Sommaire

Présidence de M. Jean-Claude Gaudin

Secrétaires :

Mme Frédérique Espagnac, M. Jackie Pierre.

1. Procès-verbal

2. Dépôt d’un rapport

3. Communications du Conseil constitutionnel

4. Questions orales

garantie individuelle du pouvoir d'achat

Question n° 1360 de M. Bruno Sido. – Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique ; M. Bruno Sido.

recul de la vaccination en france

Question n° 1378 de M. Didier Guillaume. – M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales ; M. Didier Guillaume.

sort des communes associées en cas de regroupement sous le statut de commune nouvelle

Question n° 1369 de M. Philippe Mouiller. – M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales ; M. Philippe Mouiller.

schémas départementaux de coopération intercommunale et organisation scolaire

Question n° 1344 de M. Bernard Fournier. – M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales ; M. Bernard Fournier.

critères applicables dans le calcul de la dotation de solidarité communautaire

Question n° 1400 de M. Patrick Abate. – M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales ; M. Patrick Abate.

reconnaissance du diplôme de psychomotricien obtenu en belgique

Question n° 1377 de M. Dominique Bailly. – Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie ; M. Dominique Bailly.

décompte des indemnités kilométriques en zone de montagne par la caisse primaire d'assurance maladie de l'isère

Question n° 1361 de M. Michel Savin. – Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie ; M. Michel Savin.

conséquences de la mise en place de la tarification à l'activité pour les établissements de soins en zone de montagne

Question n° 1385 de M. Jean-Yves Roux. – Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie ; M. Jean-Yves Roux.

excédents de gestion des caisses d'allocations familiales

Question n° 1345 de M. Antoine Lefèvre. – Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie ; M. Antoine Lefèvre.

rôle de l'état et des élus locaux pour l'hébergement des migrants et la scolarisation de leurs enfants

Question n° 1356 de M. Antoine Lefèvre, en remplacement de Mme Christiane Hummel. – Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie ; M. Antoine Lefèvre.

Suspension et reprise de la séance

aggravation des conditions de la circulation sur la ligne b-nord du réseau express régional

Question n° 1370 de M. Vincent Capo-Canellas. – Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité ; M. Vincent Capo-Canellas.

transport des enfants en situation de handicap et pratiques douteuses de vortex mobilité

Question n° 1372 de M. Éric Bocquet. – Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité ; M. Éric Bocquet.

prorogation des concessions hydrauliques

Question n° 1374 de M. Daniel Chasseing. – Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité ; M. Daniel Chasseing.

harmonisation des consignes de tri

Question n° 1393 de M. Olivier Cigolotti. – Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité ; M. Olivier Cigolotti.

moyens alloués à l'autorité de sûreté nucléaire

Question n° 1398 de M. Jean-Yves Roux, en remplacement de M. Michel Berson. – Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité ; M. Jean-Yves Roux.

réforme du code minier

Question n° 1452 de M. Jean Louis Masson. – Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité ; M. Jean Louis Masson.

hôtellerie de plein air et normes

Question n° 1346 de M. Gilbert Bouchet. – Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire ; M. Gilbert Bouchet.

demi-part des vieux parents et budgets locaux

Question n° 1409 de M. Jacques Mézard. – Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire ; M. Jacques Mézard.

effectifs supplémentaires pour les brigades des douanes dans les alpes du sud

Question n° 1354 de Mme Patricia Morhet-Richaud. – Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire ; Mme Patricia Morhet-Richaud.

ateliers et chantiers d'insertion

Question n° 1379 de M. Jean-Louis Tourenne. – Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire ; M. Jean-Louis Tourenne.

effectifs d'enseignants dans le val-de-marne

Question n° 1396 de Mme Laurence Cohen. – Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire ; Mme Laurence Cohen.

dotation de solidarité rurale et fraction bourg-centre

Question n° 1293 de M. Simon Sutour. – Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire ; M. Simon Sutour.

accord conclu entre l'union européenne et la turquie sur la crise des migrants

Question n° 1424 de M. Gilbert Roger. – M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire.

mise en place de maisons de l'état à maripasoula et saint-georges de l'oyapock

Question n° 1392 de M. Georges Patient. – M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire ; M. Georges Patient.

prorogation de la durée de validité des cartes nationales d'identité

Question n° 1376 de M. Philippe Bonnecarrère. – M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire ; M. Philippe Bonnecarrère.

réforme du collège

Question n° 1365 de Mme Hélène Conway-Mouret. – M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire ; Mme Hélène Conway-Mouret.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

5. Débat sur le bilan annuel de l'application des lois

M. le président

M. Claude Bérit-Débat, président de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire, du contrôle et des études

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques

M. Christian Cambon, vice-président de la commission des affaires étrangères

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture

M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances

M. Philippe Bas, président de la commission des lois

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes

M. Yvon Collin

M. Christian Favier

Mme Marie-Christine Blandin

M. Michel Canevet

M. Alain Richard

M. le président

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Hervé Marseille

6. Mise en œuvre de la transition énergétique en France. – Débat organisé à la demande du groupe Les Républicains

M. Jean-Claude Lenoir, au nom du groupe Les Républicains

M. Ladislas Poniatowski

M. Hervé Maurey

M. Michel Le Scouarnec

M. Roland Courteau

M. Ronan Dantec

M. Jean-Claude Requier

M. Louis Nègre

Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d'État

M. Jean-Yves Roux

M. Alain Marc

Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la ville

Suspension et reprise de la séance

7. Économie bleue. – Adoption définitive des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Discussion générale :

M. Didier Mandelli, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification

Mme Annick Billon

Mme Évelyne Didier

Mme Nelly Tocqueville

M. Ronan Dantec

Mme Mireille Jouve

M. Michel Vaspart

Clôture de la discussion générale.

Texte élaboré par la commission mixte paritaire

Article 9 ter

Amendement n° 1 du Gouvernement. – Réservé.

Article 22

Amendement n° 2 du Gouvernement. – Réservé.

Article 22 septies

Amendement n° 3 du Gouvernement. – Réservé.

Adoption définitive de la proposition de loi dans le texte de la commission mixte paritaire, modifié.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Jacqueline Gourault

8. Modernisation des principales filières agricoles dans le cadre de la réforme de la PAC. – Débat organisé à la demande du groupe Les Républicains

M. Jean Bizet, au nom du groupe Les Républicains

M. Michel Le Scouarnec

M. Franck Montaugé

M. Jean Desessard

M. Raymond Vall

M. Jean-Claude Lenoir

M. Jean-Jacques Lasserre

M. Henri Cabanel

M. Michel Raison

M. Daniel Gremillet

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

9. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

Secrétaires :

Mme Frédérique Espagnac,

M. Jackie Pierre.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 2 juin 2016 a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

2

Dépôt d’un rapport

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur la mise en application de la loi n° 2015–588 du 2 juin 2015 relative au renforcement de la protection des installations civiles abritant des matières nucléaires.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.

3

Communications du Conseil constitutionnel

M. le président. Le Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 3 juin 2016, deux décisions relatives, respectivement, à une question prioritaire de constitutionnalité et à la répartition des compétences entre l’État et les collectivités d’outre-mer, portant sur :

- les règles de formation, de composition et de délibération de la cour d’assises de Mayotte (n° 2016–544 QPC) ;

- diverses dispositions de la loi n° 2004–575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (n° 2016–10 LOM).

Acte est donné de ces communications.

4

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

garantie individuelle du pouvoir d'achat

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, auteur de la question n° 1360, adressée à Mme la ministre de la fonction publique.

M. Bruno Sido. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question concerne la garantie individuelle du pouvoir d’achat, mieux connue sous le sigle GIPA.

Il s’agit d’une rémunération complémentaire, ou plus simplement d’une prime, créée en 2008 pour les fonctionnaires et agents publics. Elle prenait tout son sens avec le gel du point d’indice depuis juillet 2010.

En effet, l’idée consistait à compenser l’augmentation du coût de la vie pour les seuls agents dont la hausse de rémunération était restée inférieure à l’inflation sur les quatre dernières années, dans la transparence et l’équité. Au sens littéral, il s’agissait donc bien, pour le gouvernement de l’époque, de créer un mécanisme de garantie du pouvoir d’achat des agents publics.

Je note que les salariés du secteur privés sont, eux, totalement exclus d’un tel dispositif, de manière injustifiée d’ailleurs. En effet, en quoi le secteur privé serait-il moins « méritant » aux yeux de l’État que le secteur public ? C’est quand même grâce au travail de tous nos concitoyens que le paiement de l’impôt permet le fonctionnement de « l’État-providence » auquel nous sommes tous si attachés.

Au-delà de la justification de cette prime, son mode de calcul pose question. Elle est versée tous les ans, pour la période des quatre années précédentes, sans tenir compte des GIPA déjà reçues, et ce en application d’une formule de calcul obligatoire, notamment pour les collectivités locales.

La différence est donc comptée quatre fois de suite pour les mêmes années. En définitive, la somme payée tous les ans équivaut à ce qui était prévu tous les quatre ans. Madame la ministre, je tiens à votre disposition les chiffres des conseils départementaux.

Ils sont évocateurs. Si les informations dont je dispose sont exactes, le coût de cette prime atteindrait 130 millions d’euros par an. Je vous remercie, madame la ministre, de bien vouloir confirmer ou corriger ce chiffre, et de m’indiquer les mesures que le Gouvernement compte prendre pour compenser cette charge nouvelle auprès des collectivités locales et pour rendre cette rémunération complémentaire plus conforme à son objet initial.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique. Monsieur Bruno Sido, je vous remercie de votre question, qui me permet de faire publiquement le point sur ce sujet qui inquiète de nombreux fonctionnaires de catégorie C ou de plus de cinquante ans que je rencontre sur le terrain.

C’est suite à la découverte, en 2007, d’une perte de pouvoir d’achat portant sur le traitement indiciaire pour bon nombre de ces agents de catégorie C ou de plus de cinquante ans que fut créée, en 2008, la garantie individuelle du pouvoir d’achat, ou GIPA. Celle-ci est calculée par comparaison sur une période de quatre ans, vous l’avez dit, entre l’évolution du traitement indiciaire de l’agent et l’indice des prix à la consommation. Si l’évolution du traitement a été inférieure à celle de l’inflation, l’agent perçoit une indemnité d’un montant brut équivalant à la perte de pouvoir d’achat ainsi constatée.

Alors que la GIPA devait initialement être versée tous les quatre ans, le dispositif a été renouvelé chaque année depuis 2008. Il le sera également en 2016, avec pour période de référence les années 2012 à 2015.

Comme vous le savez certainement, monsieur le sénateur, le gel du point d’indice de la fonction publique entre 2010 et 2016 a permis de réaliser une économie de 7 milliards d’euros sur le budget de la France. On peut donc dire que les fonctionnaires ont largement contribué au redressement des comptes publics. Les sommes de la GIPA représentent bien peu en comparaison de cette économie. Permettez-moi de vous communiquer quelques chiffres.

En 2015, la GIPA a été attribuée à 149 453 agents de la fonction publique d’État, pour un coût total de 109,7 millions d’euros.

Les éléments statistiques les plus récents concernant la fonction publique territoriale sont issus d’une enquête complémentaire aux bilans sociaux menée en 2013. En 2012, 159 000 agents auraient ainsi bénéficié de la GIPA, pour un montant de 75,8 millions d’euros.

S’agissant de la fonction publique hospitalière, les données connues les plus récentes estiment à 36,2 millions d’euros le montant total de GIPA versé en 2013.

Ces éléments n’étant pas entièrement satisfaisants, j’ai demandé qu’un bilan beaucoup plus fin soit réalisé afin de pouvoir évaluer ce dispositif dès cette année.

Je veux toutefois redire que ces sommes sont bien modestes eu égard à la véritable fonction sociale remplie par la GIPA. Celle-ci a en effet permis d’éviter à des milliers d’agents publics le décrochage de leur traitement indiciaire par rapport à l’inflation.

De plus, depuis 2012 le Gouvernement mène une action s’articulant notamment autour du soutien apporté aux catégories C en 2014 et en 2015, de la mise en place du protocole pour la revalorisation des carrières et des rémunérations, le PPCR – parcours professionnels, carrières et rémunérations –, dont les agents vont connaître le bénéfice entre 2016 et 2020, ou encore du dégel du point d’indice que j’ai décidé en mars dernier. Combinée à la faible inflation que nous connaissons, cette action permettra de faire baisser le montant de la GIPA dès 2017. Nous pouvons tous nous en féliciter, puisque cela signifiera que les conditions financières des fonctionnaires se sont améliorées.

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido.

M. Bruno Sido. Je souhaite uniquement faire remarquer à Mme la ministre qu’il y avait deux points dans ma question, le premier portant sur le montant versé par les collectivités locales et, surtout, le second sur le mode de calcul de la GIPA. Madame la ministre, comme vous l’avez noté, je vous faisais remarquer à ce sujet qu’alors que la GIPA visait initialement au rattrapage de la perte de pouvoir d’achat constatée, les agents concernés perçoivent quatre fois la perte de pouvoir d’achat tous les ans.

Je demande donc au Gouvernement de revoir le mode de calcul de la GIPA et la formule imposée aux collectivités locales.

recul de la vaccination en france

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, auteur de la question n° 1378, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Didier Guillaume. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, à deux jours de l’ouverture de l’Euro, au milieu de manifestations et à quelques semaines de l’éventuelle sortie du Royaume-Uni de l’Europe, ma question peut paraître déconnectée de la réalité et de l’actualité. Portant sur la vaccination, cette question adressée à Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, préoccupe pourtant l’ensemble de nos concitoyens.

Il y a déjà plusieurs mois, j’ai été alerté par des concitoyens nombreux, notamment parmi les représentants des professions médicales, sur le net recul qu’accusent les chiffres de la vaccination en France.

La vaccination a constitué, nous le savons tous, une grande avancée dans l’histoire de notre pays en matière de santé publique ; elle a permis le recul, voire la disparition de certaines maladies qui ont sévi jusqu’au milieu du siècle dernier : la tuberculose, le tétanos, la polio, la méningite bactérienne, et cette liste n’est pas exhaustive.

Or malgré les progrès incessants de la médecine dans notre pays, on constate curieusement une recrudescence de certaines pathologies, par exemple de rougeole, qui avaient disparu. Et l’on constate en parallèle que les vaccinations contre l’hépatite B, le vaccin dit ROR contre la rubéole, les oreillons et la rougeole, ou la vaccination contre la méningite sont en net recul.

On peut certainement attribuer ce constat à une perte de confiance d’une catégorie de la population dans la vaccination, ce sujet ayant suscité de nombreux articles, ou simplement à l’évolution de notre société, la prévention ayant tellement progressé que certains de nos concitoyens pensent qu’ils ne craignent plus rien.

Il me semble donc utile de rappeler quelques éléments objectifs et scientifiques de nature à rassurer la population. C’est la raison pour laquelle je souhaite interroger Mme la ministre de la santé sur les mesures que le Gouvernement a envisagées, envisage ou envisagera de prendre en vue de la réhabilitation, urgente dans notre pays, de la politique vaccinale.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le président Didier Guillaume, nous partageons votre constat. Effectivement, seules 47 % des personnes ciblées par la campagne de vaccination contre la grippe ont été vaccinées cette année. Nous sommes loin, très loin, de l’objectif de 75 % fixé par l’Organisation mondiale de la santé. Le taux de vaccination des jeunes filles contre le papillomavirus est seulement de 17 % en France, quand il est de près de 80 % au Royaume-Uni, en Belgique et au Danemark.

Pourtant, il faut rappeler, comme vous venez de le faire, que la vaccination est l’un des grands succès des politiques de prévention, et qu’il ne faut ni oublier ni banaliser les fléaux ainsi éradiqués ou amoindris dans nos pays. Ce geste a permis de sauver des millions de vies.

Le 12 janvier 2016, à la suite de la remise du rapport sur la politique vaccinale de Mme Sandrine Hurel, le Gouvernement a annoncé un plan pour la rénovation de la politique vaccinale.

Celui-ci vise tout d’abord à mieux informer les professionnels et le grand public par le biais de bulletins d’information trimestriels. Cette démarche s’accompagne également de la mise en ligne d’un site dédié à la vaccination par l’Agence nationale de santé publique. Depuis la fin du mois d’avril, le site vaccination-info-service.fr est ainsi consultable par tous.

Ce plan a aussi pour objectif de sécuriser l’approvisionnement des vaccins pour faire face aux tensions que nous connaissons actuellement, et ce en responsabilisant les industriels et en engageant des réformes telles que la mise en place de plans de gestion des pénuries. Dans les prochaines semaines, Marisol Touraine rencontrera de nouveau les industriels producteurs et distributeurs de vaccins en France afin qu’ils lui présentent leurs travaux pour mettre fin aux tensions d’approvisionnement qui sont encore ponctuellement constatées sur le territoire pour certains vaccins.

Enfin, ce plan vise à débattre avec tous nos concitoyens de l’intérêt de la vaccination. Nous nous efforcerons de démontrer cet intérêt, et votre intervention nous y aide, monsieur Guillaume. Afin d’alimenter ces débats qui se dérouleront tout au long de l’année, l’organisation d’une grande concertation citoyenne a été confiée au professeur Alain Fischer. Chacun pourra s’exprimer et suivre les débats, et les conclusions de ces échanges seront remises à la ministre des affaires sociales et de la santé dès la fin de cette année.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir répondu à cette question au nom du Gouvernement et de Marisol Touraine. Celle-ci ne visait qu’à alerter sur ce sujet qui me semble important, et la réponse qui m’a été apportée à l’instant me satisfait.

Le recul de la vaccination dans notre pays doit en effet être stoppé, sinon il pourra en résulter des problèmes en ville comme dans les zones rurales. J’attends donc avec impatience les mesures que vous avez annoncées, monsieur le ministre, et je salue la volonté de ce gouvernement d’aller dans le sens d’une meilleure prévention et de plus de vaccination. Il faut vraiment que nos concitoyens comprennent que la vaccination est quelque chose de positif pour la santé publique.

sort des communes associées en cas de regroupement sous le statut de commune nouvelle

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la question n° 1369, adressée à M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Philippe Mouiller. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le sort des communes associées suite à une fusion-association en application de la loi n° 71–88 du 16 juillet 1971 sur les fusions et regroupements de communes, dite loi Marcellin, lorsqu’elles souhaitent se regrouper sous le statut de commune nouvelle.

En effet, cette question ne semblait pas avoir été spécifiquement traitée dans la loi n° 2015–292 du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes.

De plus, des divergences d’interprétation étaient apparues quant au sort de ces communes associées dans l’hypothèse où elles s’engageraient dans une telle démarche.

Des communes associées n’envisagent de s’engager dans la création d’une commune nouvelle avec d’autres communes qu’à condition de conserver leur statut de commune déléguée. Si la création d’une commune nouvelle a pour conséquence la disparition des communes associées, beaucoup d’entre elles ne se lanceront pas dans cette démarche.

Une proposition de loi déposée sur le bureau du Sénat à l’initiative de notre collègue Bruno Sido ici présent est venue depuis compléter le dispositif proposé par la loi du 16 mars 2015, précisant le devenir des communes associées en cas de création d’une commune nouvelle. Ce texte prévoit le maintien des communes associées en tant que communes déléguées dans le cadre d’une commune nouvelle.

Adoptée par le Sénat le 8 mars dernier, cette proposition de loi a été votée par l’Assemblée nationale la semaine dernière, le 2 juin. Cette proposition de loi doit maintenant faire l’objet d’une seconde lecture dans les deux chambres, et un certain nombre d’ajustements devront être trouvés.

Les maires des communes associées sont dans l’attente de l’adoption définitive de ce texte avant de s’engager plus avant dans un processus de création d’une commune nouvelle. Je pense à un exemple précis dans le département des Deux-Sèvres, où les maires attendent de connaître les évolutions des textes législatifs pour délibérer.

Monsieur le ministre, compte tenu de l’attente suscitée par ces dispositions auprès des maires concernés, pourriez-vous m’indiquer si le Gouvernement est disposé à soutenir une adoption rapide de cette proposition de loi, et dans quels délais ? Je vous remercie des éléments que vous serez en mesure de nous apporter.

M. Bruno Sido. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur Philippe Mouiller, vous souhaitez que soit précisée la situation, dans les communes nouvelles, des communes associées issues de la loi déjà ancienne du 16 juillet 1971, dite loi Marcellin.

La loi Marcellin, bien qu’elle n’ait pas connu un grand succès et qu’elle ait été ô combien contestée et critiquée, a institué un régime juridique permettant la fusion de communes.

Dans ce cadre, les anciennes communes n’accueillant pas le chef-lieu de la commune fusionnée ont la possibilité de demander la création d’une commune associée reprenant le périmètre de l’ancienne commune ainsi que son nom. Depuis la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, qui crée le régime juridique des communes nouvelles, les communes fusionnées sous le régime de la loi Marcellin demeuraient régies par ces dispositions.

Par ailleurs, l’article L. 2113–10 du code général des collectivités territoriales prévoit le maintien des communes déléguées des communes nouvelles en cas d’extension à une ou plusieurs autres communes, mais pas celui des communes associées fusionnées sous le régime de la loi Marcellin. Aussi, la création d’une commune nouvelle entraîne la disparition de plein droit des communes associées instituées sous le régime de la loi Marcellin, sans qu’il soit besoin de prononcer leur dissolution.

Au 1er janvier 2016, trois cent dix-sept communes nouvelles avaient été créées depuis l’entrée en vigueur de la loi du 16 mars 2015, dont dix-huit comprennent parmi leurs communes fondatrices des communes issues d’une fusion-association « loi Marcellin », entraînant la disparition de trente-deux communes associées.

Vous l’avez évoqué, monsieur le sénateur, une proposition de loi, présentée par votre collègue Bruno Sido, que je salue ici, tendant à permettre le maintien des communes associées en cas de création d’une commune nouvelle, a été adoptée, en première lecture, par le Sénat au mois de mars de cette année et par l’Assemblée nationale le 1er juin dernier. Cette proposition de loi, à laquelle le Gouvernement est favorable – je vous le confirme, monsieur Sido – et sur laquelle j’avais d’ailleurs émis un avis de sagesse, apporte la modification législative que vous souhaitez. Après un examen en deuxième lecture, elle pourra être définitivement adoptée, et le problème que vous soulevez aujourd'hui sera alors réglé. Aussi, vous pouvez rassurer vos collègues quant à l’évolution législative de ce texte.

M. Bruno Sido. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller.

M. Philippe Mouiller. Je tiens simplement à remercier M. le ministre de ces précisions et à souligner l’importance de cette décision.

schémas départementaux de coopération intercommunale et organisation scolaire

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier, auteur de la question n° 1344, transmise à M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Bernard Fournier. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention et celle du Gouvernement sur les impacts de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », concernant l’organisation scolaire.

La réorganisation territoriale s’articule autour d’un document déterminant, le schéma départemental de coopération intercommunale, le SDCI, ayant vocation à réunir les différentes fusions qui auront cours dans chaque département, à modifier les périmètres ou encore à supprimer des syndicats.

Malheureusement, certains projets de SDCI préfectoraux incitent fortement à la suppression de syndicats scolaires et, en parallèle, au transfert de la compétence scolaire des communes aux intercommunalités. Cette pression est d’autant plus intolérable que la compétence scolaire ne figure pas au rang des compétences obligatoires des communautés de communes.

La refonte intercommunale, qui relève d’un autre ministère que celui de l’éducation nationale, a ainsi des conséquences sur le niveau de gestion de cette compétence et sur l’organisation du territoire scolaire, selon une politique qui ne prend pas en compte les spécificités des écoles rurales.

Les préfets disposent d’une marge d’appréciation sur la survie ou non des syndicats intercommunaux à vocation scolaire au sein desquels – faut-il le rappeler ? – les élus gèrent de façon consensuelle et efficace la compétence scolaire. Le climat de menace qui pèse sur certains regroupements pédagogiques est particulièrement déstabilisant et il est de nature à perturber l’organisation scolaire locale.

Les maires ruraux comptent sur la mise en œuvre d’une politique éducative ambitieuse qui réponde tant aux enjeux d’un aménagement du territoire juste et équilibré qu’à l’impératif d’égal accès des citoyens à l’école de la République.

La question scolaire doit être partie intégrante du projet de territoire et ne doit pas faire l’objet d’arbitrages liés à des contraintes autres que l’intérêt de l’enfant.

Par conséquent, que comptez-vous faire, monsieur le ministre, pour pérenniser les syndicats scolaires, qui remplissent parfaitement leurs missions ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur Bernard Fournier, vous appelez mon attention sur l’impact de la refonte actuelle de la carte intercommunale sur les syndicats à vocation scolaire, notamment en milieu rural.

Tout d’abord, il convient de rappeler que la compétence scolaire, relevant des communes, est une compétence sécable entre la charge des bâtiments scolaires – investissement et fonctionnement – et ce que l’on appelle le « service des écoles », c’est-à-dire l’acquisition du mobilier et des fournitures, ainsi que le recrutement et la gestion des personnels de service.

Une communauté de communes peut donc se voir transférer les deux volets de la compétence scolaire conjointement ou bien seulement l’un ou l’autre, sans, toutefois, qu’il soit possible de scinder au sein de la charge des bâtiments scolaires entre le fonctionnement et l’investissement, cette interdiction découlant des principes régissant le droit de propriété.

Parce qu’il s’agit d’une compétence historique des communes, la volonté ancienne de se regrouper pour mutualiser les moyens en matière scolaire a précédé l’élaboration institutionnelle de la carte intercommunale.

Il est vrai que, avec la loi NOTRe, le Gouvernement a voulu favoriser l’émergence d’intercommunalités aux moyens renforcés, mieux à même de répondre aux attentes de nos concitoyens. Mais vous savez tout cela, nous en avons souvent débattu ici même.

Il convient toutefois de rappeler que, dans le cadre des fusions d’EPCI, le choix du bon échelon en matière de gestion de la compétence scolaire revient aux élus, et à eux seuls : une compétence optionnelle des EPCI préexistant à la fusion est exercée à titre transitoire par le nouvel EPCI pendant trois mois – ce délai est porté à un an par l’article 35 de la loi NOTRe dans le cadre des SDCI – selon les modalités de gestion préexistantes à la fusion.

En outre, aux termes de l’article 4 de la loi du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale, dite loi « Pélissard-Sueur », la compétence scolaire bénéficie d’un aménagement de procédure : dans le cadre d’une fusion, extension ou création d’un nouvel EPCI à fiscalité propre, il est toujours possible de créer des syndicats pour les compétences scolaire, petite enfance et action sociale, si la compétence n’est pas reprise par l’EPCI.

Enfin, je vous rappelle que, dans le cadre du comité interministériel aux ruralités, réuni pour la troisième fois en quatorze mois le 20 mai dernier à Privas, le Gouvernement a pris des engagements pour lutter contre les fragilités de l’école rurale. Ainsi, quinze départements ont déjà signé des « conventions ruralités », qui permettent aux territoires volontaires de s’engager sur le regroupement et la mise en réseau d’écoles, en leur donnant une visibilité sur les évolutions des effectifs d’enseignants.

Comme cela a été préconisé par le sénateur Alain Duran dans le rapport qu’il a récemment remis au Premier ministre, le Gouvernement poursuivra cette démarche contractuelle, souple et modulable dans les semaines et les mois à venir. C’est là une très bonne réponse aux problématiques que vous venez de poser, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier.

M. Bernard Fournier. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour toutes les précisions que vous avez apportées, mais celles-ci ne sont que moyennement satisfaisantes eu égard à la question posée.

C’est une évidence, et même quasiment une lapalissade, ne détruisons pas les structures qui fonctionnent bien et rendent des services très appréciés à nos concitoyens ! La gestion au plus près des réalités du terrain, notamment dans le domaine scolaire, me semble être la sagesse même.

critères applicables dans le calcul de la dotation de solidarité communautaire

M. le président. La parole est à M. Patrick Abate, auteur de la question n° 1400, transmise à M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Patrick Abate. Monsieur le ministre, la dotation de solidarité communautaire, la DSC, répond à un besoin de péréquation entre les communes. Cette source de revenus est « répartie en tenant compte prioritairement de l’importance de la population et du potentiel fiscal ou financier par habitant, les autres critères étant fixés librement par le conseil communautaire ».

Ces critères prioritaires peuvent cohabiter avec des critères complémentaires, laissés à la discrétion des intercommunalités. Il n’existe aucune nomenclature de ces derniers critères ni de pondération prévue par la loi.

Dans un arrêt en date du 9 octobre 2007, la cour administrative d’appel a simplement établi qu’à 20 % le poids des critères prioritaires était insuffisant.

Ainsi, dans certains territoires, alors que ceux-ci respectent la règle, apparaissent de graves entorses à l’esprit de la DSC, en particulier avec l’intégration de critères complémentaires qui, par nature, ont pour effet de limiter, voire d’annuler, l’impact des critères prioritaires en termes de diminution des inégalités. La DSC ne peut donc remplir sa fonction.

À cet égard, je prendrai l’exemple d’une communauté de communes dans mon département dans laquelle les critères y sont établis comme suit : les critères de population, de potentiel fiscal et d’effort fiscal sont pondérés respectivement à hauteur de 35 %, de 15 % et de 10 %. Jusque-là, tout va bien, ces critères et leurs pondérations répondent aux exigences des textes et à la jurisprudence. Mais la communauté de communes peut décider d’affecter les 40 % restant – et c’est ce qui s’est passé ! – à un critère comme celui de la base de cotisation foncière des entreprises, la CFE, de chaque commune, la DSC étant d’autant plus élevée que la CFE liée à la commune est importante. Ce faisant, dans cette communauté de communes, les communes faiblement peuplées avec un potentiel fiscal très important et un effort fiscal très faible vont tout simplement gagner en DSC grâce à la CFE !

Vous l’aurez compris, monsieur le ministre, cette situation nous ramène à une situation antérieure à la création de la communauté de communes et, vous en conviendrez, la vocation première de la DSC n’était pas celle-là.

Monsieur le ministre, je connais votre attachement à la solidarité entre les territoires. Aussi, vous semblerait-il utile d’ajouter au dispositif un ou deux critères prioritaires tels que le nombre de logements sociaux ou le revenu médian par habitant, qui permettraient de limiter les effets néfastes potentiels ?

Quelles dispositions le Gouvernement pourrait-il mettre en œuvre pour faire prévaloir plus efficacement et plus sûrement le caractère solidaire de la DSC ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur Patrick Abate, la dotation de solidarité communautaire est, comme vous l’avez rappelé, un mécanisme de péréquation destiné à contribuer à réduire la disparité des ressources et des charges entre les communes membres d’un même EPCI.

Pour garantir l’adéquation du dispositif à cet objectif, la loi impose les critères de répartition prépondérants, à savoir le potentiel financier ou fiscal par habitant et la population, pour les communautés de communes et communautés d’agglomération non signataires d’un contrat de ville, et le revenu par habitant ainsi que le potentiel fiscal et financier par habitant pour tous les autres EPCI.

La loi donne en outre la possibilité aux collectivités territoriales de déterminer librement des critères complémentaires. Cette latitude offerte dans le respect du principe de libre administration des collectivités locales, un principe auquel je vous sais très attaché, monsieur le sénateur, à l’instar de tous vos collègues, permet de tenir compte de la situation locale, certains critères pouvant être révélateurs d’un écart de richesse ou d’une charge particulière dans certains territoires, et ne pas l’être a contrario dans d’autres.

En outre, la dotation de solidarité communautaire résulte d’un consensus local global, formalisé, le cas échéant, dans un pacte financier et fiscal de solidarité, qui tient compte de l’ensemble des relations financières au sein du bloc communal.

L’institution d’un pacte financier et fiscal de solidarité est, vous le savez, obligatoire pour les EPCI signataires d’un contrat de ville. Si un tel pacte n’a pas été élaboré au plus tard un an après l’entrée en vigueur du contrat de ville, l’EPCI signataire du contrat de ville est tenu d’instituer une dotation de solidarité communautaire au profit des communes concernées par les dispositifs prévus dans le contrat de ville.

Dans ce cas, le montant de la dotation de solidarité communautaire est au moins égal à 50 % de la dynamique de fiscalité professionnelle constatée par rapport à l’année précédente.

Par ailleurs, l’existence d’un pacte financier et fiscal peut emporter l’obligation d’instituer une dotation de solidarité communautaire pour l’EPCI à fiscalité propre, signataire du contrat de ville, lorsque cet EPCI est issu de la fusion de plusieurs EPCI dont les potentiels financiers agrégés par habitant présentent un écart d’au moins 40 % à la date de la fusion. Le montant de la dotation de solidarité communautaire est alors fixé librement.

Ces dispositions sont donc de nature à conforter l’objectif de réduction des écarts de richesse poursuivi par cette dotation et vont dans la direction que vous souhaitez, monsieur le sénateur, à savoir une solidarité entre les territoires.

M. le président. La parole est à M. Patrick Abate.

M. Patrick Abate. Monsieur le ministre, il ne s’agit bien évidemment pas ici de remettre en cause le principe de libre administration des collectivités locales, ni de ne pas tenir compte, comme vous l’avez très justement dit, des situations très différentes d’une intercommunalité à une autre. Certains critères complémentaires peuvent être effectivement efficaces dans certains territoires et contre-productifs dans d’autres. En ce sens, vous avez tout à fait raison et je partage complètement votre point de vue.

Vous avez évoqué les efforts réalisés en termes de réglementation notamment au niveau des EPCI signataires d’un contrat de ville. Il ne s’agit pas de compliquer certains points et je ne dis pas que le dispositif n’est pas satisfaisant. Toutefois, il laisse la porte ouverte à des situations compliquées.

M. Jean-Michel Baylet, ministre. Eh oui !

M. Patrick Abate. Il me semble que le simple fait de mentionner quelque part, pour les élus locaux, comme pour les juges qui auront éventuellement à faire appliquer le principe de droit, que les critères complémentaires ne peuvent remettre en cause le principe de solidarité que les critères prépondérants garantissent et qui nous est commun permettrait peut-être de renforcer la jurisprudence en ce sens.

Au vu de mon expérience – cette situation existe sans doute aussi dans d’autres territoires –, cette petite faiblesse juridique peut avoir des conséquences qui ne sont pas, je dirai, très agréables. (M. le ministre opine.)

Je le répète, je ne veux pas remettre en cause les critères prioritaires ni les critères complémentaires dans le cadre des contrats de ville. Je ne veux pas non plus remettre en cause la libre administration des collectivités locales et surtout pas le dispositif dans son ensemble, mais je souhaite l’améliorer. Tel était d’ailleurs le sens d’un amendement que j’avais déposé et à l’époque je l’avais sans doute mal exposé puisque notre assemblée et le Gouvernement m’avaient répondu qu’il ne fallait pas modifier le dispositif, au nom du principe de libre administration. Mais j’y reviendrai.

reconnaissance du diplôme de psychomotricien obtenu en belgique

M. le président. La parole est à M. Dominique Bailly, auteur de la question n° 1377, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Dominique Bailly. Madame la secrétaire d’État, je voudrais attirer ce matin votre attention sur la situation des jeunes Français titulaires du diplôme belge de psychomotricien.

Vous le savez, de nombreux jeunes de la région Nord–Pas-de-Calais–Picardie, désormais dénommée Hauts-de-France, font leurs études en Belgique et effectuent, dans le cadre de leur scolarité, des stages en France chez des professionnels de santé. Diplômés, ils se lancent à la recherche d’un emploi, sont reçus très favorablement par des professionnels de santé français, mais ne peuvent contractualiser avec eux, le diplôme belge n’étant pas reconnu.

Quand on sait les demandes actuelles dans le domaine de la psychomotricité, en particulier pour nos concitoyens atteints de la maladie de Parkinson ou d’autisme, il y a là un réel problème. Au-delà des parcours de vie de ces jeunes, qui sont brutalement stoppés, se pose aussi un problème européen : ces diplômes belges sont construits sur les normes européennes, mais sont aujourd'hui en attente de reconnaissance en France.

Madame la secrétaire d'État, la reconnaissance de ces diplômes est-elle d’actualité ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, l’impossibilité pour les étudiants français ayant suivi une formation de psychomotricien en Belgique d’obtenir une autorisation pour exercer en France est malheureusement bien connue.

En effet, la Belgique n’a réglementé ni la formation ni l’exercice en psychomotricité, ce qui signifie que cette profession n’est pas reconnue dans ce pays. En conséquence, cet exercice non réglementé en Belgique ne peut pas relever de la directive européenne garantissant la libre circulation des professionnels de santé.

Autrement dit, un jeune Français formé en Belgique ne peut pas être psychomotricien en Belgique et ne peut donc se prévaloir de deux ans d’exercice en Belgique pour demander ensuite une autorisation d’exercice en France.

À l’inverse, en France, les psychomotriciens sont des professionnels de santé, titulaires d’un diplôme d’État, formés dans des instituts après un concours d’entrée sélectif soumis à un quota d’admission.

À cet égard, Marisol Touraine a décidé, dans le cadre du plan Alzheimer, de prévoir la formation supplémentaire de 2 000 psychomotriciens dans les écoles françaises. Ainsi, le quota national annuel d’entrée en formation, fixé par le ministère de la santé, est passé de 400 places en 2010 à 920 places en 2015.

J’indique que la ministre a engagé une concertation avec les autorités belges pour trouver une solution juridique au cas de ces jeunes Français formés en Belgique, visant notamment à leur proposer des mesures compensatoires en matière de formation qui leur permettraient de valider leur diplôme en France. Cette hypothèse est actuellement à l’étude.

Mais, sans attendre, il convient d’informer au mieux les candidats potentiels aux formations dispensées en Belgique, sur la non-reconnaissance de ces diplômes pour l’exercice de la psychomotricité en France.

Le ministère de la santé a proposé d’insérer une mention d’alerte sur le site Admission Post Bac, afin de prévenir les jeunes bacheliers qui pourraient être tentés de partir faire leurs études en Belgique, et les autorités belges se sont également engagées à relayer l’information.

M. le président. La parole est à M. Dominique Bailly.

M. Dominique Bailly. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de l’attention portée à cette question et des éléments de réponse que vous m’avez communiqués.

On le voit bien, la situation est très particulière : d’un côté, des jeunes formés, dont le diplôme n’est pas reconnu en Belgique, et, de l’autre, de fortes demandes, auxquelles on est dans l’incapacité de répondre.

En revanche, je me félicite d’un élément de réponse très positif : la négociation avec nos amis belges, notamment pour faire en sorte que ces jeunes, qui sont tout de même plusieurs centaines, puissent le plus rapidement possible bénéficier d’un complément de formation sur notre territoire afin de pouvoir se présenter sur le marché du travail. Cela me semble une bonne solution, car la situation actuelle est vraiment ubuesque.

M. le président. Monsieur Dominique Bailly, si, là-bas, vous vous appelez les hauts de la France, comment nous, au Sud, va-t-on nous appeler… (Sourires.)

décompte des indemnités kilométriques en zone de montagne par la caisse primaire d'assurance maladie de l'isère

M. le président. La parole est à M. Michel Savin, auteur de la question n° 1361, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Michel Savin. J’attire l’attention du Gouvernement sur la récente décision de la caisse primaire d’assurance maladie de l’Isère de ne plus prendre en charge les indemnités kilométriques de montagne au tarif « IK montagne » pour les professionnels de santé non installés en zone de montagne.

Désormais, les professionnels implantés dans une zone « IK plaine » ne peuvent plus prétendre aux indemnités au tarif de montagne, même lorsque le domicile de leur patient se situe en zone de montagne. Il en résulte pour eux une différence de quinze centimes d’euro par kilomètre parcouru dans le cadre des soins à domicile en zone montagneuse.

Cette modification de la prise en charge kilométrique affecte les professionnels de santé du département de l’Isère et soulève de nombreuses interrogations pour les professions concernées. Alors que l’État appelle à l’adéquation entre l’aménagement du territoire et les besoins des populations, il semble aujourd’hui nécessaire de prendre en compte la réalité du quotidien des professionnels de santé, afin de justifier des moyens mis en œuvre pour assurer l’égal accès aux soins.

Cette décision met en péril les soins à domicile dans des zones souvent difficiles d’accès. À titre d’exemple, elle peut engendrer pour les professionnels de santé une perte supérieure à mille euros par an et par patient.

Alors que les trajets en montagne sont plus longs et plus coûteux qu’en plaine, du fait des contraintes géographiques et de l’usure accrue des véhicules, cette modification de la prise en charge des indemnités kilométriques par la caisse primaire d’assurance maladie de l’Isère pourrait, dans un avenir proche, favoriser l’apparition de déserts médicaux dans des secteurs montagneux où la demande en soins est par ailleurs croissante.

Aussi, madame la secrétaire d’État, pourriez-vous m’indiquer les raisons de l’application de cette mesure, ainsi que les mesures compensatoires qui seront prises pour ne pas déstabiliser l’offre médicale dans les secteurs de montagne concernés ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur Savin, en ce qui concerne le mode de calcul des indemnités kilométriques, la nomenclature définie par l’assurance maladie est claire : lorsqu’un acte doit être pratiqué au domicile du malade, les frais de déplacement du professionnel de santé sont remboursables en fonction de la distance réellement parcourue.

Ainsi, ces frais de déplacement ne sont remboursés que dans le cas d’une visite dans une autre agglomération que celle du domicile professionnel. Quant aux conditions d’exercice particulières auxquelles sont soumis les infirmières et les infirmiers en région montagneuse, elles sont prises en compte par le remboursement des frais de déplacement à partir d’un trajet de plus d’un kilomètre, au lieu de deux kilomètres en plaine, et par l’application d’un barème kilométrique plus favorable que celui qui correspond aux déplacements en plaine.

Ces règles spécifiques à l’activité en montagne s’appliquent en fonction du lieu référencé d’installation du professionnel de santé, qui peut être directement identifié. Ce principe permet de surcroît d’encourager l’installation des professionnels de santé dans les communes classées en zone de montagne.

Néanmoins, on constate que l’application de ces règles a pu faire l’objet d’interprétations divergentes par certains professionnels. C’est pourquoi il a été demandé aux caisses primaires d’assurance maladie d’organiser des échanges avec les professionnels concernés en vue de prévenir toute incompréhension ou tout malentendu sur le sujet.

Ces clarifications au niveau local seront complétées par des échanges organisés par l’Union nationale des caisses d’assurance maladie avec les représentants des infirmiers libéraux et destinés à assurer une compréhension partagée et homogène sur le territoire des règles de prise en charge des frais de déplacement des infirmiers.

M. le président. La parole est à M. Michel Savin.

M. Michel Savin. Je souhaite, madame la secrétaire d’État, que les informations que vous venez de nous communiquer soient transmises le plus rapidement possible aux différents services concernés, afin que la situation puisse être expliquée aux professionnels de santé et que ceux-ci puissent être rassurés.

J’insiste sur l’enjeu d’aménagement du territoire soulevé par ce problème : on ne peut pas continuer à tenir un double discours, en expliquant qu’il faut mobiliser les moyens nécessaires pour garantir le maintien à domicile des personnes âgées ou malades tout en pénalisant les professionnels qui dispensent les soins à domicile. Si nous voulons que ces personnes puissent se maintenir dans nos villages, notamment en montagne, nous devons leur garantir l’accès aux soins.

Madame la secrétaire d’État, je compte sur vous pour faire passer ce message et, le cas échéant, pour rectifier la prise en charge des frais de déplacement des professionnels de santé en zone de montagne, car il serait dramatique pour les personnes âgées ou malades qui y habitent que la réalisation de certains actes soit remise en cause !

conséquences de la mise en place de la tarification à l'activité pour les établissements de soins en zone de montagne

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 1385, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Jean-Yves Roux. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la santé et des affaires sociales.

À l’heure où les groupements hospitaliers de territoire se mettent en place, Mme Touraine a déclaré en février dernier : « On ne raisonne plus en termes de structures, mais en termes de territoire. On analyse dans chaque territoire les besoins de la population et, ensuite, avec un projet médical commun, on cherche à faire travailler au mieux les hôpitaux de proximité avec l’hôpital de référence. »

Dans ce contexte, je souhaite appeler de nouveau l’attention de la ministre de la santé, ainsi que la vôtre, madame la secrétaire d’État, sur la mise en place de la tarification à l’activité, la T2A, dans les établissements de soins situés en zone de montagne. En effet, le fonctionnement de ces établissements, original, présente des spécificités qui ne semblent pas prises en compte par cette tarification reposant sur une logique de mesure de la nature et du volume des activités, et non plus sur une autorisation de dépenses.

Les petits hôpitaux locaux, comme le souligne la Cour des comptes dans un rapport de septembre 2013 intitulé « L’avenir des hôpitaux locaux », ont des atouts spécifiques, au service de certains territoires fragiles et en voie de désertification médicale. À ce titre, ils supposent un pilotage plus en phase avec la réalité des actes réalisés, ainsi qu’avec les missions de service public et d’aménagement du territoire qu’ils remplissent. Ainsi, ces établissements prennent en charge, en soins de suite et de réadaptation, une patientèle âgée et dépendante très particulière à ces territoires. C’est pourquoi le rapport de la Cour des comptes préconise le maintien des lits de soins de suite et de réadaptation dans ces structures.

À cette fin, il s’agirait de mettre en place pour les hôpitaux locaux un financement mixte articulant, à titre principal, une tarification à l’activité pour les soins de court séjour, de suite et de réadaptation et un financement forfaitaire destiné à reconnaître leur rôle spécifique dans les zones médicalement fragiles.

Madame la secrétaire d’État, comment seront prises en compte, au sein des futurs groupements hospitaliers de territoire, les recommandations de la Cour des comptes sur la mise en place de tarifications à l’activité tenant compte des responsabilités particulières des établissements situés en zone de montagne ou sur un territoire incluant de telles zones ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur Roux, Marisol Touraine a fait de la réduction des inégalités territoriales d’accès aux soins une priorité, comme le démontrent les engagements pris dès 2012 dans le cadre du pacte territoire-santé.

Deux grandes modifications ont été apportées au modèle de financement des établissements de santé depuis 2012 afin de corriger les effets pervers de la tarification à l’activité.

Ainsi, depuis 2014, les établissements situés dans des zones à faible densité de population peuvent bénéficier d’un financement complémentaire à la tarification à l’activité dès lors qu’ils répondent à des critères d’isolement géographique. Ce dispositif a vocation à assurer le maintien d’activités indispensables pour les habitants des territoires géographiquement fragilisés. Dans ce cadre, monsieur le sénateur, deux établissements de votre département sont soutenus, la maternité de Manosque et le centre hospitalier de Digne-les-Bains, à hauteur de respectivement 450 000 et 630 000 euros cette année.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 a été l’occasion de compléter ce dispositif. Parmi les mesures adoptées figure une disposition en faveur des médecins exerçant dans des territoires fragiles, plus particulièrement en zone de montagne. En effet, ces professionnels font face à des contraintes liées à l’isolement, alors même que leur présence est indispensable pour garantir l’accès aux soins aux populations enclavées.

La disposition en faveur des hôpitaux de proximité qui vient concrétiser l’engagement n° 11 du pacte territoire-santé mérite également d’être mentionnée. Dès cette année, elle permettra la mise en place d’un modèle de financement innovant pour 250 établissements hospitaliers. Tel est le sens du décret publié le 24 mai dernier, aux termes duquel pourront bénéficier du nouveau mode de financement les établissements situés sur des territoires fragiles, au point de vue tant de la vulnérabilité de la population accueillie que du caractère rural des zones couvertes, ou encore de la difficulté à recruter des médecins généralistes.

Les hôpitaux de proximité bénéficieront ainsi d’une garantie de revenus, définie en partie sur le fondement d’indicateurs sociodémographiques, de façon à corriger certaines inégalités territoriales. Monsieur le sénateur, les hôpitaux de proximité de votre département pourront être concernés également par ce dispositif-ci.

Comme vous le constatez, toutes ces mesures concourent à répondre aux besoins de nos concitoyens, tout particulièrement des habitants des zones rurales et de montagne.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux.

M. Jean-Yves Roux. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Je pense que, au-delà des questions liées à la santé et à l’offre de soins, la prise en compte des spécificités des territoires de montage sera abordée de manière plus large dans le cadre du futur projet de loi pour la montagne, qui sera sûrement soumis au Parlement avant la fin de l’année.

excédents de gestion des caisses d'allocations familiales

M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, auteur de la question n° 1345, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Antoine Lefèvre. Madame la secrétaire d’État, j’attire votre attention sur la décision unilatérale prise à la fin du mois de décembre dernier par la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, de ne pas restituer aux caisses locales leurs excédents de gestion au titre de 2014 pour l’exercice 2015. Ces excédents représentent, pour la caisse d’allocations familiales de l’Aisne, un montant supérieur à 350 000 euros, soit environ 2,6 % du budget annuel de la caisse.

Cette décision s’ajoute au fait que les services de la CNAF avaient déjà repris, au mois de janvier 2015, 30 % du montant des investissements votés par le conseil d’administration de la caisse d’allocations familiales de l’Aisne sur les crédits annuels en 2014 et reportés pour exécution en 2015. De surcroît, ces mêmes services ont effectué une réfaction sur le crédit de référence de 2015, après que celui-ci eut été notifié à l’organisme et eut servi de base au vote par les administrateurs de la caisse du budget initial pour 2015. Enfin, le reversement de la totalité des excédents de 2014, inclus dans le dernier budget rectificatif voté en novembre 2015, a été purement et simplement supprimé à la fin du même mois.

Ces décisions contreviennent au principe de pluriannualité budgétaire en vigueur dans la branche famille depuis plus de trente ans et réaffirmé dans la convention d’objectifs et de gestion pour la période 2013-2017, conjointement signée.

Cette rupture de contrat met également à mal le dispositif vertueux d’encouragement à une gestion responsable des organismes. En effet, seules les économies cumulées permettent de réinvestir ultérieurement dans l’amélioration des conditions de travail des salariés, qui conduit, à terme, à améliorer le service rendu aux allocataires.

Ces moyens sont indispensables à la caisse d’allocations familiales de l’Aisne pour réaliser ses opérations d’investissement, notamment les mises aux normes d’accessibilité pour les personnes handicapées, l’aménagement des accueils de ses différents sites pour l’accès facilité des allocataires aux nouveaux moyens dématérialisés et les travaux indispensables d’entretien des bâtiments.

Cette non-restitution ne permet pas aux caisses d’allocations familiales de disposer des marges de manœuvre indispensables au financement de projets à moyen et à long terme et les met en difficulté au regard des investissements locaux initialement envisagés. Ainsi, du fait des réfactions successives, la caisse d’allocations familiales de l’Aisne reste dans une situation budgétaire délicate, que la seule rigueur de gestion ne devrait pas suffire à améliorer.

Je rappelle que le code de la sécurité sociale attribue aux conseils d’administration des caisses le vote des budgets. Les administrateurs de la caisse d’allocations familiales de l’Aisne, parce qu’ils ne peuvent cautionner ces mesures autoritaires, contraires aux principes de gouvernance des caisses et pénalisantes pour le fonctionnement de l’organisme, réclament, à l’unanimité, le retour de la pluriannualité budgétaire, dans le respect des engagements de la convention d’objectifs et de gestion. Madame la secrétaire d’État, nous demandons le respect des engagements réciproques et, surtout, la restitution des ressources indûment retenues !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur Lefèvre, les moyens alloués au réseau des caisses d’allocations familiales sont encadrés par la convention d’objectifs et de gestion conclue entre l’État et la Caisse nationale des allocations familiales pour la période 2013–2017. Cette convention prévoit les crédits nécessaires au financement de l’ensemble des objectifs fixés. Ainsi, l’enveloppe globale de crédits allouée par la CNAF à chaque caisse d’allocations familiales, actualisée chaque année, permet de financer l’ensemble des actions et emplois autorisés.

De surcroît, les pouvoirs publics sont particulièrement attentifs à la situation de la branche famille. C’est ainsi que le Gouvernement lui a octroyé des moyens complémentaires : à la fin de l’année dernière, 500 emplois d’avenir et 422 contrats à durée indéterminée lui ont été attribués pour assurer la bonne mise en œuvre de la prime d’activité et, au premier semestre de cette année, 350 contrats à durée déterminée lui ont été temporairement accordés afin de poursuivre ce soutien et de tenir compte des récentes évolutions législatives.

La caisse d’allocations familiales de l’Aisne, comme toutes les caisses d’allocations familiales, bénéficie cette année des crédits nécessaires au financement des effectifs additionnels, dans le cadre de la réutilisation d’une partie des crédits non consommés lors des exercices antérieurs.

Notre préoccupation première est que chaque caisse dispose des moyens nécessaires à l’accomplissement de ses missions. Je vous confirme que tel est le cas à travers le budget 2016.

En ce qui concerne plus précisément les crédits d’investissement sur lesquels vous appelez mon attention, monsieur le sénateur, il est vrai que la CNAF a minoré une partie de ceux de la caisse d’allocations familiales de l’Aisne en 2015. Toutefois, cette décision n’affecte en rien la capacité de cette caisse à mener à bien ses projets d’investissements, les projets touchés par cette mesure faisant désormais l’objet d’un financement par la CNAF. Ainsi, les travaux prévus sur le site de Soissons et inscrits au plan national immobilier 2013–2017 de la branche seront financés intégralement par la CNAF, à hauteur de 1,3 million d’euros.

Monsieur Lefèvre, nous connaissons l’importance de la branche famille pour les Français. C’est pourquoi le cadre pluriannuel est préservé, et les organismes, notamment dans l’Aisne, demeurent soutenus par le Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre.

M. Antoine Lefèvre. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État, même si je ne suis pas persuadé qu’elle donnera satisfaction aux administrateurs de la caisse d’allocations familiales de l’Aisne. Vous nous avez apporté votre éclairage sur la situation ; de notre côté, nous restons vigilants sur la pluriannualité budgétaire, qui est de règle !

rôle de l'état et des élus locaux pour l'hébergement des migrants et la scolarisation de leurs enfants

M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, en remplacement de Mme Christiane Hummel, auteur de la question n° 1356, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Antoine Lefèvre. Mme Christiane Hummel, empêchée ce matin, m’a chargé d’être son porte-parole pour interroger M. le ministre de l’intérieur sur la situation des enfants étrangers. Mme Hummel a rédigé cette question au mois de février dernier ; elle se permet de la réactualiser, car la situation de ces enfants s’est notoirement modifiée à La Valette-du-Var, dont elle est maire.

