compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Pierre Bel

Secrétaire :

M. François Fortassin.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Décès d'un ancien sénateur

M. le président. J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Louis de La Forest, qui fut sénateur d’Ille-et-Vilaine de 1971 à 1989.

3

Demande de création d'une mission commune d'information

M. le président. Par lettre en date du 1er octobre 2013, M. Jean-Claude Gaudin, président du groupe UMP, a fait connaître à M. le président du Sénat que le groupe UMP exerce son droit de tirage, en application de l’article 6 bis du règlement, pour la création d’une mission commune d’information sur la réforme des rythmes scolaires afin d’évaluer sa mise en place, les difficultés rencontrées et le coût induit pour l’ensemble des communes.

La conférence des présidents sera saisie de cette création lors de sa réunion du 9 octobre prochain.

4

Décision du conseil constitutionnel

M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du mardi 1er octobre 2013, le texte d’une décision du Conseil constitutionnel qui concerne la conformité à la Constitution de la loi du pays relative à la concurrence en Nouvelle-Calédonie.

Acte est donné de cette communication.

5

Candidatures à une mission commune d'information et à une commission spéciale

M. le président. L’ordre du jour appelle la désignation :

– des vingt-sept membres de la mission commune d’information sur le sport professionnel et les collectivités territoriales, créée sur l’initiative du groupe du Rassemblement démocratique et social européen en application de son droit de tirage ;

– et des douze membres de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l’évaluation interne.

En application de l’article 8 de notre règlement, les listes des candidats présentés par les groupes ont été affichées.

Ces listes seront ratifiées si la présidence ne reçoit pas d’opposition dans le délai d’une heure.

6

 
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles
Discussion générale (suite)

Modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des métropoles

Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (projet n° 796 [2012-2013], texte de la commission n° 860 [2012-2013], rapport n° 859 [2012-2013], avis nos 846 et 847 [2012-2013]).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, madame la présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, il y a un an, le 5 octobre exactement, le Président de la République partageait avec nous tous sa conviction que les territoires sont un atout pour le redressement de notre économie.

À la suite des états généraux de la démocratie territoriale organisés par le Sénat, qui furent un grand succès, il avait articulé son projet pour les territoires selon quatre principes ; sous la conduite du Premier ministre, nous n’avons eu de cesse, avec ma collègue Mme Anne-Marie Escoffier, de nous y référer pendant cette année, qui a été d’une grande richesse.

Le 5 octobre dernier, le Président de la République nous disait sa confiance dans la capacité des collectivités à conduire des expérimentations. Il souhaitait voir le droit d’expérimentation « élargi et assoupli afin que les collectivités locales puissent mettre en place des politiques nouvelles, des pratiques différentes ou même adaptent, comme il leur paraîtra souhaitable, des dispositifs existants ».

Cette faculté existera demain si le Parlement consent à faire de la conférence territoriale de l’action publique, la CTAP, le lieu de l’expression des initiatives locales. C’est ainsi, j’en suis convaincue, qu’il faut comprendre cette conférence : à ceux qui voudront bien la faire vivre, elle permettra de faire valoir les responsabilités de chacun tout en organisant finement les délégations de compétences infrarégionales, pour aboutir à une vraie simplification de la gouvernance territoriale.

En effet, les collectivités pourront se porter candidates pour des délégations de compétences de l’État, qui seront de fait des formes d’expérimentation, même si nous avons renoncé à définir l’expérimentation dans la loi fondamentale, le Président de la République n’ayant pu obtenir de perspectives positives en matière de révision de la Constitution.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Belle obstination !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Souvenons-nous que nombre de réformes fondamentales de notre action publique ont d’abord été conduites par voie d’expérimentation : la régionalisation des transports de personnes en 1998, la délégation de la gestion des aides à la pierre en 2004, la mise en place du RSA en 2007 ou la nouvelle procédure de révision des valeurs locatives en cours.

