M. Jean Louis Masson. Pour ma part, je suis totalement favorable à ce que la commission se réunisse. Ce sous-amendement de notre collègue Pierre-Yves Collombat est tout à fait pertinent, et je ne vois pas pourquoi nous n’en débattrions pas.

Cela étant, mon rappel au règlement porte sur la forme que prennent nos débats.

Mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui réunis pour examiner un texte préparé à la hâte, bâclé – cela a été dit et redit –, et ce, qui plus est, pour des raisons qui ne sont pas très claires. Je l’ai déjà souligné au cours de la discussion générale, nous sommes tous des victimes de M. Cahuzac !

Au-delà de ce constat, la moindre des choses, c’est d’observer un minimum de correction à l’égard des vingt sénateurs ici présents. Or j’ai l’impression que certaines personnes manquent quelque peu de ce scrupule minimal…

On a commencé par changer l’ordre du jour de fond en comble en début de semaine.

M. Alain Anziani. Ce n’est pas notre faute si le renvoi à la commission a été adopté !

M. Jean Louis Masson. Aujourd’hui, même si nous sommes peu nombreux, plusieurs d’entre nous ont fait l’effort de modifier leur emploi du temps pour pouvoir assister à la séance publique, ce vendredi 12 juillet, et je viens d’apprendre qu’il était question de renoncer à siéger ce soir ! C’est réellement nous prendre pour des imbéciles ! Ceux qui ont pris la peine d’être présents seront, au total, pénalisés, et devront rentrer chez eux précipitamment. C’est là une marque de désinvolture intolérable à l’égard des sénateurs de province.

Monsieur le président, l’ordre du jour de cette semaine ayant déjà été totalement chamboulé, je demande très solennellement que l’on respecte à tout le moins le programme imposé à l’improviste. Nous ne sommes quand même pas venus pour trois heures de débat cette après-midi !

Mme Éliane Assassi. Parlez pour vous ! Nous, nous sommes là depuis hier !

M. Jean Louis Masson. Ce qui se passe aujourd’hui est honteux ; c’est une atteinte à la dignité du Parlement !

Mme Éliane Assassi. Mais vous venez tout juste d’arriver !

M. Jean Louis Masson. Je demande donc que nous puissions siéger ce soir. (Exclamations sur différentes travées.)

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Monsieur le président, je confirme que je sollicite une brève suspension de séance pour pouvoir réunir la commission immédiatement.

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président, je demande la parole.

M. le président. Monsieur Collombat, il n’y a pas de débat quand l’exception d’irrecevabilité est soulevée sur un amendement ou un sous-amendement.

M. Pierre-Yves Collombat. Si, il y a débat ! Ce sous-amendement a été présenté, et il a recueilli les avis respectifs de la commission et du Gouvernement.

M. Alain Anziani. Nous appliquons le règlement, cher collègue.

M. Pierre-Yves Collombat. Vous la découvrez bien tard, cette irrecevabilité ! Il fallait vous réveiller avant !

M. Alain Anziani. Nous ne faisons qu’appliquer les textes !

M. Pierre-Yves Collombat. On dirait un congrès trotskiste ! Ou un congrès du parti socialiste…

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux afin que la commission puisse se réunir. (M. Pierre-Yves Collombat proteste.) Vous pourrez faire valoir votre position en commission, monsieur Collombat !

La séance est suspendue. (Vives exclamations sur certaines travées de l'UDI-UC.)

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. La commission des lois, après en avoir délibéré, a considéré que le sous-amendement n° 180 était irrecevable, car contraire à l’amendement qu’il tendait à modifier. (MM. Pierre-Yves Collombat et Yves Pozzo di Borgo s’exclament.)

M. le président. Le sous-amendement n° 180 étant irrecevable, je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 143.

M. Pierre-Yves Collombat. Je demande la parole, monsieur le président.

M. le président. L’irrecevabilité n’ouvre pas de débat, mon cher collègue.

M. Pierre-Yves Collombat. Je vous demande alors la parole pour un rappel au règlement, ou je solliciterai une suspension de séance, monsieur le président : à vous de choisir !

Rappels au règlement

 
 
 

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour un rappel au règlement.

