Mme la présidente. La parole est à M. Serge Dassault.

M. Serge Dassault. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, je donnerai dans le même registre que Vincent Delahaye et Philippe Dallier.

Monsieur le secrétaire d’État, comme les deux années précédentes, le Premier président de la Cour des comptes a certifié les comptes de l’État pour 2014, mais en critiquant votre vision à court terme des finances publiques. Surtout, il vous met en garde contre votre excès d’optimisme dans vos prévisions, disant de l’exécution budgétaire 2014 qu’elle a été « compromise par des prévisions optimistes en recettes et des ajustements tardifs en dépenses ».

C’est effectivement ce qui s’est passé. Vous aviez prévu une croissance de 0,9 % pour 2014, alors qu’elle est finalement évaluée à 0,2 %. Votre objectif de 3,8 % de déficit n’est pas atteint, puisque le déficit s’élève finalement à 4 % du PIB. Le déficit de l’État s’alourdit de presque 11 milliards d’euros, et il sera, une fois de plus, financé par l’emprunt.

Les dépenses nettes du budget de l’État ont augmenté de 4,23 milliards d’euros. Quant aux recettes fiscales, elles ont diminué, de 9,7 milliards d’euros, en partie en raison du faible rendement de l’impôt sur le revenu.

La baisse de 48 % des recettes de l’impôt sur les sociétés au premier trimestre 2015 va encore augmenter nos déficits, bien que le taux de cet impôt reste très élevé. Votre gouvernement refuse de faire de la réduction de notre déficit budgétaire une priorité absolue en n’engageant pas les réformes nécessaires et en refusant de supprimer les dépenses inutiles et démagogiques. En effet, il décide d’augmenter le salaire des fonctionnaires et d’accroître encore le nombre de fonctionnaires en créant 60 000 postes dans l’éducation nationale, ce qui nous coûtera plus de 90 milliards d’euros sur soixante ans. En effet, chacun de ces postes créés revient à 3 millions par an et par personne, sur soixante ans, c'est-à-dire quarante ans d’activité et vingt ans de retraite qu’il faudra payer !

Le Gouvernement crée 100 000 nouveaux contrats aidés pour 1 milliard d’euros – à quoi cela va-t-il servir ? Il crée encore une prime d’activité, pour 4 milliards d’euros. Ces mesures sont inefficaces, elles ne créeront aucun emploi durable et elles coûtent donc 5 milliards d’euros.

Par ailleurs, vous continuez à financer l’aide médicale d’État et le RSA pour les étrangers : c’est très bien, mais cela coûte 2 milliards d’euros par an, que nous n’avons pas et que vous empruntez.

Au lieu de réduire drastiquement nos dépenses publiques, vous continuez à les augmenter en refusant de réduire les dépenses sociales ; au contraire, vous les augmentez, car telle est votre politique.

Toutefois, la France n’a plus les moyens de la politique sociale qu’elle finance par l’emprunt. Il faudrait tout de même en convenir ! Nous continuons à dépenser l’argent que nous n’avons pas et à augmenter notre dette chaque année de 70 à 80 milliards d’euros de déficit budgétaire. Nous ne commencerons à rembourser notre dette que lorsque nous retrouverons l’équilibre budgétaire. Ce n’est pas demain la veille ! Avec cette politique, le Gouvernement ne respectera pas son engagement de 3 % de déficit public pour 2017, ce qui correspond à 60 milliards d’euros. Cet engagement sera donc reporté pour la quatrième fois.

Je rappelle que, dans ses promesses électorales, le Président de la République s’était engagé à atteindre l’équilibre budgétaire en 2017. On en est loin !

La Cour des comptes vous avait pourtant régulièrement mis en garde contre une dette toujours croissante. Rapport après rapport, elle préconise de réduire drastiquement nos dépenses publiques et nos prélèvements obligatoires, mais vous ne l’écoutez pas.

