M. le président. Je mets aux voix l'ensemble constitué par l’article 21 et l’état C annexé.

(L'article 21 et l’état C sont adoptés.)

Article 21 et état C annexé
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2012
Article 23 (début)

Article 22 et état D annexé

I. – Il est ouvert aux ministres, pour 2012, au titre des comptes d’affectation spéciale, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement supplémentaires s’élevant à 1 065 097 693 €, conformément à la répartition par programme donnée à l’état D annexé à la présente loi.

II. – Il est annulé pour 2012, au titre des comptes d’affectation spéciale des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant à 4 866 397 693 €, conformément à la répartition par programme donnée à l’état D annexé à la présente loi.

III. – Il est annulé, pour 2012, au titre des comptes de concours financiers, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant, respectivement, à 3 839 150 000 € et 7 716 150 000 €, conformément à la répartition par mission et programmes donnée à l’état D annexé à la présente loi.

État D

RÉPARTITION DES CRÉDITS POUR 2012 OUVERTS ET ANNULÉS, PAR MISSION ET PROGRAMMES, AU TITRE DES COMPTES SPÉCIAUX

COMPTES D’AFFECTATION SPÉCIALE

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d’engagement supplémentaires ouvertes

Crédits de paiement supplémentaires ouverts

Autorisations d’engagement annulées

Crédits de paiement annulés

Participation de la France au désendettement de la Grèce

198 700 000

198 700 000

Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre

198 700 000

198 700 000

Rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France

0

0

Participations financièresde l’État

4 000 000 000

4 000 000 000

Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

4 000 000 000

4 000 000 000

Pensions (ligne nouvelle)

866 397 693

866 397 693

866 397 693

866 397 693

Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité (ligne nouvelle)

866 397 693

866 397 693

866 397 693

866 397 693

Dont titre 2 (ligne nouvelle)

866 397 693

866 397 693

Totaux

1 065 097 693

1 065 097 693

4 866 397 693

4 866 397 693

COMPTES DE CONCOURS FINANCIERS

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d’engagement supplémentaires ouvertes

Crédits de paiement supplémentaires ouverts

Autorisations d’engagement annulées

Crédits de paiement annulés

Avances aux organismesde sécurité sociale

               

                 

3 378 150 000

3 378 150 000

Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de TVA prévue au 3° de l’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale

1 431 000 000

1 431 000 000

Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de TVA prévue au 9° de l’article L. 241-6 du code de la sécurité sociale

1 593 150 000

1 593 150 000

Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de TVA affectée aux organismes de sécurité sociale par l’article 53 de la loi de finances pour 2008

354 000 000

354 000 000

Prêts à des États étrangers

461 000 000

4 338 000 000

Prêts aux États membres de l’Union européenne dont la monnaie est l’euro

461 000 000

4 338 000 000

Totaux

3 839 150 000

7 716 150 000

M. le président. Je mets aux voix l'ensemble constitué par l’article 22 et l’état D annexé.

(L'article 22 et l’état D sont adoptés.)

TITRE II

AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2012. – PLAFONDS DES AUTORISATIONS D’EMPLOIS

Article 22 et état D annexé
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2012
Article 23 (interruption de la discussion)

Article 23

La seconde colonne du tableau du second alinéa de l’article 69 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 est ainsi modifiée :

1° À la deuxième ligne, le nombre : « 1 922 505 » est remplacé par le nombre : « 1 924 029 » ;

2° À la quatrième ligne, le nombre : « 31 789 » est remplacé par le nombre : « 31 806 » ;

3° À la dixième ligne, le nombre : « 953 353 » est remplacé par le nombre : « 954 860 » ;

4° À la dernière ligne, le nombre : « 1 934 490 » est remplacé par le nombre : « 1 936 014 ».

M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage, sur l'article.

Mme Claudine Lepage. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’enseignement était au cœur du programme de François Hollande et il se trouve aujourd’hui au centre de l’action du Gouvernement.

Dès la rentrée 2012, cette priorité donnée à l’éducation se traduira par la création, notamment, de 1 000 postes de professeur des écoles, 1 500 emplois d’auxiliaire de vie scolaire et 2 000 postes d’assistant d’éducation. Tel est l’objet de l’article 23 du projet de loi de finances rectificative.

