M. Jean-Pierre Sueur. C’est un peu simpliste !

M. François Zocchetto. Avec vous, six mois, c’est une litanie de plans sociaux : aujourd'hui, Doux, PSA, Candia ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Éliane Assassi. C’est vous !

M. François Rebsamen. PSA, c’est vous !

M. Jean-Pierre Godefroy. Ce sont vos plans sociaux !

M. François Zocchetto. Et demain, combien d’autres malheureusement, dont je tairai les noms, par respect pour les salariés concernés ? Six mois, c’est 20 milliards d’euros de prélèvements obligatoires de plus sur les entreprises, et donc sur l’emploi de demain ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UDI-UC.)

Pensiez-vous sincèrement que l’interminable conférence de presse du Président de la République, lequel n’a apporté aucune réponse claire, peut suffire à masquer l’inaction du Gouvernement ?

Où est le cap ? Où conduisez-vous la France ?

Plusieurs sénateurs du groupe UMP. Dans le mur ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. François Zocchetto. Le chômage a-t-il diminué ? En réalité, il ne cesse d’augmenter ! Plus de 3 millions de chômeurs aujourd'hui ! Que faites-vous ? Vous demandez du temps ; vous jouez la montre !

Certes, vous avez créé les emplois d’avenir et vous allez présenter un projet de loi instaurant les contrats de génération. Il est plus facile de faire baisser le chômage en recrutant des fonctionnaires qu’en soutenant les efforts des entreprises ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Avez-vous diminué la dépense publique ? Vous nous annoncez 50 milliards d’euros de réduction un jour, 60 milliards d’euros le lendemain !

M. François Zocchetto. Quelle est la vérité ? La vérité, c’est que vous ne nous dites jamais ce que vous allez faire, à part que vous voulez faire payer les riches ! En réalité, les millions de Français ont compris que vous aviez supprimé les avantages liés aux heures supplémentaires et à la participation salariale.

M. Christian Cointat. Absolument !

M. François Zocchetto. Quels sont les résultats ? La compétitivité de la France s’est-elle rétablie ? À la suite de la remise du rapport Gallois, vous annoncez 20 milliards d’euros de crédit d’impôt aux entreprises en 2014, alors que vous leur aurez entre-temps – en 2013 – ponctionné 20 milliards d’impôts supplémentaires.

M. François Patriat. Bouffonnerie !

M. François Rebsamen. Que leur avez-vous pris en dix ans ? L’espoir !

M. François Zocchetto. Est-ce ainsi que vous allez améliorer la situation des entreprises ? On a vraiment l’impression que le Gouvernement joue à la marelle avec l’avenir de nos concitoyens. Cette situation n’est pas acceptable !

M. Michel Vergoz. Vous jouez au professeur et vous êtes mal placé !

M. François Zocchetto. Où est le redressement dans la justice ?

Monsieur le ministre, où en serons-nous dans six mois ? Même nos amis allemands, à l’instar de nos concitoyens, commencent à douter de la France !

Vous l’avez compris, l’urgence sociale n’a jamais été aussi grande. Lors de sa conférence de presse, le Président de la République a souhaité vouloir « faire Nation ». Mais quand pensez-vous « faire réforme » ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur Zocchetto, j’ai bien fait de me méfier de votre compliment initial ! Quant à vous, vous auriez dû vous méfier de la réalité des chiffres et des faits.

M. Michel Sapin, ministre. Je suis tout prêt à parler des six mois ou de l’année à venir, dont nous avons – nous, et pas vous –la responsabilité.

Mais quand vous parlez des six mois écoulés, faites attention ! Pensez aux cinq années précédentes !

M. Michel Sapin, ministre. En effet, pour poser avec modestie et modération des questions sur le sujet extrêmement important de l’emploi, vous devriez avoir en tête ce premier chiffre : un million de chômeurs supplémentaires en cinq ans, sous la majorité que vous avez soutenue ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du groupe CRC.)

En d’autres termes, ni ceux qui ont dirigé hier ni ceux qui dirigent aujourd'hui ne doivent faire preuve de trop de certitudes et d’arrogance. (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. Michel Sapin, ministre. C'est la raison pour laquelle nous nous inscrivons, nous, dans l’action, dans la décision et même dans la mise en œuvre des décisions.