Depuis plusieurs années, certaines associations prennent en charge des familles déboutées du droit d’asile en les hébergeant temporairement dans des hôtels de la commune. Les enfants de ces familles sont scolarisés passagèrement, sans qu’aucun service de l’État n’avertisse jamais ni le maire ni les services municipaux. Ces enfants restent dans les écoles quelques semaines, sans possibilité d’intégration ni perspective pédagogique sérieuse. Pour la plupart, ils ne peuvent pas comprendre ce qui leur arrive.

De plus l’ensemble de la communauté éducative – maîtres des écoles, directeurs, élèves et parents – ainsi que les services municipaux doivent faire face, avec difficulté, à ces situations incohérentes, qui ne relèvent que de l’improvisation.

Mme Hummel demande donc au ministre de l’intérieur s’il est possible d’assouplir l’obligation de scolariser lorsque les enfants n’ont pas vocation à rester dans une commune et, surtout, si les maires pourraient être informés avant l’inscription des enfants, afin de pouvoir prendre les dispositions nécessaires dans la sérénité. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de la réponse que vous allez apporter à ma collègue.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. M. le ministre de l’intérieur prie Mme Hummel de bien vouloir excuser son absence.

La France s’est engagée à accueillir 30 700 personnes en besoin manifeste de protection, faisant ainsi preuve d’initiative pour faire face à la crise migratoire. Afin de participer à l’effort national, le préfet du Var a sollicité l’ensemble des communes du département, notamment par courrier, en leur précisant les modalités d’accueil et d’accompagnement proposées par l’État.

Certaines d’entre elles ont répondu favorablement à cette demande. À titre d’illustration, le maire de Montfort-sur-Argens, commune de 1 302 habitants, a été fortement accompagné en amont de l’accueil, ce qui a permis à un couple avec un enfant, jusqu’alors hébergé dans un centre d’accueil de demandeurs d’asile, d’être accueilli dans la commune le 25 janvier dernier. L’enfant a été scolarisé à l’école élémentaire quatre jours après son arrivée. Il s’agissait d’une situation connue par l’État et pour laquelle un accompagnement a été possible.

On ne note pas d’évolution significative des flux d’élèves allophones scolarisés dans les établissements scolaires : au 1er avril dernier, ils étaient 221 dans le premier degré et 167 dans le second, contre respectivement 380 et 154 au cours de l’année scolaire 2014-2015 ; 66 sont pris en charge par d’autres dispositifs, comme les missions locales ou la mission de lutte contre le décrochage scolaire, contre 63 l’année dernière.

Ces élèves font l’objet d’une affectation dans un établissement scolaire après avoir été reçus par le centre académique pour la scolarisation des enfants allophones nouvellement arrivés et des enfants issus de familles itinérantes et de voyageurs, le CASNAV. Selon la procédure mise en place par la direction des services départementaux de l’éducation nationale du Var, ce service prend l’attache du responsable des affaires scolaires de la commune concernée par la scolarisation de l’enfant ; celui-ci est ensuite admis dans l’établissement par le directeur de l’école, l’inscription relevant, quant à elle, de la compétence exclusive de la commune.

En ce qui concerne plus particulièrement la commune de La Valette-du-Var, cinq enfants allophones y sont scolarisés à ce jour dans quatre écoles, deux maternelles et deux élémentaires.

Le département du Var ne rencontre pas, à ce jour, de difficulté particulière liée à la scolarisation des élèves non francophones.

Par ailleurs, la commune de La Valette-du-Var n’abrite aucune structure d’hébergement ou de logement pour l’accueil de réfugiés. En revanche, jusqu’au 31 décembre 2015, il a existé dans le Var un dispositif hôtelier d’hébergement d’urgence pour des demandeurs d’asile. Dans ce cadre, deux familles de demandeurs d’asile ont été hébergées dans un hôtel privé de la commune de La Valette-du-Var, dans l’attente d’un transfert vers un dispositif plus adapté, comme un centre d’accueil de demandeurs d’asile ; une seule de ces familles comprenait des enfants scolarisés, au nombre de deux. Cet hébergement était très provisoire et réservé à des familles en instance de demande d’asile. Les personnes concernées ont d’ailleurs quitté l’hôtel depuis plusieurs semaines.

M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre.

M. Antoine Lefèvre. Madame la secrétaire d’État, je transmettrai à ma collègue Christiane Hummel les informations que vous venez de nous communiquer. Il est certain qu’une association des maires permet de bien anticiper les situations. Ainsi, l’accueil de plusieurs familles d’Afghans dans ma commune de Laon, en liaison avec les services de l’État et de l’éducation nationale, se passe très bien. Quand les maires peuvent être associés, cela vaut mieux !

M. le président. Mes chers collègues, dans l’attente de l’arrivée de Mme la secrétaire d'État chargée de la biodiversité, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures trente, est reprise à dix heures quarante.)

M. le président. La séance est reprise.

aggravation des conditions de la circulation sur la ligne b-nord du réseau express régional

M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, auteur de la question n° 1370, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Vincent Capo-Canellas. Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur les conditions de circulation sur la ligne B du RER.

Le sujet est certes connu et ancien, il a été maintes fois traité, mais je voudrais que l’on essaie de regarder la situation telle qu’elle est aujourd’hui : s’il faut prendre acte des efforts accomplis et saluer les équipes qui essaient de moderniser au quotidien une ligne qu’il est pourtant bien difficile de moderniser, compte tenu de l’ampleur du trafic, il faut également tenter de réfléchir aux mesures qui nous permettraient de franchir une nouvelle étape et, en tout cas, essayer d’adopter une méthode nous donnant les moyens d’aller de l’avant.

Je rappelle que la ligne B du RER compte quelque 900 000 usagers quotidiens, ce qui en fait, me semble-t-il, l’une des deux plus importantes lignes en Europe. On pourrait d’ailleurs associer la ligne A du RER à notre réflexion sur la ligne B : un certain nombre de maux sont semblables pour les deux lignes et leur mode d’exploitation est en fait assez proche…

La branche nord du RER B relie plus particulièrement la région parisienne à l’aéroport Charles-de-Gaulle. De ce point de vue-là, elle constitue donc un enjeu d’intérêt national. Cette branche permet aussi aux communes du nord-est de l’agglomération parisienne d’accéder au centre de Paris. Les habitants de ce secteur rejoignent ainsi les principaux pôles d’emploi – c’est également vrai dans le sens inverse, de Paris vers Roissy – et viennent travailler dans les nombreuses zones d’activités traversées par la ligne.

Malgré quelque six années de chantier, 650 millions d’euros de dépenses, la mise en place du RER B Nord +, les progrès liés à l’interopérabilité en gare du Nord, l’amélioration de la desserte et de la régularité de la ligne, ainsi qu’une amélioration de la fréquence de passage des trains, il suffit de s’abonner au compte Twitter  du RER B – je vous invite à le faire, madame la secrétaire d’État ! – et d’en activer les notifications pour éprouver le quotidien de ses usagers : malaises de voyageurs, pannes de caténaires, problèmes techniques divers et variés, autant de raisons à l’origine des interruptions du trafic qui font que la régularité de la ligne B du RER, même si elle a progressé, n’est toujours pas au niveau des autres lignes !

Par ailleurs, le matériel affecté à la ligne est extrêmement ancien et vétuste. Même s’il a été rénové, cela reste du matériel d’il y a quarante ans ! Si j’osais employer une formule un peu facile, je dirais que c’est comme si on avait une R 16 dont on n’aurait finalement changé que les sièges ! C’est la raison pour laquelle les usagers du RER B ont le sentiment qu’il reste plus difficile de voyager sur cette ligne que sur toute autre ligne.

On doit donc s’interroger sur la meilleure manière d’avancer sur le sujet. Se posent notamment la question du doublement du tunnel entre la gare du Nord et la station Châtelet, et celle de la gouvernance du RER, aujourd’hui coexploité par la RATP et la SNCF.

Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous nous dire comment le Gouvernement envisage l’avenir de la ligne B du RER ? Quels sont les moyens qu’il entend mettre en œuvre pour renouveler son approche du sujet et parvenir à franchir un cap, et pour faire davantage que poser des rustines, certes utiles mais insuffisantes ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité. Monsieur Capo-Canellas, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de M. Alain Vidalies qui doit participer aujourd’hui au conseil Transports, à Luxembourg.

La modernisation de la ligne B du RER fait partie des projets que l’État soutient en priorité, afin d’améliorer le service quotidien de transport offert aux Franciliens.

En 2013, comme vous l’avez rappelé, la ligne B du RER a vu l’aboutissement de plusieurs projets structurants.

Elle a tout d’abord bénéficié de la mise en œuvre du projet RER B Nord +, qui avait été inscrit au contrat de plan État-région 2007–2013, et qui a notamment consisté en 260 millions d’euros d’investissement dans l’infrastructure et les gares. Ce projet a permis une meilleure desserte du nord de Paris et un gain très significatif en matière de régularité des trains.

La création d’une direction de ligne unifiée et l’installation du centre de commande unifié SNCF-RATP ont également contribué à améliorer l’efficacité du pilotage et la coordination de l’exploitation de la ligne.

Les opérateurs et le Syndicat des transports d'Île-de-France, le STIF, ont enfin financé à parité la rénovation de 117 rames du RER B pour un coût total de 313 millions d’euros, ce qui accroît le confort des voyageurs, leur information et leur sécurité.

Les résultats sont déjà en net progrès : depuis 2012, ce ne sont pas moins de six points de ponctualité qui ont été gagnés. C’est ainsi que la ligne B du RER a pu assurer dans de très bonnes conditions l’accès au parc des expositions du Bourget durant la COP 21, à la fin de l’année dernière.

Toutefois, et vous avez raison sur ce point, monsieur le sénateur, on ne peut pas se satisfaire de cette amélioration, quand bien même significative.

C’est pourquoi Alain Vidalies est entièrement mobilisé pour renforcer la qualité des transports au quotidien sur cette ligne qui accueille chaque jour 900 000 voyageurs, et ce en lien avec les autorités organisatrices, en particulier avec le STIF.

C’est également la raison pour laquelle l’État appuie la nouvelle étape ambitieuse de modernisation de l’ensemble de la ligne, sous la forme du schéma directeur du RER B Sud lancé en 2013. Afin de contribuer à l’efficacité globale de la ligne, les améliorations portent non seulement sur sa partie sud, mais aussi sur l’ensemble de la ligne, en termes tant d’infrastructures que d’exploitation ou de services.

L’État a mobilisé des sommes importantes dans le cadre du contrat de plan passé entre l’État et la région : celui-ci réserve près de 1,3 milliard d’euros aux seuls schémas directeurs des RER d’ici à 2020.

Les actions les plus immédiates ont déjà été mises en œuvre pour le RER B. Des mesures complémentaires, y compris les projets les plus structurants, sont progressivement étudiées et réalisées pour améliorer l’exploitation du tronçon central de la ligne, actuellement saturé. C’est ainsi que des travaux de modernisation de la signalisation au sud de la ligne seront engagés au cours de l’année 2016 et que des installations de dépannage des rames seront créées à Mitry.

Grâce à leur mobilisation conjointe, la RATP et la SNCF doivent parvenir à respecter les engagements ambitieux que les pouvoirs publics leur ont fixés dans le cadre du schéma directeur.

M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.

M. Vincent Capo-Canellas. Madame la secrétaire d’État, je voudrais saluer les annonces que vous avez faites, ou plutôt vos rappels sur le sujet.

Nous sommes tous parfaitement conscients de la mobilisation des différents acteurs, à commencer par les exploitants de la ligne que sont la SNCF et la RATP. Pour autant, différents chantiers sont encore devant nous.

Vous avez évoqué le schéma directeur du RER B Sud. Il contribuera certes marginalement à l’amélioration de la régularité de la partie nord de la ligne mais, vous l’avez compris, cela ne répond pas à l’essentiel de mes préoccupations.

Le projet de ligne Charles-de-Gaulle-Express, ou CDG Express, en est à la phase de l’enquête publique. Il faudra se poser la question de la robustesse du RER B au regard de cette nouvelle ligne. En effet, CDG Express empruntera des lignes de secours qui ne pourront plus être utilisées par le RER. Nous attendons des réponses sur ce point.

Enfin, il faut se poser une question simple : le nombre de voyageurs augmente tous les ans sur la ligne B du RER. C’est un peu comme le rocher de Sisyphe, on a toujours l’impression de courir après cette tendance. Il faut peut-être se demander si une modernisation globale et plus radicale de la ligne ne serait pas nécessaire et songer à un autre mode d’exploitation de la ligne. Il faudrait peut-être même envisager la fermeture de certaines voies pendant quelques mois pour réaliser de véritables travaux de rénovation, afin de ne pas entretenir un système qui ressemble à un cautère sur une jambe de bois !

Je sais que la présidente de la région Île-de-France est très mobilisée sur le sujet. Je souhaiterais donc que l’État se rapproche de la région et qu’il considère dorénavant cette problématique d’une façon un peu différente, en ne se contentant pas de moderniser le réseau par petits bouts, comme on est souvent contraint de le faire.

Madame la secrétaire d’État, je vous remercie malgré tout pour vos explications et vos propos rassurants.

transport des enfants en situation de handicap et pratiques douteuses de vortex mobilité

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, auteur de la question n° 1372, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Éric Bocquet. Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les pratiques de l’entreprise Vortex mobilité, qui est le principal opérateur français en matière de transport d’enfants en situation de handicap.

Chaque jour, 2 800 chauffeurs à temps très partiel, rémunérés 350 euros nets par mois en moyenne, transportent pour le compte de cette société des milliers d’enfants sur les routes de quelque soixante-dix départements français.

Les marchés publics représentent la quasi-totalité des activités de Vortex mobilité, société qui réalise un chiffre d’affaires annuel de 50 millions d’euros et qui bénéficie d’importants allégements fiscaux, puisqu’elle a notamment déjà reçu 3,2 millions d’euros au titre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE.

Le 25 novembre 2015, le cabinet Secafi a rendu un rapport d’expertise qui souligne de nombreuses entorses au code du travail au sein de cette société. Pour n’en citer que quelques-unes, il est question de l’absence de visites médicales obligatoires, d’heures de travail non rémunérées ou encore d’un défaut de formation pourtant nécessaire et obligatoire quand on transporte des enfants handicapés moteurs ou mentaux à l’école.

Outre de nombreux constats simples, quatre inspecteurs du travail dans les départements de l’Essonne, de la Vienne, du Rhône et de l’Hérault sont allés jusqu’à dresser des procès-verbaux constatant de multiples infractions et principalement de faits récurrents de travail dissimulé, qui prennent la forme d’une dissimulation d’heures de travail.

En interne, des syndicalistes se battent depuis des années pour dénoncer ces dysfonctionnements, tout comme le font des dizaines de parents d’enfants handicapés qui se manifestent régulièrement auprès des conseils départementaux.

Vortex se porte bien grâce à son modèle économique en holding, qui lui permet de faire transiter la quasi-totalité de ses profits vers des entités tierces lui appartenant. Plus de 10 millions d’euros de dividendes y ont été reversés entre 2010 et 2015.

À titre d’exemple, Vortex réalise des bénéfices grâce à un simple tube de colle ! Je m’explique : chaque jour, les chauffeurs remplissent une feuille de route qu’ils remettent à leur agence en fin de mois. Cette feuille est signée du chauffeur lui-même, du chef de l’établissement scolaire et du directeur de l’agence locale. Or des salariés ont découvert que des dizaines de feuilles ont été falsifiées pour gonfler la facture remise au conseil départemental. Dans le département du Rhône, Vortex a également été pris en flagrant délit de surfacturation.

L’inquiétude grandit depuis la parution, le 23 juillet dernier, d’un article du journal Les Échos intitulé : « Vortex mobilité veut devenir l’Uber des ambulances ». (MM. Patrick Abate et Jean-Yves Roux sourient.) Selon l’article, les dirigeants de Vortex souhaitent désormais se développer également dans le transport sanitaire pour concurrencer les ambulanciers et les taxis.

C’est pourquoi je souhaiterais connaître la réponse que le Gouvernement entend apporter aux salariés, aux parents, aux enfants et aux contribuables face à cette situation.

M. Patrick Abate. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser Alain Vidalies.

Je comprends et partage votre volonté d’assurer un service de transport de qualité pour les enfants handicapés.

Vous formulez différents griefs concernant les pratiques sociales de l’entreprise Vortex, qui a comme activité principale, vous l’avez rappelé, le transport routier public de personnes à mobilité réduite et qui emploie environ 2 000 salariés.

Selon les informations dont je dispose, le climat social dans cette entreprise semble très dégradé, les organisations syndicales de salariés dénonçant depuis 2003, et sans discontinuité, ce qu’ils estiment être un non-respect des dispositions du code du travail en matière de durée du travail et une non-application de certaines dispositions conventionnelles. Certains articles de presse, vous l’avez souligné, s’en sont également fait l’écho.

Sur toutes ces questions liées à la bonne application des règles au sein de l’entreprise, l’inspection du travail a procédé aux enquêtes nécessaires et engagé toutes les procédures qui lui incombaient.

Alain Vidalies a, pour sa part, demandé au préfet de région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées d’instruire les éléments de contrôle en matière de réglementation sur les transports et d’apprécier, au vu des éléments dont il dispose, si ceux-ci peuvent justifier la saisine de la commission territoriale des sanctions administratives, chargée de faire respecter la discipline des transporteurs et de diligenter des suites pénales auprès du procureur de la République en cas de nécessité.

Au-delà de ces procédures, pour détendre le climat social dans cette entreprise, les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, la DIRECCTE, veillent au bon fonctionnement des institutions représentatives du personnel en rappelant régulièrement les règles applicables en la matière et en jouant un rôle de conseil auprès des salariés comme de la direction de l’entreprise.

Vous le voyez, l’État n’a pas pris les choses à la légère et ses services continuent d’agir pour améliorer la situation.

Les instructions sont ainsi en cours dans les différents services de contrôle. Naturellement, toutes les suites administratives ou judiciaires seront à examiner. Il est cependant trop tôt pour les anticiper.

En ce qui concerne la supposée surfacturation que vous évoquez, c’est avant tout aux autorités organisatrices de transport, qui passent des contrats avec des entreprises, de s’assurer de la bonne exécution de ces contrats, et en cas de défaillance du prestataire, d’en tirer toutes les conséquences.

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de ces informations, qui montrent bien que le Gouvernement a pris en compte cette situation en diligentant des enquêtes, en mobilisant les préfets et les DIRECCTE. Ces mesures vont forcément dans le bon sens, car on ne saurait accepter que la situation perdure.

À titre d’information, sachez, madame la secrétaire d’État, et vous aussi, mes chers collègues, que le département de l’Ain, par exemple, ne connaît plus de problème avec Vortex, puisque depuis la rentrée 2014 le transport des élèves et étudiants handicapés est désormais assuré par une régie publique.

Si, malheureusement, les résultats de l’enquête se révélaient positifs, des décisions devraient être prises, éventuellement en termes de sanctions.

prorogation des concessions hydrauliques

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, auteur de la question n° 1374, adressée à Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

M. Daniel Chasseing. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, l’avenir des concessions hydrauliques, en France, tel qu’il est prévu par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, préoccupe à juste titre les acteurs locaux. En effet, la Commission européenne met la France en demeure de s’ouvrir à la concurrence, c’est-à-dire d’attribuer éventuellement ces concessions à d’autres opérateurs que celui qui les exploite traditionnellement, à savoir EDF, puisque, selon l’Europe, celle-ci est en position dominante, et ce en dépit de la satisfaction des acteurs locaux, les maires en particulier, ce qui ne sera probablement pas le cas avec d’autres opérateurs ne possédant pas cette culture de service public.

J’ajoute que, une fois de plus, nous sommes le seul pays d’Europe à vivre cette situation, puisque la plupart de nos voisins concernés par cette problématique comme l’Espagne et l’Italie ont déjà réglé cette question, l’Allemagne ayant utilisé d’autres procédures. Je regrette que nous soyons toujours, en France, dans l’incertitude.

Cela est vrai, en particulier, pour une partie du territoire dont je suis l’élu, à savoir les ensembles hydroélectriques Dordogne-Truyère, dont les activités se trouvent dans le département de la Corrèze, mais également dans ceux du Cantal et de l’Aveyron, c’est-à-dire relevant de trois régions.

Ces ensembles majeurs représentent 15 % du parc hydroélectrique français et comprennent une douzaine d’aménagements, dont les dates d’échéances de concession s’échelonnent de 2012 à 2062. Or la mise en concurrence, compte tenu des dates barycentres, conduirait à un renouvellement de ces concessions au-delà de 2020, ce qui, fatalement, reporterait l’éventuelle réalisation d’investissements envisagés par EDF à hauteur de 2 milliards d’euros.

Ne pas prolonger ces concessions aurait donc pour conséquence non seulement de se priver de la création d’importantes capacités hydroélectriques supplémentaires – énergie propre par excellence, à l’heure où l’on ne cesse de répéter qu’il faut développer les énergies renouvelables ! –, mais encore de renoncer à de fortes retombées, en matière d’emploi, de sous-traitance, de fiscalité et de redevances, indispensables à l’aménagement de territoires, dont certains d’entre eux, qui relèvent de la ruralité, ont besoin.

Parmi ces projets, j’insiste particulièrement sur celui de Redenat, en Corrèze, réalisation que je soutiens sans réserve : d’une part, elle va générer, à elle seule, plus de 1 000 mégawattheures ; d’autre part, elle a été déclarée remarquable par la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement, la DREAL, et le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux, le SDAGE, du bassin Adour-Garonne, et procurera 500 emplois en cinq ans.

La solution la plus adaptée, aujourd’hui, semble donc être la prolongation, pour au moins une quinzaine d’années, des concessions Dordogne et Truyère à EDF. Elle est juridiquement possible, puisque ladite loi du 17 août 2015 précise dans son chapitre II, à l’article 116 : « Lorsque la réalisation de travaux nécessaires à l’atteinte d’objectifs mentionnés aux articles L. 100–1, L. 100–2 et L. 100–4 et non prévus au contrat initial l’exige, la concession peut être prorogée […] ».

Je vous remercie de bien vouloir me faire savoir, madame la secrétaire d’État, quelle est la position du Gouvernement sur cette prolongation, étant précisé que cette position est très attendue par l’ensemble des acteurs locaux des territoires concernés.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Ségolène Royal, qui m’a chargée de vous répondre.

Les débats relatifs à la loi de transition énergétique pour la croissance verte, en particulier ceux qui ont été conduits par les parlementaires, ont permis de mettre en place un cadre de gestion des concessions hydroélectriques conciliant les règles européennes de la concurrence avec les principes du modèle français.

Le contrôle public de la gestion de l’eau, l’accélération du développement des énergies renouvelables, dont l’hydroélectricité est l’un des fleurons, la sécurité d’approvisionnement en électricité, la sûreté des barrages, la sécurité des personnes et, enfin, l’ancrage territorial des concessions sont nos priorités. Elles contribuent au développement économique local avec le maintien des compétences et des emplois dans les barrages et les usines.

La ministre de l’énergie met en place les outils d’application de la loi : le regroupement des concessions, la prolongation des concessions en contrepartie d’investissements, et la possibilité de constituer des sociétés d’économie mixte lors du renouvellement des concessions. Les vallées de la Dordogne et de la Truyère font partie de celles où des investissements ont été examinés.

La Commission européenne a toutefois adressé, à la fin du mois d’octobre 2015, une mise en demeure à la France, considérant que la place d’EDF dans l’hydroélectricité conduisait à une situation anticoncurrentielle qui constituait une infraction aux règles européennes de concurrence. Le Gouvernement a fermement contesté l’infraction. Ségolène Royal a échangé à plusieurs reprises avec la commissaire européenne à la concurrence, Mme Vestager, pour présenter les dispositions de la loi relative à la transition énergétique, qui contribuera à diversifier la production d’électricité et donc à développer la concurrence sans déstabiliser la filière, ainsi que les opportunités d’investissement dans l’hydroélectricité.

Les échanges se poursuivent, et le Gouvernement sera vigilant quant au respect et à la bonne mise en œuvre du cadre fixé par la loi qui a consolidé le régime des concessions et garantit le respect des enjeux de service public de l’hydroélectricité française.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.

M. Daniel Chasseing. Je regrette que l’Europe soit, concernant les normes, plus exigeante pour la France que pour les autres pays. C’est même le cas pour les barrages.

Je souhaite donc, comme vous l’avez indiqué, madame la secrétaire d’État, que le Gouvernement intervienne avec force au niveau de la Commission européenne afin que les concessions hydrauliques situées en France et gérées par EDF puissent être prolongées. Cette mesure, qui a été réalisée dans d’autres États membres, est très attendue, car elle entraînera des investissements et de l’emploi pour nos zones rurales.

harmonisation des consignes de tri

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, auteur de la question n° 1393, adressée à Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

M. Olivier Cigolotti. Le développement du geste de tri et l’évolution des habitudes du consommateur constituent des objectifs essentiels pour les filières de recyclage.

Pour améliorer la valorisation des déchets, il est impératif de replacer l’État au cœur de la gouvernance globale des différentes filières. Aujourd’hui, cette gouvernance des filières est constituée d’une architecture complexe d’observatoires et de commissions diverses. Elle en devient peu lisible et se trouve en pratique largement dominée par les metteurs sur le marché des produits soumis à reprise en vue de leur valorisation. Le pouvoir de contrôle de la puissance publique doit être en l’état réaffirmé !

En effet, le système ne contribue pas forcément aujourd’hui à mettre en place une modulation des éco-contributions incitative en termes d’écoconception ou de prévention.

Concernant les éco-organismes, ils constituent un mode de gestion des déchets original ayant contribué à l’augmentation des taux de collecte et de recyclage des déchets ménagers en France depuis une vingtaine d’années.

Néanmoins, la concurrence entre éco-organismes n’est pas souhaitable, dans la mesure où la multiplicité de ces éco-organismes dans une même filière peut encourager le dumping afin d’attirer des adhérents, ce qui nuit gravement à la performance de la filière.

Il serait bon de rationaliser progressivement la gouvernance au sein de chaque filière, afin qu’il n’y ait plus qu’un seul éco-organisme par flux de déchets.

Autre point important à évoquer : la multiplication des logos sur les produits. Cette signalétique dite « commune » est censée informer les citoyens que le produit relève d’une consigne de tri. Elle devrait normalement contribuer efficacement à la simplification du geste de tri et améliorer les performances de tri des produits recyclables.

Depuis 2012, les résultats de recyclage stagnent à 67 % environ. Il est par conséquent important de donner un nouveau souffle à la « responsabilité élargie du producteur ».

La Cour des comptes souligne dans son rapport annuel de 2016 que l’ajout d’un nouveau symbole dont la signification n’est pas directement lisible risque de brouiller les messages destinés aux consommateurs.

Aussi, elle recommande plutôt l’apposition d’une consigne de tri claire et harmonisée sur l’emballage constituant ainsi un moyen plus efficace pour lutter contre les erreurs de tri et, surtout, pour attirer le consommateur vers une attitude responsable et écologique.

Il convient de noter que de nombreux metteurs sur le marché ont mis en place une signalétique personnelle concernant le tri, en apposant de manière volontaire sur leurs produits des indications visant à expliciter la consigne de tri.

Aussi, l’ensemble des éco-organismes devraient harmoniser les couleurs des bacs de collecte sur l’ensemble du territoire, inciter leurs adhérents à apposer une consigne de tri claire et identique et, surtout, communiquer sur la présence de cette consigne unique.

Les pouvoirs publics ont un grand rôle à jouer dans cette simplification des consignes, celui notamment d’engager des actions de communications communes avec les éco-organismes afin de mettre en place une campagne nationale d’information.

Par conséquent, madame la secrétaire d’État, je souhaite savoir ce que le Gouvernement entend mettre en place pour consolider le dispositif des éco-organismes, augmenter les résultats du recyclage et la visibilité des consignes de tri.

M. Jean-Marc Gabouty. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser l’absence de Ségolène Royal, qui m’a chargée de vous apporter cette réponse.

La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a fixé de nouveaux objectifs au tri des déchets. Elle prévoit notamment la généralisation, d’ici à 2022, du tri de tous les plastiques partout en France, non seulement les bouteilles et flacons en plastique comme c’est le cas actuellement, mais également les films et barquettes en plastique, ce qui permettra des économies de matières premières, des créations d’emploi et une simplification du geste de tri pour tous nos concitoyens. La loi prévoit aussi que les collectivités veillent à l’harmonisation, d’ici à 2025, des modalités de collecte séparée des déchets d’emballages et de papiers afin de contribuer à l’efficacité du tri.

Ces objectifs seront intégrés dans le cahier des charges de la filière responsabilité élargie des producteurs, ou REP, des emballages ménagers pour la prochaine période d’agrément 2017–2022, tout comme l’objectif d’atteindre un taux de recyclage de 75 % des déchets d’emballages ménagers.

Les moyens qu’il conviendra de mettre en œuvre en vue d’atteindre ces objectifs viseront à rationaliser l’ensemble du dispositif allant de la collecte des déchets à leur tri en vue de leur recyclage.

Les travaux de renouvellement des agréments des filières REP des déchets d’emballages ménagers et de papiers, actuellement en cours, prendront en compte ces éléments pour permettre la réussite de cette évolution vers un meilleur recyclage des emballages ménagers et des papiers. En outre, ils permettront de préciser les attentes en termes de gouvernance et d’engagements des éco-organismes.

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti.

M. Olivier Cigolotti. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de ces propos plutôt rassurants. Mais, vous l’avez compris, il faut aller dans le sens de la simplification pour améliorer la lisibilité et, par conséquent, les gisements qui pourront être valorisés et recyclés.

M. Loïc Hervé. Très bien !

moyens alloués à l'autorité de sûreté nucléaire

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, en remplacement de M. Michel Berson, auteur de la question n° 1398, adressée à Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

M. Jean-Yves Roux. Cette question s’adresse à Mme la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

Avant de vous interroger sur les moyens alloués à l’Autorité de sûreté nucléaire, vous me permettrez madame la secrétaire d’État, d’excuser l’absence de M. Michel Berson. Celui-ci étant hospitalisé, il ne peut être présent ce matin et m’a demandé de bien vouloir poser sa question en ses lieu et place, ce que j’ai accepté bien volontiers.

Dans un avis daté du 9 février 2016, l’ASN a relevé que « faute d’effectifs suffisants, elle devra privilégier le contrôle des installations et activités existantes au détriment des projets nouveaux ».

Or, dans la loi de finances pour 2016, seulement 30 postes supplémentaires ont été accordés à l’ASN sur la période 2015–2017, contre les 190 qui étaient demandés – 95 emplois pour l’ASN et 65 emplois pour l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, l’IRSN.

Pour être en mesure d’assumer pleinement ses nouvelles missions de protection nucléaire – contrôle du vieillissement, de la durée de fonctionnement et du démantèlement des réacteurs électronucléaires ; contrôle des travaux consécutifs au retour d’expérience de l’accident de Fukushima ; contrôle de l’entrée en fonction du réacteur européen ; instruction des dossiers réglementaires des nouvelles installations –, l’ASN estime nécessaire la création de 150 postes pour la période 2017–2019 et demande que 20 postes supplémentaires soient créés, dès 2017.

Face à ces enjeux de sûreté nucléaire, pouvez-vous préciser, madame la secrétaire d’État, les mesures envisagées par le Gouvernement pour renforcer, dès 2017, les moyens humains et financiers de l’Autorité de sûreté nucléaire ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur, permettez-moi, au nom du Gouvernement, de souhaiter à Michel Berson mes meilleurs vœux de rétablissement, afin qu’il nous revienne le plus vite possible.

Cette question a été posée à Ségolène Royal, qui ne peut malheureusement être présente et m’a chargée de vous répondre.

La sûreté nucléaire est l’une des priorités du gouvernement français. La garantie de la sûreté nucléaire et de la radioprotection est un enjeu majeur qui justifie que des moyens techniques, organisationnels et réglementaires suffisants y soient consacrés.

Ségolène Royal rappelle que l’État a consenti des efforts très importants de 2009 à 2014, avec une augmentation des crédits de paiement de l’Autorité de sûreté nucléaire de 25 %, de 64 millions d’euros à 80 millions d’euros, et une augmentation de l’effectif total de 430 à 467 équivalents temps plein travaillés. La part des ressources dédiées par l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire à l’appui technique de l’ASN a augmenté de 13 %, de 73 millions à 83 millions d’euros dans le même temps. Au total, les moyens consacrés au contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection sont donc passés de 137 millions d’euros à 163 millions d’euros de 2009 à 2014, soit une hausse de 19 % en cinq ans.

De plus, comme vous le rappelez à juste titre, l’ASN a obtenu un renforcement de ses effectifs à hauteur de 30 ETP sur le triennal 2015–2017, à hauteur de 10 ETP par an, et l’IRSN a obtenu 18 ETP de plus en 2015, soit une hausse de 1 %.

L’ASN et l’IRSN ont demandé à la ministre de l’environnement en 2015 un effort supplémentaire de 107 ETP pour l’ASN, soit une hausse de 22 %, et de 53 ETP pour l’IRSN, c’est-à-dire une augmentation de 3 %, soit 160 ETP au total.

C’est pourquoi Ségolène Royal a mandaté une mission en avril 2015, conjointement avec le ministre des finances et des comptes publics, pour expertiser ces demandes sur le financement de la sûreté nucléaire auprès de l’Inspection générale des finances, du Conseil général de l’économie et du Conseil général de l’environnement et du développement durable.

Selon les conclusions de la mission, les renforts alloués dans le triennal couvrent les besoins et une réévaluation de ces moyens sera pertinente au début de 2017 pour l’ASN et l’IRSN, afin de tenir compte de l’évolution du contexte et des progrès d’efficience en cours de réalisation.

Par ailleurs, dans le cadre la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, la ministre de l’environnement a renforcé les moyens de contrôle et les pouvoirs de sanction de l’ASN, en la dotant d’outils plus gradués, tels que les amendes et les astreintes administratives. Elle l’a aussi dotée d’une commission des sanctions à cet effet.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux.

M. Jean-Yves Roux. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse. Néanmoins, compte tenu des enjeux sans précédent auxquels doit faire face notre pays pour garantir la fiabilité et la sûreté de sa filière nucléaire, permettez-moi de me faire ici le porte-parole de M. Michel Berson : cette situation exceptionnelle nécessite un engagement de l’État vraiment à la hauteur de ces enjeux.

réforme du code minier

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, auteur de la question n° 1452, adressée à Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

M. Jean Louis Masson. Madame la secrétaire d’État, la loi dispose que les dégâts miniers doivent être indemnisés par l’exploitant. Cependant, ces dégâts sont parfois reportés dans le temps et ne surviennent qu’après l’arrêt de l’exploitation de la mine. De ce fait, pour le bassin houiller de Lorraine, l’État a été subrogé à la responsabilité de Charbonnages de France, après la dissolution de cet établissement public.

Or l’arrêt de l’exhaure du siège de la Houve entraîne une importante remontée de la nappe phréatique.

Ce problème est d’autant plus grave qu’à la suite de l’extraction du charbon, le niveau de la surface a baissé de plusieurs mètres en de nombreux endroits, ce qui crée de véritables cuvettes.

À proximité de l’ancien puits de la Houve, Charbonnages de France s’est engagé à réaliser des pompages pour maintenir le niveau de la nappe phréatique à au moins trois mètres sous la surface du sol, ce qui fut confirmé par un arrêté préfectoral du 5 août 2005.

Néanmoins, la remontée de la nappe phréatique est plus rapide et plus importante que prévu. Malheureusement, l’administration refuse de confirmer clairement la prise en charge financière du pompage supplémentaire.

Par ailleurs, près de Forbach, la commune de Rosbruck est victime d’affaissements très importants. Un groupe de maisons est même descendu d’une hauteur de quinze mètres et se retrouve dorénavant sous le niveau de la Rosselle.

Le risque d’inondation brutale a conduit au classement de ce secteur en zone rouge du plan de prévention des risques.

Plus généralement, la commune est confrontée à l’obligation de mener des travaux de l’ordre de 10 à 15 millions d’euros, montant démesuré pour une localité comptant moins de 1 000 habitants.

La responsabilité minière est évidente dans les dégâts causés aux bâtiments et aux réseaux souterrains. L’État mène, hélas ! une « guérilla » juridique pour éviter ou retarder l’indemnisation des dégâts miniers causés à Rosbruck. Cette situation dure depuis plus de dix ans et, d’expertises en recours de procédure, l’arbitrage définitif n’est toujours pas rendu.

Madame la secrétaire d’État, oui ou non, l’État accepte-t-il d’assumer ses responsabilités à l’égard des communes et des habitants du bassin houiller de Lorraine ?

Par le passé, en réponse à diverses questions parlementaires, il a été indiqué que l’État assumerait les suites de ces problèmes. Comme tous les élus du bassin houiller, je suis donc très déçu par l’attitude actuelle des pouvoirs publics en la matière. Cette situation n’est pas normale, qu’il s’agisse du pompage à hauteur de la Houve ou des difficultés subies par la commune de Rosbruck. Lorsqu’une localité s’affaisse de plus de dix mètres, il faut être d’une certaine mauvaise foi pour affirmer qu’il n’y a pas de conséquences !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur, Ségolène Royal, qui ne pouvait être présence ce matin dans cet hémicycle, m’a demandé de vous apporter la réponse suivante.

Vous appelez particulièrement l’attention de Mme la ministre de l’environnement sur la commune de Rosbruck, située dans un territoire où d’anciennes mines de charbon ont été exploitées et qui a été touché par des mouvements de terrain.

Vos questions concernent l’indemnisation des victimes. Mme Royal est attachée à ce que ces dernières soient justement indemnisées au regard des dommages qu’elles subissent. Mais, malgré l’intervention de plusieurs experts, aucun accord n’a pu être trouvé quant au montant à verser. La justice a donc été saisie à la demande de la commune de Rosbruck qui, en 2009, a contesté la première expertise.

Pour ce qui concerne le phénomène de remontée de nappe autour de la communauté de communes du Warndt, des études ont été réalisées dès 2003 en prévision de l’arrêt de l’exploitation minière, afin de dimensionner les éventuels dispositifs de prévention.

Ces études tenaient compte d’hypothèses fondées sur l’analyse des consommations passées, en particulier des industries et des collectivités. Or, au total, ces consommations se révèlent beaucoup plus faibles que prévu, notamment du fait d’une baisse significative de la consommation industrielle.

Face à cette situation, les services du ministère de l’environnement ont commandité une révision des études menées en 2014. Ce travail est en cours.

Depuis 2009, l’État a déjà entrepris et financé des travaux de pompage et de traitement des eaux minières, pour un montant de 7,4 millions d’euros.

Par ailleurs, la remontée de la nappe fait l’objet d’une surveillance effectuée par l’État à travers un réseau de vingt-cinq piézomètres.

Au regard des premiers éléments disponibles, l’État a décidé de réaliser différents travaux de prévention complémentaires pour un montant total de 1,5 million d’euros, alors même que l’arrêt de l’exploitation minière n’est pas la seule cause des remontées de nappe.

L’État assume donc pleinement sa responsabilité en matière d’après-mine, et il agit. Il a en effet déjà mis en œuvre les mesures nécessaires pour faire face à la remontée de nappe observée dans le bassin houiller lorrain.

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Madame la secrétaire d’État, cette réponse n’est pas du tout satisfaisante. Si l’on observe des remontées de nappe, c’est bien sûr du fait de l’exploitation minière sous les communes bordant la Houve. Je le répète, les terrains se sont affaissés !

L’État espérait peut-être que certains industriels de la zone chimique de Carling pomperaient de leur côté dans la nappe, ce qui l’aurait dispensé d’assurer des pompages pour compenser les séquelles causées par les mines. Mais, en la matière, ces entreprises n’ont aucune obligation.

En faisant reposer sur ces sociétés la responsabilité de la remontée de nappe, l’État s’exonère un peu rapidement… Les quelques travaux que vous avez évoqués ne correspondent pas du tout au problème. Vous le savez très bien, dans cette région, certaines maisons voient leurs sous-sols régulièrement inondés, y compris en période de sécheresse – je ne parle pas des inondations actuelles. Cette situation est tout à fait inadmissible.

Enfin, on ne peut pas affirmer qu’il n’y a pas de problème majeur à Rosbruck, que la difficulté se limite à un léger contentieux d’indemnisation. Il ne faut pas se moquer du monde ! Je le répète, tout un quartier de cette commune est en zone rouge, parce qu’il est situé à dix mètres sous le niveau de la rivière. Bien entendu, avant l’exploitation de la mine, les maisons considérées étaient au-dessus de la rivière. Puisqu’il y a eu un affaissement et que la rivière a été artificiellement surélevée, c’est quand même à l’État d’assumer la responsabilité de l’incidence sur les populations.

Je suis très déçu de l’attitude des pouvoirs publics. Je connais bien les problèmes miniers, étant moi-même ingénieur en chef des mines. En la matière, quand on a des responsabilités, il faut les assumer. Or, actuellement, l’État n’assume pas les siennes !

hôtellerie de plein air et normes

M. le président. La parole est à M. Gilbert Bouchet, auteur de la question n° 1346, transmise à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire.

M. Gilbert Bouchet. Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaite relayer une nouvelle fois les inquiétudes des professionnels du tourisme et plus particulièrement des adhérents de la fédération Rhône-Alpes de l’hôtellerie du plein air, face à l’empilement des normes qui freine la capacité de cette profession à évoluer et à s’adapter aux attentes des vacanciers, ce dans un environnement très concurrentiel.

Avec un chiffre d’affaires annuel de plus de 2 milliards d’euros et plus de 36 000 emplois, l’hôtellerie de plein air est un acteur majeur de notre économie. Elle est le premier mode d’hébergement touristique marchand en France. Il reste le préféré des Français, avec environ 109 millions de nuitées en 2014.

Ce qui fait la force du camping, c’est sa capacité à s’adapter rapidement à l’évolution des demandes de la clientèle et à proposer une offre toujours plus large, permettant à chacun de trouver les vacances qui lui conviennent, quels que soient son budget et ses souhaits.

Or la profession est en train de perdre cet avantage à cause d’obstacles de toutes sortes, qui entravent son développement.

L’investissement, qui a fait la force de ce secteur depuis quinze ans, est en recul. Une récente étude d’Atout France est venue confirmer cette tendance, en notant que les investissements ont baissé de 8 % entre 2014 et 2015. Ces montants se sont même effondrés de 20 % entre 2012 et 2015, à contre-courant du reste de l’industrie touristique.

Les professionnels n’osent plus investir dans des équipements, dans de nouvelles installations ou dans de nouveaux services, face au risque de les voir rendus obsolètes par des réglementations édictées en méconnaissance totale de la réalité du terrain. Ils affirment devoir à présent consacrer une grande partie de leur activité à réfléchir aux moyens de se mettre en conformité avec ces normes !

Les campings ont besoin de flexibilité pour survivre et continuer à proposer aux Français un mode de vacances qu’ils plébiscitent d’année en année.

À l’heure où se développe chez les particuliers une offre de camping hors de toute contrainte réglementaire et de tout contrôle, où la concurrence avec les pays de l’Europe du Sud et des Balkans se fait toujours plus pressante, les rigidités et les contradictions du cadre qui s’impose aux gestionnaires de campings français deviennent de plus en plus insupportables.

Ces professionnels ne réclament ni subventions, ni aides, ni mécanismes d’allégement fiscaux préférentiels : ils souhaitent pouvoir exercer leur métier sans contraintes administratives ou fiscales supplémentaires. Ils demandent une pause, ou du moins une stabilité réglementaire, afin de disposer d’une visibilité pour leurs investissements futurs.

Aussi, je me dois de relayer leurs préoccupations et de vous demander si elles pourront être prises en compte.

Madame la secrétaire d’État, ma question est la suivante : peut-on espérer une simplification administrative pour cette profession, ou, à tout le moins, un arrêt de l’accumulation de la réglementation ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur, j’ai bien entendu votre interrogation et votre requête.

Le Gouvernement s’est engagé à créer un contexte favorable au développement des entreprises, et tout particulièrement des entreprises du secteur du tourisme. Pour cela, nous avons fait de la simplification une priorité. De nombreuses mesures venant réduire ou aménager les contraintes réglementaires existantes ont été prises au cours des derniers mois.

Tout d’abord, nous avons ouvert la possibilité aux professionnels de l’hébergement touristique marchand de prendre la main sur le calendrier de réalisation des diagnostics, études et travaux issus de normes législatives ou réglementaires.

Les mises aux normes obligatoires, que vous évoquez, pourront ainsi être effectuées dans un délai de six ans, même si les textes concernés fixent des délais plus contraignants, excepté les normes afférentes à la sécurité, à la santé publique et à l’accessibilité.

Désormais, les professionnels pourront donc programmer ces chantiers obligatoires dans le cycle habituel de leurs travaux. Ce faisant, leur programmation retrouvera de la stabilité.

Par ailleurs, nous avons apporté des clarifications et simplifications sur de nombreux sujets, allant de la gouvernance des offices de tourisme à la procédure d’immatriculation des agents de voyage en passant par la gestion des conventions avec les partenaires acceptant les chèques-vacances ou par la réglementation relative aux fiches individuelles de police remplies par les étrangers qui séjournent en France. Sur ce dernier point, l’arrêté présentant le nouveau modèle de fiche individuelle de police a été publié le 9 octobre 2015.

Pour ce qui concerne l’accessibilité des établissements recevant du public, le même souci d’approche pragmatique a été déployé. Le but est de maintenir un équilibre entre, d’une part, les exigences de sécurité et, de l’autre, la viabilité économique des entreprises.

Ainsi, les professionnels ont eu la possibilité de programmer leurs travaux de mise en accessibilité au-delà du 1er janvier 2015, s’ils s’engageaient à respecter un calendrier limité. Ce dispositif d’agenda d’accessibilité programmée, ou Ad’AP, a permis de relancer la dynamique.

Le principe de dérogation, notamment en cas de disproportion manifeste entre le coût et les effets sur l’usage du bâtiment ou sur la viabilité de l’exploitation, a été rappelé lors des différents travaux.

Enfin, d’autres dispositions simplificatrices relatives au secteur du tourisme figurent parmi les cinquante-deux mesures de simplification pour les entreprises annoncées le 1er juin 2015.

Sont par exemple assurées la simplification du régime de licences d’entrepreneurs de spectacle, dont bénéficieraient notamment les professionnels du tourisme et le tourisme de plein air, la modernisation de l’affichage obligatoire dans les établissements hôteliers et l’adoption d’un règlement sanitaire unique adapté au secteur du tourisme.

Le Gouvernement continuera à examiner avec attention les autres pans de la réglementation s’appliquant aux campings, pour évaluer dans quelle mesure certaines dispositions peuvent être allégées ou mieux proportionnées à l’exercice de cette profession, si indispensable à l’attractivité touristique de la France.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Bouchet.

M. Gilbert Bouchet. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie des informations que vous me communiquez. Les acteurs du tourisme de plein air attendent réellement des dispositions allégées, ou mieux adaptées à l’exercice de leur profession, qui fait partie intégrante de l’activité touristique en France.

M. le président. En attendant M. Jacques Mézard, qui va arriver dans un instant, je tiens à apporter une précision aux jeunes gens et jeunes filles présents dans nos tribunes : lors des séances de questions orales, ne viennent généralement que les sénatrices et sénateurs interrogeant le Gouvernement et les ministres et secrétaires d’État tenus de leur répondre, lesquels se succèdent au fur et à mesure. Qu’ils ne soient donc pas surpris de ne pas observer d’affluence dans cet hémicycle !

demi-part des vieux parents et budgets locaux

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, auteur de la question n° 1409, adressée à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.

M. Jacques Mézard. Monsieur le président, avant tout, je vous prie de m’excuser de ce léger retard.

J’attire l’attention du Gouvernement sur les conséquences de l’aménagement de la demi-part dite « des vieux parents » pour le budget de 2016 des collectivités territoriales et pour le calcul des bases prévisionnelles de taxes locales.

Dans le cadre de la loi du 29 décembre 2015 de finances pour 2016, le Gouvernement a décidé d’aménager la disparition programmée de la demi-part fiscale supplémentaire dite « des vieux parents » ou « des veufs ou veuves », en rétablissant en partie les avantages liés à celle-ci.

L’aménagement, prévu à l’article 75 de ce texte, concerne les ménages dont la situation financière est restée inchangée en 2015 par rapport à 2014. Le but est d’annuler les effets de seuil qui, en 2015, ont fait perdre à certains ménages les avantages liés à cette demi-part du simple fait de l’évolution des règles fiscales. Est visé en particulier le champ des ressources prises en compte pour le calcul du revenu fiscal de référence.

Le régime de la demi-part supplémentaire permet aux seniors percevant des revenus modestes, ainsi qu’aux personnes veuves ou atteintes de certaines invalidités, de bénéficier, sous condition de ressources, d’une exonération de la taxe d’habitation et de la taxe foncière.

Jusqu’en 2015, le Gouvernement a maintenu le projet, instauré en 2009, d’éteindre progressivement ce régime. Mais l’aménagement introduit par la loi de finances initiale pour 2016 rétablit en partie les exonérations. Or ces exonérations exceptionnelles représentent un coût supplémentaire pour les collectivités territoriales auxquelles est destiné le produit des impôts locaux.

Le coût total de la mesure est estimé à 400 millions d’euros par an, dont 140 millions d’euros seraient à la charge des collectivités à partir de 2017. L’aménagement rend également difficile le calcul des bases prévisionnelles permettant aux collectivités de fixer les taux d’imposition en 2016. Les dégrèvements de taxe d’habitation modifient en effet les données de référence de 2015 utilisées pour le calcul des bases exonérées et des bases d’imposition prévisionnelles.

Les montants effectifs de ces dégrèvements seront connus trop tardivement pour être inclus dans les systèmes d’information permettant le calcul des bases prévisionnelles de taxe d’habitation.

Madame la secrétaire d’État, à la suite du vote survenu à la fin de l’année 2015, nos collectivités territoriales ont subi des difficultés considérables. Pouvez-vous nous confirmer que la compensation du maintien du régime de la demi-part, au titre de l’année 2016, sera bien prise en charge par l’État en totalité ? Comment les collectivités pourront-elles, à l’avenir, bénéficier des informations nécessaires à la préparation de leur budget ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur Mézard, le Gouvernement a bien proposé et fait voter, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, un dispositif neutralisant les effets, en matière d’impôts locaux, de mesures d’augmentation de l’impôt sur le revenu. Je pense tout particulièrement à la suppression, votée en 2008, de la demi-part pour les personnes isolées n’ayant pas élevé seules un enfant pendant cinq ans.

Ce dispositif de neutralisation porte sur la taxe d’habitation due par les personnes veuves, âgées de plus de soixante ans ou atteintes d’invalidité, sur la contribution à l’audiovisuel public à la charge des mêmes redevables et sur la taxe foncière des personnes de plus de soixante-quinze ans.

Afin d’apporter une réponse immédiate aux difficultés de nos concitoyens confrontés à ces sorties d’exonération, la mesure s’est appliquée dès 2015. Les impositions étant déjà émises, elle s’est traduite par un dégrèvement intégralement pris en charge par l’État.

Je vous le confirme, à compter de 2016, ces exonérations sont compensées par l’État selon les modalités de droit commun propres à chaque impôt et à chaque exonération.

Toutefois, comme vous l’observez, en 2016, pour des raisons tenant au système d’information, la réintroduction de l’exonération en fin d’année 2015 n’a pu être intégrée dans les programmes informatiques servant au calcul des bases prévisionnelles de taxe d’habitation avant la notification de celles-ci aux collectivités. Il en résulte une légère surévaluation de ces bases, pour la seule taxe d’habitation.

Les communes ont été informées de cette situation. Cette surévaluation ne devrait pas constituer un obstacle majeur à la construction des budgets communaux, tant elle est minime : à l’échelle nationale, elle représente 0,7 % des recettes des communes et intercommunalités, étant rappelé que les bases notifiées sont, par nature, toujours prévisionnelles.

De surcroît, dans les communes de petite taille, le comptable de la collectivité peut aider à construire le budget.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Madame la secrétaire d’État, vous savez qu’à l’époque où nous vivons, 0,7 %, ce n’est pas neutre pour les budgets locaux ! Cette part représente même souvent une somme importante. (Mme la secrétaire d’État le concède.)

Vous nous avez rappelé les mesures prises. Vous le reconnaissez très loyalement : le problème découle d’une défaillance du système d’information.

À présent, ce qui importe, c’est que ce problème soit résolu. Cela me paraît être le cas. Mais surtout, nous ne devons plus, à l’avenir, être confrontés à ces difficultés, qui sont considérables à l’heure où les collectivités territoriales ont tant de mal à préparer leur budget.

effectifs supplémentaires pour les brigades des douanes dans les alpes du sud

M. le président. La parole est à Patricia Morhet-Richaud, auteur de la question n° 1354, adressée à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Mme Patricia Morhet-Richaud. Madame la secrétaire d’État, les services des douanes accomplissent de multiples fonctions sur l’ensemble du territoire national. Ils exercent, tout d’abord, une mission de protection et de sécurité des citoyens, ensuite, une mission de lutte contre le terrorisme, contre l’immigration clandestine ou irrégulière, contre les trafics, de stupéfiants par exemple, et, enfin, une mission de contrôle, notamment concernant les produits.

Depuis l’entrée en vigueur de l’état d’urgence, le 20 novembre 2015, les brigades des douanes sont sur tous les fronts. L’organisation de leurs personnels a été très touchée par l’accroissement de leur activité, laquelle se traduit par des contrôles intensifiés, une surveillance accrue et la nécessaire collaboration avec d’autres services de l’État pour collecter et croiser des informations utiles en matière de lutte contre le terrorisme.

Avec le rétablissement temporaire des contrôles d’identité aux frontières nationales, les départements frontaliers sont donc en première ligne, et les douaniers fortement mobilisés, pour lutter contre l’immigration clandestine et irrégulière ainsi que contre la circulation de marchandises illicites telles que les armes, les munitions ou les stupéfiants.

Dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, la brigade de Gap compte actuellement treize agents qui exercent leur activité sur deux départements : les Alpes-de-Haute-Provence et les Hautes-Alpes. Cette brigade est la dernière à être opérationnelle dans ce secteur de montagne, qui couvre une zone de plus de 12 000 kilomètres carrés aux frontières de l’Italie.