Faut-il rappeler que l’éducation nationale a été, depuis 2007, par la volonté du précédent gouvernement, le principal « contributeur » à la politique de réduction de l’emploi public ? Le ministère avait alors beau jeu d’expliquer que, compte tenu de l’évolution démographique, les taux d’encadrement demeuraient équivalents. Nous savons bien que les moyennes ne permettent pas de rendre compte de la réalité de la vie quotidienne des classes. Il s’agit donc ici de réparer la casse qu’a eu à subir notre école.

Nous ne pouvons que nous féliciter de cette perspective, d’autant que le Gouvernement concilie responsabilité budgétaire et ambition pédagogique. Mais – car il y a un mais –, en ma qualité de sénatrice des Français de l’étranger, permettez-moi de nourrir une certaine frustration, doublée d’une inquiétude certaine. Cette augmentation des plafonds des emplois titulaires est répartie sur l’ensemble du territoire métropolitain et ultra-marin. Mais alors, qu’en est-il du réseau de l’enseignement français à l’étranger ? L’aurait-on oublié ?

Certes, les Français de l’étranger doivent participer, comme tous leurs concitoyens, et en fonction de leurs capacités respectives, à l’effort collectif demandé pour redresser notre pays. C’est une évidence, et cette communauté ne doit bénéficier d’aucun régime de faveur ; elle ne le demande d’ailleurs pas. Il me semble au demeurant que plusieurs dispositions du présent projet de loi confirment pleinement cette réalité.

Néanmoins, en y regardant de près, il n'est pas question, s’agissant du réseau d’enseignement français à l’étranger, de stabilité : on observe bel et bien une réduction du taux d’encadrement des classes par des enseignants titulaires. Comme le rappellera certainement mon collègue Jean-Yves Leconte quand il défendra l’amendement que j’ai cosigné avec Richard Yung, la fréquentation des établissements français à l’étranger augmente régulièrement : ils accueillent chaque année de 3 000 à 5 000 élèves supplémentaires. Pourtant, le plafond d’emploi des enseignants titulaires détachés ne suit pas la même pente, loin de là ! Alors même que le rapport final de la commission sur l’avenir de l’enseignement français à l’étranger, rendu à l’été 2008, préconisait une proportion de 50 % de professeurs titulaires de l’éducation nationale.

Il n’est pas question de nier l’apport que constitue la présence d’enseignants « recrutés locaux » au sein d’une équipe éducative. Cependant, un point doit être clairement affirmé : il faut garder un taux minimal d’enseignants résidents, dans le souci d’assurer le maintien de la qualité, mais aussi de la spécificité de notre enseignement. En effet, nous devons conserver l’attrait de notre réseau pour les élèves étrangers, afin que celui-ci puisse pleinement remplir son autre mission : faire rayonner notre culture. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – MM. Christian Cointat et Christophe-André Frassa applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Les dispositions de cet article 23 concrétisent, en autorisations d’emplois, une partie des crédits qui sont redistribués en faveur de l’enseignement et destinés à financer des mesures d’urgence pour la rentrée 2012. Elles sont évidemment les bienvenues puisque la loi de finances initiale avait programmé pour cette prochaine rentrée 14 000 nouvelles suppressions de postes, dont 12 250 d’enseignants.

En cinq années d’exercice, 70 600 postes auront été supprimés à l’éducation nationale, dont 68 000 d’enseignants !

Nous savons à quel point cette politique a déstructuré et dénaturé le service public de l’éducation, ses missions et sa visée, mais aussi bouleversé le métier des enseignants et de l’ensemble des personnels agissant à leurs côtés. Ces dispositions, bien qu’elles ne représentent qu’une augmentation toute relative du nombre des postes d’enseignant, doivent donc être saluées.

