lui serait confiée par le président du tribunal de commerce.

Monsieur Yung, votre scrupule n'a pas de raison d'être. Certes, il existe des incompatibilités que nous avons évoquées hier soir. J'ai pris l'engagement, vis-à-vis de M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de les sortir de la loi, mais de les reprendre par voie réglementaire, puisque ce domaine relève de la compétence du Gouvernement, en prenant en compte les critères qu'il a proposés.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 349.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 350.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 351.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 19 est présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois.

L'amendement n° 185 est présenté par M. C. Gaudin, au nom de la commission des affaires économiques.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rétablir le texte proposé par cet article pour rédiger l'article L. 611-14 du code de commerce dans la rédaction suivante :

« Art. L. 611-14.- Tout conciliateur doit, pour être désigné en application du présent titre, justifier d'une assurance garantissant les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile encourue du fait de négligences ou de fautes dans l'exercice de son mandat.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 19.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. L'Assemblée nationale a supprimé l'obligation faite au mandataire ad hoc et au conciliateur de souscrire une assurance couvrant leur responsabilité civile, au motif que cette obligation interdirait, en pratique, à d'autres personnes que des administrateurs ou des mandataires au redressement et à la liquidation des entreprises d'être désignées en qualité de mandataire ad hoc ou de conciliateur.

La commission des lois est sensible à la volonté témoignée d'ouvrir, le cas échéant, à d'autres personnes que des administrateurs judiciaires et des liquidateurs judiciaires au redressement et à la liquidation des entreprises les fonctions de conciliateur ou de mandataire ad hoc.

Cependant, elle s'interroge sur l'opportunité de supprimer toute obligation d'assurance, dès lors que la personne extérieure qui souhaitera assurer une mission de cette nature ne sera couverte par aucune garantie, alors même qu'elle pourrait faire l'objet d'actions en responsabilité lourdes. Il ne faudrait pas, par ailleurs, que l'absence de toute assurance conduise les sociétés d'assurance à ne pas offrir de polices permettant la couverture d'un tel risque.

Cette question doit également être analysée au regard du dispositif d'ouverture du redressement judiciaire à la suite d'un échec d'une procédure de conciliation. Dans une telle hypothèse, en application de l'article L. 631-4 du code de commerce, tel qu'il sera rédigé si l'article 100 du présent projet de loi est adopté, « lorsque le rapport du conciliateur établit que le débiteur est en cessation des paiements, le tribunal, d'office, se saisit afin de statuer sur l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ».

Pour tous ces motifs, il s'avère nécessaire de prévoir que le conciliateur indique précisément, lorsqu'il fait connaître au président du tribunal l'échec de la conciliation, si le débiteur est ou non en état de cessation des paiements. Or, compte tenu de cette obligation, source de mise en jeu de sa responsabilité, il serait difficilement concevable de ne pas instituer une obligation d'assurance.

Par conséquent, la commission des lois vous propose de rétablir, par cet amendement, l'obligation d'assurance initialement prévue par le projet de loi, en la restreignant toutefois au seul conciliateur.

Cet amendement met également en relief le régime de la responsabilité auquel pourrait donner lieu l'exercice de la mission de conciliateur.

M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 185.

M. Christian Gaudin, rapporteur pour avis. Même argumentaire que M. le rapporteur.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Il existe une cohérence entre la proposition de M. Hyest et le texte adopté par l'Assemblée nationale.

Ainsi, l'Assemblée nationale a supprimé l'obligation d'assurance. Mais le Sénat a adopté, à l'article 6, un amendement qui vise à conférer une responsabilité particulière au conciliateur. Ce dernier, en cas d'échec de sa mission, doit déclarer l'entreprise en cessation des paiements. Pour éviter d'être poursuivi, il va souscrire une assurance. Je trouve cette procédure très lourde. Ce qui m'inquiète, c'est que tout le monde s'assure. Notez ainsi le coût de l'assurance des médecins. Mais, étant donné le contexte actuel et l'amendement adopté à l'article 6, la proposition formulée, tant par la commission des lois que par la commission des affaires sociales, est cohérente. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 19 et 185.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. L'amendement n° 373 rectifié, présenté par MM. Buffet,  Lecerf,  Girod,  Trillard et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le début du texte proposé par cet article pour l'article L. 611-15 du code de commerce :

Après avoir recueilli l'accord du débiteur, le président du tribunal ...