Les passages routiers carrossables de l’arc alpin sont peu nombreux et constituent des points stratégiques qui doivent être contrôlés, puisqu’ils sont les lieux de tous les passages et, par conséquent, de toutes les fraudes.

À titre d’exemple, le col du Montgenèvre est la seule route des Alpes occidentales entre la France et l’Italie praticable toute l’année et gratuite pour les poids lourds. Il s’agit donc d’un axe privilégié pour ceux-ci comme pour les véhicules utilitaires légers, lesquels concentrent, comme vous le savez, les contentieux douaniers et judiciaires.

C’est pourquoi je vous serais très reconnaissante, madame la secrétaire d’État, de bien vouloir m’indiquer les renforts qui ont été mis en place. Les départements des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes pourront-ils bénéficier d’effectifs supplémentaires afin que la brigade de Gap puisse effectuer ses missions de contrôle et de sécurité dans des conditions satisfaisantes ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Martine Pinville, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame Morhet-Richaud, le Président de la République a annoncé le 16 novembre 2015, devant le Parlement réuni en Congrès, la mise en place d’un pacte de sécurité en dégageant des moyens exceptionnels pour renforcer la protection des Français et soutenir notre lutte contre le terrorisme.

La douane est un acteur majeur de ce pacte de sécurité. Sa mobilisation et son engagement sont sans faille. Face à ces nouvelles sollicitations, il est indispensable de permettre à cette administration de renforcer son action de contrôle aux frontières et de lutte contre le terrorisme.

À ce titre, elle bénéficiera de moyens opérationnels supplémentaires et d’outils juridiques renforcés pour une efficacité accrue de son action.

Ainsi, 1 000 recrutements supplémentaires seront effectués en 2016 et 2017 pour assurer la sécurité des Français. Ces renforcements devront bénéficier aux unités de surveillance chargées du contrôle des franchissements des frontières terrestres ou de missions de sûreté dans les gares, dans les aéroports et sur les liaisons maritimes, ainsi qu’aux services de renseignement.

Ce fléchage est nécessaire pour permettre à ces renforts de conserver toute leur efficacité, conformément aux attentes des deux assemblées.

Bien qu’intervenant sur les départements des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes, la brigade de Gap n’a pas été retenue au titre des services prioritaires en matière de lutte contre le terrorisme et de contrôle aux frontières. L’effectif cible de quinze emplois sera donc stabilisé à son niveau actuel, qui est cohérent avec son positionnement, sa charge de travail et ses résultats contentieux.

Au-delà des ressources humaines, une enveloppe exceptionnelle de 45 millions d’euros supplémentaires sera débloquée pour la douane sur deux ans. Ces moyens nouveaux serviront à améliorer l’équipement des agents : habillement, gilets pare-balles, armes – notamment armes longues – et véhicules. Ils permettront également d’améliorer les moyens de communication et les outils de détection de trafics illicites. Par ailleurs, 16,4 millions d’euros supplémentaires sont prévus au titre de l’investissement informatique.

Le renforcement de l’action douanière passe également par de nouveaux outils juridiques. Certains ont été attribués à la douane dans le cadre de la loi sur le renseignement du 24 juillet 2015, notamment au bénéfice de la Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières. D’autres moyens lui seront attribués dans le cadre de la future loi sur la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, actuellement discutée au Parlement.

Ce plan de renforcement de l’action de la douane en matière de lutte contre le terrorisme et de contrôle aux frontières participe du pacte de sécurité voulu par le Président de la République pour apporter une réponse proportionnée et adaptée aux menaces auxquelles nous sommes confrontés.

Il est également justifié au regard de la capacité jamais démentie de la douane à lutter contre les trafics dangereux ou frauduleux, illustrée tout au long de l’année dernière par plusieurs saisies majeures de stupéfiants, d’armes, de cigarettes ou de contrefaçons, dynamique qui se poursuit en 2016.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud.

Mme Patricia Morhet-Richaud. Madame la secrétaire d’État, j’entends bien les chiffres que vous avancez en matière d’effectifs et je vous en remercie à l’échelon national. Cependant, je tiens à préciser qu’ils sont bien sûr loin de me satisfaire.

En effet, en période estivale, ce n’est plus un, mais quatre cols qui sont ouverts à la circulation entre la France et l’Italie dans les Hautes-Alpes et les Alpes-de-Haute-Provence : au col du Montgenèvre s’ajoutent le col de l’Échelle, le col Agnel et le col de Larche. En montagne, ce qui compte, ce n’est pas les kilomètres, mais le temps de trajet.

À situation exceptionnelle, moyens exceptionnels ! À défaut, nous pourrions payer cher les lacunes opérationnelles d’un service public qui n’est plus en capacité d’être un service de proximité, un service efficace dans la chaîne de sécurité de nos concitoyens.

ateliers et chantiers d'insertion

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, auteur de la question n° 1379, adressée à Mme la ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

M. Jean-Louis Tourenne. Je souhaite attirer votre attention sur la situation de trésorerie dans les ateliers et chantiers d’insertion, ou ACI. Ceux-ci permettent une déclinaison et une application pratique sur le terrain de la politique de l’emploi engagée par le Gouvernement. Cette politique a également été confortée par la réforme pour l’insertion par l’activité économique, laquelle a eu de nombreux effets bénéfiques, les ACI le reconnaissent, notamment sur les droits et parcours des salariés.

En revanche, les modalités de versement des aides de l’État, trop tardives, provoquent des déficits de trésorerie qui emportent parfois des conséquences fâcheuses et dramatiques et peuvent mettre en péril ces ateliers et chantiers.

À la suite de la réforme de l’insertion par l’activité économique votée en 2013, il existe désormais un décalage de paiement de l’aide conventionnelle aux postes, qui conduit aujourd’hui de nombreux ateliers et chantiers d’insertion à subir des difficultés financières.

Or la Bretagne, comme d’autres régions, est une terre fertile en accompagnement de ceux qui, victimes d’un long chômage, ont besoin d’un palier de décompression avant de retrouver le chemin du bureau ou de l’usine.

Je souhaite donc savoir comment le ministère, en lien avec l’Agence de services et de paiement, l’ASP, permettra à ces structures de disposer d’une trésorerie suffisante et assurée dans le temps, car cette action essentielle pour la réinsertion et ces emplois ne sauraient être remis en question pour de simples raisons de complexités administratives ou temporelles.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Martine Pinville, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur, vous appelez à juste titre l’attention du Gouvernement sur les difficultés financières liées au paiement de l’aide au poste par l’Agence de services et de paiement que les ateliers et chantiers d’insertion pourraient rencontrer à la suite de la réforme du financement de l’insertion par l’activité économique.

Celle-ci, parmi d’autres évolutions, a substitué, pour les ACI, au financement assuré par des contrats aidés et par une aide à l’accompagnement, un financement assuré par une aide au poste d’insertion, composée d’un montant socle et d’un montant modulé en fonction des caractéristiques des publics accueillis, de l’effort d’insertion de la structure et des résultats de retour à l’emploi.

Les structures d’insertion signent avec les services de l’État, au terme d’un dialogue de gestion, une convention leur reconnaissant le statut de structure de l’insertion par l’activité économique et prévoyant dans une annexe financière annuelle un nombre de postes financés par l’État et, le cas échéant, par le conseil départemental.

La procédure de versement qui s’applique à toutes les structures de l’insertion par l’activité économique repose sur un paiement mensuel à terme échu, au lieu d’un versement en cours de mois appliqué aux contrats aidés. Le versement intervient le mois suivant la réception du justificatif d’activité. Ce système nécessite une vigilance particulière des structures d’insertion afin d’assurer une transmission régulière à l’ASP des pièces justificatives des paiements, notamment les suivis mensuels en heures de leurs salariés en insertion.

Depuis janvier 2016 et jusqu’à la fin du mois de mai, les ACI ont reçu 179 millions d’euros de versements de la part de l’Agence de services et de paiement.

Concernant la situation de l’insertion par l’activité économique en Bretagne, on constate à la fin du mois de mai un versement régional total par l’ASP de plus de 9 millions d’euros, dont 7 millions au titre de l’aide au poste dans les ACI. Les conseils départementaux ont versé 811 569 euros depuis le début de l’année aux ACI bretons.

La procédure de paiement va évoluer pour l’ensemble des structures d’insertion par l’activité économique.

Le nouveau système d’information, qui sera opérationnel le 1er janvier 2017, permettra d’assurer un paiement des structures en cours de mois et au plus près de l’activité réelle sur l’ensemble de l’année, ce qui n’est techniquement pas possible aujourd’hui.

Dans l’attente, une attention particulière est apportée par les services des DIRECCTE aux situations des ateliers et chantiers d’insertion qui se trouveraient en difficulté financière, de façon à adopter dans les plus brefs délais les mesures appropriées.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.

M. Jean-Louis Tourenne. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse claire et circonstanciée ainsi que des mesures d’accompagnement prises de façon transitoire lorsque les dispositions législatives ou réglementaires ne permettent pas de satisfaire totalement à la demande et aux besoins des structures concernées. Les réponses que vous venez d’apporter satisferont les structures d’insertion, et je ne manquerai pas de leur apporter la bonne nouvelle.

Je profite de cette occasion pour aborder un autre point, sur lequel, n’ayant pas posé de question, je n’attendais pas de réponse. (Sourires.) Il me paraît nécessaire de mettre en œuvre rapidement une réflexion sur le modèle économique des structures d’insertion par l’activité économique, en lien avec les financeurs de l’économie sociale et solidaire, notamment la Caisse des dépôts, France Active et les collectivités locales.

En effet, ces structures souffrent d’un manque de fonds propres et les solutions de financement du secteur de l’économie sociale et solidaire sont la plupart du temps peu adaptées. Je vous appelle donc à ouvrir ce nouveau chantier.

effectifs d'enseignants dans le val-de-marne

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, auteur de la question n° 1396, adressée à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Laurence Cohen. Madame la secrétaire d’État, la direction des services départementaux de l’éducation nationale du Val-de-Marne prévoit, pour les écoles maternelles et élémentaires à la rentrée 2016, quatre-vingt-huit suppressions et quatre-vingt-neuf ouvertures de classes, alors même que l’on comptera 1 000 élèves supplémentaires.

Dans une ville comme Fontenay-sous-Bois, pour ne prendre qu’un seul exemple, cela portera les effectifs de certaines classes de maternelles à trente-deux élèves. Vous en conviendrez, il est difficile de préparer les petits Val-de-Marnais aux apprentissages fondamentaux dans ces conditions. Cette situation est tout simplement inacceptable.

Concernant le secondaire, les futures créations de postes dans les lycées de l’académie de Créteil pour la rentrée prochaine correspondent à une augmentation de la dotation horaire globale de 3 471 heures au total. L’augmentation des effectifs atteignant 5 215 élèves pour l’année 2016–2017, la moitié des besoins ne sera donc pas pourvue.

Alors que la carte scolaire départementale sera révisée le 17 juin prochain, la mobilisation est forte. Je me trouvais, le 23 mars dernier, avec 250 enseignants, parents d’élèves et élus locaux devant le ministère de l’éducation nationale afin d’obtenir une dotation supplémentaire exceptionnelle pour notre département. De multiples initiatives continuent d’être organisées dans tout le Val-de-Marne.

Face à l’urgence de la situation, je vous demande, madame la secrétaire d’État, si le Gouvernement est enfin disposé à mettre en place cette dotation supplémentaire.

D’autant que les inégalités engendrées par cette carte scolaire profondément injuste sont amplifiées par des difficultés de recrutement des enseignants, singulièrement importantes dans l’académie de Créteil. À ce sujet, je vous renvoie au nombre d’inscrits aux concours dans cette académie.

Pourriez-vous me dire si des mesures sont prévues pour mettre en place un véritable prérecrutement permettant de renforcer durablement les effectifs de l’éducation nationale, comme le demandent les organisations syndicales enseignantes et estudiantines afin de redonner tout son sens à la notion d’école Républicaine, école de toutes et tous ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Martine Pinville, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire. Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord d’excuser la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui m’a demandé de vous transmettre cette réponse.

Comme vous le savez, l’effort de création de postes engagé dès la rentrée 2012 se poursuit aujourd’hui, avec de nouvelles modalités d’allocation des moyens permettant de mieux tenir compte des réalités du terrain.

S’agissant plus précisément du département du Val-de-Marne, pour la rentrée 2015, les moyens alloués reposaient sur les effectifs prévisionnels qui se sont avérés supérieurs aux besoins des effectifs constatés.

Ainsi, pour la rentrée 2016, une augmentation des effectifs ayant été prévue, le département a été doté de soixante-sept équivalents temps plein – ETP – pour le premier degré, et de vingt-quatre équivalents temps plein pour le second, permettant d’accompagner l’évolution démographique tout en réalisant des rééquilibrages en relation avec la difficulté sociale. Ces moyens permettront également d’accompagner la mise en œuvre de la réforme des collèges.

Par ailleurs, je vous informe que la répartition des moyens dans le premier degré a été actée par le conseil départemental de l’éducation nationale le 18 mars dernier. Ces éléments vous ont également été transmis lors de la réunion des parlementaires du Val-de-Marne, présidée par Mme la rectrice et M. le préfet.

Concernant les concours de recrutement, si un déficit est constaté sur quelques matières, les admissions ont progressé de 20 % en 2014 et 2015, au rythme des postes ouverts.

Ces précisions faites, je souhaite porter à votre attention la difficulté de prévoir les effectifs dans votre département, en raison de la forte mobilité des populations et des évolutions très inégales selon les communes, mais aussi de l’adoption par de nombreuses villes, sans concertation préalable avec les services de l’éducation nationale, des secteurs dits « flottants », qui ne respectent pas la carte scolaire définie par arrêté municipal.

Enfin, s’agissant du volume d’enseignants stagiaires qui exerceront à la rentrée 2016, je vous informe que celui-ci sera comparable à la situation de la rentrée 2015.

Vous le voyez, madame Cohen, c’est en tenant compte de la réalité du terrain que nous affectons les moyens aux différents territoires, dans l’intérêt de l’ensemble des élèves.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de ces précisions, mais je crains que vous n’ayez été mal renseignée. Le conseil départemental de l’éducation nationale a en effet adopté à l’unanimité une motion contre la carte scolaire telle qu’elle avait été proposée. Il me semble donc que subsiste sur ce point un petit malentendu : personne n’est favorable à cette carte scolaire !

Vous évoquez, par ailleurs, des chiffres d’ETP qui confirment mes propos : ils ne correspondent qu’à la moitié des besoins.

Je vous invite donc à réviser vos informations, si je puis m’exprimer ainsi, et à tenir compte de mes remarques, qui sont actualisées en lien avec les acteurs et les actrices de l’éducation nationale sur le terrain.

Vous savez bien, madame la secrétaire d’État, que d’une ville à l’autre, vous l’avez d’ailleurs souligné, la situation peut changer. Décider de suppressions de classes globalement, au niveau départemental, sans tenir compte de la réalité des villes et des écoles concernées provoque des catastrophes.

Hier encore, un conseil municipal extraordinaire s’est tenu dans une école du Val-de-Marne, à Arcueil, afin de dénoncer à quel point la situation est tendue.

Aussi, madame la secrétaire d’État, je vous demande de revoir cette carte scolaire. Une réunion se tiendra le 17 juin. Je souhaite que le Gouvernement y soit attentif. Vous n’avez malheureusement pas répondu à la proposition que j’ai formulée avec les organisations des enseignants et des étudiants : la mise en place du prérecrutement. Il s’agit là véritablement d’un besoin impératif.

dotation de solidarité rurale et fraction bourg-centre

M. le président. La parole est à M. Simon Sutour, auteur de la question n° 1293, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

M. Simon Sutour. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaite attirer l’attention de M. le ministre de l’intérieur et du Gouvernement dans son ensemble sur les conséquences financières de la loi du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires et modifiant le calendrier électoral pour les communes ayant perdu leur qualité de chef-lieu de canton et pour celles ne remplissant plus le critère de la part de la population communale, fixé à 15 % de la population cantonale.

En effet, selon l’article L. 2334-21 du code général des collectivités territoriales, les communes chefs-lieux de canton et les communes dont la population représente au moins 15 % de celle de leur canton se voient attribuer la première fraction, dite « bourg-centre », de la dotation de solidarité rurale. Or la division par deux du nombre de cantons pose inévitablement la question de l’éligibilité à cette fraction « bourg-centre » des communes qui ont perdu leur qualité de chef-lieu de canton.

Plus de 4 000 communes sont concernées, dont de nombreuses dans le département dont je suis élu, le Gard. Bien que la réforme n’ait d’impact qu’à compter de 2017, de nombreux élus sont d’ores et déjà très inquiets, d’autant que ces ex-chefs-lieux continuent de payer des investissements, notamment en matière d’infrastructures sportives, culturelles, sociales et bien entendu éducatives. Ces ex-chefs-lieux assuraient et continuent d’assurer une fonction essentielle, celle de la structuration de leur territoire.

C’est pourquoi je demande au Gouvernement de bien vouloir m’indiquer ses intentions sur la pérennisation de la fraction « bourg-centre » à compter de 2017 pour les anciens chefs-lieux de canton et pour les communes ne remplissant plus le critère de la part de la population communale dans la population cantonale. Il s’agit d’un sujet auquel les élus de mon département sont particulièrement sensibles.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Martine Pinville, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur, pour commencer, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur.

L’article L. 2334-21 du code général des collectivités territoriales prévoit que la première fraction, dite « bourg-centre », de la dotation de solidarité rurale, la DSR, est notamment attribuée aux communes chefs-lieux de canton ainsi qu’aux communes dont la population représente au moins 15 % de celle de leur canton. La loi du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires a prévu un redécoupage de la carte cantonale à l’échelle nationale, dans le cadre de la mise en place des conseillers départementaux.

La réduction du nombre de cantons posait donc la question de l’éligibilité à la fraction « bourg-centre » des communes perdant leur qualité de chef-lieu de canton ou ne remplissant plus le critère de la part de la population communale dans la population cantonale à la suite de cette réforme.

À droit constant, la réforme de la carte cantonale n’aurait pas eu d’impact sur la répartition de la DSR bourg-centre avant l’année 2017. En effet, l’éligibilité aux trois fractions de la DSR est appréciée sur le fondement des données connues au 1er janvier de l’année précédant celle de la répartition, en application de l’article R. 2334-6 du code général des collectivités territoriales.

Afin de rassurer d’ores et déjà les collectivités préoccupées par les incidences financières du redécoupage cantonal, le Gouvernement a souhaité leur apporter des garanties dès la fin de l’année 2014, avant la mise en œuvre du nouveau découpage cantonal. Aussi, des mesures législatives ont été adoptées pour neutraliser les effets de cette réforme, que ce soit en matière de régime indemnitaire des élus ou en matière de dotations.

L’article L. 2334-21 du CGCT, modifié par la loi de finances pour 2015, prévoit ainsi que les limites territoriales à partir desquelles seront appréciés les seuils de population seront celles qui étaient en vigueur au 1er janvier 2014. De plus, les anciens chefs-lieux de canton conserveront, aux côtés des bureaux centralisateurs, le bénéfice de l’éligibilité à la fraction bourg-centre de la DSR, sans préjudice des autres conditions requises pour l’éligibilité.

M. le président. La parole est à M. Simon Sutour.

M. Simon Sutour. Je veux remercier en quelques mots Mme la secrétaire d’État de sa réponse, qui précise bien les choses.

Nous savions évidemment qu’une évolution législative s’est faite, un peu sous la pression des réalités locales. Les communes concernées sont souvent petites, rurales, et vous savez que, en ce moment, les budgets communaux ne sont pas faciles à élaborer. Il aurait été dommage qu’il y ait une nouvelle perte de ressources. Je souhaitais poser cette question de manière claire, avec publication au Journal officiel, pour que les choses soient bien précisées.

accord conclu entre l'union européenne et la turquie sur la crise des migrants

M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 1424, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

M. Gilbert Roger. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’attire l’attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur l’accord que l’Union européenne a conclu avec la Turquie, le 18 mars dernier, pour tenter d’apporter une solution à la crise des migrants. Depuis le dimanche 20 mars 2016 à minuit, toutes les personnes arrivées illégalement en Grèce par la Turquie sont renvoyées dans ce pays, y compris les demandeurs d’asile.

Selon les informations dont dispose Amnesty International, quelques heures après l’entrée en vigueur de l’accord, vingt-sept demandeurs d’asile afghans, craignant d’être attaqués par des talibans, ont été renvoyés de force par la Turquie dans leur pays sans avoir bénéficié d’un accès à la procédure d’asile, ce qui constitue une infraction à la législation européenne et au droit international.

Aussi, je souhaite savoir comment le gouvernement français compte peser sur l’Union européenne afin qu’elle travaille avec la Turquie pour mettre fin aux violations des droits des réfugiés.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire. Monsieur Gilbert Roger, la France est pleinement engagée avec ses partenaires européens dans la recherche d’une solution globale à la crise migratoire. C’est dans ce contexte que des engagements ont été pris le 18 mars dernier avec la Turquie, premier point de passage vers l’Union européenne et partenaire inévitable dans la gestion de cette crise.

L’enjeu de cette coopération est double : soutenir la Turquie dans ses efforts incontestables d’accueil de plus de 3 millions de réfugiés et mettre un terme au trafic d’êtres humains, trafic qui prospérait au péril de la vie de ses victimes.

Les autorités françaises et européennes sont très attentives au respect des droits de l’homme et du droit d’asile dans la mise en œuvre de l’accord avec la Turquie. À leur arrivée en Grèce, les migrants qui sollicitent l’asile bénéficient d’un examen individuel de leur demande et qui peut donner lieu à un recours en cas de rejet. La France et ses partenaires européens soutiennent la Grèce pour l’examen des demandes d’asile dans les meilleures conditions possibles. Ainsi ne doivent être éloignés vers la Turquie que des migrants économiques ou des personnes dont la demande d’asile a été rejetée.

Pour sa part, la Turquie a modifié sa législation en faveur des réfugiés syriens et d’autres évolutions législatives sont annoncées afin que toutes les personnes en besoin de protection internationale bénéficient d’une protection suffisante et conforme aux normes internationales. Cela vaut aussi pour les non-Syriens et donc pour les Afghans.

Le respect du droit international et du droit de l’Union européenne est une condition de la crédibilité et de l’identité même de l’Union européenne.

mise en place de maisons de l'état à maripasoula et saint-georges de l'oyapock

M. le président. La parole est à M. Georges Patient, auteur de la question n° 1392, transmise à M. le ministre de l’intérieur.

M. Georges Patient. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, si l’on veut assurer une présence réelle et totale de l’État sur le vaste territoire de la Guyane, constitué de communes très éloignées des centres administratifs ou totalement enclavées, la création de maisons de l’État s’impose. Or il n’en existe aucune alors que, depuis la publication de la circulaire du Premier ministre du 15 octobre 2014, beaucoup de ces maisons se sont ouvertes dans l’Hexagone.

Eu égard à la configuration de la Guyane, que je viens de décrire brièvement, il faudrait très rapidement en créer deux, l’une à Maripasoula et l’autre à Saint-Georges de l’Oyapock.

En effet, les administrés de Maripasoula, qui est située le long du fleuve Maroni et est la plus grande commune de France avec 18 000 kilomètres carrés, ainsi que ceux des communes environnantes et des petits villages, soit plus de 30 000 habitants au total, doivent, pour faire toutes les démarches administratives – relatives aux impôts, à la carte nationale d’identité, au passeport, aux régularisations administratives, un service très important, à la sécurité sociale, aux allocations familiales ou encore à la justice –, se rendre à la sous-préfecture de Saint-Laurent-du-Maroni, distante de plus de deux jours de pirogue. Certes, il existe bien un transport aérien, mais il est loin d’être gratuit.

Le même problème se pose avec la commune de Saint-Georges de l’Oyapock, ville de l’est guyanais frontalière du Brésil, et ses communes environnantes. Là aussi, les usagers concernés doivent prendre une journée complète, perdue tant pour les salariés que pour les chefs d’entreprise, pour effectuer leurs démarches à Cayenne.

La création de maisons de l’État dans ces deux communes se justifierait également par leur environnement culturel et linguistique particulièrement varié, qui nécessite un recrutement adapté afin de garantir le meilleur service aux usagers. Ainsi, le recrutement du personnel devrait se faire sur le bassin d’emploi par une sélection sur dossier, les personnes ainsi recrutées devant maîtriser le français mais aussi les langues régionales très usitées, certaines personnes ne parlant que celles-ci. De cette façon, les agents connaîtront les cultures locales et seront à même de reformuler les problèmes et les réponses, pour mieux les faire admettre et comprendre par les populations.

Monsieur le secrétaire d’État, à la lumière de ces éléments, vous comprendrez la nécessité de mettre en place des maisons de l’État dans ces communes. Que compte faire le Gouvernement pour favoriser celles-ci ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Georges Patient, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence du ministre de l’intérieur.

Vous évoquez la création de maisons de l’État dans les communes de Saint-Georges de l’Oyapock et de Maripasoula. En ce qui concerne la commune de Maripasoula, la situation d’enclavement que vous décrivez a été prise en compte dès 2001 et une maison de l’État y a été installée par la préfecture. Cette maison est, depuis cette date, occupée par la caisse générale de sécurité sociale et par la caisse d’allocation familiale.

En outre, les agents de la préfecture et de la direction des finances publiques y assurent des permanences tous les deux mois, notamment pour les demandes de titres de séjour et la vente de timbres fiscaux. Ces permanences sont également l’occasion pour les services de l’État de dispenser des conseils aux communes et aux administrés. Par ailleurs, pour être complet, Pôle emploi a créé une structure pérenne à Maripasoula.

Le fonctionnement de cette maison de l’État est appelé à évoluer dans les mois à venir, puisque la caisse générale de sécurité sociale a fait le choix d’intégrer les locaux du centre de santé. L’espace libéré pourra être mis à disposition d’autres services qui en ont déjà exprimé le besoin. Ainsi, les services du rectorat étudient une implantation à Maripasoula et des négociations sont en cours pour mettre à la disposition de la population par la préfecture la possibilité d’effectuer des passeports.

En ce qui concerne Saint-Georges de l’Oyapock, la création et la construction d’une maison de l’État sont portées par la communauté de communes de l’est guyanais. Sa construction, sur l’impulsion de l’État, a débuté en juillet 2013 par la pose de la première pierre par le préfet. Elle a pris du retard du fait de problèmes financiers de l’établissement public de coopération intercommunale et elle doit s’achever à l’automne 2016 pour une ouverture au 1er janvier 2017.

Cette construction permettra de concentrer en un lieu unique toutes les structures offrant un accès aux services, notamment en matière d’emploi, d’insertion, de formation, de création d’entreprises et d’accès aux droits, sous forme de permanences ou d’implantations de guichets pérennes. Une rencontre entre le sous-préfet aux communes de l’intérieur et le président de la communauté de communes de l’est guyanais est d’ailleurs prévue dans les tout prochains jours afin de définir conjointement les services qui pourraient être accueillis au sein de cette structure.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement suit avec attention la mise en place et le fonctionnement des services de l’État au plus près des populations et des élus pour les assister dans leurs projets.

M. le président. La parole est à M. Georges Patient.

M. Georges Patient. Je remercie M. le secrétaire d’État de ces annonces. Seulement, je souhaite insister pour que ces opérations se réalisent rapidement. Je le sais, monsieur le secrétaire d’État, vous vous êtes rendu il n’y a pas très longtemps en Guyane, notamment à Saint-Georges de l’Oyapock et vous avez pu vous rendre compte sur place que, si nous n’allons pas très vite sur ce dossier, nos administrés risquent de se tourner vers le Brésil. Je ne peux donc que réitérer mes demandes pour aller beaucoup plus vite en ce domaine.

prorogation de la durée de validité des cartes nationales d'identité

M. le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, auteur de la question n° 1376, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

M. Philippe Bonnecarrère. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question s’adresse au ministre de l’intérieur et porte sur les difficultés que pose l’extension de la durée de la validité de certaines cartes nationales d’identité. Je le précise d’emblée, je comprends très bien que M. le ministre de l’intérieur n’ait pu se dégager ce matin pour répondre aux différentes questions qui lui étaient posées et je sais que vous nous répondez, monsieur le secrétaire d’État, avec beaucoup d’attention.

Depuis le 1er janvier 2014, la durée de validité des cartes nationales d’identité délivrées entre le 2 janvier 2004 et le 31 décembre 2013 à des personnes majeures est prorogée de cinq ans, de manière automatique. On comprend bien l’objectif pratique de cette mesure.

Toutefois, cette prorogation de la validité n’est pas inscrite sur les cartes nationales d’identité elles-mêmes et, surtout, elle n’est pas officiellement reconnue par certains autres pays européens, notamment par nos voisins espagnols. Les ressortissants français rencontrent ainsi des difficultés pratiques lors de leurs déplacements au sein des pays européens qui ne reconnaissant pas cette prorogation de validité, le problème pouvant même se poser dès l’aéroport de départ.

Les conseils reçus par nos concitoyens ont dans un premier temps consisté à recommander l’établissement d’un passeport ; la réponse est bien sûr évidente : cela entraîne un problème de coût – 86 euros. En outre, cela entraîne aussi, à mon sens, un problème institutionnel car cela revient à dire qu’on ne peut pas se déplacer dans l’espace Schengen avec sa carte d’identité.

Les pouvoirs publics ont ensuite mis à disposition des attestations ou des notices explicatives à présenter aux autorités locales, un procédé sans doute un peu étroit. En outre, il existe maintenant une véritable disparité de pratiques entre préfectures, certaines acceptant d’établir une nouvelle carte d’identité, d’autres non. En pratique, cela conduit in fine nos concitoyens à faire des déclarations fictives de perte ou de vol.

Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d’État, quelles mesures pratiques, très concrètes, le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour répondre à la préoccupation quotidienne de nos concitoyens ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire. Monsieur le sénateur, le décret du 18 décembre 2013, relatif à la durée de validité et aux conditions de délivrance et de renouvellement de la carte nationale d’identité, entré en vigueur le 1er janvier 2014, a étendu la durée de validité des cartes nationales d’identité sécurisées de dix à quinze ans.

Cette mesure, annoncée par le Gouvernement dans le cadre du comité interministériel pour la modernisation de l’action publique, qui s’est tenu le 17 juillet 2013, vise à alléger les démarches de renouvellement de ce titre pour les usagers et les services de l’État.

Comme vous l’avez dit, cette mesure est également applicable aux titres délivrés à des personnes majeures et en cours de validité au 1er janvier 2014, c’est-à-dire qui ont été délivrés entre le 2 janvier 2004 et le 31 décembre 2013.

Les autorités des pays qui acceptent à leurs frontières une carte nationale d’identité sécurisée ont été informées de la mesure. Les usagers souhaitant se rendre dans ces pays ont aussi, comme vous l’avez rappelé, la possibilité de se munir de leur passeport. Ils peuvent également télécharger un document, traduit en plusieurs langues, attestant de la prolongation de la validité de leur carte nationale d’identité.

Voilà plus d’un an, après que des incidents lui eurent été signalés, le ministère des affaires étrangères et du développement international a engagé les démarches appropriées auprès des États, en nombre limité – trois sur quarante-quatre pays concernés –, qui refusent de reconnaître ces titres comme valables.

En outre, l’annexe de l’accord européen, conclu le 13 décembre 1957, sur le régime de la circulation des personnes entre les pays membres du Conseil de l’Europe, qui dresse la liste des documents permettant la circulation sur le territoire des pays signataires, est en cours de modification, pour prendre en compte les cartes d’identité prolongées.

À ce jour, la Turquie et Malte ont reconnu officiellement les cartes nationales d’identité prolongées, de même que la Serbie, qui n’est pas signataire de l’accord. Ces démarches diplomatiques ont permis de réduire drastiquement le nombre d’incidents signalés.

Je rappelle, par ailleurs, que la directive 2004/38/CE relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres pose le principe suivant lequel les citoyens de l’Union peuvent circuler librement sous le couvert d’une carte d’identité ou d’un passeport en cours de validité, à seule fin de justifier de leur identité.

Le 4 de l’article 5 de cette directive prévoit également que, lorsque le citoyen de l’Union européenne ne dispose pas du document de voyage requis, « l’État membre concerné accorde à ces personnes tous les moyens raisonnables afin de leur permettre d’obtenir ou de se procurer, dans un délai raisonnable, les documents requis ou de faire confirmer ou prouver par d’autres moyens leur qualité de bénéficiaires du droit de circuler et de séjourner librement ».

Dans la mesure où un document d’identité périmé peut permettre de circuler librement sur le territoire de l’Union européenne et/ou de l’espace Schengen, dès lors que la qualité de ressortissant de l’Union européenne peut être établie par ce moyen, la simple péremption faciale du titre ne constitue pas une difficulté pour circuler sur le territoire d’un État membre.

Enfin, le secrétaire d’État chargé des transports a procédé à un rappel des règles applicables aux compagnies aériennes.

Une évolution des règles relatives au renouvellement des titres d’identité ne semble donc pas nécessaire.

Les services des ministères de l’intérieur et des affaires étrangères et du développement international restent toutefois particulièrement attentifs à cette question et prendront les mesures appropriées si la situation devait évoluer.

M. le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.

M. Philippe Bonnecarrère. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse.

Je prends acte de la bonne volonté, dont je ne doutais pas, du Gouvernement sur ce dossier, et répète que la logique est double.

Premièrement, il s’agit d’aller vers une simplification.

Deuxièmement, dans une période où la population, en France comme sur le reste du continent, est assez mal disposée à l’égard des institutions européennes, ce que je regrette très profondément, il est important que nos concitoyens ne soient pas ennuyés par de telles mesures, dont on voit bien, du reste, qu’elles ne trouvent ni de près ni de loin leur origine dans les directives européennes, qui sont par ailleurs de très bonne qualité.

À cet égard, une simplification à l’échelle nationale me paraît de nature à améliorer l’image de l’Union européenne auprès de nos concitoyens.

réforme du collège

M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, auteur de la question n° 1365, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le secrétaire d'État, le Président de la République a fait de l’éducation une priorité, et l’universitaire que je suis s’en félicite.

Cette réforme ambitieuse de refondation de l’école, dans laquelle l’action de la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche s’inscrit pleinement, requiert cependant, même si je suis persuadée que la plus parfaite éducation consiste à habituer le disciple à se passer des maîtres, un effort de formation important, afin de rendre sa mise en œuvre possible et cohérente.

Un plan de formation a donc été mis en place durant l’année 2015-2016, à destination des personnels d’encadrement, des formateurs, des enseignants et des conseillers principaux d’éducation, les CPE.

Naturellement, ces actions de formation concernent également l’enseignement français à l’étranger, dont on sait combien il contribue au rayonnement de la France, de sa culture et de sa langue. C’est ainsi que l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, a collaboré avec le ministère pour définir les conditions dans lesquelles ces actions seront ouvertes aux enseignants des établissements d’enseignement français à l’étranger homologués.

Il semble cependant que, à ce jour, seules quelques dizaines de places de stages, dans le primaire comme dans le secondaire, ont été ouvertes, pour l’ensemble des enseignants des 494 établissements français à l’étranger.

J’ajoute qu’aucune place de stage ne semble prévue pour les personnels encadrants, les CPE ou les coordonnateurs de zone, lesquels sont pourtant au nombre de 330. Or ces derniers, même s’ils n’ont pas de rôle pédagogique, veillent à la mise en œuvre des directives de l’AEFE au niveau local avec les chefs d’établissement, les inspecteurs de l’éducation nationale et l’ensemble des personnels de l’AEFE présents dans la zone. Ils sont les interlocuteurs des comités de gestion des établissements homologués.

Monsieur le secrétaire d'État, afin que la réforme annoncée associe l’ensemble de ceux qui auront, demain, à la soutenir et à la faire vivre, je souhaiterais connaître la place que les services entendent réellement réserver au personnel des établissements français à l’étranger dans ce plan de formation.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire. Madame la sénatrice, la réforme du collège engagée par le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche est ambitieuse et suppose, comme vous le soulignez justement, un effort de formation important, auquel nous voulons associer les acteurs de l’enseignement français à l’étranger, pour toutes les raisons que vous avez évoquées.

Ainsi, pour la session 2016, le dispositif « Formations AEFE-DGESCO », organisé par l’AEFE en partenariat avec la direction générale de l’enseignement scolaire, la DGESCO, a accueilli, dans l’académie de Nancy-Metz, pour le second degré, et les académies d’Amiens et de Rouen, pour le premier degré, quelque 110 enseignants en fonction dans les établissements de l’enseignement français à l’étranger.

Au-delà, le plan national de formation à la réforme du collège a été conçu de manière à être systématiquement accessible à tous les inspecteurs, personnels d’encadrement et formateurs concernés par la mise en œuvre de cette réforme et des nouveaux programmes de la scolarité obligatoire, quelle que soit leur position géographique.

En ce sens, les trois sessions qui se sont déroulées en octobre 2015, janvier 2016 et mai 2016 à l’École supérieure de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche ont pu être suivies simultanément dans toutes les académies, grâce à un ambitieux dispositif de retransmission en direct, dont les éléments techniques ont été transmis au chef du service pédagogique de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.

Toutefois, les contraintes techniques et matérielles n’ont permis la connexion que d’un seul groupe cette année. Il n’en demeure pas moins que cet accès a vocation à demeurer actif. Sa généralisation à tous les responsables pédagogiques des zones de l’AEFE pourra donc être envisagée rapidement, ces derniers disposant déjà d’un accès à l’ensemble des parcours de formation du dispositif « M@gistère ».

Par ailleurs, la DGESCO s’est engagée dans la publication, sur le site Éduscol, de nombreuses ressources destinées à accompagner la formation des différentes catégories d’acteurs éducatifs de la réforme. Ces ressources seront régulièrement enrichies et actualisées.

Vous le voyez, madame la sénatrice, les établissements de l’AEFE seront destinataires de l’ensemble des ressources organisationnelles, didactiques et pédagogiques qui accompagnent la mise en œuvre, sur le terrain, de la réforme du collège.

L’effort se poursuivra l’année prochaine et devrait permettre de les associer de manière plus systématique encore.

M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le secrétaire d'État, je suis rassurée par la place qui est réservée à cette formation et par les efforts déployés.

Je veux encourager le Gouvernement à poursuivre cette ouverture, notamment pour ce qui concerne l’accès numérique : quand on se trouve à plusieurs heures d’avion et à quelques milliers de kilomètres de notre pays, il est indispensable de rester connecté !

En outre, il me paraît important de réfléchir au redéploiement des personnels ayant pu bénéficier de la formation en France et pouvant donc la porter dans des régions du monde assez éloignées de l’Hexagone. Il faut que nous puissions, localement, nous reposer sur eux.

En effet, le succès de la réforme, qui, comme vous l’avez rappelé, est ambitieuse, ce succès que nous appelons toutes et tous de nos vœux passe évidemment par ceux qui l’ont comprise et qui sont donc les mieux à même de la mettre en place.

M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures vingt, est reprise à quatorze heures trente, en salle Clemenceau, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

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Débat sur le bilan annuel de l'application des lois

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat sur le bilan annuel de l’application des lois (rapport d’information n° 650).

Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président Claude Bérit-Débat, mesdames, messieurs les présidents de commission, mes chers collègues, nous voici réunis pour notre rendez-vous annuel sur le bilan de l’application des lois, auquel le Sénat attache une importance toute particulière et qui me paraît constituer une spécificité de notre assemblée.

La fonction de contrôle que le Parlement exerce en application de l’article 24 de la Constitution doit être à nos yeux une priorité de même rang que la fonction législative.

Éloignés sans doute des confrontations politiques traditionnelles, qui ont leur valeur, nous avons une grande légitimité pour assurer ce contrôle, que nous avons institutionnalisé ici depuis au moins quatre décennies.

Au cours de l’année parlementaire 2015-2016, le Parlement a voté 41 textes de loi. C’est plutôt moins que les années précédentes, mais leur volume s’est accru.

Or, faute de texte d’application, certaines lois votées par le Parlement restent partiellement ou même totalement lettre morte.

Nous devons également porter une attention spécifique au respect par l’exécutif de la volonté du législateur. Il y va de la crédibilité de notre travail, quelles que soient les majorités en place.

Sans plus attendre, je donne la parole à M. Claude Bérit-Débat, président de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire, du contrôle et des études, que je remercie tout particulièrement non seulement de la qualité de son rapport d’information, dont il a évoqué les grandes lignes devant la conférence des présidents, mais aussi de l’ensemble de l’action qui est la sienne.

La parole est à M. le président de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire, du contrôle et des études.

M. Claude Bérit-Débat, président de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire, du contrôle et des études. Monsieur le secrétaire d’État, mesdames, messieurs les présidents de commission, mes chers collègues, rendez-vous désormais annuel, la séance publique de cet après-midi va nous permettre de faire le point sur l’application des lois, en présence de M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.

Réitérant l’expérience de l’an dernier, nous avons choisi de siéger en salle Clemenceau, plus appropriée que l’hémicycle à un débat de contrôle de ce type.

Tous les chiffres de la dernière session, en l’occurrence l’année parlementaire 2014-2015, figurent dans mon rapport écrit. Aussi me contenterai-je d’en récapituler les points essentiels, dont j’ai donné un premier aperçu lors de la conférence des présidents du 11 mai dernier.

Ces données ont été établies à partir des bilans détaillés des commissions permanentes, dont je salue la qualité, et des statistiques de la direction de la législation et du contrôle du Sénat, après recoupement avec les chiffres concordants du secrétariat général du Gouvernement.

Comme en 2015, nous avons également eu l’honneur, et le plaisir, d’entendre en audition le secrétaire général du Gouvernement, M. Marc Guillaume. Nous avons aussi évoqué avec lui quelques questions connexes, mais importantes, comme la mise en œuvre des lois d’habilitation ou le taux de réponse aux questions écrites des sénateurs.

Au vu de toutes ces informations, je retiendrai cette année cinq grandes tendances.

Tout d’abord, la production législative est apparemment en baisse, avec 43 lois votées contre 66 l’an dernier, hors conventions internationales.

Mais il s’agit bien d’une baisse apparente, puisque, en réalité, certaines des lois de l’an dernier ont été de véritables « lois-fleuves », comportant plusieurs centaines d’articles. Je pense à loi Macron et à ses 308 articles, ou encore à la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte et à ses 213 articles… En aval, cela signifie que plusieurs dizaines de décrets d’application devront être pris. Espérons que cela ne viendra pas grever le bilan des prochaines années !

Presque 30 % des lois de la précédente session ont résulté d’une initiative parlementaire. Comme l’an dernier, le Sénat, avec 6 propositions de loi, a été à l’origine d’environ une loi sur 7.

Ensuite, sur la législature, c'est-à-dire depuis le 20 juin 2012, le secrétaire général du Gouvernement a annoncé un taux d’application de 80 %, qui recoupe nos propres calculs et marque une progression significative par rapport au précédent exercice.

Le taux communiqué lors du conseil des ministres du 11 mai 2016 est même passé à 82 % au 30 avril 2016. Je le signale pour mémoire, nous clôturons nos statistiques au 31 mars de chaque année, conformément à la méthode arrêtée de concert avec le Gouvernement.

Pour la seule année parlementaire 2014-2015, le pourcentage de parution des textes est mécaniquement moindre : il s’élève à ce jour à 62 %, en hausse de 7 points par rapport à celui de la précédente session.

Ces pourcentages appellent deux commentaires. Premièrement, le taux d’application des lois augmente d’année en année, même s’il reste perfectible. Deuxièmement, ces statistiques récapitulatives gomment des écarts parfois sensibles entre les différentes commissions, entre les ministères et même d’une loi à l’autre.

Autre tendance dans la durée, je signale la résorption progressive du stock de lois inappliquées, au point que sur les 120 lois votées depuis le début de la XIVe législature, quasiment toutes ont reçu au moins un début de mise en application.

Concernant les délais de publication, on sait qu’une circulaire de février 2008 laisse aux ministères six mois à compter de la promulgation de la loi pour faire paraître leurs textes.

L’an dernier, les délais moyens se sont rapprochés de cet objectif, la moyenne appréciée sur l’ensemble de la législature tournant aux alentours de 9 mois et 12 jours. C’est plus que prévu, certes, mais, au vu de la complexité du processus réglementaire et de la durée incompressible de certaines consultations – je pense au Conseil d’État –, j’estime que les dépassements restent dans la limite du raisonnable.

En revanche, j’aurais aimé vous dire que le taux de présentation des rapports demandés par le Parlement s’est amélioré l’an dernier. Hélas, tel n’est pas le cas ! En effet, comme les années précédentes, ce taux, calculé sur la moyenne des dix dernières sessions, n’atteint même pas 60 %

Faut-il, une fois de plus, monter à la tribune sur un sujet qui, d’année en année, prend un tour de plus en plus incantatoire ? Je dirai simplement que c’est une atteinte manifeste au pouvoir de contrôle du Parlement, et nous ne pouvons nous en satisfaire.

Comme je l’ai dit au début de mon propos, outre l’application des lois proprement dite, nous avons évoqué plusieurs questions connexes, comme la prise en compte des positions du Sénat en matière européenne, sur lesquelles le président Jean Bizet a publié un remarquable rapport en mars 2016, ou, dans un tout autre domaine, l’utilisation des lois d’habilitation votées sur le fondement de l’article 38 de la Constitution.

Sur ce chapitre, et sans réitérer les développements de mon rapport écrit, je veux appeler une nouvelle fois votre attention, monsieur le secrétaire d’État, sur les nombreux retards constatés s’agissant des réponses à nos questions écrites, mais vous n’en serez pas étonné, je pense…

Lequel d’entre nous ne s’est pas vu obligé, un jour ou l’autre, de transformer une question écrite en question orale, au risque d’encombrer la séance publique, pour obtenir la réponse attendue en vain au Journal officiel ?

Nous avions déjà évoqué ce problème l’an dernier, et je sais que le Président du Sénat en a saisi le Premier ministre après la conférence des présidents du 6 avril dernier.

Lors de son audition, le secrétaire général du Gouvernement nous a dit sa détermination à résorber rapidement le stock des questions écrites en souffrance : ce sera, n’en doutez pas, un sujet sur lequel je reviendrai le moment venu !

En conclusion, je crois légitime de dire que, cette année, le bilan de l’application des lois, sans être exceptionnel, va dans le bon sens. Nous devons en donner acte au Gouvernement.

Surtout, la précédente session confirme la tendance positive observée depuis trois ou quatre ans : elle relègue peu à peu au rayon des idées fausses l’affirmation selon laquelle les lois seraient dans leur ensemble insuffisamment appliquées.

C’est un constat irréfutable, dont le Sénat peut se féliciter. En effet, par une action inlassable, il a largement contribué à faire de cette question une priorité politique désormais partagée par tous les gouvernements.

Toutefois, c’est un constat précaire. Ne baissons pas la garde, car l’application des lois reste un combat de tous les instants, dans lequel doivent se mobiliser aussi bien les ministères que les commissions permanentes du Sénat.

C’est aussi une attente forte exprimée par nos concitoyens et un gage de crédibilité de l’action du Parlement. En effet, à quoi bon voter des lois si elles doivent rester lettre morte ?

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission des affaires économiques a eu l’occasion de m’entendre voilà peu sur l’application des lois figurant dans son portefeuille d’activités. Sur les 30 lois concernées, 11 sont totalement applicables.

Je serai bref et précis, et n’évoquerai que deux lois majeures, à savoir la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte et la loi d’avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.

La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui comportait 215 articles à l’issue de son examen parlementaire, renvoyait à 180 mesures réglementaires. Lors des débats parlementaires, la ministre chargée de l’énergie s’était engagée à ce que tous les textes réglementaires soient pris avant la fin de l’année 2015.

Or, au 31 mars 2016, soit à la fin de la période de référence et un peu plus de sept mois après la promulgation de la loi, seules 54 dispositions, c’est-à-dire 30 % des textes réglementaires attendus, étaient devenues applicables.

À ce jour, le taux d’application de la loi s’élève à 48 %, 94 mesures et 23 rapports étant encore attendus. Nous aurons tout à l’heure un débat en séance publique sur l’application de la loi relative à la transition énergétique. Mme la ministre nous a fait savoir qu’un certain nombre de textes ont été produits par son administration et sont désormais dans les tuyaux qui les mèneront au Conseil d’État, avant leur signature par les ministres compétents. Nous prenons acte de ces précisions.

Il convient malgré tout de le souligner, des dispositions majeures n’ont pas trouvé leur traduction réglementaire. Je pense notamment à la programmation pluriannuelle de l’énergie, censée décliner l’évolution du mix énergétique. Sa présentation, désormais promise pour le 1er juillet, n’a cessé d’être repoussée. Seul le volet relatif aux énergies renouvelables a été publié.

Ces reports successifs témoignent manifestement de la difficulté de la tâche, des concessions devant être faites et des compromis adoptés, comme nous l’avions signalé. Ces incertitudes n’étant pas levées, de tels retards pèsent directement sur les entreprises de la filière.

À l’opposé, on signalera, parmi les motifs de satisfaction, la publication rapide des textes d’application des mesures en faveur des industries électro-intensives, ainsi que la parution des budgets carbone et de la stratégie bas-carbone, qui étaient attendus par un certain nombre d’acteurs, notamment du secteur agricole.

Parmi les textes les plus importants publiés depuis le 1er avril, on trouve le décret relatif aux « travaux embarqués », les textes d’application du complément de rémunération, le nouveau cadre réglementaire des concessions hydroélectriques et la définition des conditions de mise en œuvre du chèque énergie.

Je tiens cependant à attirer votre attention sur une disposition réglementaire que le Gouvernement n’entend pas prendre, mais qui nous paraît nécessaire. Il s’agit de l’installation d’équipements de contrôle et de gestion active de l’énergie. Le Gouvernement et le Sénat sont en désaccord et portent des appréciations différentes sur ce sujet, dont nous parlerons ultérieurement.

La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt est applicable à 70 %. Un certain nombre de dispositions ont été prises. Néanmoins, les mesures relatives à la protection des espaces naturels, agricoles et forestiers et au renouvellement des générations en agriculture ont fait l’objet d’une mise en application assez incomplète : les dispositions sur le registre agricole ne sont toujours pas applicables, de même qu’un certain nombre d’autres dispositions, dont il sera fait mention dans un rapport ultérieur.

Je voudrais réserver quelques instants, monsieur le président, à un sujet périphérique mais important, à savoir l’usage des circulaires.

Sur le terrain, dans nos territoires, les agents des services déconcentrés n’appliquent ni les lois, ni les décrets, ni les arrêtés : ils appliquent les circulaires. Nous devons donc vérifier que celles-ci sont conformes non seulement à l’esprit mais aussi à la lettre des lois que nous votons et des décrets que prend le Gouvernement. Pour illustrer ce propos, les exemples ne manquent pas, mais le temps me fait défaut pour les énumérer. Il y a là un phénomène auquel le Sénat doit être extrêmement attentif, s’il veut contrôler totalement l’application des lois.

M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

M. Christian Cambon, vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme vous le savez, l’essentiel de l’activité législative de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées consiste en l’examen de projets de loi autorisant la ratification des traités internationaux, qui ne demandent pas de mesures d’application.

Même si ces projets de loi ne sont pas pris en compte dans le contrôle de la mise en application des lois, je vous informe toutefois qu’au cours de la session parlementaire 2014-2015, le Sénat a adopté 38 conventions et accords internationaux relevant de la compétence de la commission, contre 22 au cours de la session précédente, soit une augmentation de 72 %.

Cette nette augmentation est le fruit d’une politique volontariste, menée en concertation avec le Gouvernement, dans la lignée du rapport Plagnol, de résorption de la fameuse « bosse » des conventions internationales en souffrance d’examen parlementaire, parfois depuis de longues années, qui discrédite la signature de la France en tant que partenaire international.

La commission a en effet mis en œuvre une nouvelle méthode d’examen dite « synthétique », lorsque le Sénat est saisi après l’Assemblée nationale d’un traité. Cette méthode porte ses fruits, et je profite de l’occasion qui m’est donnée pour remercier nos collègues rapporteurs de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées de s’être prêtés à cette expérimentation, laquelle sera pérennisée.

Les deux lois promulguées en 2014-2015 dans le secteur de compétence de la commission résultent de l’accroissement de la menace sur le territoire national et hors de nos frontières : c’est la loi relative au renforcement de la protection des installations civiles abritant des matières nucléaires et la loi actualisant la programmation militaire, deux textes importants, à l’évidence.

Notre commission s’est également saisie pour avis de la loi de juillet 2015 relative au renseignement, son président, Jean-Pierre Raffarin, ayant également présidé la délégation au renseignement en 2015.

Fort logiquement, et fort heureusement, à la date du 31 mars 2016, ces lois sont presque totalement applicables.

C’est en particulier le cas pour la loi sur les installations civiles nucléaires, qui a été rendue applicable en moins de six mois, avec la publication de l’unique décret attendu. De même, les deux lois de programmation militaire de 2013 et 2015 sont quasiment totalement applicables : sur 20 mesures réglementaires, il ne manque actuellement qu’un seul arrêté pour celle de 2013 ; pour celle de 2015, c’est un peu moins bien, puisqu’il manque encore 3 mesures d’application sur 5.

La commission en conclut qu’en présence d’une volonté politique forte, le travail réglementaire se fait. Sur ces sujets, le Sénat a soutenu le Gouvernement en votant largement ces textes, et ce dans des délais d’examen brefs. Nous nous félicitons donc que l’impulsion ne se soit pas arrêtée à la porte du Parlement et qu’elle se soit diffusée au sein des services de l’administration.

Quand on veut, on peut, même s’il reste encore un petit effort à faire.

En effet, parmi les lois adoptées au cours des sessions antérieures, la loi du 28 juillet 2011 tendant à faciliter l'utilisation des réserves militaires et civiles en cas de crise majeure est enfin devenue totalement applicable, avec la publication, très attendue, du décret en Conseil d’État du 7 mai 2015, qui a précisé les modalités d’utilisation des réserves civiles et militaires dans le cadre du dispositif de réserve de sécurité nationale.

Pour autant, ce sujet connaît une nouvelle actualité, depuis les déclarations du Président de la République sur la « Garde nationale » au Congrès, le 16 novembre 2015. Nous risquons donc de voir ce chantier rouvert, alors que nous venons à peine de le clore.

