Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

M. Gérard Longuet. Je me réjouis que notre collègue Jean-Pierre Vial se rallie à l’amendement n° 918, même si sa rédaction, sans être ambiguë, manque de clarté sur un point : dans le premier paragraphe de l’article L. 351-1 du code de l’énergie, il serait préférable d’écrire « bénéficient » plutôt que « peuvent bénéficier ». En effet, l’utilisation de verbe « pouvoir » ouvre une petite incertitude.

Nous sommes dans une situation extrêmement complexe et paradoxale : nous avons une hydroélectricité utilisée par EDF dans les périodes de pointe, et qui est normalement la plus coûteuse ; nous avons une électricité nucléaire de ruban, qui est la plus raisonnable ; de surcroît, dans certains cas, monsieur Dantec, EDF est payée pour absorber de l’énergie intermittente allemande, que notre voisin d’outre-Rhin n’est pas capable d’utiliser sur son territoire, mais qu’il doit cependant écouler pour éviter que son réseau ne soit fortement perturbé. Je ne suis pas technicien, mais c’est, en gros, l’explication qui est donnée.

Les entreprises électro-intensives, qui, historiquement, ont souvent été à l’origine des investissements hydroélectriques, dont elles profitent, mais qui ont été entre-temps nationalisés – pas tous, d’ailleurs, puisque nous avons des chutes privées qui sont relativement importantes et qui constituent un atout considérable dans le patrimoine de ces entreprises, comme nous l’avons vu dans l’affaire Ascométal – doivent mener une négociation de moyen et long termes avec l’électronucléaire, qui est le plus sûr et le plus attractif, n’en déplaise à M. Dantec, afin d’être associées à EDF pour absorber des excès.

Je pense que la demande présentée par notre collègue Vial de création d’une mission ou d’un groupe de travail sur le sujet est de nature à apaiser la totalité des inquiétudes de ceux qui défendent les électro-intensifs. Pour avoir produit des billettes d’aluminium, il y a longtemps, dans le département de l’Ariège, j’ai gardé pour ce secteur une grande sympathie, teintée de nostalgie.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.

M. Marc Daunis. Ce sujet est particulièrement important dans le cadre du débat sur la réindustrialisation de la France. Comment soutenir les entreprises électro-intensives ?

C’est l’intervention de notre collègue Gérard Longuet qui me fait réagir. Si la rédaction de l’amendement du Gouvernement était modifiée comme il le suggère, la fin de l’amendement perdrait toute sa valeur puisqu’il y est prévu que, « en cas de non-respect des engagements d’efficacité énergétique, l’autorité administrative peut retirer le bénéfice des conditions particulières mentionnées au premier alinéa… »

Si nous écrivons dans la loi qu’elles bénéficient de façon quasiment automatique de ces conditions particulières d’approvisionnement en électricité, il sera difficile de retirer le bénéfice en question par voie réglementaire a posteriori.

La rédaction du Gouvernement m’apparaît au contraire assez subtile puisqu’elle permet de répondre…

M. Gérard Longuet. Elle peut décourager !

M. Marc Daunis. Pas du tout ! Elle permet au contraire, d’un côté, de répondre à cette préoccupation majeure de la réindustrialisation et de l’activité des entreprises électro-intensives, et, de l’autre côté, de les encourager à observer les meilleures pratiques en termes d’efficacité énergétique.

Il y a là un accompagnement de bon sens dans la prise en compte de leurs besoins et, en même temps, quelques garanties sur le fait qu’elles ne se contenteront pas de bénéficier de cette manne publique dans leur approvisionnement sans progresser en matière d’efficacité énergétique.

À mon sens, tout l’intérêt de l’amendement réside dans les mots « peuvent bénéficier ».

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 918.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 42 bis, et l’amendement n° 191 rectifié quater n'a plus d'objet.