La parole est à M. François-Noël Buffet.

M. François-Noël Buffet. Cet amendement vise à rendre nécessaire l'accord du chef d'entreprise pour ce qui concerne les conditions de rémunération du mandataire ad hoc, du conciliateur ou, le cas échéant, de l'expert prévu par l'amendement n° 20 de la commission des lois, dont il a demandé la désignation au président du tribunal, préalablement à la décision fixant ces conditions, laquelle est prise en même temps que la désignation de cet intervenant.

Le projet de loi permet, en effet, au demandeur de contester la décision fixant les conditions de cette rémunération, sans pour autant que cette contestation fasse obstacle à l'intervention du professionnel concerné.

Ainsi, un chef d'entreprise pourrait se voir imposer des conditions de rémunération excessives qui l'auraient dissuadé de demander un tel concours s'il les avait connues préalablement.

Le caractère raisonnable des émoluments des mandataires ad hoc, des conciliateurs et, le cas échéant, des experts sera l'une des conditions du succès du nouveau dispositif de traitement amiable des difficultés des entreprises auprès des petites et moyennes entreprises.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement paraît opportun à la commission des lois, car il est de nature à éviter que la rémunération de ces intervenants ne dissuade le débiteur de solliciter l'ouverture d'une procédure de mandat ad hoc ou de conciliation. Par conséquent, la commission émet un avis favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Cet amendement est heureux. Il ne faudrait pas que, le recours à un mandataire apparaissant tellement coûteux aux yeux des petites entreprises de province, cette procédure soit vouée à échec dès le départ. Prévoir que le chef d'entreprise doit connaître avec certitude les conditions de rémunération de cet intervenant fixées par le président du tribunal de commerce me paraît relever d'une élémentaire prudence. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 373 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 20, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 611-15 du code de commerce, remplacer les mots :

et du conciliateur

par les mots :

, du conciliateur et, le cas échéant, de l'expert

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement tend à donner compétence au président du tribunal pour fixer les conditions de la rémunération de l'expert éventuellement nommé dans le cadre de la procédure de conciliation.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 21, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le début du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 611-15 du code de commerce :

Les recours contre ces décisions sont portés...

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.

(L'article 10 est adopté.)

Art. 10
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Art. 11

Articles additionnels après l'article 10

M. le président. Les amendements nos 352 et 353 sont présentés par MM. Badinter,  C. Gautier,  Yung,  Frimat et  Peyronnet, Mme Bricq, MM. Charasse et  Guérini, Mme M. André, MM. Collombat,  Courrière,  Dreyfus-Schmidt,  Mahéas,  Sueur,  Sutour et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

L'amendement n° 352 est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'avant-dernier alinéa de l'article L. 811-10 du code de commerce est supprimé.

L'amendement n° 353 est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'avant-dernier alinéa de l'article L. 812-8 du code de commerce est supprimé.

La parole est à M. Charles Gautier.

M. Charles Gautier. Je retire ces amendements, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos 352 et 353 sont retirés.

Art. additionnels après l'art. 10
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Art. 12

Article 11

I. - L'article L. 612-1 est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, les mots : « choisis sur la liste mentionnée à l'article L. 822-1 qui exercent leurs fonctions dans les conditions prévues par le livre II, titres Ier et II, sous réserve des règles qui leur sont propres. Les dispositions de l'article L. 242-27 sont applicables » sont supprimés ;

2° Le cinquième alinéa est supprimé.

II. - Aux troisième et quatrième alinéas de l'article L. 612-2, après les mots : « comité d'entreprise », sont insérés les mots : « ou, à défaut, aux délégués du personnel ».

III. - Les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 612-3 sont ainsi rédigés :

« A défaut de réponse dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat, ou si celle-ci ne permet pas d'être assuré de la continuité de l'exploitation, le commissaire aux comptes invite par un écrit dont la copie est transmise au président du tribunal de grande instance, les dirigeants à faire délibérer l'organe collégial de la personne morale sur les faits relevés. Le commissaire aux comptes est convoqué à cette séance. La délibération de l'organe collégial est communiquée au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel et au président du tribunal de grande instance.