Hier les expérimentations, demain les délégations, mais toujours la même volonté de permettre à certains l’exercice de nouvelles responsabilités : la seconde lecture que nous entamons aujourd’hui nous permettra d’affiner cette ambition. J’admets qu’elle revêt un caractère peut-être déstabilisant, mais le XXIe siècle doit voir s’affirmer en France la société du contrat.

La conférence territoriale de l’action publique doit être le lieu de la concertation de toute l’action publique, y compris celle de l’État. Celui-ci doit s’adapter. Il s’agit donc ici non pas d’un État arbitre, mais d’un État partenaire, d’un État partie prenante à l’action publique.

Les CTAP, ce sont les « conférences de partage » prônées par Martin Malvy, dont la région Midi-Pyrénées conjugue avec force avec les autres collectivités l’action économique. Martin Malvy y voyait déjà le lieu où se déclinent, « par convention », les compétences que la loi attribue « au coordinateur, au chef de file, au pilote ».

En somme, les CTAP, cela consiste à consacrer un peu de temps aux accords de gouvernance pour gagner beaucoup de temps par la suite. Les collectivités n’auront plus à se réunir au quotidien pour savoir, à propos de chaque projet, qui fait quoi, qui finance quoi.

Déterminer des modalités d’organisation particulières entre les collectivités, valoriser la confiance entre leurs exécutifs, qui ont déjà su apporter la preuve qu’ils sont capables de s’entendre, libérer les initiatives locales : voilà l’objectif des textes que je défends.

Il demeure un point de désaccord entre nous, concernant les incitations à entrer dans le jeu collectif. Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, il a semblé au Gouvernement nécessaire de prévoir des incitations, car, chacun d’entre nous le sait bien, jouer collectif n’est ni naturel ni spontané.

Permettez-moi de vous redire que nous avons dû inventer une solution qui combine l’efficacité de l’organisation avec le maintien de la clause générale de compétence et l’interdiction de la tutelle d’une collectivité sur une autre. (M. François Patriat s’exclame.) Ce sont les deux principes que le Président de la République, monsieur Patriat, a tenu à afficher en haut de sa feuille de route !

M. François Patriat. Oui, mais je le regrette ! Il faut savoir si l’on veut ou non faire des économies !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le pire eût été de s’en tenir à réduire les dotations, sans autre forme de péréquation ni de perspective. C’est tout le contraire que nous avons choisi de faire : construction du cadre d’une rationalisation concertée ; efficience de la dépense publique par le contrat ; instauration d’un pacte de confiance et de responsabilité avec les collectivités ; péréquation encore en progression cette année, avec en ligne de mire la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation et une réforme de la dotation globale de fonctionnement. Je remercie une nouvelle fois le Sénat de ses travaux sur les sujets liés à la fiscalité.

La confiance, le Président de la République la plaçait enfin dans de grands desseins en matière de maîtrise de la production de normes. Le bilan est positif : les outils seront bientôt tous en place et les chantiers sont lancés.

La proposition de loi portant réforme de la commission consultative d’évaluation des normes, laquelle deviendra le conseil national de l’évaluation des normes, écrite au Sénat et votée par lui en janvier dernier à l’unanimité, a été adoptée il y a deux semaines à l’Assemblée nationale. Nous aurons à en débattre de nouveau, en deuxième lecture, lundi prochain, avec l’espoir qu’elle sera définitivement votée d’ici à la fin de l’année. Ce texte le mérite.

Le Premier ministre a réformé le Conseil national du sport et, désormais, les élus, représentant le tiers des membres de la commission d’examen des règlements fédéraux relatifs aux équipements sportifs, pourront saisir directement le Conseil national des normes. Mme Gourault et MM. Sueur et Doligé, notamment, semblent respirer un peu mieux depuis l’annonce de cette nouvelle… (Sourires.) C’est une garantie supplémentaire pour les communes de faire entendre leur voix, alors qu’elles assument l’essentiel des dépenses d’entretien et de mise aux normes des équipements sportifs. Monsieur le président du Sénat, le Gouvernement devait cette réforme à votre assemblée !