L'amendement n° 834, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 42 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article L. 442-10 du code de commerce, il est inséré un article L. 442-… ainsi rédigé :

« Art. L. 442-… – Est nul tout contrat de travaux et ou de prestations visant à une amélioration de la performance énergétique et environnementale qui inclut la fourniture d’énergies non renouvelables. »

II. – Le code de l’énergie est ainsi modifié :

1° L’article L. 241-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 241-2-… – Sont nulles et de nul effet toutes stipulations contractuelles relatives à l'exploitation des installations de chauffage et de climatisation ou se référant à cette exploitation notamment pour la gestion des immeubles lorsqu’elles prévoient dans le même contrat des modalités de rémunération de la fourniture d’énergies empêchant ainsi la baisse de la consommation d’énergies. » ;

2° L’article L. 241-3 est abrogé ;

3° L’article L. 241-5 est ainsi rédigé :

« Art. L. 241-5. – Tout contrat d’exploitation de chauffage ou de climatisation fait l’objet d’une renégociation sans droit à indemnisation du prestataire s’il s’avère que les clauses contractuelles dudit contrat empêchent le client de mettre en œuvre des actions de maîtrise de l'énergie ou de production d’énergie renouvelable en vue de réduire sa consommation énergétique ou sa dépendance énergétique conformément aux objectifs fixés par la loi n° … du … relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Un avenant définit les nouvelles clauses contractuelles si les parties ont décidé de poursuivre leur relation contractuelle. » ;

4° Les articles L. 241-7 et L. 241-8 sont abrogés.

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Je me permets de rappeler à Mme la ministre que je lui ai posé une question extrêmement précise. J’espère qu’elle profitera de la discussion de ce nouvel amendement pour y répondre. En tout cas, nous n’avons pas pris part au vote sur le précédent, car nous n’avons eu de réponse sur l’ETS et l’électro-intensif, qui n’est pas une question secondaire puisque cela joue sur des sommes importantes.

Mme Ségolène Royal, ministre. Monsieur Dantec, me permettez-vous de vous interrompre ?

M. Ronan Dantec. Je vous en prie, madame la ministre.

Mme la présidente. La parole est Mme la ministre, avec l’autorisation de l’orateur.

Mme Ségolène Royal, ministre. Ces questions, qui sont d’ailleurs tout à fait pertinentes, seront traitées dans les textes d’application, notamment dans le décret en Conseil d’État qui est prévu.

J’en profite pour dire à MM. Jean-Pierre Vial et Gérard Longuet que j’estime tout à fait judicieux qu’un groupe de travail soit créé, si M. le président de la commission des affaires économiques et M. le rapporteur en sont d’accord, car je souhaite que la rédaction des textes d’application se fasse aussi en concertation avec les industriels.

Monsieur Vial, vous connaissez parfaitement ce sujet et je suis très impressionnée par la façon dont vous jonglez avec tous ces concepts difficiles. Je sais aussi que la région Rhône-Alpes, dont vous êtes un élu, est justement confrontée au problème des électro-intensifs. Sachez que je suis tout à fait favorable à ce que les premiers projets de rédaction des textes d’application préparés par mes services puissent être soumis à un groupe de travail de la Haute Assemblée, dans le cadre d’un véritable partenariat.

Même si le ministère est très directement au contact des électro-intensifs, il faut vraiment que nous puissions regarder avec beaucoup de finesse les critères permettant d’obtenir des avantages en termes de tarifs, qui sont déjà sensiblement clarifiés dans cet amendement.

J’en profite aussi pour préciser à M. Longuet que, comme l’a signalé M. Daunis, les mots « peuvent bénéficier » ne doivent pas être entendus comme ouvrant de manière arbitraire une possibilité d’obtenir ou non des tarifs avantageux : il y a une condition d’efficacité d’énergétique et, dès lors que les critères prévus dans l’amendement sont remplis, l’entreprise a le droit d’accéder à ces tarifs.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. Madame la ministre, je réponds de façon très positive à votre suggestion concernant la préparation des textes d’application qui seront pris après le vote de la loi.