« En cas d'inobservation de ces dispositions ou si le commissaire aux comptes constate qu'en dépit des décisions prises la continuité de l'exploitation demeure compromise, une assemblée générale est convoquée dans des conditions et délais fixés par décret en Conseil d'Etat. Le commissaire aux comptes établit un rapport spécial qui est présenté à cette assemblée. Ce rapport est communiqué au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel. »

IV. - Au deuxième alinéa de l'article L. 612-4, les mots : « choisis sur la liste mentionnée à l'article L. 822-1 qui exercent leurs fonctions dans les conditions prévues par le livre II sous réserve des règles qui leur sont propres. Les dispositions de l'article L. 242-27 sont applicables » sont supprimés.

M. le président. Les amendements nos 22 et 23 sont présentés par M. Hyest, au nom de la commission des lois.

L'amendement n° 22 est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le III de cet article :

III.- L'article L. 612-3 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots « à l'article L. 612-1 », sont remplacés par les mots « aux articles L. 612-1 et L. 612-4 » ;

2° Les deuxième et troisième alinéas sont ainsi rédigés :

« A défaut de réponse dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat, ou si celle-ci ne permet pas d'être assuré de la continuité de l'exploitation, le commissaire aux comptes invite, par un écrit dont la copie est transmise au président du tribunal de grande instance, les dirigeants à faire délibérer l'organe collégial de la personne morale sur les faits relevés. Le commissaire aux comptes est convoqué à cette séance. La délibération de l'organe collégial est communiquée au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel et au président du tribunal de grande instance.

« En cas d'inobservation de ces dispositions, ou si le commissaire aux comptes constate qu'en dépit des décisions prises la continuité de l'exploitation demeure compromise, une assemblée générale est convoquée dans des conditions et délais fixés par décret en Conseil d'Etat. Le commissaire aux comptes établit un rapport spécial qui est présenté à cette assemblée. Ce rapport est communiqué au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel. » ;

3° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsqu'une procédure de conciliation ou de sauvegarde a été engagée par les dirigeants en application des articles L. 611-6 et L. 620-1. »

L'amendement n° 23 est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le IV de cet article :

IV.- L'article L. 612-4 est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, les mots : « choisis sur la liste mentionnée à l'article L. 822-1 qui exercent leurs fonctions dans les conditions prévues par le livre II sous réserve des règles qui leur sont propres. Les dispositions de l'article L. 242-27 sont applicables » sont supprimés ;

2° Les trois derniers alinéas sont supprimés.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. L'amendement n° 22 a deux objets.

Son objet principal est d'harmoniser les conditions de l'alerte du commissaire aux comptes dans les associations subventionnées par l'Etat ou par les collectivités territoriales avec celles qui prévalent actuellement pour les personnes morales de droit privé exerçant une activité commerciale. En effet, dans ces associations, le commissaire aux comptes n'a pas d'obligation d'alerte et celle-ci se fait dans des conditions spécifiques. Or ces différences n'obéissent à aucune justification juridique ou économique.

Cet amendement tend également à supprimer l'obligation d'alerte du commissaire aux comptes lorsque le débiteur soumis à son contrôle fait l'objet d'une procédure de conciliation ou de sauvegarde. Les difficultés de l'entreprise étant en effet prises en charge dans le cadre de ces procédures, l'alerte du commissaire aux comptes n'a plus à s'appliquer.

L'amendement n° 23 est un amendement de conséquence.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 11, modifié.

(L'article 11 est adopté.)

CHAPITRE II

Dispositions relatives à la sauvegarde

Art. 11
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Art. 13

Article 12

I. - Supprimé

II. - L'article L. 620-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 620-1. - Il est institué une procédure de sauvegarde ouverte sur demande d'un débiteur mentionné à l'article L. 620-2 qui justifie de difficultés susceptibles de le conduire à la cessation des paiements. Cette procédure est destinée à faciliter la réorganisation de l'entreprise afin de permettre la poursuite de l'activité économique, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif.

« La procédure de sauvegarde donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation et, le cas échéant, à la constitution de deux comités de créanciers, conformément aux dispositions des articles L. 626-26 et L. 626-27. »

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 24 rectifié, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

A la fin de la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 620-1 du code de commerce, remplacer les mots :

qui justifie de difficultés susceptibles de le conduire à la cessation des paiements

par les mots :

qui  justifie de difficultés, qu'il n'est pas en mesure de surmonter, de nature à le conduire à la cessation des paiements

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet article est très important puisqu'il vise la définition des conditions d'ouverture de la procédure de sauvegarde. Dans les avant-projets, plusieurs rédactions avaient été proposées. Il ne faut ni banaliser, ni trop restreindre la procédure de sauvegarde, mais apporter les précisions nécessaires pour permettre aux tribunaux d'apprécier cas par cas.