Vous avez raison, mesdames, messieurs les sénateurs, de souligner que nous devons gagner du temps. C’est pourquoi nous avons ouvert les chantiers de plusieurs habilitations à légiférer par voie d’ordonnances.

Ainsi, en matière de simplification des relations entre les citoyens et l’administration, il est prévu que le silence de l’administration vaudra désormais accord pour la majeure partie des autorisations administratives. Je salue l’action sur ce point des rapporteurs des deux assemblées, qui a permis l’adoption de ce texte à l’unanimité dans les deux chambres. Nous œuvrons à son adoption définitive rapide et vous remercions de votre soutien.

Je rappelle aussi l’ordonnance en cours de préparation sur la construction et l’urbanisme, qui a été présentée ce matin, ainsi que celle visant à simplifier la vie des entreprises : le projet de loi d’habilitation est en cours d’examen au Parlement ; vous aurez à en débattre dans les prochaines semaines.

La clarté est le second principe que le Président de la République a mis en exergue devant nous tous le 5 octobre 2012 : « Nous devons sortir de la confusion des responsabilités entre l’État et les collectivités, mais aussi entre les collectivités elles-mêmes. »

Cette clarté, c’est celle qui découlera de l’article 2 du projet de loi, au travers duquel nous vous proposons de définir des chefs de file qui organiseront les modalités de l’action commune de toutes les collectivités intéressées à l’exercice d’une compétence.

Le Président de la République évoquait déjà, en octobre dernier, la création des métropoles. Nous avons avancé dans cette direction. Il nous disait qu’il ne voyait pas d’inconvénient à ce que les territoires s’organisent différemment, selon qu’ils sont plutôt urbains ou plutôt ruraux.

J’ai déjà eu l’occasion de le dire et je le redirai autant qu’il le faudra : nous avons suivi une feuille de route qui s’inspirait largement des travaux du Sénat, des différents rapports de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, présidée par Mme Gourault. Qu’en est-il aujourd’hui ? De quoi sera fait demain ?

Nous avons obtenu du Premier ministre l’assurance que, une fois voté ce premier volet de la réforme, nous discuterions rapidement, dès janvier prochain, du deuxième volet, qui donnera leur contenu aux missions de chef de file des régions et des départements : développement économique pour les premières, formation professionnelle, développement des solidarités territoriales et schéma des services publics pour les seconds.

C’est pourquoi nous ne devons pas fléchir ; nous voici rassemblés pour l’examen du texte en deuxième lecture.

Au titre Ier, article 2, nous avons tenu à déposer un amendement fondamental à nos yeux, car il ouvre la possibilité, pour une ou plusieurs collectivités, de proposer des rationalisations de l’exercice des compétences, notamment en matière de schémas.

Les élus locaux ne cessent de réclamer « moins de schémas et de paperasse » et davantage de liberté d’action.

Il m’apparaît aujourd’hui pertinent de nous inspirer, par exemple, du plan d’aménagement et de développement durable de la Corse ou du schéma directeur de la région d’Île-de-France, deux documents qui se sont avérés être plus efficaces, sur le terrain, qu’un simple schéma régional, mais aussi plus respectueux des stratégies des collectivités que les directives territoriales d’aménagement, leur élaboration ayant donné lieu à une plus grande concertation. Tel est le chemin que je vous invite à suivre.

À titre d’illustration, j’indique que la Commission européenne a présenté au mois de mai dernier un projet de directive sur la planification spatiale maritime et la gestion intégrée des zones côtières. La question de la gouvernance y tient une place majeure. C’est dans cette perspective que s’inscrit la mission confiée par le Premier ministre à votre collègue du Morbihan, Mme Odette Herviaux, sur la gouvernance des grands ports maritimes. C’est également dans cette perspective que les conférences territoriales de l’action publique devront se saisir des enjeux liés au développement des économies maritimes et côtières ; sinon, la directive ne pourra être appliquée en France.

