M. Alain Fouché. Ça, c’était bon pendant la campagne électorale !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. … les choses vont dans la bonne direction.

Oui, la France redémarre.

Les indicateurs montrent que l’investissement du secteur industriel est positif, les chefs d’entreprise donnent des indications favorables en matière d’embauche pour les mois à venir, la consommation tient bon en dépit des difficultés que peuvent rencontrer certains de nos concitoyens.

Au moment où les perspectives redeviennent encourageantes, tout ce que nous avons entrepris depuis plus de vingt mois doit non seulement être poursuivi, mais surtout consolidé et amplifié. Tel est le sens du pacte que le Président de la République a proposé aux partenaires sociaux et que nous allons réussir à mener à bien.

Le Gouvernement a reçu cette mission du Président de la République ; il y travaille. Les partenaires sociaux vont se rencontrer le 28 février prochain. Ils auront à définir un cadre, une méthode permettant de mettre les choses en mouvement : d’un côté, la Nation va consentir des efforts supplémentaires pour donner des marges aux entreprises afin qu’elles investissent, innovent et embauchent ; de l’autre, nous attendons des contreparties en termes d’emploi, de qualité d’emploi, de formation professionnelle et de perspectives pour les salariés.

Il s’agit d’un pacte de responsabilité dans lequel le Gouvernement assume sa part. Nous demandons à tous ceux qui peuvent participer à ce redressement de faire de même. Il est important que chacun soit au rendez-vous, que chacun prenne ses responsabilités ! L’année 2014 est l’année du tournant, l’année où ce que nous avons entrepris, ce que nous avons semé, va enfin porter ses fruits !

M. Gérard Cornu. Remaniement !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Nous ne sommes pas seuls en Europe. Notre situation est meilleure parce que nous avons pris des décisions courageuses. Mais je ne suis pas là pour faire des déclarations désagréables à l’égard de tel ou tel pays. Nous devons poursuivre sur la voie que nous avons choisie et amplifier ce mouvement. Ce n’est pas le moment de changer de politique !

Nous ne faisons pas de la politique au jour le jour. Nous invitons chacun à prendre ses responsabilités, la majorité comme l’opposition, parce que ce que nous voulons, c’est la réussite de la France ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines du groupe CRC et du RDSE.)

biodiversité

M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé, pour le groupe écologiste.

M. Jean-Vincent Placé. Monsieur le Premier ministre, nous avons, malheureusement, quatre ans de retard, quatre ans au moins.

M. Alain Fouché. Ça commence bien !

M. Jean-Vincent Placé. Je veux parler de la protection de la biodiversité !

L’Union internationale pour la conservation de la nature, l’UICN, avait fait démarrer en 2010 le « compte à rebours pour enrayer la perte de biodiversité ». Où en sommes-nous aujourd’hui ?

Des grands prédateurs – « la grande faune charismatique » – aux insectes, tous – mammifères, reptiles, poissons, oiseaux, végétaux... – comptent des milliers d’espèces et de sous-espèces en voie de disparition. (Marques d’ironie sur les travées de l'UMP.)

M. Jean Bizet. Les écolos aussi !

M. Jean-Vincent Placé. Il s’agit d’une hécatombe silencieuse, et je ne suis pas sûr, chers collègues, qu’il y ait tant que cela matière à rire.

M. Alain Fouché. On ne rit pas, on écoute !

M. Jean-Vincent Placé. Sur plus de 71 000 espèces étudiées, plus de 21 000 figurent sur la liste rouge mondiale des espèces menacées établie par l’UICN.

La France, avec ses outre-mer, compte parmi les dix pays hébergeant le plus grand nombre d’espèces menacées sur son territoire. Nous sommes les témoins d’un effondrement des dynamiques naturelles.

Aux esprits taquins que j’aperçois sur les rangs de l’opposition (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.), plus attentifs peut-être aux portefeuilles à court terme qu’à la beauté de la nature, et qui ne verraient dans ce sujet qu’une « danseuse » des écologistes, je rappellerai que ce sujet touche aussi la santé, l’alimentation et l’économie dans son ensemble.

La biodiversité rend des services innombrables : pollinisation, purification de l’eau, rafraîchissement de l’air...

Un sénateur du groupe UMP. C’est une question d’actualité ?