La justification par le débiteur de « difficultés susceptibles de conduire à la cessation des paiements » qui conduirait à l'ouverture de la procédure de sauvegarde suscite une certaine perplexité, compte tenu de son imprécision. Ce critère donne en effet au débiteur une très grande latitude pour décider de solliciter l'ouverture de la procédure.

La commission des lois estime que, pour limiter les effets d'aubaine qui pourraient survenir, il serait nécessaire de préciser que la procédure de sauvegarde ne pourrait être sollicitée que si les difficultés rencontrées par le débiteur sont réellement de nature à le conduire à la cessation des paiements si les mesures applicables, grâce à la procédure de sauvegarde, n'étaient pas mises en oeuvre.

En effet, contrairement au droit américain qui n'exige, pour l'ouverture d'une procédure de réorganisation, que l'existence de dettes du débiteur sans que leur nature ou leur volume ait à être caractérisé, il semble indispensable que le débiteur soit, à tout le moins, dans une situation suffisamment préoccupante pour que, si aucune mesure de protection judiciaire n'était prise, il se trouve rapidement face à une panne de trésorerie qui caractérise la cessation des paiements.

Il convient en effet d'éviter que des débiteurs pouvant manifestement faire face à leurs difficultés sans craindre la cessation des paiements ne limitent indûment les droits légitimes de leurs créanciers et ne bénéficient au surplus d'une intervention de l'AGS, l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, ce qui serait contraire à l'esprit du texte.

Nous proposons donc d'ajouter la mention « qu'il n'est pas en mesure de surmonter », plutôt que le terme « insurmontable », notion qui ne peut être appréciée que de l'extérieur. Dans notre proposition, c'est le chef d'entreprise qui indique ne pas être en mesure de surmonter lui-même les difficultés si on ne prend pas des mesures immédiates.

La procédure de sauvegarde a pour objet d'éviter la cessation des paiements. Après avoir beaucoup réfléchi et avoir dialogué avec l'ensemble de nos collègues de la commission des finances, c'est à cette solution que nous avons abouti.

M. le président. Le sous-amendement n° 400, présenté par M. Badinter, est ainsi libellé :

Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 24 rectifié, remplacer les mots :

qu'il n'est pas en mesure de surmonter

par le mot :

insurmontables

La parole est à M. Robert Badinter.

M. Robert Badinter. Après avoir bien écouté M. Hyest, je m'aperçois que nous n'arriverons pas à obtenir une définition qui donne satisfaction. Ce seront les tribunaux de commerce et, éventuellement, la Cour de cassation qui nous éclaireront.

Par conséquent, autant prendre votre définition, puisque vous y tenez ; nous verrons ce qu'elle deviendra avec la jurisprudence.

Je retire donc ce sous-amendement.

M. le président. Le sous-amendement n° 400 est retiré.

Le sous-amendement n° 284, présenté par M. Juilhard, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par l'amendement n° 24, après le mot :

conduire

insérer le mot :

inévitablement

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 223, présenté par Mmes Assassi,  Mathon,  Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

A la fin de la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 620-1 du code de commerce, remplacer les mots :

difficultés susceptibles de le conduire à la cessation des paiements.

par les mots :

difficultés, avérées ou prévisibles, susceptibles d'entraîner à bref délai la cessation des paiements.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On veut tout améliorer, mais on reste en présence d'une notion floue et assez subjective, alors qu'il fallait auparavant que le débiteur se trouve en état de cessation des paiements - notion plus précise - pour pouvoir engager la procédure de sauvegarde.

Afin d'éviter que la procédure de sauvegarde ne soit utilisée abusivement par le débiteur, nous proposons de substituer aux mots « difficultés susceptibles de le conduire à la cessation des paiements », les mots « difficultés avérés ou prévisibles susceptibles d'entraîner à bref délai la cessation des paiements ».

Cette préoccupation étant partagée, je pense, par notre rapporteur, j'espère que cette rédaction pourra être acceptée.