Rapport après rapport, la Cour tire la sonnette d’alarme sur notre niveau d’endettement, mais vous ne l’écoutez pas.

Rapport après rapport, elle vous met en garde contre un risque d’envolée des taux. Là encore, vous ne l’écoutez pas. Ce dernier point est pourtant capital, encore plus dans le contexte actuel.

En tant que rapporteur sur la charge de la dette, je vous rappelle que le risque d’envolée des taux d’intérêt dans la zone euro n’est pas négligeable et qu’il serait catastrophique pour la France : en 2015, elle emprunte 200 milliards d’euros, dont 70 à 80 milliards d’euros pour financer notre déficit budgétaire et plus de 130 milliards d’euros pour faire face aux échéances de notre dette.

Nos taux d’intérêt à dix ans sont déjà passés de 0,33 % en avril dernier à 1,25 % environ aujourd’hui et la crise grecque risque de maintenir cette tendance à la hausse, qui pourrait même s’accélérer.

Chaque point de taux d’intérêt supplémentaire représentera un coût de 2,4 milliards d’euros la première année et près de 40 milliards d’euros sur cinq ans, comme vous l’a récemment rappelé le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer. Ce n’est donc pas le produit de mon imagination !

Monsieur le secrétaire d’État, notre situation ressemble plus à celle de la Grèce qu’à celle de l’Allemagne ou de l’Angleterre.

Il y a deux façons de présenter des prévisions. La plus dangereuse consiste à faire des prévisions optimistes pour donner confiance, mais elle présente des risques d’échecs graves dans le cas où la prévision ne se réaliserait pas. C’est la situation actuelle. La moins risquée consiste au contraire à faire des prévisions prudentes, qui peuvent parfois être démenties par des résultats meilleurs que prévu, ce qui augmente l’activité. Si nous étions dans ce cas-là, nous vous féliciterions de votre gestion.

Le Gouvernement refuse de prendre conscience de la situation alarmante de notre économie.

La croissance redémarre partout en Europe, sauf en France. Le Royaume-Uni a une croissance de 2,8 %, alors qu’elle n’est que 0,2 % chez nous. C’est que le Royaume-Uni a pris les dispositions nécessaires dont l’absence en France explique notre situation de grande précarité, malgré vos 400 000 emplois aidés qui nous ont déjà coûté près de 5 milliards d’euros depuis 2012. Les contrats aidés coûtent cher et ne servent pas forcément à grand-chose parce qu’ils ne sortent pas définitivement du chômage ceux qui en bénéficient.

Il serait peut-être temps que le Gouvernement se remette en cause, car cette croissance en berne et ce chômage en explosion sont le fruit de sa politique ! Et ce ne sont pas les orientations budgétaires 2015-2018, dont on nous a parlé récemment, qui nous rassurent !

Pourtant, un autre politique économique est possible : le Royaume-Uni enregistre de bons résultats, qui sont dus non pas au hasard, mais à des réformes courageuses menées depuis une trentaine d’années et initiées par Margaret Thatcher. La France n’a pas eu la chance d’avoir une telle personnalité à sa tête, et c’est dommage !

Le Royaume-Uni a créé le système fiscal le plus compétitif du G20, avec pour objectif de devenir l’un des meilleurs pays pour la création et le développement des entreprises. Les réformes ont porté sur la flexibilité de l’emploi, dont vous ne voulez pas entendre parler, et sur la simplification et la réduction de la pression fiscale, que nous augmentons. On fait tout le contraire de ce qu’il faudrait faire !

Le taux de l’impôt sur les sociétés est passé là-bas de 28 % à 20 %, alors que nous ne faisons rien en ce sens, et de nombreuses niches fiscales ont été supprimées. Pourquoi n’agissons-nous pas ainsi ?

Le Royaume-Uni a mis également en place un dispositif accordant 50 % de déduction d’impôt pour les investissements dans les jeunes entreprises créatrices d’emploi. Par ailleurs, le nombre d’apprentis a augmenté.

