M. Xavier Bertrand, ministre. L’amendement présenté par Dominique Tian et adopté en première lecture à l'Assemblée nationale le 10 juin visait à limiter la dépense d’AME en appliquant une tarification à l’activité.

Tout comme M. le rapporteur général, je souscris aux motifs de cette réforme, à savoir la nécessité d’une tarification équitable des soins dispensés dans le cadre de l’AME.

Il est exact que les hôpitaux facturent aujourd’hui de manière différente un même soin selon qu’il concerne un bénéficiaire de l’AME ou un assuré social « de droit commun ». Les établissements facturent en effet à l’assurance maladie les soins en AME sur la base de tarifs journaliers de prestations, lesquels sont sensiblement supérieurs aux tarifs utilisés pour la facturation des soins des assurés sociaux. (M. André Trillard marque son approbation.)

En outre, les tarifs journaliers de prestations sont très variables d’un établissement à l’autre et leur évolution annuelle n’a été encadrée que très récemment.

Cette situation doit évoluer, comme l’ont très clairement souligné dans leur rapport conjoint l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales, ainsi que, dans leur rapport d’information fait au nom du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, par Claude Goasguen et Christophe Sirugue.

Pour autant, nous pensons qu’il faut revoir la rédaction actuelle de l’article, qui soulève deux difficultés.

D’une part, elle implique une mise en place immédiate de la réforme de tarification, ce qui ne me semble pas souhaitable, car il faut préalablement modifier la chaîne de facturation et faire évoluer les systèmes d’information.

D’autre part, aucune mesure d’accompagnement n’est prévue pour les établissements de santé. Or les deux rapports que j’ai mentionnés préconisent une mise en place progressive de la réforme sur deux ou trois ans, afin d’en atténuer les effets sur les comptes des hôpitaux. Ne nous voilons pas la face : si l’on modifie immédiatement la tarification, il nous faudra bien évidemment compenser le surcoût pour les hôpitaux.

Le Gouvernement vous propose donc, mesdames, messieurs les sénateurs, d’adopter une version modifiée de l’article 18 bis, qui préserverait l’objectif de la réforme, à savoir une tarification alignée sur celle des assurés sociaux pris en charge par l’assurance maladie, tout en prenant en compte la situation spécifique des bénéficiaires de l’AME.

Contrairement aux craintes exprimées ici ou là, la modification des systèmes d’information pourra se faire assez rapidement, d’ici au 1er décembre 2011. Et, comme l’ont préconisé les auteurs des rapports précités, cette réforme sera mise en place progressivement, sur trois ans, pour ne pas déstabiliser les établissements de santé.

En résumé, mesdames, messieurs les sénateurs, nous restons fidèles à la réforme, mais nous privilégions dans le choix des modalités une approche pragmatique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission vous suivra dans cette approche réaliste, monsieur le ministre.

Je souhaiterais toutefois vous poser quelques questions complémentaires.

Avec ce nouveau dispositif, quel est l’ordre de grandeur de l’économie réalisée par l’État par rapport au droit existant ? Car, si je comprends bien – je n’ai pas la dextérité de notre excellent collègue Alain Vasselle sur ces sujets de financement de l’assurance maladie ! –, l’alignement sur le droit commun ne serait que partiel, avec la création d’un nouveau tarif spécifique.

Je rappelle également à Mme Bricq que ce dispositif ne concerne pas directement les personnes défavorisées qui bénéficient de l’AME, mais le financement des établissements de soins qui répondent à leurs demandes.

Mme Nicole Bricq. C’est bien ainsi que je l’avais compris !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous savons bien que, dans nos établissements hospitaliers, quelle que soit notre condition sociale, nous sommes traités de la même façon. (Mme Nicole Bricq en doute.)

M. le président. L'amendement n° 43, présenté par Mme Dini, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

II. - Le I est applicable à compter du 1er mars 2012.

La parole est à Mme Anne-Marie Payet, au nom de la commission des affaires sociales.

Mme Anne-Marie Payet, au nom de la commission des affaires sociales. Mme Muguette Dini, que je souhaite excuser, car elle a dû rentrer dans son département, a déjà amplement présenté le contexte dans lequel elle a déposé cet amendement lors de son intervention dans la discussion générale.

Il s’agit de décaler au 1er mars 2012 l’entrée en vigueur d’une mesure que nous soutenons dans son principe, mais qui a des incidences financières fortes pour certains hôpitaux.