M. le président. L'amendement n° 355, présenté par MM. Badinter,  C. Gautier,  Yung,  Frimat et  Peyronnet, Mme Bricq, MM. Charasse et  Guérini, Mme M. André, MM. Collombat,  Courrière,  Dreyfus-Schmidt,  Mahéas,  Sueur,  Sutour et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 620-1 du code de commerce, après les mots :

susceptibles de le conduire

insérer les mots :

, à bref délai,

La parole est à M. Robert Badinter.

M. Robert Badinter. La procédure de sauvegarde ne trouve son sens que lorsque l'urgence de la situation demande une intervention immédiate. Nous risquons sinon de voir la procédure de sauvegarde détournée à des fins qui sont étrangères à ce que souhaite le législateur.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je vous remercie, mes chers collègues, de toutes ces tentatives de précision. Il y en a eu beaucoup dès les avant-projets et même lors des débats à l'Assemblée nationale.

On parlait du droit américain ; mais le droit allemand, qui est beaucoup plus proche du nôtre, a été modifié : je citerai la procédure de l'Insolvenzordnung.

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Je n'y avais pas pensé !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je sais, monsieur le garde des sceaux, que vous pratiquez le droit allemand, qui est très proche du nôtre, contrairement à ce qu'on pense, notamment en matière de droit commercial.

La procédure de l'Insolvenzordnung s'apparente à celle de la sauvegarde, mais la définition est encore beaucoup plus souple.

Les difficultés que le débiteur n'est pas en mesure de surmonter sont matérialisées dans le compte de gestion prévisionnel ou par un certain nombre d'éléments qui entraînent la demande d'ouverture de la procédure de sauvegarde.

Préciser « à bref délai » ne me paraît pas indispensable et n'irait pas avec ce que la commission des lois après réflexion a tenté d'établir.

Je suis donc défavorable aux deux amendements.

Je suis en revanche favorable aux propositions que l'on a essayé de synthétiser et qui tendent, dans l'esprit, à prémunir cette procédure contre les effets d'aubaine, mais la procédure doit, dans le même temps, être suffisamment en amont de la cessation des paiements pour qu'elle ait un sens.

Doit-elle intervenir un mois, trois mois ou six mois avant la cessation des paiements ? Ce n'est pas une question de délais. Il peut arriver qu'une entreprise qui a perdu un de ses gros clients et qui essaie d'en rechercher de nouveaux s'aperçoive qu'elle risque de se retrouver dans les six mois en cessation des paiements. Elle est exactement dans la situation de demander la mise en oeuvre de la procédure de sauvegarde.

Si l'on veut que la procédure soit efficace, il faut d'abord qu'elle soit appréciée in concreto. C'est pour cela que l'expression « qu'il n'est pas en mesure de surmonter » est préférable au mot « insurmontable ».

Le terme « insurmontable » est objectif, il est apprécié de l'extérieur, alors que, dans notre formulation, c'est l'entrepreneur qui indique ne pas être en mesure de surmonter ses difficultés et, pour cela, demande l'ouverture de la procédure.

Je suis donc défavorable aux deux amendements, mais j'estime que nous avons bien avancé quant à la définition et à l'encadrement de cette procédure.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Permettez-moi, monsieur le président, de vous dire combien la Haute assemblée provoque mon admiration.

Il est parfaitement exact que les abus d'application aux Etats-Unis du chapter eleven ont prouvé que l'utilisation de la procédure de sauvegarde pouvait souvent être considérée comme abusive. L'Assemblée nationale n'a pas assez pris au sérieux la définition des termes.

La commission des lois, son président, ainsi que le sénateur Badinter ont tenté de définir un critère plus précis.

Selon mon point de vue, ils y sont arrivés ; car, à la différence du mot « insurmontable », qui est une notion objective et qui s'applique à tout le monde, l'expression « qu'il n'est pas en mesure de surmonter », est subjective et veut dire que le chef d'entreprise ne « peut » pas surmonter.

Comme c'est de cela qu'il s'agit, la définition de la commission est la meilleure.

Par ailleurs, et concernant la notion de bref délai, il ne faut pas ramener la procédure de sauvegarde à ce qu'elle était en 1985 : il ne faut pas attendre qu'il soit trop tard avant d'agir. Toute l'idée de la sauvegarde, c'est d'être en amont. La formule « bref délai » serait trop lato sinsu : elle serait mal interprétée par le juge, je le crains, même si j'en vois l'intérêt et l'intuition. Il est donc plus prudent de ne pas l'employer.