À mon sens, c’est le rôle d’une commission législative, en l’occurrence la commission des affaires économiques, d’y participer. Je rappelle qu’il n’y a plus de commission de contrôle de l’application des lois dans notre assemblée et que le principe a été acté, même s’il n’a pas fait l’objet d’une décision formelle, selon lequel le rapporteur au fond est en charge du suivi de l’application de la loi votée.

Je suggère donc que la commission des affaires économiques puisse travailler avec vous-même, madame la ministre, votre cabinet et vos services, en lien avec le groupe de travail sur l’énergie, lequel va être reconstitué sous peu, sans doute d’ici au début du mois de mars. Jean-Pierre Vial, qui n’est pas membre de la commission des affaires économiques, mais dont la participation apparaît aujourd’hui plus nécessaire que jamais compte tenu de sa très grande connaissance du sujet, pourra participer aux travaux que nous mènerons dans ce cadre.

Ainsi, nous pourrions faire œuvre utile, et ce rapidement.

Mme la présidente. Veuillez poursuivre, monsieur Dantec.

M. Ronan Dantec. Il était intéressant que nous entendions la réponse de Mme la ministre au sujet de ce groupe de travail, dont M. le président Lenoir a également souligné l’intérêt. Pour ma part, je pense qu’il est absolument nécessaire aujourd’hui.

L’amendement n° 834 tend à mettre en avant une difficulté réelle, liée à l’indépendance entre les activités de fourniture d’énergie, d’une part, et les services d’efficacité énergétique, d’autre part. Là aussi, pour plus de transparence, d’égalité de traitement entre acteurs économiques, et pour que le consommateur s’y retrouve plus facilement en ayant confiance dans les deux prestations, nous proposons de séparer les deux activités.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?

M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. Mais que vous ont donc fait les fournisseurs d’énergie, monsieur Dantec ? Pourquoi leur voulez-vous du mal ? (Sourires.)

Par cet amendement, vous voulez exclure les fournisseurs d’énergie du secteur des services énergétiques. Autrement dit, vous ne voulez pas qu’EDF ait une filiale Dalkia ou bien que GDF ait une filiale Cofely. En tout cas, c’est à cela que revient votre amendement…

M. Ronan Dantec. C’est réducteur !

M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. Il serait paradoxal d’interdire aux fournisseurs d’énergie d’être eux-mêmes des acteurs de la transition énergétique en combinant leur métier historique, celui de producteur et de fournisseur d’une énergie dont la consommation est appelée à baisser, puisque tel est bien votre objectif, avec celui d’opérateur de services énergétiques, qui contribuent à l’efficacité énergétique.

Je suis donc tout à fait défavorable au fond de votre amendement.

Par ailleurs, je voudrais attirer votre attention sur le fait que votre amendement, s’il était voté, supprimerait dans le même temps plusieurs articles du code de l’énergie qui n’ont rien à voir avec cette question, et ce sans que l’exposé des motifs en explique les raisons. Il s’agit, par exemple, de dispositions prévues à l’article L. 241-3 pour limiter la durée des contrats d’exploitation de chauffage ou de climatisation, ou des modalités d’application de ces contrats résultant de l’article L. 241-8, telles que la fixation de clauses types, dont celles relatives aux économies d’énergie.

J’ai donc deux bonnes raisons pour donner un avis défavorable sur cet amendement, mon cher collègue.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Le Gouvernement suggère le retrait de cet amendement, qui vise à exclure du secteur des services d’efficacité énergétique les entreprises qui assurent la fourniture d’énergie.

On comprend bien l’idée qui le sous-tend : comment les entreprises qui vendent de l’énergie auraient intérêt à vendre moins, c’est-à-dire à diminuer leur chiffre d’affaires ? C’est, certes, une vraie problématique, qui pose la question du modèle économique, mais l’expérience montre que les fournisseurs ont un rôle important à jouer pour inciter les clients à réduire leur consommation grâce au dispositif des certificats d’économies d’énergie, qui, sur la période 2015-2017, représente 3 milliards d’euros, ce qui signifie que les fournisseurs doivent consacrer cette somme aux travaux d’économies d’énergie afin de réduire de près de 9 milliards d’euros le montant de la facture de nos concitoyens.