S’agissant du dépôt des rapports demandés par le Parlement, notre commission n’est pas totalement satisfaite. Comme le fait remarquer Claude Bérit-Débat dans son rapport, nos remarques sur les transmissions tardives ou lacunaires de rapports sont toujours un peu incantatoires. Aussi, je me contenterai de vous faire part du principal regret de notre commission, qui est de ne pas avoir encore reçu le bilan annuel politique, opérationnel et financier des opérations extérieures en cours, prévu à l’article 4 de la loi de programmation militaire.

Sur les 4 rapports prévus par ce texte, c’est le seul qui n’ait pas encore été déposé, or c’est l’un de ceux qui revêtent le plus grand intérêt. La commission a donc décidé de faire elle-même son propre bilan des OPEX ; c’est l’objet d’une mission qu’elle a confiée à nos collègues Jacques Gautier et Daniel Reiner.

À l’inverse, nous souhaitons souligner que le Gouvernement a déposé – avec quand même deux mois de retard ! – le rapport sur les missions des forces armées sur le territoire national en protection des populations. Ce rapport a été jugé insuffisant par notre commission sur le plan de la doctrine d’emploi des forces, mais il a toutefois permis un échange fructueux avec le Gouvernement à l’occasion d’une déclaration suivie d’un débat en séance publique.

La commission s’était auparavant rendue sur le terrain, auprès des soldats de l’opération Sentinelle, pour préparer ce débat. Notre critique constructive, notamment sur le caractère trop statique des gardes ou l’insuffisante autonomie par rapport aux forces de sécurité intérieure, a conduit à des modifications du dispositif. C’est encore insuffisant, certes, mais nous considérons qu’il s’agit d’un bon début. Il y a donc bien des rapports utiles, qui sont lus, débattus, et qui sont même suivis d’effets…

En conclusion, monsieur le président, sous les réserves évoquées, notre commission dresse un bilan globalement positif de l’application des lois relevant de son secteur de compétence pour la session 2014-2015.

M. le président. Je vous remercie, monsieur Cambon. Votre « même » est révélateur, … mais de bonheur ! (Sourires.)

La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, pour la commission des affaires sociales, le bilan de l’application des lois porte cette année sur un nombre de textes assez réduit. En effet, plusieurs lois examinées par la commission en 2014-2015 étaient d’application directe, tandis que d’autres ont vu leur discussion se poursuivre sur la session suivante.

Pour les lois entrant dans le périmètre de ce bilan annuel, 144 mesures d’application étaient attendues. Au 31 mars 2016, 97 étaient intervenues, soit un taux de 67 %. C’est moins satisfaisant que l’an dernier, où nous avions atteint un taux de 78 % sur un nombre beaucoup plus important de 265 mesures attendues.

Je voudrais tout de suite tempérer cette appréciation, car, depuis le 31 mars, plusieurs textes attendus ont été publiés et le taux de mise en application a donc sensiblement progressé.

S’agissant de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, le décret instaurant, pour les hôpitaux de proximité, un financement mixte combinant la tarification à l’activité et une dotation forfaitaire, a paru voilà quinze jours. Nous nous en félicitons, car il s’agissait d’une proposition de la Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale du Sénat, formulée dans son rapport sur la T2A… en 2012 !

En revanche, nous regrettons que plusieurs dispositions censées renforcer l’efficience des prises en charge par l’assurance maladie demeurent non appliquées. C’est le cas, par exemple, des dotations pour l’amélioration de la qualité des soins dans les établissements de santé ou de la régulation de l’offre de taxis conventionnés pour le transport des patients.

De même, le Sénat avait prévu une procédure d’achat groupé de vaccins au profit des établissements de santé et des centres de vaccination relevant des collectivités locales. Nous regrettons, là aussi, l’absence de décret d’application.

S’agissant de la loi relative au dialogue social et à l’emploi, dite loi Rebsamen, 52 % seulement des mesures attendues étaient prises au 31 mars. Le retard a en partie été comblé ces derniers mois avec la parution de plusieurs textes, qui porte désormais à 75 % le taux de mise en application.

Parmi les mesures en attente figurent celles qui permettent la conclusion d’accords collectifs dans les entreprises dépourvues de représentation syndicale, prévue à l’article 21, et le décret d’application de l’article 26 sur les services de santé au travail. Il est vrai que, sur ces deux sujets, le droit n’est pas stabilisé, puisque nous en discutons de nouveau dans le cadre du projet de loi « Travail ».

De manière générale, l’intervention en fin de législature d’un texte touchant à de multiples aspects du droit du travail conduit à revenir sur des mesures de lois antérieures avant même qu’elles aient pu pleinement entrer en application. Cela ne peut qu’alimenter une critique régulièrement formulée, en droit du travail notamment, sur l’instabilité de la législation française.

Notre commission a par ailleurs été chargée du suivi de la mise en œuvre du volet social de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, soit près de 80 articles sur les 308 que contient cette loi. Dans le champ des affaires sociales, 77 % des mesures attendues étaient intervenues fin mars. Ce taux s’est lui aussi amélioré depuis, avec la parution de nouveaux textes.

Nous constatons que ce texte, promulgué voilà dix mois, a fait l’objet d’un effort tout particulier pour permettre une mise en œuvre effective dans des délais plus rapides que ceux auxquels nous sommes habitués. Peut-être faudrait-il s’inspirer du dispositif mis en place pour que ce qui nous paraît aujourd’hui exceptionnel devienne, demain, habituel.

J’en viens aux lois antérieures à octobre 2014.

Le décret permettant l’application de la loi du 6 décembre 2013 autorisant l’expérimentation des maisons de naissance, issue de la proposition de loi déposée au Sénat par Muguette Dini, est enfin intervenu. L’arrêté fixant la liste des neuf maisons de naissance autorisées à fonctionner de manière expérimentale a été publié moins de deux semaines avant le terme fixé par la loi pour lancer l’expérimentation.

De même a été publié au Journal officiel, il y a quinze jours, l’arrêté imposant une teneur maximale en sucres ajoutés aux produits exclusivement distribués outre-mer, texte prévu par la loi du 3 juin 2013 visant à garantir la qualité de l'offre alimentaire en outre-mer. Notre collègue Michel Vergoz, rapporteur du texte, était vivement intervenu à ce sujet en commission le mois dernier. La question est désormais réglée, mais nous comprenons mal ce qui justifie un tel retard.

Pour conclure, il me paraît utile de souligner le réel effort réalisé sur une grande majorité de lois pour publier les textes d’application dans des délais relativement raisonnables, mais il y en a encore à faire pour permettre l’application rapide des décisions politiques.

Songez, monsieur le secrétaire, mes chers collègues, que trois mois seulement se sont écoulés entre le dépôt du projet de loi Rebsamen sur le dialogue social et son adoption définitive par le Parlement, mais que la moitié seulement des décrets d’application avaient été pris huit mois plus tard : ce n’est donc pas toujours la procédure parlementaire qui s’avère la plus longue et la plus problématique !

Il y a donc encore des efforts collectifs à consentir pour permettre l’application rapide des décisions politiques !

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au cours de cette session, 4 lois ont été promulguées dans les secteurs de compétence de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.

Il s’agit de la loi n° 2014-1663 du 30 décembre 2014 habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer dans le droit interne le respect des principes du code mondial antidopage ; de la loi n° 2015-195 du 20 février 2015 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de la propriété littéraire et artistique et du patrimoine culturel, dite loi DDADUE ; de la loi n° 2015-433 du 17 avril 2015 portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse ; enfin, de la loi n° 2015-737 du 25 juin 2015 portant transformation de l’université des Antilles et de la Guyane en université des Antilles, ratifiant diverses ordonnances relatives à l’enseignement supérieur et à la recherche et portant diverses dispositions relatives à l’enseignement supérieur.

Sur un plan strictement quantitatif, on notera que la liste des lois promulguées dans les secteurs de compétence de la commission de la culture traduit une stabilité de son activité législative.

Sur ces quatre lois promulguées, une est issue d’une proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale par M. Bruno Le Roux et plusieurs de ses collègues : la loi relative à la modernisation du secteur de la presse.

Par ailleurs, deux de ces lois sont d’application directe : il s’agit de la loi sur le code mondial antidopage et de celle sur l’université des Antilles et de la Guyane.

En revanche, les deux autres nécessitaient des décrets d’application. Aujourd’hui, la loi relative à la modernisation du secteur de la presse est partiellement applicable, 2 décrets sur 3 ayant été pris, tandis que la loi DDADUE est devenue totalement applicable, le seul décret nécessaire pour mettre en application 3 dispositions ayant été publié.

Quelles conclusions pouvons-nous tirer de ces observations ?

Le constat effectué les années précédentes se confirme : le choix de la procédure accélérée est sans incidence sur le rythme de parution des mesures d’application de la loi. J’insiste sur ce point, monsieur le secrétaire d’État, tout en vous faisant remarquer que, sur cette session, toutes les lois promulguées ont fait l’objet d’une procédure accélérée…

Le contrôle de la parution des textes d’application renvoie évidemment à la question des délais, qui a déjà été évoquée par les précédents orateurs.

À cet égard, nous notons également que des efforts ont été accomplis par les gouvernements successifs. Le délai de parution des décrets d’application pris au cours de la période s’étendant du 1er octobre 2014 au 31 mars 2016, pour les lois promulguées au cours de l’année parlementaire, était inférieur à trois mois dans la moitié des cas. Par ailleurs, je vous rappelle qu’un projet de loi s’accompagne désormais d’un calendrier de parution des mesures d’application, ce qui nous satisfait tout particulièrement.

Pour terminer ce panorama du contrôle, je ferai quelques remarques sur les rapports demandés au Gouvernement dans les lois. Leur dépôt s’effectue le plus souvent en retard, et les gouvernements successifs ne manifestent que peu de volonté ou de motivation à leur égard. En outre, si 14 rapports sont parus au cours de la session 2014-2015, le nombre de rapports en attente de parution demeure particulièrement élevé : 36 rapports manquent depuis 2000.

Enfin, la plupart des textes attendus pour l’application des grandes lois votées depuis le début de la législature dans le domaine de compétence de notre commission sont désormais parus, et nous pouvons en être satisfaits.

Deux lois promulguées au cours de précédentes sessions sont entrées totalement en application au cours de l’année parlementaire 2014-2015 : il s’agit de la loi relative à l’indépendance de l’audiovisuel public, dont le dernier décret d’application est paru en avril 2015, et de la loi relative à la refondation de l’école, dont les deux derniers textes d’application attendus sont parus au cours de la session – l’arrêté du 3 novembre 2015 sur la périodicité et le contenu des visites médicales et de dépistage obligatoires et le décret du 31 décembre 2015 relatif à l’évaluation des acquis scolaires des élèves et au livret scolaire, à l’école et au collège.

En revanche, le bilan d’application des lois anciennes reste très mitigé : les décrets parus pour la période de référence ne concernent jamais, ou à de rares exceptions près, les lois promulguées lors des législatures antérieures.

Tel est, mes chers collègues, le bilan que fait notre commission de l’application des lois sur la session 2014-2015.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le bilan de l’application des lois suivies par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable fait, lui aussi, apparaître les grandes tendances mises en avant par les autres commissions permanentes du Sénat : une amélioration dans la mise en application des lois, avec une progression de la plupart des indicateurs qui permettent d’en rendre compte ; un délai moyen devenu plus raisonnable pour la parution des décrets d’application, et un point noir, déjà souligné, à savoir le taux nettement insuffisant de remise des rapports demandés par le Parlement au Gouvernement.

Cette année, nous avons plus particulièrement relevé trois points positifs.

La loi du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur, seule loi relevant de notre compétence promulguée cette année, a été entièrement et rapidement appliquée par le Gouvernement. C’était nécessaire, et nous nous en félicitons.

Autre motif de satisfaction : l’amélioration du taux d’application des lois plus anciennes suivies par la commission, grâce à la publication de 18 décrets en Conseil d’État, de 8 décrets simples, de 16 arrêtés et d’une ordonnance.

C’est nettement plus satisfaisant que l’an dernier, où nous n’avions relevé que 15 mesures d’application.

Enfin, mais c’est la moindre des choses, aucune des lois suivies par notre commission depuis dix ans n’est aujourd’hui totalement inapplicable : chacune d’elles a fait l’objet d’au moins une mesure réglementaire d’application.

Voilà pour les points positifs, mais, comme les années précédentes, plusieurs motifs d’insatisfaction demeurent. J’en développerai deux.

Tout d’abord, près du tiers des lois relevant des domaines de compétence de la commission attendent encore une ou plusieurs mesures d’application. Sur les 36 lois suivies dans le cadre de notre bilan, 10 ne sont encore que partiellement applicables, et la moitié d’entre elles seulement ont fait l’objet d’une nouvelle mesure d’application au cours de la période. C’est évidemment insuffisant !

De même, nous déplorons, cette année encore, la lenteur de remise des rapports demandés au Gouvernement : au cours de l’année parlementaire 2014-2015, seuls 3 rapports intéressant notre commission ont été déposés au Sénat.

Pour illustrer cette lenteur, je vous rappelle que le rapport sur les impacts de l’autorisation de circulation des poids lourds de 44 tonnes, daté de mai 2015 par ses auteurs, n’a été reçu à la commission que le 9 mars 2016, alors que la loi exigeait sa remise avant le 31 décembre 2014 !

Avant de terminer mon propos, je voudrais insister sur quelques textes emblématiques suivis par notre commission. Je réserverai néanmoins pour le débat prévu à la suite de celui-ci mes commentaires sur la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, d’autant que Jean-Claude Lenoir en a parlé.

Je souhaiterais insister sur la loi du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur. La publication de l’ensemble des mesures réglementaires attendues a été effectuée rapidement, ce qui a rendu ce texte totalement applicable. C’est un point positif !

Nous avons même eu la satisfaction d’obtenir le rapport qui avait été demandé, mais, malheureusement, celui-ci ne comporte pas tous les éléments que nous avions souhaités à l’article 3 : il manque des éléments sur l’évolution de l’offre de taxis dans les métropoles et des propositions de pistes de réforme concernant la procédure de délivrance des autorisations.

Ensuite, j’aborderai la loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire. Si la quasi-totalité des textes réglementaires d’application ont été pris, il reste encore trois dispositions importantes et sensibles à mettre en œuvre.

En premier lieu, et c’est malheureusement d’actualité, nous attendons toujours le « décret-socle » inscrit à l’article 17, qui doit fixer les règles relatives à la durée du travail dans les entreprises ferroviaires et d’infrastructures. Un projet de décret a été transmis au Conseil d’État au mois de mars, et sa version définitive doit impérativement être publiée avant le 1er juillet, date à laquelle le régime de travail actuel deviendra caduc.

Il y a donc urgence !

Au-delà des textes réglementaires d’application, il faut également signaler le retard pris dans la conclusion des contrats-cadres devant être signés entre l’État, d’une part, et les trois établissements publics industriels et commerciaux du groupe public ferroviaire, d’autre part.

Or ces contrats de performance sont déterminants pour que l’État exerce effectivement son rôle d’État stratège et que la trajectoire financière de ces EPIC, en particulier celle de SNCF Réseau, soit davantage maîtrisée et prévisible.

Ces contrats ne seront vraisemblablement pas conclus avant l’année 2017. Ils doivent en effet être précédés d’un rapport stratégique d’orientation, dont le Haut Comité du système de transport ferroviaire n’a toujours pas été destinataire…

Je terminerai en évoquant la loi du 17 décembre 2009 relative la lutte contre la fracture numérique, qui reste emblématique du non-respect de la volonté du législateur. En effet, son taux d’application n’évolue malheureusement pas. Le décret devant fixer les critères d’attribution des aides du Fonds d’aménagement numérique des territoires et l’alimentation de ce fonds n’a toujours pas été pris et ne le sera vraisemblablement jamais, le Gouvernement ayant fait le choix de mettre en place un autre dispositif, à travers un fonds national pour la société numérique.

Je ne peux que regretter ce choix, qui marque une intention délibérée des gouvernements successifs de ne pas respecter la volonté du législateur en la matière.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des finances.

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je commencerai en évoquant à mon tour quelques chiffres.

Sur les 106 mesures attendues, 83 sont parues, soit 80 %, mais seulement 40 % ont été prises dans le délai réglementaire de six mois. Les lois de finances sont toujours votées dans des délais très brefs ; il est dommage que les mesures d’application ne soient pas soumises à un calendrier aussi serré.

Nous contrôlons l’application des lois votées par le Parlement, mais la législation financière se fait de plus en plus par ordonnance, en particulier lorsqu’il s’agit de transposer des directives.

J’ai constaté que, si 8 projets de loi ont été déposés pour ratifier les 10 ordonnances prises sur le fondement des habilitations données par la loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne du mois de décembre 2014, aucune ordonnance n’a été ratifiée à ce jour. L’une d’entre elles le sera bientôt ; c’est celle qui transpose en droit français tout le dispositif de l’Union bancaire, du mécanisme de résolution unique et de la garantie des dépôts. La procédure retenue a été celle d’un amendement déposé par le Gouvernement au projet de loi « Sapin II ».

Nous contrôlons aussi la remise des rapports demandés au Gouvernement. Je voudrais le rappeler, si les parlementaires demandent des rapports, ce n’est pas toujours pour le plaisir ou pour contourner l’article 40 ; c’est parce qu’ils considèrent que les lois ou les politiques publiques doivent faire l’objet d’évaluations, afin, au besoin, d’être améliorées.

La commission des finances travaille beaucoup cette année sur les questions de fraude, d’évasion ou d’optimisation fiscales internationales. Le projet de loi « Sapin II », que nous examinerons bientôt, nous amènera à poursuivre notre effort, puisqu’il comporte des dispositions transposant dans notre droit interne des recommandations du projet BEPS, pour Base Erosion and Profit Shifting, de l’OCDE.

À cet égard, il nous aurait été particulièrement utile de bénéficier depuis le début de l’année des deux annexes au projet de loi de finances relatives, pour l’une, au fonctionnement de notre réseau de conventions fiscales et, pour l’autre, à la mise en œuvre par l’administration fiscale des divers outils permettant de lutter contre l’évasion fiscale des multinationales. Nous avons interrogé publiquement le ministre du budget et des représentants de l’administration fiscale, qui nous ont promis ces documents dans les meilleurs délais. Nous attendons encore…

À l’inverse, il arrive que des rapports fournissent des informations utiles au travail législatif. La loi du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance vie en déshérence prévoyait, à la demande du Sénat, la remise d’un rapport au mois de mai 2016. Une lecture attentive de ce document nous a permis, à M. le rapporteur général et à moi-même, d’identifier des difficultés dans la mise en œuvre de cette loi ; certaines ne pourront être résolues que par de nouvelles modifications législatives.

Ainsi, le montant cumulé des contrats collectifs de retraite non réglés après la cessation d’activité du bénéficiaire est particulièrement élevé, jusqu’à 7 milliards d’euros selon les estimations de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’ACPR. Cela montre que le phénomène a été fortement sous-estimé jusqu’à aujourd’hui.

Je conclurai en constatant, de manière assez banale, que l’absence de publication des mesures réglementaires peut porter préjudice à la mise en œuvre de réformes attendues.

À trois jours du début de l’Euro, je prendrai l’exemple de l’article 67 de la loi du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, qui a réformé la taxe de séjour, et à la suite duquel un décret a prévu la publication, le 1er juin et le 31 décembre, d’un fichier informatique reprenant les informations relatives à la taxe de séjour dans toutes les communes l’ayant instaurée.

Il s’agit notamment de permettre aux plateformes de type Airbnb, qui peuvent désormais collecter la taxe de séjour pour le compte des logeurs, de mettre en place ce système de manière simple pour chaque commune, sans avoir à se procurer toutes les délibérations une à une. Aujourd’hui, Airbnb ne collecte la taxe de séjour qu’à Paris et à Chamonix ! Les modalités de ce fichier doivent être précisées par un arrêté… qui n’est toujours pas paru.

Par conséquent, les communes ne bénéficieront pas autant qu’elles l’auraient pu des recettes liées à l’organisation de l’Euro 2016. Afin de limiter les inconvénients d’une telle situation, le ministère de l’intérieur a toutefois mis en ligne les délibérations scannées des communes qui les ont transmises.

Telles sont les quelques observations que je voulais formuler. Je remercie particulièrement M. le président du Sénat et M. le président Claude Bérit-Débat de leur investissement en faveur de la bonne application des mesures votées par le Parlement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, commission dont l’intitulé démontre bien l’ampleur des missions. (Sourires.)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer le rapport très instructif de M. le président de la délégation du Bureau, Claude Bérit-Débat ; son exhaustivité me permettra de faire preuve de concision, puisque je n’ai pas besoin de revenir sur le détail de tous les textes.

Au vu du bilan que nous avons établi au sein de la commission des lois, il reste à mes yeux de très importantes marges de progrès pour assurer la bonne application des lois.

Certes, nous avons déjà enregistré des progrès. Mais l’objectif annoncé depuis 2012 d’un taux d’application des lois de 100 % six mois après leur promulgation est loin d’être atteint. En 2014-2015, 75 % des mesures réglementaires prévues ont été prises. C’est la vieille histoire du verre aux trois quarts plein ou au quart vide. Il reste tout de même un quart des mesures à prendre, ce qui est beaucoup trop.

Au demeurant, cette proportion doit être fortement nuancée. D’abord, la dimension qualitative des mesures prises est évidemment plus difficile à évaluer. Ensuite, il y a un certain nombre de mesures « secondaires ». Surtout, six mois après la fin de la session, des mesures ne sont toujours pas prises.

Il faut noter que le recours à la procédure accélérée s’est particulièrement intensifié cette année ; il serait d’ailleurs intéressant d’analyser le rapport entre le recours à cette procédure et la vitesse d’application des textes…

L’usage de la procédure accélérée était moins fréquent lors des deux sessions précédentes ; il est nettement reparti à la hausse dans la période récente. Près de 80 % des textes promulgués au cours de la session sont concernés. Cela représente en réalité 91 % des projets de loi et, fait à souligner, également 57 % des propositions de loi.

Certes, on peut comprendre que le recours à cette procédure puisse parfois se justifier par l’urgence qu’il y a à légiférer. Mais force est de constater que son utilisation est désormais devenue quasi systématique. Je souligne le contraste qui existe parfois entre le bref délai laissé au législateur pour légiférer et la célérité moindre du Gouvernement pour appliquer les textes ainsi votés…

Je centrerai mon propos sur plusieurs points importants.

D’abord, la loi du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures couvre un vaste éventail de sujets en matière de droit civil et de procédure pénale. Les dispositions réglementaires requises pour son application sont peu nombreuses. Mais nous pouvons constater que l’administration n’a aucune hâte à appliquer les lois de simplification… Plusieurs dispositions de cette loi avaient été jugées inapplicables par le Sénat ; il se trouve qu’elles n’ont pas été appliquées.

Dès lors, on peut se dire que les difficultés d’application devraient rétroagir sur notre manière de légiférer et qu’il y aurait parfois intérêt à être plus attentif aux mises en garde des rapporteurs du Sénat.

Je pense notamment à la réforme de l’enseignement des auto-écoles. Nous avions souligné qu’il n’y avait pas de pertinence à faire former des candidats au permis de conduire par des maîtres n’ayant pas eux-mêmes achevé leur formation. Nous n’avons pas réussi à trouver la disposition d’application de cette nouvelle règle.

Idem pour la création du tribunal foncier en Polynésie française. Nous nous demandions comment le représentant du Gouvernement de la Polynésie française pourrait intervenir dans chaque affaire de terres. Pour l’instant, il n’intervient dans aucune, puisqu’on n’a pas réussi à prendre le décret d’application.

Je souhaite également évoquer la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement. La comparaison entre le temps parlementaire et le temps exécutif n’est pas à la faveur de ce dernier. Pour l’application de cette loi, la parution des textes réglementaires a été beaucoup plus lente que la cadence à laquelle nous avons dû conduire le débat législatif. Heureusement, pratiquement tous les décrets sont publiés aujourd'hui.

Je terminerai en évoquant les aspects qualitatifs. Parfois, une dynamique d’application des lois se crée en s’écartant des objectifs du législateur, non pas à partir de textes réglementaires, mais du fait d’une doctrine d’application mise en œuvre par les préfets.

C’est notamment le cas pour l’application des dispositions relatives aux intercommunalités de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République. Les arrêtés de périmètre prévoient en zone rurale le regroupement de plus de 50 ou 100 communes, voire plus, alors que la loi n’a prévu aucun instrument juridique pertinent pour permettre le bon fonctionnement de telles intercommunalités. Résultat : le législateur devra de nouveau intervenir pour apporter des solutions indispensables à ces difficultés ; l’enjeu est essentiel pour la démocratie locale.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires européennes.

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. Monsieur le président, il est important que la commission des affaires européennes puisse s’exprimer dans ce débat ; je vous remercie de l’avoir permis.

L’attachement traditionnel du Sénat au suivi de ses travaux législatifs se retrouve aussi en matière européenne. Nos collègues y sont légitimement très attachés.

Le 3 mars dernier, la commission a ainsi adopté un rapport d’information qui fait le point sur les différentes positions européennes de notre Haute Assemblée. Ce débat requiert toutefois que je concentre mon propos sur les résolutions européennes adoptées sur le fondement de l’article 88-4 de la Constitution et adressées au Gouvernement.

Entre le 1er octobre 2014 et le 11 février dernier, le Sénat a adopté 17 résolutions européennes, dont 10 sont issues d’une proposition de résolution de notre commission, et 7 d’une initiative d’un ou plusieurs de nos collègues ; 7 ont donné lieu à un rapport d’information de notre commission, et 10 à un rapport d’une commission législative ; 3 ont été l’occasion d’un débat en séance publique.

Les modalités de suivi des positions européennes du Sénat recouvrent une variété de méthodes.

Il y a d’abord les fiches de suivi établies par le Secrétariat général des affaires européennes, ou SGAE. Elles sont le plus souvent, je dois le dire, très complètes et de grande qualité ; mais elles sont généralement communiquées trop tardivement. Cela ne permet pas d’en tirer le meilleur parti. Surtout, et en dépit de nos critiques passées à cet égard, ces fiches continuent de ne concerner que des résolutions portant exclusivement sur des actes européens de nature législative. Elles laissent ainsi de côté d’autres résolutions, pourtant significatives, comme celles sur la réforme de la gouvernance de l’Internet, la lutte contre le terrorisme ou l’union des marchés de capitaux.

Mais il existe d’autres modalités de suivi, en particulier lorsque le sujet est d’une grande importance. Je pense par exemple au groupe de travail sur les négociations du traité transatlantique ou aux communications que nous présentent nos rapporteurs sur les évolutions intervenues sur tel ou tel texte à Bruxelles. Notre commission s’est livrée à cet exercice à six reprises depuis le 1er octobre 2014, y compris en présence du rapporteur du Parlement européen.

Le rapport démontre que les résolutions européennes du Sénat ont des conséquences directes sur les négociations conduisant à l’élaboration de la législation européenne et, par conséquent, du fait de la transposition des directives, sur la législation française.

Nos résolutions constituent un instrument efficace dans l’établissement d’un véritable dialogue avec le pouvoir exécutif. De fait, les positions arrêtées par le Sénat ne restent pas lettre morte.

En fonction des suites qu’elles ont reçues, les résolutions européennes du Sénat peuvent être classées en trois catégories.

Première catégorie, dans plus de la moitié des cas, nos résolutions ont été prises totalement ou très largement en compte au cours des négociations, voire dans le texte européen définitif. Je peux mentionner le règlement des différends dans le cadre du traité transatlantique, les médicaments vétérinaires, le PNR européen – cela nous a demandé beaucoup de temps, mais nous y sommes parvenus –, le plan Juncker, le paquet « Mieux légiférer », la pêche au bar, les conséquences du traité transatlantique pour l’agriculture et l’aménagement du territoire ou encore les importations de sucres, avec les enjeux afférents pour nos collectivités d’outre-mer.

Deuxième catégorie, dans près de 30 % des cas, les positions du Sénat ont été partiellement suivies, par exemple sur le paquet « déchets », sujet sur lequel notre collègue Michel Delebarre s’est particulièrement investi – vous devinez les implications pour les collectivités locales –, le programme de travail de la Commission pour 2015, la lutte contre le terrorisme, la stratégie européenne du numérique et le secteur laitier.

Troisième catégorie, le Sénat n’a pas obtenu satisfaction jusqu’à présent dans environ 20 % des cas. Trois sujets précisément nous interpellent : la gouvernance mondiale de l’Internet, l’expression des parlements nationaux lors du renouvellement de la Commission européenne et l’union des marchés de capitaux.

Vous le voyez, le bilan est très largement positif, le Sénat étant entendu dans 80 % des cas. Pourtant, le suivi de nos résolutions européennes pourrait être encore amélioré.

Le SGAE s’est montré ouvert à plusieurs propositions que je lui ai faites en ce sens. Il pourrait nous adresser ses fiches de suivi avec plus de régularité, afin qu’elles visent moins à dresser un bilan qu’à permettre un dialogue. Ces fiches pourraient aussi être établies non plus juste après l’accord politique sur un texte, ce qui en reporte l’échéance éventuellement fort loin, mais de manière intermédiaire, pour faire un point sur l’évolution des négociations.

Nous demandons depuis longtemps que ces fiches portent aussi sur des résolutions ne faisant pas l’objet d’un acte ; le SGAE a évoqué une telle avancée, notamment lorsque notre résolution concerne des négociations internationales.

De même, M. le secrétaire d’État aux affaires européennes m’a donné son accord pour faire le point régulièrement devant la commission. Il serait aussi très pertinent d’auditionner le ministre concerné en commun avec la commission permanente compétente, avant les réunions du Conseil abordant des questions ayant fait l’objet d’une résolution européenne.

Le message est donc passé auprès tant du SGAE que du secrétaire d’État aux affaires européennes ; il a été entendu.

Enfin, le suivi de nos résolutions doit également, me semble-t-il, permettre de faciliter le bon déroulement de la transposition des directives. L’an dernier, le Conseil d’État avait publié une étude intitulée Directives européennes : anticiper pour mieux transposer.

M. le président. Il va falloir conclure, mon cher collègue.

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. Ce document comporte des développements sur l’amélioration de l’information du Parlement tout au long de la négociation. Il était ainsi proposé de réunir une fois par semestre, au niveau politique, un comité de liaison pour échanger sur la programmation des travaux législatifs de transposition. Cela permettrait de faire le point sur les négociations en cours. Les rapporteurs des résolutions européennes auraient toute leur place dans cette enceinte et pourraient ainsi informer notre commission.

M. le président. Monsieur le président de la commission des affaires européennes, je salue cette première.

Dans la suite du débat, la parole est à M. Yvon Collin, pour le groupe du rassemblement démocratique, social et européen.

M. Yvon Collin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme chaque année depuis 1971, le débat consacré au bilan d’application de la loi est aussi l’occasion pour nous de réfléchir sur nos méthodes de travail.

Au-delà des aspects quantitatifs de la mise en œuvre, l’application de la loi est inextricablement liée à sa qualité ; personne ne le contestera.

Mieux légiférer, c’est un souci qui traverse toutes les institutions chargées de pouvoirs normatifs, y compris les institutions européennes. D’ailleurs, elles sont récemment parvenues à un accord interinstitutionnel à cet égard.

La défiance qui anime de nombreux citoyens est un motif supplémentaire pour conduire une réflexion approfondie sur notre capacité à légiférer, si possible à bon escient – chacun sait que les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires –, puis à faire appliquer des normes dans des délais raisonnables. Mais on se saurait confondre vitesse et précipitation.

Le contrôle de l’application des lois est absolument nécessaire pour le Parlement. À long terme, retarder l’entrée en vigueur de dispositions annoncées, donc attendues par les citoyens, contribue à affaiblir la loi et la parole publique. Il est donc impératif de poursuivre les efforts qui sont les nôtres dans l’usage de nos prérogatives de contrôle en la matière. Sans les textes d’applications qui s’imposent, une loi adoptée par le Parlement et promulguée par le président de la République risque de demeurer lettre morte.

En tant que parlementaires, nous disposons de peu de moyens juridiques pour lutter contre les retards de publication de textes d’application. Mais il est positif de constater la multiplication de comités de suivi destinés à surveiller les effets d’un texte après son adoption.

Certaines dispositions méritent, en effet, une vigilance particulière en raison de la menace qu’elles présentent pour les libertés – c’est le cas de l’état d’urgence, monsieur le secrétaire d’État – ou de la complexité de leur exécution – la refondation de l’école, par exemple.

Le déficit d’information est également une problématique récurrente. Malgré nos précédentes mises en garde, nous ne pouvons que regretter que le taux de communication de rapports d’origine gouvernementale n’ait pas augmenté depuis la dernière session puisqu’il stagne autour de 60 %.

À première vue, selon les estimations de notre excellent rapporteur, l’augmentation du taux de parution des décrets d’application pris lors de la session parlementaire 2014-2015, qui porte à 80 % le taux de parution pour la XIVe législature, est une évolution réjouissante. La réduction à moins de six mois du délai moyen de parution des décrets d’application procède du même effort gouvernemental.

Toutefois, ces résultats cachent des disparités entre les textes et ne permettent pas, à eux seuls, d’apprécier la mise en œuvre effective des dispositions adoptées par le Parlement lors de cette législature.

Les auteurs du rapport annuel soulignent que le taux de publication des décrets d’application n’est pas un indicateur suffisant pour juger de l’opérabilité d’un dispositif. Il arrive en effet qu’une loi soit appliquée sans que les mesures d’application n’aient été prises. Dans d’autres cas, les mesures d’application sont décrétées, mais la mise en œuvre se heurte à des difficultés sur le terrain.

Paradoxalement, ces bons résultats quantitatifs interviennent à l’issue d’une session qui a été marquée par un phénomène que l’on pourrait qualifier de « densification législative ». Le nombre de lois examinées a diminué, mais leur taille moyenne a augmenté, tout comme la part des textes d’origine gouvernementale. Il s’agit de lois conçues comme des grands ensembles. Cela présente l’avantage de la cohérence : en embrassant l’ensemble des aspects du sujet, le législateur cherche à maîtriser toutes les conséquences des nouvelles dispositions. Cependant, lorsqu’elle est conjuguée à la procédure accélérée, cette pratique réduit considérablement les temps d’examen et d’amendement parlementaire, et le risque de la « loi fourre-tout » n’est jamais bien loin.

Au-delà de l’inflation législative qui en résulte, l’absence de deuxième lecture nous contraint à une très grande réactivité dans des délais particulièrement courts. Il est donc très décevant de constater que l’urgence qui justifiait la mise en œuvre de la procédure accélérée disparaît parfois au moment de la publication des mesures d’application de ces mêmes textes !

Au-delà de ces remarques générales sur l’évolution de l’examen et de l’application des lois, je voudrais également insister sur quelques dispositions plus précises.

À l’heure de leur application, certains textes semblent souffrir de leur gigantisme, sans que l’on puisse discerner clairement les causes réelles des retards de publication observés. On parle beaucoup de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, parue au Journal officiel il y a plus de deux ans, qui nécessite encore un très grand nombre de mesures d’application pour produire tous ses effets. Il ne s’agit cependant pas d’un cas isolé, puisque la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, promulguée en octobre 2014, connaît les mêmes difficultés de mise en œuvre.

Pour les thèmes qui ont accaparé l’actualité lors de la session précédente, les retards de publication de décrets d’application sont moindres, mais parfois préoccupants. S’agissant de la loi relative à la réforme du droit d’asile, parue il y a bientôt un an, plusieurs décrets en Conseil d’État se font toujours attendre pour permettre sa pleine application. De même, il est étonnant de constater que le décret relatif à la détermination des modalités et des conditions d’échanges d’informations entre les services de renseignement et les autres autorités administratives ne soit pas encore paru, alors que le Gouvernement justifie la prorogation de l’état d’urgence par la menace terroriste…

Enfin, les retards n’épargnent pas les décrets d’application de textes d’origine parlementaire, quand bien même ils concernent des dispositions très attendues par nos concitoyens. Il s’agit, par exemple, du décret simple visant à préciser les conditions d’intervention de l’inspecteur du travail lorsqu’il constate qu’un stagiaire occupe un poste en méconnaissance de dispositions du code du travail.

Logement, agriculture, réfugiés, sécurité, emploi : tous ces textes ont des implications très concrètes sur la vie des Français. Au nom du groupe du RDSE, je souhaite donc alerter le Gouvernement sur les retards constatés s’agissant des mesures d’application, retards que rien ne semble justifier, d’autant moins que les mesures sont souvent très attendues sur le terrain par les acteurs concernés.

M. le président. La parole est à M. Christian Favier, pour le groupe communiste républicain et citoyen.

M. Christian Favier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le débat de ce jour, devenu une tradition de notre assemblée, pourrait paraître routinier si nous devions nous limiter à l’examen de statistiques plus ou moins complètes sur l’application des lois. Mais la vérité commande de faire quelques remarques sur le processus de formation et de mise en œuvre de la loi dans notre pays.

Tout d’abord, il faut bien constater la réalité d’un nouvel alourdissement de la durée et de la densité des travaux parlementaires.

La session 2014-2015 a en effet été marquée par une nouvelle relance de la durée des séances publiques, avec 1 077 heures constatées. Nous avons ainsi connu 147 jours de séance, bien au-dessus des 120 jours « constitutionnels ».

L’activité a été également marquée par une véritable explosion du nombre des amendements déposés sur les différents textes examinés puisque ceux-ci sont passés de 11 856 sur la période 2013-2014 à 17 306 pour 2014-2015, soit une hausse de 46 %.

La matière législative à examiner le justifiait au demeurant pleinement, notamment pour ce qui concerne la loi NOTRe et la loi Macron.

Notons enfin que le rythme des travaux du Sénat au cours de la session actuelle ne s’est pas à proprement parler réellement ralenti, avec 714 heures de séance constatées avant l’examen, probablement chronophage, du projet de loi « Travail », et une, voire deux sessions extraordinaires qui devraient accroître encore l’intensité des travaux parlementaires.

Une autre observation que je souhaite relever, au-delà de toute considération de fond, porte sur le recours constant à la procédure d’habilitation.

Pas moins de 69 ordonnances ont été promulguées en 2015, soit bien plus que les 41 textes adoptés sur la période 2014-2015.

Ce recours renforcé à la procédure d’habilitation n’est pas sans poser de sérieux problèmes quant au sens que l’on entend donner au travail du législateur.

L’un des autres aspects formels est bien entendu le recours à la procédure accélérée, qui concerne l’essentiel des textes d’origine gouvernementale et se heurte bien souvent au principe de réalité.

Pour prendre l’exemple de la loi Macron, on rappellera que le texte fut déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale en décembre 2014 et a attendu le 6 août 2015 pour être promulgué. Le projet de loi était pourtant assorti de la déclaration de procédure accélérée.

Quant à la loi NOTRe, compte tenu de sa nature, elle a fait l’objet d’un dépôt sur le bureau du Sénat en juin 2014 et sa promulgation définitive, malgré la procédure accélérée, est intervenue le 7 août 2015. Une procédure accélérée qui dure quatorze mois, cela fait tout de même beaucoup !

Un tel phénomène interroge sur le sens que l’on donne aux mots et aux choses, notamment quand on présente en débat des textes comportant, dès l’origine, un nombre d’articles ou de dispositions si élevé qu’un temps significatif est nécessaire pour un examen digne de ce nom.

Le travers de ces textes touffus n’a manifestement pas été abandonné puisque le projet de loi « Travail » comporte, avant le passage en séance au Sénat, plus de 100 articles. On y trouve notamment ce fameux article 2 relatif à l’insécurité juridique des accords collectifs, qui comporte rien moins que 745 alinéas après son examen en commission. Par ailleurs, l’article 3, qui vise à remettre en cause les modalités de congé, compte lui 417 alinéas…

Cette manière de procéder ne nous semble pas présenter les garanties les plus solides quant à la qualité, à la lisibilité et à la compréhension de la loi !

Quoi qu’il en soit, à multiplier les textes complexes, on multiplie aussi les recours et donc les retards de traduction réglementaire, en raison de la publication nécessaire d’un plus grand nombre de décrets et arrêtés d’application.

Ainsi, dans le cas de la loi Macron, plus de 50 dispositions réglementaires diverses et 28 autres mesures dont pas moins de 10 ordonnances, certaines désormais frappées d’une habilitation obsolète, sont restées en souffrance.

Outre le fait que de nombreux rapports prévus par le texte concerné n’ont toujours pas été publiés, on relèvera l’absence de l’ordonnance relative à la création de l’établissement public prévu pour la réalisation du canal Seine-Nord-Europe, tandis que, parmi les dispositions réglementaires prévues, manquent encore des décrets comme celui pour prévenir la conduite d’autocar sous l’empire d’un état alcoolique, ainsi que la plupart des décrets concernant l’évolution de la profession notariale ou l’ensemble relatif au fonctionnement des conseils de prud’hommes.

Pour ce qui est de la loi NOTRe, si 23 dispositions réglementaires prévues ont été promulguées, 21 autres n’ont toujours pas été prises.

On relève ainsi que certaines mesures relatives au traitement et à la planification du traitement des déchets n’ont toujours pas été prises. Par ailleurs, on n’en sait pas plus sur le contenu des conventions régionales en matière de construction de logements sociaux.

Le fait que certaines dispositions réglementaires n’aient pas encore été prises peut fort bien provenir de l’opposition durable de certains secteurs professionnels à toute modification des règles en vigueur.

Vu le retard enregistré dans la transformation des professions dites « réglementées », il est évident que d’aucuns poursuivent le combat engagé avant la discussion de la loi, parfois d’ailleurs à juste titre.

Pour ce qui concerne la loi NOTRe, sa mise en œuvre s’est accompagnée d’une nouvelle élaboration des schémas départementaux de coopération intercommunale qui ont, de manière systématique, visé à réduire le nombre d’EPCI existants en vue d’assurer à quelques notables la haute main sur le devenir de territoires toujours plus vastes et bien souvent incohérents.

Cette recentralisation des responsabilités, ce renforcement des échelons régionaux et intercommunaux au détriment des niveaux départementaux et communaux risque, sur la durée, de coûter très cher à la République, noyée dans une nouvelle et coûteuse technocratie totalement coupée des citoyens.

La revivification de notre démocratie passe par un renforcement de la démocratie locale – nous ne sommes pas les seuls à le penser, je vous renvoie notamment aux propos de notre collègue Philippe Bas – et, pour tout dire, un nouveau texte décentralisateur et progressiste reste nécessaire.

Je ne suis pas certain que la loi NOTRe ait jamais répondu à cette définition, surtout accompagnée par des lois de finances grevées par l’austérité.

Il est donc temps, pour faire la loi dans notre pays, de retrouver la voie du dialogue, de l’échange et de la démocratie. Telles sont les remarques que souhaitait le groupe CRC à ce moment du débat.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour le groupe écologiste.

Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, nos collègues présidents de commission nous ont livré leurs diagnostics rigoureux et précis. Nous apprécions leur travail et le taux énoncé d’exécution. Néanmoins, si nous voulons que les urnes se remplissent et que les rues se vident, c’est aussi au niveau de ce que voient, de ce que vivent, de ce qu’entendent nos concitoyens qu’il nous faut évaluer l’application des lois votées.

Je souhaite donc, au nom du groupe écologiste, attirer votre attention sur des retards préjudiciables.

Le premier retard a été cité : c’est celui qui touche la programmation pluriannuelle de l’énergie. Cette programmation est tout à fait réalisable pour qui veut planifier la maîtrise de la demande et la diversification de la production dans le contexte des accords de Paris. Sa publication ferait cesser les errances médiatiques de certains opérateurs qui sont mus par d’autres intérêts.

Le deuxième, d’une tout autre échelle, concerne le décret d’autorisation d’utilisation et de commercialisation des préparations naturelles peu préoccupantes prévu dans la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt et publié plus d’un an et demi après la promulgation de loi.

Il n’y a pas de mauvaise volonté de la part de la direction générale de l’alimentation, la DGAL, ni effet de lobbying des firmes agrochimiques. Pourtant, malgré ce délai, le décret n’autorise que 100 substances sur 800, privilégiant celles déjà autorisées en pharmacologie humaine, c'est-à-dire les plantes médicinales du code de la santé, qui ne répondent pas aux besoins prioritaires des agriculteurs. Il en reste 700 à autoriser. Ce travail a été délégué à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, avec un an et demi de retard, qui elle-même mettra un certain temps dans son travail d’évaluation des centaines de substances en question.

Nous devons sortir de cet enlisement préjudiciable. Il a commencé par la bataille médiatique du purin d’ortie en septembre 2006. Les Français entendent le plan Écophyto du ministère de l’agriculture, ils approuvent l’objectif de réduire de 50 % les pesticides d’ici à 2018. Une part importante des agriculteurs, soit 40 %, est disposée à utiliser les nouvelles substances, mais ils notent l’extrême lenteur du processus d’autorisation et de diffusion de ces pratiques, et s’interrogent sur un tel symptôme de schizophrénie.

L’enjeu est aussi d’éviter que les entreprises de production des pesticides ne mettent la main sur les substances alternatives petit à petit, à coup de brevets, sur le biocontrôle. Le vinaigre, par exemple, s’est vu refuser son autorisation par l’EFSA, l’European Food Safety Authority, le temps qu’une firme s’assure le monopole de son autorisation de mise sur le marché !

Troisième inquiétude, aux termes de l’article 22 de la loi ALUR, « avant la fin de l’année 2014, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport évaluant le dispositif de défiscalisation prévu à l’article […] du code général des impôts, portant notamment sur le nombre de logements de chaque catégorie ayant bénéficié du dispositif ». Ce dispositif, c’est le « Censi-Bouvard », à savoir la défiscalisation des meublés locatifs pour les personnes âgées, les étudiants, les personnes en situation de handicap et pour le tourisme. Nous voudrions avoir l’assurance d’une juste répartition : elle ne saurait se faire au seul service du tourisme, et en premier lieu au bénéfice de quelques célèbres opérateurs du secteur, spécialistes de la bétonisation, des logements à fuite thermique et producteurs de lits froids jamais occupés.

Enfin, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, je tiens une fois de plus, jusqu’à ce que vous l’ayez bien mémorisé, à pointer du doigt la non-mise en application de la loi relative à l’indépendance de l’expertise en matière de santé et d’environnement et à la protection des lanceurs d’alerte, votée en 2013. Certes, les décrets ont été publiés, mais la commission nationale de déontologie, un outil pourtant essentiel, n’est pas installée, au motif que deux ministères, celui de l’agriculture et celui de la recherche – excusez du peu ! – n’ont toujours pas désigné leurs représentants !

Il est un peu facile d’enrayer ainsi la volonté du Parlement.

Alors que le Gouvernement, par la voix de Michel Sapin, ne manque aucune occasion de communiquer sur le thème populaire et porteur des lanceurs d’alerte, en coulisse, l’outil de contrôle de l’expertise des conflits d’intérêts, des registres d’alertes et du suivi de celles-ci en matière sanitaire et environnementale est bloqué par deux ministères. Le suivi de l’application des lois n’aura d’intérêt, monsieur le secrétaire d'État, que si demain sont mises en œuvre les mesures votées. Il y va de la remédiation au désamour des Français pour la classe politique !

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour le groupe de l'UDI-Union centriste.

M. Michel Canevet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mesdames, messieurs les présidents de commission, mes chers collègues, je souhaite tout d’abord féliciter, au nom du groupe UDI-Union centriste, le président de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire, du contrôle et des études, Claude Bérit-Débat, de la qualité de son rapport, qui nous permet de mieux appréhender la réalité de la situation législative dans notre pays.

Si nous percevons certains efforts réalisés par le Gouvernement, beaucoup de chemin reste à parcourir, comme de nombreux orateurs l’ont souligné avant moi, afin que nous arrivions à une production législative qui rejoigne l’attente de nos concitoyens.

À l’heure d’internet, au moment où le Journal officiel dans sa version papier a été supprimé, il est essentiel que nous puissions nous adapter aux attentes de la société. Cela implique notamment que le processus législatif puisse être plus rapide, en particulier une fois que la décision est prise.

Le groupe UDI-Union centriste se félicite aussi que, durant l’année législative écoulée, sur le nombre de textes ayant été validés, 43, soit un total inférieur à ceux des années législatives précédentes, 12 textes étaient d’initiative parlementaire. Il me semble que le Parlement doit prendre une part plus importante dans l’élaboration des lois, c’est son rôle. Il devrait peut-être y avoir moins de textes d’initiative gouvernementale. Cela permettrait sans doute d’améliorer la production législative.

J’ai en mémoire notre débat de la semaine passée sur le statut général des autorités administratives indépendantes issu du rapport élaboré par une commission d’enquête mis en place par le Sénat. Cette commission a produit un travail extrêmement intéressant pour organiser ces entités aujourd'hui importantes dans l’organisation administrative de la France. C’était nécessaire et nous pourrions aller beaucoup plus loin en ce sens.

Les décrets, les différents orateurs l’ont souligné, mettent un peu de temps à être publiés. Je sais bien que leur processus d’élaboration est long : il faut d’abord les rédiger, il faut ensuite se concerter, y compris en Conseil d’État. Cela étant, ces dernières années, la production des décrets d’application demandait neuf mois. À l’heure actuelle, il faut un peu plus de six mois. Il est important que l’on s’attache à respecter les termes de la circulaire de 2008 afin de gagner encore du temps, autant que faire se peut.

J’évoquerai aussi les questions de simplification. Il convient – j’ai bien entendu notre collègue du groupe CRC – de dire un mot du nombre d’amendements.

Tout d’abord, monsieur le président, nous nous réjouissons que le temps de débat ait été réorganisé dans notre hémicycle pour rendre nos échanges plus dynamiques. Il est important que tout le monde puisse s’exprimer. Le Sénat a réussi cette réforme, et je l’en félicite !

Le nombre d’amendements a en effet tendance à croître. Selon nous, chaque groupe doit faire un effort de rationalisation.

Je le dis aussi au groupe communiste républicain et citoyen : le nombre d’amendements déposés sur la loi Macron a retardé le débat. Je sais bien que celui-ci était important, tout comme le sera le débat sur le projet de loi « Travail ». Il serait bon, toutefois, que nous soyons plus efficaces en évitant de présenter des amendements redondants, ce qui permettrait d’améliorer la qualité du débat parlementaire.

Nous devons être attentifs également à ne pas surtransposer en permanence les directives. C’est un mal français que de toujours vouloir faire mieux que les autres à cet égard ! Ce faisant, nous pénalisons notre économie. Or, si nous connaissons aujourd’hui une situation économique particulièrement difficile, c’est bien parce que nous avons parfois tendance à nous imposer des règles que d’autres ne s’appliquent pas.

J’évoquerai aussi les ordonnances. La présidente de la commission des finances a rappelé que, sur les deux ordonnances qui concernaient notre commission, une seule avait été mise en application. Dès lors que le Parlement lui permet de légiférer par ordonnance, le Gouvernement doit profiter de cette possibilité pour gagner du temps.

Par ailleurs, le nombre de rapports demandés dépasse de beaucoup celui des rapports effectivement publiés, ce qui n’est pas logique. Nous avons l’habitude, au Sénat, de rejeter les demandes de nouveaux rapports, considérant qu’il conviendrait avant tout de satisfaire les demandes déjà formulées, étant observé que nombre de dispositions relatives aux rapports contribuent à alourdir les textes de loi, alors qu’elles n’ont parfois rien à y faire.

J’en viens enfin aux questions écrites au Gouvernement, dont le processus mérite d’être amélioré. Il est tout à fait anormal que le délai de réponse à ces questions ne cesse de s’allonger, jusqu’à atteindre aujourd’hui 203 jours !

Le rôle des parlementaires est aussi de contrôler l’action du Gouvernement, ce qui peut se faire par l’interpellation directe – mais le temps de parole est alors limité – ou via les questions écrites. Pourquoi le délai de réponse est-il si long ? Et que dire quand les réponses elles-mêmes sont inconséquentes ?

J’ai ainsi posé, voilà trois mois, une question au Gouvernement sur les conditions d’acquittement par une société de sa TVA. La réponse, que je me réjouissais de recevoir, a consisté à m’opposer le secret fiscal ! Je sais bien que le Gouvernement n’a pas l’obligation de transmettre des informations secrètes, mais il importe tout de même qu’il réponde clairement aux demandes des parlementaires, et non « à côté ». Il y va de la qualité du débat parlementaire et de la satisfaction des attentes du public.

En conclusion, j’espère que les efforts accomplis pour réduire le délai d’application des textes de loi seront poursuivis.

M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Alain Richard. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux, à mon tour, mettre en exergue l’utilité et la qualité de ce débat.

Le fait que nous nous réunissions dans cette formation, en salle Clemenceau, ne nuit pas à l’efficacité et à la vitalité de nos échanges. Je constate, en outre, que notre effectif d’aujourd’hui serait considéré comme très flatteur pour un débat dans l’hémicycle. Le degré d’attention du tour de table me paraît même légèrement supérieur à ce qu’il est lorsque nous siégeons sur les fauteuils en velours… (Sourires.) Il y a sans doute quelques conclusions à en tirer. Mais je vous prie de m’excuser pour ce propos impromptu !

Je mentionnerai quelques cas de mise en application de lois relatives à un domaine sur lequel nous sommes quelques-uns à nous être impliqués : la sécurité et la prévention de la criminalité. Tous ces textes, qui avaient été examinés selon la procédure accélérée – cela pouvait s’entendre, dans le contexte que nous connaissions –, ont été mis en application assez rapidement, dans l’ensemble.

Ainsi, la loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, présentée au Parlement en juillet 2014, a été définitivement adoptée le 4 novembre de la même année, soit quatre mois plus tard. Il est vrai que toutes les dispositions relevant du code pénal et du code de procédure pénale étaient d’application immédiate ; cela simplifie les choses. Mais étaient également prévues de substantielles modifications réglementaires du code de la sécurité intérieure, du code monétaire et financier pour ce qui concerne le financement du terrorisme, et du code des transports pour introduire de nouvelles mesures de contrôle : elles ont toutes été mises en œuvre, selon mes informations, dans un délai de huit à dix mois. C’est un résultat, sinon idéal, du moins satisfaisant.