En revanche, le travail des commissaires aux lois me paraît tout à fait satisfaisant et un vrai progrès dans la définition et l'encadrement a été réalisé par rapport à la rédaction de l'Assemblée nationale.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 24 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 223 et 355 n'ont plus d'objet.

L'amendement n° 224, présenté par Mmes Assassi,  Mathon,  Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 620-1 du code de commerce, insérer deux phrases ainsi rédigées :

Toutefois, avant de faire cette demande, le débiteur doit consulter pour avis les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel s'ils existent, ou à défaut les salariés. Lors de cette consultation, le débiteur examine toutes les propositions alternatives soumises par les représentants des salariés ou les salariés eux-mêmes permettant d'éviter le déclenchement de cette procédure.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L'article 12 du projet de loi est le premier des articles consacrés à la nouvelle procédure de sauvegarde, mesure phare du projet de loi, comme notre rapporteur vient de le réaffirmer.

A la différence de la conciliation, cette procédure est exclusivement préventive puisqu'elle doit être ouverte en amont. Elle n'est pas ouverte aux entreprises en état de cessation des paiements mais uniquement à celles qui connaissent des difficultés susceptibles de les conduire à la cessation des paiements.

En revanche, à l'instar de la conciliation, l'initiative de la procédure de sauvegarde appartient au seul débiteur, les salariés n'étant absolument pas associés au déclenchement de cette nouvelle procédure.

Nous regrettons - cela ne vous étonnera pas - qu'une fois de plus les salariés soient écartés d'une décision qui concerne leur entreprise, d'autant plus que cette décision aura certainement des conséquences directes sur leur emploi.

Notre amendement tend à prévoir la consultation des salariés ou de leurs représentants préalablement à l'ouverture de la procédure de sauvegarde afin qu'ils puissent formuler des propositions et des avis susceptibles d'aider l'employeur dans la sauvegarde de l'entreprise.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La demande exprimée par cet amendement est déjà satisfaite par certaines dispositions du texte relatives aux représentants des salariés.

L'article 15 du projet de loi tend à imposer au titre d'une formalité que les représentants du comité d'entreprise ou des délégués du personnel soient entendus lors de l'arrêté du plan par le tribunal. Ils pourront à cette occasion faire part au tribunal de leurs propositions éventuelles.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Madame la sénatrice, nous avons déjà eu ce débat plusieurs fois.

C'est en amont de la procédure que vous souhaitez la présence d'un représentant du personnel.

Loin de vouloir mettre de coté l'indispensable apport du personnel, nous souhaitons que ce dernier soit interrogé au bon moment, à la fin de la procédure et non pas au début, et cela par volonté de discrétion ou pour éviter que le personnel ne se fasse hara-kiri.

La situation prévue par le texte est très équilibrée et votre amendement ne peut donc pas être accepté.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 224.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis maintenant saisi de cinq amendements, présentés par Mmes Assassi,  Mathon,  Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen :

L'amendement n° 225 est ainsi libellé :

Dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 620-1 du code de commerce, supprimer les mots :

faciliter la réorganisation de l'entreprise afin de

L'amendement n° 226 est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 620-1 du code de commerce, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La procédure de sauvegarde peut être également engagée par les représentants du comité d'entreprise, ou à défaut, des délégués du personnel s'ils existent, ou à défaut les salariés.

L'amendement n° 227 est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 620-1 du code de commerce, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les représentants du comité d'entreprise, ou à défaut des délégués du personnel s'ils existent ou à défaut les salariés, disposent d'un droit d'opposition à la procédure de sauvegarde s'ils constatent que l'engagement dans cette procédure est dépourvu de motifs réels et sérieux. Ils transmettent cette opposition au tribunal saisi par le débiteur qui statuera d'abord sur cette opposition. Si le tribunal juge que la procédure visée par l'opposition est dépourvue de motifs réels et sérieux, il met fin aux actions engagées par le débiteur.

L'amendement n° 228 est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 620-1 du code de commerce, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Lorsque la procédure de sauvegarde est engagée, le débiteur doit en informer les représentants du comité d'entreprise, ou à défaut les délégués du personnel ou à défaut les salariés et leur communiquer toutes les informations utiles motivant l'engagement de la procédure de sauvegarde.