Permettez-moi de citer trois exemples.

J’évoquerai d’abord l’Europe, dont le ministre de l’économie et des finances a parlé et dont, en ce moment-même, le Premier ministre s’occupe, avec notre partenaire fondamental et privilégié : l’Allemagne.

M. Gérard Larcher. Très bien !

M. Michel Sapin, ministre. La remise en ordre et la réorientation de l’Europe, la sécurisation du système européen, la mise en œuvre du programme de croissance européen, c’est d’emploi qu’il s’agit !

Un pacte de compétitivité annoncé, dont une part est dès maintenant mise en œuvre, dont la partie relative au crédit d’impôt le sera dès le début de l’année prochaine, crédit d’impôt dont le financement interviendra dès l’année suivante, c’est encore d’emploi qu’il s’agit !

Enfin, la mise en œuvre des emplois d’avenir,…

M. Alain Gournac. Oh là là !

M. Michel Sapin, ministre. … l’instauration du contrat de génération – j’y reviendrai –, c’est encore d’emploi qu’il s’agit, et de l’emploi le plus précieux, monsieur le sénateur : celui des jeunes !

En effet, jamais il n’y a eu autant de jeunes sans emploi et sans formation,…

M. Alain Gournac. Et sans vrai travail !

M. Michel Sapin, ministre. … et cela résulte du double échec de votre majorité ! C’est la conséquence non pas de six mois, mais de vos dix ans de difficultés et de mise au ban de la société de la jeunesse de la France ! Et c’est à elle que nous nous adressons aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. Jean-Claude Lenoir. Rendez-vous dans un an !

M. Michel Sapin, ministre. Vous avez échoué au cours des cinq dernières années ; nous, nous réussirons lors des cinq prochaines ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines travées du groupe écologiste.)

MM. François Marc et François Rebsamen. Très bien !

pacte de compétitivité - croissance

M. le président. La parole est à M. Alain Richard.

M. Alain Richard. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances.

Monsieur le ministre, le Gouvernement a pris les décisions nécessaires pour assurer la croissance durable de notre pays, en rétablissant sa compétitivité.

Il nous présente un projet de loi de finances destiné à mettre fin à l’étouffement par la dette, qui se poursuivait depuis des années. Aux côtés du Président de la République, il agit pour achever la stabilisation du système financier européen, notamment le système public de supervision des banques.

Nous sommes nombreux à approuver la cohérence de cette stratégie et, comme les citoyens que nous représentons, nous sommes dans l’attente de ses résultats concrets : une croissance au rendez-vous, des comptes extérieurs équilibrés, de l’emploi et des ressources supplémentaires.

L’année 2013 présente à la fois des potentialités et des risques.

Les risques, tout le monde vous en parle ; je n’y reviendrai pas, monsieur le ministre.

Mais notre économie a ses points forts, que Louis Gallois a relevés. Dans tous les secteurs, de nombreux entrepreneurs – nous les rencontrons dans les départements – sont décidés à aller de l’avant. Nous prendrons notre part dans la croissance mondiale, comme les pays européens qui réussissent. Nos partenaires sociaux sont au travail pour trouver le soubassement social de cet effort collectif d’adaptation.

Vous avez en mains quatre leviers pour franchir positivement cette année de remontée vers la croissance : la consommation des ménages ; la qualité et l’innovation des entreprises, qu’il faut financer ; la conquête de marchés extérieurs ; l’investissement public et le logement. Vous les utilisez tous, avec des marges de manœuvre réduites et donc un impératif majeur de cohérence et de confiance.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous résumer la manière dont vous voulez piloter cette phase de contre-attaque de notre économie pour nous placer, à la fin de cette décisive année 2013, dans la situation de reprise solide qu’attendent les Français ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Francis Delattre. Merci pour la question !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Monsieur Richard, comme l’a fait Louis Gallois, j’aimerais moi aussi insister sur les points forts et les atouts de notre économie.

