M. Vincent Peillon, ministre. Vous non plus !

Mme Françoise Férat. Je regrette que celle-ci soit absente de ce texte. Elle s’est faite sans réelle concertation ; elle n’a même pas été débattue devant le Parlement et a été imposée aux collectivités.

M. Jean-Michel Baylet. Ce n’est pas vrai !

Mme Françoise Férat. Nous n’avons pas les mêmes sources de renseignement, monsieur Baylet.

M. Jean-Michel Baylet. Moi, je suis sur le terrain !

Mme Françoise Férat. Malgré une réelle bonne volonté, nombre d’entre elles auront les plus grandes difficultés à assumer cette évolution, sur un plan tant financier que pratique, particulièrement en zone rurale. Son faible taux d’application à la prochaine rentrée scolaire en témoigne. Mal évaluée, cette mesure sera créatrice d’inégalités entre les territoires, qui ont été mis devant le fait accompli.

En conclusion, je ferai remarquer que la Haute Assemblée aura, en moins d’une semaine, balayé, en plus d’un sens, deux projets de loi qui ont pour ambition de réformer tout notre système éducatif, de la maternelle au doctorat. Cela représente un parcours qui commence à l’âge de 2 ans et se termine à 26 ou 28 ans. Un quart de siècle d’une vie réformé en une semaine !

Tout cela s’est fait en si peu de temps et avec si peu de concertation... La cause n’aurait-elle pas mérité plus d’échanges et de dialogue ?

Encore une fois, avec mes collègues du groupe UDI-UC, nous ne pouvons que regretter ces constats. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Baylet.

M. Jean-Michel Baylet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si l’examen par le Sénat en deuxième lecture du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école devait s’apparenter à une année scolaire, nous pourrions dire que nous entamons aujourd’hui le dernier trimestre. (Sourires.)

Monsieur le ministre, tous vos prédécesseurs rue de Grenelle ont clamé leurs ambitions pour l’école. Celles-ci, très souvent grandioses, ont cohabité, dans un passé récent, avec des moyens toujours plus limités. C’est ainsi que près de dix ans après le vote de la dernière grande loi sur l’école, l’échec scolaire n’a pas disparu – il n’a même pas été réduit ! Dans le même temps, les inégalités sociales et territoriales se sont, elles, creusées.

En première lecture, nous avons été nombreux, y compris – je leur en donne acte – sur les travées de l’opposition, à dresser l’état des lieux d’une école qui n’était plus en mesure de mener à bien ses missions. Notre collègue Jean-Claude Carle soulignait que « chaque année, notre école est plus inéquitable et plus inefficace ». Colette Mélot dressait, quant à elle, le constat que « l’école du XXIe siècle est en crise dans notre pays ».

Vous me connaissez, je ne nourrirai pas la polémique sur la paternité des renoncements qui nous ont conduits à la situation actuelle, mais je soulignerai que le volontarisme affiché et les moyens mobilisés par le Gouvernement, faisant de l’éducation une priorité du quinquennat, constituent une rupture salutaire avec le passé. Il y avait urgence, tant l’éducation nationale était au bord de l’implosion, avec des effectifs rognés, des enseignants déconsidérés et résignés et une formation tronquée.

Alors que nous abordons la deuxième lecture de ce projet de loi, d’aucuns feindront de s’interroger : ce texte est-il irréprochable ? Je sais, de ma longue expérience parlementaire, que la perfection ne se trouve jamais dans un texte de loi, et celui-ci ne déroge pas à la règle. Fruit d’une longue concertation avec les différents acteurs du monde de l’éducation, il a été soumis au Parlement qui, au gré des lectures successives, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, l’a amélioré. C'est un texte de compromis, pragmatique.

Les radicaux auraient souhaité que soit retenu un de leurs amendements sur les regroupements pédagogiques en direction des communes ne faisant partie ni d’un regroupement pédagogique intercommunal ni d’un EPCI exerçant la compétence scolaire.