S’agissant des métropoles, il n’est pas inutile de revenir sur le souci qui est le nôtre : doter nos territoires urbains des outils nécessaires à leur développement. Les domaines d’action sont vastes : mobilité durable, urbanisme, qualité de vie, logement, services d’eau, déchets et assainissement… Là encore, je sais ce qui nous oppose. Le Gouvernement souhaite une automaticité de la transformation, alors que le Sénat entend s’en tenir au volontariat.

Le Gouvernement promeut le franchissement d’un pas supplémentaire vers l’intégration intercommunale. Il ne s’agit pas de tuer les communes : au contraire, pour un certain nombre d’entre elles, l’association intercommunale est la garantie d’un meilleur service et d’une plus grande régulation. Je souhaite qu’une petite commune puisse bénéficier des services d’ingénierie publique de l’intercommunalité ou du département : c’est plus efficace et moins onéreux que le recours contraint à un bureau d’études privé. Telle est ma philosophie de l’intégration intercommunale : partout, les communes doivent être préservées, sauf évidemment si elles souhaitent fusionner.

S’agissant de Paris, de Lyon et de Marseille, les débats sont différents.

Au lendemain de la suppression par le Sénat des dispositions relatives à la métropole du Grand Paris, j’ai ouvert les portes de mon ministère à qui voulait échanger avec moi. Je suis sûre que M. Dallier s’en souvient… Au fil des réunions, il est apparu qu’une majorité de parlementaires d’Île-de-France s’accordaient sur la timidité relative du premier projet et souhaitaient aller vers une intégration plus forte et plus audacieuse.

Je n’avais qu’un objectif : ne pas laisser une page blanche pour notre région capitale. Je n’ai eu qu’une méthode : rapprocher sans cesse des positions très éloignées, que dis-je ? rapprocher les contraires, tant les solutions proposées alors pouvaient paraître – n’est-ce pas, monsieur Karoutchi ? – dissemblables.

M. Roger Karoutchi. Je n’ai encore rien dit !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Certains voulaient la fusion des départements, d’autres – Mme Lipietz s’en souvient certainement – la création d’une métropole « à la lyonnaise », d’autres encore une communauté urbaine, d’autres enfin une fusion de la région et des départements… De nombreuses propositions étaient sur la table !

Mesdames, messieurs les sénateurs des groupes CRC et UMP, finalement, je vous remercie (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.), car votre vote en première lecture est à l’origine d’une solution unique, innovante et ambitieuse,…

M. Philippe Dallier. Exactement !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. … dont nous avons pu discuter sur le terrain dès le mois de juillet avec M. Christian Favier.

La solution que j’ai proposée par voie d’amendement à l’Assemblée nationale est simple : elle est inspirée par les métropoles de droit commun, mais prend en compte les particularités de la région parisienne, notamment sa taille, sa diversité et son statut de région capitale.

Cette solution répond à quatre impératifs que vous aviez mis en exergue.

Le premier était que le périmètre soit clair et lisible : il s’agira de Paris et de sa petite couronne.

Le deuxième impératif était que cette solution soit efficace en matière de logement : la métropole concentrera les compétences dans ce domaine.

Le troisième impératif était celui de la péréquation : la métropole, EPCI à fiscalité propre, permettra la mutualisation de la richesse fiscale, qui sera redistribuée sous forme de dotations territoriales et d’actions d’intérêt métropolitain au bénéfice de l’ensemble du territoire.

Enfin, et c’était pour tous une condition sine qua non, il importait de ne pas créer une région à deux vitesses. Je vous réponds d’emblée sur ce point, monsieur Karoutchi ! C’est pour cette raison que les intercommunalités de la grande couronne doivent atteindre une taille leur permettant de faire valoir leurs politiques et leurs projets dans le concert régional.

La création d’une métropole forte dans une région équilibrée repose en fait sur quatre articles fondateurs du projet de loi.

Les articles 10 et 11 prévoient la structuration intercommunale de la grande couronne. Votre commission des lois les a supprimés ; nous comptons les rétablir pour les raisons que je viens d’exposer, mais le débat reste bien évidemment ouvert.