Ce dispositif a d’ailleurs permis l’émergence de nombreuses PME spécialisées dans les travaux d’économies d’énergie. On voit donc que l’implication des fournisseurs n’est pas antinomique du développement de nouvelles entreprises. Cependant, vous avez raison, monsieur Dantec, il faut rester vigilant.

Par ailleurs, j’observe que cet amendement supprime plusieurs dispositions du code de l’énergie qui permettent de limiter la durée des contrats ou d’imposer des clauses types en faveur des économies d’énergie, ce qui va à rebours des objectifs de ce projet de loi.

Mme la présidente. Monsieur Dantec, l’amendement n° 834 est-il maintenu ?

M. Ronan Dantec. Non, je vais le retirer, madame la présidente, puisqu’il s’agissait d’un amendement d’appel.

J’ai bien écouté M. le rapporteur et il me semble qu’il a apporté un début de réponse à la question que je posais. En effet, il a parlé de filiales. Or notre amendement ne visait que les contrats communs, ce qui exclut les filiales. Si la structure qui vend la production était obligée de confier la prestation d’efficacité énergétique à une filiale, nous réaliserions déjà une avancée intéressante. Je retiens donc la proposition de M. le rapporteur, qui ouvre une piste, même si je ne suis pas certain qu’il ait évoqué cette possibilité dans cet état d’esprit.

Mme la présidente. L’amendement n° 834 est retiré.

Articles additionnels après l'article 42 bis
Dossier législatif : projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte
Article 42 bis A (nouveau) (précédemment réservé)

Article 43

Au titre V du livre III du code de l’énergie, il est inséré un chapitre unique ainsi rédigé :

« Chapitre unique

« Consommateurs électro-intensifs

« Art. L 351-1. – Les tarifs d’utilisation du réseau public de transport d’électricité applicables aux sites fortement consommateurs d’électricité qui présentent un profil de consommation prévisible et stable ou anticyclique sont réduits d’un pourcentage fixé par décret, qui ne peut excéder 90 % par rapport au tarif d’utilisation du réseau public de transport normalement acquitté. Ce pourcentage est déterminé en tenant compte de l’impact de ces catégories d’utilisateurs sur le système électrique et des objectifs de la politique énergétique, notamment celui de maintenir un prix de l’énergie compétitif.

« Les bénéficiaires de la réduction visée à l’alinéa précédent sont les consommateurs finals raccordés directement au réseau de transport ou ceux équipés d’un dispositif de comptage géré par le gestionnaire du réseau de transport, qui justifient d’un niveau de consommation supérieur à un plancher défini en quantité d’énergie ou en part de la valeur ajoutée et répondent à des critères d’utilisation du réseau tels qu’une durée minimale d’utilisation ou un taux minimal d’utilisation en heures creuses. Ces critères sont définis par décret. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 912, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 1 à 3

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

Après l’article L. 341-4 du code de l’énergie, il est inséré un article L. 341-4-1 ainsi rédigé :

II. – Alinéa 4

1° Remplacer la référence :

L. 351-1

par la référence :

L. 341-4-1

2° Première phrase

Supprimer les mots :

, qui ne peut excéder 90 %

3° Seconde phrase

a) Après les mots :

en tenant compte de l’impact

insérer le mot :

positif

b) Remplacer les mots :

catégories d’utilisateurs

par les mots :

profils de consommation

c) Supprimer les mots :

et des objectifs de la politique énergétique, notamment celui de maintenir un prix de l’énergie compétitif

III. – Alinéa 5, première phrase

Supprimer les mots :

défini en quantité d’énergie ou en part de la valeur ajoutée

IV. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« La réduction visée au premier alinéa est plafonnée pour concourir à la cohésion sociale et préserver l’intérêt des consommateurs. Ce plafond est défini en fonction de la catégorie du site bénéficiaire. Pour les sites qui relèvent de l’article L. 351-1, le plafond est fixé par décret en fonction des catégories définies au même article, et ne peut excéder 90 %. Pour les installations permettant le stockage de l’énergie en vue de sa restitution ultérieure au réseau, le plafond est fixé à 50 %. Pour les autres sites de consommation, le plafond est fixé par décret et ne peut excéder 20 %. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme Ségolène Royal, ministre. Je considère que cet amendement a été défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 981, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Amendement n° 912, dernier alinéa

Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :

« La réduction visée au premier alinéa est plafonnée pour concourir à la cohésion sociale et préserver l’intérêt des consommateurs. Ce plafond est fixé par décret :

« 1° Pour les sites qui relèvent de l’article L. 351-1, en fonction des catégories définies au même article et sans excéder 90 % ;

« 2° Pour les installations permettant le stockage de l’énergie en vue de sa restitution ultérieure au réseau, en fonction de l’efficacité énergétique de l’installation de stockage et sans excéder 50 % ;

« 3° Pour les autres sites de consommation, sans excéder 20 %. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. Outre qu’il vise à apporter une clarification rédactionnelle, ce sous-amendement tend à préciser que la réduction des tarifs d’utilisation du réseau public de transport d’électricité applicable aux installations de stockage de l’énergie tient compte de l’efficacité énergétique de l’installation et doit donc s’entendre hors autoconsommation du moyen de stockage considéré. L’électricité autoconsommée par l’installation n’étant, par définition, pas réinjectée dans le réseau, il n’y a pas lieu de l’exonérer de la composante « soutirage » du tarif.

Mme la présidente. L’amendement n° 518, présenté par MM. Bosino et Le Scouarnec, Mme Didier, M. Vergès, Mme Assassi, M. Abate, Mme Beaufils, MM. Billout et Bocquet, Mmes Cohen, Cukierman, David et Demessine, MM. Favier et Foucaud, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et M. Watrin, est ainsi libellé :

Alinéa 4, première phrase

Remplacer le pourcentage :

90 %

par le pourcentage :

60 %

La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.

M. Jean-Pierre Bosino. Nous ne sommes pas intervenus dans le débat précédent, mais nous avons noté une belle unanimité pour soutenir les consommateurs électro-intensifs. Nous ne sommes pas hostiles à l’industrie : on peut d’autant moins nous intenter ce mauvais procès, que certains nous ont parfois accusés d’être d’affreux productivistes !

L’article 43 du projet de loi pérennise la réduction de 50 % du TURPE décidée par la CRE pour la période allant du 1er août 2014 au 31 juillet 2015. La rédaction de la commission va même plus loin que le texte initial en plafonnant cette modulation à 90 %, alors que le texte adopté par l’Assemblée nationale la limitait à 60 %.

Pour RTE, le coût de cette mesure décidée en 2014 est estimé à 27 millions d’euros pour cinq mois en 2014 et, en 2015, il atteindra 38 millions d’euros pour sept mois. En année pleine, ce coût s’élève donc à 65 millions d’euros, pour un abattement de 50 % ; pour un abattement de 60 %, il serait de 80 millions d’euros.

Il est vrai que le TURPE s’établit entre 4,5 euros et 8,9 euros par mégawattheure pour les industriels électro-intensifs français, contre 1,3 euro par mégawattheure pour les industriels allemands. Dès lors, nous sommes bien en présence d’un phénomène de concurrence déloyale. Notons toutefois que les Allemands ont été rappelés à l’ordre par les instances communautaires.

Si nous sommes favorables à l’aide apportée à certains secteurs énergivores de l’industrie, il convient cependant de noter que toutes les entreprises électro-intensives ne sont pas dans la même situation : les secteurs de la chimie ou de la cimenterie ne me semblent pas vivre des difficultés insurmontables. Il ne faut pas se voiler la face, cette mesure sera financée, Mme la ministre l’a rappelé, par les autres consommateurs : les ménages, mais aussi les PME et les TPE.