L'amendement n° 229 est ainsi libellé :

Dans le second alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 620-1 du code de commerce, remplacer le mot :

deux

par le mot :

trois

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter ces cinq amendements.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L'amendement n° 225 vise à clarifier les objectifs de la sauvegarde.

La formule « faciliter la réorganisation de l'entreprise » laisse penser que des licenciements pourraient être effectués dans le cadre de cette procédure, alors que l'entreprise n'est pas en cessation des paiements et que l'un des objectifs de la procédure de sauvegarde est, on peut le penser, le maintien de l'emploi

Il était auparavant question de continuation de l'entreprise : l'article 12 fait explicitement référence à la réorganisation de l'entreprise, terme qui nous vient clairement de la législation américaine.

L'amendement n° 226 vise à associer les salariés à la sauvegarde de l'entreprise.

En effet, je le répète, la sauvegarde de l'entreprise, c'est également la sauvegarde de l'emploi. Nonobstant ce qui a été dit, le fait que les salariés soient associés me parait absolument indispensable.

Certains observateurs notent en effet que l'employeur n'aura peut-être pas la lucidité suffisante pour enclencher cette procédure de sauvegarde pouvant pourtant être salutaire pour son activité, et donc pour l'emploi. Il convient donc d'ouvrir la possibilité aux représentants des salariés de pouvoir le faire.

L'amendement n° 227 vise à accorder aux salariés un droit d'opposition à la procédure de sauvegarde.

La procédure de sauvegarde peut conduire à des compressions d'effectif ou à tout aménagement des conditions de travail. Or les salariés ne sont pas à l'abri d'un employeur peu scrupuleux qui profiterait des effets d'aubaine de cette procédure pour réorganiser son entreprise sans contraintes. Pour éviter ces dérives, il convient donc de doter les représentants des salariés d'un droit d'opposition.

L'amendement n° 228 vise à assurer l'information des salariés.

Lorsque l'employeur décide d'engager la procédure de sauvegarde, qui peut avoir des effets sur l'emploi, il importe que les salariés, ou leurs représentants s'ils existent, puissent prendre connaissance des éléments qui ont motivé sa décision.

Enfin, l'amendement n° 229 est un amendement de coordination avec l'amendement que nous avons déposé à l'article 92 du projet de loi et qui tend à créer un troisième comité de créanciers constitué des administrations financières, des organismes de sécurité sociale et des institutions régies par le livre IX du code de la sécurité sociale.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces cinq amendements ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 225.

Je rappelle que la formulation retenue dans le projet de loi pour la procédure de sauvegarde s'oppose à celle qui a été retenue pour le redressement.

On vise la poursuite de l'activité de l'entreprise ; si la procédure de sauvegarde n'était pas « destinée à faciliter la réorganisation de l'entreprise », c'est la notion même de sauvegarde qui disparaîtrait.

Cette différence d'approche s'explique par le fait que la procédure de sauvegarde intervient alors que l'activité de l'entreprise n'a pas cessé.

Cependant, le maintien de l'emploi reste l'un des objectifs premiers de la procédure, ainsi qu'en témoigne la rédaction de l'article 12. Il me semble donc que la crainte exprimée par Mme Borvo Cohen-Seat n'est pas justifiée.

La commission est également défavorable à l'amendement n° 226.

Le recours à la procédure de sauvegarde est une démarche qui doit être effectuée sous la responsabilité du chef d'entreprise, mais rien n'empêche en pratique les salariés de demander au chef d'entreprise d'engager une telle procédure.

En outre, le projet de loi prévoit que les représentants des salariés peuvent communiquer au tribunal les faits révélant la cessation des paiements aux fins d'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires.

Quant à l'amendement n° 227, il démontre que ses auteurs n'ont peut-être pas très bien saisi en quoi consistait la procédure de sauvegarde. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat proteste.)

Cette nouvelle procédure est destinée à sauvegarder l'entreprise en difficulté avant que sa situation ne la conduise à cesser son activité faute d'une trésorerie suffisante.

La procédure de sauvegarde de l'entreprise ne pourra que bénéficier aux salariés.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Elle ne sera en tout état de cause pas plus préjudiciable aux salariés que la situation dans laquelle ils seraient si l'entreprise ne recourrait pas à la protection ainsi offerte.