M. Pierre-Yves Collombat. Je conteste formellement l’interprétation de la commission, dans la mesure où mon sous-amendement ne faisait que modifier, certes substantiellement, l’amendement de M. Sueur. La moindre des choses eût été de s’apercevoir de son irrecevabilité avant de me laisser l’expliquer puis d’émettre des avis.

Si je voulais faire des effets de manche, je dirais que c’est scandaleux, mais je me contenterai de constater que tout cela est bien mesquin. Quand on veut donner des leçons de transparence, de vertu et de démocratie, le moment est mal choisi pour ce genre de pratiques !

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour un rappel au règlement.

 
 
 

Mme Éliane Assassi. Je peux comprendre qu’il y ait des problèmes de lisibilité du règlement et de nos procédures. Je voudrais toutefois dire de façon très ferme que je ne peux accepter la façon dont se déroulent nos débats aujourd’hui. Ils sont hachés et découpés, et font perdre du sens au texte qui nous occupe cet après-midi.

M. le président. Acte vous est donnée de votre rappel au règlement, ma chère collègue.

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour un rappel au règlement.

 
 
 

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, mon rappel au règlement se fonde sur l’article 29 de notre règlement, qui concerne l’organisation de nos travaux.

Je ne suis pas membre de cette assemblée depuis très longtemps, mais il me semble que c’est la première fois que nous voyons trois ministres se succéder au banc du Gouvernement en moins d’une journée. Non qu’ils soient incompétents ou désagréables, mais, entre la procédure accélérée et les difficultés de gestion de l’examen d’un article 1er sur lequel on a compté 103 sous-amendements, il est déjà extrêmement difficile d’y retrouver ses petits !

Pour ceux de nos collègues, comme M. Masson, qui arrivent en cours de séance pour participer à ces débats, je comprends que ce soit un peu acrobatique. Je partage donc tout à fait l’avis de Mme Assassi sur les difficultés que nous rencontrons dans ce débat, d’autant qu’il s’agit d’un texte important, qui arrive en séance un vendredi après-midi, dans un hémicycle dépeuplé. Sur un tel texte, avec une seule lecture, je crains que le résultat ne soit pas à la hauteur de nos attentes.

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.

Je souhaite rappeler que M. Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, est absent pour de très sérieuses raisons personnelles.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille. J’entends, et je comprends, ces remarques sur la succession des ministres au banc du Gouvernement. Je tiens cependant à rappeler à mon tour que M. Vidalies est souffrant, ce qui explique que Mme Vallaud-Belkacem et moi-même nous partagions la tâche cet après-midi.

Il ne doit donc y avoir aucune ambiguïté sur l’absence de M. Vidalies : le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement ne peut vraiment pas être physiquement présent en cet instant.

M. le président. La parole est à M. Alain Richard.

M. Alain Richard. Puisque chacune étale son sentiment, je voudrais à mon tour apporter un commentaire sur l’application du règlement.

Que voulez-vous, chers collègues, nous n’évoquons qu’un seul sujet, qui suscite un profond désaccord au sein de cette assemblée, comme d’ailleurs de l’autre : publie-t-on, ou non, les patrimoines ? Il n’est question que de cela, de façon directe ou indirecte.

Je respecte tout à fait la position de nos collègues qui, mobilisant tous les motifs possibles, affirment qu’il ne faut pas opérer cette publication. Nous sommes cependant un certain nombre à trouver que celle-ci est au contraire souhaitable et légitime. Personne n’est obligé d’être un homme public ou une personne exerçant un mandat public. Il y a aujourd’hui un problème, pour diverses raisons qui tiennent à l’état de notre société et aussi à un passif…

M. Gérard Longuet. Il ne concerne pas les parlementaires !

M. Pierre-Yves Collombat. Pas au Parlement !

M. Alain Richard. … dû à des comportements politiques accumulés de longue date. (M. Pierre-Yves Collombat s’exclame.) J’ai respecté la parole de chacun, la mienne est audible, elle n’est offensante pour personne !

Pour ceux qui sont favorables, par principe, à cette publication, ce débat est évidemment peu encourageant. Quelle que soit son issue, nous aurons, pour beaucoup d’entre nous, vu notre conduite associée à celle de collègues qui, avec les meilleurs arguments du monde, ne la souhaitent pas.