Cet amendement de précaution par rapport à la rédaction résultant des travaux de l’Assemblée nationale, deviendra sans objet si l’amendement précédent est adopté. Je souhaite donc faire quelques remarques sur la réforme proposée ici par le Gouvernement.

Tout d’abord, nous sommes étonnés que cette modification importante de la tarification hospitalière trouve sa place dans un collectif budgétaire, alors qu’elle touche le code de la sécurité sociale et la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004. Une réforme de cette nature aurait mérité un débat approfondi dans les deux chambres à l’occasion de l’examen d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale. D’ailleurs, on aurait peut-être pu l’intégrer dans le premier projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale que nous sommes justement en train d’examiner…

Sur le fond, que de complications ! Plutôt que d’appliquer aux patients bénéficiant de l’AME le même tarif hospitalier que pour tout un chacun, le Gouvernement souhaite créer un nouveau barème spécifique, propre à ce type de patients.

Cela est fondamentalement contraire à la logique de la tarification à l’activité et à la convergence que la commission soutient depuis de nombreuses années : le tarif est censé correspondre à un acte et non à un patient.

Qui plus est, la T2A a pris en compte les situations spécifiques et les charges particulières de certains établissements, puisque nous avons créé les missions d’intérêt général et à l’aide à la contractualisation, les MIGAC, enveloppe de dotations destinées à financer les missions d’intérêt général et certaines aides. L’une de ces dotations est précisément destinée à la prise en charge de personnes en situation de précarité.

Monsieur le ministre, pourquoi ne pas appliquer le tarif normal et relever les MIGAC pour compenser la perte de recettes aux établissements ? J’ai bien peur que la commission des finances, si sourcilleuse quand il s’agit du budget de l’État, ne s’interroge comme nous sur ce choix.

En entrant un peu plus dans le détail du dispositif, le nouveau tarif sera un « mix » entre deux tarifs existants, auquel sera ajoutée une pincée de coefficient correcteur dont la définition est pour le moins vague : il doit « permettre la prise en compte des spécificités liées à l’accueil et à la prise en charge des patients ».

En outre, la facturation devra tenir compte, mais on ne sait ni dans quel sens ni comment, des spécialités pharmaceutiques et du forfait journalier.

Enfin, on applique à tout cela un coefficient de transition sur une courte période, puisqu’il devrait disparaître au 1er mars 2013, date habituelle de renouvellement de la tarification hospitalière. À cet égard, il est là aussi singulier de créer ce tarif au 1er décembre prochain, trois mois seulement avant l’actualisation annuelle générale.

Monsieur le ministre, les caisses de sécurité sociale et l’ensemble des établissements de santé devront en conséquence modifier, d’ici au 1er décembre prochain, leur système comptable et de facturation pour intégrer un nouveau tarif totalement spécifique et qui concernera peu de personnes par rapport à l’ensemble de leurs patients.

Avez-vous chiffré le coût que cela va représenter pour eux ? Quels sont les dotations ou les crédits prévus pour financer les prestataires informatiques ?

Voilà les remarques que nous souhaitions formuler sur cet amendement : la commission était favorable à la poursuite de la convergence tarifaire et à la transparence. Nous gâchons certainement une occasion de progresser sur cette voie.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission propose très respectueusement à Mme Payet de bien vouloir se rallier à l’amendement du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement demande le retrait ou, à défaut, il émettra un avis défavorable. Puisque, en définitive, on est capable de le faire au 1er décembre 2011, pourquoi attendre mars 2012 ? On peut le faire plus tôt !

Mme Nicole Bricq. Vous croyez qu’on aura oublié d’ici là !

M. le président. Madame Payet, l'amendement n° 43 est-il maintenu ?

Mme Anne-Marie Payet, au nom de la commission des affaires sociales. Je le maintiens, monsieur le président, même s’il devient sans objet.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 238.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 18 bis est ainsi rédigé et l’amendement n° 43 n’a plus d’objet.

La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur le rapporteur général, l’économie réalisée sera de 150 millions d'euros sur trois ans, et, dès 2012, de 50 millions, voire de 60 millions d'euros.

Article 18 bis (nouveau) (précédemment réservé)
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2011
Articles additionnels après l'article 23

Article 23

Le Gouvernement est autorisé à participer à la révision générale des quotes-parts des pays membres du Fonds monétaire international qui a été approuvée par la résolution du conseil des gouverneurs de cette institution en date du 15 décembre 2010.