De même, la loi relative au renseignement, qui a certes été examinée par les deux chambres selon la procédure accélérée, était en réalité en maturation bien avant et la concertation avec les parlementaires durait depuis des mois. Promulguée le 24 juillet 2015, elle est entrée en application un peu plus de deux mois plus tard, dans la mesure où il fallait que soit nommé, après avis des deux commissions des lois, le président de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, la CNCTR.

Nombre des dispositions de cette loi étaient, là encore, d’application immédiate. Pour ce qui concerne les autres dispositions, les décrets ont été publiés entre septembre 2015 et janvier 2016. Nous avons donc eu le sentiment que l’urgence était réelle, et réellement prise en compte par tous, face aux situations que nous connaissions.

Autre point dont la commission des lois a débattu : la réforme du droit d’asile, promulguée le 29 juillet 2015. Ce texte présente la particularité, du point de vue de l’application des lois, de nous mettre en conformité avec trois directives du « paquet asile », cette fois sans retard de transposition, les délais prévus dans notre engagement communautaire ayant été respectés. Au vu du sujet, c’était souhaitable ! Les différents partenaires législatifs ont donc joué le jeu. Les mesures d’application ont été prises, pour l’essentiel, dans les trois mois.

Nous devons nous rappeler pourquoi nous voulions tous que soit adoptée cette réforme du droit d’asile : la longueur excessive des délais d’examen des demandes du statut de réfugié avait pour effet indésirable le maintien indu sur le territoire de 70 % des demandeurs d’asile, c’est-à-dire de personnes ayant détourné, volontairement ou non, le droit d’asile.

Où en sommes-nous du rattrapage de ces délais ? L’objectif fixé par le ministre de l’intérieur de l’époque, qui est désormais Premier ministre, était la réduction en deçà de six mois de la durée d’examen des demandes d’asile. Cette diminution des délais est amorcée, mais elle est encore insuffisante.

Il faut évoquer, compte tenu du contexte auquel nous sommes confrontés, les lois successives sur l’état d’urgence, lesquelles ne prévoyaient aucune mesure d’application. Mais tous ceux qui ont participé à la commission de suivi de l’état d’urgence, sous la direction de son rapporteur, Michel Mercier, conviennent que le Gouvernement a fourni au Parlement des informations de terrain détaillées. Je ne vais d’ailleurs pas tarder à prendre congé de vous, car ce comité se réunit cet après-midi afin d’examiner de plus près les mesures prises pour assurer la sécurité des premières rencontres de l’Euro 2016 au Stade de France. Là aussi, la collaboration entre le Parlement et le Gouvernement a été bonne.

Je vais faire appel à un souvenir très ancien, celui d’une initiative parlementaire prise en coordination avec le Gouvernement : la loi du 6 mars 2012 relative à l’établissement d’un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif. Les dispositions de ce texte sont désormais complètement entrées en application. Il serait toutefois judicieux, monsieur le président de la commission des lois, que nous interrogions le ministère de l’intérieur afin de savoir où en sont les actions de prévention menées par la police, la gendarmerie et les douanes. On observe en effet, dans de très nombreuses affaires de délinquance ou de criminalité qui occupent l’actualité – et certaines sont graves –, la persistance d’une circulation d’armes dont la détention est interdite aux particuliers.

S’agissant des textes relatifs à la décentralisation et à l’administration locale, le code général des collectivités territoriales comprend peu de décrets. Ces lois ont cependant des « suites » administratives. Comme l’ont dit plusieurs collègues, lorsque le texte législatif présente quelques travers, soit parce qu’il est imprécis – il a bien fallu trouver un compromis ! –, soit parce qu’il est complexe, ses suites sont parfois inattendues.

Je prendrai un exemple dont j’ai eu à connaître par mes responsabilités au sein du Conseil national de la transition écologique, le CNTE, celui du fameux schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire, le SRADDT, qui englobe la quasi-totalité des autres schémas et sur lequel nous avons légiféré à l’occasion de la loi NOTRe du 7 août 2015.

Le SRADDT fait l’objet d’un décret qui n’est pas encore publié et sur lequel nous délibérons au sein du CNTE. En outre, il a fallu prendre une ordonnance pour résorber les anciens schémas et vérifier que tout était articulé. Or je crains que cette ordonnance ne soit pas encore publiée l’été prochain, alors même que les régions, désormais en place depuis six mois, devraient se mettre au travail pour élaborer, souvent à partir de l’existant, ces schémas régionaux.

La procédure selon laquelle les régions devront adopter les schémas régionaux ne sera donc pas précisée avant la fin du mois d’août. On voit bien l’interaction entre une loi pour laquelle on n’a pas craint la complexité et sa mise en application, qui peut être difficile.

Je ferai pour conclure deux ou trois observations transversales, rejoignant ainsi les propos de Jean-Claude Lenoir sur l’impact des circulaires.

Nous devons être vigilants, chacun dans le domaine que nous suivons, tout comme les collaborateurs de nos commissions, pour attirer l’attention de l’ensemble du Gouvernement sur la divergence d’interprétation dont font l’objet certaines circulaires. Or « l’unité de base » de celles-ci représente tout de même 30 pages, quelle que soit la taille du texte législatif d’origine ! Il y a en effet un risque sérieux de réinterprétation de certains textes par les circulaires.

Je rejoins aussi Christian Cambon sur la question du retard pris dans les ratifications, qui jette tout de même le discrédit sur notre pays et qui est dû, pour l’essentiel, au sous-dimensionnement de l’équipe chargée de cette mission au quai d’Orsay.

Ce qui m’amène au « back office » du travail d’application de la loi. Celui-ci repose sur les services juridiques des différents ministères, qui présentent d’assez grandes disparités… Lorsqu’on s’intéresse à ces questions, on finit par disposer d’une sorte de guide Michelin de ces services de production des textes réglementaires, dont certains sont correctement armés, et d’autres plus squelettiques.

Monsieur le secrétaire d’État, puisque vous êtes en prise directe avec l’hôtel Matignon, vous conviendrez avec moi que le Premier ministre n’aura pas de mal à se faire expliquer ces disparités dans les capacités des services juridiques ministériels par le Secrétariat général du Gouvernement, qui en sait tout. Quelle que soit la limitation actuelle des emplois dans nos administrations centrales, il faut trouver les moyens de combler ces déficits de potentiel humain, qui sont ensuite la cause de retards et d’anomalies dans l’application des textes.

Pour terminer tout à fait, je vous livre un sujet de curiosité. Dans les délais nécessaires pour mener jusqu’à son terme l’application réglementaire, il est une composante qui justifierait une étude particulière : le délai nécessaire à la préparation du contreseing du ministre du budget ou du ministre des finances. Si l’on pouvait analyser le temps nécessaire à la conclusion du débat entre le ministre porteur principal du texte et son collègue des finances, on pourrait expliquer certains retards d’application. Cela irait dans le sens de l’intérêt général.

M. le président. Je vous remercie, mon cher collègue. Je rappelle que si notre réunion a pris cette forme, c’est grâce au travail que vous avez conduit avec M. Roger Karoutchi. Le bon déroulement de nos travaux démontre que les réflexions collectives que nous avons menées étaient positives. Le président Claude Bérit-Débat et moi-même nous en réjouissons.

Avant de céder la parole à M. le secrétaire d’État, je tiens à souligner que le nombre de pages des seuls projets de loi, études d’impact comprises, est passé de 4 000 en 2010-2011 à 7 318 aujourd’hui. Il y a peut-être un effet de lentille grossissante, mais il n’y a pas que la lentille qui est grossissante… (Sourires.)

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président, monsieur le président de la délégation du Bureau, mesdames, messieurs les présidents de commission, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de m’accueillir de nouveau pour cet exercice annuel de bilan et de dialogue autour de la question, essentielle, de l’application des lois.

En premier lieu, je tiens à remercier M. Claude Bérit-Débat, l’ensemble des présidents de commission ainsi que les services du Sénat qui, grâce à leur expertise, nous permettent de suivre avec précision le travail réalisé et les efforts restant à fournir afin que les lois votées ne restent pas lettre morte et puissent se traduire en réalités concrètes pour nos concitoyens.

Je salue, à mon tour, la très haute qualité de cette réunion, notamment les communications des orateurs, et l’intérêt porté au débat par tous ceux qui y assistent.

Cet enjeu est au cœur des préoccupations du Gouvernement : outre la mise en place du Comité interministériel de l’application des lois, le CIAL, que je réunis deux à trois fois par an avec le Secrétaire général du Gouvernement – je tiens à l’en remercier, ainsi que l’ensemble de son service –, le suivi de l’application des lois fait désormais l’objet, chaque mois, d’une communication en conseil des ministres. C’est dire tout l’intérêt que le Président de la République et le Premier ministre portent à ce sujet. Cet exercice, diversement apprécié par mes collègues, est souvent comparé à un relevé des copies et à une distribution mensuelle de notes, mais il faut reconnaître qu’il a produit des résultats.

Ces bonnes pratiques, de même que les travaux conduits chaque année avec le Sénat, nous ont permis d’atteindre de bons, voire de très bons résultats, que vous avez soulignés.

Le taux d’application de l’ensemble des textes adoptés depuis le début de la législature est, en effet, à ce jour d’environ 80 %, en hausse de 15 points par rapport à l’an dernier. Quant aux résultats concernant la dernière session, ils sont en hausse de 7 points par rapport à l’année précédente, avec un taux global d’application de 62 % au 31 mars 2016 pour les textes adoptés entre le 1er octobre 2014 et le 30 septembre 2015.

La mobilisation des services doit donc se maintenir au plus haut niveau pour améliorer encore ces résultats, notamment en poursuivant la publication des mesures d’application des lois « Croissance », NOTRe, « Transition énergétique » et « Dialogue social ». Ces textes ont en effet tous été adoptés selon la procédure accélérée, ce qui justifie, vous avez été plusieurs à le relever, une diligence particulière de la part du Gouvernement.

Cette diligence est d’autant plus légitime que le Gouvernement a insisté politiquement sur l’importance structurelle qu’il accordait à ces textes.

Le taux d’application des propositions de loi est quant à lui en nette augmentation : il est supérieur de 9 points à celui des projets de loi.

Je regrette, en revanche, que le taux de remise des rapports reste très insuffisant. Seulement 59 % des rapports prévus ont été remis. Si je reconnais qu’il convient d’améliorer ce chiffre concernant les rapports dits « de l’article 67 », de très nombreux autres rapports continuent à être prévus dans les différents textes.

À titre d’exemple, la loi « Croissance » en prévoyait 17 et la loi « Transition énergétique » pas moins de 34 !

La multitude des rapports prévus par la loi engorge les administrations, qui sont en même temps mobilisées par la rédaction des textes d’application. Il est vrai que, au vu du contexte budgétaire, nous sommes assez chiches sur les moyens que nous leur accordons.

Je m’arrêterai quelques instants sur les trois sujets connexes évoqués par le président Bérit-Débat.

Le premier sujet, également abordé par Mme la présidente Michèle André et M. Canevet, est celui des ordonnances. Leur taux d’application est à ce jour de 86 %, un très bon taux : c'est la moindre des choses, la procédure des ordonnances ayant vocation à traiter des sujets revêtant une urgence particulière.

S’agissant de la suite donnée aux lois d’habilitation, vous citez, dans votre rapport, l’habilitation à prendre des mesures sur l’octroi de mer à Mayotte : ce sujet a finalement fait l’objet d’une loi relative à l’octroi de mer, promulguée le 29 juin 2015, c’est-à-dire dans le délai de six mois dont disposait le Gouvernement pour prendre les mesures par ordonnance.

Le deuxième sujet porte sur le taux de réponse aux questions écrites. Il est à ce jour de 73 % pour l’ensemble des questions posées par les sénateurs. Ce chiffre, bien qu’insuffisant, est en légère progression, grâce notamment au suivi régulier de ce sujet par le Secrétariat général du Gouvernement. Je rappelle moi-même très souvent à mes collègues qu’ils doivent impérativement répondre aux questions écrites dans les délais réglementaires.

Enfin, le troisième sujet est relatif aux questions européennes.

Monsieur le président Bizet, mesdames, messieurs les présidents de commission, mon collègue Harlem Désir m’a confirmé, comme il vous l’a indiqué dans un récent courrier, qu’il se tient à votre entière disposition pour les auditions que les commissions, notamment celle des affaires européennes, souhaiteraient organiser. Ces auditions pourraient avoir lieu, par exemple, préalablement à la tenue de conseils européens, en fonction de leur ordre du jour.

S’agissant des méthodes de travail et de dialogue entre le Parlement, le secrétariat d’État aux affaires européennes et le SGAE, une réunion doit se tenir avec des représentants des commissions des affaires européennes des deux assemblées, dans trois jours, dans les locaux du SGAE. Je ne doute pas que de nouveaux points d’avancée pourront être trouvés.

Je vais maintenant tenter d’apporter des éléments de précision sur les autres points abordés par les différents orateurs.

Monsieur le président Lenoir, le taux d’application de la loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte s’établit désormais à 54 %. Il convient en outre de noter que 6 mesures sont au contreseing, 27 sont actuellement soumises à l’examen du Conseil d’État et 25, regroupées en 13 décrets, sont en consultation obligatoire ou en concertation avec les parties prenantes, ce qui peut prendre du temps.

Le taux d’application devrait donc s’améliorer très sensiblement dans les prochains mois. Je n’entre pas davantage dans le détail, puisque vous aurez tout à l’heure un débat sénatorial de contrôle portant précisément sur ce sujet. Vous pourrez décortiquer l’affaire avec votre sagacité habituelle, monsieur le président Lenoir !

S’agissant de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, sur laquelle est également intervenu M. Collin, 82 mesures ont été prises sur les 99 prévues par le texte, ce qui représente un taux d’application de 82 %.

Je reprendrai les mesures que vous avez citées : la compensation agricole, de même que les mesures de contrôle sanitaire prévues à l’article 45, sont actuellement en cours d’examen par le Conseil d’État. À la suite de nombreuses concertations, la publication du décret sur les registres agricoles est prévue pour le troisième trimestre 2016, après examen par la CNIL. Enfin, la saisine du Conseil d’État sur les mesures relatives aux déclarations de cession de médicaments vétérinaires, un sujet sur lequel plusieurs orateurs sont intervenus, est prévue pour la fin du mois de septembre 2016.

Monsieur le vice-président Cambon, je vous remercie d’avoir relevé que le bilan de l’application des lois était globalement positif. Concernant les mesures restant à prendre sur la loi d’actualisation de la programmation militaire 2015-2019, 2 décrets, prévus par l’article 11 et relatifs aux associations professionnelles nationales de militaires, qui est un sujet sensible, ont été rédigés et soumis au Conseil supérieur de la fonction militaire en décembre 2015. Les discussions interministérielles sont toujours en cours, mais devraient déboucher sous peu. Le projet de décret sur le port de l’insigne des blessés a été adressé au Conseil d’État le 2 juin dernier.

Quant au bilan annuel politique, opérationnel et financier des opérations extérieures, il n’a certes pas encore été transmis au Parlement. Toutefois, le ministre de la défense a très régulièrement fait le point avec votre commission sur les différentes opérations en cours, et des débats ont été organisés en application de l’article 35 de la Constitution. Le bilan annuel des opérations extérieures a également été abordé lors de la remise des rapports annuels sur l’exécution de la loi de programmation militaire, préalablement aux débats d’orientation des finances publiques de 2015 et de 2016.

Monsieur le président Milon, la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi nécessitait 64 mesures d’application : 50 ont été prises, ce qui porte le taux d’application à 77 %.

Restent en attente de publication 14 mesures, dont 8 font l’objet de décrets qui ont été transmis au Conseil d’État le 6 mai dernier : ces derniers ne devraient donc plus trop tarder… Le décret portant reconnaissance des maladies psychiques comme maladie professionnelle est actuellement au contreseing et sera donc publié rapidement. Les dernières mesures restant à prendre risquent de voir leur base légale modifiée par le projet de loi « Travail ». Il est vrai qu’il arrive aussi bien à l’exécutif qu’au législatif de reporter d’un texte à l’autre certaines discussions. Je ne suis donc pas actuellement en mesure de vous donner précisément leur date de publication.

S’agissant du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, 7 mesures sur 59 restent à prendre. Vous avez cité plusieurs points dans votre rapport. Je tiens à vous dire que les organismes de sécurité sociale ont été saisis le 2 juin du projet de décret encadrant l’achat groupé de vaccins. Le décret sera publié à l’issue de ces consultations.

Les mesures concernant les dotations pour l’amélioration de la qualité des soins sont en cours de finalisation et les caisses de sécurité sociale viennent d’en être saisies.

S’agissant de la régulation de l’offre de taxis conventionnés, un projet de décret a été rédigé, sur lequel la concertation avec la profession est encore en cours.

Madame la présidente Morin-Desailly, la loi du 17 avril 2015 relative à la modernisation du secteur de la presse est désormais totalement applicable, puisque la dernière mesure, prévue à l’article 18 de cette loi, a été publiée le 25 mai dernier.

Monsieur le président Maurey, je vais tenter de vous donner des éléments aussi complets que possible sur l’application de la loi de 2014 portant réforme ferroviaire, une loi qui est indiscutablement d’actualité et dont l’histoire reste à faire – j’espère que chacun ici pourra en goûter tout le sel ! Cette loi est à présent applicable à 89 %.

Trois mesures étaient en attente.

Le Conseil d’État a achevé d’examiner le décret relatif aux règles encadrant la durée du travail dans les entreprises de transport ferroviaire le 27 mai, qui devrait donc paraître dans les prochains jours.

Le décret prévu à l’article 12 est soumis à l’examen du Conseil d’État depuis le 26 avril, après avoir reçu un avis conforme de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires, l’ARAF.

La mesure prévue à l’article 7 a pris du retard, à la suite de la modification de cet article par la loi NOTRe ; son examen par le Conseil national d’évaluation des normes est prévu en juillet, pour une publication à l’automne.

Madame la présidente André, je ne pourrai malheureusement pas apporter de réponses à l’ensemble des points que vous avez soulevés, dont je ne manquerai cependant pas de faire part à mon collègue Michel Sapin. Ses services m’ont toutefois informé que la liste des revues de dépenses annexée au projet de loi de finances pour 2016 a été déposée le 25 janvier dernier.

Pour ce qui concerne les ordonnances, j’ai déjà apporté des éléments de réponse.

S’agissant de l’arrêté relatif à la taxe de séjour que vous mentionnez, il se trouve actuellement au contreseing et devrait donc être publié très prochainement. Toutefois, l’application du décret du 31 juillet 2015 relatif à la taxe de séjour, en tant qu’il prévoit une liste d’informations à publier issues des délibérations de taxe de séjour, ne modifie pas le régime d’entrée en vigueur de ces délibérations.

Conformément au principe selon lequel « les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu’il a été procédé à leur publication ou affichage ainsi qu’à leur transmission au représentant de l’État dans le département », les collectivités bénéficiaires sont donc en droit d’exiger des redevables le paiement de la taxe, quelle que soit la modalité, physique ou électronique, par laquelle a eu lieu l’intermédiation.

Monsieur le président Bas, permettez-moi de faire un point sur la mise en œuvre de la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement, que MM. Collin et Richard ont également mentionnée. Sur cette loi, applicable à 92 %, une seule mesure, prévue à l’article 8, reste à prendre : elle concerne les modalités et les conditions d’échanges d’informations entre les services de renseignement et les autorités administratives. Un décret en Conseil d’État est en cours d’élaboration et de consultation interservices. Il devrait être transmis au Conseil d’État au tout début de l’été.

Ensuite, concernant l’application de la loi de simplification du 16 février 2015, applicable à 90 %, les dispositions relatives à la formation des formateurs d’auto-écoles ont été prises par un décret du 30 mars dernier.

Je vous confirme que les dispositions relatives au tribunal foncier en Polynésie sont toujours en attente de décret, lequel est subordonné à l’aboutissement des travaux immobiliers et aux conclusions d’un groupe de travail mis en place par le garde des sceaux.

Messieurs Favier et Canevet, vous avez, à raison, rappelé les problèmes qu’engendre l’inflation législative.

Monsieur Canevet, je ne peux qu’être d’accord avec vous quand vous constatez quelle utilisation est faite de la procédure parlementaire, notamment du droit d’amendement. Nous menons ensemble un travail auquel le président Larcher est particulièrement attaché : permettre au Parlement d’être moins dans la posture et davantage dans le travail de fond. Certes, le Parlement vote les lois et le budget, mais il exerce aussi une fonction de contrôle. À cette fin, il faut du temps et de l’énergie. La multiplication d’amendements « secondaires » ne correspond pas toujours à notre volonté commune que le Parlement, en l’occurrence le Sénat, ait un rôle pilote. Le travail qu’il fournit doit lui permettre d’être pleinement « actif », et ne pas donner simplement une image de blocage.

Vous avez pris l’exemple de la loi « Croissance », passée de 106 à 308 articles au fil des différentes phases de la discussion parlementaire. J’ai bien conscience de ce problème ; néanmoins, l’application de cette loi progresse : 96 mesures ont été adoptées sur les 116 à prendre, ce qui représente un taux très honorable de 83 %. J’ajoute que 10 décrets d’application de ce texte, portant 13 mesures, sont actuellement examinés par le Conseil d’État. J’espère que cette loi sera entièrement applicable avant la fin de l’année.

Madame Blandin, la loi relative à l’indépendance de l’expertise en matière de santé et d’environnement et à la protection des lanceurs d’alerte est aujourd’hui applicable à 100 %. Son dispositif sera adapté et complété à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

Votre question portait plus précisément sur la désignation des membres de la Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé publique et d’environnement : ma collègue Barbara Pompili vous a indiqué, lors de la séance de questions d’actualité du 5 avril dernier, que la désignation de certains membres était encore attendue.

À ce jour, les membres du Conseil d’État et du Comité consultatif national d’éthique ont été désignés, et nous attendons de façon imminente la désignation de 2 sur 4 des membres des ministères de l’agriculture et de la recherche.

Monsieur Richard, la loi relative à la réforme du droit d’asile est applicable à 95 %. Le rapport d’application à six mois a été transmis au mois de février. Deux mesures sensibles restent à prendre, sur la transmission des données relatives à la vulnérabilité du demandeur d’asile et sur les informations à fournir en cas de refus ou d’abandon d’hébergement. Le décret a été rédigé et est en cours de consultation interministérielle.

Vous avez, à juste titre, pointé les différences de qualité du travail, peut-être liée à des moyens inégaux, qui peuvent exister entre ministères, notamment en matière d’expertise juridique et de rédaction des décrets. Nous avons essayé de mutualiser les moyens juridiques mis à la disposition de différents ministères. C'est à la fois du soutien et, le cas échéant, de l’accompagnement que nous avons mis en place dans des ministères qui pouvaient sembler « affaiblis » et démunis lorsqu’ils devaient préparer un monceau de décrets. C'est ainsi que nous avons essayé de réagir aux difficultés que vous avez pointées. Il faut faire le bilan de cette action, mais elle me semble s’inscrire dans l’évolution que vous souhaitez vers plus d’efficacité.

Pour conclure, je ferai un court point de prospective : d’importantes lois ont été adoptées depuis la fin de l’année 2015, qui entreront bientôt dans le « compteur » de l’application des lois en vertu du délai de six mois : outre les textes financiers de la fin de l’année, on peut notamment citer la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement ou la loi « Santé ». C’est avec vigilance que je suis l’avancée de la publication des mesures d’application de ces lois, notamment dans la perspective du bilan semestriel que nous effectuerons le 30 juin prochain et qui fera l’objet d’une communication en conseil des ministres au début du mois de juillet. Nous ne manquerons pas de vous en transmettre les résultats.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de votre participation et de votre intérêt pour cette tâche éminemment importante pour la bonne gestion de nos lois et l’évolution du rôle du Parlement.

M. le président. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie, tout comme le président Bérit-Débat, les présidents de commissions et nos collègues qui sont intervenus. Ce débat a été utile, et il permet de prendre date par rapport au rendez-vous de l’année prochaine.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures trente salle Clemenceau, est reprise à seize heures quarante-cinq dans l’hémicycle, sous la présidence de M. Hervé Marseille.)

PRÉSIDENCE DE M. Hervé Marseille

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

6

Mise en œuvre de la transition énergétique en France

Débat organisé à la demande du groupe Les Républicains

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Les Républicains, sur le thème : « La mise en œuvre de la transition énergétique en France, un an après la loi n° 2015–992 du 17 août 2015, afin de pérenniser notre modèle énergétique, de garantir notre indépendance énergétique et notre compétitivité économique, tout en poursuivant des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre ».

La parole est à Jean-Claude Lenoir, orateur du groupe auteur de la demande.

M. Jean-Claude Lenoir, au nom du groupe Les Républicains. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, j’ai l’honneur d’ouvrir ce débat que le groupe Les Républicains, que je représente à cet instant, a souhaité voir organisé au sein de cet hémicycle afin de faire le point sur la mise en œuvre de la loi de transition énergétique promulguée il y a presque un an, le 17 août dernier.

J’articulerai mes observations autour de quatre thèmes.

Premièrement, les objectifs affichés par le Gouvernement dans un certain nombre de secteurs touchant à l’énergie étaient à l’évidence trop ambitieux et, en définitive, irréalistes.

Il était prévu que nous diminuions la consommation d’énergie de 20 % d’ici à 2020 et de moitié d’ici à 2050. Or la consommation d’électricité a continué d’augmenter, entre 0,5 et 2 %, indépendamment des aléas météorologiques mais de manière cohérente avec la croissance de notre PIB, fût-elle modeste. La consommation des produits pétroliers a également continué d’augmenter, légèrement, mais elle a augmenté.

En ce qui concerne les énergies renouvelables, leur part dans notre mix énergétique n’est pas à la hauteur de ce qui était prévu. Les chiffres sont très clairs : les énergies renouvelables représentaient 19,4 % de notre consommation en 2013 ; passée à 19,6 % en 2014, leur part est aujourd'hui de 18,7 %, c'est-à-dire que, contrairement aux volontés exprimées par le Gouvernement et aux ambitions portées par cette loi, leur part a en fait diminué.

Les objectifs fixés par le Gouvernement étaient également irréalistes pour ce qui concerne la part du nucléaire. Celui-ci représente aujourd'hui 77 % de notre mix énergétique, alors que, au cours des dix dernières années, sa part a oscillé entre 73 % et 78 % en fonction de la disponibilité des centrales nucléaires. Les premiers indicateurs soulignent que la tendance n’est donc pas celle qui était souhaitée par le Gouvernement et visée par cette loi.

Deuxièmement, la mise en œuvre de cette loi ne se fait pas au rythme qui était annoncé par Mme la ministre de l'énergie.

Participant au débat sur le bilan annuel de l’application des lois en tant que président de la commission des affaires économiques, j’ai précisé il y a quelques instants que 48 % des textes d’application relatifs à la loi de transition énergétique avaient été pris. Le secrétaire d'État M. Jean-Marie Le Guen m’a ensuite corrigé, avançant le chiffre de 54 %, et Mme Ségolène Royal, qui, ne pouvant être parmi nous, s’est excusée de façon extrêmement courtoise auprès des orateurs dans un courrier, annonce dans celui-ci le chiffre de 75 %. La différence est quand même extraordinairement importante, d’autant que, je le rappelle, Mme la ministre avait dit que tous les textes seraient pris avant la fin de l’année 2015, et que le Président de la République avait pour sa part annoncé, lors de la conférence gouvernementale sur l’environnement, en avril dernier, que tous les décrets seraient pris avant le 30 juin.

Madame la secrétaire d'État, sans entrer dans le détail des décrets d’application qui sont attendus, permettez-moi de souligner que la disposition concernant la programmation pluriannuelle, élément essentiel de la politique, nous intéresse tout particulièrement.

Certes, me direz-vous, les premières mesures ont été prises pour ce qui concerne le renouvelable, mais nous vous attendons sur le nucléaire ! Comment le Gouvernement va-t-il s’y prendre pour que, d’ici à 2025, la part du nucléaire passe à 50 % dans notre mix énergétique ? Comment le Gouvernement s’y prendra-t-il pour fermer la centrale de Fessenheim dans les délais qui ont été annoncés, c'est-à-dire avant les échéances de 2017 ?

L’un des prédécesseurs de Mme Ségolène Royal affirmait en 2013 qu’il fermerait Fessenheim en 2016, comme si un ministre pouvait fermer une centrale nucléaire ! Une telle décision implique le respecter un certain nombre de procédures et elle emporte des conséquences, notamment financières. La centrale de Fessenheim n’appartient pas qu’à EDF. Les Suisses et les Allemands en détiennent 30 %.

Les conditions dans lesquelles cette centrale peut être fermée, pas seulement arrêtée mais réellement fermée, sont particulièrement nombreuses et incitent à penser que, heureusement, la raison va l’emporter sur l’idéologie et que le Gouvernement ne sera pas en mesure de la fermer dans le délai qu’il s’était fixé.

La programmation pluriannuelle est également importante pour l’industrie nucléaire. À l’heure où le nucléaire est en train de repartir dans le monde, il faudrait en effet que la France, dont le savoir-faire est reconnu en la matière, puisse continuer à gagner des marchés, et c’est pourquoi nous sommes dans l’attente de cette programmation.

Troisièmement, les moyens que vous mettez en œuvre sont insuffisants. Cette loi de transition énergétique comporte deux volets majeurs : le renouvelable et la rénovation thermique des bâtiments.

Le financement des énergies renouvelables est notamment assuré par la fameuse CSPE, la contribution au service public de l’électricité. Celle-ci pèse si lourdement sur la facture d’électricité que la loi en a plafonné le montant à 22,5 euros, le reste étant financé par la taxation carbone.

Mes chers collègues, madame la secrétaire d'État, j’appelle votre attention sur l’analyse qu’a faite la Commission de régulation de l’énergie, autorité incontestée. Le coût du renouvelables, qui sera donc subventionné, s’élève, pour la période 2014–2025, à 100 milliards d’euros ! Pour rappel, les cinquante-huit réacteurs nucléaires qui ont été installés en France ont coûté un peu moins de 100 milliards d’euros.

Aujourd'hui, on privilégie la subvention pour l’installation en faisant croire qu’ensuite l’énergie est gratuite, puisqu’elle est apportée par le vent ou par le soleil. Certes, la part du renouvelable a augmenté pour l’éolien et le photovoltaïque, le parc installé représentant 10 000 mégawatts pour l’éolien et de 4 000 mégawatts pour le solaire. Mais l’on fait souvent la confusion entre la puissance installée et la production d’énergie électrique. En effet, l’éolien représente aujourd'hui seulement 4,5 % de notre mix énergétique, et le solaire 1,6 %. Les 10 000 mégawatts représentent dix réacteurs nucléaires. Ces derniers produiraient dix fois plus d’énergie que le renouvelable.

Aujourd’hui, les moyens manquent. On nous dit : Il y aura la taxation carbone. Celle-ci va bien sûr peser sur les consommateurs. Ceux qui utilisent leur véhicule sont nombreux, et les hydrocarbures représentent tout de même les deux tiers de notre consommation. Or quand bien même cette taxation pèserait sur les carburants, elle serait insuffisante pour couvrir les besoins, qui sont, je le rappelle, de 100 milliards d’euros pour la production d’énergie à partir du renouvelable.

Pour ce qui concerne la transition énergétique, c’est clair – les chiffres, ce sont les vôtres, madame la secrétaire d'État –, cela va coûter entre 9 milliards et 10 milliards d’euros par an. Or les ressources affichées ne représentent même pas la moitié. Autrement dit, plus de la moitié, sans doute à peu près 60 %, du coût de la rénovation thermique des bâtiments sera à la charge des ménages. Je doute fort que ces derniers soient en mesure de supporter les conséquences de ces choix.

Devant cette situation, et ce sera ma quatrième observation, une autre politique s’impose. Dans quelques mois, l’occasion nous sera heureusement donnée de proposer aux Français de choisir.

Vous avez fait le choix d’une énergie chère, prenant exemple sur nos voisins allemands qui ont une énergie non seulement chère, mais en plus très carbonée puisqu’ils remplacent le nucléaire par le charbon.

Nous, nous faisons un choix clair : revenir entièrement sur les objectifs que vous vous êtes fixés non pas dans le domaine de l’environnement – nous avons, d’ailleurs, voté ces dispositions –, mais pour ce qui concerne la production d’énergie électrique et son financement. Ainsi, nous souhaitons revenir sur la diminution de la part du nucléaire à 50 % dans notre mix énergétique d’ici à 2025 et sur le plafond que vous avez fixé. Ce dernier obligerait à se séparer prématurément d’une centrale nucléaire (M. Claude Kern opine.) – j’ai parlé de Fessenheim –, dont l’Autorité de sûreté nucléaire, après les travaux réalisés par l’entreprise EDF, a approuvé la prolongation de l’exploitation pour une durée de dix ans. (M. Claude Kern opine de nouveau.)

Il nous faut une autre politique ! C’est la raison pour laquelle nous voulions ce débat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Ladislas Poniatowski.

M. Ladislas Poniatowski. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, tout au long du débat parlementaire, et malgré les efforts déployés par le Sénat pour parvenir à un texte équilibré et consensuel, le Gouvernement aura refusé de revenir sur l’erreur stratégique de la loi de « transition énergétique », c’est-à-dire la promesse électorale du candidat Hollande faite aux écologistes de réduire la part du nucléaire à 50 % du mix électrique à l’horizon de 2025.

M. Jean-Claude Lenoir. Il est mal récompensé aujourd'hui !

M. Ladislas Poniatowski. Dès lors qu’un tel couperet était maintenu pour des raisons purement idéologiques, plus aucun accord n’était possible.

Nous l’avions dit à l’époque, et les faits ne nous ont pas démentis depuis : un tel objectif est non seulement néfaste en termes de compétitivité, d’indépendance énergétique comme de réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais aussi parfaitement irréaliste, comme l’attestent les reports successifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie, la PPE.

En réduisant d’environ un tiers la production nucléaire, ce sont entre dix-sept et vingt réacteurs qui devront être fermés dans les dix ans, avec des effets désastreux en termes d’emplois, mais aussi pour nos finances publiques, puisqu’il faudra bien, comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel, indemniser l’exploitant à la hauteur du préjudice subi.

Une telle perspective est d’autant plus préoccupante qu’elle viendra impacter une filière dont les deux fleurons, EDF et Areva, connaissent déjà des difficultés importantes, qui sont, pour l’un, liées principalement à l’effondrement des prix du marché et, pour l’autre, aggravées par des choix stratégiques désastreux. Pour surmonter ces difficultés, ces deux entreprises ont un besoin impérieux de visibilité et de confiance dans l’avenir, ce que n’offre pas le cadre législatif actuel.

C’est pourquoi, dans l’hypothèse où nous serions appelés à gouverner en 2017, nous supprimerons « l’objectif-couperet » des 50 % à l’horizon de 2025, non pas par idéologie ou par « aveuglement pro-nucléaire », mais parce que les choix énergétiques passés, à qui nous devons notre électricité propre et bon marché, restent justes. Mais aussi par conviction environnementale.

Il faut le rappeler, en assurant une production décarbonée de base, flexible et prévisible, le nucléaire est le meilleur allié de la transition énergétique et du développement des énergies renouvelables intermittentes. Du reste, nous ne plaidons pas pour le statu quo dans la mesure où nous sommes favorables à une diversification progressive et raisonnée du mix électrique, dont le nucléaire représenterait 50 % « à terme », c’est-à-dire à un horizon raisonnable et réaliste.

Cette trajectoire impliquera, selon les cas, des prolongations, des constructions ou des fermetures. Dans ce dernier cas, il faudra privilégier, pour en limiter l’impact territorial, des fermetures partielles de tranches plutôt qu’un démantèlement complet d’une centrale.

Il nous faudra aussi revenir sur une autre mesure prévue par la loi aux conséquences encore plus immédiates : le plafonnement de la capacité de production à son niveau actuel, qui entraîne, comme vous l’avez rappelé il y a quelques instants, cher président Lenoir, la fermeture de la centrale de Fessenheim, avant même la mise en service de l’EPR de Flamanville à la fin de l’année 2018.

Pour tenter de rendre le processus irréversible avant les prochaines échéances électorales, le Gouvernement a exigé d’EDF qu’il dépose sa demande d’abrogation à la fin de ce mois, alors que cette centrale est parfaitement sûre et que l’Autorité de sûreté nucléaire a autorisé en 2011 et 2012 le fonctionnement des deux réacteurs pour au moins dix ans supplémentaires.

Aux conséquences redoutables d’une fermeture sur le plan local s’ajoutera la question de l’indemnisation non seulement de l’exploitant, mais aussi des autres parties prenantes, allemande et suisse, qui détiennent près d’un tiers de la centrale.

Or la première estimation transmise par le Gouvernement à EDF apparaît totalement farfelue : entre 80 et 100 millions d’euros, alors que, selon les experts, le préjudice véritable se chiffrerait a minima en milliards d’euros ! Les Français ne sont sûrement pas prêts à payer une telle somme !

Plus globalement, la filière électronucléaire française est aujourd’hui confrontée à des défis et, donc, à des besoins de financement importants.

Premier défi : le « grand carénage », qui doit permettre de prolonger la durée de vie du parc actuel au-delà de quarante ans, pour un coût estimé par EDF à 51 milliards d’euros d’ici à 2025. Cette prolongation permettra surtout de continuer à bénéficier, en toute sûreté, de la « rente » de centrales déjà amorties.

Deuxième défi : le renouvellement du parc existant des cinquante-huit réacteurs par environ trente-cinq EPR nouvelle génération, qui permettront de continuer à assurer une production de base décarbonée. Or, qu’il s’agisse de l’un ou de l’autre, les sommes en cause plaident, à mon sens, pour l’entrée de partenaires aux côtés d’EDF, comme c’est déjà le cas, je vous le rappelle, mes chers collègues, dans cinq centrales du parc actuel : Fessenheim, Cattenom, Bugey, Tricastin et Chooz. Il n’y a donc là rien de révolutionnaire, et bon nombre d’opérateurs, industriels ou énergéticiens, sont intéressés, ce qui allégerait d’autant la facture pour EDF.

Pour conclure, le nucléaire n’est pas une industrie comme les autres, c’est une industrie d’État. C’est donc à l’État d’avoir le courage de prendre toutes les décisions.

Je vous le dis, madame la secrétaire d'État, je le dis également aux responsables de ma famille politique, plus particulièrement à ceux qui briguent les responsabilités les plus hautes : vous devrez tous être clairs sur le mix énergétique qu’il faut pour la France.

Plus que jamais le nucléaire a besoin d’une vision assise sur des considérations objectives, et non sur des postulats idéologiques. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey. (M. Claude Kern applaudit.)

M. Hervé Maurey. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de regretter l’absence de Mme Ségolène Royal, ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, et son remplacement par Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d’État chargée de la ville, dont je suis, en revanche, ravi de faire la connaissance, puisque je n’avais pas eu ce plaisir jusqu’à présent. (Sourires.)

Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la ville. Je vous en remercie, monsieur le sénateur !

M. Hervé Maurey. Et puisque j’en suis à exprimer des regrets, je souhaiterais, madame la secrétaire d'État, que vous rappeliez à Mme Royal que le président Lenoir et moi-même attendons qu’elle nous donne enfin une date pour que nos deux commissions puissent ensemble, comme convenu sur le principe, l’auditionner…

M. Jean-Claude Lenoir. Ne désespérons pas !

M. Hervé Maurey. … afin qu’elle nous présente elle-même le bilan de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, dont elle a voulu faire l’une des grandes lois de ce quinquennat.

M. Claude Kern. Très bien !

M. Hervé Maurey. À cet égard, je remercie le président Lenoir d’avoir proposé d’inscrire à l’ordre du jour de nos travaux ce débat, qui nous permettra de faire le point sur ce qui devait être l’une des priorités du quinquennat, à savoir la transition énergétique.

À en croire la première conférence environnementale de 2012, puis le débat national sur la transition énergétique, qui a mobilisé, pendant des mois, à Paris et dans les régions, de très nombreux acteurs, notre modèle de développement énergétique devait être entièrement repensé et mis au service d’une nouvelle conception de la croissance, créatrice d’emplois et de richesses. Mais qu’en est-il ?

La loi du 17 août 2015 a fixé des objectifs ambitieux ; j’en rappellerai quelques-uns : réduire de 40 % les émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030 par rapport à 1990 ; porter la part des énergies renouvelables à plus de 30 % de la consommation énergétique finale d’énergie à l’horizon 2030 ; baisser à 50 % la part du nucléaire dans la production d’électricité à l’horizon 2025 ; enfin, créer, grâce à ces mesures et à d’autres mesures concernant le bâtiment notamment, 100 000 emplois : c’était ce que l’on appelait alors « la croissance verte » !

Tout cela est très bien, mais chacun sait que ces objectifs ne sont pas tenables.

Ainsi, les émissions de gaz à effet de serre n’ont pour l’instant été réduites que de 17,2 % par rapport à 1990, c'est-à-dire en vingt-six ans. On voit donc mal comment on pourrait atteindre l’objectif de 40 % d’ici à 2030, dans un peu moins de quinze ans.

La part des énergies renouvelables n’atteint que 14,6 %, en retrait même par rapport aux objectifs fixés par le précédent plan national, qui tablait sur un minimum de 16 %.

La part du nucléaire dans la production d’électricité est encore de plus de 75 %, et personne n’imagine que l’on atteigne le taux de 50 % en 2025 : chacun sait que c’est totalement utopique !

Quant aux emplois créés, l’objectif de 100 000 emplois est, lui aussi, toujours très utopique. Il relève malheureusement plus de l’incantation que de la réalité économique.

Au-delà des objectifs, des mesures ont été adoptées dans la loi du 17 août 2015, mais beaucoup reste encore à mettre en œuvre. Je prendrai quelques exemples pour illustrer cette affirmation.

Premier exemple : la programmation pluriannuelle de l’énergie, qui devait être le document socle, la stratégie de notre pays en matière d’énergie. Inscrite dans la loi relative à la transition énergétique, sa publication est sans cesse reportée. Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous nous dire quand la programmation pluriannuelle de l’énergie deviendra réalité ?

Deuxième exemple, sur lequel la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et son rapporteur Louis Nègre ont beaucoup travaillé : la question des transports propres.

Là aussi, nous attendons des mesures d’application, notamment le décret qui doit, par exemple, préciser les critères définissant les véhicules ayant un faible niveau d’émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques, et ceux à très faibles émissions pouvant bénéficier de conditions de circulation et de stationnement privilégiées. Il en est de même du décret qui doit définir l’obligation d’acquérir des véhicules propres pour les flottes publiques, les loueurs de voitures, les taxis et les exploitants de voiture avec chauffeur.

Or ces mesures sont fondamentales pour déterminer notre capacité à respecter les engagements qui ont été fixés par l’accord de Paris sur le climat. À cet égard, nous nous prononcerons demain sur le projet de loi autorisant la ratification de cet accord.

Quand je dis : « nous attendons », je parle, bien sûr, non pas seulement des sénateurs impatients que nous sommes, mais aussi des filières économiques, des élus locaux et de nos concitoyens. Les choix stratégiques ou économiques de tous ces acteurs sont conditionnés à ces critères. Et il y a vraiment urgence à les définir et à respecter la volonté du législateur !

Troisième exemple : la lutte contre les gaspillages et la promotion de l’économie circulaire.

Là encore, les enjeux sont importants pour réduire notre consommation d’énergie et optimiser nos ressources. Ainsi, sur l’initiative de notre collègue Chantal Jouanno, nous avions introduit dans la loi une stratégie nationale de transition vers l’économie circulaire incluant, notamment, un plan de programmation des ressources nécessaires aux principaux secteurs d’activités économiques, que le Gouvernement devait établir tous les cinq ans. Là encore, nous n’avons rien vu venir, madame la secrétaire d'État. Aussi, nous aimerions savoir où en est ce plan de programmation des ressources.

D’ailleurs, il est assez curieux de constater que tout ce qui concerne les documents à caractère stratégique fait défaut. Cela nous laisse malheureusement penser que nous sommes encore bien loin d’une transition énergétique voulue et organisée.

En outre, je dirai un mot sur ce que l’on peut appeler « le feuilleton Fessenheim ».

Comme cela a été rappelé, la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim a été un engagement fort du Président de la République. On peut imaginer que cette fermeture était fondée sur des critères objectifs, en lien avec la sûreté nucléaire. Mais qu’en est-il réellement ? Aujourd'hui, plus personne ne sait le sort qui sera réellement réservé à Fessenheim.

Enfin, dernier exemple, mais ô combien important, la question de la fiscalité écologique.

La fiscalité, tout le monde en convient, est un instrument très important pour faire évoluer les comportements. Dans ce domaine, aucune mesure significative n’a été prise, si ce n’est la très anecdotique indemnité kilométrique vélo.

Pourtant, de nombreuses études ont démontré qu’une fiscalité écologique ambitieuse permet de favoriser les solutions vertueuses et de pénaliser celles qui ne le sont pas. Accessoirement, en créant une fiscalité écologique, on peut alléger la fiscalité qui pèse sur le travail et qui nuit à la compétitivité des entreprises et, par là même, à celle de notre pays.

En matière de fiscalité écologique, notre pays est, je tiens à le souligner, parmi les derniers de la classe en Europe. Eurostat nous place au vingt-quatrième rang sur vingt-huit pour ce qui concerne les recettes fiscales environnementales. Celles-ci représentent moins de 2 % de notre PIB, contre 5 % au Danemark et près de 3,5 % en Allemagne, la moyenne européenne s’établissant à 2,5 %.

Madame la secrétaire d’État, nous sommes, je ne vous le cacherai pas, déçus, car notre pays est loin d’être engagé dans la transition énergétique qu’il était nécessaire de mettre en œuvre pour préparer l’avenir de notre pays et, surtout, que l’on nous avait vantée, pour ne pas dire vendue, pendant des mois et des années. Il ne suffit pas de se bercer de mots et de se complaire dans l’autosatisfaction, il faut, lorsqu’on est aux responsabilités, agir et agir vraiment. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC. – M. Jackie Pierre applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la notion de transition énergétique est au cœur des débats depuis quelques années, que ce soit dans les médias ou dans les différentes instances de décision nationales et européennes. C’est un vocable qui, dans le cadre des réflexions sur le développement durable et les énergies du futur, fait consensus.

L’idée selon laquelle cette transition est devenue nécessaire, voire inéluctable, pour répondre à la fois à l’augmentation continue du prix du pétrole et, surtout, au réchauffement climatique semble une évidence. Tout le monde est d’accord sur ce point : il nous faut véritablement organiser une transition énergétique, même si l’on peut aussi acter que celle-ci a déjà commencé.

Toutefois, derrière les questions ayant trait à l’énergie de demain se cachent de nombreuses inquiétudes. Nous devons à l’évidence trouver de nouveaux modes de développement, de vie et de déplacement. Nous devons réduire éventuellement nos besoins et, sûrement, nos consommations ; trouver de nouvelles sources d’énergie et, dans le même temps, ne pas fragiliser nos tissus économiques et sociaux, ni renoncer complètement à notre confort, tout en étant attentif à nos factures.

C’est pourquoi la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte avait suscité de nombreuses attentes chez nos concitoyens. En effet, elle est apparue comme un impératif auquel la France devait se confronter pour répondre aux défis de demain et infléchir un modèle de consommation qui a atteint ses limites.

Certes, beaucoup de questions restaient en suspens, surtout celle des moyens. Cependant, les différents débats publics ont montré l’importance de ce sujet pour l’ensemble de nos concitoyens.

Or le bilan de l’application de la loi sur la transition énergétique nous interpelle.

D’une part, la feuille de route dénommée « programmation pluriannuelle de l’énergie », à propos de laquelle nous avions souhaité plus de précisions lors des débats, n’est toujours pas publiée dans son intégralité. Cette PPE, qui aurait dû être présentée le 8 mars dernier, a été repoussée sine die, et la publication du « premier volet » de la PPE portant sur la production des énergies renouvelables n’a pas rassuré tous les acteurs. Pire, certains considèrent qu’il s’agit d’un enterrement pur et simple de l’application de la loi relative à la transition énergétique : « Le texte a été écrit sans tenir compte de la loi votée. »

La baisse du budget relatif à l’écologie et la lenteur de la publication des décrets d’application de la loi relative à la transition énergétique nous interpellent également.

À la fin du mois d’avril 2016, 117 dispositions sur 164 restaient dans l’attente d’un décret d’application. Ainsi, ce sont 47 dispositions qui ont fait l’objet d’un décret de nature à permettre leur mise en application. Cela signifie que 77 % des dispositions de la loi n’ont toujours pas de décret d’application.

Ces retards concernent de nombreuses mesures structurantes, sans lesquelles la transition énergétique telle que définie par la loi ne peut être juridiquement engagée. Parmi celles-ci, les plus importantes sont les suivantes : la création du carnet numérique de suivi et d’entretien du logement ; la réglementation des travaux embarqués permettant d’atteindre, en une ou plusieurs étapes, pour chaque bâtiment ou partie de bâtiment, un niveau de performance énergétique compatible avec les objectifs de la politique énergétique nationale ; la création du Fonds de garantie pour la rénovation énergétique, avec les conditions de ressources des bénéficiaires ; la réforme de l’obligation d’achat et la création du dispositif de complément de rémunération pour les énergies renouvelables ; l’obligation d’achat de véhicules propres pour certaines flottes, et la liste n’est pas exhaustive !

Au niveau budgétaire, ce sont 136 millions d’euros d’annulations de crédits de paiement pour l’année 2016, qui concernent la plupart des programmes : le programme « Infrastructures et services de transports », à hauteur de 72,1 millions d’euros ; le programme « Énergie, climat et après-mines », à hauteur de 4,7 millions d’euros, sans être exhaustif, auxquels il faut ajouter 9,2 millions d’euros dans le programme « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables ».

De plus, les annulations de crédits pourraient finalement bien conduire à une revue à la baisse des subventions accordées pour la rénovation énergétique, notamment celles qui sont délivrées par l’ANAH, l’Agence nationale de l’habitat, malgré les différents montages proposés, entre autres le redéploiement de crédits, de l’ordre de 150 millions d’euros, vers le programme « Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat ». Il s’agit en fait d’un transfert vers l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, à destination de l’ANAH : « C’est de la tuyauterie », pour reprendre l’expression d’un journal du soir.

Or l’ambition affichée était de 500 000 rénovations annuelles à partir de 2017, et la France compte près de 4 millions de logements « passoires thermiques », extrêmement dégradés dans lesquels vivent, pour une bonne part, des ménages modestes, qui n’ont pas accès à des logements de qualité et thermiquement performants. Beaucoup d’entre eux ont du mal à se chauffer.

Ce grand chantier devait permettre de créer près de 75 000 emplois dans le bâtiment. « Un chiffre magique – ou vivement souhaité – que l’on n’atteindra probablement pas », selon le président de la CAPEB. Nous étions très attachés à cet objectif certes élevé, mais raisonnable et réaliste.

Finalement, c’est surtout dans le cadre de la libéralisation que les chantiers ont été les plus aboutis : la promotion de l’effacement par des agrégateurs privés, l’obligation d’installation des compteurs Linky, avec, en prime, l’ouverture des données de consommation des ménages, qui a engendrée des contestations.

Le grand débat que nous avions eu avec la ministre Mme Ségolène Royal nous avait passionnés et donné un peu d’espoir pour l’avenir. Aujourd’hui, la flamme n’est pas encore éteinte, mais il reste beaucoup à faire. C’est pourquoi nous attendons beaucoup de vos réponses, madame la secrétaire d'État. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – Mme Delphine Bataille et M. Joseph Castelli applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, en tout domaine nous pouvons avoir des lectures différentes ; pas étonnant, donc, que nous nous trouvions dans ce cas cet après-midi.

À la veille de l’examen par le Sénat du projet de loi autorisant la ratification de l’accord de Paris, comment ne pas commencer par se féliciter de l’importance de cet accord universel et sans précédent, ainsi que de la part que la France a prise dans les négociations qui ont conduit à ce succès, éloignant du même coup le fantôme de Copenhague ?

L’essentiel étant de persévérer, nous serons l’un des premiers pays de la planète à ratifier cet accord, qui vise à réorienter enfin la finance vers les investissements bas-carbone. De même, avec la publication de l’arrêté relatif aux objectifs de développement des énergies renouvelables, nous devenons le premier pays à inscrire dans son droit national la déclinaison des engagements de l’accord de Paris.

Ainsi, pour la France, les déclarations deviennent-elles des actes.

Il faut souligner aussi l’engagement qui vient d’être pris de fixer un prix plancher du carbone au 1er janvier 2017 – un dispositif qui pourrait servir de modèle aux autres pays de l’Union européenne.

On notera donc avec satisfaction que la France se place en tête des émetteurs d’obligations vertes ; la récente demande faite aux banques publiques le confirme amplement.

En ce qui concerne la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, constatons, pour nous en réjouir, que, au 10 mai dernier, 75 % de ses décrets d’application avaient été publiés ou étaient en cours d’examen par le Conseil d’État et que 94 mesures avaient été publiées ou étaient en cours de publication. Reconnaissons qu’il s’agit d’une performance pour une loi qui compte plus de 200 articles et 160 dispositions au moins relevant du domaine réglementaire.

L’enjeu est important, car, à la clé, il y a la création de plus de 100 000 emplois en trois ans ! Ce pari, nous pouvons le gagner ; il suffit d’observer les premiers résultats des mesures prises depuis 2014 : 20 000 emplois verts ont été créés. En particulier, l’emploi a progressé de 9 % dans le secteur de la rénovation énergétique du bâtiment, grâce à un dispositif d’aide efficace ; cette tendance devrait s’amplifier à la faveur de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Ainsi, le mur de l’argent ne fera plus obstacle aux travaux de rénovation.

L’emploi a également progressé, de 13 %, dans le secteur des énergies renouvelables. Les trois appels d’offres lancés depuis 2014 dans le photovoltaïque devraient susciter 1 milliard d’euros d’investissements et plus de 5 000 emplois, selon les acteurs économiques d’un secteur dans lequel, souvenons-nous, 15 000 emplois ont été détruits en 2011.

Même le secteur des véhicules électriques et hybrides a multiplié ses effectifs par trois.

Nul doute que l’annonce du doublement de l’enveloppe attribuée aux territoires à énergie positive viendra également conforter l’emploi : 400 territoires, déjà labellisés, bénéficient d’un fonds de 500 millions d’euros, susceptible d’entraîner 850 millions d’euros de travaux.