Nous soutenons néanmoins les nombreuses avancées permises par ce texte. Nous demeurerons attentifs au pilotage et à la mise en œuvre des objectifs fixés. On ne le dira jamais assez, l’une des principales dispositions de ce projet de loi – sinon la principale avec l’annonce de la création de 60 000 postes,…

M. Michel Billout. Avec quels moyens ?

M. Jean-Michel Baylet. … qui mérite d'ailleurs d’être rappelée, et même mise en avant – concerne la formation des enseignants. Elle fut lentement déconstruite ces dernières années, avec une mastérisation ratée.

On en était arrivé à une situation dans laquelle les personnes qui étaient chargées de transmettre un enseignement n’en recevaient pas elles-mêmes pour les préparer à leur belle et noble mission. Être enseignant, mes chers collègues, c’est être pédagogue, et cela s’apprend ! En cela, la création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation constitue un progrès indéniable. Ces dernières devraient être opérationnelles à la rentrée de septembre prochain.

Monsieur le ministre, vous profiterez sans doute de l’examen de ce projet de loi pour nous exposer les modalités, que nous aimerions connaître, de ce déploiement.

La polémique entourant la question de la refonte des rythmes scolaires, que nous évoquions à l’instant, a au moins permis de mettre en lumière le rôle clef joué par les collectivités territoriales dans notre système éducatif, qu’il s’agisse des communes, pour l’école primaire, ou des départements et des régions, pour l’enseignement secondaire. Nos collectivités s’investissent et investissent dans l’éducation, pour peu que leurs élus veuillent se donner la peine de faire et de bien faire.

La réussite de cette réforme dépendra donc également du partenariat entre l’éducation nationale, le mouvement sportif et associatif, et les collectivités territoriales dans la coproduction d’offre scolaire et périscolaire, sur l’ensemble du territoire. Dans cette perspective, monsieur le ministre, nous avons pris connaissance du projet de décret encadrant le fonds d’amorçage pour la réforme des rythmes scolaires dans le premier degré, en application de l’article 47 du projet de loi.

Vous le savez, cette réforme suscite des inquiétudes chez les maires, notamment de petites communes. Pouvez-vous informer notre assemblée des modalités d’attribution du fonds, du montant de l’enveloppe qui y est consacrée et de la manière dont ce fonds sera abondé ?

Lors de mon intervention en prélude à l’examen du texte en première lecture, je mobilisais – l’école en vaut la peine ! – certaines figures du Panthéon radical : Alain, Jean Zay ou Ferdinand Buisson. (M. Gérard Longuet s’exclame.)

Mes références seront aujourd’hui plus modestes, et je me bornerai à me féliciter que les amendements déposés par notre groupe et adoptés par le Sénat en première lecture aient été repris par l’Assemblée nationale. Parmi ces seize amendements, plusieurs ont, à nos yeux, une importance particulière.

C’est le cas de l’inscription de la lutte contre les inégalités territoriales au sein des missions du service public de l’éducation. C’est également le cas du renforcement de la place des parlementaires au sein du Conseil supérieur des programmes, qui permettra au Parlement d’être mieux représenté dans cette instance.

Je citerai également parmi ces améliorations notoires l’inscription dans le code de l’éducation de la lutte contre l’innumérisme, le développement d’une politique de promotion de la culture scientifique et technologique, mais aussi la nécessité de réformer l’aide aux enfants en difficulté et le renforcement indispensable des RASED. La mise en œuvre de cet amendement permettra de rendre l’école plus inclusive.

En deuxième lecture, l’Assemblée n’a que peu modifié le texte voté le 24 mai dernier par le Sénat. Sur les 26 amendements adoptés, nombre sont des ajustements rédactionnels. Je salue toutefois l’adoption de celui, symbolique, qui tend à ajouter le drapeau européen au drapeau français sur le fronton des établissements.