Vous n’êtes pas sans savoir que l’INSEE a annoncé ce matin les chiffres de la croissance française pour le troisième trimestre de cette année.

Peu d’économistes y croyaient, mais je l’avais pour ma part prédit : notre pays a connu au cours de ce troisième trimestre une croissance positive de 0,2 %, grâce notamment à la politique menée par le Gouvernement. Nous avons en effet soutenu la consommation intérieure et le pouvoir d’achat, qui sont les moteurs de la croissance. (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Francis Delattre. Quel aplomb !

M. Alain Gournac. Vous croyez au Père Noël !

M. Pierre Moscovici, ministre. Plutôt que de guetter les mauvaises nouvelles, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, réjouissez-vous des bonnes ! Soyez cohérents et faites preuve d’unité lorsqu’il s’agit de notre économie !

Par ailleurs, ce matin même, la France a emprunté à des taux d’intérêt historiquement bas, ce qui est un signe de confiance inédit et majeur dans notre économie mais aussi, je le crois, une marque de la crédibilité de notre politique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Vous m’avez interrogé, monsieur le sénateur, sur la cohérence de notre politique économique. Celle-ci est fondée sur trois piliers.

Le premier de ces piliers, vous le savez, c’est le sérieux budgétaire, car il nous faut désendetter le pays. L’endettement est en effet l’ennemi de l’économie et des services publics. Tout euro que nous ne consacrerons pas à la dette sera un euro gagné pour l’éducation, la justice, l’hôpital ou l’emploi. Cette politique, nous la mènerons avec une grande résolution !

Le deuxième pilier, vous l’avez évoqué, c’est la construction européenne, que nous réorientons actuellement avec le pacte de croissance – obtenu de haute lutte ! –, la taxe sur les transactions financières et la recapitalisation de la Banque européenne d’investissement. La zone euro est en train de sortir de l’ornière, et l’action que nous menons y est pour quelque chose.

M. Alain Gournac. Merci Sarkozy !

M. Pierre Moscovici, ministre. Le troisième pilier, c’est la compétitivité.

Combien de fois n’a-t-on pas entendu que le rapport Gallois serait enterré et que nous n’allions pas en tenir compte ? Tel n’a pas été le cas.

Ce rapport nous a au contraire encouragés à mettre en place une politique sans précédent, courageuse, qui traite de tous les aspects de la compétitivité : la compétitivité hors-coût, la compétitivité-coût et la compétitivité-prix.

Le quatrième pilier – les trois mousquetaires étaient bien quatre ! –, c’est la réforme du marché du travail menée par Michel Sapin et qui représente un enjeu tout à fait historique.

Cette politique, à mon sens courageuse, permettra de tirer le pays de l’ornière. J’appelle donc chacun à participer à la mobilisation et au redressement, car c’est ainsi que nous réussirons ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines travées du groupe écologiste.)

M. Alain Gournac. C’est la méthode Coué !

politique économique du gouvernement

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances.

Hier, lorsque François Hollande était candidat à la présidence de la République, il traçait une perspective, une voie. Il affirmait, à juste titre : « je vais vous dire qui est mon adversaire […] Cet adversaire, c’est le monde de la finance. » Il concluait en déclarant : « Si la finance est l’adversaire, alors il faut l’affronter ».

Il annonçait la nécessité d’un pacte productif tourné vers l’emploi, puisant sa force dans « la mise au pas de la finance ». (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Six mois après son élection qui, je le rappelle, n’aurait pas été possible sans les 11 % de voix obtenues par le Front de gauche, nous constatons que l’affrontement avec le monde de la finance, de l’actionnariat et des agences de notations n’est plus à l’ordre du jour. À cet égard, l’affaire des « pigeons » est tout un symbole.

Les vieux mots que l’on a si souvent entendus ces dernières années – coût du travail, compétitivité, réduction des dépenses – sont de retour.

Le concept de compétitivité a été inventé pour justifier l’austérité et la soumission des salariés à la logique patronale. Suivre cette voie signifie que l’on se prépare, non plus à affronter la finance, mais à s’y soumettre.