M. Jean-Vincent Placé. Si vous dégradez un milieu naturel ainsi que l’ensemble de ses fonctions, le service à financer pour le remplacer sera bien plus onéreux que le coût des aménagements nécessaires à sa préservation. Agissons donc pour cette « biodiversité positive ».

Il s’agit d’une responsabilité qui nous engage, et le Gouvernement le sait. J’en veux pour preuve les engagements qu’il a pris sur ce sujet, notamment celui de la création de l’Agence nationale de la biodiversité en 2014. C’est ce que vous avez déclaré, monsieur le Premier ministre, lors de la deuxième conférence environnementale. Nous en avons pris bonne note et je m’en réjouis.

M. Jean-Vincent Placé. Vous l’avez compris, la biodiversité nous préoccupe et le temps presse. (Oui ! sur les travées de l'UMP.) Les associations s’inquiètent d’un agenda parlementaire chargé et veulent être rassurées sur le fait que cet enjeu sera examiné prochainement.

Aussi, monsieur le Premier ministre, ma question est la suivante… (Ah ! sur les travées de l’UMP.)

Quelle impatience ! Il est vrai qu’après avoir fait si peu pendant dix ans, vous avez des raisons d’être impatients !

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Vincent Placé. Qu’en est-il de la loi-cadre sur la biodiversité ? Quel en est le calendrier ? La représentation des associations de protection de l’environnement ne court-elle pas le risque d’être affaiblie dans ses instances de décision ? Quand l’Agence nationale pour la biodiversité verra-t-elle le jour et quels seront son périmètre et ses moyens ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Monsieur Placé, votre question est tout à fait justifiée, et je vous remercie de me l’avoir posée… (Sourires.)

M. Alain Fouché. Vous pouvez donc faire preuve d’un minimum de gratitude !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. D’un maximum de gratitude ! (Nouveaux sourires.)

Si, depuis 1976, plusieurs lois ont contribué à la protection de la biodiversité, ce sera en effet la première fois qu’une loi y sera spécifiquement consacrée.

Vous l’appelez de vos vœux et vous avez parfaitement raison. Vous savez que le Gouvernement accorde beaucoup d’importance à ce projet, qui permettra de promouvoir en France une vision dynamique de la biodiversité et de notre patrimoine naturel, aussi bien dans l’Hexagone que dans les outre-mer.

Le projet de loi, actuellement en cours d’examen au Conseil d’État, sera présenté par Philippe Martin en conseil des ministres au mois de mars prochain. Ce texte chemine donc de manière sûre, et le Gouvernement s’est engagé à ce qu’il soit examiné par le Parlement avant la fin du printemps.

Le premier objectif de ce projet de loi, monsieur le sénateur, sera de renforcer nos politiques de protection. Cela signifie de nouveaux moyens pour les parcs naturels régionaux et pour le Conservatoire du littoral, mais aussi de nouvelles réserves halieutiques et un meilleur encadrement des activités en mer.

Vous m’avez également interrogé sur la place des ONG dans ce processus : la concertation avec ces organisations est en effet absolument nécessaire, et elle est d’ores et déjà engagée. Chacun reconnaît que les ONG doivent trouver leur place dans le dispositif. Nous devons faire en sorte que les associations de protection, très nombreuses et très actives, disposent de la meilleure représentation possible, de même que les collectivités locales, sans oublier les acteurs économiques et scientifiques.

C’est la raison pour laquelle nous avons l’intention de créer un conseil unique chargé de la biodiversité, là où plusieurs instances agissent aujourd’hui, parfois sans cohérence, et sans que la loi leur confère un réel rôle d’accompagnement des décisions publiques. Ce regroupement devra se faire au niveau national, mais aussi au niveau régional.

Enfin, comme je l’ai annoncé lors de la conférence environnementale, nous allons reprendre un chantier qui avait été engagé par nos prédécesseurs, avant d’être finalement abandonné, celui de la création d’une agence française de la biodiversité, issue du rapprochement de plusieurs acteurs existants : c’est aussi une question de cohérence, d’efficacité et de bonne gestion des moyens.

Ainsi, l’Agence des aires marines protégées, l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, l’ONEMA, le service du Muséum d’histoire naturelle et bien d’autres organismes contribueront à créer une agence forte, dotée d’environ 1 200 agents, qui auront les moyens de fournir aux acteurs non seulement les données, mais aussi l’expertise dont ils ont besoin pour faire des choix, notamment dans les territoires.