M. Gérard Longuet. Si M. Montebourg accepte ! (Sourires.)

M. Jean-Michel Baylet. Lors de l’examen en deuxième lecture, la commission des affaires culturelles s’est félicitée de l’équilibre atteint entre les deux chambres du Parlement et a estimé que le texte ne nécessitait pas de retouches. Je tenais, à ce stade, à remercier Mme le rapporteur, Françoise Cartron, de son implication, qui a permis un travail parlementaire rigoureux.

Sans modifier l’équilibre général du texte, notre groupe défendra toutefois quelques améliorations au rapport annexé, notamment pour rappeler et renforcer la liberté pédagogique des professeurs et assurer la présence enseignante dans les départements ruraux.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, l’ensemble des sénateurs radicaux de gauche et la quasi-totalité des membres du RDSE apporteront leur voix à la refondation de l’école.

Ils agiront ainsi pour les raisons que je viens d’évoquer, mais aussi parce que ce texte institue un nouvel enseignement civique et moral, qui sera laïque, c’est-à-dire émancipateur.

Parce qu’il accorde une place essentielle à l’orientation, afin que celle soit choisie et non plus subie.

M. Jean-Michel Baylet. Parce qu’il prévoit la création du service public du numérique éducatif.

Parce qu’il répond à l’ambition de fonder l’école du XXIe siècle, lieu de transmission des savoirs et creuset des valeurs républicaines.

Enfin, parce qu’il contribue, et il était temps, à rendre à la jeunesse de notre pays, qui en a bien besoin, l’espoir en l’avenir ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux.

Mme Corinne Bouchoux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’école doit être l’affaire de tous, et non de quelques spécialistes qui auraient légitimité pour parler alors que les autres écouteraient.

Nous voudrions commencer par souligner, à l’instar de Mme Gonthier-Maurin, le bon esprit qui a présidé à nos travaux : toutes les sensibilités ont pu être entendues et toutes les paroles ont été prises en compte, bien évidemment à des degrés divers.

Aujourd’hui, nous sommes saisis en deuxième lecture du projet de loi dit « de refondation de l’école de la République ». Nous sommes satisfaits que la rédaction issue des travaux du Sénat en première lecture ait été conservée.

Nous avons partagé largement les constats suivants : notre école ne va pas bien, elle va même parfois assez mal ; il faut faire face au phénomène du décrochage scolaire ou des élèves « décrochés » ; le troublant problème de l’ennui à l’école s’aggrave.

Nous avons essayé d’œuvrer collectivement en faveur d’une autre école, d’une école de l’écoute, de la bienveillance, qui éduquerait à la coopération plutôt qu’à la compétition. Nous l’avons déjà dit ici, nous souhaiterions une école qui promeuve la résolution non-violente des conflits avec des adultes formés à ces techniques.

Nous appelons de nos vœux une école qui sensibilise à la rareté et à la finitude des ressources par l’éducation à l’environnement ; une école qui s’adresse à tous les élèves, quels que soient leur milieu social et leur origine, et qui prenne en compte toutes les diversités ; une école où tous et toutes seront reconnus.

Nous avons aussi pu faire entendre que les parcours artistiques donnaient tout son sens à une véritable éducation artistique.

Nombre de nos amendements, fruits de débat engagés et parfois animés, ont été confirmés par l’Assemblée nationale, C'est la preuve que le travail et le dialogue entre les deux chambres sont non seulement nécessaires et utiles, mais également extrêmement précieux.

Nous avons bien avancé sur un grand nombre de points, mais il faut reconnaître qu’il s’agit seulement ici d’un début de refondation de l’école. En dépit des limites du texte, que nous avions déjà signalées – mais nous savons qu’il est très difficile de réformer l’école –, ce commencement est une impérieuse nécessité.

Le chantier est immense, et les acteurs nombreux ; les intérêts convergent lorsqu’il s’agit de parler de la réussite des élèves et divergent parfois quand on évoque le rythme de vie de chacun. Un cap est maintenant fixé et, même si ce n’est pas à 100 % l’école rêvée des écologistes, il faut reconnaître que les choses vont incontestablement dans le bon sens.