Le déroulement du débat n’est qu’une succession d’opérations de procédure, comme le droit parlementaire l’autorise, pour essayer de faire obstacle à l’adoption de cette règle. Les batailles parlementaires, cela existe, et tous les coups sont permis !

Il est tout de même possible de reconnaître que le fond de ce débat est là, et que les collègues qui sont opposés à la publication font valoir de bons arguments, que nous avons déjà largement entendus. Je me permets de les déranger un instant en évoquant le droit, pour d’autres, de ne pas être d’accord avec eux et de constater que cette succession de votes sur des points qui tournent toujours autour du même sujet, se résume simplement à l’application des règles de la bataille parlementaire, où le plus astucieux essaie toujours de trouver une solution pour prolonger le débat. Nous y sommes habitués et il faut bien s’y conformer.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Je suis d’accord pour reconnaître qu’il s’agit du point le plus sensible, mais, question astuce, celle qui consiste à faire croire qu’en votant l’amendement n° 122 rectifié bis, on est totalement d’accord avec le sens de ce projet de loi est tout de même fantastique ! Enfin, monsieur Richard, il ne faut pas exagérer…

Je connais votre honnêteté, et l’on peut dire en effet que le sous-amendement que je proposais constituait une modification substantielle de l’amendement, mais il visait tout de même à imposer une forme de publication, et restait donc conforme à l’épure du texte. Mais nous n’avons pas besoin de leçons de ce type !

M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

M. Yves Pozzo di Borgo. Je voudrais répondre à M. Richard, qui a évoqué le passif.

Mes chers collègues, qui analyse bien l’ensemble des condamnations prononcées en ces matières sous la Ve République, voire beaucoup plus tôt, y compris en remontant au XIXsiècle,…

M. Yves Pozzo di Borgo. … ne peut que le constater, jamais un parlementaire n’a été condamné parce qu’il était parlementaire. Les personnes ont toujours été condamnées parce qu’elles avaient dirigé un exécutif ou exercé des responsabilités ministérielles.

Rappelez-vous l’été dernier : trois immunités parlementaires ont bien été levées, malgré ce qui se disait à l’époque sur le fait que, trois socialistes étant concernés, le parti socialiste ne consentirait pas à ce que cela se produise. Car le bureau a été très courageux, et a levé l’immunité de ces trois parlementaires, mais en raison de leurs rôles dans des exécutifs, et non en tant que parlementaires.

Je l’ai dit ce matin : comment voulez-vous qu’un parlementaire soit corruptible, alors qu’il a de moins en moins de pouvoir ?

M. Gérard Longuet. Qui pourrait bien songer à acheter un parlementaire ?

M. Yves Pozzo di Borgo. M. Longuet évoquait le scandale de Panama, il faudrait bien étudier la question, mais, autant que je m’en souvienne, le dernier parlementaire à avoir été condamné parce qu’il était parlementaire l’a bien été à cette époque, dans les années 1880.

M. Gérard Longuet. Il y en a tout de même eu après !

M. Yves Pozzo di Borgo. Oui, peut-être y en a-t-il eu deux ou trois après…

Monsieur Richard, je respecte beaucoup ce que vous dites, et vous avez raison, ce débat sur la publication est important, mais vous ne pouvez pas soutenir devant nous que c’est ce passif qui lui a donné naissance !

C’est bien quelqu’un de chez vous qui était ministre et qui a commis une forfaiture devant l’Assemblée nationale ! Après cela, le Président de la République – il est très habile –, a renvoyé la balle aux parlementaires, qui ont foncé tête baissée ! Je rends hommage à M. Bartolone, qui a fait preuve d’un peu de courage pour bloquer le processus, quoiqu’incomplètement.

Alors, faites attention à ce que vous dites. Les parlementaires que nous sommes souffrent déjà d’un véritable problème de crédibilité, et nous ne faisons que l’aggraver avec ce texte-là.

Je le dis depuis ce matin, nous nous flagellons en permanence, qu’il s’agisse des parlementaires de la majorité ou de ceux de l’opposition. Ce faisant, nous sommes en train d’affaiblir nos institutions.

Mme Éliane Assassi. Au contraire ! Nous leur donnons de la force !