Je me félicite également des mesures d’aménagement de services pour les étudiants stagiaires, tout en souhaitant exprimer ici une crainte concernant la situation des futurs stagiaires : nous ignorons si la mise en place des décharges horaires – trois heures pour les certifiés et les agrégés, six heures pour les conseillers principaux d’éducation –, rappelée dans la circulaire du ministre de l’éducation nationale du 3 juillet dernier, sera effective.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous garantir que ce cadrage national sera respecté intégralement pour tous les stagiaires, dans tous les rectorats et en toute transparence ?

De plus, je tiens à faire part ici d’un regret : que ce collectif budgétaire n’ait pas été aussi l’occasion d’adresser un signal fort face à la crise aigue de recrutement que connaît l’éducation nationale.

Sans revenir dans le détail sur l’échec manifeste de la réforme de la mastérisation, je veux souligner l’une de ses conséquences : le terrible assèchement du vivier de recrutement. Nous vivons à cet égard une crise considérable, qui risque de s’amplifier et que l’on ne peut plus ignorer. Les résultats des concours de 2012 au CAPES et à l’agrégation en témoignent de nouveau cette année : 1 100 postes d’enseignants du second degré – budgétés en loi de finances initiale – ne seront pas pourvus ! C’est plus encore qu’en 2011, une année où, déjà, 976 postes avaient été perdus.

Compte tenu des très faibles marges de manœuvre, notamment en moyens de remplacement, ces chiffres laissent craindre les plus grandes difficultés sur le terrain pour la prochaine année scolaire, alors que 25 000 élèves supplémentaires sont attendus dans le secondaire. L’amorce, même modeste, dès cet été, d’un dispositif de pré-recrutement avant la clôture des inscriptions aux concours de 2013, le 19 juillet dernier, aurait constitué ce signal fort à adresser aux étudiants se destinant au métier d’enseignant.

Cela aurait pu se faire, par exemple, sur la base de la constitution de listes complémentaires de candidats par les jurys de CAPES, d’autant que l’on sait que les « non-admis » constitueront très certainement le gros du bataillon des contractuels mobilisés en urgence au cours de l’année pour assurer les remplacements d’enseignants titulaires !

Cette crise du vivier de recrutement revêt d’ailleurs encore plus d’acuité si l’on examine en parallèle l’évolution démographique du corps enseignant.

Ainsi, entre 2012 et 2016, selon les prévisions de la direction générale des ressources humaines de l’éducation nationale, les départs définitifs, essentiellement à la retraite, représenteront en moyenne, chaque année, premier et second degrés confondus, environ 18 500 ETP.

C’est pourquoi je demande de nouveau au Gouvernement de dresser un état des lieux précis et circonstancié sur cette question, notamment en ce qui concerne les départs à la retraite, par cycle et par discipline, à cinq, dix et quinze ans, ainsi que les besoins futurs de recrutement, en termes à la fois quantitatifs et qualitatifs.

L’occasion d’amorcer dès ce collectif budgétaire des pré-recrutements, dont le principe avait été porté par le futur Président de la République lors de sa campagne, a été manquée, et je le regrette.

Si l’on ne veut pas prendre une nouvelle année de retard dans le traitement de cette crise de recrutement, je souhaite donc, monsieur le ministre, que le principe d’un pré-recrutement, des modalités duquel il faudra évidemment débattre, soit inscrit dans la loi de finances pour 2013.

M. le président. La parole est à M. Pierre Bordier, sur l'article.

M. Pierre Bordier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en tant que membre de la commission de la culture et de l’éducation, je tiens à dénoncer l’irréalisme et l’imprécision des mesures proposées au travers de cet article.

Vous supprimez la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux dans l’éducation nationale, malgré l’aggravation du déficit de l’État. Pour rendre réalisable votre promesse de 13 000 créations de postes par an dans la police, la justice, la gendarmerie et l’éducation nationale, vous en arrivez à appliquer une RGPP bien plus stricte, à savoir le non-renouvellement de deux fonctionnaires sur trois dans les autres ministères, que, selon , vous jugez « non prioritaires », pour reprendre vos propres termes.

Que n’aurions-nous entendu si le précédent gouvernement avait agi de la sorte ! Et tout cela dans une imprécision totale sur la manière dont cette règle sera appliquée dans ces administrations. Qu’en sera-t-il pour le ministère du travail et de l’emploi ? Pour la défense, les affaires étrangères, la culture ?