Le montant de la quote-part de la France dans le Fonds monétaire international est porté de 10 738,5 millions de droits de tirage spéciaux à 20 155,1 millions de droits de tirage spéciaux. – (Adopté.)

Article 23
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Article 24 (nouveau)

Articles additionnels après l'article 23

M. le président. L'amendement n° 96, présenté par MM. Foucaud et Vera, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Après l’article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 septembre 2011, un rapport sur les conséquences de l’application de la révision générale des politiques publiques dans l’éducation nationale.

La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Nous en sommes bien conscients, cet amendement tombe un peu par hasard à ce stade du débat, mais il n’est toutefois pas inutile de revenir sur les questions qu’il soulève.

Nous savons pertinemment que les parlementaires peuvent, au titre de l’exercice de leurs prérogatives, procéder, en tant que de besoin, au contrôle de l’action du Gouvernement et que ce contrôle participe notamment du suivi des engagements budgétaires de l’État, c’est-à-dire de l’utilisation effective des crédits ouverts en loi de finances initiale.

Seulement voilà, depuis quelques années et singulièrement depuis le début de la législature, nous sommes entrés dans une vaste entreprise de révision générale des politiques publiques qui, sous les apparences de la modernité, ne fait que consacrer la réduction constante des dépenses publiques.

D’ailleurs, plutôt que de « révision générale des politiques publiques », on devrait parler de « rétrécissement général des pouvoirs du Parlement », étant donné que les logiques gestionnaires actuellement à l’œuvre font peu de cas des votes du Parlement, la responsabilité essentielle étant laissée aux seuls gestionnaires, et ce dans le seul objectif avoué de tenir, coûte que coûte, la norme « zéro volume » d’évolution des dépenses publiques.

On pourrait parler de l’éducation nationale, victime de plus de 60 000 suppressions d’emplois sur la législature, des centaines d’écoles rurales et des sections entières de collèges ou de lycées professionnels qui ont été fermées.

Pendant ce temps-là, on le sait, le ministre de l’éducation parle de « rationalisation », d’« efficacité », de « performance » et je ne sais encore quel autre vocable issu du sabir des directeurs de ressources humaines de groupes industriels transnationaux.

Je serais tenté de dire que c’est le pyromane qui crie au feu !

Notre amendement vise donc, par la mise à plat des éléments de la RGPP dans le secteur de l’éducation, à donner à chacun les éléments de mesure des effets des politiques menées.

Ce rapport spécifique serait d’ailleurs une utile contribution au débat ouvert par de nombreux travaux parlementaires – y compris ceux de la mission commune du Sénat – sur la révision générale des politiques publiques.

C’est pourquoi nous vous invitons toutes et tous à voter cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission émet un avis tout à fait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 96.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 156, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l’article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Dans le cadre des procédures de sélection des établissements bancaires et financiers, auprès desquels l'État pourrait contracter une ligne de trésorerie ou un emprunt bancaire, ou à qui il confierait un rôle d'arrangeur dans le cadre d'une émission obligataire, ou un rôle d'établissement contrepartie dans le cadre d'une opération de gestion de dette, l'État demande aux établissements de préciser leur situation ou celle des entités dans lesquelles ils possèdent une participation majoritaire au regard de la liste des États et territoires non coopératifs, telle que définie par arrêté ministériel, chaque année au 1er janvier, en application du deuxième alinéa du 1 de l'article 238-0 A du code général des impôts, ainsi que les procédures et outils dont ils se sont dotés pour lutter contre le blanchiment, la corruption et la fraude fiscale.

Ces éléments sont pris en compte dans le choix de l'établissement à retenir. Dès que la réglementation applicable à l'achat de prestations de services financiers en ouvre la possibilité, l'État refuse de prendre en considération les offres ou propositions de services présentées par des organismes bancaires ou financiers qui, pour l'application du précédent alinéa, ont déclaré exercer eux-mêmes ou par un organisme dont ils détiennent une participation majoritaire, une activité dans les États ou territoires figurant sur la liste prévue à l'article 238-0 A du code général des impôts.