Mme Éliane Assassi. Jamais ne sont mises en rapport la notion de compétitivité et celle de rentabilité financière. Jamais n’est mis en rapport le coût pour la société tout entière du chômage, de la précarité, du manque de soins.

Savez-vous que les accidents du travail coûtent 13 milliards d’euros à la société, soit plus que la réduction annuelle des dépenses publiques que vous voulez imposer ? Interpellerez-vous le patronat sur ce point ?

Même si ce choix semble déplaire, les sénateurs de mon groupe, parlementaires communistes et élus du Front de gauche, affichent une cohérence au travers de leur vote sur les lois de finances. (Applaudissements sur certaines travées de l’UMP.)

L’an dernier, la gauche sénatoriale avait suivi une autre voie : une alternative budgétaire, certes encore imparfaite, mais bien réelle. Aujourd’hui, en revanche, presque aucun des amendements que nous proposons n’a été retenu. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. C’est pas bien ! (Sourires sur les mêmes travées.)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Vous rejetez tout !

Mme Éliane Assassi. C’est un camouflet infligé à la majorité de gauche du Sénat ! Un seul de ces amendements, celui qui tend à taxer la spéculation sur le rachat des entreprises en difficulté, rapporterait pourtant 17 milliards d’euros au budget de l’État.

Monsieur le ministre, nous ne souhaitons pas plus que vous le retour de la droite aux affaires (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.),...

M. Christian Cointat. Vous avez tort !

Mme Éliane Assassi. ... mais nous aimerions savoir si le Gouvernement acceptera d’étudier sérieusement nos propositions, qui relèvent non pas de la surenchère, mais de la cohérence et du simple respect des engagements pris. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Ils n’ont pas besoin de vous !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Alain Gournac. Oh là là !

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Madame la sénatrice, croyez bien que je respecte, tout comme le Gouvernement, les convictions qui sont les vôtres, la cohérence que vous affichez et la force politique que vous représentez. Pourtant, je ne partage pas votre vision des choses. (Ah ! sur les travées de l'UMP.) Vous faites fausse route en nous faisant ce procès en reniement, qui ne reflète pas la réalité.

Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas un procès ! Nous parlons du principe de réalité.

M. François Zocchetto. Les écrits restent !

M. Pierre Moscovici, ministre. Nous avons tracé un cap, nous le suivons et nous n’en changerons pas.

Je vais revenir sur quelques-uns de vos arguments pour montrer à quel point vous vous trompez. En effet, le Président de la République a fait la démonstration, au cours de sa conférence de presse, qu’il respectait les engagements pris devant le pays et acceptés par les partis que vous représentez.

Vous avez évoqué le pacte productif : il existe bel et bien ! Je reviendrai devant vous dans quelques semaines pour présenter le projet de banque publique pour l’investissement – la première proposition du candidat François Hollande ! –, qui sera la banque des PME, des entreprises de taille intermédiaire, de l’innovation et des territoires. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) N’est-ce pas un élément de ce pacte ?

Vous avez remis en cause, par ailleurs, le concept de compétitivité. Vous faites complètement fausse route !

Nous livrons actuellement une bataille économique au sein d’une compétition mondiale, et c’est pourquoi nous devons muscler l’appareil productif français. Qui peut dire le contraire ? Qui peut se réjouir de la désindustrialisation, alors qu’elle touche en premier lieu les plus défavorisés, les ouvriers, les classes populaires ?

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Sûrement pas nous ! Mais comment ferez-vous sans briser la logique de financiarisation ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Oui, il nous faut relancer l’appareil productif !

De la même façon, nous poursuivons notre combat pour la justice sociale. Si le taux de la croissance pour le troisième trimestre 2012, que je viens d’évoquer, est à ce niveau, c’est parce que nous avons agi en faveur du pouvoir d’achat.

M. Pierre Moscovici, ministre. Nous avons en effet augmenté l’allocation de rentrée scolaire, diminué les prix du carburant, donné un coup de pouce au SMIC, puis étalé la facture dont nous avons hérité en matière de gaz afin de préserver les couches populaires ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. N’importe quoi !

M. Pierre Moscovici, ministre. Plutôt que de nous faire ce procès, que je crois malvenu,...

Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas un procès ! Vous vous trompez d’hémicycle...