Par ailleurs, comment les chiffres des créations de postes dans l’éducation nationale ont-ils été calculés, que ce soit pour la rentrée prochaine ou pour l’ensemble du quinquennat ? Là également, nous sommes dans le flou. Le chiffre de 60 000 postes d’enseignants martelé pendant la campagne électorale est censé correspondre au rétablissement du remplacement des départs à la retraite pour l’ancien et le futur quinquennat.

Je soulève cette question car des chiffres différents ont été évoqués lors des travaux d’une mission d’information de notre commission, dont le rapporteur était Mme Gonthier-Maurin, et qui a eu pour objet le métier d’enseignant.

Mme Gonthier-Maurin a estimé que, si l’on restaurait les 60 000 postes non renouvelés par le précédent gouvernement et que l’on remplaçait les départs à la retraite sur cinq ans, on arriverait à 150 000 postes. Ce chiffre a suffisamment gêné les sénateurs de la nouvelle majorité pour qu’il disparaisse de la version proposée en commission !

Par ailleurs, par pure volonté d’affichage, vous prévoyez des créations de postes dès la rentrée prochaine, alors que ce n’est pas réalisable, en tout cas dans de bonnes conditions.

Les objectifs visés par l’article 23 peuvent sembler louables : qui ne souhaiterait davantage d’auxiliaires de vie scolaire pour les élèves handicapés, ou davantage de RASED pour les élèves en difficulté ?

Le problème est que ces créations de postes se font en dépit du bon sens. Dans quels établissements allez-vous affecter ces personnels ? Iront-ils réellement là où sont les besoins ? Ils seront plutôt affectés, me semble-t-il, là où vous pourrez recruter. Ici encore, nous sommes dans le flou !

Avez-vous oublié que, cette année encore, certains jurys de concours de l’enseignement ont été dans l’impossibilité de pourvoir la totalité des postes disponibles ? Il y a des besoins, mais il n’y a pas assez de candidats.

Alors, comment allez-vous trouver les personnels que vous souhaitez recruter ? Dans un tel contexte, je doute que leur profil corresponde aux besoins. Dans les zones prioritaires, par exemple, les établissements ont besoin d’enseignants expérimentés. Lors d’une récente mission sur la carte scolaire à laquelle j’ai participé, nous sommes tous convenus que des néo-titulaires ne devaient pas occuper ces postes difficiles. Je pense que, malheureusement, vous ne pouvez pas aujourd’hui prendre l’engagement de ne pas avoir recours à de nouveaux diplômés !

Enfin, et ce point me semble particulièrement important, la création de postes que vous envisagez va immanquablement provoquer un gel des salaires. Je rappelle que, sous le gouvernement précédent, la moitié des gains provenant de la politique de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite a été dédiée à des augmentations de salaires. Nous sommes en effet convaincus que l’amélioration de notre système éducatif passe par la revalorisation du métier d’enseignant et, par voie de conséquence, par une augmentation des traitements plutôt que par des créations de postes. (M. Alain Néri proteste.)

Par ailleurs, chers collègues de la majorité, comme vous venez d’adopter l’article 2 et le rétablissement de l’imposition des heures supplémentaires, le pouvoir d’achat des enseignants ne pourra pas être maintenu à son niveau actuel. Je rappelle que 56 % des enseignants effectuent des heures supplémentaires. J’imagine leur désillusion : vous les avez tout simplement abusés !

Les membres du groupe UMP refuseront de s’associer à votre politique d’aggravation du déficit et d’atteinte au pouvoir d’achat des enseignants. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette, sur l'article.

M. Jean-Étienne Antoinette. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer l’ouverture de postes engagée par le Gouvernement. Face à la saignée opérée sans discernement par le gouvernement précédent, cette mesure est un premier signe encourageant des priorités données par la nouvelle équipe au pouvoir.

Même s’il ne s’agit que d’une atténuation de l’affaiblissement de l’encadrement éducatif, les postes supplémentaires attribués à la Guyane – quinze pour l’enseignement public et deux pour l’enseignement privé sous contrat – sont plus que nécessaires.