Selon nous, l’une des questions cruciales est celle de la formation des enseignants, qui fut sacrifiée ces dernières années. Il faut que les écoles supérieures du professorat et de l’éducation soient des lieux structurés et vivants, qui doivent donner un nouveau souffle à la formation de nos enseignants. Enseigner est un métier qui s’apprend, et pas seulement une vocation.

Nous savons que le calendrier sera extrêmement difficile à respecter, comme cela a été dit en réponse à une question de Marie-Christine Blandin lors des questions d’actualité. Toutefois, nous attirons votre attention, monsieur le ministre, sur la nécessité de prendre en compte tout ce qui est actuellement dans le texte de loi pour l’intégrer dans les maquettes des ESPE dès la rentrée prochaine.

Un autre point nous tient particulièrement à cœur : la formation continue des enseignants. À cet égard, nous nous étions interrogés ici même, au Sénat, et sommes très contents que les députés aient, à l'unanimité, via un amendement, adopté une nouvelle rédaction indiquant, d'une part, que chaque enseignant est encouragé à se former régulièrement, et, d'autre part, qu’une offre de formation continue adaptée aux besoins des personnels d’enseignement est proposée, notamment par le biais des écoles supérieures du professorat et de l’éducation.

C’est là un sujet qui nous tient particulièrement à cœur, même si nous ne méconnaissons pas les problèmes de remplacement et d'organisation qu’un tel dispositif peut poser. Son importance est majeure dans tous les départements et tous les territoires.

Ensuite, il nous paraît nécessaire de dispenser une formation continue de qualité pour les enseignants tout au long de leur carrière. Nous estimons que les échanges de pratiques entre enseignants expérimentés, enseignants débutants et formateurs aguerris sont extrêmement fructueux.

Enfin, il nous semble particulièrement important que les enseignants en exercice puissent bénéficier de formations sur la gestion non violente des conflits, ainsi que, notamment, sur le travail de groupe et l'interdisciplinarité – trois impératifs qui nous tiennent très à cœur.

Parmi les nouveaux apports à ce texte, l’Assemblée nationale a adopté un amendement écologiste tendant à inscrire la formation et la scolarisation d'élèves handicapés dans les missions des ESPE, les écoles supérieures du professorat et de l’éducation. Nous nous en réjouissons, car il s'agit là d'un signal fort adressé à ces élèves en situation de handicap, à leurs familles et aux enseignants qui vont les accompagner.

À ce titre, nous ne pouvons que saluer l'annonce de la création de 8 000 postes à la rentrée pour accompagner ces enfants en situation de handicap. Ils permettront, selon nous, d'aller vers une école plus inclusive.

Malheureusement, notre modèle reste très éloigné des pratiques nordiques et, vous le savez comme moi, mes chers collègues, nombre de parents ont du mal à trouver une place dans l'école publique pour leurs enfants en situation de handicap, dont beaucoup restent déscolarisés. Selon nous, il s'agit ici d'un des problèmes à régler prochainement.

Quoi qu'il en soit, nous voulons préserver, en deuxième lecture au Sénat, l'équilibre acquis par ce texte et nous espérons que la loi qui s'ensuivra donnera un nouveau souffle, pour une école de la réussite, de la coopération et de la bienveillance.

Enfin, pour en venir à la lecture que vous avez faite, monsieur Legendre, du rapport de la Cour des comptes, il se trouve que nous n’avons pas tout à fait la même interprétation de ce document. Nous insistons sur un point particulièrement important : la question des jeunes enseignants, qui sont envoyés dans les postes les plus difficiles, alors que l’on affecte les plus expérimentés, déjà solides, dans des zones a priori moins difficiles.

Se pose alors une question primordiale, à laquelle il faudra réfléchir : comment concilier, à l'avenir, les statuts des personnels et les évolutions qui apporteraient plus de justice pour tous les élèves ?

Malgré les imperfections que nous avons signalées, malgré ses lacunes et même s'il ne s'agit pas d'une loi écologiste à 100 %, nous voterons ce texte, qui va dans le bon sens. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner.