M. Pierre Moscovici, ministre. ... je vous invite à nous rejoindre dans ce combat pour la justice, le redressement et les réformes menées dans le dialogue et la concertation.

Nous vous proposons un changement de méthode et de cap.

M. Christian Cointat. Le « cap-italisme » ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. Pierre Moscovici, ministre. Oui, ce pays a désormais un cap, fixé à partir d’un diagnostic juste, et aussi un capitaine !

Rejoignez-nous, madame la sénatrice, dans ce combat commun qui doit être celui de la gauche ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste.)

arrestation d'aurore martin

M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Ma question s’adressait à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, quelques jours après la déclaration de M. le ministre de l’intérieur dans laquelle il assurait qu’il collaborerait avec l’Espagne en matière de lutte contre le terrorisme, Aurore Martin était arrêtée par hasard. Les écologistes prennent donc acte que Fortuna, déesse de la chance, est manifestement avec lui.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Notre-Dame-des-Landes, priez pour nous ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)

Mme Hélène Lipietz. Au-delà du cas de cette militante du parti Batasuna, autorisé de ce côté-ci des Pyrénées mais interdit de l’autre, se pose la question de l’espace judiciaire européen et du mécanisme du mandat d’arrêt européen, intégré dans le droit français le 9 mars 2004.

Pour que le mandat d’arrêt européen soit valide, il faut que les faits reprochés dans l’État émetteur fassent encourir plus de trois ans d’emprisonnement, ce qui n’inclut aucune obligation de double incrimination, l’une dans le pays d’accueil et l’autre dans le pays émetteur. Or il n’existe pas de référentiel européen de l’échelle des peines ni de la qualification des délits et des crimes. À quand une réflexion sur ce sujet ? Les députés européens Verts/ALE ont, quant à eux, interpellé en urgence la Commission européenne à ce propos.

Dans le cas d’Aurore Martin, le dossier présenté par la justice espagnole a semblé solide tant à la cour d’appel de Pau qu’à la Cour de cassation et à la Cour européenne des droits de l’homme.

Par ailleurs, la dissolution de Batasuna espagnol a été validée par un juge reconnu pour son intégrité en matière de lutte contre les dictatures, le juge Garzon, et confirmée là encore par la Cour européenne des droits de l’homme.

La justice espagnole est donc saisie. Le temps de Franco étant révolu, nous pouvons espérer qu’elle sera sereine.

Cependant, le futur Président de la République déclarait au mois de juillet 2011, à l’occasion de la précédente arrestation d’Aurore Martin, qu’il convenait de respecter le principe de clémence. De plus, la résolution du conflit basque est en cours depuis la conférence de conciliation d’Aiete du 17 octobre 2011, et l’ETA a renoncé à la lutte armée.

Les Français sont donc en droit de s’interroger sur la rapidité d’exécution de cette remise d’une citoyenne française aux autorités d’un État tiers, décision particulièrement grave qui ne pouvait visiblement souffrir aucun retard.

Le mal est fait. Reste une question : comment la France entend-elle assurer la protection consulaire d’Aurore Martin, qui n’a toujours pas reçu la visite du consul de France ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste. – Exclamations sur les travées de l’UMP.)

M. Alain Gournac. C’est incroyable !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Alors, monsieur le ministre délégué ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Je vous prie de bien vouloir excuser, madame la sénatrice, l’absence de Mme le garde des sceaux, actuellement en déplacement.

La Française Aurore Martin, militante de Batasuna, a été arrêtée le 1er novembre 2012 dans les Pyrénées-Atlantiques, puis remise aux autorités espagnoles en application du mandat d’arrêt européen dont elle faisait l’objet depuis 2010.

Les autorités espagnoles lui reprochent d’avoir participé en Espagne à des réunions publiques comme membre de Batasuna, parti considéré comme le bras politique de l’organisation séparatiste basque ETA, interdit de l’autre côté des Pyrénées.

Aurore Martin a comparu le 2 novembre au matin devant un juge de l’Audience nationale de Madrid. Elle a été placée sous mandat de dépôt.