Comme le disait Tony Blair, « la bonne politique n’est ni de gauche ni de droite, c’est celle qui marche. » Or votre politique, monsieur le secrétaire d’État, ne marche pas !

M. Richard Yung. Mais elle vole, et en escadrille ! (Sourires.)

M. Serge Dassault. Nous aussi, nous pourrions avoir 2,8 % de croissance et diviser le chômage par deux, si vous aviez le courage de mener les réformes nécessaires, en fonction non pas de vos intérêts électoraux, mais de celui de la France.

Mes chers collègues, je vais vous faire maintenant quelques propositions de réformes structurelles, qui pourraient nous sortir du piège mortel d’un endettement non contrôlé et relancer notre économie. Je sais que vous ne les accepterez pas. Pourtant, si vous ne les adoptez pas, vous ne changerez rien !

Il faut s’interdire, c’est fondamental, le recours à l’emprunt pour financer des dépenses de fonctionnement. Sinon, c’est de la cavalerie ! Mais c’est, hélas, ce que nous faisons…

Il faut instituer la règle d’or selon laquelle tout gouvernement doit présenter des budgets équilibrés. Nous n’en faisons rien, alors que le Royaume-Uni est actuellement en train de mettre en place une telle règle.

Il faut prévoir dans la Constitution un plafonnement de la dette à 2 300 milliards d’euros. En effet, aujourd'hui, notre dette n’est pas plafonnée, contrairement à celle d’autres pays, et nous ne savons pas comment elle évoluera. Pourquoi n’atteindrait-elle pas 3 000 milliards d’euros ? Je le rappelle, nous enregistrons chaque année un déficit supplémentaire de 70 milliards à 80 milliards d’euros, qui vient augmenter la dette, mais tout le monde s’en fout ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Comment cela ? Arrêtez !

M. Serge Dassault. Et le Gouvernement équilibre allégrement son budget par des emprunts.

Il faut supprimer l’ISF, mais vous ne voulez pas en entendre parler. Il s’agit d’un impôt dévastateur pour notre économie, qui la vide de ses investisseurs. Pourquoi la croissance n’est-elle pas au rendez-vous ? C’est, notamment, parce que les investisseurs sont partis, excepté quelques-uns, qui restent, malgré eux.

Il faut créer, mais vous ne voulez pas en entendre parler, des emplois de mission pour flexibiliser l’emploi. Sinon, vous ne diminuerez pas le chômage.

Enfin, il faut bien évidemment supprimer les 35 heures, qui paralysent notre économie et réduisent sa compétitivité.

Si vous ne comprenez pas le bien-fondé de ces propositions, vous conduirez la France et les Français à la faillite. Il s’agit non pas d’une opposition idéologique entre la droite et la gauche, mais d’une question d’efficacité. Il faut faire ce qui marche, mais vous vous y refusez !

Votre vision de l’économie est fausse : il faut piloter en fonction de la réalité et des solutions qui donnent des résultats. Sinon, vous ne réussirez jamais à réduire le chômage et à augmenter l’emploi.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’état de nos finances publiques est grave. La France est au bord du précipice. Si nous continuons, nous n’aurons bientôt plus d’investisseurs. Nous emprunterons alors à des taux extrêmement élevés, ce qui sera dramatique. Cela conduira notre pays à la situation de la Grèce, à savoir le défaut de paiement. Prenez la pleine mesure de la gravité de la situation, en adoptant les réformes structurelles nécessaires. Je le sais, je parle dans le vide, et c’est dommage. Mais peut-être un jour serai-je écouté, car telle est la réalité…

Mme la présidente. Veuillez conclure, monsieur Dassault.

M. Serge Dassault. Il convient donc de lancer rapidement les réformes structurelles nécessaires, car attendre, sans changer de politique, c’est prendre le risque de se retrouver dans la situation de la Grèce, en cessation de paiement. Une telle situation serait alors de la responsabilité de ce gouvernement. J’espère simplement que nous verrons autre chose après ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. François Marc.