M. Jacques-Bernard Magner. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la première lecture du projet de loi d’orientation et de programmation de l’école a donné lieu à près de 32 heures de débat en séance au Sénat. Deux motions ont été déposées par l'UMP – question préalable et renvoi en commission –, qui, heureusement, n’ont pas été adoptées, sans quoi nous ne débattrions pas aujourd'hui.

M. Gérard Longuet. Nous débattrions d’autre chose !

M. Jacques-Bernard Magner. Avec plus de 1 000 amendements déposés en commission ou en séance, tous groupes confondus, ce sont à des discussions très approfondies que se sont livrés les sénateurs durant quatre jours et quatre nuits. Plus de 260 amendements ont été adoptés, parmi lesquels un grand nombre ont été portés par l'opposition.

Pourtant, les débats ont mis en évidence deux conceptions très divergentes, voire opposées, de l’école, en particulier sur le rôle de la maternelle et la préscolarisation, sur le collège unique, sur l’âge d’entrée en apprentissage et l’étendue de la scolarité obligatoire ou encore, tout simplement, sur la pédagogie.

Grâce au travail d’enrichissement du texte et de dialogue approfondi engagé par Mme la rapporteur Françoise Cartron, la majorité de gauche a su s’unir pour porter une réforme phare du quinquennat de François Hollande, concrétisant ainsi la priorité accordée à la jeunesse par le Gouvernement.

Françoise Cartron l’a encore souligné aujourd'hui : le Sénat a pleinement joué son rôle « en apportant sa pierre, ou, plutôt, ses multiples petites pierres, en vue d’améliorer le projet de loi qui était porté par le Gouvernement ».

Les principes fondamentaux de l’éducation ont été réaffirmés par la création d’un article 3 A, qui fixe de grands objectifs, tels que la lutte contre les inégalités sociales et territoriales de réussite, la mixité sociale et l’égale dignité des êtres humains. Cette disposition met également l’accent sur la participation des parents, en vertu du principe de coéducation. La notion d’éducabilité de tous a été ajoutée. Par ailleurs, il a été mentionné que le système éducatif favorise la coopération entre élèves.

La commission a rétabli le principe de l’accord des parents pour la mise en œuvre de dispositifs d’aide en faveur des élèves en difficulté.

Pour lutter contre l’orientation subie, Mme la rapporteur a inscrit dans la loi la possibilité d’expérimenter l'attribution aux parents, ou à l’élève majeur, de la décision d’orientation en fin de troisième. Un bilan annuel des actions menées dans les collèges et les lycées à destination des parents d’élèves a également été prévu, tandis qu’un espace sera dédié aux parents au sein des établissements, pour qu’ils s’approprient les locaux scolaires. L’information des parents et l’aide au suivi de la scolarité de leur enfant font désormais partie intégrante des missions des enseignants.

Toujours sur l’initiative de Mme la rapporteur, un même secteur de recrutement pourra être partagé par plusieurs collèges publics situés à l’intérieur d’un même périmètre de transports urbains, afin de favoriser la mixité sociale.

Avec les articles 5 et 30, les enfants de moins de trois ans seront comptabilisés pour les prévisions d'effectifs d'enseignants des écoles qui les scolarisent, ce qui était réclamé depuis longtemps.

Par ailleurs, avant toute affectation à l'école maternelle, les enseignants, y compris ceux qui sont déjà en poste, devront bénéficier d’éléments spécifiques de formation, afin de mieux s’adapter aux besoins des plus jeunes enfants et de favoriser leur mobilité entre les niveaux d’enseignement. Ainsi, il a été précisé que la formation dispensée en maternelle s’attache à développer l’envie et le plaisir d’apprendre pour devenir un élève.

Mme la rapporteur pour avis des affaires sociales, Claire-Lise Campion, a été, pour sa part, à l’origine de plusieurs amendements tendant à donner corps au principe de l’école inclusive porté par le projet de loi.