Cette agence sera en outre dotée des moyens financiers lui permettant de soutenir également des projets grâce au programme des investissements d’avenir. Je me souviens d’ailleurs, monsieur Placé, que vous aviez apporté votre concours à la réflexion qui avait précédé l’adoption du nouveau programme des investissements d’avenir : vous aviez plaidé pour des investissements susceptibles de soutenir des programmes d’accompagnement pour le maintien et la préservation de la biodiversité, mais aussi de la transition énergétique.

M. Alain Fouché. Ça peut ouvrir des perspectives, monsieur Placé ! (Sourires.)

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. L’ensemble est donc cohérent : la transition énergétique figure au cœur du projet du Gouvernement, et la biodiversité en constitue également l’un des éléments prépondérants. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste, ainsi que sur plusieurs travées du groupe CRC.)

intermittents

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour le groupe CRC.

M. Pierre Laurent. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Des négociations très importantes entre organisations syndicales et patronales sont en cours sur l’indemnisation du chômage. Les organisations patronales ont mis sur la table des propositions d’une grande violence contre les droits des salariés. Sont notamment menacées l’indemnisation chômage de l’ensemble des intérimaires, celle des salariés dits « à activité réduite » et, de nouveau, celle des intermittents du spectacle relevant des annexes 8 et 10. Pendant que le MEDEF nous amuse, comme sœur Anne, avec des contreparties qu’on ne voit pas venir, il sonne la charge contre les droits des salariés, condamnés au chômage et à la précarité. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Monsieur le ministre, allez-vous laisser faire ? Pouvez-vous nous assurer que votre gouvernement ne s’est pas engagé auprès des autorités européennes à réduire le niveau d’indemnisation du chômage dans notre pays, conformément aux souhaits du MEDEF ?

Plus précisément, ma question porte sur le régime de l’intermittence du spectacle. La charge est relancée contre les annexes 8 et 10. Or un rapport réalisé à la demande du syndicat des entreprises artistiques et culturelles, le Syndeac, par Olivier Pilmis et Mathieu Grégoire, rendu public jeudi dernier, contribue utilement au débat. Il démontre avec des hypothèses chiffrées que, contrairement aux pistes envisagées d’augmentation du nombre d’heures exigé, qui fragiliseraient les plus précaires, une réforme juste du régime spécifique d’assurance chômage des intermittents est possible : en rétablissant la date anniversaire ainsi que le seuil de 507 heures sur douze mois, au lieu de dix, et en mettant en place un plafond de cumul des salaires et des indemnités, le système peut être équilibré et pérenne, tout en garantissant plus de stabilité aux salariés intermittents et en privilégiant l’indemnisation des plus précaires.

Ma question, monsieur le ministre, est donc double.

Premièrement, le Gouvernement va-t-il s’engager clairement sur ce dossier ? Allez-vous agir en faveur de la mise en œuvre des propositions raisonnables contenues dans ce rapport et vous opposer au scénario catastrophe pour la culture et la création avancé par le MEDEF ?

Deuxièmement, allez-vous accéder à la demande que vous a adressée, le 13 février dernier, le comité de suivi de la réforme de l’intermittence, dont je fais partie avec d’autres parlementaires, d’un rendez-vous conjoint sur cette question avec la ministre de la culture ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail.

M. Alain Gournac. Tout va bien !

M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur Laurent, comme vous l’avez indiqué, une négociation s’est récemment ouverte – avec un peu de retard, d’ailleurs, puisqu’elle aurait dû s’ouvrir à la fin de l’année dernière – pour le renouvellement de la convention de l’UNEDIC sur le chômage.

Vous le savez, ce sont les partenaires sociaux, patrons et syndicats, qui négocient – il s’agit d’ailleurs du dernier dispositif véritablement paritaire –, et il leur appartient d’aboutir à un résultat.

Vous le savez également, si les partenaires sociaux ne parvenaient pas à un accord, il appartiendrait au Gouvernement, comme le prévoit la loi, de prendre ses responsabilités ; mais un tel cas de figure ne s’est que rarement produit par le passé.

C’est donc d’abord et avant tout aux partenaires sociaux de négocier.