L’article 12 vise à créer, au 1er janvier 2016, la métropole du Grand Paris, établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre à statut particulier – je le répète, car c'est un point important – comprenant Paris et les communes des trois départements de la petite couronne. Elle sera organisée en territoires qui exerceront les compétences classiques de chaque territoire, à l’exception des missions stratégiques pour le développement de la métropole : l’habitat, le logement, l’aménagement et l’environnement.

Je sais que la question du statut des territoires vous a beaucoup occupés.

Vous vous êtes interrogés, à juste titre, sur leur statut juridique. Vous avez souhaité leur conférer une personnalité morale. Ce n’est pas la position du Gouvernement : nous avons d’autres solutions pour leur faire gagner en reconnaissance institutionnelle sans bloquer la métropole. J’espère qu’en faisant un pas vers leur reconnaissance institutionnelle, nous pourrons trouver un accord.

Vous vous êtes également posé la question de leur statut politique : comment ces territoires interviendront-ils dans les politiques de la métropole ? Quelles marges de manœuvre auront-ils ? Là sont les véritables enjeux, car il y va de l’avenir démocratique de la métropole.

La solution qui a été adoptée à l’Assemblée nationale est certainement perfectible. Les amendements que la commission des lois du Sénat a votés ont conduit à une forme moins intégrée de la métropole du Grand Paris. Le Gouvernement cherchera donc avec les volontaires – il y en a ! – des solutions pour que le Sénat se rapproche d’une forme plus construite de métropole en matière de logement, d’aménagement et d’environnement.

Enfin, pour parfaire l’édifice, l’article 13 tend à créer un document dédié au logement en Île-de-France, le « schéma régional de l’habitat et de l’hébergement », afin de renforcer la coordination à l’échelle régionale. La région doit jouer pleinement son rôle.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la métropole du Grand Paris fournira le cadre institutionnel pour la mise en place des politiques publiques qui permettront de juguler la crise : elle est une solution !

En effet, comme partout ailleurs sur le territoire, l’intercommunalité est une solution contre les particularismes, voire les égoïsmes locaux, pour des politiques publiques plus efficaces. L’intercommunalité, c’est bien ; mais en Île-de-France, c’est mieux quand elle permet la péréquation et le développement de projets cohérents avec les besoins des citoyens d’un territoire.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la métropole du Grand Paris, c’est la plus importante opération de péréquation jamais réalisée en France, sans heurts, dans le respect des fonctions et des besoins de chaque territoire.

En ce qui concerne Lyon, monsieur Mercier, nous aurons à discuter de dispositions relativement mineures si l’on pense à tout le chemin qui a déjà été parcouru. J’ai grande confiance. Nombre d’entre vous souhaitent revenir sur plusieurs détails relatifs à l’exercice des compétences. La discussion demeure ouverte sur de nombreux points.

Enfin, nous conclurons le débat par l’examen de deux articles majeurs, relatifs respectivement à la dépénalisation du stationnement payant et à la création des pôles d’équilibre et de solidarité territoriale.

S’agissant du stationnement, je me réjouis que les propositions des associations d’élus aient enfin pu trouver une concrétisation dans un texte. Deux ans après l’adoption de la loi, la dépénalisation deviendra effective.

Je ne vous cache pas qu’il reste quelques doutes à lever quant aux modalités précises de sa mise en œuvre. J’aurais souhaité, comme plusieurs de mes collègues du Gouvernement, que nous profitions des deux années qui nous séparent de l’application concrète de cette réforme pour expérimenter le dispositif sur quelques territoires. Je ne doute pas que nombre d’entre vous soient intéressés pour évaluer, in situ et avec les vrais chiffres, les perspectives, en matière tant de recettes que de dépenses et de manque à gagner pour l’État et certaines collectivités.

Je veux aussi redire ici que le Premier ministre a toujours demandé que la mise en œuvre de ces dispositions soit financièrement neutre pour l’État. Notre préoccupation porte donc sur l’adaptation à celles-ci des politiques de stationnement de certaines communes.