M. Richard Yung. Enfin un autre discours !

M. François Marc. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme l’a indiqué avec une extrême pertinence mon collègue Richard Yung il y a quelques instants, nos résultats budgétaires pour 2014 sont encourageants.

M. François Marc. Il faut rappeler, cher Philippe Dallier, vous qui aimez remonter le temps pour vous retrancher dans les années antérieures, que le déficit structurel s’établit à 2,1 %, soit le meilleur résultat atteint depuis l’année 2000.

M. François Marc. Au-delà de ces résultats, que dire des orientations de la politique budgétaire du Gouvernement pour les deux ou trois années à venir ?

Sur ce point, nous pouvons retenir de vos propos, monsieur le secrétaire d’État, trois éléments majeurs.

Tout d’abord la croissance va s’améliorer : elle augmentera de 1 % en 2015 et de 1,5 % en 2016. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Eu égard aux prévisions plus optimistes du FMI, de l’Union européenne et de l’OCDE, on peut relever la prudence du Gouvernement dans ses prévisions de croissance, ce qui rend ses orientations budgétaires d’autant plus crédibles et réalistes pour les deux ans qui viennent.

On note également que le Gouvernement a souhaité changer quelques orientations s’agissant de la trajectoire des finances publiques. Ainsi, un plan d’économies sans précédent de 50 milliards d’euros sur les dépenses publiques sera mis en œuvre. Nous ne pouvons à cet égard que saluer la démarche de maîtrise des dépenses publiques dans laquelle s’engage ce gouvernement. Rappelons à ce sujet que la croissance des dépenses s’établissait en moyenne à 3,6 % en valeur sur la période 2002-2012 ! C’est dire les efforts entrepris depuis deux ans.

Je me félicite également que cette trajectoire de finances publiques ait été récemment validée à la fois par le Haut Conseil des finances publiques et par l’Union européenne.

Le Gouvernement a-t-il eu raison de revoir ainsi sa trajectoire budgétaire, en reportant à 2017 l’objectif d’un déficit public à 3 % du PIB ? La réponse est « oui », mes chers collègues. Il est en effet primordial de ne pas tuer la croissance naissante,…

M. Philippe Dallier. Elle est si petite !

M. François Marc. … afin qu’elle puisse s’accentuer et porter très vite ses fruits, notamment en termes d’emplois. Oui, la stratégie de la France pour améliorer ses comptes publics et redresser son économie est une bonne stratégie, qui se joue sur plusieurs plans.

Tout d’abord, comme je l’ai évoqué précédemment, je citerai un plan d’économies sans précédent de 50 milliards d’euros sur les dépenses publiques. Ensuite, des mesures fortes visent à améliorer la compétitivité de nos entreprises, en particulier des PME et TPE. C’est vrai du CICE, mais de bien d’autres initiatives qui ont été prises.

On peut également évoquer les mesures de simplification administrative pour les entreprises, la réforme de la formation professionnelle, la mise en œuvre de la loi Macron, qui, dès son adoption désormais imminente, permettra de déverrouiller notre économie et de lutter contre les situations de rente.

Je pense aussi au programme d’investissements d’avenir, à la promotion de l’innovation et de la recherche via le crédit d’impôt recherche et au développement des nouvelles technologies au travers notamment de la French Tech, qui vise à la croissance et au rayonnement du numérique français dans le monde.

Cette stratégie globale et ambitieuse porte ses fruits : les commandes aux entreprises et le moral des décideurs s’améliorent, tandis que l’image de la France se bonifie à l’international.

L’un de nos collègues nous disait à l’instant que cela ne marchait pas. Pourtant, quand on voit les commandes de Rafale ou d’Airbus enregistrées récemment, on peut se dire, mes chers collègues, qu’il y a quelque chose qui bouge. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Chacun devrait s’en rendre compte.