Nul doute non plus que le soutien accordé par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, à 15 000 opérations dans le cadre du fonds chaleur et du fonds déchets aura aussi un effet positif.

Quant à la stratégie bas-carbone, déjà publiée, et dont traitera dans quelques instants Jean-Yves Roux, elle devrait jouer favorablement tant sur le PIB que sur l’emploi et permettre à la France de rester parmi les pays les plus avancés de l’Union européenne dans la dynamique de réduction des gaz à effet de serre.

Comment ne pas saluer cette autre avancée que constitue la mise en place par la Caisse des dépôts et consignations d’un dispositif exceptionnel de 1,5 milliard d’euros pour financer, à taux zéro, les travaux de rénovation des bâtiments des collectivités territoriales, entre autres projets ?

Un autre motif de satisfaction réside dans les textes publiés sur le tiers financement, la rénovation des bâtiments tertiaires, le fonds de garantie pour la rénovation énergétique, le financement participatif pour les énergies renouvelables et l’expérimentation du chèque énergie. Monsieur le président Lenoir, je puis vous assurer que le Conseil supérieur de l’énergie, le CSE, se réunit à un rythme fort soutenu !

Il me paraît également essentiel de souligner l’importance de l’outil innovant de programmation stratégique que constitue la programmation pluriannuelle de l’énergie, la PPE, instaurée par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

M. Roland Courteau. La PPE va donner plus de visibilité aux acteurs,…

M. Ladislas Poniatowski. C’est indéfiniment repoussé !

M. Roland Courteau. … à commencer par les entreprises. Or la visibilité est fondamentale pour favoriser le basculement vers un mode décarboné de production de l’énergie.

Certes, la PPE a été reportée, le Gouvernement ayant choisi de procéder en deux temps, ce que nous pouvons comprendre : un décret a d’abord été publié pour sécuriser le développement des énergies renouvelables, qui ont grand besoin de visibilité. J’observe que les acteurs économiques se sont félicités de ce texte réglementaire, qui vise à augmenter la puissance installée des énergies renouvelables de 50 % en doublant celle de l’éolien terrestre, en triplant celle du photovoltaïque et en donnant un coup d’accélérateur aux filières bois-énergie, solaire-thermique et méthanisation, la production de la dernière devant être multipliée par sept. Voilà qui devrait favoriser la création des quelques dizaines de milliers d’emplois espérés dans le cadre de cette programmation.

Autant vous le dire nettement, madame la secrétaire d’État : j’apprécie que l’éolien flottant, qui fait l’objet d’un appel à manifestation d’intérêt, soit doté de 150 millions d’euros. En effet, je me sens particulièrement concerné par les projets pilotes du golfe du Lion, en Méditerranée, et je plaide volontiers, une nouvelle fois, en faveur de ce dossier.

Quant à la feuille de route sur le nucléaire et à la décision de ramener à 50 % la part de celui-ci dans le mix énergétique, on peut comprendre, là aussi, que quelques semaines supplémentaires soient nécessaires pour fixer la fourchette du nombre de réacteurs à fermer. Dans la mesure où il faut tenir compte des scénarios d’évolution de la consommation électrique à l’horizon de 2025, il paraît logique que les réacteurs à fermer soient désignés ultérieurement, d’autant qu’il faudra prendre en considération aussi le contexte économique, mais également les efforts réalisés en matière de maîtrise et d’efficacité énergétiques, sans oublier le taux de pénétration des énergies renouvelables ni, surtout, l’avis de l’Autorité de sûreté nucléaire sur la durée de vie des centrales.

En définitive, il s’agira de concilier l’atteinte de l’objectif de réduction du nombre de réacteurs avec le respect de notre approvisionnement énergétique. Tout cela me paraît cohérent, de bon sens et parfaitement responsable.

Les concessions hydroélectriques sont un sujet sensible, à propos duquel nous avions déposé une proposition de loi visant à prolonger les concessions lorsque des investissements importants peuvent être réalisés. Cette initiative, qui a été reprise dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, nous paraît essentielle.

Enfin, nous trouvons un motif de satisfaction supplémentaire dans la publication du décret relatif à nos entreprises consommatrices de grosses quantités d’énergie, pour lesquelles la maîtrise des coûts énergétiques constitue un facteur capital de compétitivité.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, en conclusion, le groupe socialiste et républicain tient à saluer le très grand nombre de dispositions prises dans le cadre de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. En plus d’améliorer la compétitivité et le pouvoir d’achat, cette loi invente d’une certaine manière le futur. Apprécions les mesures qui contribuent à préserver le bien mondial qu’est le climat et à faire de la France la nation de l’excellence environnementale ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – MM. Michel Le Scouarnec et Joseph Castelli applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission du développement durable, mes chers collègues, je commencerai par féliciter chaleureusement le groupe Les Républicains, tout particulièrement mes amis Jean-Claude Lenoir et Ladislas Poniatowski, pour le choix du thème de ce débat.

Nous vivons en effet un moment historique, ce qui n’a évidemment pas échappé à Jean-Claude Lenoir, même si ce dernier en a assez peu parlé en ouverture de notre débat… (M. Jean-Claude Lenoir s’exclame.)

De fait, entre le 7 et le 11 mai dernier, le Portugal a couvert l’ensemble de ses besoins en électricité en recourant uniquement à l’éolien, au solaire et à l’hydraulique. Le fait est d’autant plus notable que, en 2013 encore, ce pays tirait 23 % de son électricité du nucléaire importé et à peine 10 % de l’éolien et du solaire.

Très dépendant des énergies fossiles jusqu’à une période récente, le Portugal a fait le choix d’investir massivement dans l’éolien et l’hydraulique. Il a réussi, puisque, naguère importateur d’électricité, il en devient de plus en plus un exportateur. Mes chers collègues, c’est ce nouveau paradigme électrique qu’il convient de considérer lucidement.

En Allemagne, comme il a presque été dit – je dis bien : presque ! –, les énergies renouvelables ont battu de nouveaux records en 2015. Pendant cette année, en effet, les énergies vertes ont couvert près d’un tiers de la consommation électrique allemande – 32,5 %, pour être exact, contre 27 % l’année précédente – et 30 % de la production électrique. Quant à la production éolienne terrestre, elle se hisse à 78 térawattheures, ce qui représente un bond de 50 % par rapport à 2014. Encore faut-il ajouter que la consommation d’électricité en Allemagne a légèrement augmenté l’an dernier, dans le sillage d’une année plus froide que la précédente.

Le plus fort est que cette année sera probablement meilleure encore que la précédente. Ainsi, le 8 mai dernier, l’Allemagne a produit 95 % de son électricité avec des énergies renouvelables : les quelque 50 gigawatts de consommation ont été presque totalement couverts par cette production, assurée notamment par l’énergie solaire, pour plus de 16 gigawatts.

Permettez-moi d’indiquer aussi que, au niveau mondial, les investissements en production électrique renouvelable ont mobilisé, en 2015, 286 milliards de dollars d’investissements, soit plus du double des sommes investies dans les centrales à charbon et à gaz. Je ne parle évidemment pas de l’investissement dans le nucléaire, totalement négligeable par rapport au montant dont je viens de faire état.

Or le développement inéluctable des énergies renouvelables n’est pas sans conséquences. Le jour du pic de production renouvelable en Allemagne que je viens d’évoquer, le prix d’échange de l’électricité s’est établi à un niveau négatif : - 97 euros le mégawattheure entre 13 et 16 heures et jusqu’à - 130 euros entre 14 et 15 heures. (M. Ladislas Poniatowski opine.) Ladislas Poniatowski et moi-même avons des préoccupations communes.

Dans une Europe de plus en plus interconnectée, cette évolution des productions énergétiques affecte très fortement l’ancien modèle énergétique français, qui, en termes économiques, ne tient plus ; ce constat doit faire consensus entre nous.

M. Jean-Claude Lenoir. Dites-nous donc quelle est la part du charbon en Allemagne !

Mme Évelyne Didier. Elle va se réduire : il s’agit d’une période transitoire !

M. Ronan Dantec. L’extrême gravité de la situation financière d’EDF et les conséquences de nos retards sur notre capacité à faire évoluer le système énergétique français sont aujourd’hui telles que je tremble, très sincèrement, pour le service public à la française, du moins si nous continuons de vivre dans le déni du monde réel.

Souvenez-vous, mes chers collègues, que l’endettement d’EDF s’élève déjà à 37 milliards d’euros, de sorte que le mur d’investissements auquel le groupe doit faire face paraît aujourd’hui très clairement infranchissable. À lui seul, le grand carénage des centrales nucléaires pourrait coûter entre 50 milliards d’euros, selon EDF, et 100 milliards d’euros, selon la Cour des comptes. Une somme à laquelle il faut ajouter les 2,5 milliards d’euros correspondant au rachat de l’activité réacteurs d’Areva, aujourd’hui en faillite virtuelle. Sans oublier, bien entendu, l’investissement de 18 milliards de livres sterling dans l’EPR d’Hinkley Point, qui a déjà provoqué la démission du directeur financier du groupe.

Ce n’est pas faisable ! Sauf à vendre les bijoux de famille : RTE aujourd’hui et, demain, probablement, ERDF, qui est le socle de l’égalité à la française dans le domaine de l’accès à l’électricité.

Je le dis et je le répète : notre principal problème est l’effondrement du prix de gros sur le marché de l’électricité. Songez que, en moyenne, ce prix est passé de 42 euros le mégawattheure à la fin de 2014 à 28 euros aujourd’hui, alors qu’EDF considère que, à moins de 37 euros, le système n’est plus viable…

Sans doute M. Lenoir peut-il m’opposer sa démonstration, que je connais bien, sur la différence entre le prix de l’électricité d’origine renouvelable et le prix de gros, celui de l’électricité qu’on achèterait sur un marché libéralisé : de cette soustraction résultent 100 milliards d’euros de contributions. Seulement voilà : aujourd’hui, le même calcul réalisé pour le tarif de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique, l’ARENH, donne un montant d’argent public bien supérieur encore !

M. Jean-Claude Lenoir. Et la part des subventions pour installer les unités de production ?

M. Ronan Dantec. Sans compter qu’EDF propose de relever l’ARENH à 55 euros… Ne perdons jamais de vue la réalité des masses financières en jeu !

Conclusion : le modèle actuel n’est plus viable.

Dès lors, pour un vrai libéral, et même pour un simple lycéen ayant suivi quelques mois de cours d’économie, la seule issue consiste à réduire la production. D’ailleurs, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte réaffirme bien que la production électrique française n’augmentera plus.

Or, pour réduire la production, il faut aujourd’hui fermer non pas des productions intermittentes, mais des productions de base. Pour ce faire, notre seule possibilité est de fermer des centrales nucléaires. En d’autres termes, si nous voulons rendre le système à nouveau viable en termes économiques pour EDF, il faut fermer un certain nombre de tranches nucléaires. Sans remontée des prix, EDF ne survivra pas ! Vouloir retarder la fermeture de Fessenheim est donc un dangereux combat d’arrière-garde.

Mes chers collègues, voilà quelques années, vingt ans peut-être, j’aurais pris la parole comme l’incarnation de l’écolo chevelu, brun et barbu, fier du panneau solaire fait maison accroché sur son toit… (Rires.)

M. Ladislas Poniatowski. Vous vieillissez un peu…

M. Jean-Claude Lenoir. La chevelure n’a pas changé ! (Sourires.)

M. Ronan Dantec. Nous avons certes un peu blanchi, mais, surtout, le monde a bien changé !

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Ronan Dantec. Je conclus sur ce point, monsieur le président.

Avez-vous remarqué ce fait dont je suis tout tourneboulé ? Cet après-midi, c’est moi qui représente les puissances industrielles – je ne dis pas : le grand capital –, celles qui brassent des centaines de milliards d’euros et créent des millions d’emplois, 8 millions selon les derniers chiffres de l’IRENA sur le développement des énergies renouvelables !

M. le président. Concluez, monsieur Dantec !

M. Ronan Dantec. Je m’adresse donc avec bienveillance aux derniers représentants d’une production énergétique marginale, car j’ai été dans la même situation dans ma jeunesse… Je leur dis : Évoluez, ouvrez les yeux, sans quoi la France va connaître de grosses difficultés ! (Mme Évelyne Didier applaudit. – M. Ladislas Poniatowski s’exclame.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les décisions en matière de politique énergétique engagent l’avenir des générations futures sur plus d’un siècle, à l’instar du décret paru le 2 juin dernier qui détaille les opérations de démantèlement de Phénix : ce réacteur, autorisé en 1969, ne sera démantelé qu’en 2050.

Aussi est-il nécessaire que la représentation nationale se prononce sur les orientations de la politique énergétique, qui, longtemps, a relevé du seul pouvoir exécutif.

Dans cet esprit, la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte met en place une programmation pluriannuelle de l’énergie, ou PPE, instrument de pilotage permettant de fixer clairement les objectifs du pays dans le domaine de l’énergie.

Remplaçant la programmation pluriannuelle des investissements de production d’électricité et de chaleur, définissant les besoins énergétiques futurs selon des hypothèses d’évolution démographique et de contexte économique, comportant une évaluation de l’impact économique, social et environnemental des évolutions prévues et déterminant leur coût prévisionnel pour les finances publiques, cette loi est le fondement sur lequel repose la transition énergétique.

Pour l’instant, le Gouvernement s’est contenté d’une simple actualisation, peu ambitieuse, de la précédente programmation pluriannuelle des investissements. Est-ce un aveu de son impuissance à respecter ses promesses électorales ?

Bien que cet exercice n’aille pas de soi – je le conçois –, il est regrettable que, à ce stade, nous ne disposions pas de la première version de la PPE, qui devait couvrir les années 2016 à 2018 ; en effet, cette programmation était l’une des principales avancées de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

La réduction de 75 à 50 % de la part du nucléaire dans notre mix électrique à l’horizon de 2025, votée à l’Assemblée nationale, implique que soient sacrifiés dix-sept à vingt réacteurs, comme l’explique la Cour des comptes dans son dernier rapport annuel, rendu public en février dernier. En d’autres termes, il s’agit de sacrifier – j’emploie ce verbe à dessein – un tiers de notre parc nucléaire, sans pour autant se fonder sur des critères de sécurité.

Le tableau est bien noir, tant il est vrai qu’Areva et EDF sont en difficulté : le grand carénage des réacteurs coûte cher, des actifs sont cédés et des postes supprimés, l’exploitant est indemnisé dans des proportions dérisoires pour la fermeture de Fessenheim, le dossier de l’EPR est dans l’impasse et la durée de vie des centrales donne lieu à des tergiversations. Ce qui est certain, c’est que les moyens financiers n’ont pas suivi. C’est un coup porté à l’un de nos fleurons industriels, sans garantie que notre indépendance énergétique ne sera pas affectée.

Quel est donc l’avenir de l’atome en France ? Nous contenterons-nous de faire plaisir aux États voisins en arrêtant les réacteurs situés aux frontières, ou bien nos décisions se fonderont-elles sur la sûreté de nos installations ?

Il est pourtant incontestable que le mix énergétique français, reposant à la fois sur le nucléaire et sur les énergies renouvelables, a toute sa place dans l’accomplissement des objectifs de réduction de gaz à effet de serre.

La visibilité doit être garantie pour permettre aux industriels d’adapter la trajectoire de leurs investissements, quelle que soit la source d’énergie. De fait, il est absurde et peu compatible avec l’efficacité de la dépense publique d’investir lourdement dans un réacteur qui devra fermer rapidement.

Lors de la récente conférence environnementale, le Président de la République a déclaré : « Fermer des centrales n’est pas une décision qui s’improvise », tout en précisant que le processus devrait s’accompagner d’« un calendrier précis, dans le respect des personnels, des territoires et de nos engagements en matière de climat ». Désigner les réacteurs qui seront prochainement arrêtés serait, à mon sens, plus respectueux.

Il convient en effet d’arrêter clairement la stratégie à suivre, en particulier pour la filière nucléaire, si l’on veut que la transition énergétique soit une réussite.

En ce qui concerne les énergies renouvelables, outre qu’il est nécessaire d’accélérer la simplification des procédures administratives, les objectifs fixés dans l’attente de la PPE ne sont pas suffisamment ambitieux. C’est le cas notamment pour les énergies marines renouvelables, dont il a déjà été précédemment question, puisque nous nous contentons d’un objectif de 100 mégawattheures à l’horizon de 2023, alors que les autres États membres de l’Union européenne avancent à grands pas.

Enfin, pour ce qui est des dispositions visant à accroître l’efficacité énergétique, je finirai par quelques remarques positives.

Je salue ainsi la publication du décret relatif à l’obligation d’isoler les bâtiments lors des grands travaux, qui devrait procurer du travail aux artisans et aux entreprises, même si de nombreuses dérogations demeurent. Je constate également les progrès réalisés au cours de ces derniers mois sur un certain nombre de points, notamment grâce aux mesures qui accompagnent la transition énergétique, comme le soutien aux cinq cents territoires à énergie positive pour la croissance verte.

Je tiens à répondre à Ronan Dantec qui, parlant de la société de distribution d’électricité, ERDF, devenue ENEDIS, proposait de vendre les bijoux de famille. Mais, mon cher collègue, cette société ne pourra pas les vendre ! En effet, les réseaux électriques à basse et moyenne tension appartiennent aux syndicats d’électrification,…

M. Jean-Claude Requier. … et donc aux communes ! (M. Ronan Dantec s’exclame.)

M. Jean-Claude Requier. Je ne vois pas comment cette entreprise pourrait vendre un bien qui ne lui appartient pas !

M. Ladislas Poniatowski. C’est très bien de le rappeler !

M. Ronan Dantec. Ce n’est pas vrai !

M. Jean-Claude Requier. Je ferme la parenthèse.

Madame la secrétaire d’État, ce n’est pas tant la communication autour du nombre de décrets qui nous préoccupe – même si 75 % des décrets et 95 % des ordonnances ont été publiés ou sont en cours d’examen au Conseil d’État –, mais leur contenu.

Je constate que l’essentiel, à savoir la programmation pluriannuelle de l’énergie, fait défaut à ce jour. J’espère que vous nous apporterez des réponses claires sur le sujet à l’occasion de ce débat. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur certaines travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Canevet applaudit également.)

M. Alain Gournac. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Louis Nègre.

M. Louis Nègre. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoyait un cortège d’objectifs s’inscrivant dans une logique simple : il s’agissait de réduire les émissions de gaz à effet de serre pour que la France apporte une contribution décisive à la réussite de l’accord de Paris sur le climat.

La politique de transition énergétique que vous mettez en œuvre, madame la secrétaire d’État, consiste avant tout en une diversification de notre bouquet énergétique, ce qui a toujours été défendu par le groupe Les Républicains, comme le président Jean-Claude Lenoir et notre collègue Ladislas Poniatowski l’ont rappelé tout à l’heure.

Or le rééquilibrage souhaité par tous devra essentiellement se concentrer autour de la biomasse, du solaire et de l’éolien. C’est la récente programmation pluriannuelle de l’énergie, la PPE, qui nous dévoile les objectifs du Gouvernement dans ce domaine.

Aussi, j’insisterai dans le débat de ce jour sur deux points : la diversification du bouquet énergétique, tout d’abord, et les économies d’énergie issues des nouvelles mobilités, ensuite.

S’agissant du premier point, à savoir les énergies renouvelables, la direction est bonne mais les résultats risquent de se faire attendre.

En effet, nous attendons plus que jamais une vraie mobilisation de la part de la filière issue de la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse. Cette énergie ne représente aujourd’hui que 7,9 des 550 térawattheures d’électricité produits en France. À ce titre, madame la secrétaire d'État, qu’en est-il du doublement du fonds chaleur et des appels d’offres pour la biomasse ?

Concernant les autres énergies renouvelables, les objectifs de la programmation pluriannuelle de l'énergie ont gagné en crédibilité même si, selon nous, certains d’entre eux sont encore optimistes, car ils vont bien au-delà du paquet énergie-climat européen.

De la même manière, je suis assez inquiet par rapport à l’objectif de 100 mégawattheures pour l’énergie marine renouvelable, car celui-ci est extrêmement limité. Qu’en est-il, là aussi, des appels d’offres concernant l’hydrolien et de leur intégration dans la PPE ?

S’agissant maintenant du second point, c’est-à-dire des économies d’énergie issues des nouvelles mobilités, certaines mesures sont intéressantes. Toutefois, notre avis est là encore nuancé.

Comme je l’ai dit en introduction, la transition énergétique est aussi et surtout une économie sobre en énergie grâce à une révolution des mobilités. (Mme la secrétaire d’État opine.) En effet, les transports représentent 32 % de la consommation finale d’énergie devant le logement qui correspond, lui, à 30 % de cette même consommation.

Conscient de cette réalité, le gouvernement auquel vous appartenez a consacré une partie substantielle de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte aux transports, madame la secrétaire d’État ! Cela commence bien… (Sourires.)

Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d'État. Oui, en effet ! (Nouveaux sourires.)

M. Louis Nègre. Nous attendons cependant l’application concrète de la première disposition, qui consistait pour l’État, les établissements publics, les loueurs de voitures, les taxis et les exploitants de VTC, les voitures de transport avec chauffeur, à acquérir des véhicules à faibles émissions.

Le texte retient par ailleurs une définition réaliste en distinguant les obligations de l’État de celles des collectivités locales. Cette disposition me paraît aller dans le bon sens, car elle tient compte des réalités financières de nos institutions respectives.

Cependant, madame la secrétaire d’État, je souhaite vous saisir du problème lié à l’application de l’article 37 de la loi, qui précise que les « véhicules à faibles émissions [sont] définis comme […] électriques ou les véhicules de toutes motorisations et de toutes sources d’énergie produisant de faibles niveaux d’émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques, fixés en référence à des critères définis par décret ».

C’est là que le bât blesse : le projet de décret crée en effet une véritable « usine à gaz » qui différencie les carburants comme les motorisations, au lieu de s’en tenir tout simplement aux taux des émissions produites, comme le souhaitait le législateur ! Je vous rappelle à cet égard, madame la secrétaire d’État, que le législateur avait souhaité retenir une formule neutre sur le plan technologique, car c’est la réalité des émissions polluantes qui compte pour le citoyen et non le type de motorisation ou le type de carburant !

S’agissant maintenant du décret créant les zones à circulation restreinte, les ZCR, vos services nous ont répondu que vous vous trouveriez dans une phase de consultation. Sur le principe, je suis favorable à la nouvelle rédaction de ce décret, sous réserve que les véhicules dédiés aux transports en commun en soient exclus. Ils sont en effet déjà couverts par l’article 37 dont je viens de parler. Il est important de laisser circuler les bus, de façon à offrir une alternative à nos concitoyens qui ne pourraient se déplacer autrement.

Enfin, je constate que les signaux envoyés par le Gouvernement sont contradictoires.

À titre d’exemple, je souhaite évoquer l’aide à l’acquisition de véhicules peu polluants. Ce dispositif vertueux, antérieur à la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, a porté ses fruits. Toutefois, les modifications dans l’application de la règle du bonus-malus ont conduit à une diminution drastique de ses bénéficiaires. Comment le Gouvernement pourrait-il faire passer un message prioritaire sur la dépollution du parc automobile dans de telles conditions ? Comment y parviendrait-il s’il ne s’en donne pas les moyens ?

En changeant les règles du jeu, on perturbe le consommateur. En diminuant significativement le bonus, l’effet d’entraînement est diminué d’autant. Et ce n’est pas la création d’un super-bonus de 10 000 euros qui pourra masquer cette réalité !

Aussi, madame la secrétaire d’État, en tant que corapporteur du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, je ne peux qu’inviter le Gouvernement à rendre le processus engagé plus dynamique et à rendre à ce texte toute sa force initiale ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Hervé Maurey applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux. (Mmes Marie-Pierre Monier et Gisèle Jourda applaudissent.)

M. Jean-Yves Roux. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous avons raison d’être collectivement exigeants sur les conditions d’application de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

L’ampleur des enjeux environnementaux et leurs conséquences sur toute l’activité économique, ainsi que sur les perspectives de croissance et d’emplois, nous rendent en effet doublement comptables, et ce d’autant que la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte nous y invite.

Cette loi fixe en effet les grandes lignes d’une trajectoire à la fois réaliste et volontaire de réduction de nos émissions de gaz à effet de serre : 40 % de réduction de gaz à effet de serre entre 1990 et 2030, ainsi qu’une division par quatre de ces émissions entre 1990 et 2050. Au regard des engagements que nous avons pris lors de la COP 21 et du rôle majeur de la France dans ces négociations, elle anticipe et représente le bras armé de la concrétisation de l’accord de Paris.

Vous me permettrez d’être plus particulièrement attentif à la mise en œuvre de l’article 173, consacré à la stratégie nationale bas-carbone.

La philosophe Cynthia Fleury disait que la construction de l’État de droit était l’aventure du fossé entre les principes et les pratiques. Or, si la transition énergétique et la lutte contre le réchauffement climatique sur le plan international sont des principes fondamentaux, la stratégie nationale bas-carbone et la mise en place de budgets carbone en déterminent les pratiques.

Le décret du 18 novembre 2015, qui est donc en vigueur depuis six mois, précise d’ores et déjà les modalités de cette stratégie pour l’État, les collectivités territoriales et leurs groupements, ainsi que pour les personnes morales de droit public. Il définit ainsi le périmètre des budgets carbone par lesquels la réduction de ces émissions passera, en excluant pour le moment l’agriculture et la foresterie.

L’évaluation des premiers effets produits par ce décret me paraît pour le moment quelque peu prématurée. Rappelons que la stratégie nationale bas-carbone fera l’objet d’une révision à la fin du mois de juin 2019, en s’appuyant sur des évaluations données à un rythme biannuel par le Conseil national de la transition écologique. Une évaluation sectorielle dans six mois, au moment de la discussion budgétaire, sera sans doute des plus opportunes.

Toutefois, à ce stade, il me paraît fondamental de ne pas briser la dynamique d’investissement amorcée par les budgets carbone dans les domaines de la construction, de l’industrie, des déchets ou des énergies renouvelables.

En effet, la stratégie nationale bas-carbone ne constitue pas en soi un frein à la vitalité économique. Au contraire, elle vise précisément à définir une feuille de route pour réduire les émissions de gaz à effet de serre tout en garantissant une soutenabilité économique sur le moyen et le long terme. Elle nécessite des investissements et de l’innovation, nerf de la guerre de la compétitivité économique à venir.

Par ailleurs, je ne doute pas que la concrétisation de l’accord de Paris fera de la qualité de la production décarbonée un argument indispensable à l’exportation. Je plaide pour que la prise en compte de la stratégie nationale bas-carbone intervienne plus systématiquement dans chacune de nos décisions, au Parlement comme dans nos territoires, en pleine cohérence.

Mes chers collègues, le basculement vers une production décarbonée et une lutte efficace contre le dérèglement climatique supposent non seulement de la cohérence mais aussi une visibilité sur le long terme. À ce titre, et afin de renforcer la visibilité des acteurs économiques, la mise en place d’une tarification carbone constitue un véritable atout.

Avec une trajectoire ambitieuse pour la contribution climat-énergie, qui est fondée sur une valeur de la tonne de carbone fixée à 56 euros en 2020 et à 100 euros en 2030, la France donne indéniablement l’exemple !

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Jean-Yves Roux. Cependant, je crains que le prix du carbone et la structuration actuelle du marché du carbone européen ne soient pas encore suffisamment incitatifs pour opérer ce nécessaire basculement.

Peut-être ne faut-il pas s’arrêter là, madame la secrétaire d’État, et ne pas simplement chercher à inciter des entreprises à adopter des comportements vertueux, mais plutôt essayer de leur donner les moyens financiers dont elles ont besoin ?

Certains économistes, Michel Aglietta en tête, recommandent ainsi de mettre en place de véritables certificats carbone à l’échelle européenne. Il s’agirait d’actifs carbone consacrés au financement d’investissements décarbonés et susceptibles de promouvoir une industrie bas-carbone dans toute l’Union européenne. Ce processus de certification permettrait de dégager des financements qui ne grèveraient pas les budgets des États, tout en redynamisant la croissance européenne verte.

Des certificats pourraient être délivrés aux entreprises en fonction des résultats en matière de réduction de gaz à effet de serre qu’elles atteindraient. Ces entreprises engagées et impliquées transmettraient ensuite ces certificats verts à leur banque pour rembourser leur crédit. Les banques pourraient à leur tour transférer ces certificats à la Banque centrale européenne, la BCE.

Ainsi, comme l’explique M. Aglietta, « en achetant des actifs carbone garantis au lieu de titres de dettes publiques existantes, la BCE acquerrait des actifs privés directement créateurs de revenus. »

Couplée à la tarification carbone, cette idée mérite sans doute d’être creusée.

M. Roland Courteau. Absolument !

M. Jean-Yves Roux. Mes chers collègues, la mise en œuvre de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, notamment en ce qui concerne la stratégie nationale bas-carbone, suit une trajectoire équilibrée, réaliste mais surtout volontaire. C’est ce cap qu’il convient de maintenir ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Alain Marc. (M. Jean-Claude Lenoir applaudit.)

M. Alain Marc. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la France dispose de l’un des tout premiers ensembles hydroélectriques sur les vallées de la Truyère et du Lot.

Aujourd’hui déjà, cet ensemble de concessions d’une puissance totale de près de 2 000 mégawattheures est stratégique pour la sécurité de notre approvisionnement en électricité. Demain, il pourrait constituer l’une des meilleures réponses au besoin de flexibilité du système électrique et un puissant levier de la transition énergétique française.

En effet, le concessionnaire en place serait en mesure d’y réaliser d’importants investissements. Il suffirait pour cela que l’État proroge ces concessions en retenant une durée raisonnable d’amortissement, ce à quoi l’article 116 de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte l’autorise.

Pourtant, l’avenir de ces projets reste très incertain. En effet, la France a reçu le 22 octobre 2015 une mise en demeure de la Commission européenne lui demandant de mettre en concurrence une part significative des concessions aujourd’hui exploitées par EDF, afin de les attribuer à d’autres opérateurs, au motif que l’opérateur historique occuperait une position dominante sur le marché de l’électricité.

Mme Évelyne Didier. Je croyais pourtant qu’il fallait démanteler le service public de l’énergie ?

M. Alain Marc. Si aucune décision d’infraction à la législation européenne n’a pour le moment été prise par la Commission européenne à la suite de cette mise en demeure, rien ne permet à ce stade de rassurer les élus, les collectivités territoriales et les habitants des vallées concernées quant à l’avenir des concessions.

Dans le contexte économique difficile que nous connaissons, ces investissements – plusieurs centaines de millions d’euros – auraient un fort impact sur nos territoires ruraux, en termes tant d’emplois que de fiscalité, et créeraient de nouvelles ressources pour nos collectivités locales.

Une procédure de mise en concurrence ferait courir le risque de voir ces investissements être reportés de plusieurs années, voire annulés.

EDF, puisqu’il faut bien nommer cette société, est depuis longtemps un acteur important de nos territoires. Les relations de travail avec cette entreprise sont souvent des relations de confiance et efficaces, qu’il s’agisse d’œuvrer pour le développement économique ou de partager l’eau stockée dans les retenues. Cette confiance patiemment établie serait une garantie supplémentaire pour la réussite de ces projets.

Madame la secrétaire d’État, l’arrêté du 24 avril 2016 relatif aux objectifs de développement des énergies renouvelables a fixé des objectifs très ambitieux en matière de développement des énergies éolienne et photovoltaïque pour notre pays. Il vise a minima à doubler le parc éolien et à tripler le parc photovoltaïque à l’horizon 2023.

Ces énergies étant de fait intermittentes et imprévisibles, leur intégration dans le réseau électrique ne sera possible que si notre pays développe en parallèle des moyens de production flexibles, capables de suppléer rapidement les variations du vent et du soleil. Ces moyens flexibles existent : ce sont nos grands barrages !

Aussi, je vous prie, madame la secrétaire d’État, de bien vouloir nous faire connaître la position du Gouvernement quant à l’application de l’article 116 de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, et plus particulièrement sa position sur la possibilité de proroger les concessions des vallées de la Truyère et du Lot – elles comptent pour plus de 10 % dans la production hydroélectrique nationale – dans le double intérêt de la transition énergétique et du développement de nos territoires.

Nous aimerions aussi connaître le degré d’implication du Gouvernement dans les négociations qui se déroulent avec la Commission européenne sur le sujet. (Applaudissements sur certaines travées du groupe Les Républicains. – M. Hervé Maurey applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la ville. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Ségolène Royal, retenue par d’autres obligations (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.) et qui m’a demandé de la représenter devant vous. Je ferai de mon mieux pour être la plus complète possible dans mes réponses, et je ne doute pas que, lorsque la ministre de l’environnement viendra à votre rencontre, elle complétera ce qui n’aurait pas été parfait.

Avant de répondre plus précisément aux différentes questions, je voudrais vous adresser un message de la part de Mme la ministre, également présidente de la COP. Je souhaite en effet dire, même si certains d’entre vous en ont parlé, que six mois presque jour pour jour après l’adoption à Paris, le 12 décembre dernier, d’un accord universel sur le climat, la COP 21 a montré l’extraordinaire prise de conscience et la mobilisation au sein de la société tout entière et dans tous les pays du monde face aux défis liés aux enjeux climatiques. Il faut saluer cette énergie, d’autant que la France a permis d’aboutir à ce résultat.

La venue de 154 chefs d’État ou de Gouvernement le premier jour a donné l’impulsion politique et fixé le cap. Cette mobilisation s’est confirmée le 22 avril dernier à New York, avec la signature en un seul jour – c’est une fois de plus un record historique – par plus de 170 pays de l’accord de Paris.

Vous me l’accorderez, la mobilisation de la France pour la réussite de la COP 21 peut être saluée à plusieurs titres : d’abord, sous l’angle diplomatique, avec une équipe de négociateurs de talent ; ensuite, sous l’angle de l’organisation, irréprochable, seulement quelques jours après les dramatiques attentats du 13 novembre. On peut également saluer la sincérité de la France dans sa volonté d’agir pour la planète et ses habitants.

M. Roland Courteau. Exactement !

Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d'État. De ce point de vue, l’adoption, dès le mois d’août 2015, de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, riche, et ce grâce à vous, d’un débat parlementaire intense, a grandement contribué à asseoir la crédibilité de la France dans son rôle d’organisateur.

J’en viens aux points que vous avez évoqués tout au long de vos interventions.

La France a inscrit dans la loi sa contribution nationale à la lutte contre le dérèglement climatique. Vous le savez, l’accord de Paris a fixé pour objectif de contenir la hausse des températures bien en deçà de 2 degrés et de s’efforcer de la limiter à 1,5 degré. Cet accord prévoit que chaque pays mette à jour tous les cinq ans, de façon toujours plus ambitieuse, sa contribution nationale.

Le débat d’aujourd’hui est donc l’un des jalons du suivi de l’ambition que la France a portée au travers de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Vous l’avez rappelée dans vos interventions, parfois avec un peu de malice, mais toujours, je n’en doute pas, avec la volonté que nous allions plus loin.

Il s’agit de réduire de moitié la consommation d’énergie d’ici à 2050, de porter à 32 % la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique d’ici à 2030 et à 40 % dans l’électricité ainsi que de diminuer de 30 % le recours aux énergies fossiles. Un certain nombre d’entre vous ont exprimé des inquiétudes concernant cette part d’énergies renouvelables. Je rappelle que nous voulons au minimum doubler la puissance installée des éoliennes terrestres, tripler la puissance solaire photovoltaïque installée, multiplier par quatre la production de chaleur à partir de géothermie. L’ambition est forte, notamment avec l’éolien en mer, qu’il s’agisse de l’éolien en mer posé ou de l’éolien flottant, dont les premiers résultats de l’appel d’offres pilote seront annoncés dès le mois de juillet.

Le cadre de soutien aux énergies renouvelables est donc réformé, mais pour favoriser et accélérer encore ce développement. Ainsi, la publication d’un calendrier des appels d’offres vise, comme cela a été souligné, à donner plus de visibilité et la simplification des procédures d’appels d’offres permettra d’avancer plus vite.

Quant au financement de ces énergies renouvelables, sujet qui a également été évoqué, la CSPE, gelée à 22,5 euros par mégawattheure, ce qui reste inférieur à l’Allemagne, permet de préserver le pouvoir d’achat des consommateurs.

Ce texte sur la transition énergétique est également fondateur du fait de l’éventail des mesures qu’il comprend : il touche bien sûr à l’énergie, mais également à tous les champs de la vie quotidienne. Car l’enjeu est bien là : toute la société doit se saisir du sujet. Voilà pourquoi les questions liées au bâtiment, aux transports, à la production de biens ou de services, à l’économie circulaire ainsi qu’au traitement des déchets sont portées autour d’une gouvernance que nous avons souhaité partagée – cela est inscrit dans la loi –, incluant les investisseurs et les entreprises. Vous le voyez, c’est un nouveau modèle de développement qui est en train de s’opérer.

Mme la ministre Ségolène Royal a également fait de la mobilisation de la société civile, au niveau tant national qu’international, au travers de l’agenda de l’action, le fil rouge de son action pour le climat.

Vous le savez, élus, citoyens, entreprises ont bénéficié en France de moyens d’accompagnement techniques et financiers sans précédent. Je le dis avec d’autant plus d’aisance que, voilà peu, j’étais vice-présidente à l’énergie de la métropole de Lyon. À ce titre, j’ai assisté à la mise en œuvre de ce soutien financier aux actions à destination des territoires à énergie positive pour la croissance verte – 400 territoires sont concernés – et des 150 territoires zéro déchet.

Je citerai la mise en place et la pérennisation du crédit d’impôt pour la transition énergétique ou les aides de l’Agence nationale de l’habitat. Sur ce sujet important, y compris pour le secrétariat d’État à la ville dont je porte la mission, je m’arrêterai un instant. Aujourd’hui, dans tous les programmes, qu’il s’agisse du renouvellement urbain ou des actions de l’ANAH, est inscrite la question de la rénovation des bâtiments, avec des moyens dédiés à l’échelon national, mais également déployés par les collectivités qui s’y investissent. Il convient d’ajouter à cela le poids de la Caisse des dépôts et consignations.

Je tiens aussi à vous rappeler le soutien du programme d’investissements d’avenir aux technologies de la transition énergétique et la green tech, ainsi que le déploiement des appels d’offres pour les énergies renouvelables – j’ai déjà abordé ce point.

La création d’une prime, dont le montant pourra atteindre 10 000 euros, est prévue pour la conversion des véhicules les plus polluants. J’en profite pour donner quelques éléments de réponse à Louis Nègre sur la question des décrets liés aux véhicules.

Comme vous le souhaitez, monsieur le sénateur, la loi prévoit que les véhicules propres soient imposés aux collectivités locales, dans le cadre des renouvellements, notamment des bus. Sur ce sujet, nous travaillons à trouver un bon équilibre entre la protection de la qualité de l’air, dont l’exigence est élevée, et le coût que devraient supporter les collectivités. Pour ce faire, il semble important que le temps de la consultation soit conservé.

De même, le décret concernant les bus et les cars propres est en phase d’arbitrage après la consultation des acteurs que vous avez vous-même évoquée. Il est évident qu’il faut aussi réfléchir à la technologie des véhicules et pas simplement, vous l’avez dit, aux normes d’émissions, qui sont elles aussi actuellement en discussion.

Grâce à vous, mesdames, messieurs les sénateurs, la France sera dans quelques jours le premier pays d’Europe à ratifier l’accord de Paris. Celui-ci entrera en vigueur lorsque 55 pays, représentant 55 % des émissions de gaz à effet de serre, l’auront ratifié. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a donné des moyens d’agir.

Vous m’avez interrogée sur les cadres d’action.

D’abord, la stratégie nationale bas-carbone a été publiée dès le 15 novembre 2015. Elle est notre guide pour la transformation d’une économie encore trop conservatrice, notamment dans le bâtiment, les transports, l’industrie et l’agriculture. Elle contribuera à améliorer la compétitivité de notre économie.

Je le rappelle, les économies d’énergie, ce n’est pas simplement un dogme ; elles font baisser les factures de tous les consommateurs. Les énergies renouvelables, par exemple, font baisser nos importations d’hydrocarbures et améliorent notre solde commercial.

Les études économiques montrent que les actions entreprises dans tous les secteurs permettront d’augmenter la croissance de notre PIB de plus de 1,5 %, en moyenne, sur la période 2015-2035, et de créer plus de 350 000 emplois. Aujourd’hui, ce sont déjà 20 000 emplois qui ont été créés, comme cela a été rappelé.

La trajectoire inscrite en loi de finances pour le prix carbone nous place à l’avant-garde des pays du monde qui s’engagent, avec un objectif de 56 euros la tonne en 2020 et 100 euros en 2030.

Vous m’avez aussi largement interrogée sur les dispositions de la loi qui seront applicables un an après sa promulgation. Plusieurs chiffres, comme l’a indiqué M. Lenoir, ont été avancés. D’après les données les plus officielles possible, 56 % des décrets ont été publiés, taux qui grimpera à 80 % à l’issue de l’examen par le Conseil d’État – d’où la différence avec vos chiffres, monsieur le sénateur. En ce qui concerne les ordonnances, ce taux est déjà atteint.

Je ne vous ferai pas la liste exhaustive de tous les décrets et ordonnances déjà publiés.

M. Jean-Claude Lenoir. C’est dommage ! (Sourires.)

Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d'État. J’en ai six pages devant les yeux. Si vous le souhaitez, je peux vous les lire, mais je suis sûre que vous ne me le demanderez pas. (Sourires.)

Parmi ces nombreux textes, je citerai les mesures relatives à l’individualisation des frais de chauffage qui permettent à chacun de maîtriser sa consommation, celles qui sont relatives à la création des sociétés de tiers-financement pour la rénovation énergétique, la création de certificats d’économies d’énergie dédiés à la lutte contre la précarité.

Quant à l’expérimentation du chèque énergie sur laquelle m’a interrogée M. Le Scouarnec, elle a lieu aujourd’hui dans quatre départements : l’Ardèche, les Côtes-d’Armor, le Pas-de-Calais et l’Aveyron. Une fois cette expérimentation achevée, un bilan en sera établi.

De plus, est paru le décret lié au cadre rénové du soutien financier aux énergies renouvelables, dit « complément de rémunération ». J’évoquerai encore la réforme des concessions hydroélectriques, sujet dont vous avez parlé, et l’obligation de reporting climatique pour les investisseurs publics.

S’agissant de nos consommations, sont prévus la suppression des sacs en plastique à usage unique, le cadre réglementaire des combustibles solides de récupération et la reprise par les distributeurs de matériels de BTP des déchets de chantier.

Sans vous avoir lu les six pages en question, vous avez une idée assez précise des mesures qui sont déjà parues.

Comme je vous le disais, dans quelques jours, les textes relatifs aux zones à circulation restreinte, aux véhicules propres et aux certificats qualité de l’air seront publiés.

Ainsi, toutes ces dispositions soutiennent l’économie, favorisent la création d’emploi et la croissance verte, comme le montrent les bons chiffres du bâtiment, des industries, des énergies renouvelables et de l’automobile.

Nous devons maintenant nous attacher aux mesures de plus longue haleine avec, comme en ont parlé MM. Maurey et Lenoir, la programmation pluriannuelle de l’énergie, sujet qui suscite tout votre intérêt et dont je rappelle qu’il mobilise plusieurs acteurs : les services de l’État, les entreprises, les collectivités territoriales.

Pour construire une programmation pluriannuelle de l’énergie, l’expérience a montré qu’il fallait prendre le temps de la concertation. Or je suis sûre que vous auriez reproché au Gouvernement de ne pas avoir utilisé plus largement la concertation si nous avions sorti une PPE à toute vitesse et dans l’urgence. Le comité de suivi est en place, vous le savez. Il donnera ses retours très prochainement ; votre impatience touche donc à sa fin.

Quant à la révision de la réglementation de la construction, qui remplacera la RT-2012, elle est bien engagée et fera également l’objet de premières orientations avant l’été.

Enfin, quelques dispositions ayant des conséquences sur le marché intérieur de l’Union attendent un accord de niveau européen et seront adoptées d’ici à la fin de l’année.

Vous le voyez, les échéances sont courtes : l’été pour une partie d’entre elles, la fin de l’année pour d’autres. Pour un texte aussi fondateur que celui que vous avez adopté, de telles échéances à un an paraissent somme toute raisonnables.

Vous m’avez enfin interrogée sur la question du nucléaire. Or je ne voudrais pas que vous ayez le sentiment que je fuis le débat.

Le Président de la République s’est effectivement engagé à initier la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim. Les décrets paraîtront d’ici à la fin de l’année 2016 pour retirer l’autorisation d’exploiter les deux réacteurs de la centrale. Bien sûr, la mise en œuvre effective de cet arrêt prendra au moins deux ans, ce qui nous amène à 2018.

Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d'État. Il faut le temps d’arrêter les réacteurs nucléaires, mais, à partir du moment où les décrets sont pris, les choses sont enclenchées et les discussions, qui sont indispensables, vont continuer avec la direction d’EDF.

Par ailleurs, cela a été évoqué à plusieurs reprises, le Gouvernement reste attaché à un mix qui regroupe à la fois le nucléaire et les énergies renouvelables. Il ne s’agit pas d’opposer une énergie à une autre. Nous ne sommes ni en guerre contre le nucléaire ni en train de le défendre envers et contre tous. Pour réussir la transition énergétique, il faut pouvoir trouver les bons équilibres entre une énergie qui a été utile à notre pays et continuera de l’être et toutes les autres énergies possibles.

Monsieur Dantec, EDF investit déjà plusieurs milliards d’euros par an sur le long terme, non seulement dans le nucléaire, mais aussi dans les réseaux et les énergies renouvelables. Si l’entreprise doit s’adapter et améliorer sa compétitivité, le Gouvernement est attentif à sa situation et participera à une augmentation de capital. Donc, sur ce sujet, il n’y a pas lieu d’avoir d’inquiétude excessive.

Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments de réponse que je souhaitais vous transmettre au moment où nous entrons dans la phase la plus active de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Vous le voyez, le Gouvernement agit, comme le montrent les décrets et les ordonnances, qui vont permettre à toute la société de se mobiliser.

J’ai bien compris, même à travers vos interventions les plus critiques – des critiques tout à fait constructives –, que vous étiez très intéressés par le sujet. La France est en effet à un tournant majeur et va même une fois de plus montrer l’exemple, comme elle l’a fait pour la COP, en adoptant un nouveau modèle de croissance économique et de développement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC, du groupe écologiste et du RDSE.)

M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur le thème : « La mise en œuvre de la transition énergétique en France, un an après la loi n° 2015-992 du 17 août 2015, afin de pérenniser notre modèle énergétique, de garantir notre indépendance énergétique et notre compétitivité économique, tout en poursuivant des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet ».

Mes chers collègues, avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures vingt-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

7

 
Dossier législatif : proposition de loi pour l'économie bleue
Discussion générale (suite)

Économie bleue

Adoption définitive des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi pour l'économie bleue
Article 1er bis A

M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du Gouvernement, l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi pour l’économie bleue (texte de la commission n° 541, rapport n° 540).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

M. Didier Mandelli, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé de la réforme de l’État et de la simplification, mes chers collègues, nous sommes réunis cet après-midi pour conclure l’examen de la proposition de loi pour l’économie bleue.

D’emblée, je tiens à féliciter toutes les parties prenantes, députés et sénateurs bien sûr, mais aussi l’administration et le Gouvernement, ainsi que l’ensemble des interlocuteurs du monde de la mer avec lesquels nous avons eu l’occasion d’échanger, d’avoir permis l’aboutissement, en un temps record, d’une commission mixte paritaire conclusive. Ce n’était pas gagné d’avance, même si, sur toutes les travées de cet hémicycle, nous sommes d’accord pour mener le combat de la maritimisation de la France.

En effet, sur les soixante-dix-sept articles que comptait le texte transmis par l’Assemblée nationale, le Sénat en avait adopté trente-sept conforme et avait ajouté vingt-cinq articles additionnels. Restaient ainsi en discussion soixante-cinq articles, sur lesquels il a fallu trouver un accord.

Au total, la commission mixte paritaire a adopté vingt-huit articles dans la rédaction issue du Sénat, deux articles dans la rédaction issue de l’Assemblée nationale et trente articles dans la rédaction issue de ses propres travaux. Parallèlement, elle a supprimé cinq articles.

Nous pouvons donc nous féliciter de l’apport du travail sénatorial, d’autant que nous avons examiné ce texte au mois de mars dernier dans un calendrier très contraint.

En 2009, le Grenelle de la mer avait permis d’énoncer de nombreuses propositions. Nous pouvons nous réjouir que le Sénat ait pu en défendre ou en introduire certaines dans cette proposition de loi, en gardant à l’esprit cet objectif, partagé par tous : renforcer la compétitivité des activités maritimes de toutes les manières possibles.

Parmi les mesures emblématiques, figure l’autoliquidation de la TVA à l’importation dans les ports, pour laquelle le Sénat s’est battu. Cet article a été fermé à l’issue d’âpres débats avec le secrétaire d’État chargé du budget. Il y a urgence en la matière puisque, actuellement, 50 % des biens à destination de la France sont débarqués dans un port étranger. Malheureusement, cette part est encore appelée à croître.

Nous avons également revu les modalités de gouvernance des ports, en accordant davantage de poids aux grandes régions et aux investisseurs privés. Le but est de franchir une étape supplémentaire vers une autonomie réelle des ports. Pour autant, nous ne devons pas anticiper les travaux en cours sur les grands axes portuaires, et nous sommes parvenus à un juste équilibre avec nos collègues députés.

J’en viens au volet économique.

Nous avons conservé l’esprit de l’exonération de charges, ou net wage, tout en adoptant une version proposée par le Gouvernement à l’issue d’un vote confus. Ce dispositif a été amélioré par la commission mixte paritaire dans le sens d’une augmentation du nombre de contributions dont les armateurs sont exonérés et d’une définition plus précise du champ des activités concernées.

Quant à la responsabilité élargie des producteurs concernant les bateaux, la « REP navires », son entrée en vigueur différée de 2017 à 2018 a été conservée par la commission mixte paritaire. En revanche, le plafonnement de la contribution à 0,5 % du prix de vente du navire a finalement été supprimé, dans la mesure où il ne correspond pas nécessairement à la logique de la REP.

La solution élaborée par le Sénat au sujet des jeux de hasard embarqués a été conservée. L’équilibre ainsi retenu permet de n’installer à bord que des machines à sous et de répondre au problème de compétitivité sur les ferries transmanche sans pour autant menacer la réglementation générale des casinos à terre.

Un autre point important est l’obligation de capacité de transport des produits pétroliers. Le récent décret consacré à ce sujet n’était pas conforme à l’esprit du mécanisme adopté dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Je me félicite que la commission mixte paritaire ait pu élaborer une solution permettant de conserver une flotte stratégique complète combinant petits et gros navires, et ce dans le prolongement de nos travaux.

Je passe à présent au volet sécurité de cette proposition de loi.

Nous avons facilité le recours à des entreprises privées de protection des navires, en supprimant notamment la notion de zonage pour la circulation des armes à bord. Si cette notion peut être pertinente en matière de piraterie maritime, il n’en va pas de même pour la menace terroriste qui, par définition, ne s’inscrit pas dans une zone précise. C’est la raison pour laquelle la commission mixte paritaire a retenu une rédaction qui distingue les deux cas de figure. Ainsi, le dispositif se trouve stabilisé.

La commission mixte paritaire a également tenu à clarifier le régime de l’évaluation de sûreté dans les ports, dont la responsabilité relève de l’État au regard des standards internationaux. L’État peut autoriser un organisme de sûreté reconnu à assurer cette évaluation pour un port donné. Mais nous avons veillé à ne pas introduire de rupture d’égalité devant les charges publiques, en partageant les frais en deux parts égales entre l’autorité administrative et l’autorité portuaire.

Nous avons encore affiné les dispositifs prévus en matière de contrôles de sécurité et de sanctions applicables à bord des navires et dans les ports, en facilitant notamment les interpellations, gardes à vue et prises d’empreintes en cas de délit d’intrusion dans une zone d’accès réservé d’un port.

J’évoquerai rapidement le volet pêche et aquaculture. En la matière, peu de modifications ont été apportées, les mesures proposées étant plus modestes et faisant l’objet d’un large consensus. Je saisis cette occasion pour saluer à nouveau le travail accompli par Michel Le Scouarnec et par la commission des affaires économiques, qui a examiné au fond les articles relatifs à la pêche.

La commission mixte paritaire a simplement recentré le champ du rapport sur le pescatourisme, en fixant pour objectif d’élaborer un véritable mode d’emploi afin de diversifier les revenus des pêcheurs. En outre, l’information dans les restaurants quant aux zones de capture ou de production des produits aquacoles proposés aux clients a été de nouveau rendue facultative, afin de ne pas alourdir les obligations pesant sur ce secteur d’activité.

Parallèlement, la commission mixte paritaire s’est penchée sur le volet environnemental, que le Sénat a largement développé. À l’issue d’un long débat, elle a repoussé de 2020 à 2025 l’interdiction du rejet en mer des sédiments et résidus de dragage pollués, afin de permettre la mise en place d’une véritable filière de traitement et de récupération à terre.

À l’heure actuelle, le dragage fait déjà l’objet de procédures extrêmement rigoureuses pour que la pollution soit limitée. Des arrêtés de seuils sont pris par les préfets. Il s’agit désormais d’aller plus loin, en se fixant un horizon commun pour qu’aucun sédiment pollué ne puisse retourner en mer sans avoir été traité, et ce conformément aux engagements du Grenelle de la mer de 2009. Je me félicite que nous soyons parvenus à un accord sur cet horizon.

La commission mixte paritaire a également amélioré la transposition de la directive de 2014 sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs. Elle a prévu, pour les navires, des objectifs clairs pour la mise en place de systèmes de distribution de gaz naturel liquéfié, ou GNL, et pour l’alimentation électrique à quai dans les ports. C’est un sujet important quand on connaît le niveau de pollution de l’air que subissent les ports et qui est régulièrement mesuré.