II. – L'État demande aux établissements avec lesquels il a contracté, de présenter annuellement, au plus tard six mois après la reddition de leurs comptes annuels, un état, pays par pays, portant information :

1° du nom de toutes leurs implantations dans les pays où ils sont présents ;

2° du détail de leurs performances financières, y compris :

- les ventes, à la fois à des tiers et à d'autres filiales du groupe ;

- les achats, répartis entre les tiers et les transactions intra-groupes ;

- la masse salariale et le nombre d'employés ;

- les coûts de financement, y compris les paiements de facilitation, partagés entre ceux payés aux tiers et ceux payés aux autres membres du groupe ;

- le bénéfice avant impôt ;

3° des charges fiscales détaillées incluses dans leurs comptes pour les pays en question ;

4° du détail du coût et de la valeur comptable nette de leurs actifs physiques fixes ;

5° du détail de leurs actifs bruts et nets.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Je dépose cet amendement à l’occasion de la discussion de chaque projet de loi de finances, mais j’ai cru comprendre que M. le ministre était très attaché à la lutte contre la fraude fiscale sous tous ses aspects. Il a raison, nous l’avons toujours soutenu dans cette volonté.

Cet amendement vise à exiger la transparence de la part des établissements bancaires et financiers contractant avec l’État.

Il tend à instaurer une obligation de comptabilité, pays par pays, pour tous les partenaires bancaires et financiers de l’État et il a évidemment un lien avec la liste, établie chaque année par le gouvernement français, des territoires considérés comme « non coopératifs », au sens de la convention de l’OCDE, avec lesquels la France n’a pas de convention d’assistance administrative.

Cet amendement vise à ce que les banques ou les établissements financiers qui traitent avec l’État fournissent une comptabilité pays par pays dans tous les territoires où ils sont présents, y compris dans ces territoires non coopératifs, en précisant leur chiffre d’affaires, leurs résultats, leurs effectifs et les impôts qu’ils ont payés.

Cela permettrait à l’État d’avoir un bon moyen de pression pour faire rentrer ces établissements dans le rang. C’est une copie d’un dispositif assez voisin introduit dans la loi FATCA, ou Foreign Account Tax Compliance Act – aux États-Unis.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. L’intention est louable, elle peut être partagée, mais, surtout à cette heure-ci, nous sommes hésitants, parce qu’il peut en résulter un handicap de compétitivité pour les établissements bancaires français. Il faudrait pouvoir s’en assurer, ce que nous n’avons pas pu faire.

Donc, à ce stade, nous demandons le retrait de l’amendement.

Mme Nicole Bricq. Vous y viendrez !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Peut-être !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Défavorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 156.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 157, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l’article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 1er janvier 2012, le Gouvernement remet un rapport au Parlement sur les conditions de mise en œuvre d’une fusion progressive de l’impôt sur le revenu et de la contribution sociale généralisée. Ce rapport détaille notamment les possibilités d’un prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement – nous n’en avons pas demandé beaucoup dans ce projet de loi de finances rectificative, c’est le seul, me semble-t-il – relatif à la fusion de l’impôt sur le revenu avec la contribution sociale généralisée, la CSG.

Ce rapprochement peut poser des problèmes techniques, mais, pour nous, il est essentiel. Il figure dans le projet du Parti socialiste pour l’élection présidentielle, car il permet de rendre l’impôt sur le revenu plus juste, de lui redonner de la progressivité et d’en améliorer le rendement, sans augmenter la charge fiscale globale, grâce à une assiette plus large, débarrassée des niches fiscales.

C’est, du reste, la raison pour laquelle nous ne sommes pas favorables en l’état à l’instauration d’une tranche supérieure de l’impôt sur le revenu car, avec cette réforme, nous semble-t-il, on pourrait peut-être s’en passer.

Par ailleurs, ce rapprochement devrait s’accompagner d’un prélèvement à la source de cette imposition, pour correspondre au mieux à la situation fiscale du foyer et permettre de collecter plus efficacement l’impôt.

Nous demandons au Gouvernement s’il pourrait nous éclairer sur les conséquences d’un tel choix.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission émet un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. On peut toujours demander un rapport !

M. le président. Cela encourage la déforestation !

Mme Nicole Bricq. Et le recyclage, monsieur le président ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. On ne peut pas toujours dire non !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 157.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 23.

Articles additionnels après l'article 23
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2011
Article additionnel après l'article 24

Article 24 (nouveau)

I. – Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Le chapitre préliminaire du titre préliminaire du livre III est complété par un article L. 300-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 300-2. – Un Fonds national d’accompagnement vers et dans le logement est institué pour le financement d’actions d’accompagnement personnalisé de personnes reconnues prioritaires et auxquelles un logement doit être attribué en urgence, en application du cinquième alinéa du II de l’article L. 441-2-3, et d’actions de gestion locative adaptée de logements destinés à ces personnes, favorisant leur accès à un logement et leur maintien dans le logement.