M. Francis Delattre. Des socialistes qui se réjouissent de ventes d’armes, c’est nouveau !

M. François Marc. Le Gouvernement a par ailleurs mis en place d’autres chantiers de mobilisation pour la croissance et l’emploi, en lien avec l’Union européenne : le plan Juncker – c’est important –, la lutte contre la fraude fiscale, qui représente chaque année une perte de recettes d’environ 1 000 milliards d’euros pour les pays européens, ainsi que le parachèvement de l’Union bancaire et la mise en place de l’Union des marchés de capitaux, afin de favoriser le financement des entreprises européennes.

Mes chers collègues, je souhaiterais enfin rappeler que, sur le chemin du redressement de notre économie, la mobilisation collective ne réussira que si un effort accru de solidarité est consenti par le pays. J’ai ainsi en mémoire les propos de Patrick Artus, économiste bien connu, qui, dans son dernier ouvrage intitulé Croissance zéro, préconise « un nouveau partage pour éviter l’affrontement ».

C’est justement le sens des mesures qui ont été récemment mises en place par le Gouvernement. Elles visent à instaurer plus de justice fiscale et sociale entre nos concitoyens : baisse d’impôts pour les ménages les plus modestes dès septembre 2014, suppression en 2015 de la première tranche de l’impôt sur le revenu, et modulation des allocations familiales en fonction des revenus.

En conclusion, je me félicite donc que les conditions de réussite de la stratégie du Gouvernement se mettent en place.

Face à ces éléments positifs, nous pouvons le dire sans ambages, la France sera plus forte en 2017 qu’elle ne l’était en 2012. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.) Et le projet de loi de finances pour 2016 sera, n’en doutons pas, une étape utile de cette trajectoire vertueuse. (Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées.)

Mme la présidente. La parole est à M. Maurice Vincent.

M. Maurice Vincent. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je limiterai mes propos aux orientations budgétaires pour 2016.

Au moment où se tient ce débat d’orientation des finances publiques, nous espérons vivement que la Grèce, l’Union européenne et les institutions trouveront dans les jours à venir un compromis positif pour permettre à ce pays de rétablir sa situation financière et rester dans la zone euro.

Je veux saluer l’action déterminée du Président de la République et du Gouvernement pour parvenir, dans un contexte particulièrement difficile, à ce résultat. Je salue aussi leur constance, qui tranche avec les sorties quelque peu précipitées et contradictoires de plusieurs responsables politiques, notamment du président du parti Les Républicains.

Comme beaucoup d’observateurs, je suis convaincu que la France et l’Europe ont un intérêt majeur à favoriser un accord, y compris pour ce qui concerne les conséquences budgétaires qui nous occupent cet après-midi.

Quelles que soient les décisions qui seront prises sur cette question, nous savons que la difficulté particulière du budget 2016 réside dans la nécessité de tout faire pour rechercher le plus haut niveau de croissance du PIB, tout en poursuivant le programme de maîtrise des dépenses publiques, du déficit et de la dette, à la suite de la situation particulièrement dégradée qui s’est constituée au fil des années, notamment de 2002 à 2012. Oui, l’héritage est lourd, cela a été souligné.

Si ces deux objectifs peuvent paraître en partie contradictoires, il faut cependant réussir à les atteindre simultanément, puisque, d’un côté, la croissance détermine directement non seulement l’emploi, mais aussi l’évolution des recettes de l’État – nous l’avons vu en 2014 –, alors que, d’un autre côté, la maîtrise des dépenses publiques est indispensable au redressement progressif des comptes du pays.

Il est difficilement contestable que les propositions avancées par le Gouvernement dans ce débat d’orientation répondent clairement à ces deux exigences.