Enfin, la commission mixte paritaire a supprimé quelques dispositions inopérantes que nous avions adoptées, comme l’extension du service minimum au transport maritime ou l’immatriculation au RIF, le registre international français, de tous les navires de pêche outre-mer. Au-delà des débats relatifs aux objectifs, ces dispositions exigent un travail juridique et une concertation plus approfondis en amont pour présenter une réelle portée opérationnelle.

Pour le reste, les modifications apportées en commission mixte paritaire visent surtout à améliorer les dispositifs proposés et à préciser leurs modalités d’application outre-mer.

Avant de conclure, je tiens à remercier notre collègue député Arnaud Leroy d’avoir donné l’impulsion nécessaire pour faire avancer des mesures attendues par le monde maritime depuis parfois plus de dix ans. Gardons cependant à l’esprit que ces mesures permettront au mieux de réduire le fossé de compétitivité qui nous sépare de nos concurrents. Il fallait certes commencer par là, mais on ne saurait se contenter de poser la première pierre en remettant au lendemain les choix difficiles.

Mes chers collègues, je l’ai dit au mois de mars dernier : à l’heure où les grandes puissances font réellement le pari de la mer, construisent de vraies infrastructures, explorent les fonds marins, affirment leurs revendications territoriales, développent les biotechnologies bleues et la recherche marine, nous avons l’obligation de définir une véritable stratégie maritime, servie par une vision politique ambitieuse en faveur de la croissance bleue. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur quelques travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous voici parvenus, après une commission mixte paritaire conclusive, au terme de l’examen de la proposition de loi pour l’économie bleue. Ce texte, porté par le député Arnaud Leroy, est l’aboutissement d’un travail approfondi mené par le Parlement afin de promouvoir la croissance bleue.

Cette volonté d’œuvrer pour une politique maritime ambitieuse au service de notre pays ne pouvait qu’être soutenue par le Gouvernement, puisque cette proposition de loi vient renforcer les différents textes consacrés, depuis 2012, aux activités maritimes : la loi du 1er juillet 2014 relative aux activités privées de protection des navires ; la loi du 8 décembre 2015 tendant à consolider et clarifier l’organisation de la manutention dans les ports maritimes ; mais aussi le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, qui consacre un certain nombre de dispositions importantes à la mer.

Cette réponse législative était attendue par les acteurs. Elle vient s’insérer dans une démarche globale couvrant des dispositions variées – budgétaires, fiscales, contractuelles… – au service de l’économie maritime de notre pays. Je rappelle que le présent texte est le résultat de nombreux échanges conduits durant plusieurs mois avec l’État et les acteurs du monde maritime.

Le comité interministériel de la mer, ou CIMER, qui s’est tenu le 22 octobre dernier sous la présidence du Premier ministre, a permis d’avancer de manière concrète et opérationnelle sur un certain nombre de sujets importants et dans l’ensemble des secteurs qui constituent notre économie maritime.

Premièrement, le CIMER a assuré le renforcement de la compétitivité des grands ports maritimes français, en leur donnant de nouvelles perspectives de développement et d’attractivité.

Deuxièmement, il a mis en place des mesures assurant le renouvellement de la flotte de commerce pour l’adapter aux conditions du marché mondial.

Troisièmement, un soutien renforcé a été apporté à notre secteur de la pêche maritime, pilier de notre économie maritime particulièrement mis à l’honneur par le Premier ministre durant les visites menées en marge de ce comité, à Boulogne-sur-Mer. Ainsi pourrons-nous profiter de la conjoncture favorable pour préparer l’avenir et installer des jeunes.

Quatrièmement, le CIMER a permis d’affirmer une ambition aquacole pour la France, afin de réduire notre dépendance aux importations en produits de la mer en confortant les sites existants et de favoriser les implantations nouvelles.

Cinquièmement, il a garanti le renforcement de nos capacités de contrôle dans nos aires marines protégées, afin de préserver l’environnement marin de manière effective.

D’autres mesures ont été prises, permettant l’adaptation de nos outils de sûreté et de sécurité maritimes aux nouveaux enjeux. Le Gouvernement a notamment réaffirmé le caractère fondamental du principe de solidarité des gens de mer, en soutenant le programme d’investissement de la SNSM, la Société nationale de sauvetage en mer, pour le renouvellement de ses moyens.

Enfin, le CIMER a permis de souligner la nécessité de valoriser le potentiel considérable des espaces maritimes ultramarins, en renouvelant les moyens maritimes, en permettant leur surveillance et en soutenant le déploiement d’une stratégie spécifique pour nos ports d’outre-mer.

Plus récemment, ont été mises en place des missions parlementaires associant députés et sénateurs. Ces structures visent à développer le potentiel des axes situés dans l’hinterland de nos principaux ports maritimes. Nous en attendons les résultats dans quelques semaines. Il nous appartient collectivement de poursuivre la massification des flux, nécessaire pour que nos ports, forts de cette cohérence unique que procure notre littoral, le plus vaste d’Europe, retrouvent une place de premier plan dans le commerce mondial.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nombre de ces éléments trouvent logiquement une déclinaison législative dans le texte qui vous est soumis aujourd’hui. Cette proposition de loi s’est enrichie tout au long de la procédure parlementaire. À cet égard, je tiens à saluer M. Didier Mandelli, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire, de l’important travail qu’il a accompli, ainsi que M. Michel Le Scouarnec, qui s’est penché sur les sujets liés à la pêche en bon Morbihannais. (Sourires.)

M. Loïc Hervé. Très beau département, le Morbihan !

M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État. Avec plus de quatre-vingt-dix articles, le présent texte comporte désormais de nombreuses dispositions touchant au transport maritime, à la plaisance, à la pêche, à l’aquaculture, au domaine portuaire, à la sûreté et au droit du travail comme au fonctionnement des équipages. Il contient plusieurs mesures permettant des simplifications administratives. Il s’agit là, vous le savez, d’un sujet qui m’est cher.

Je ne reviendrai pas sur toutes ces dispositions. Je souhaite néanmoins en citer quelques-unes, en particulier celles qui ont été enrichies, voire introduites lors de l’examen au Sénat, grâce à vos travaux, qui sont toujours de grande qualité.

L’article 3 porte sur la gouvernance des ports. Il accorde notamment une place plus importante aux régions dans les instances de gouvernance des grands ports maritimes. Il prévoit également la création d’une commission des investissements au sein du conseil de développement, composée de deux collèges à parité, l’un public, l’autre privé, et présidée par le président du conseil régional ou par son délégué. Enfin, cet article prévoit l’extension de l’autoliquidation de la TVA à l’ensemble des personnes, physiques ou morales.

Les articles 5 quater A et 5 quater sont liés aux conditions de moralité exigées pour exercer certaines fonctions sur les navires de pêche. Ainsi, cette proposition de loi supprime toute condition de moralité pour les chefs mécaniciens à la pêche – ces professionnels n’auront pas moins de moralité pour autant (Sourires.). Elle supprime également les prérogatives de puissance publique des capitaines et suppléants des navires à la petite pêche et aux cultures marines.

L’article 8 étend les exonérations de charges patronales liées aux allocations familiales et à l’assurance chômage à tous les navires de commerce affectés à des activités de transport et soumis à la concurrence internationale. Jusqu’à présent, ces exonérations étaient réservées aux navires à passagers.

L’article 9 bis prévoit de confier au Conseil supérieur des gens de mer un rapport sur l’évolution de l’ENIM, l’Établissement national des invalides de la marine. Ce rapport associera les différents ministères concernés, à savoir les ministères en charge de la mer, de la santé et des finances. Ce sujet est extrêmement sensible pour les marins et pour les armateurs. Le Gouvernement suivra bien entendu ce travail avec le plus grand intérêt.

Je tiens également à ajouter que la proposition de loi habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance sur la question de la délimitation des espaces maritimes afin de moderniser notre droit en la matière – cette question me semble essentielle. Sans être directement chargé de la question maritime, comme vous le savez, j’ai souhaité l’organisation d’un colloque sur l’évaluation des politiques publiques, le 19 mai dernier, et la présentation de la politique maritime a permis de faire ressortir ce sujet, qui est aussi celui de la planification spatiale.

Enfin, le texte comporte des dispositions précieuses pour accompagner les secteurs de la pêche et de l’aquaculture ; je pense notamment à la modification du statut de la société de pêche artisanale, qui permettra de renforcer notre ambition partagée d’un renouvellement de notre flotte de pêche.

Pour terminer sur une tonalité plus sociale, j’aborderai une question importante, dont le Gouvernement avait été saisi, et que cette proposition de loi a permis de résoudre : les marins ayant liquidé leur pension avant le 19 octobre 1999 et ayant été soumis au feu pendant la guerre d’Algérie bénéficieront dorénavant d’un doublement de leur droit à retraite pour ces périodes.

Vous pouvez compter sur l’engagement du Gouvernement pour suivre la mise en application des dispositions prévues dans cette proposition de loi.

Notre espace maritime représente une force considérable si nous savons le mettre au service de l’emploi, de l’activité, du développement durable, du respect de l’environnement et des énergies nouvelles. La mer, dans cette perspective de croissance bleue, est donc à la fois une ressource, un investissement et un domaine qu’il convient de protéger. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement soutient pleinement l’adoption de cette proposition de loi. Nous saluons le travail accompli à l’Assemblée nationale et au Sénat, de même que le compromis trouvé en commission mixte paritaire, qui sera sans nul doute propice à la croissance bleue dans notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur plusieurs travées de l'UDI-UC. – M. Michel Le Scouarnec applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)

Mme Annick Billon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, examiner le texte d’une commission mixte paritaire conclusive est toujours gratifiant. Cela démontre, s’il le fallait encore, que nos deux assemblées savent réaliser des compromis constructifs.

Je remercie nos rapporteurs, tout particulièrement Didier Mandelli, pour les accords obtenus, qui permettent de répondre rapidement aux attentes des professionnels concernés. Nous espérons que les décrets d’application suivront très rapidement, monsieur le secrétaire d’État.

Cette première satisfaction ne doit pas occulter la déception de n’avoir abordé la croissance bleue qu’au travers d’une proposition de loi technique, sans véritable ambition stratégique, même si je reconnais à ses auteurs des efforts certains pour donner une cohérence à l’ensemble. Notre pays a en effet besoin d’une vision stratégique, audacieuse et cohérente, à la hauteur de son potentiel en matière d’économie maritime. On ne cesse de le répéter.

Les exemples sont là : quelle fierté, pour une élue vendéenne, de voir les chantiers de Saint-Nazaire obtenir encore et encore des contrats leur assurant des années de travail ! C’est bien une marque d’excellence, dont nous avons d’ailleurs davantage besoin en ces temps troublés par les blocages en tous genres. Mais ce n’est pas la seule : la croissance bleue est un formidable vivier de création d’emplois et d’attractivité.

Il est évident qu’il faudra désormais attendre le prochain quinquennat pour qu’une telle réforme voie le jour. Celle-ci devra permettre à nos grands ports maritimes de se positionner en tête des ports européens. Je rappelle que 50 % des biens à destination de la France sont débarqués dans un port étranger. Cette situation n’est pas acceptable !

Mme Annick Billon. Cette réforme devra aussi donner à nos pêcheurs les moyens de poursuivre la modernisation de leur profession et de leur outil de travail, au service d’une gestion durable des ressources halieutiques. Nous avons de formidables professionnels dans ce secteur, passionnés, désireux d’évoluer pour apporter aux consommateurs des produits de qualité, tout en ayant à cœur de préserver la ressource, qui, ne l’oublions pas, est leur avenir.

Elle devra en outre soutenir le développement d’une aquaculture de qualité, compétitive, respectueuse de l’environnement. N’est-ce pas frustrant de ne pas voir cette activité se développer, surtout quand on connaît le professionnalisme et l’expertise des aquaculteurs français ?

Elle devra enfin permettre aux élus d’assurer le développement des territoires littoraux dans le cadre d’une application équilibrée de la loi Littoral : il faut en revenir à l’esprit de la loi !

Je pourrais également citer le tourisme, les biotechnologies, les énergies marines renouvelables, la connaissance et l’exploitation des fonds marins, notamment des terres rares.

S’agissant de l’industrie nautique, toujours fleuron de l’économie vendéenne à la veille de la huitième édition du Vendée Globe, la mise en place d’une filière de déconstruction des bateaux en 2018 est l’échéance qui confirme l’engagement des professionnels, tout en laissant le temps indispensable pour créer un éco-organisme. Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous assurer de la collaboration de vos services sur ce dossier ? (M. le secrétaire d'État opine.)

La proposition de loi pour l’économie bleue n’est naturellement pas à la hauteur des ambitions que ses auteurs affichaient. Elle ne justifiait pas non plus l’urgence invoquée pour contraindre les sénateurs à travailler dans des délais aussi courts. Reconnaissons néanmoins qu’elle apporte un certain nombre d’ajustements juridiques dont ont besoin les acteurs de ces différents secteurs. Je ne reviendrai pas sur ces points dont nous avons déjà discuté.

Ce texte et les discussions qui l’ont accompagné ont enfin un mérite : celui de rappeler aux uns et aux autres que la France est une grande puissance maritime et que son avenir réside probablement dans l’économie bleue. Gageons que nous saurons à l’avenir nous tourner vers la mer. En attendant, le groupe UDI-UC votera la proposition de loi issue des travaux de la CMP. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, ainsi que sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier.

Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au terme de la navette parlementaire, le texte soumis au vote de notre assemblée est assez différent de la proposition de loi initiale déposée par les députés socialistes. En effet, son contenu a été enrichi par de nombreuses mesures, dont certaines n’ont que très peu à voir avec l’économie bleue.

L’examen en commission mixte paritaire est décevant. Tous les aspects les plus négatifs du texte ont été conservés, le seul point positif étant la suppression de l’amendement, déposé et adopté au Sénat, qui avait élargi le service minimum au domaine maritime.

Reste que les raisons qui nous avaient conduits à voter contre le texte sont encore d’actualité.

Ainsi, le Sénat avait, à l’article 22, transformé la possibilité d’indiquer la zone de capture ou de pêche dans les restaurants en obligation. La CMP a fait le choix de revenir à une simple faculté.

Le Sénat avait aussi, en adoptant un amendement que j’avais déposé, posé le principe de l’extension à la collecte des micro-déchets et des macro-déchets du rapport prévu par la loi sur l’élargissement des activités des pêcheurs. On se demande qui une telle mesure pouvait gêner ; elle a pourtant disparu.

Nous regrettons également, à l’article 19 bis AA, adopté au Sénat, que le texte de la CMP repousse à 2025, au lieu de 2020, l’interdiction du rejet en mer des sédiments et résidus de dragage pollués.

Par contre, la commission mixte paritaire a confirmé la remise en cause de la loi Littoral au nom de l’agriculture biologique, en permettant le maintien de structures en bois de 1 000 mètres carrés construites avant 2010 près du littoral.

Nous regrettons, enfin, le report de la mise en place de la filière REP de déconstruction des navires. Le problème se pose depuis bien longtemps ; tout le monde sait qu’il faut trouver une solution, et traîner ne sert à rien.

Autant de reculs qui montrent que la protection de notre environnement n’est pas toujours considérée comme une nécessité. De ce point de vue, les débats récents ne nous rendent pas très optimistes.

Par ailleurs, les objectifs initiaux du texte conservent une vision assez nettement libérale. Alors que nous avions supprimé le net wage au Sénat, celui-ci a été réinstauré. Ce dispositif repose sur l’idée fausse que, en abaissant les charges sociales et les droits des salariés, on relancerait l’emploi. Or la relance de l’emploi passe par bien d’autres facteurs comme le pouvoir d’achat, la formation, l’investissement et, surtout, un bon carnet de commandes ! Abaisser les charges sociales, c’est nier qu’elles sont un salaire différé ; cela revient à baisser les droits et les salaires. C’est avant tout une politique de régression sociale.

Autre régression : l’extension du RIF et la nouvelle définition de son application, qui veut que les critères soient définis par rapport à la flotte, et non navire par navire. Alors que ce pavillon a été déclaré pavillon de complaisance par la Fédération internationale des travailleurs, une telle disposition fait naître des risques en matière de sécurité et crée du dumping social et fiscal. Nous demandons, bien au contraire, un minimum de marins communautaires par navire, ce qui permettrait de garantir un niveau de formation et de qualification compatible avec les exigences de sécurité des navires et des personnels.

Dans un autre domaine, les ajouts concernant la lutte contre le terrorisme ont été maintenus et renforcés au fil des lectures. Ce texte permet ainsi le recours accru aux sociétés privées de protection des navires, ce que nous contestons.

Ajoutons que certains articles mélangent de manière indécente lutte contre le terrorisme et lutte contre l’immigration illégale, notamment dans les zones d’accès restreint des ports. Un article prévoit même une peine d’emprisonnement. Nous continuons de penser que légiférer de cette manière, sans avis du Conseil d’État, sans étude d’impact, n’est pas admissible. Ce texte n’est de toute façon pas le bon véhicule législatif.

Dernier point : nous avions été assez nombreux dans cet hémicycle à rappeler l’importance pour la défense nationale de la création et du renforcement de la flotte stratégique prévue dans la loi relative à la transition énergétique. Or, aujourd’hui, cette flotte est définie a minima. Il n’y a aucune exigence en termes de nombre de navires, de capacité de ces navires, de situation et de statut de l’équipage, notamment l’exigence de navires battant pavillon français. Toutes ces questions sont renvoyées au pouvoir réglementaire, alors qu’il s’agit de questions éminemment politiques et stratégiques. De plus, le texte ne fait plus mention d’une obligation de capacité de transport maritime de pétrole brut, mais d’une simple faculté.

Enfin, nous souhaitons de nouveau appeler l’attention du Gouvernement sur l’importance du renforcement des capacités multimodales des ports. Aujourd’hui, les politiques publiques sous-estiment ces aspects stratégiques, à l’inverse d’autres ports comme Rotterdam ou Anvers. Relancer l’économie maritime, cela passe aussi par un retour de la puissance publique au sein des ports, pour l’outillage, mais également en matière d’infrastructures de transports, notamment ferroviaires.

Pour toutes ces raisons, nous voterons une nouvelle fois contre ce texte, dans sa rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Nelly Tocqueville.

Mme Nelly Tocqueville. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, beaucoup de travail a été accompli depuis la publication, en 2013, du rapport d’Arnaud Leroy, Osons la mer, à l’origine de ce texte.

Souvent technique, cette proposition de loi a pour ambition de s’intéresser à toutes les composantes de l’économie maritime afin d’accompagner le potentiel exceptionnel de la croissance bleue. Elle vise à défendre l’économie maritime « au sens large », qui représente aujourd’hui pas moins de 340 000 emplois directs et 70 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel.

Le Président de la République l’a rappelé, le 6 octobre 2015 : notre espace maritime « est une force considérable, si nous savons l’utiliser, si nous savons la mettre au service de l’emploi, de l’activité, du développement durable, du respect de l’environnement, de ces énergies nouvelles que nous pouvons trouver dans la mer. »

Je salue donc l’ambition transversale de ce texte, qui ne se limite pas à la seule question des transports maritimes. Bien sûr, il ne prétend pas apporter toutes les réponses, mais il en propose un nombre intéressant. D’ailleurs, je regrette les critiques de la majorité sénatoriale, qui a parfois, au cours du débat, minimisé la portée de ce texte, allant jusqu’à vouloir le rebaptiser.

Mme Évelyne Didier. C’est une manie !

Mme Nelly Tocqueville. S’il n’a pas toutes les vertus, ce texte s’inscrit cependant dans une dynamique et permet de franchir une nouvelle étape. De plus, il prolonge l’ambition affirmée du Gouvernement en faveur du secteur maritime. Le dernier comité interministériel de la mer, qui s’est tenu le 22 octobre 2015, a ainsi permis de tracer une feuille de route comprenant plusieurs sujets majeurs, notamment le renforcement de la compétitivité des grands ports maritimes.

En outre, récemment, plusieurs missions parlementaires de réflexion sur les axes portuaires ont été engagées. Ainsi, Valérie Fourneyron, députée de Rouen et notre collègue Charles Revet, sénateur de Seine-Maritime, ont été missionnés sur le devenir des ports du Havre et de Rouen. En effet, les enjeux sont grands pour le développement de notre territoire.

Pour être maire d’une commune située en bord de Seine, je connais la puissance économique des grands ports maritimes. Ainsi, le groupement d’intérêt économique HAROPA, Le Havre-Rouen-Paris, est devenu le premier port français, représentant 18 000 emplois pour le seul grand port maritime de Rouen.

Je veux saluer ici le travail considérable réalisé par Arnaud Leroy, qui a beaucoup enrichi son texte et su le faire évoluer, ainsi que celui de notre rapporteur, Bruno Mandelli. Je le remercie pour son sens du dialogue. C’est d’ailleurs cet esprit de compromis, partagé par tous, qui a permis de trouver un accord en commission mixte paritaire.

Bien sûr, certaines mesures préconisées par le texte faisaient consensus. Je pense particulièrement à l’autoliquidation de la TVA, proposition défendue de longue date par notre collègue Michel Delebarre.

Avec le système actuel de perception de la TVA, les entreprises importatrices donnent la priorité aux ports étrangers. Cela crée une distorsion, dans un contexte de très forte concurrence européenne, au détriment des ports français, particulièrement ceux du Nord, en raison de leur proximité avec les ports belges et néerlandais. Ce sont ainsi, chaque année, 2 millions de conteneurs qui ne sont pas pris en charge par nos ports nationaux.

En permettant l’autoliquidation à un grand nombre d’entreprises, nous supprimons une inégalité majeure pour les importations françaises et nous ouvrons des perspectives économiques considérables en termes de développement. Le rapatriement de ces flux perdus est en effet estimé à un gain d’environ 10 000 emplois et 1 milliard d’euros, et ce pour la seule filière portuaire. C’est d’ailleurs l’objectif de l’annonce faite par le Président de la République lors du Conseil stratégique de l’attractivité, le 22 mars 2016 : l’élargissement de l’autoliquidation de la TVA à plus de 8 000 opérateurs pour faciliter les opérations douanières.

S’agissant des conditions de moralité, entourant notamment la fonction de capitaine de navire, je me réjouis que l’Assemblée nationale et le Sénat aient, tour à tour, adopté des dispositions répondant à cette inquiétude forte du monde de la pêche. Ainsi, une solution a été trouvée pour les capitaines de petite pêche, comme pour les chefs mécaniciens embarqués à bord des navires de pêche. Le texte permettra, par ailleurs, au pouvoir réglementaire de revenir sur le décret du 2 juin 2015 et de préciser quelles infractions portées sur le bulletin n° 2 sont compatibles avec le plein exercice des fonctions de capitaine, d’officier en charge de sa suppléance, de chef mécanicien ou d’agent chargé de la sûreté du navire.

D’autres sujets devaient en revanche être tranchés par la CMP, notamment l’épineuse question de la gouvernance portuaire.

Les dispositions adoptées sur l’initiative de la majorité sénatoriale posaient de grandes difficultés. Elles mettaient à mal le caractère unifié de notre stratégie portuaire et entraînaient des bouleversements importants en matière de gestion des grands ports, dont personne ne pouvait réellement évaluer l’impact. En outre, les grands ports maritimes sont des établissements publics de l’État. Il n’était donc pas souhaitable de modifier leur nature juridique de cette manière.

Le retour au texte de l’Assemblée nationale sur la question du rôle de la région au sein du conseil de surveillance constitue donc, pour nous, une sage décision.

S’agissant de la commission des investissements, le texte adopté par la commission mixte paritaire est équilibré. Si la création de cette commission est évidemment légitime, afin de mieux intégrer les investisseurs privés dans le processus décisionnel portuaire, il n’était pas souhaitable d’inverser la hiérarchie institutionnelle existante des grands ports maritimes. Un avis conforme de la commission des investissements, de surcroît pris à la majorité des trois cinquièmes, aurait sans nul doute entraîné un risque de blocage dans les ports. Par conséquent, la suppression du caractère conforme de l’avis était nécessaire.

Je note cependant la reprise d’une partie des propositions du Sénat, témoignant de cet esprit de compromis que j’ai évoqué précédemment. Ainsi, l’avis de la commission des investissements est étendu aux projets d’investissements publics d’infrastructures d’intérêt général. De plus, la CMP a prévu que, si le conseil de surveillance décide de passer outre un avis défavorable de la commission des investissements, celui-ci doit motiver sa décision.

S’agissant des exonérations de cotisations sociales pour les employeurs de gens de mer, le fameux système net wage, le texte adopté par la commission mixte paritaire permet également d’aboutir à une rédaction équilibrée.

Les exonérations prévues pour le pavillon RIF sont élargies au pavillon du premier registre. C’est une mesure très importante pour la compétitivité et l’emploi de l’armement français.

Concernant la flotte stratégique, la commission mixte paritaire a reconnu aux armateurs la possibilité de se regrouper. Par ailleurs, le texte n’impose plus d’obligation de souscrire des contrats de couverture portant à la fois sur le pétrole brut et raffiné. Cette faculté est toutefois prévue dans le cadre de la capacité de transport, de même que la possibilité de recourir à des navires de moins de 20 000 tonnes. À cet égard, j’ai en mémoire la mise en garde du Gouvernement portant sur les difficultés juridiques posées par ce dispositif. Cette rédaction, moins stricte, nous permettra, me semble-t-il, de passer sous les fourches caudines de la Commission européenne.

Pour ce qui concerne l’extension des activités privées de protection des navires, le texte de la CMP autorise le recours aux sociétés privées de protection de navires au-delà de la mer territoriale s’il y a une menace d’actes de terrorisme. Là encore, j’observe une manifestation de la volonté de compromis de la CMP. Ainsi, le zonage encadrant le dispositif en matière d’actes terroristes est supprimé. Toutefois un décret déterminera les types de navires non éligibles ; il faudra donc attendre pour pouvoir juger du caractère opérant du dispositif.

Enfin, je me félicite de la suppression de la mesure relative au service minimum dans les transports maritimes. Il n’était absolument pas opportun de la mettre en place de cette manière. Si l’on souhaite vraiment faire une comparaison avec les transports terrestres, il faut aller jusqu’au bout ; le service minimum dans ce domaine avait été mis en place à la suite d’accords d’entreprise, le terrain avait donc été préparé. Ce n’est pas du tout le cas en matière maritime.

Sécurité maritime, gouvernance portuaire, infractions de pêche, exonérations de charge, je n’ai évoqué que les principaux points de ce texte, qui en comportent beaucoup d’autres. Monsieur le secrétaire d'État, nous savons que nous pouvons compter sur l’engagement du Gouvernement pour suivre la mise en application des dispositions prévues dans ce texte, qui est essentiel pour la construction concrète de la croissance bleue.

Pour toutes les raisons que je viens d’exposer, le groupe socialiste et républicain votera en faveur de ce texte équilibré, qui contribue au renforcement de la compétitivité de notre économie maritime. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite saluer de nouveau, comme nous l’avions fait en mars, les objectifs de cette proposition de loi, résultant d’un long travail parlementaire, malgré l’unique lecture, qui a associé en amont une grande diversité d’acteurs. Nous avions besoin d’un texte abordant la politique maritime de la France de façon transversale, au-delà de la seule question du transport, en incluant notamment la pêche, l’aquaculture et le tourisme. Par ailleurs – est-il besoin de le rappeler ? –, les enjeux sont immenses pour la France eu égard à l’importance de son domaine maritime.

Le groupe écologiste a soutenu de nombreuses mesures de ce texte, qui ont apporté de réelles avancées. Ainsi, je me félicite que le principe de l’interdiction du rejet en mer des sédiments et résidus pollués de dragage – puisque c’est ainsi que cela s’appelle désormais – ait été conservé par la commission mixte paritaire, principe inséré dans la proposition de loi à la suite d’un amendement du groupe écologiste.

Je regrette toutefois que l’on perde encore cinq années sur ce sujet puisque, pour mémoire, nous proposions une échéance fixée à 2020 et c’est finalement l’année 2025 qui a été retenue. Le volume annuel de ces sédiments dragués est estimé, je le rappelle, à environ 50 millions de mètres cubes, dont 95 % sont immergés. Leur élimination était en outre un engagement pris lors de la conférence environnementale de 2013 et lors du Grenelle de la mer de 2009, de même que la mise en place d’une filière de traitement et de récupération des macro-déchets associés.

Mme Évelyne Didier. Vous gardez le moral ?

M. Ronan Dantec. Par ailleurs, nous regrettons de ne pas avoir été suivis sur d’autres de nos propositions.

L’une des ambitions de la proposition de loi pour l’économie bleue était de placer le développement durable au cœur de la réflexion sur l’activité maritime, et nous nous étions inquiétés du fait que la préoccupation environnementale n’était pas assez prise en compte, notamment au regard des chiffres accablants des diminutions de stocks de poissons et de la destruction des écosystèmes marins. Nous avions donc fait plusieurs propositions pour rétablir un équilibre entre la protection de l’environnement marin et les autres ambitions affichées par ce texte, en tentant en particulier d’interdire toute nouvelle activité d’extraction minière en mer au sein d’un site Natura 2000, mais sans succès.

Nous avions également suscité la discussion sur l’interdiction du chalutage en eaux profondes ; ce sujet a été abordé lors de l’examen de plusieurs textes. Nous avons bien entendu que des discussions étaient en cours à l’échelon européen et nous espérons avoir rapidement des garanties pour que les choses avancent dans le sens que nous souhaitons. Toutefois, un signal du Parlement aurait tout de même été bienvenu, et je regrette la mobilisation très conservatrice des parlementaires bretons sur ce point,…

M. Ronan Dantec. … alors que cette interdiction reste pourtant inéluctable.

M. Ronan Dantec. Je suis moi-même Breton, mais j’ai vu mes camarades députés de cette région se mobiliser fortement contre cette mesure.

M. Hubert Falco. Ah, les camarades…

M. Ronan Dantec. Vous le voyez, je ne dis pas toujours du bien des Bretons…

Autre motif de déception, déjà mentionné par Évelyne Didier, le report de 2017 à 2018 de l’entrée en vigueur du dispositif relatif à la filière REP de déconstruction des navires. Cette mesure avait été introduite dans la loi relative à la transition énergétique grâce à un amendement écologiste. Je salue néanmoins la détermination d’Arnaud Leroy en commission mixte paritaire pour supprimer le plafonnement de la contribution financière du secteur à 0,5 % du prix de vente pour chaque bateau neuf, plafonnement introduit au Sénat qui allait très clairement à l’encontre de la logique même de la REP.

Cela étant dit, le report d’un an n’est pas un bon signal. Les acteurs économiques ont besoin de visibilité et, en reportant toujours l’entrée en vigueur des mesures qui visent à mieux intégrer les préoccupations environnementales, nous n’envoyons pas de signaux clairs. J’ai toutefois bien pris note de ce qu’indiquait à l’instant notre collègue Annick Billon, à savoir qu’il n’est pas question de faire disparaître tôt ou tard la REP, qui sera bien en place en 2018 ; nous saurons le rappeler.

Enfin, les écologistes sont fermement opposés à l’introduction d’une peine de prison de six mois contre les auteurs d’intrusions dans les zones portuaires.

Mme Évelyne Didier. Eh oui, qu’est-ce que ça changera ?

M. Ronan Dantec. Outre le fait que l’on ne comprenne pas bien ce qu’une telle mesure pénale vient faire dans une proposition de loi pour l’économie bleue, nous pensons qu’elle est profondément inefficace et injuste.

Nous n’ignorons rien des difficultés que doivent gérer la ville et le port de Calais, puisque c’est bien de cela qu’il s’agit, face au nombre de migrants qui continuent d’arriver chaque jour dans l’espoir de rejoindre l’Angleterre, mais comment croire que c’est en criminalisant à tout-va que l’on va régler un phénomène qui relève d’une telle détresse humaine ?

Mme Évelyne Didier. Ce n’est pas de la bonne sécurité !

M. Ronan Dantec. La plupart des personnes qui se trouvent à Calais fuient la guerre et la violence et ont déjà risqué leur vie ; comment une peine de prison pourrait-elle les dissuader davantage que tout ce qu’ils ont eu à affronter sur leur chemin jusque-là ?

Mme Évelyne Didier. Exactement !

M. Ronan Dantec. Le signal envoyé par cette mesure, qui ne vise qu’à encombrer encore davantage les prisons avec des gens qui n’ont rien à y faire, me semble assez désastreux. On punit plutôt que de s’attaquer au problème de fond. Ce type d’approche conduit à une impasse, il est temps de se rendre à l’évidence. Je le répète, nous regrettons profondément l’introduction de cette mesure dans un texte sur l’économie bleue.

Pour toutes les raisons que je viens d’évoquer, le groupe écologiste s’abstiendra sur cette proposition de loi.

M. Hubert Falco. Quelle déception ! Un ministre écolo qui n’est pas suivi par ses troupes !

M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve.

Mme Mireille Jouve. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’océan recèle d’extraordinaires ressources qui doivent être à la fois partagées et préservées. Cela concerne notamment la France, qui dispose, grâce à la richesse et au territoire de ses outre-mer, de la deuxième zone économique exclusive du monde.

Le secteur maritime est stratégique pour notre économie, pour notre approvisionnement et pour notre indépendance énergétique. L’essor de l’économie bleue repose avant tout sur la protection de l’environnement maritime, qui doit être mieux connu et qui joue le rôle de principal réservoir de dioxyde de carbone.

La présente proposition de loi, qui va dans le sens d’une amélioration de la compétitivité de notre économie bleue, est le fruit d’un dialogue constructif associant tous les acteurs – je salue d’ailleurs l’initiative d’Arnaud Leroy, qui s’est fortement impliqué sur ce dossier –, mais elle ne constitue que l’une des premières pierres d’un vaste chantier à venir.

Dans ce domaine très exposé à la concurrence internationale, comme dans bien d’autres secteurs, la simplification et la modernisation des procédures administratives, comme la création du permis d’armement, résultant de la fusion du rôle d’équipage et du permis de circulation, était très attendue. Nous aurions toutefois pu, si nous avions eu le temps de la réflexion, aller plus loin, en fusionnant la procédure de francisation et celle d’immatriculation, au lieu de limiter cette réforme à l’établissement d’un simple document unique ; c’est d’ailleurs ce que proposait le rapport Leroy sur la compétitivité des transports et services maritimes français.

La commission mixte paritaire a préservé certains équilibres adoptés par la Haute Assemblée en matière de gouvernance des grands ports maritimes, notamment la création d’une commission des investissements comprenant un double collège d’investisseurs publics et privés se prononçant sur les projets stratégiques. Le principe de l’avis simple, retenu par la commission mixte paritaire, me semble plus équilibré.

Le net wage, ou salaire net, pour les activités de transport soumises à une concurrence internationale, applicable désormais à tous les gens de mer, a été étendu à tous les navires, y compris à ceux du premier registre, ce qui est positif pour la lutte contre le dumping social. Toutefois, il aurait été intéressant d’évaluer la possibilité d’une exonération des charges sociales salariales, et non seulement patronales, à l’image de ce qui a été fait en Finlande ou au Danemark.

La généralisation de l’autoliquidation de la TVA à l’importation dans les ports permettra aux entreprises de faire face à la concurrence et facilitera la vie des assujettis, qui n’auront plus à avancer les frais. Il faudra que les risques de fraude ne masquent pas les avantages potentiels de cette mesure.

En ce qui concerne la pêche, je me réjouis de l’association des territoires d’outre-mer aux discussions relatives à la gestion et à l’évaluation des ressources halieutiques partagées avec d’autres États, ce qui inclut la collectivité de Saint-Martin, chère à notre collègue Guillaume Arnell, dont l’amendement a été satisfait par la rédaction du Sénat.

Je regrette par ailleurs que l’indication de la zone de capture ou de production des produits de la mer proposés dans la restauration ou inclus dans les plats préparés soit devenue, à l’issue des travaux de la CMP, facultative. Il est pourtant légitime que le consommateur puisse s’assurer de la traçabilité de ces produits.

Enfin, deux sujets essentiels pour que l’on puisse vraiment parler d’économie bleue restent à la marge de la présente proposition de loi : l’environnement et l’énergie. Nous nous contenterons donc de quelques progrès, comme l’interdiction du rejet en mer de sédiments et résidus pollués de dragage, à un horizon néanmoins bien lointain, le 1er janvier 2025. Je connais d’ailleurs bien ce problème puisque les boues rouges rejetées dans les calanques marseillaises sont préoccupantes.

Mme Mireille Jouve. Si l’exonération des dispositifs légaux d’assurance pour les installations d’énergie marine renouvelable lève un obstacle à leur développement, nous attendons des progrès en la matière avec la mise en place du permis unique.

Bien que cet ensemble de dispositions importantes et très hétérogènes revête l’habit d’une proposition de loi et que la politique de la mer aurait mérité une réforme de plus grande ampleur pour permettre à la France d’exploiter tout son potentiel maritime,…

M. Hubert Falco. Qui est grand !

Mme Mireille Jouve. … le groupe du RDSE votera pour ce texte, qui apporte des modifications utiles et nécessaires au droit en vigueur. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur plusieurs travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Michel Vaspart. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Michel Vaspart. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd'hui pour achever le parcours législatif de la proposition de loi pour l’économie bleue. En effet, la commission mixte paritaire, dont j’étais l’un des membres, a pu arriver à un accord. Je tiens à féliciter une nouvelle fois Didier Mandelli, notre rapporteur, pour son travail et sa qualité d’écoute et, surtout, de négociation avec notre collègue député Arnaud Leroy.

La proposition de loi pour l’économie bleue est le troisième texte du quinquennat sur les activités maritimes, après le projet de loi relatif aux activités privées de protection des navires, en 2014, et la proposition de loi tendant à consolider et clarifier l’organisation de la manutention dans les ports maritimes, en 2015, dont j’ai eu l’honneur d’être le rapporteur.

Le présent texte, qui, à l’origine, comprenait seulement une vingtaine d’articles, s’est fortement étoffé lors de son passage à l’Assemblée nationale. Il est devenu une sorte d’inventaire à la Prévert de mesures visant à renforcer la compétitivité des entreprises maritimes françaises – donc du pavillon français –, à favoriser l’employabilité des gens de mer, ainsi qu’à réformer la gouvernance des ports, en renforçant le rôle des collectivités territoriales. Plusieurs dispositions sur la pêche visent aussi à favoriser l’essor de l’aquaculture.

Ce projet de loi déguisé en proposition de loi témoigne malheureusement de la vision fragmentée et parcellaire du Gouvernement. Ne définissant ni perspectives ni stratégie économique à long terme, ce texte ne permettra pas, hélas, de refonder une véritable politique maritime pour notre pays. Nous le regrettons.

La France est, par sa géographie, la plus grande zone maritime du monde et, par son histoire, une grande nation maritime. Cependant, aujourd'hui, elle est très loin d’être la première puissance maritime du monde. Nous avons la profonde conviction qu’elle ne redeviendra une véritable puissance maritime qu’à l’aide de la mobilisation de l’ensemble des acteurs concernés, par l’adoption d’un vrai dispositif permettant sa compétitivité dans tous les domaines.

L’accord qui a été trouvé en CMP a toutefois permis d’acter des avancées majeures, acquises notamment par le vote d’amendements issus de notre groupe. Je limiterai donc mon propos aux principaux points qui ont fait débat.

Je pense, en premier lieu, à la gouvernance des grands ports maritimes, qui se trouve profondément modernisée. Le poids des régions, mais aussi des opérateurs portuaires privés, y est renforcé. Ces modifications permettent d’augmenter de quatre à cinq le nombre de représentants des collectivités territoriales au conseil de surveillance. Parmi ceux-ci, on trouvera désormais deux représentants de la région dans laquelle est situé le siège du port, ainsi que trois représentants des collectivités territoriales autres que la région, dont au moins un représentant du département.

De plus, les personnalités qualifiées membres du conseil de surveillance sont nommées après avis du président du conseil régional.

La nomination du président du directoire du port constitue une autre avancée. Sur ce point, la CMP a conservé une partie des évolutions issues des travaux du Sénat. Les modalités de nomination du président du directoire prévoient désormais un avis du président de la région dans laquelle se trouve le siège du port. Cette modification fait suite à un amendement déposé par nos collègues Charles Revet et Bruno Retailleau. En effet, au regard de la fonction que jouent les régions dans le développement économique de notre pays, il est apparu pertinent d’accorder une place plus importante à la collectivité régionale dans le choix du président du directoire. La CMP a cependant choisi de rétablir l’avis conforme du conseil de surveillance.

En ce qui concerne la composition de la commission des investissements au sein du conseil de développement, la CMP a retenu la création du double collège, l’un rassemblant les investisseurs publics, dont l’État, l’autre représentant les investisseurs privés du domaine du grand port maritime, conformément au dispositif d’un autre amendement de MM. Revet et Retailleau. Ainsi, si leur nombre de représentants peut être différent, ces deux collèges demeurent égaux en voix.

Parallèlement, la représentation des investisseurs publics devra être proportionnelle à leur niveau d’investissement, avec, cependant, un siège au moins par collectivité territoriale.

Ce renforcement du poids des investisseurs privés dans les décisions prises au sein de la commission des investissements vise à favoriser le développement du port.

La commission mixte paritaire a également ajouté une condition de possession d’un titre d’occupation supérieur ou égal à dix ans pour les investisseurs. En effet, les investissements sur les ports étant des investissements de long terme, il faut que les investisseurs représentés au comité des investissements soient des investisseurs stables et sûrs, engagés sur le long terme dans le fonctionnement du port.

La CMP a souhaité revenir sur l’avis conforme rendu par la commission des investissements au sein du conseil de développement sur le projet stratégique du grand port maritime et sur les projets d’investissements les plus importants : il s’agira dorénavant d’un avis simple, non contraignant. Toutefois, reprenant un amendement de Charles Revet, elle a introduit une clause prévoyant que, si le conseil de surveillance décide de ne pas suivre un avis défavorable de la commission des investissements, il devra motiver sa décision.

Enfin, dans un souci de plus grande transparence, la motivation de la décision doit désormais être rendue publique.

J’en viens maintenant à un autre sujet qui a fait débat – tout le monde en a parlé – : l’autoliquidation de la TVA.

L’article 3 quater vise à élargir à toutes les entreprises réalisant des opérations d’importation en France la possibilité d’opter pour un report du montant de la TVA directement auprès de la DGFIP, la direction générale des finances publiques, sur déclaration fiscale.

Aujourd’hui, seules les entreprises pour lesquelles est réalisée une procédure de domiciliation unique peuvent bénéficier du dispositif d’autoliquidation de la TVA. Cette procédure est très complexe à mettre en œuvre pour les PME et les TPE au regard de l’intérêt que celles-ci pourraient en retirer. Je pense notamment à la nécessité de mettre en place un magasin de dépôt temporaire et à l’audit d’une durée de trois mois qui leur est imposé, alors que, lorsqu’elles choisissent comme point d’entrée communautaire un autre pays de l’Union européenne, il leur suffit de remplir une simple déclaration d’échange pour pouvoir bénéficier d’un régime comparable, dans la pratique, à celui de l’autoliquidation. C’est d'ailleurs pourquoi les entreprises importatrices privilégient aujourd’hui les ports étrangers, ce qui engendre une véritable distorsion de concurrence, dont souffrent les ports français.

De plus, l’évolution prévue à l’article 3 quater permettra de rapatrier en France une partie du dédouanement de marchandises qui se fait aujourd'hui dans des ports étrangers, ce qui induira – nous l’espérons – une augmentation des recettes de l’État.

Je veux évoquer une autre mesure fiscale, prévue à l’article 8 du texte : l’exonération de cotisations sociales, ou net wage.

Cet article instaure l’exonération totale des charges sociales pour les équipages que les entreprises emploient au titre des navires de commerce battant pavillon français. Les armateurs français réclamaient ce net wage, ou salaire net, de longue date. L’exonération des charges patronales dues pour les équipages qu’ils emploient sera donc étendue aux cotisations d’allocations familiales et aux cotisations d’assurance chômage.

La version adoptée par la CMP est maximaliste. En effet, alors que le Gouvernement souhaitait limiter le net wage aux marins et aux seuls navires de transport immatriculés au registre international français, nous avons choisi d’en faire bénéficier l’ensemble des gens de mer, en incluant également les navires de premier registre.

J’en viens aux articles relatifs à la filière REP de déconstruction des navires.

La notion de « responsabilité élargie du producteur » désigne des démarches et dispositifs qui restaurent la responsabilité du producteur de produits manufacturés pour ce qui concerne la gestion des déchets finaux et intermédiaires générés par les produits qu’il a fabriqués et mis sur le marché.

La nouvelle écriture de l’article 12 bis DA, telle qu’issue de la commission mixte paritaire, adapte les modalités de mise en place et de financement de la filière REP de déconstruction des navires créée par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, afin de mieux prendre en compte la réalité du marché de l’industrie nautique et préserver les emplois. Je me réjouis que mon amendement, qui visait à repousser d’un an, au 1er janvier 2018, la mise en place de cette filière, ait été maintenu en CMP.

En revanche, je ne peux qu’exprimer ma déception quant à la suppression de l’article 12 bis DB, qui plafonnait l’écocontribution des entreprises à 0,5 % du prix de vente et d’affectation au flux de bateaux neufs. Cet article me paraissait nécessaire pour accompagner le développement de cette filière de déconstruction sans déstabiliser l’industrie nautique française, qui, je le rappelle, est la première industrie de construction de bateaux de plaisance du monde.

Je veux également dire quelques mots sur les pêches et les cultures marines : le débat que nous avons eu en séance a permis que le Gouvernement s’engage à ouvrir des discussions sur la définition des élevages marins.

Enfin, je regrette que l’amendement de notre collègue Jean-François Rapin n’ait pas été retenu en CMP.

M. Michel Vaspart. Son adoption aurait permis d’assouplir les obstacles et d’atténuer les risques juridiques pour les maires des communes littorales délivrant les documents d’urbanisme. Monsieur le secrétaire d'État, comme l’a confirmé le Congrès des maires qui s’est tenu la semaine dernière, ces maires sont dans une insécurité juridique permanente lorsqu’ils délivrent leurs documents d’urbanisme. Ils en ont assez ! Nous devrons à nouveau mettre ce débat sur la table.

En conclusion, la proposition de loi pour l’économie bleue nous a permis de débattre de la politique de la mer, de l’avenir de la marine et de ses emplois. Toutefois, à l’issue de nos débats, nous continuons de penser qu’elle ne va pas assez loin et qu’elle n’est pas à la hauteur de l’ambition que nous devons avoir pour la France, premier territoire maritime du monde. Le développement de l’économie bleue mérite un vrai projet de loi, qui reste à rédiger. Cependant, agissant en responsabilité, les membres du groupe Les Républicains voteront ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat, lorsqu’il examine après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :

proposition de loi pour l’économie bleue

TITRE IER

RENFORCER LA COMPÉTITIVITÉ DES EXPLOITATIONS MARITIMES ET DES PORTS DE COMMERCE

Chapitre IER

Simplifier les procédures administratives

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Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi pour l'économie bleue
Article 1er bis B

Article 1er bis A

(Texte du Sénat)

I. – Le code des douanes est ainsi modifié :

1° Le I des articles 219 et 219 bis est ainsi modifié :

a) Au 1°, les mots : « la Communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » ;

b) Le 2° est ainsi modifié :

– au A, les mots : « la Communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » ;

– le même A est complété par une phrase ainsi rédigée :

« . Si le navire est détenu en copropriété, chacun des gérants doit résider en France ou, s’il y réside moins de six mois par an, y faire élection de domicile ; »

– au premier alinéa et à la première phrase du second alinéa du B, au C et aux a et c du D, les mots : « la Communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » ;

– il est ajouté un E ainsi rédigé :

« E. – Soit être affrété coque nue par :

« a) Une personne physique remplissant les conditions de nationalité et de résidence définies au A ;

« b) Ou une société remplissant les conditions de nationalité, de siège social ou d’établissement stable définies au B ; »

2° L’article 219 est ainsi modifié :

a) Le 3° du I est ainsi rédigé :

« 3° Indépendamment des cas prévus au 2°, la francisation d’un navire de commerce ou de plaisance peut être accordée par agrément spécial dans des conditions fixées par décret lorsque, dans l’une des hypothèses prévues au même 2°, les droits des personnes physiques ou morales remplissant les conditions de nationalité, de résidence, de siège social ou de principal établissement définies audit 2° ne s’étendent pas à la moitié mais au quart au moins du navire et, en outre, à la condition que la gestion du navire soit assurée par ces personnes elles-mêmes ou, à défaut, confiée à d’autres personnes remplissant les conditions prévues aux A ou B du même 2°. » ;

b) Il est ajouté un III ainsi rédigé :

« III. – La francisation d’un navire affrété coque nue peut être suspendue par gel du pavillon français à la demande de l’affréteur qui souhaite faire naviguer ce navire sous pavillon étranger pendant la durée du contrat d’affrètement.

« La francisation ne peut être suspendue qu’avec l’accord préalable des créanciers hypothécaires et à condition que la législation de l’État qui serait pour la durée du contrat l’État du pavillon ne permette pas dans de tels cas l’inscription sur ses registres de nouvelles hypothèques.

« L’hypothèque consentie sur un navire dont la francisation est suspendue demeure inscrite au siège de la conservation hypothécaire. » ;

3° L’article 219 bis est ainsi modifié :

a) Le 3° du I est ainsi rédigé :

« 3° Indépendamment des cas prévus au 2°, la francisation d’un navire armé à la pêche peut être accordée par agrément spécial dans des conditions fixées par décret lorsque, dans l’une des hypothèses prévues au même 2°, les droits des personnes physiques ou morales remplissant les conditions de nationalité, de résidence, de siège social ou de principal établissement définies audit 2° ne s’étendent pas à la moitié mais au quart au moins du navire. » ;

b) Après le II, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis. – La francisation d’un navire affrété coque nue peut être suspendue par gel du pavillon français à la demande de l’affréteur qui souhaite faire naviguer ce navire sous pavillon étranger pendant la durée du contrat d’affrètement.

« La francisation ne peut être suspendue qu’avec l’accord préalable des créanciers hypothécaires et à condition que la législation de l’État qui serait pour la durée du contrat l’État du pavillon ne permette pas dans de tels cas l’inscription sur ses registres de nouvelles hypothèques.

« L’hypothèque consentie sur un navire dont la francisation est suspendue demeure inscrite au siège de la conservation hypothécaire. » ;

4° L’article 241 est ainsi modifié :

a) La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « , sauf s’ils ont été francisés parce qu’ils remplissent les conditions définies au E du 2° du I des articles 219 ou 219 bis » ;

b) La seconde phrase du même premier alinéa est supprimée ;

c) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Ils ne peuvent être grevés que d’hypothèques conventionnelles. » ;

5° Le 1 de l’article 251 est complété par les mots : « , à l’exception de la suspension de la francisation mentionnée au III de l’article 219 et au II bis de l’article 219 bis ».

II. – La loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer est ainsi modifiée :

a) L’article 3 est ainsi rédigé :

« Art. 3. – Les règles de francisation des navires sont fixées aux articles 219 et 219 bis du code des douanes. » ;

b) Les articles 43 et 57 sont abrogés.

Article 1er bis A
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Article 1er ter A

Article 1er bis B

(Texte du Sénat)

Le 2° du I de l’article 219 du code des douanes est complété par un F ainsi rédigé :

« F. – Soit être un navire dont la gestion nautique remplit les critères suivants :

« a) Elle est effectivement exercée depuis la France par un établissement stable de la société propriétaire ou d’une société française liée contractuellement avec le propriétaire pour en assurer la gestion nautique ;

« b) Le gestionnaire de navire, responsable de son exploitation, est détenteur d’un document de conformité en application du code international de gestion de la sécurité et remplit les conditions de nationalité, de résidence, de siège social ou de principal établissement définies aux A ou B ; ».

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Article 1er bis B
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Article 1er ter C

Article 1er ter A

[Pour coordination]

L’article 231 du code des douanes est ainsi modifié :

1° Le 1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « partie » est remplacé par le mot : « part » et le mot : « contenir » est remplacé par le mot : « indiquer » ;

b) Au a, les mots : « et la désignation » sont remplacés par les mots : « , le type et le modèle » ;

c) Le c est remplacé par des c à e ainsi rédigés :

« c) Le bureau des douanes du port d’attache ;

« d) La date et le numéro d’immatriculation ;

« e) L’année de construction du navire et le type de construction, en précisant si la construction a été réalisée par un non-professionnel ou par un professionnel. » ;

2° Après le mot : « navire », la fin du 2 est supprimée.

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Article 1er ter A
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Article 1er ter E

Article 1er ter C

(Texte de la commission mixte paritaire)

I. – Le 6 de la section 7 du chapitre Ier du titre IX du code des douanes est ainsi modifié :

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Contribution de sécurité de la propriété maritime et responsabilité en matière d’hypothèque maritime » ;

2° L’article 252 est ainsi rédigé :

« Art. 252. – Les attributions conférées à l’administration des douanes et droits indirects en matière d’hypothèque maritime sont exercées par le service comptable des douanes territorialement compétent, dans des conditions définies par décret en Conseil d’État.

« La liste des conservations des hypothèques maritimes est fixée par arrêté du ministre chargé des douanes. » ;

3° Il est ajouté un article 252 bis ainsi rédigé :

« Art. 252 bis. – L’État est responsable du préjudice résultant des fautes commises par chaque service chargé des hypothèques maritimes dans l’exécution de ses attributions.

« L’action en responsabilité de l’État est exercée devant le juge administratif et, à peine de forclusion, dans un délai de quatre ans à compter du jour où la faute a été commise. » ;

4° Il est ajouté un article 252 ter ainsi rédigé :

« Art. 252 ter. – La conservation des hypothèques maritimes territorialement compétente perçoit la contribution de sécurité de la propriété maritime lors de l’inscription hypothécaire ou de son renouvellement.

« Cette contribution est fixée à 0,05 % du capital des créances donnant lieu à l’hypothèque, quel que soit le nombre de navires sur lesquels il est pris inscription. Toutefois, dans le cas où les navires affectés à la garantie d’une même créance sont immatriculés dans des ports dépendant de conservations des hypothèques maritimes différentes, la contribution de sécurité de la propriété maritime est due au conservateur de chacun des ports.