« Le Fonds national d’accompagnement vers et dans le logement est administré par un comité de gestion, composé de représentants de l’État, qui fixe les orientations et répartit les crédits de ce fonds.

« La gestion de ce fonds est assurée par la Caisse de garantie du logement locatif social.

« Il est fait rapport une fois par an au ministre chargé du logement des actions financées par le fonds, en regard des moyens financiers engagés et des objectifs poursuivis.

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article, notamment la composition et les modes de désignation des membres du comité de gestion ainsi que les modalités de fonctionnement du fonds. » ;

2° Après le mot : « fonds », la fin du dernier alinéa des I et II de l’article L. 441-2-3-1 est ainsi rédigée : « national d’accompagnement vers et dans le logement, institué en application de l’article L. 300-2. » ;

3° L’article L. 452-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Elle gère le fonds institué par l’article L. 300-2. »

II. – Le produit des astreintes liquidées à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi est versé au Fonds national d’accompagnement vers et dans le logement mentionné à l’article L. 300-2 du code de la construction et de l’habitation.

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, sur l'article. (Marques d’impatience sur certaines travées.)

M. Thierry Foucaud. Si M. le ministre daignait nous répondre un peu plus souvent, nous aborderions le débat d’une autre manière !

La présence de cet article est pour le moins étonnante, à ce stade de la discussion.

Car enfin, mettre en place un dispositif qui tend à faire du produit de la condamnation de l’État pour non-respect de ses obligations, une source de financement, cela mérite réflexion !

Pour autant, la vraie question posée par les problématiques du logement social dans notre pays, c’est celle de l’insuffisance des constructions neuves, une insuffisance renforcée, d’ailleurs, par la réforme de l’épargne populaire et singulièrement du livret A.

Le livret d’épargne favori des Français, le livret A, a quitté il y a maintenant deux ans l’escarcelle de La Banque postale, de la Caisse d’épargne et du Crédit Mutuel.

Le livret A ayant été « libéralisé » dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie, ce changement de statut n’a pas été sans conséquences.

Hier, l’ensemble des dépôts des Français étaient gérés par la Caisse des dépôts et consignations. L’établissement public avait ensuite la charge de prêter cet argent aux organismes de logements sociaux, pour les aider à mener à bien leurs projets de construction, d’achat et de rénovation. Aujourd’hui, une part croissante des dépôts échappe à toute centralisation.

Une telle situation était prévisible et nous vous avions alertés sur cette question à l’époque.

Pourtant, aujourd’hui, et au regard de la crise du logement que traverse notre pays, nous ne pouvons plus nous permettre ce mauvais usage de l’épargne populaire.

En effet, les besoins en logements ne sont pas moins importants qu’en 2009 et, parallèlement, cette ressource n’est pas négligeable, puisque les dépôts cumulés représentaient une manne de près 204,3 milliards d’euros en avril dernier, soit le niveau le plus élevé jamais observé depuis le lancement du livret, il y a près de deux cents ans, et plus de 260 milliards d’euros s’il on ajoute les dépôts des livrets ex-CODEVI !

Au total, compte tenu des normes mises en œuvre, ce sont 80 milliards d’euros qui échappent à toute centralisation et qui restent dans les mains des collecteurs – en fait, les collecteurs autres que les réseaux historiques de La Poste et des Caisses d’épargne.

Le Gouvernement, au travers d’un décret récent, vient d’ailleurs de donner une chance supplémentaire à la dispersion de cette collecte, en fixant à 65 % le taux de centralisation, et cela en contrepartie, évidemment, d’une légère réduction du taux de rémunération de la collecte et des réseaux collecteurs. Cette mesure, bien entendu, frappera surtout ceux-là mêmes qui se sont vu imposer les obligations les plus fortes, à savoir les réseaux historiques.

Concrètement, alors que l’on détermine dans cet article la manière dont on va utiliser les quelques centaines de milliers d’euros que représentent les astreintes de l’État au regard du droit au logement opposable, on laisse filer dans les doigts des banquiers des milliards d’euros – de l’ordre de 10 à 12 milliards, tout de même ! – dont nous aurions bien besoin pour mener une véritable politique du logement social.

Nous rejetons cette politique de Gribouille et de dilapidation de l’épargne populaire, d’autant que la survie du service postal de proximité est, pour une bonne partie, liée à la rémunération de La Poste pour la collecte du livret A.

Telles sont les observations que nous souhaitions vous livrer, mes chers collègues, à ce stade de la discussion.