Un amendement a été voté afin de prendre en compte les projets linguistiques des élèves sourds et de leurs familles et de favoriser leur parcours scolaire selon le mode de communication que ces dernières auront choisi.

L’un des apports majeurs de notre groupe a été l’enrichissement des dispositions du projet de loi concernant la santé scolaire.

La notion de parcours de santé autour des visites médicales et de dépistage obligatoires a été introduite. La périodicité et le contenu des bilans de santé obligatoires seront désormais fixés conjointement par les ministères de l’éducation nationale et de la santé, pour plus de cohérence et d’effectivité.

Les missions de la promotion de la santé ont par ailleurs été complétées par la détection précoce des problèmes de santé ou de carences de soins, par l’accueil, l’écoute et le suivi individualisé des élèves, ainsi que par la participation à la veille épidémiologique.

Le Sénat a également renforcé le rôle et l’identité des ESPE, notamment en permettant aux acteurs de l’éducation populaire et aux associations agréées par l’éducation nationale de participer à la formation des futurs enseignants, mais aussi en intégrant des représentants de collectivités locales aux conseils des écoles.

Il a, en outre, renforcé la formation continue des enseignants, ainsi que celle, initiale et continue, des personnels d’inspection et de direction.

La place du sport a été affirmée dans le projet de loi : ont été inscrits dans le code de l’éducation la contribution apportée par le sport aux apprentissages, la complémentarité entre les pratiques sportives scolaires, périscolaires et extrascolaires, ainsi que les partenariats avec le mouvement sportif lui-même.

Le code de l’éducation mentionne désormais explicitement les associations éducatives complémentaires de l’enseignement public en tant que membres de la communauté éducative.

Le nombre des parlementaires membres du Conseil supérieur des programmes est passé de quatre à six. Ils seront désignés, à l’Assemblée nationale et au Sénat, par les commissions compétentes en matière d’éducation. Par ailleurs, il a été précisé que les membres du Conseil supérieur des programmes ne peuvent être simultanément membres du Conseil national d’évaluation du système scolaire. Il s'agit là d'ailleurs d’un apport de l'opposition.

Toujours sur proposition de Mme la rapporteur, le rapport annuel du Conseil national d’évaluation du système éducatif sera transmis aux commissions compétentes du Parlement et pourra donner lieu à un débat en séance publique. Les huit personnalités qualifiées que comprend cette instance seront nommées après avis des commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat ; cette disposition résulte, là encore, d'un amendement porté par l'opposition. Le conseil pourra être saisi par ces mêmes commissions, au lieu des présidents des deux chambres.

Outre l’apprentissage d’une langue vivante étrangère dès le cours préparatoire, prévue par le texte, les sénateurs socialistes ont promu la notion de diversité linguistique, que ce soit par le biais des langues parlées au sein des familles ou au travers des langues régionales. Le recours à des pratiques pédagogiques spécifiques pour les élèves issus de milieux principalement créolophones a été étendu à ceux qui sont issus de milieux amérindiens.

Il a en outre été précisé que l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger assurait ses missions de service public de l’éducation en tenant compte des capacités d’accueil de ces établissements. Des amendements visant à favoriser le développement de filières technologiques et professionnelles sein du réseau de l’enseignement français à l’étranger, ainsi que les partenariats avec les pays tiers, ou bien encore une association plus étroite du ministère de l’éducation nationale aux missions de l’enseignement du français à l’étranger, ont été également adoptés.

Ce projet de loi a donc été approuvé, en première lecture, par tous les groupes de la gauche sénatoriale, qui se sont rassemblés pour porter, unis, la refondation de l’école de la République.

En deuxième lecture, à l’Assemblée nationale, l’équilibre général du texte issu du Sénat a été maintenu : si quelques modifications ont été apportées, elles ne changent pas le fond du texte. Il convient désormais de conclure nos débats et de voter conforme ce projet de loi afin que sa promulgation intervienne dans les plus brefs délais, de telle sorte que ce texte puisse être mis en œuvre très rapidement, dans la perspective de la rentrée 2013.