Le système scolaire guyanais se heurte manifestement à des difficultés inconnues dans les autres académies. Je rappellerai quelques chiffres pour illustrer mon propos. Cette année, l’écart constaté entre le taux de réussite aux baccalauréats général et professionnel à l’échelon national et dans l’académie de Guyane s’élève à quinze points ; il atteint même plus de 25 points pour ce qui concerne l’ensemble des filières technologiques. Quant au brevet des collèges, la différence est de presque 11 points. Tel est le fossé entre les résultats guyanais et nationaux !

Il existe donc en Guyane un problème manifeste de réussite scolaire, dont la violence scolaire se fait le reflet. Le climat au sein des établissements ne cesse de se dégrader : rackets, incivilités, violences verbales et physiques à l’encontre des enseignants comme des élèves, actes de dégradation sur le matériel pédagogique. Des postes d’assistant d’éducation seraient également bien nécessaires.

Mais les effectifs sont-ils seuls en cause ? En réalité, le problème paraît davantage structurel. Je vais illustrer ce point en me concentrant, comme le Gouvernement, sur l’enseignement primaire.

La proportion des élèves scolarisés dans le primaire qui se trouvent en zone d’éducation prioritaire s’établit à 60 % en Guyane, contre 4 % en métropole. Or, malgré la mise en place de réseaux ambition réussite et réussite scolaire, aux termes des évaluations nationales, les résultats obtenus en Guyane se situent très en deçà de ceux qui sont enregistrés en métropole : seuls 30 % des élèves maîtrisent le socle commun de connaissances, contre 75 % en métropole.

Alors que les effectifs scolaires stagnent en métropole, ils progressent de 3,7 % par an dans mon département. L’augmentation démographique laisse supposer que la population âgée de moins de 20 ans aura doublé en 2040. Comment accueillir tous ces nouveaux élèves ?

Ces dernières années, deux écoles maternelles et trois écoles primaires ont été construites. Sur ce point encore, la spécificité guyanaise apparaît : 60 % de nos écoles ont plus de dix classes, contre 12 % en métropole.

Le problème des locaux se pose clairement, non seulement pour les primo-scolarisés, mais aussi pour les internes des collèges ou encore pour les redoublants de terminale. Or les locaux sont tributaires des finances des collectivités territoriales et de celles de l’État. Faut-il que l’on organise en Guyane une classe le matin et une autre l’après-midi pour pallier le manque de capacités d’accueil ? Certains pays émergents ont recours à une telle pratique. Il faudrait toutefois, pour cela, consentir à augmenter à terme le corps enseignant de 10 % à 25%.

La non-scolarisation dans le primaire est une autre particularité malheureuse de la Guyane : elle concerne 4 % des enfants et cette proportion atteint 7 % lorsque les parents sont inactifs. Chaque année, 5 000 enfants se trouvent ainsi dans cette situation.

En fait, c’est peut-être l’offre pédagogique qui doit être aménagée. Actuellement, l’enseignement en langue maternelle établissant le lien avec le français, langue de scolarisation, n’est pas assez développé pour faire barrage à l’échec de la scolarisation. Le temps consacré à l’enseignement en langue maternelle dépasse rarement trois demi-heures par semaine, à condition toutefois que l’établissement puisse le délivrer. Or, dans les espaces isolés guyanais, on trouve fréquemment des élèves français non francophones, cas de figure ayant disparu depuis les années cinquante dans l’Hexagone. Néanmoins, lorsqu’une telle situation apparaît en métropole, l’enseignement est capable d’emmener l’élève de sa culture propre vers la culture du pays d’accueil ; sur le territoire des Amérindiens ou des Bushinengués, descendants des noirs marrons, c’est l’enseignant qui est étranger au monde dans lequel il enseigne.

Des expériences de transition entre un enseignement en langue maternelle et un enseignement en langue française comportant des références au milieu et au mode de vie des élèves ont déjà été tentées, tout en consolidant la première expérience de langage de ces jeunes populations, afin de construire un bilinguisme dans une école moins étrangère.