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Notre collègue Alain Richard vient de souligner que, dans un débat démocratique, il y a ceux qui sont pour et ceux qui sont contre, les uns et les autres devant se respecter. Je suis tout à fait d’accord sur ce point. Toutefois, se respecter les uns les autres, c’est aussi accepter qu’il y ait vote.

En l’espèce, vous nous avez fait un bien mauvais tour, une entourloupe, comme dirait M. Tapie, en empêchant la mise aux voix du sous-amendement de notre collègue Pierre-Yves Collombat. Voilà qui est invraisemblable ! Comment peut-on parler de démocratie quand on use d’artifices pour échapper à un vote ?

Par ailleurs, notre collègue Alain Richard a laissé entendre que les débats s’éternisaient. Mais que dire de la modification, au dernier moment, de l’ordre du jour de nos travaux, comme je l’ai relevé tout à l'heure, et de la suppression de la séance publique de ce soir pourtant prévue par la conférence des présidents ?

Je le redis, c’est un scandale si l’on supprime la séance prévue ce soir !

M. le président. Pour l’instant, mon cher collègue, la séance de ce soir n’est pas supprimée.

M. Jean Louis Masson. Je vous le dis dès à présent, monsieur le président : prenez-en acte !

M. le président. La parole est à M. Alain Anziani.

M. Alain Anziani. À plusieurs reprises, il a été dit que la démocratie était bafouée, entre autres propos moins amènes.

Mais qu’est-ce que la démocratie, monsieur Masson, sinon le respect des règles élaborées par une communauté et partagées par elle ?

M. Pierre-Yves Collombat. Cela arrange certains !

M. Alain Anziani. Non, c’est la définition même de la démocratie !

Là où il n’y a pas de règles, il n’y a pas de démocratie, mais au contraire le règne du plus fort et de la violence. La démocratie, c’est, je le répète, le respect des règles.

Ici, au Sénat, nous nous référons au règlement du Sénat, que l’on applique strictement. (Protestations sur les travées de l'UDI-UC.)

M. Yves Pozzo di Borgo. Non ! Vous l’interprétez !

M. Alain Anziani. Je reprends à l’intention de nos collègues qui ne sont pas membres de la commission des lois les arguments que nous avons retenus, en leur demandant de se reporter à l’article 48 du règlement, notamment à ses alinéas 4 et 9 : la commission saisie au fond – mais aussi tout sénateur - peut soulever à tout moment de la discussion en séance publique une exception d’irrecevabilité.

Nous ne faisons donc qu’appliquer la règle, qui est notre patrimoine commun. Nous travaillons véritablement dans un esprit de démocratie.

Exception d'irrecevabilité
Dossier législatif : projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique
Exception d'irrecevabilité (début)

Article 1er (suite)

M. le président. Mes chers collègues, nous en revenons au vote du sous-amendement n° 143, sur lequel la commission et le Gouvernement ont émis un avis défavorable.

M. Alain Anziani. Je demande la parole, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Alain Anziani.

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique
Exception d'irrecevabilité (interruption de la discussion)

M. Alain Anziani. Je suis obligé de soulever, là encore, une exception d’irrecevabilité pour une raison simple, qui va vous paraître encore plus évidente que précédemment, mes chers collègues.

L’amendement n° 79 rectifié bis prévoit, en substance, la suppression des sanctions que le sous-amendement n° 143 vise à rétablir. C’est là où réside le manque de cohérence. Comment ne pas voir ici la contradiction manifeste ?

C’est pourquoi ce sous-amendement est, à l’évidence, irrecevable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur la recevabilité du sous-amendement n° 143 ?

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Monsieur le président, je ne peux que me référer à la décision prise par la commission à l’issue de la réunion qu’elle vient de tenir.

Dès lors que MM. Anziani, Michel et moi-même avons déposé un amendement prévoyant que les déclarations de situation patrimoniale sont publiques et qu’un sous-amendement vise à pénaliser la publication de ces déclarations, ce dernier est contraire à l’amendement. C’est d’une totale évidence, et chacun peut facilement le comprendre.

M. le président. Le sous-amendement n° 143 est donc irrecevable.

M. Pierre-Yves Collombat. Je demande la parole, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Je suis heureux de constater que la lumière est enfin faite… même tardivement !