C’est vrai notamment s’agissant des droits rechargeables, une avancée considérable de la loi sur la sécurisation de l’emploi, qui doit maintenant être mise en œuvre. Le Gouvernement est extrêmement attaché à la concrétisation de ces droits rechargeables, qui permettront d’aider les chômeurs les plus précaires tout en les incitant à reprendre un travail.

Il en va de même de la simplification nécessaire du système d’assurance chômage, dont la complexité crée parfois de réelles difficultés pour les services de Pôle emploi lorsqu’il s’agit de calculer l’indemnisation, comme pour le chômeur lui-même lorsqu’il s’agit de prévoir l’indemnisation à laquelle il pourrait avoir droit. Cette complexité peut parfois conduire à des erreurs, à des incompréhensions, voire, parfois, à de véritables drames ; d’où la nécessité d’une simplification.

Enfin, il conviendra que les partenaires sociaux s’interrogent sur la question du « déficit ». Mais après tout, qu’y a-t-il d’anormal à ce que l’assurance chômage soit en déficit dans une période de chômage élevé ? C’est la vocation même d’un mécanisme d’assurance chômage !

M. Alain Fouché. Regardez-nous un peu, monsieur le ministre ! Nous sommes là, nous aussi !

M. Michel Sapin, ministre. Je veux redire ici – Mme la ministre de la culture aura également l’occasion de s’exprimer sur ce sujet à l’occasion d’une question posée par l’une de vos collègues – notre attachement profond à la pérennité d’un système permettant de couvrir les intermittents du spectacle. Aurélie Filippetti et moi-même l’avons d’ailleurs rappelé bien avant que la question ne soit posée, bien avant que le MEDEF ne mette sur la table cette proposition de suppression du système des intermittents.

M. Jean-Pierre Raffarin. Et nous, nous n’existons pas ?

M. Michel Sapin, ministre. Il appartient aux partenaires sociaux de trouver une solution. Les organisations syndicales devront évidemment manifester leur refus d’une telle remise en cause, mais je vous redis notre attachement profond à ce système spécifique. (Et nous ? sur les travées de l’UMP.)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Nous ne voyons que votre dos !

M. Michel Sapin, ministre. Permettez-moi de répondre à celui qui a posé la question ! Quand vous poserez la question, il vous sera répondu !

Plusieurs sénateurs du groupe UMP. Que d’énervement !

M. Jean-Louis Carrère. Et vous, quelle médiocrité !

M. Michel Sapin, ministre. Je veux donc réaffirmer très clairement devant le Sénat notre attachement à ce système de l’intermittence, l’un des éléments qui fait la spécificité de l’activité culturelle française. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur quelques travées du groupe CRC.)

sages-femmes

M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour le groupe du RDSE.

Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question, qui s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, concerne le mouvement social des sages-femmes, entamé voilà plus de quatre mois, mais qui couronne une revendication vieille de plus de vingt ans.

Ces sages-femmes, dont le quotidien n’est pas « rose layette », comme j’ai pu le lire dans la presse, réclament une revalorisation de leur place dans le système de santé et ont manifesté en ce sens, hier, à Paris, pour la troisième fois depuis le mois d’octobre.

Aujourd’hui, près de 20 000 sages-femmes et maïeuticiens accompagnent les femmes pendant et après leur grossesse, particulièrement au cours de leur accouchement. Même si leur importance dans le parcours de santé des femmes n’est plus à démontrer, ces professionnels restent parfois considérés comme de simples supplétifs.

Depuis le 7 novembre 2013, le Gouvernement a entamé des négociations et mis en place un groupe de travail, qui doit rendre ses conclusions dans les prochains jours. Il convient de saluer cette écoute, car bien des gouvernements, par le passé, étaient restés sourds et surtout passifs sur ce dossier.

La question de l’évolution de leur statut est au centre des discussions. Cette revendication est légitime.

Certaines organisations réclament le statut de « praticien hospitalier », ce qui peut poser problème, mais d’autres organisations préfèrent un maintien dans la fonction publique.

Comment le Gouvernement entend-il adapter le statut de ces professionnels aux réalités de leurs missions ?

D’autres questions appellent également des réponses. Est-il possible de leur confier davantage de responsabilités ? Et quelle articulation peut-on envisager entre les sages-femmes et les autres professionnels de santé ? Quelle place pour les sages-femmes dans les établissements, notamment dans leur gouvernance ? Faudrait-il apporter des modifications à leur formation universitaire initiale ?