Je terminerai mon propos en évoquant les pôles ruraux. C’est le Sénat qui les a inventés. Anne-Marie Escoffier et moi-même avons encouragé cette dynamique, estimant que celle qui a été engendrée par la création des pays en 1995, avant d’être réellement généralisée grâce à la loi Voynet de 1999, était une bonne manière de bâtir des projets communs dans les territoires non urbains.

Vous avez, sur ce sujet, des points de désaccord avec l’Assemblée nationale. En effet, les députés ont souhaité faire de ces nouveaux espaces de concertation des lieux de territorialisation de l’action publique, pouvant se transformer à terme en intercommunalités.

Demain, nous le savons tous, c’est la présence effective des services publics qui garantira le pacte républicain : j’en suis profondément convaincue !

Demain – et cela explique notre impatience d’engager la discussion du deuxième projet de loi –, la solidarité territoriale, la présence équilibrée des services publics dans les territoires seront le rempart contre les extrémistes surfant sur la peur de certains de nos concitoyens d’être abandonnés par l’État.

Telle est, mesdames, messieurs les sénateurs, la réforme de l’action publique que je défends. Cela étant, elle doit non pas obéir à des postures défensives, mais, au contraire, être guidée par le seul objectif de satisfaire le besoin de nos concitoyens de vivre bien, de les préparer à sortir de la crise grâce à des solutions institutionnelles transparentes et efficaces.

Le Premier ministre l’a dit bien avant moi, en janvier dernier, en défendant le « nouveau modèle français » : il faut repenser le rôle des pouvoirs publics, renforcer la fonction stratégique de l’État, moderniser l’action publique grâce à la coopération de tous – élus, fonctionnaires et usagers – et améliorer l’efficacité grâce à une meilleure répartition des tâches entre l’État et les différents niveaux de collectivités.

Je le souligne de nouveau, la modernisation de l’action publique, c’est non pas moins de politiques publiques, qu’elles soient portées par l’État, les régions ou d’autres collectivités, mais des services publics plus efficaces, plus proches des citoyens et, au final, moins coûteux.

Je crois profondément que les collectivités de France sont le lieu dynamique du redressement de notre pays. Trop d’articles de presse ont voulu donner à croire que le Gouvernement les avait oubliées. J’affirme solennellement ici qu’il tiendra les engagements pris devant vous le 5 octobre 2012 par le Président de la République. Le Gouvernement a choisi d’entendre et de respecter la voix de chacune des composantes tant de la Haute Assemblée que de l’Assemblée nationale, depuis le début de l’’examen de ce texte par le Sénat, en mai dernier. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. René Vandierendonck, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, le Sénat est aujourd'hui de nouveau saisi du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

Ce projet de loi avait été adopté en première lecture le 6 juin dernier par le Sénat à une large majorité des votants : 182 voix pour et 38 contre.

Ce vote du Sénat, je le rappelle, avait été obtenu après que Mme la ministre eut apporté des précisions fondamentales sur le calendrier de l’examen de deux autres textes intéressant la décentralisation, relatifs l’un à la simplification des normes, qui représente une priorité absolue pour le Sénat, l’autre au statut de l’élu local, tout aussi prioritaire à nos yeux. Sur ces points, le Gouvernement avait, dès la première lecture au Sénat, consenti à des avancées tout à fait importantes.

Je ne surprendrai personne en disant que la deuxième lecture s’inscrit pour nous dans la même logique que la première : faire confiance à l’intelligence territoriale et s’appuyer d’une manière non hémiplégique sur les principes fondamentaux qui gouvernent l’approche du Sénat sur les questions d’organisation territoriale.

Il faut constater que quand nous avons su trouver un accord, l’Assemblée nationale nous a suivis. Ainsi, nos collègues députés ont émis un vote conforme sur les dispositions relatives à la métropole de Marseille et sont allés dans notre sens s’agissant de la dépénalisation du stationnement, même s’ils ont apporté des modifications au dispositif, d’ailleurs souvent fort utiles. Enfin, l’Assemblée nationale nous a également suivis sur la création des pôles ruraux de coopération, dont l’esprit et les objectifs font tout de même furieusement penser aux pays !