Dans le cadre d’une prévision de croissance pour 2016 particulièrement raisonnable, inférieure à celle du consensus des économistes, monsieur Delahaye, de nombreuses dispositions sont susceptibles de conforter la croissance et l’emploi. La confirmation de la baisse des impôts pour les ménages aux revenus les plus modestes et moyens, les aides à la première embauche dans les PME et TPE, les créations supplémentaires d’emplois aidés – c’est vrai, mais il n’y a pas que cela à retenir de la politique menée -, de nouvelles possibilités de formation, le soutien à l’embauche de jeunes apprentis : tout cela favorisera la consommation et l’emploi, donc la croissance de notre économie.

De nouvelles mesures ont été prises en faveur de l’investissement des entreprises, François Marc s’en est fait l’écho il y a un instant. J’ajoute que le suramortissement voté récemment prendra tout son effet dans les mois à venir et en 2016, sans parler de la montée en puissance du CICE et du préfinancement du FCTVA, le Fonds de compensation pour la TVA, qui représente tout de même, pour les collectivités, en matière d’investissement, une disposition positive.

Ces mesures sont donc de nature à conforter en 2016 la reprise d’activité amorcée en 2015, avec toujours une grande attention portée à l’emploi.

Dans le même temps, la maîtrise des dépenses publiques se concrétise – c’est une réalité – par une diminution de près de 3 milliards d’euros par rapport au projet de loi de finances pour 2015 et par la volonté de poursuivre sur la voie de résultats jamais atteints jusqu’ici grâce à une gestion particulièrement rigoureuse.

Je terminerai en disant combien, dans ce cadre général, les priorités budgétaires retenues pour 2016 sont judicieuses.

Il est inutile que j’insiste longtemps sur les efforts requis et réalisés en faveur de la défense, de la sécurité intérieure et extérieure de notre pays dans le cadre de la révision de la loi de programmation militaire.

Chacun connaît la nature et la gravité des menaces dont la France fait l’objet et l’importance de son engagement sur des terrains d’opérations extérieures. Cette situation a justifié que l’on revienne sur l’effort de maîtrise de la masse salariale dans les armées. Il était nécessaire de freiner la déflation des effectifs. Personne ne le conteste et, d’ailleurs, personne ne l’a contesté.

Je soulignerai aussi la continuité et la persévérance du Gouvernement en faveur des budgets de l’éducation et de l’enseignement supérieur auxquels vient s’ajouter une nouvelle tranche du programme d’investissements d’avenir. L’effort en faveur du budget de la culture se poursuit. Ce sont autant de secteurs indispensables pour préparer l’avenir et accélérer l’innovation, source de la croissance de demain.

De façon plus transversale, chacun constate l’ampleur des signes adressés à la jeunesse, que ce soit par une nouvelle offre de services civiques, la Garantie jeunes ou la politique de la vie étudiante.

En conclusion, ces orientations budgétaires répondent bien à la double exigence que j’évoquais au début de mon propos : préparer l’avenir en favorisant partout les conditions de l’innovation et de la diffusion des savoirs, dire notre confiance dans la jeunesse en l’aidant à affronter le contexte difficile qu’elle rencontre sur le marché du travail et, en même temps, faire en sorte que le budget 2016 participe pleinement à la trajectoire crédible de maîtrise de nos comptes. Ce qui revient finalement à rompre avec les facilités de l’endettement cumulatif trop aisément accepté entre 2002 et 2012, pour que notre souveraineté budgétaire ne soit jamais mise en question. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs généraux, mes chers collègues, au mois de mars dernier, la publication des comptes du régime général de sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse nous a permis de constater une réduction du déficit plus importante que prévue.

L’élément essentiel, c’est que cette réduction des déficits nous est confirmée par les résultats – définitifs, cette fois – pour 2014 : en un an, le solde des administrations de sécurité sociale est amélioré de 600 millions d’euros, celui de l’ensemble des régimes obligatoires de base est amélioré de 3,2 milliards d’euros, celui du régime général est amélioré de 2,8 milliards d’euros et le déficit de l’assurance maladie est réduit de 300 millions d’euros.