Je tenais enfin à vous féliciter, monsieur le ministre, et surtout à vous remercier d’avoir donné à notre école de la République cette loi fondatrice et porteuse d’un avenir pour la jeunesse de notre pays. Bien sûr, le groupe socialiste votera ce texte avec conviction et enthousiasme. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Colette Giudicelli. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Colette Giudicelli. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux revenir sur la question de l’échec scolaire, qui est un problème récurrent. Nous n’avons jamais vu autant d’études ou de rapports émanant de l’OCDE ou de l'éducation nationale elle-même qui nous expliquent que nos enfants ont de graves lacunes.

On a le sentiment que chaque nouveau ministre de l'éducation nationale vient dresser le même diagnostic sur la situation scolaire dans notre pays, en présentant des solutions qui permettront de régler toutes les difficultés.

Or, année après année, nous nous rendons compte que notre système scolaire, en particulier l'enseignement primaire, est de moins en moins performant. Plus on parle d’égalité des chances, plus l’école s’enfonce dans un système incapable d’apprendre à nos enfants à lire, écrire et compter correctement !

Au cours de nos débats, nous avons tous rappelé que la France a l’un des plus importants taux d’échec des pays de l’OCDE en matière d’apprentissage de la lecture et de l’écriture. En effet, quatre élèves sur dix arrivent en sixième avec de graves lacunes en la matière.

Toutefois, cela fait bien plus de dix ans, monsieur le ministre, que l’OCDE nous alerte sur la chute du niveau scolaire. Cette tendance est confirmée par le rapport du programme international de recherche en lecture scolaire. Dans ce document, que j’ai consulté, il est écrit que « les élèves français sont toujours les plus nombreux à s’abstenir de répondre lorsque les réponses doivent être rédigées. Ils sont aussi les plus nombreux à ne pas terminer les épreuves ».

Monsieur le ministre, j’ai du mal à croire que la dégradation du niveau des élèves date seulement des dix dernières années, comme vous l'écrivez précisément dans l’annexe de votre projet de loi. Le mal dont souffre notre système éducatif est bien plus ancien, bien plus profond, et vouloir attribuer la responsabilité de cette situation aux majorités des dix dernières années n’est pas vraiment équitable.

La dernière enquête PISA de 2009 a porté sur des élèves nés en 1993. Or, de mai 1988 à mars 2002, qui étaient nos ministres de l’éducation nationale ? Lionel Jospin, puis Jack Lang, puis François Bayrou, puis Claude Allègre, puis, de nouveau, Jack Lang.

Or, avant la période des dix dernières années dont vous parlez, le niveau général des élèves en fin d’école primaire était déjà en chute libre, comme le constatait d'ailleurs une note d’alerte émanant des services statistiques du ministère de l’éducation nationale. La dégradation du niveau général n’est donc pas récente et, dans tous les cas, chaque Gouvernement a sa part de responsabilité dans ce diagnostic.

Vous avez donc raison, monsieur le ministre, de vouloir donner la priorité au primaire. En revanche, la solution réside-t-elle uniquement dans davantage de moyens humains ? Je ne crois pas que la réponse à toutes nos difficultés se limite à la question du nombre de professeurs. D’ailleurs, la Cour des comptes l'affirme, et l’OCDE le confirme.

Ce sont les questions de formation, de statut et de rémunération des maîtres qui sont déterminantes. Votre réforme aurait pu améliorer la qualité de l’encadrement et de la formation des professeurs, plutôt qu’accroître leur nombre.

Dans de nombreux pays, ce sont les étudiants les plus compétents qui sont incités à devenir enseignants, car ce rôle est essentiel. Or la vocation ne peut s’accomplir sans une reconnaissance forte, y compris d’un point de vue financier.

Je rappellerai simplement que, sous la précédente législature, une partie des économies qui ont été réalisées par le non-renouvellement d’un fonctionnaire sur deux a été réaffectée à l’augmentation du salaire des jeunes professeurs.