Mais les obstacles sont nombreux : la reconduction des budgets en faveur de ces médiateurs culturels, leur statut en tant qu’intervenants en langue maternelle, la difficulté de les former pédagogiquement et la pérennisation du dispositif sont autant de sujets qui nécessitent un travail urgent, tant à l’échelon du rectorat de Guyane qu’à celui du ministère.

Je souhaite vivement que l’effort consacré par le Gouvernement à la petite enfance et à l’école primaire soit adapté à la diversité des situations (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. le président. L'amendement n° 113, présenté par M. J.C. Gaudin et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Fabienne Keller.

Mme Fabienne Keller. Nous proposons de supprimer l’article 23. En effet, selon nous, soit c’est trop, soit c’est trop peu. Trop peu s’il s’agit de respecter la promesse électorale évoquée par nos collègues de la majorité dans leurs interventions liminaires, à savoir mener une grande réforme de l’enseignement, dédier de nouveaux moyens aux élèves en difficulté, assurer une meilleure formation des enseignants, disposer d’enseignants spécialisés.

Nous sommes tous d’accord pour promouvoir un projet ambitieux pour l’école. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Promis par François Hollande, il a même été chiffré : 60 000 postes.

Or qu’en est-il en réalité ? Sont prévus ici 1 524 équivalents temps plein : un millième de la promesse de François Hollande… Il faudra donc attendre vingt ans pour qu’elle soit tenue !

Mme Frédérique Espagnac. Et vous, combien de postes avez-vous supprimé ?

M. Alain Néri. Vous, vous fermiez les portes, nous, nous les ouvrons !

Mme Fabienne Keller. Concrètement, quel est le projet ? J’imagine qu’auront lieu des concertations, des assises, des réflexions, des réunions de commissions, des états généraux… Pourtant, il y a urgence !

Comme l’a indiqué notre collègue de Guyane, il faut reconnaître le travail des acteurs des réseaux « ambition réussite », respecter les enseignants en améliorant leur rémunération. Et l’accompagnement des personnels d’encadrement est stratégique.

M. Jean-Marc Todeschini. Et leur formation !

Mme Fabienne Keller. Telles sont d’ailleurs les mesures qui ont été engagées par le précédent gouvernement.

M. Alain Néri. Pendant dix ans, vous avez tout cassé !

Mme Fabienne Keller. Quant aux jeunes enseignants, dont la formation, reconnaissons-le, mérite réforme, nous découvrons, dans l’exposé des motifs de l’article 23, que, dès la rentrée, trois heures de formation professionnelle leur seront ménagées. Encore faut-il les organiser ! Et, plus original, une décharge de six semaines est prévue les premières semaines de la rentrée. Tant pis pour les élèves, qui se débrouilleront comme ils le pourront jusqu’au milieu du mois d’octobre !

Mes chers collègues, pour toutes ces raisons, je vous propose de supprimer l’article 23. Mal préparé, il ne présente aucune stratégie claire et n’est qu’une réponse lilliputienne à une grande promesse, une réponse qui laisse donc présager une immense déception. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Néri. C’est comme Dalida : « Paroles, paroles ! »

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement a pour objet d’empêcher l’augmentation du nombre d’enseignants, élément essentiel à la mise en œuvre de la politique gouvernementale. L’article 23 prévoit de renforcer de 1 524 équivalents temps plein dans le corps enseignant. Ma chère collègue, vous voulez aller à l’encontre de cette orientation. C'est pourquoi j’émets, au nom de la commission des finances, un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Pour des raisons identiques, le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

M. Dominique de Legge. Vous venez de nous expliquer qu’il fallait attendre les mois de septembre et d’octobre pour statuer sur un certain nombre de sujets et qu’on allait voir ce qu’on allait voir… En l’espèce, on ne voit rien du tout ! En fait, on anticipe sur la grande stratégie qu’on ne verra sans doute jamais se déployer.

Monsieur le ministre, un certain nombre d’entre nous vous ont posé à plusieurs reprises la même question, mais nous n’avons toujours pas de réponse.