En outre, aucune contrepartie n’est demandée aux entreprises ainsi aidées, ni en termes d’investissements, ni en termes sociaux, ni même en termes d’emplois, cette aide venant s’ajouter aux autres, évidemment ! Il ne faut pas oublier non plus que les gros industriels bénéficient d’un plafond qui fait qu’une partie des kilowattheures qu’ils consomment est exonérée de la contribution au service public de l’électricité, la CSPE.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous souhaitons revenir à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, qui prévoit que la réduction du tarif ne peut excéder 60 % du TURPE.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?

M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. En ce qui concerne l’amendement n° 912, je remercie Mme la ministre puisque son amendement conforte la rédaction adoptée par la commission en vue de placer les entreprises électro-intensives dans une situation d’égalité vis-à-vis de leurs concurrentes des pays voisins. Cet amendement vient utilement compléter le travail de la commission et, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 981 que je viens de présenter, j’émets un avis tout à fait favorable.

En ce qui concerne l’amendement n° 518, l’avis de la commission est évidemment défavorable. Chers collègues du groupe CRC, il n’est pas facile de défendre certaines positions ! En effet, que vous le vouliez ou non, votre amendement est clairement anti-électro-intensif. (Protestations sur les travées du groupe CRC.) Or, comme vous l’avez rappelé, vous êtes malgré tout des défenseurs de l’industrie française et de l’emploi !

Je pense vraiment qu’il est important de permettre à nos entreprises de se défendre à armes égales face à la concurrence des pays voisins. Je vous suggère donc de retirer votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. J’émets un avis favorable sur le sous-amendement n° 981, puisque la prise en compte de l’efficacité énergétique des installations de stockage est pertinente. L’amendement n° 912, ainsi sous-amendé, constitue le deuxième volet de notre politique de soutien aux consommateurs électro-intensifs, avec le fait d’accorder une exonération partielle, mais importante, du tarif de réseau.

C’est bien pourquoi je suggère aux auteurs de l’amendement n° 518 de le retirer. En effet, l’article 23 ainsi amendé représente un avantage consenti aux entreprises françaises et aux emplois en France. Il est important que nous puissions manifester une véritable unité nationale dans le soutien aux entreprises qui fabriquent en France et vont entrer dans la transition énergétique. Je le rappelle, en contrepartie de la baisse du coût de l’énergie, celles-ci devront améliorer leur efficacité énergétique, pour dégager des marges leur permettant de créer de l’activité et de l’emploi. Je m’étonne que le groupe CRC ne soutienne pas ardemment cette dynamique qui vise à créer des emplois en France !

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 981.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 912, modifié.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 518 n’a plus d’objet.

L’amendement n° 66 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mme Férat, MM. Canevet et Roche, Mme Morin-Desailly et MM. Guerriau, Marseille, Gabouty, Bonnecarrère, Cadic, Delahaye, Kern et Bockel, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 4, première phrase

Après les mots :

réseau public de transport

insérer (deux fois) les mots :

et de distribution

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Claude Kern.

M. Claude Kern. La rédaction actuelle de l’article 43 ne permet d’envisager la possibilité d’une réduction du TURPE que sur le réseau de transport d’électricité, et non sur le réseau de distribution, à la différence de ce qui est prévu pour le gaz. Il en résulte une distorsion de concurrence entre les industries électro-intensives, en particulier en fonction de la taille des sites. Il est donc proposé de remédier à cette distorsion.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?

M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. Cet amendement vise à étendre la réduction du tarif d’utilisation du réseau proposée à l’article 43 au réseau de distribution. Or la modulation du TURPE vise avant tout à cibler les entreprises les plus électro-intensives exposées à la concurrence internationale et qui sont, du fait de leur consommation importante d’électricité, majoritairement raccordées au réseau de transport d’électricité.

En outre, en étendant la réduction au réseau de distribution auquel sont raccordés les consommateurs de base, cet amendement ferait porter la charge de cette réduction sur les ménages, puisque les coûts de réseau doivent nécessairement être couverts par le TURPE : ce qui n’est pas payé par les uns est obligatoirement payé par les autres.