Le ministre de la justice a rappelé que la remise de Mme Martin à la justice espagnole s’est opérée dans le strict cadre du mandat d’arrêt européen, qui permet la remise de nationaux et s’opère de juge à juge, sans intervention des autorités gouvernementales. Ce mandat est ainsi une procédure uniquement conduite par les autorités judiciaires.

C’est l’autorité judiciaire, en l’espèce le juge d’instruction espagnol, qui émet le mandat, et c’est elle seule qui en contrôle la régularité, soit en l’espèce le parquet général et la chambre d’instruction de Pau, puis la Cour de cassation, puis la Cour européenne des droits de l’homme. Je précise que le parquet général de Pau était lié, pour l’exécution de ce mandat, par la décision définitive de la chambre de l’instruction.

En l’espèce, toutes les voies de recours d’Aurore Martin ont été rejetées. Par arrêt du 15 décembre 2010, la Cour de cassation a rejeté son pourvoi. La Cour européenne des droits de l’homme a aussi déclaré irrecevable une demande présentée par la jeune femme au mois de mai dernier.

Le mandat d’arrêt européen est enfin utilisé sans que soit imposée la condition de la double incrimination, pour une liste précise d’infractions graves punies d’au moins trois ans d’emprisonnement, parmi lesquelles figure le terrorisme. Cette caractéristique rend dès lors sans objet, pour ces infractions, une harmonisation des délits et des peines.

Le Gouvernement – en particulier le garde des sceaux – est bien entendu très attentif à la situation des ressortissants français. Aurore Martin bénéficie ainsi, de manière très concrète, de la protection consulaire accordée par la France à tous ses nationaux, particulièrement à ceux qui sont en détention.

La France est également très vigilante à la suite de la procédure, désormais conduite en Espagne par des autorités judiciaires dont elle respecte scrupuleusement l’indépendance, assurée dans le cadre démocratique espagnol. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

gaz de schiste

M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.

M. Yvon Collin. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Madame la ministre, l’indépendance énergétique de la France doit constituer une priorité. Sur cette question, le groupe du RDSE partage l’analyse de l’excellent rapport, remis la semaine dernière au Premier ministre, de M. Louis Gallois : il faut préserver le faible coût de l’énergie, car c’est un réel atout pour notre industrie et sa compétitivité.

Cela passe, bien sûr, par des économies d’énergie, mais aussi par le développement des énergies renouvelables et le maintien d’une filière nucléaire d’excellence.

Cela passe également par la cinquième proposition du rapport Gallois : « Mener les recherches sur les techniques d’exploitation des gaz de schiste. »

M. Alain Gournac. Bien sûr !

M. Yvon Collin. En effet, si notre pays dispose des réserves annoncées, il serait irresponsable de nous en priver.

M. Yvon Collin. C’est aussi, du reste, la position affirmée, voilà deux jours, par le Président de la République, puisqu’il a précisé, concernant les gaz de schiste, que la recherche devait continuer pour trouver « d’autres techniques » que la fracturation hydraulique, beaucoup trop polluante.

Nous partageons cette position…

Mme Hélène Lipietz. Venez vivre en Seine-et-Marne !

M. Yvon Collin. Comme le Président de la République, le groupe du RDSE est opposé à la technique de la fracturation hydraulique et, comme le Président de la République, il estime que cette opposition ne signifie pas que l’on renonce à l’exploitation future des gaz de schiste.

C’est la position que nous avions exprimée, ici même, au mois de juin 2011, lors de l’examen de la proposition de loi « gaz de schiste ». Non, l’obscurantisme ne doit pas prendre le pas sur le principe de précaution ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

Mais, madame la ministre, quelle est la position du Gouvernement, puisque celui-ci n’a pas retenu la cinquième proposition du rapport Gallois lors de la présentation par le Premier ministre du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi ? Il est vrai, me direz-vous, que c’était avant que le Président de la République ne s’exprime sur le sujet. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

Madame la ministre, la recherche sur les gaz de schiste est un impératif majeur de notre politique énergétique : recherche pour évaluer précisément l’état de nos réserves et recherche, bien évidemment, sur les techniques d’exploitation !