Enfin, nous aimerions en savoir davantage sur la revalorisation salariale annoncée par Mme Touraine.

Les sages-femmes et maïeuticiens attendent des décisions, et donc des réponses concrètes à leurs revendications précises.

Vous me permettrez également de lier les revendications des sages-femmes aux préoccupations de toutes les femmes face à la pénurie de spécialistes de gynécologie médicale sur notre territoire. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur de nombreuses travées des groupes UDI-UC et UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée de la famille.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice, voilà plusieurs semaines que Mme la ministre des affaires sociales et de la santé a engagé, avec Mme Fioraso, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, un travail en concertation avec les sages-femmes. Ce travail est absolument fondamental parce qu’il y va de la santé des femmes tout au long de leur vie.

Si la question du statut des sages-femmes à l’hôpital focalise les débats, il faut savoir que les demandes des sages-femmes sont plurielles. Les différents chantiers lancés sur le métier, le statut, la formation et la rémunération forment un tout qui doit trouver une issue globale.

En ce qui concerne le statut, l’objectif de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé est de faire en sorte que le caractère médical de leurs compétences soit pleinement reconnu lorsque les sages-femmes exercent à l’hôpital. Il nous faut leur accorder un statut qui permette cette reconnaissance.

Ce statut peut se décliner de plusieurs façons, et deux options sont envisagées aujourd’hui : au sein de la fonction publique hospitalière ou hors de celle-ci.

Une dernière séance du groupe de travail mené par Édouard Couty s’est tenue hier après-midi. La ministre des affaires sociales et de la santé se réjouit que l’ensemble des acteurs se soient retrouvés pour cette dernière séance de réflexion. Édouard Couty va remettre à la ministre des affaires sociales et de la santé ses conclusions dans les jours prochains. À partir de celles-ci, Mme Touraine prendra des décisions.

La discussion sur la revalorisation salariale des sages-femmes sera ensuite engagée, car la reconnaissance du statut doit effectivement s’accompagner d’une revalorisation salariale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

ukraine

M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour le groupe UMP.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, le temps s’accélère en Ukraine. La violence s’étend à tout le territoire et la répression policière, déjà féroce, pourrait être reprise en main par les forces armées. Le président Obama lui-même s’en est inquiété ce matin.

Il y a une semaine, j’étais sur la place Maïdan, impressionnée par la dignité des manifestants, par leur rejet de la corruption qui gangrène leur pays, par leur détermination à refuser des lois liberticides, par leur courage face aux intimidations. La « révolution orange » de 2004 n’avait, elle, fait aucune victime ; les effusions de sang des dernières heures en sont d’autant plus intolérables.

J’ai rencontré la plupart des leaders de l’opposition : tous manifestaient leur déception devant la passivité de l’Union européenne, leur crainte de voir la situation dégénérer, leur demande de sanctions personnelles et ciblées contre les oligarques corrompus, par exemple le gel de leurs avoirs bancaires à l’étranger et le refus de leur délivrer des visas, ainsi qu’à leurs familles.

La menace d’engrenage était évidente, mais une sortie de crise pacifique semblait encore possible, à condition de retourner aux garanties constitutionnelles de 2004 et d’organiser de nouvelles élections.

Je me réjouis que la France ait aujourd’hui accepté de soutenir l’idée de ces sanctions personnelles et ciblées. Mais pourquoi donc avoir attendu que les morts jonchent la place Maïdan pour réagir ?

Ces sanctions indispensables ne doivent pas être une simple mesure de rétorsion face à l’horreur de la répression : méfions-nous des politiques étrangères punitives fondées sur des réactions émotionnelles à portée plus symbolique qu’effective.

La vengeance ne ressuscite pas les morts. Les sanctions à l’encontre de quelques dizaines de dirigeants ne sauraient être un moyen de nous donner bonne conscience ni nous dispenser d’un travail moins visible et plus long de médiation politique. Je m’interroge, par exemple, sur la pertinence du refus par la diplomatie européenne du « trilogue » Kiev-Bruxelles-Moscou proposé par Vladimir Poutine. (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.) En Ukraine, comme en Syrie, la sortie de crise passe aussi par Moscou.