Tels sont les résultats, incontestables, du choix fait en 2012 de redresser les finances publiques et de la politique d’assainissement des comptes mise en œuvre.

En 2011, la Cour des comptes estimait que plus des deux tiers du déficit structurel étaient essentiellement dus à une insuffisance de recettes et que seules des mesures nouvelles significatives permettraient une réduction des déficits. À l’époque, le rapporteur général de la commission des affaires sociales, qui « sonnait l’alerte » sur les finances sociales, ne disait pas autre chose, alors que nous approchions les 30 milliards d’euros de déficit pour le régime général et le Fonds de solidarité vieillesse.

Ces mesures ont été prises dès juillet 2012, et le déficit est aujourd’hui réduit de plus de moitié. En 2014, tous les soldes des branches – assurance maladie, accidents du travail-maladies professionnelles, retraite, famille – se sont améliorés par rapport à 2013, de même que le régime des indépendants et les régimes spéciaux.

La gestion participe également au redressement des organismes de la sécurité sociale. À cet égard, le résultat est positif en 2014 : pour la deuxième année consécutive depuis 2006, la Cour des comptes a certifié l’ensemble des états financiers des quatre établissements publics nationaux et des quatre branches du régime général. Je soulignerai particulièrement le constat favorable de la Cour sur le redressement du régime social des indépendants, après la réforme de 2008 qu’elle avait qualifiée de « catastrophe industrielle ».

Cette politique de maîtrise des coûts est aussi de long terme et s’inscrit dans le cadre général du programme de stabilité. C’est pourquoi des réformes structurelles ont également été engagées dans le cadre défini par la stratégie nationale de santé et sont mises en œuvre dans le projet de loi de modernisation de la santé. Nous travaillons à cette réforme, qui est d’autant plus complexe qu’elle était attendue depuis 2009 et n’avait pas été engagée en temps voulu.

La tâche est certes d’autant plus difficile que, jusqu’en 2012, ces réformes de fond de notre système de protection sociale n’ont pas été menées, les dépenses courantes ont été financées à crédit et les déficits ont été laissés à eux-mêmes.

Aujourd’hui, la progression sur la voie du retour à l’équilibre se confirme pour la troisième année, de manière équilibrée entre économies et nouvelles ressources et de manière juste. Juste, parce que ce résultat est obtenu sans nouveaux déremboursements et sans que soient réduits la couverture sociale ni l’accès aux soins.

Vous relevez, à cet égard, monsieur le rapporteur général, que les effets des prélèvements obligatoires ont été plus que compensés par le bénéfice des transferts sur le revenu disponible des premiers déciles et que la hausse se concentre sur les derniers déciles de rémunération, de la même manière, d’ailleurs, que la mise sous conditions de ressources des allocations familiales – à partir de 6 000 euros de revenus mensuels, je le rappelle – permet aujourd’hui une allocation plus juste des prestations.

Il n’y a pas, mes chers collègues, de pensée unique : vous le constatez, tous les leviers disponibles, dans le contexte difficile que nous connaissons, sont mis à contribution pour redresser les comptes. L’enjeu, pour la santé au sens large et pour l’économie, indissociables l’une de l’autre et se nourrissant l’une et l’autre, vaut l’effort.

Je n’en prendrai que deux exemples, dont le plus récent est celui du traitement de l’hépatite C. Comment garantir pour tous l’accès à l’innovation ? Je n’évoque pas même ici les conditions d’acquisition du brevet en l’espèce. Et quid du coût des thérapies géniques du cancer ? Il nous interrogera à moyen, si ce n’est à court terme. Or seul un système solidaire de prise en charge nous apporte cette garantie.

Mes chers collègues, sur cette voie de solidarité et d’efficacité – préserver, conforter et moderniser notre système de protection sociale – le Gouvernement est aujourd’hui résolument engagé ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)