M. Alain Anziani. Pour tout le monde !

M. Pierre-Yves Collombat. Il vous aura fallu tout ce temps pour vous rendre compte du caractère irrecevable de mon sous-amendement ? Voilà une vocation d’exégète bien tardive !

M. Gérard Longuet. Je demande la parole, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet.

M. Gérard Longuet. Je m’attendais à cette prise de position du président de la commission des lois, par ailleurs, rapporteur du texte, sur ce sous-amendement.

Si la discussion de ces sous-amendements s’inscrivait dans un débat conduit normalement, j’adhérerais totalement à l’observation formulée : un sous-amendement a vocation à préciser, compléter, peut-être à adapter sur des points particuliers, un amendement principal, mais il ne saurait en contredire l’orientation générale.

Mais pourquoi avons-nous procédé par sous-amendements ? Tout simplement parce que les délais qui nous étaient impartis rendaient toute autre forme d’expression impossible.

Je suis dans la situation quelque peu paradoxale d’être l’unique représentant d’un groupe – grâce à nos amis, je ne suis pas tout à fait seul en séance publique ! (Sourires.) Les débats ont été organisés, après la conférence des présidents, dans une certaine improvisation, pour ainsi dire à la veille de la fête nationale, qui requiert la présence de nos collègues dans leurs départements respectifs. Dans la bousculade due à l’engagement de la procédure accélérée sur ce texte, alors que l’urgence ne s’imposait pas, nous avons procédé par voie de sous-amendements parce que nous avons nous-mêmes découvert très tardivement les amendements de la commission, qui portent complètement le projet du Gouvernement ou, parfois, s’en démarquent.

Monsieur Anziani, l’application du règlement à mon sous-amendement, qui est la conséquence immédiate et directe de l’organisation des débats, n’est pas formellement contestable dans la mesure où il s’oppose à l’amendement n° 79 rectifié bis.

En revanche, permettez-moi d’exprimer un point de vue différent en ce qui concerne le sous-amendement de M. Collombat, qui faisait, selon moi, vivre d’une autre façon l’amendement n° 79 rectifié bis. Mon sous-amendement combattait cet amendement, et j’accepte, je le répète, le fait qu’il soit déclaré irrecevable. Mais la décision que vous avez prise concernant le sous-amendement de M. Collombat est lourde de conséquences.

Vous n’avez pas de majorité sur ce projet de loi organique, et vous essayez d’esquiver un vote de notre assemblée. Telle est la réalité !

Le débat de fond, nous l’avons eu longuement, cher Alain Richard, et nous le retrouvons d’amendement en sous-amendement. Si vous aviez eu la possibilité d’assister un petit peu plus tôt à nos débats, vous vous seriez rendu compte que nous avons, chemin faisant, découvert des problèmes nouveaux.

Sur un sujet aussi grave, céder à la tentation de donner satisfaction à l’opinion publique telle qu’elle s’exprime au travers des points de vue des éditorialistes de magazines hebdomadaires, c’est, assurément, faire du mauvais travail, pour la démocratie comme pour l’image du Parlement.

À cet égard, permettez-moi de répéter les chiffres que nous a communiqués par M. Sauvé, vice-président du Conseil d’État et président de la Commission pour la transparence financière de la vie politique : en vingt-cinq ans, quatorze saisines, six parlementaires mis en cause et aucune condamnation. Qui doit se couvrir la tête de cendres ? (MM. Yves Pozzo di Borgo et Hervé Marseille applaudissent.)

M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques nos 79 rectifié bis et 122 rectifié bis.

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.

M. Jean Louis Masson. Je voterai radicalement contre ces amendements identiques, car je considère que notre débat dérive complètement. On est dans le flou et l’incohérence la plus totale. La sagesse serait certainement de remballer ce projet de loi organique et de reprendre son examen en septembre prochain, une fois que la réflexion aura pu être menée à son terme.

Mme Éliane Assassi. Il faudrait savoir ce que vous voulez !