Bien au contraire, il faut rappeler que c'est le droit commun du licenciement qui s'appliquera et que l'intervention de l'AGS, l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, sera, du fait des amendements adoptés par la commission, « verrouillée » pour que le débiteur indélicat ne la détourne de ses finalités.

Je répète une fois encore que le sauvetage d'une entreprise ne peut se faire que si les salariés jouent réellement le jeu et acceptent la protection judiciaire qu'offre cette procédure.

La commission est donc défavorable à l'amendement n° 227.

L'amendement n° 228 exprime une demande tout à fait légitime. Toutefois,...

M. Jean-Jacques Hyest. ...il conviendrait plutôt de prévoir cette information dans le cadre de l'article L. 432-1 du code du travail. C'est justement l'objet de l'amendement n° 377, amendement de M. Paul Girod tendant à insérer un article additionnel après l'article 187 du projet de loi et sur lequel la commission se propose d'émettre un avis favorable.

L'opposition de cette dernière à votre propre amendement, madame Borvo Cohen-Seat, ne tient donc qu'à une raison de forme et, dans la mesure où votre demande sera satisfaite, elle vous demande de retirer l'amendement n° 228.

Quant à l'amendement n° 229, les administrations financières, les organismes de sécurité sociale et l'UNEDIC obéissent chacun à des règles particulières en matière de remise de dettes, ce qui explique leur exclusion des comités de créanciers. Un nouveau comité qui leur serait strictement dédié ne serait pas praticable, raison pour laquelle l'avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Mme Borvo Cohen-Seat, en présentant l'amendement n° 225, vous avez dit que l'objet de la procédure de sauvegarde était de sauver les emplois. Non ! Le but est de sauver l'entreprise et, dans l'entreprise, il y a les emplois.

Vous voulez que tous les emplois soient sauvés : c'est la quadrature du cercle ! Si l'on pouvait sauver tous les emplois quand une entreprise est en difficulté, cela se saurait et on le ferait ! Bref, ce que vous proposez est beau mais impossible. Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Quant à l'amendement n° 226, il tend à donner aux salariés le pouvoir de déclencher eux-mêmes la procédure de sauvegarde.

De deux choses l'une : ou les salariés sont cogestionnaires de l'entreprise, ou ils ne le sont pas.

Si la cogestion, philosophie qu'il est possible de défendre - et même de mettre en oeuvre, comme l'ont fait certains types de coopératives ouvrières -, était notre modèle, les salariés dirigeraient eux-mêmes l'entreprise ; ils seraient donc au courant des finances comme de la situation commerciale de leur entreprise, et il pourrait leur revenir de déclencher la procédure.

Cependant, hors du cas de la cogestion, le personnel ne dispose pas des éléments nécessaires pour savoir si une procédure doit être déclenchée. Je crains donc, madame Borvo Cohen-Seat, que vous ne privilégiez trop le rôle du personnel ! Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

L'amendement n° 227 tend, lui, à donner aux salariés le pouvoir de dire non à la procédure. Imaginons un instant que dix, cinq, deux emplois - voire un seul emploi - doivent être supprimés et que le personnel, interrogé par le tribunal de commerce au moment de l'ouverture de la procédure, répond qu'il ne tolérera pas un seul licenciement et demande donc au tribunal de refuser le déclenchement de la procédure. Ce serait la mort du système de la sauvegarde ! Je l'ai déjà dit, le fond du débat, c'est que l'on ne parle pas de la même chose, et c'est bien là le problème. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Le Gouvernement est également défavorable aux amendements nos 228 et 229.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 225.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 226.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 227.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Madame Nicole Borvo Cohen-Seat, l'amendement n° 228 est-il maintenu ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je le retire, mais je tiens à dire à M. le garde des sceaux qu'en effet nous ne parlons pas de la même chose, mais, nous, nous avons l'expérience de la façon dont sont traités les salariés quand les entreprises décident de fermer ! C'est à ce titre que nous demandons que les salariés soient informés et puissent eux-mêmes s'exprimer quand l'entreprise est en difficulté.

Je retire également l'amendement n° 229.

M. le président. Les amendements nos 228 et 229 sont retirés.

Je mets aux voix l'article 12, modifié.

(L'article 12 est adopté.)