À l’heure où se tient un Conseil européen sur l’Ukraine, j’insiste sur la nécessité de faire preuve de détermination pour défendre l’état de droit en Ukraine, comme l’avait fait Nicolas Sarkozy en 2008 pour la Géorgie.

Rester les spectateurs passifs de l’émergence d’une guerre civile aux frontières de l’Europe serait humainement insupportable. Ce serait nous rendre complices d’une possible balkanisation de l’Ukraine, extrêmement dangereuse pour la sécurité de l’ensemble de la région.

Pourriez-vous donc nous préciser, monsieur le Premier ministre, la position de la France sur les moyens d’améliorer le dialogue franco-russe et russo-européen sur cette question et de progresser au plus vite vers un retour de la démocratie en Ukraine, ce pays ami de la France, qui nous est cher, mais que nous avons peut-être trop longtemps ignoré ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Madame la sénatrice, vous venez de poser une question grave. La situation en Ukraine, particulièrement à Kiev, conduit à des violences totalement inadmissibles, et le bilan, malheureusement, ne cesse de s’alourdir. Cette situation est épouvantable, comme en témoignent les images diffusées en direct à la télévision.

La situation en Ukraine interpelle la France, qui n’a pas attendu pour condamner ces violences avec la plus extrême fermeté. Surtout, la France appelle au retour au calme et au dialogue, comme vous le souhaitez, madame la sénatrice. Le retour au dialogue est en effet la seule solution possible, la seule façon d’aboutir à un règlement politique.

Le Président de la République et moi-même avons d’ailleurs abordé cette question hier, dès le début de l’entretien que nous avons eu, juste avant le conseil des ministres franco-allemand, avec la chancelière Angela Merkel. Partageant les mêmes préoccupations et les mêmes angoisses face au péril, nous avons très vite adopté la même position, sans hésitation, espérant également entraîner l’Union européenne. Un Conseil des ministres des affaires étrangères doit avoir lieu aujourd'hui.

Nous avons également décidé que le ministre des affaires étrangères français, Laurent Fabius, se rendrait immédiatement à Kiev, accompagné de ses homologues Frank-Walter Steinmeier, pour la République fédérale d’Allemagne, et Radoslaw Sikorski, pour la Pologne, troisième partenaire du triangle de Weimar.

Un message de fermeté a été transmis aux autorités ukrainiennes. Il ne doit y avoir aucune ambiguïté. L’Ukraine doit savoir que l’Union européenne ne laissera pas ces actes sans conséquences.

Les trois ministres ont eu des contacts avec tout le monde. Ils en ont eu avec l’opposition, comme vous en avez eu vous-même. À l’heure où je vous parle, ils rencontrent les autorités ukrainiennes.

Au cours de la réunion extraordinaire des ministres des affaires étrangères d’aujourd'hui, les conséquences des discussions qui ont eu lieu hier à Kiev devront être tirées.

On peut évidemment se gargariser avec des formules. Vous ne l’avez pas fait, madame la sénatrice, tant vous avez conscience des risques, comme tous ceux qui sont présents dans cette assemblée.

Nous voulons convaincre les uns et les autres qu’il faut mettre fin à cette spirale de la violence. La résolution de la crise que traverse l’Ukraine passe par la fin des violences, le retour au dialogue et l’engagement de tous les partenaires de l’Ukraine. Vous avez évoqué la Russie, madame la sénatrice. L’Union européenne doit bien sûr parler avec la Russie. Il faut d’ailleurs une politique russe de l’Union européenne, car une telle politique n’est pas, à ce jour, suffisamment définie.

Nous devons également être garants de la souveraineté de l’Ukraine et respectueux des choix du peuple ukrainien, qui aspire à la liberté et à la démocratie.

Tel est le cadre de notre action.

Il est nécessaire et urgent d’agir. La France y travaille, mais pas seule. Elle le fait avec ses partenaires européens. Le Conseil franco-allemand qui s’est tenu hier a constitué une étape importante, car la France et l’Allemagne ont la responsabilité particulière d’entraîner les autres. Mme Ashton est évidemment également associée à tous ces travaux.

Je souhaite, comme vous tous ici, que l’Ukraine sorte de cette spirale de la violence. La France ne ménagera pas sa peine pour que cet objectif soit atteint. (Applaudissements.)

taxe communale sur la consommation finale d'électricité perçue par les intercommunalités