M. Pierre-Yves Collombat. C’était le sens de la motion de renvoi à la commission !

M. Jean Louis Masson. Tel était effectivement le sens de la motion de renvoi à la commission, qui a été adoptée. Or, monsieur le rapporteur, vous essayez de passer outre en décalant de deux jours le débat, ce qui, en outre, perturbe notre emploi du temps d’aujourd'hui et peut-être de lundi prochain !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 79 rectifié bis et 122 rectifié bis.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 305 :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l’adoption 180
Contre 164

Le Sénat a adopté. (MM. Alain Richard et Claude Dilain applaudissent.)

En conséquence, les amendements nos 62, 104, 98 rectifié, 18, 12, 3, 4, 70, 19, 67 et 68, ainsi que les sous-amendements nos 142 rectifié et 144, n’ont plus d’objet.

Je mets aux voix le sous-amendement n° 149, qui porte sur l’amendement n° 80 rectifié.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 175.

M. Gérard Longuet. Je suis favorable à ce sous-amendement ! (Sourires.)

M. Yves Pozzo di Borgo. Moi aussi !

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 179.

Mme Catherine Procaccia. Je suis contre, puisque la condition de nationalité n’est même pas prévue !

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 151.

M. Gérard Longuet. Monsieur le président, je le retire, ayant obtenu gain de cause avec l’adoption du sous-amendement n° 185 à l’amendement n° 78 rectifié bis.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Très bien !

M. le président. Le sous-amendement n° 151 est retiré.

Je mets aux voix le sous-amendement n° 177.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 152.

M. Gérard Longuet. M. le rapporteur, pour m’inciter à retirer ce sous-amendement, a fait valoir que les membres et rapporteurs de la Haute Autorité de la transparence de la vie publique seront tenus de respecter le secret professionnel. Je ne suis pas complètement convaincu par cet argument.

En effet, les membres et rapporteurs ne seront pas tout le personnel de la Haute Autorité : cette instance étant appelée à gérer plus de 7 000 dossiers, dont l’actualisation devra être permanente, elle risque d’avoir des effectifs plus importants que ceux de l’actuelle Commission pour la transparence financière de la vie politique. Or ces personnels auront nécessairement accès aux informations transmises et traitées.

Quoi qu’il en soit, je retirerais volontiers ce sous-amendement si Mme le ministre voulait bien m’indiquer quels moyens matériels le Gouvernement compte mettre à la disposition de la Haute Autorité. En particulier, quel sera le nombre des rapporteurs ? De quelle catégorie relèveront les fonctionnaires mis à la disposition de cette très Haute Autorité qui dira, pour l’éternité, le bien et le mal dans le monde politique ?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Monsieur Longuet, votre amendement est satisfait par le projet de loi ordinaire que nous examinerons ultérieurement. En effet, l’alinéa 21 de l’article 12 de ce texte prévoit, dans la rédaction adoptée par la commission, que « les membres de la Haute Autorité sont soumis au secret professionnel », et l’alinéa 30 du même article que « les agents de la Haute Autorité sont soumis au secret professionnel ».

Les dispositions relatives à la Haute Autorité ne relevant pas du domaine de la loi organique, il est logique qu’elles soient inscrites dans la loi ordinaire. Je pense que leur adoption ne posera pas de difficulté.

M. Gérard Longuet. Dans ces conditions, je retire le sous-amendement n° 152 ; on en reparlera lors de l’examen du projet de loi ordinaire.

M. le président. Le sous-amendement n° 152 est retiré.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Monsieur Longuet, je tiens à vous apporter quelques précisions.

À l’heure actuelle, la Commission pour la transparence financière de la vie politique bénéficie de six emplois à temps plein ; il est prévu d’en affecter vingt à la Haute Autorité, qui pourra en outre bénéficier de l’appui, en termes de moyens matériels, des grandes juridictions dont seront issus les rapporteurs, en particulier dans les périodes de renouvellement des déclarations.

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 186.

M. Gérard Longuet. Le groupe UMP est favorable à ce sous-amendement, qui vise à rendre aux bureaux des assemblées parlementaires, sollicités par la Haute Autorité, la responsabilité de saisir le parquet. Cette formule est beaucoup plus respectueuse de la séparation des pouvoirs, puisque, au moins formellement, c’est le législatif qui fera le ménage dans sa propre maison, même s’il se fondera bien entendu sur les informations transmises par la Haute Autorité.

M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.