« Un bordereau d’inscription hypothécaire ne peut être délivré que pour un seul navire. En cas de changement de domicile du requérant, de subrogation du créancier ou de radiation de l’hypothèque, le requérant fait une déclaration distincte par inscription hypothécaire. »

II et III. – (Supprimés)

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Article 1er ter C
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Article 1er ter F

Article 1er ter E

(Texte du Sénat)

Le chapitre VI de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 relative au statut des navires et autres bâtiments de mer est ainsi modifié :

1° Au début, il est ajouté un article 43 A ainsi rédigé :

« Art. 43 A. – Les règles relatives aux hypothèques maritimes sont fixées à la section 7 du chapitre Ier du titre IX du code des douanes ainsi qu’au présent chapitre. » ;

2° Les articles 44 à 46, 48, 49, 52 à 54 sont abrogés.

Article 1er ter E
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Article 2 bis

Article 1er ter F

(Texte du Sénat)

La loi n° 67-1175 du 28 décembre 1967 portant réforme du régime relatif aux droits de port et de navigation est ainsi modifiée :

1° Avant le chapitre Ier, il est inséré un article 1er A ainsi rédigé :

« Art. 1er A. – Les règles relatives aux droits de port et de navigation sont fixées au chapitre Ier du titre IX du code des douanes, au titre II du livre III de la cinquième partie du code des transports et à la présente loi. » ;

2° Le chapitre Ier, le chapitre II, la section 1 du chapitre III, le chapitre IV, l’article 18, l’article 23 et le tableau relatif au droit de francisation et de navigation annexé à cette même loi sont abrogés.

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Article 1er ter F
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Article 2 quinquies

Article 2 bis

(Texte du Sénat)

I. – La cinquième partie du code des transports est ainsi modifiée :

1° A Au second alinéa de l’article L. 5511-3, les mots : « le rôle » sont remplacés par les mots : « la liste » ;

1° Aux 2° et 3° de l’article L. 5511-4, les mots : « le rôle » sont remplacés par les mots : « la liste » ;

2° L’article L. 5542-5 est ainsi modifié :

a) Le II est abrogé ;

b) Le début du III est ainsi rédigé : « L’inscription sur la liste d’équipage d’une personne appartenant à la catégorie des gens de mer dispense… (le reste sans changement). » ;

2° bis Au premier alinéa de l’article L. 5532-1, les mots : « d’un rôle » sont remplacés par les mots : « d’une liste » ;

2° ter Au 4° de l’article L. 5552-16, les mots : « du rôle d’équipage » sont remplacés par les mots : « de l’état des services » et les mots : « ce rôle » sont remplacés par les mots : « cet état des services » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 5542-18 et au second alinéa des articles L. 5715-4, L. 5735-4, L. 5745-4 et L. 5755-4, les mots : « au rôle d’équipage » sont remplacés par les mots : « à l’état des services » ;

4° À l’article L. 5549-5, les mots : « au rôle » sont remplacés par les mots : « à l’état des services » et, après le mot : « liste », sont insérés les mots : « d’équipage » ;

5° À la première phrase de l’article L. 5552-18, les mots : « du rôle d’équipage » sont remplacés par les mots : « de l’état des services » ;

6° À l’article L. 5762-1, après le mot : « celles », sont insérés les mots : « des chapitres Ier à IV du titre III et » ;

7° À l’article L. 5772-1, après le mot : « celles », sont insérés les mots : « des chapitres Ier à IV du titre III et » ;

8° Au premier alinéa de l’article L. 5785-1, après la référence : « L. 5549-1 », est insérée la référence : « , l’article L. 5551-3 » ;

9° Au 1° de l’article L. 5785-3, les mots : « au rôle d’équipage » sont remplacés par les mots : « à l’état des services » ;

10° Au premier alinéa de l’article L. 5795-1, après la référence : « L. 5549-1 », est insérée la référence : « , l’article L. 5551-3 » ;

11° Au 1° de l’article L. 5795-4, les mots : « au rôle d’équipage » sont remplacés par les mots : « à l’état des services ».

II. – Le code civil est ainsi modifié :

1° À la fin de la seconde phrase du dernier alinéa de l’article 59, les mots : « rôle d’équipage » sont remplacés par les mots : « livre de bord » ;

2° À l’article 993, le mot : « rôle » est remplacé par les mots : « livre de bord ».

III. – Au 1° de l’article L. 121-5 du code de justice militaire, les mots : « le rôle » sont remplacés par les mots : « la liste ».

IV. – (Supprimé)

V. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Aux première et seconde phrases du troisième alinéa de l’article L. 921-7, les mots : « rôle d’équipage » sont remplacés par les mots : « permis d’armement » ;

2° Au 17° de l’article L. 945-4, les mots : « rôle d’équipage » sont remplacés par les mots : « permis d’armement ».

VI. – L’article 54 du code du travail maritime est abrogé.

VII. – La loi n° 42-427 du 1er avril 1942 relative aux titres de navigation maritime est ainsi modifiée :

1° Le dernier alinéa de l’article 3 est ainsi rédigé :

« Les cartes de circulation sont visées annuellement. » ;

2° Les articles 5 à 6-1 et 10 sont abrogés.

VIII. – Au second alinéa de l’article 1er de la loi n° 77-441 du 27 avril 1977 portant dérogations, en ce qui concerne certains marins des départements d’outre-mer et du territoire d’outre-mer de la Polynésie française, à diverses dispositions du code des pensions de retraite des marins et du décret-loi du 17 juin 1938, les mots : « au rôle d’équipage » sont remplacés par les mots : « à l’état des services ».

IX. – Au 17° de l’article 9 de l’ordonnance n° 2010-1307 du 28 octobre 2010 relative à la partie législative du code des transports, les références : « 5, 6, 6-1, » et les mots : « et la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article 10 » sont supprimés.

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Article 2 bis
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Article 3 B

Article 2 quinquies

(Texte de la commission mixte paritaire)

I. – Le livre VII de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° et 2° (Supprimés)

3° Avant le chapitre Ier du titre III, il est inséré un article L. 5730-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 5730-1. – Pour l’application à Saint-Barthélemy de l’article L. 5000-5, aux a et b du 2°, après le mot : “aux”, sont insérés les mots : “règles applicables en métropole en application des” » ;

4° (Supprimé)

5° Avant le chapitre Ier du titre V, il est inséré un article L. 5750-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 5750-1. – Pour l’application à Saint-Pierre-et-Miquelon de l’article L. 5000-5, aux a et b du 2°, après le mot : “aux”, sont insérés les mots : “règles applicables en métropole en application des” » ;

6° L’article L. 5760-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l’application de l’article L. 5000-5, aux a et b du 2°, après le mot : “aux”, sont insérés les mots : “règles applicables en métropole en application des” » ;

7° L’article L. 5770-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l’application de l’article L. 5000-5, aux a et b du 2°, après le mot : “aux”, sont insérés les mots : “règles applicables en métropole en application des” » ;

8° L’article L. 5780-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l’application de l’article L. 5000-5, aux a et b du 2°, après le mot : “aux”, sont insérés les mots : “règles applicables en métropole en application des” » ;

9° L’article L. 5790-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l’application de l’article L. 5000-5, aux a et b du 2°, après le mot : “aux”, sont insérés les mots : “règles applicables en métropole en application des” ».

II. – Les 4° et 5° de l’article 1er , les articles 1er bis A, 1er bis B, 1er bis C, 1er bis, 1er ter A, 1er ter B, 1er ter C, 1er ter D, 1er ter E, 1er ter F et 1er quater ne sont pas applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon.

L’article 1er ter E est applicable en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna.

L’article 1er ter n’est pas applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy.

L’article 1er ter est applicable à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

L’article 1er quinquies est applicable en Nouvelle-Calédonie, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

L’article 2 est applicable à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

L’article 2 bis est applicable, à l’exception des 2°, 2° ter, 3°, 4° et 5° du I, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie Française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

III. – Le chapitre VI de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 relative au statut des navires et autres bâtiments de mer est complété par un article 57 bis ainsi rédigé :

« Art. 57 bis. – L’article 43 A est applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Wallis-et-Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises dans sa rédaction résultant de l’article 1er ter E de la loi n° … du … pour l’économie bleue. »

Chapitre II

Rénover la gouvernance des ports

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Article 2 quinquies
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Article 3 C

Article 3 B

(Texte de la commission mixte paritaire)

L’article L. 5312-7 du code des transports est ainsi modifié :

1° Le 2° est ainsi rédigé :

« 2° Deux représentants de la région ; »

2° Après le 2°, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :

« 2° bis Trois représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, autres que la région, dont au moins un représentant du département ; »

3° Au 4°, après le mot : « État, », sont insérés les mots : « après avis du président du conseil régional, ».

Article 3 B
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Article 3

Article 3 C

(Texte de la commission mixte paritaire)

L’article L. 5312-9 du code des transports est ainsi rédigé :

« Art. L. 5312-9. – Le nombre de membres du directoire est déterminé, pour chaque grand port maritime, par décret.

« Le président du directoire est nommé par décret, après avis du président du conseil régional de la région dans laquelle se trouve le siège du port et après avis conforme du conseil de surveillance.

« Le président du directoire porte le titre de directeur général.

« Les autres membres du directoire sont nommés par le conseil de surveillance sur proposition du président du directoire.

« La durée du mandat des membres du directoire est fixée par voie réglementaire. »

Article 3 C
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Article 3 ter A

Article 3

(Texte de la commission mixte paritaire)

I. – L’article L. 5312-11 du code des transports est ainsi rédigé :

« Art. L. 5312-11. – Dans chaque grand port maritime, sont représentés dans un conseil de développement :

« 1° Les milieux professionnels, sociaux et associatifs ;

« 2° Les collectivités territoriales et leurs groupements, dont la région dans laquelle se trouve le siège du port.

« Les membres du conseil de développement mentionnés au 1° sont nommés par le représentant de l’État dans la région, après avis du président du conseil régional de la région dans laquelle se trouve le siège du port.

« Le conseil de développement rend des avis sur le projet stratégique ainsi que sur les projets d’investissements et la politique tarifaire du grand port maritime. Il peut émettre des propositions et a le droit de faire inscrire à l’ordre du jour d’une réunion du conseil de surveillance toutes questions en lien avec son champ de compétence.

« Les avis du conseil de développement sont transmis au conseil de surveillance.

« Une commission des investissements est constituée au sein du conseil de développement. Elle est présidée par le président du conseil régional ou son délégué et est composée de deux collèges comportant un même nombre de représentants :

« a) Un collège des investisseurs publics, composé des membres du directoire du grand port maritime et de représentants des investisseurs publics, membres du conseil du développement, dont le nombre est proportionnel à leur niveau d’investissement avec un minimum d’un siège par membre éligible à ce collège, ainsi que d’un représentant de l’État ;

« b) Un collège des investisseurs privés, choisis parmi les membres du conseil de développement représentant des entreprises ayant investi, de manière significative, sur le domaine du grand port maritime et titulaires d’un titre d’occupation supérieur ou égal à dix ans. Chaque grand port maritime définit le seuil d’investissements significatifs réalisés par les entreprises sur son domaine.

« Sont soumis à l’avis de la commission des investissements :

« – le projet stratégique du grand port maritime, avant sa transmission pour examen au conseil de surveillance ;

« – les projets d’investissements publics d’infrastructures d’intérêt général à réaliser sur le domaine portuaire et à inclure dans le projet stratégique.

« Les avis de la commission des investissements sont publiés au recueil des actes administratifs du département.

« Le conseil de développement peut demander à la commission des investissements une nouvelle délibération sur les investissements à inclure dans le projet stratégique avant de transmettre son avis définitif au conseil de surveillance.

« Si le conseil de surveillance décide de ne pas suivre un avis défavorable de la commission des investissements rendu en application des dixième à douzième alinéas, il doit motiver sa décision. Cette motivation est publiée au recueil des actes administratifs du département.

« Les délibérations de la commission des investissements sont prises à la majorité des trois cinquièmes des membres de la commission.

« Ses avis sont transmis au conseil de développement et au conseil de surveillance.

« Le montant des projets d’investissements soumis à l’avis de la commission des investissements en application du douzième alinéa est défini par le conseil de surveillance. »

II. – Le 5° de l’article L. 5713-1-1 du même code est ainsi rédigé :

« 5° Le 1° de l’article L. 5312-11 est complété par les mots : “, avec, notamment, au moins un représentant des consommateurs” ; ».

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Article 3
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Article 3 quinquies

Article 3 ter A

(Texte du Sénat)

Le deuxième alinéa de l’article L. 5312-12 du code des transports est ainsi modifié :

1° La première phrase est complétée par les mots : « dans le but d’élaborer des positions communes par façade sur les enjeux nationaux et européens » ;

2° La seconde phrase est complétée par les mots : « d’expertise et de services, y compris de dragage et de remorquage ».

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Article 3 ter A
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Article 3 octies (nouveau)

Article 3 quinquies

(Texte du Sénat)

L’article L. 5314-12 du code des transports est ainsi modifié :

1° Après le mot : « stratégique », sont insérés les mots : « , la prise en compte des questions environnementales » ;

2° (Supprimé)

3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le conseil portuaire forme, à chaque renouvellement, des commissions chargées d’étudier l’exploitation, les tarifs, le développement ou toute autre question soumise au conseil. »

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Article 3 quinquies
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Article 5 bis

Article 3 octies (nouveau)

I. – Les articles 3 A, 3 B, 3 C, 3, 3 bis, 3 ter A, 3 quater et 3 sexies ne sont pas applicables à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.

II. – L’article 3 quater n’est pas applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon.

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Chapitre III

Renforcer l’employabilité des gens de mer et leur protection

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Article 3 octies (nouveau)
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Article 5 ter

Article 5 bis

(Texte de la commission mixte paritaire)

Le 3° de l’article L. 5511-1 du code des transports est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Les marins comprennent notamment les marins au commerce et les marins à la pêche, ainsi définis :

« a) “Marins au commerce” : gens de mer exerçant une activité directement liée à l’exploitation de navires affectés à une activité commerciale, qu’ils soient visés ou non par la convention du travail maritime de l’Organisation internationale du travail, adoptée à Genève, le 7 février 2006, à l’exception des navires affectés à la pêche ou à une activité analogue ;

« b) “Marins à la pêche” : gens de mer exerçant une activité directement liée à l’exploitation des navires affectés à une activité de pêche relevant de la convention n° 188 de l’Organisation internationale du travail relative au travail dans la pêche, adoptée à Genève, le 14 juin 2007 ; ».

Article 5 bis
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Article 5 quater A

Article 5 ter

(Texte du Sénat)

I. – La cinquième partie du code des transports est ainsi modifiée :

1° L’article L. 5521-1 est ainsi modifié :

a) Le 3° du IV est abrogé ;

b) Il est ajouté un V ainsi rédigé :

« V. – Les normes d’aptitude médicale à la navigation des gens de mer sont définies par arrêté du ministre chargé de la mer, pris après consultation du Conseil supérieur des gens de mer. Elles tiennent compte des recommandations internationales relatives à la santé et au travail en mer, des particularités des conditions de travail et de vie à bord des navires et des impératifs de la sécurité maritime. Le cas échéant, ces normes sont déterminées selon les fonctions à bord ou les types de navigation. » ;

2° L’article L. 5521-2 est ainsi modifié :

a) Au I, les mots : « ne satisfait aux conditions de formation professionnelle correspondant » sont remplacés par les mots : « n’est pourvu de titres de formation professionnelle maritime et de qualifications correspondant aux capacités qu’il doit avoir et » ;

b) Les 1° et 2° du II sont remplacés par des 1° à 4° ainsi rédigés :

« 1° Les conditions de délivrance et de validité des titres de formation professionnelle maritime ;

« 2° Les conditions de dérogation au I ;

« 3° Les modalités de suspension et de retrait des prérogatives attachées aux titres de formation professionnelle maritime ;

« 4° Les conditions dans lesquelles sont reconnus, le cas échéant après des épreuves ou des vérifications complémentaires, les titres, diplômes et qualifications professionnelles obtenus ou acquis dans un État étranger. » ;

c) Il est ajouté un III ainsi rédigé :

« III. – Les titres de formation professionnelle maritime et les qualifications mentionnés au I sont définis par voie réglementaire. » ;

3° À l’article L. 5524-1, la référence : « L. 5521-1 » est remplacée par la référence : « L. 5521-2 » ;

4° Au second alinéa de l’article L. 5725-1, après le mot : « que », est insérée la référence : « le V de l’article L. 5521-1 et ».

II. – (Supprimé)

Article 5 ter
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Article 5 quater B

Article 5 quater A

(Texte de la commission mixte paritaire)

L’article L. 5521-4 du code des transports est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le premier alinéa ne s’applique pas aux fonctions de chef mécanicien exercées sur un navire armé à la pêche. » ;

2° Le second alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il définit notamment les mentions portées au bulletin n° 2 du casier judiciaire qui sont compatibles avec l’exercice des fonctions de capitaine, d’officier en charge de sa suppléance, d’agent chargé de la sûreté du navire et, sous réserve du deuxième alinéa, avec l’exercice des fonctions de chef mécanicien. »

Article 5 quater A
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Article 5 quater

Article 5 quater B

(Supprimé)

Article 5 quater B
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Article 5 quinquies

Article 5 quater

(Texte de la commission mixte paritaire)

Le chapitre Ier du titre II du livre V de la cinquième partie du code des transports est complété par un article L. 5521-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 5521-5. – Les capitaines et leurs suppléants embarqués sur des navires armés à la petite pêche ou aux cultures marines ne bénéficient pas des prérogatives de puissance publique. »

Article 5 quater
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Article 6 bis

Article 5 quinquies

(Texte de la commission mixte paritaire)

Le code des transports est ainsi modifié :

1° Après le deuxième alinéa de l’article L. 5542-18, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au premier alinéa, à la pêche maritime, un accord collectif de branche peut prévoir une période ouvrant droit à indemnité inférieure à la durée d’inscription à l’état des services. Cette période ne peut être inférieure à la durée de l’embarquement effectif. » ;

2° À l’article L. 5725-4 et au 2° des articles L. 5785-3 et L. 5795-4, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « cinquième ».

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Article 5 quinquies
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Article 6 ter

Article 6 bis

(Texte du Sénat)

Après le deuxième alinéa de l’article L. 5542-48 du code des transports, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’accusé de réception de la demande aux fins de tentative de conciliation interrompt la prescription ainsi que les délais pour agir. »

Article 6 bis
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Article 6 quater

Article 6 ter

(Texte du Sénat)

I. – L’article L. 5543-1-1 du code des transports est complété par un V ainsi rédigé :

« V. – Pour la mise en œuvre des conventions de l’Organisation internationale du travail intéressant les gens de mer, la consultation de la Commission nationale de la négociation collective maritime vaut consultation tripartite au sens de la convention (n° 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, de l’Organisation internationale du travail.

« Cette consultation vaut également pour toute mise en œuvre, pour les gens de mer, des autres conventions de l’Organisation internationale du travail. »

II. – Au premier alinéa du III de l’article L. 5543-2-1 et au IV des articles L. 5544-4 et L. 5544-16 du même code, les mots : « , pris après avis des organisations les plus représentatives d’armateurs et de gens de mer intéressées, » sont supprimés.

II bis. – Après les mots : « par un décret en Conseil d’État », la fin de l’article L. 5544-32 dudit code est supprimée.

II ter. – Au deuxième alinéa de l’article L. 5544-40 du même code, les mots : « pris après avis des organisations les plus représentatives d’armateurs et de gens de mer intéressées, » sont supprimés.

III. – À l’article L. 5623-9 du même code, les mots : « , après consultation des organisations professionnelles représentatives des armateurs et des organisations syndicales représentatives des gens de mer » sont supprimés.

Article 6 ter
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Article 6 quinquies

Article 6 quater

(Suppression maintenue)

Article 6 quater
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Article 7

Article 6 quinquies

(Texte du Sénat)

L’article L. 5564-1 du code des transports est ainsi modifié :

1° Après le mot : « navires », sont insérés les mots : « mentionnés à l’article L. 5561-1 » ;

2° Les mots : « avec les îles ou de croisière, et d’une jauge brute de moins de 650 » sont supprimés.

Article 6 quinquies
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Article 8

Article 7

(Texte du Sénat)

I à V. – (Supprimés)

VI. – L’article L. 5548-1 du code des transports est ainsi modifié :

1° À la fin du deuxième alinéa, le mot : « marin » est remplacé par les mots : « gens de mer » ;

2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Lorsqu’ils existent en vertu de la législation du pavillon du navire, le capitaine informe les représentants des gens de mer à bord du navire de la visite de l’inspecteur ou du contrôleur du travail, afin qu’ils puissent assister à cette visite s’ils le souhaitent. »

VII. – À l’article L. 5548-2 du même code, le mot : « marins » est remplacé par les mots : « gens de mer ».

VIII. – Le chapitre VIII du titre IV du livre V de la cinquième partie du même code est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 5548-3, il est inséré un article L. 5548-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 5548-3-1. – Sans préjudice des missions des inspecteurs et contrôleurs du travail, les officiers et fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer sont chargés du contrôle de l’application du titre VI du présent livre ainsi que du contrôle de l’application des normes de l’Organisation internationale du travail relatives au travail des gens de mer embarqués à bord d’un navire battant pavillon étranger faisant escale dans un port français.

« Pour l’exercice de ces missions, ils sont habilités à demander à l’employeur, ainsi qu’à toute personne employée à quelque titre que ce soit à bord d’un navire, de justifier de son identité, de son adresse et, le cas échéant, de sa qualité de gens de mer.

« Lorsqu’ils existent en vertu de la législation du pavillon du navire, le capitaine informe les représentants des gens de mer à bord du navire de la visite des officiers et fonctionnaires, afin qu’ils puissent assister à cette visite s’ils le souhaitent. » ;

2° Il est ajouté un article L. 5548-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 5548-5. – Les officiers et fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer et les inspecteurs et contrôleurs du travail se communiquent réciproquement tous renseignements et tous documents utiles à l’accomplissement des missions de contrôle définies au présent chapitre. Pour l’exercice de ces missions, ils s’informent réciproquement de la programmation des contrôles et des suites qui leur sont données. »

IX et X. – (Supprimés)

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Article 7
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Article 8 bis

Article 8

(Texte de la commission mixte paritaire)

I. – L’article L. 5553-11 du code des transports est ainsi rédigé :

« Art. L. 5553-11. – Les entreprises d’armement maritime sont exonérées de la contribution patronale mentionnée à l’article L. 5553-1 du présent code, de la cotisation d’allocations familiales mentionnée à l’article L. 241-6 du code de la sécurité sociale et de la contribution à l’allocation d’assurance contre le risque de privation d’emploi mentionnée à l’article L. 5422-9 du code du travail dues par les employeurs, pour les équipages et les gens de mer que ces entreprises emploient, qui sont affiliés au régime d’assurance vieillesse des marins et qui sont embarqués à bord des navires de commerce battant pavillon français affectés à des activités de transport ou à des activités de services maritimes soumises aux orientations de l’Union européenne sur les aides d’État au transport maritime, soumises à titre principal à une concurrence internationale. »

II (nouveau). – L’article 137 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 est abrogé.

Article 8
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Article 9

Article 8 bis

(Supprimé)

Article 8 bis
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Article 9 bis A

Article 9

(Texte du Sénat)

I. – Le titre VI du livre V de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° L’article L. 5561-1 est ainsi modifié :

a) (Supprimé)

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent titre n’est pas applicable aux navires de construction traditionnelle participant à des manifestations nautiques. » ;

c) (Supprimé)

2° (Supprimé)

2° bis À l’article L. 5561-2, la référence : « à l’article L. 5561-1 » est remplacée par les références : « aux 1° à 3° de l’article L. 5561-1 » ;

2° ter Au premier alinéa de l’article L. 5562-1, la référence : « à l’article L. 5561-1 » est remplacée par les références : « aux 1° à 3° de l’article L. 5561-1 » ;

3° L’article L. 5562-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « armateur », sont insérés les mots : « , l’employeur ou la personne faisant fonction » ;

b) Le 3° est complété par les mots : « , l’employeur ou la personne faisant fonction » ;

c) Le 8° est complété par les mots : « , l’employeur ou la personne faisant fonction » ;

4° À la seconde phrase de l’article L. 5562-3, après le mot : « armateur », sont insérés les mots : « , l’employeur ou la personne faisant fonction » ;

4° bis A Au premier alinéa de l’article L. 5563-1, la référence : « à l’article L. 5561-1 » est remplacée par les références : « aux 1° à 3° de l’article L. 5561-1 » ;

4° bis Au premier alinéa de l’article L. 5563-2, après le mot : « armateur », sont insérés les mots : « , l’employeur » ;

5° L’article L. 5566-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « armateur », sont insérés les mots : « , l’employeur ou la personne faisant fonction » ;

b) Au 2°, la référence : « L. 5561-2 » est remplacée par la référence : « L. 5562-2 » ;

6° Au premier alinéa de l’article L. 5566-2, après le mot : « armateur », sont insérés les mots : « , l’employeur ou la personne faisant fonction » ;

7° Il est ajouté un chapitre VII ainsi rédigé :

« CHAPITRE VII

« Constatation des infractions

« Art. L. 5567-1. – Les infractions au présent titre sont constatées par les inspecteurs et les contrôleurs du travail, les officiers et fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer et les personnes mentionnées aux 1° à 4°, au 8° et au 10° de l’article L. 5222-1.

« Art. L. 5567-1-1. – Pour l’exercice des missions mentionnées à l’article L. 5567-1, les personnes mentionnées au même article sont habilitées à demander à l’employeur ou à la personne faisant fonction, ainsi qu’à toute personne employée à quelque titre que ce soit à bord d’un navire, de justifier de son identité, de son adresse et, le cas échéant, de sa qualité de gens de mer.

« Lorsqu’ils existent en vertu de la législation du pavillon du navire, le capitaine informe les représentants des gens de mer à bord du navire de la visite des personnes mentionnées à l’article L. 5567-1, afin qu’ils puissent assister à cette visite s’ils le souhaitent.

« Art. L. 5567-1-2. – Les personnes mentionnées à l’article L. 5567-1 se communiquent réciproquement tous renseignements et tous documents utiles à l’accomplissement des missions de contrôle définies au présent chapitre.

« Art L. 5567-2. – En cas de manquement aux formalités administratives prévues par le présent titre ou par les mesures prises pour son application, en cas d’obstacle aux missions des agents de contrôle ou en cas de non-présentation des documents devant être tenus à la disposition de ces agents, l’autorité maritime met en demeure l’armateur, l’employeur ou la personne faisant fonction de mettre le navire à quai dans le port qu’elle désigne dans un délai maximal de vingt-quatre heures, en vue de permettre aux services de l’État concernés de procéder aux contrôles requis. »

II. – Au 34° de l’article L. 311-3 du code de la sécurité sociale, la référence : « à l’article L. 5561-1 » est remplacée par les références : « aux 1° à 3° de l’article L. 5561-1 ».

III. – À l’avant-dernier alinéa du II de l’article 31 de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016, la référence : « à l’article L. 5561-1 » est remplacée par les références : « aux 1° à 3° de l’article L. 5561-1 ».

Article 9
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Article 9 ter

Article 9 bis A

(Texte du Sénat)

Après l’article L. 5571-3 du code des transports, il est inséré un article L. 5571-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 5571-4. – Outre les officiers et agents de police judiciaire, les personnes mentionnées aux 1° à 4° et aux 8° et 10° de l’article L. 5222-1 sont habilitées à constater les infractions au présent titre. »

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Article 9 bis A
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Article 9 quater

Article 9 ter

(Texte de la commission mixte paritaire)

I. – Le livre VII de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° L’article L. 5725-1 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, sont ajoutés les mots : « Le b du 3° de l’article L. 5511-1 et » ;

b) Au début du second alinéa, les mots : « Les titres Ier et III » sont remplacés par les mots : « Le titre Ier, à l’exception du b du 3° de l’article L. 5511-1, et le titre III » ;

2° L’article L. 5765-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après la référence : « L. 5511-5, », sont insérés les mots : « à l’exception du b du 3° de l’article L. 5511-1, » et la référence : « L. 5571-3 » est remplacée par la référence : « L. 5571-4 » ;

b) Au second alinéa, après la référence : « L. 5511-5, », sont insérés les mots : « à l’exception du b du 3° de l’article L. 5511-1, » et la référence : « L. 5571-3 » est remplacée par la référence : « L. 5571-4 » ;

3° L’article L. 5775-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après la référence : « L. 5511-5, », sont insérés les mots : « à l’exception du b du 3° de l’article L. 5511-1, » et la référence : « L. 5571-3 » est remplacée par la référence : « L. 5571-4 » ;

b) Au second alinéa de l’article L. 5775-1, après la référence : « L. 5511-5, », sont insérés les mots : « à l’exception du b du 3° de l’article L. 5511-1, » et la référence : « L. 5571-3 » est remplacée par la référence : « L. 5571-4 » ;

4° L’article L. 5785-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après la référence : « L. 5511-5, », sont insérés les mots : « à l’exception du b du 3° de l’article L. 5511-1, », la référence : « L. 5521-4 » est remplacée par la référence : « L. 5521-5 », après la référence « les II et III de l’article L. 5549-1 », est insérée la référence : « , l’article L. 5553-11 » et la référence : « L. 5571-3 » est remplacée par la référence : « L. 5571-4 » ;

b) Au second alinéa, après la référence : « L. 5511-5, », sont insérés les mots : « à l’exception du b du 3° de l’article L. 5511-1, » et la référence : « L. 5571-3 » est remplacée par la référence : « L. 5571-4 » ;

4° bis (nouveau) Après l’article L. 5785-5-1, il est inséré un article L. 5785-5-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 5785-5-2. – Pour l’application à Wallis-et-Futuna de l’article L. 5553-11, les mots : “ , de la cotisation d’allocations familiales mentionnée à l’article L. 241-6 du code de la sécurité sociale et de la contribution à l’allocation d’assurance contre le risque de privation d’emploi mentionnée à l’article L. 5422-9 du code du travail dues” sont remplacés par le mot : “due”. » ;

4° ter (nouveau) Au début de l’article L. 5785-6, sont ajoutés les mots : « Sans préjudice des dispositions de l’article L. 5785-5-2, » ;

5° L’article L. 5795-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après la référence : « L. 5511-5, », sont insérés les mots : « à l’exception du b du 3° de l’article L. 5511-1, », la référence : « L. 5521-4 » est remplacée par la référence : « L. 5521-5 » et la référence : « L. 5571-3 » est remplacée par la référence : « L. 5571-4 » ;

b) Au second alinéa, après la référence : « L. 5511-5, », sont insérés les mots : « à l’exception du b du 3° de l’article L. 5511-1, » et la référence : « L. 5571-3 » est remplacée par la référence : « L. 5571-4 ».

II. – A à C. – (Supprimés)

D. – L’article 5 bis de la présente loi, à l’exception du dernier alinéa, est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie Française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

E. – Le dernier alinéa de l’article 5 bis de la présente loi n’est pas applicable à Mayotte.

F. – Les 1° à 3° du I de l’article 5 ter de la présente loi sont applicables à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

bis (nouveau). – L’article 5 quater A est applicable à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

G. – Le 1° de l’article 5 quinquies de la présente loi est applicable à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

H. – L’article 6 de la présente loi est applicable à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

I. – L’article 6 bis, les I et II de l’article 6 ter et l’article 6 quater de la présente loi ne sont pas applicables à Mayotte.

Article 9 ter
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Article 10

Article 9 quater

(Texte du Sénat)

Les pensions de retraite des marins liquidées avant le 19 octobre 1999 peuvent être révisées à la demande des intéressés, déposée après la date d’entrée en vigueur de la présente loi, et à compter de cette demande, afin de bénéficier des dispositions du 1° de l’article L. 5552-17 du code des transports relatives à la prise en compte, pour le double de leur durée, des périodes de services militaires en période de guerre, au titre de leur participation à la guerre d’Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc, selon les modalités en vigueur à la date de promulgation de la présente loi.

Chapitre IV

Renforcer l’attractivité du pavillon français

Article 9 quater
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Article 12

Article 10

(Texte du Sénat)

Le chapitre Ier du titre Ier du livre VI de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° L’article L. 5611-2 est ainsi modifié :

a) Après la seconde occurrence du mot : « navires », la fin du 1° est ainsi rédigée : « transporteurs de passagers mentionnés au 1° de l’article L. 5611-3 ; »

b) Au 2°, le nombre : « 24 » est remplacé par le nombre : « 15 » ;

c) Il est ajouté un 3° ainsi rédigé :

« 3° Les navires de pêche professionnelle armés à la grande pêche, classés en première catégorie et travaillant dans des zones définies par voie réglementaire. » ;

2° L’article L. 5611-3 est ainsi modifié :

a et b) (Supprimés)

c) Le 4° est complété par les mots : « non mentionnés au 3° de l’article L. 5611-2 et par les mesures réglementaires prises pour son application » ;

3° et 4° (Supprimés)

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Article 10
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Article 12 bis C

Article 12

(Texte de la commission mixte paritaire)

I. – L’article L. 321-3 du code de la sécurité intérieure est ainsi rédigé :

« Art. L. 321-3. – I. – Par dérogation aux articles L. 324-1 et L. 324-2, il peut être accordé aux casinos installés à bord des navires de commerce transporteurs de passagers battant pavillon français, quel que soit leur registre d’immatriculation, l’autorisation temporaire d’ouvrir au public des locaux spéciaux, distincts et séparés où sont pratiqués certains jeux de hasard dans les conditions fixées au présent chapitre.

« L’autorisation d’exploiter les jeux de hasard dans les casinos mentionnés au premier alinéa du présent I est accordée par arrêté du ministre de l’intérieur à une personne morale qualifiée en matière d’exploitation de jeux de hasard ayant passé une convention avec l’armateur conforme à une convention type approuvée par décret en Conseil d’État.

« L’arrêté d’autorisation de jeux fixe la durée de l’autorisation. Il détermine la nature des jeux de hasard autorisés, leur fonctionnement, les missions de surveillance et de contrôle, les conditions d’admission dans les salles de jeux et leurs horaires d’ouverture et de fermeture. L’autorisation peut être révoquée par le ministre de l’intérieur, en cas d’inobservation des dispositions de l’arrêté ou des clauses de la convention passée avec l’armateur.

« II. – Dès lors qu’un navire mentionné au premier alinéa du I assure des trajets dans le cadre d’une ligne régulière intracommunautaire, les jeux exploités peuvent ne comprendre que les appareils de jeux mentionnés à l’article L. 321-5.

« Le nombre maximal d’appareils de jeux exploités dans ces conditions ne peut excéder quinze par navire.

« Par dérogation à l’article L. 321-4, la personne morale qualifiée n’exploitant que des appareils de jeux mentionnés à l’article L. 321-5 doit désigner, d’une part, des personnels chargés d’assurer l’installation, l’entretien et la maintenance du matériel et, d’autre part, des caissiers.

« Ces personnels doivent être français ou ressortissants d’un autre État membre de l’Union européenne ou d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen, majeurs, jouissant de leurs droits civiques et politiques. Ils sont agréés par le ministre de l’intérieur.

« En aucun cas, la personne morale qualifiée ne peut se substituer un fermier de jeux.

« III. – Les locaux mentionnés au I ne peuvent être ouverts que :

« 1° Hors des limites administratives des ports maritimes, pour les navires de commerce transporteurs de passagers assurant des lignes régulières intracommunautaires ;

« 2° Dans les eaux internationales, pour les autres navires.

« Les locaux ne sont accessibles qu’aux passagers majeurs, titulaires d’un titre de croisière ou d’un titre de transport.

« Dans l’enceinte du casino, le capitaine et l’officier chargé de sa suppléance sont garants du bon ordre, de la sûreté et de la sécurité publiques. »

II. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Au 9° de l’article L. 561-2, la référence : « de l’article L. 321-1 du code de la sécurité intérieure » est remplacée par les mots : « des articles L. 321-1 et L. 321-3 du code de la sécurité intérieure, sous réserve si nécessaire de l’application du troisième alinéa du II du même article L. 321-3 » ;

2° Après le 2° du I de l’article L. 755-13, il est inséré un 2°bis ainsi rédigé :

« 2° bis Au 9° de l’article L. 561-2, les mots : “L. 321-3 du code de la sécurité intérieure, sous réserve si nécessaire de l’application du troisième alinéa du II du même article L. 321-3 ” sont remplacés par la référence : “L. 344-4 du code de la sécurité intérieure” ; ».

Chapitre IV bis

Favoriser l’essor du nautisme et des loisirs de plage

Section 1

Encourager le développement du secteur de la plaisance

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Article 12
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Article 12 bis DA

Article 12 bis C

(Texte de la commission mixte paritaire)

La loi du 31 décembre 1903 relative à la vente de certains objets abandonnés est ainsi modifiée :

1° Au premier alinéa de l’article 1er, après le mot : « nettoyés », sont insérés les mots : « et les navires et bateaux de plaisance déposés chez un professionnel pour être réparés, entretenus, conservés ou gardés, » ;

1° bis Le deuxième alinéa de l’article 2 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Pour les navires et bateaux de plaisance mentionnés au premier alinéa de l’article 1er, cette ordonnance indiquera également qu’il est possible, en cas de carence d’enchères, que le navire soit remis directement à une société de déconstruction en vue de sa déconstruction ou de son démantèlement. » ;

2° Après le troisième alinéa de l’article 6 bis, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Aux navires et bateaux de plaisance déposés dans un chantier, sur un terre-plein ou dans un atelier professionnel de réparation navale, d’entretien ou de gardiennage ; ».

Article 12 bis C
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Article 12 bis DB

Article 12 bis DA

(Texte du Sénat)

Au premier alinéa de l’article L. 541-10-10 du code de l’environnement, l’année : « 2017 » est remplacée par l’année : « 2018 ».

Article 12 bis DA
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Chapitre V

Article 12 bis DB

(Supprimé)

Section 2

Favoriser la coexistence des activités sur le littoral

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Article 12 bis DB
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Article 12 quater A

Chapitre V

Renforcer les mesures relatives à la sûreté et à la sécurité

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Chapitre V
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Article 12 quater

Article 12 quater A

(Texte de la commission mixte paritaire)

L’article L. 631-1 du code de l’énergie est ainsi modifié :

1° Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La capacité de transport maritime mentionnée au premier alinéa comprend une capacité de transport maritime de produits pétroliers et peut comprendre une capacité de transport maritime de pétrole brut, dans des proportions fixées par décret. La capacité de transport de produits pétroliers comprend une part assurée par des navires de moins de 20 000 tonnes de port en lourd, dans des proportions fixées par décret. » ;

2° Le 2° du II est ainsi modifié :

a) Les mots : « des armateurs » sont remplacés par les mots : « un armateur ou un groupement d’armateurs » ;

b) Après le mot : « capacité », la fin du 2° est ainsi rédigée : « conformes au contrat type approuvé par arrêté du ministre chargé de la marine marchande et approuvés par le ministre chargé de la marine marchande ; ».

Article 12 quater A
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Article 12 quinquies

Article 12 quater

(Texte du Sénat)

Le chapitre III du titre II du code des douanes est complété par un article 59 nonies ainsi rédigé :

« Art. 59 nonies. – Les agents des douanes et les agents placés sous l’autorité du ministre chargé de l’énergie sont autorisés à se communiquer, sur demande ou spontanément, tous les renseignements et documents détenus ou recueillis dans l’exercice de leurs missions relatives aux produits pétroliers. »

Article 12 quater
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Article 12 sexies A

Article 12 quinquies

(Texte de la commission mixte paritaire)

I. – Le titre IV du livre IV de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 5441-1, les mots : « les menaces extérieures » sont remplacés par les mots : « des menaces d’actes définis aux articles 224-6 à 224-8 du code pénal ou d’actes de terrorisme définis au titre II du livre IV du code pénal » ;

2° L’article L. 5442-1 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, est insérée la référence : « I. – » ;

b) Au premier alinéa, les mots : « en raison des menaces encourues » sont remplacés par les mots : « lorsque les menaces encourues constituent des menaces d’actes définis aux articles 224-6 à 224-8 du code pénal » ;

c) L’article est complété par un II ainsi rédigé :

« II. – Sans préjudice de l’application d’accords internationaux, l’activité mentionnée à l’article L. 5441-1 est exercée au-delà de la mer territoriale des États lorsque les menaces encourues constituent des menaces d’actes de terrorisme définis au titre II du livre IV du code pénal.

« Un décret fixe les types de navires non éligibles ainsi que les circonstances dérogatoires dans lesquelles ceux-ci peuvent embarquer des agents de protection. » ;

3° Au troisième alinéa de l’article L. 5442-12, le mot : « extérieure » est supprimé ;

II. – Le titre premier du livre VI du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

Au 4° de l’article L. 611-1, les mots : « les menaces extérieures » sont remplacés par les mots : « des menaces d’actes définis aux articles 224-6 à 224-8 du code pénal ou d’actes de terrorisme définis au titre II du livre IV du code pénal ».

Article 12 quinquies
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Article 12 sexies

Article 12 sexies A

(Texte de la commission mixte paritaire)

Après le premier alinéa de l’article L. 5421-1 du code des transports, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le transporteur peut refuser l’embarquement de toute personne qui s’oppose à l’inspection visuelle ou à la fouille de ses bagages ou à la réalisation de palpations de sécurité, ainsi que de toute personne qui contrevient à des dispositions dont l’inobservation est susceptible, soit de compromettre la sécurité des personnes, soit de troubler l’ordre public. »

Article 12 sexies A
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Article 12 septies A

Article 12 sexies

(Texte du Sénat)

L’article L. 232-7 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Le II est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « aériens », sont insérés les mots : « et maritimes » et les deux occurrences du mot : « vols » sont remplacées par le mot : « déplacements » ;

b) Au deuxième alinéa, après le mot : « aériens », sont insérés les mots : « et maritimes » ;

c) Au dernier alinéa, après le mot : « aéronef », sont insérés les mots : « ou d’un navire » ;

2° Au III, après le mot : « aériens », sont insérés les mots : « et maritimes » et, après le mot : « aéronef », sont insérés les mots : « ou d’un navire » ;

3° Au V, après le mot : « aérien », sont insérés les mots : « ou maritime » et, après le mot : « aéronef », sont insérés les mots : « ou d’un navire » ;

4° À la seconde phrase du VI, après le mot : « aériens », sont insérés les mots : « ou maritimes » et, après le mot : « aéronef », sont insérés les mots : « ou d’un navire ».

Article 12 sexies
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Article 12 septies

Article 12 septies A

(Texte de la commission mixte paritaire)

Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° L’article L. 232-4 est ainsi modifié :

a) Au troisième alinéa, les mots : « maritimes et » sont supprimés ;

b) Après le troisième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Pour la mise en œuvre des traitements mentionnés aux articles L. 232-1 et L. 232-2, les transporteurs maritimes sont tenus de recueillir et de transmettre aux services du ministère de l’intérieur les données relatives aux passagers mentionnées au paragraphe 3.1.2. de l’annexe VI au règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen).

« Ils sont également tenus de communiquer aux services mentionnés au quatrième alinéa du présent article les données mentionnées au 3° de l’article L. 232-1 autres que celles mentionnées au même quatrième alinéa lorsqu’ils les détiennent. » ;

2° La seconde phrase du premier alinéa du II de l’article L. 232-7 est complétée par les mots : « pour les transporteurs aériens et celles mentionnées au quatrième alinéa du même article L. 232-4 pour les transporteurs maritimes ».

Article 12 septies A
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Article 12 octies

Article 12 septies

(Texte de la commission mixte paritaire)

Le code des transports est ainsi modifié :

1° Le 1° de l’article L. 4000-3 est ainsi rédigé :

« 1° Bateau : toute construction flottante destinée à la navigation intérieure et à la navigation entre le premier obstacle à la navigation des navires et la limite transversale de la mer ; »

2° L’article L. 4200-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sauf dispositions contraires, les titres Ier à III du présent livre et les articles L. 4272-1, L. 4274-2, L. 4274-3 et L. 4274-5 à L. 4274-18 sont également applicables à la navigation à l’aval de la limite transversale de la mer prévue à l’article L. 4251-1. » ;

3° L’article L. 4251-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 4251-1. – I. – La navigation des bateaux à l’aval de la limite transversale de la mer est limitée à l’accès aux installations de stationnement établies dans des zones maritimes situées à proximité de cette limite, dans des conditions fixées par voie réglementaire.

« II. – (Supprimé)

« III. – Les articles L. 5321-1, L. 5332-6, L. 5334-3, L. 5334-12, L. 5334-13, L. 5336-12 et L. 5336-14 sont applicables aux bateaux naviguant à l’aval de la limite transversale de la mer. » ;

4° Le II de l’article L. 5241-1 est ainsi rédigé :

« II. – Sauf dans les conditions prévues à l’article L. 4251-1, les bateaux ne peuvent naviguer à l’aval de la limite transversale de la mer. » ;

5° Au début du chapitre II du titre IV du livre II de la cinquième partie, est insérée une section 1 A ainsi rédigée :

« Section 1 A

« Dispositions générales

« Art. L. 5242-1 A. – Les infractions et les peines prévues au présent chapitre sont applicables aux personnes embarquées sur un bateau muni d’un titre de navigation intérieure lorsqu’il pratique la navigation maritime à l’aval de la limite transversale de la mer. » ;

6° L’article L. 5242-6-6 est abrogé.

Article 12 septies
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Article 12 undecies

Article 12 octies

(Texte de la commission mixte paritaire)

Au début du chapitre II du titre III du livre III de la cinquième partie du code des transports, il est inséré un article L. 5332-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 5332-1 A. – L’autorité administrative réalise ou fait réaliser par un organisme habilité à cet effet les évaluations de la sûreté portuaire définies à l’annexe I de la directive 2005/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 relative à l’amélioration de la sûreté des ports, ainsi que les évaluations de sûreté des installations portuaires prévues à l’article 3 du règlement (CE) n° 725/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relatif à l’amélioration de la sûreté des navires et des installations portuaires.

« Les frais liés à ces évaluations sont répartis à parts égales entre l’autorité administrative et l’autorité portuaire ou l’exploitant de l’installation portuaire. »

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Article 12 octies
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Article 12 duodecies

Article 12 undecies

(Texte de la commission mixte paritaire)

Le chapitre II du titre III du livre III de la cinquième partie du code des transports est complété par un article L. 5332-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 5332-8. – L’accès permanent aux zones d’accès restreint définies à l’article L. 5332-2 est réservé aux personnes individuellement désignées et dûment habilitées par le représentant de l’État dans le département, à l’issue d’une enquête administrative destinée à vérifier que le comportement de la personne n’est pas incompatible avec l’exercice des missions ou des fonctions envisagées.

« Les agents chargés de certaines des missions de sûreté mentionnées à l’article L. 5332-4, dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État, sont titulaires d’un agrément individuel délivré par le représentant de l’État dans le département, à l’issue d’une enquête administrative destinée à vérifier que le comportement de l’agent n’est pas incompatible avec l’exercice des missions ou des fonctions envisagées.

« L’enquête administrative précise si le comportement de la personne donne des raisons sérieuses de penser qu’elle est susceptible, à l’occasion de ses fonctions, de commettre un acte portant gravement atteinte à la sécurité ou à l’ordre publics.

« Elle peut donner lieu à la consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire et de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l’article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, à l’exception des fichiers d’identification.

« L’habilitation ou l’agrément peut être retiré après une nouvelle enquête administrative, menée à la demande de l’employeur ou à l’initiative de l’autorité administrative, si le comportement de la personne laisse apparaître des doutes sur la compatibilité avec l’exercice de ses missions ou fonctions. »

Article 12 undecies
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Article 12 terdecies

Article 12 duodecies

(Texte de la commission mixte paritaire)

La section 1 du chapitre VI du titre III du livre III de la cinquième partie du code des transports est complétée par un article L. 5336-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 5336-1-1. – Sans préjudice des sanctions pénales encourues, en cas de méconnaissance des articles L. 5332-4, L. 5332-5 ou L. 5332-8 du présent code ou des mesures prises pour leur application, l’autorité administrative compétente met en demeure la personne morale à laquelle incombe l’obligation d’y satisfaire dans un délai qu’elle détermine. En cas d’urgence, elle fixe les mesures nécessaires pour prévenir les dangers graves et imminents pour la sécurité publique.

« Lorsqu’à l’expiration du délai imparti la personne intéressée n’a pas obtempéré à cette injonction, l’autorité administrative peut ordonner le paiement d’une amende au plus égale à 7 500 € et une astreinte journalière au plus égale à 750 € applicable à partir de la notification de la décision fixant cette astreinte et jusqu’à satisfaction de la mise en demeure.

« L’astreinte bénéficie d’un privilège de même rang que celui prévu à l’article 1920 du code général des impôts. Il est procédé à son recouvrement comme en matière de créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine. Le comptable peut engager la procédure d’avis à tiers détenteur prévue par l’article L. 263 du livre des procédures fiscales. L’opposition à l’état exécutoire pris en application d’une astreinte ordonnée par l’autorité administrative devant le juge administratif n’a pas de caractère suspensif.

« L’amende et l’astreinte sont proportionnées à la gravité des manquements constatés.

« L’amende ne peut être prononcée plus d’un an à compter de la constatation des manquements.

« Lorsqu’à l’expiration du délai imparti la personne intéressée n’a pas obtempéré à l’injonction mentionnée au premier alinéa, l’autorité administrative peut également suspendre l’exploitation d’une installation portuaire ou d’un port pendant un délai qu’elle détermine. »

Article 12 duodecies
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Article 12 quaterdecies A

Article 12 terdecies

(Texte de la commission mixte paritaire)

Le chapitre VI du titre III du livre III de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° L’article L. 5336-5 est complété par un 4° ainsi rédigé :

« 4° Les officiers de port et officiers de port adjoints, pour les délits définis à l’article L. 5336-10. » ;

2° À l’article L. 5336-10, après le mot : « puni », sont insérés les mots : « de six mois d’emprisonnement et ».

Article 12 terdecies
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Article 12 quaterdecies

Article 12 quaterdecies A

(Texte du Sénat)

Après l’article L. 5211-3 du code des transports, il est inséré un article L. 5211-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 5211-3-1. – Pour prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens, les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire peuvent, à toute heure, accéder à bord et procéder à une fouille de sûreté de tout navire ou de tout autre engin flottant, à l’exception des navires de guerre étrangers et des autres navires d’État étrangers utilisés à des fins non commerciales, se trouvant soit dans les eaux intérieures, soit dans la mer territoriale et se dirigeant ou ayant déclaré son intention de se diriger vers un port français ou vers les eaux intérieures.

« Cette fouille de sûreté est opérée avec l’accord du capitaine, ou de son représentant, ou, à défaut, sur instructions du procureur de la République communiquées par tous moyens.

« Est considérée comme le capitaine la personne qui exerce, de droit ou de fait, le commandement ou la conduite du navire ou de l’engin flottant.

« Dans l’attente des instructions du procureur de la République, le navire ou l’engin flottant peut être immobilisé pour une durée qui ne peut excéder une heure.

« La fouille de sûreté se déroule en présence du capitaine du navire ou de son représentant. Elle comprend l’inspection des extérieurs ainsi que des cales, des soutes et des locaux, à l’exception des locaux affectés à un usage privé ou d’habitation, aux fins de rechercher des matériels, armes ou explosifs mentionnés aux articles L. 317-7 et L. 317-8 du code de la sécurité intérieure et à l’article L. 2353-4 du code de la défense.

« Le navire ou l’engin flottant ne peut être immobilisé que le temps strictement nécessaire au déroulement de la fouille de sûreté.

« L’officier de police judiciaire responsable de la fouille de sûreté rend compte du déroulement des opérations au procureur de la République, au représentant de l’État en mer ainsi qu’au préfet de département du port de destination. Il informe sans délai le procureur de la République de toute infraction constatée. »

Article 12 quaterdecies A
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Article 12 quindecies

Article 12 quaterdecies

(Suppression maintenue)

Article 12 quaterdecies
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Article 14

Article 12 quindecies

(Supprimé)

TITRE II

SOUTENIR LES PÊCHES MARITIMES ET LES CULTURES MARINES

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Article 12 quindecies
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Article 15

Article 14

(Texte du Sénat)

Le livre VI du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Le I de l’article L. 653-2 est complété par un 4° ainsi rédigé :

« 4° Les règles applicables à la reproduction et à l’amélioration génétique des ressources conchylicoles. » ;

2° (Supprimé)

3° L’article L. 640-1 est ainsi modifié :

a) Au troisième alinéa, après le mot : « halieutiques », il est inséré le mot : « aquacoles, » ;

b) (Supprimé)

c) Au dernier alinéa, après le mot : « agricoles », il est inséré le mot : « aquacoles, ».

Article 14
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Article 15 bis A

Article 15

(Texte de la commission mixte paritaire)

Le livre IX du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 911-1 est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Sont soumis au présent livre :

« 1° L’exercice de la pêche maritime, c’est-à-dire la capture des animaux et la récolte des végétaux marins, en mer, sur l’estran et dans la partie des fleuves, rivières, étangs et canaux où les eaux sont salées ;

« 2° L’exercice de l’aquaculture, c’est-à-dire la conchyliculture, la pisciculture, les élevages marins et les autres cultures marines, qui constituent des activités d’exploitation du cycle biologique d’espèces aquatiques, végétales ou animales. Ces activités d’exploitation comprennent notamment le captage, l’élevage, la finition, la purification, l’entreposage, le conditionnement, l’expédition ou la première mise en marché des produits. » ;

2° L’article L. 911-2 est ainsi modifié :

a) Au 1°, les mots : « dans ses eaux sous juridiction ou souveraineté que » sont remplacés par les mots : « sur l’estran que dans ses eaux sous juridiction ou souveraineté et » ;

b) À la fin du 2°, les mots : « la filière » sont remplacés par les mots : « les filières des pêches maritimes, de l’aquaculture marine, en mer et à terre, et des activités halioalimentaires » ;

c) Au 3°, les mots : « de la filière » sont remplacés par les mots : « des filières » et le mot : « comprend » est remplacé par le mot : « comprennent » ;

d) Au 5°, les mots : « d’une flotte adaptée » sont remplacés par les mots : « des flottes des pêches maritimes et de l’aquaculture adaptées » et les mots : « de la filière » sont remplacés par les mots : « des filières » ;

e) Au 6°, après le mot : « notamment », sont insérés les mots : « les activités d’aquaculture marine en mer et à terre, en facilitant l’implantation de sites aquacoles en zone littorale et à proximité de celle-ci, en facilitant l’approvisionnement d’eau de mer en quantité suffisante sur ces sites et » ;

3° Après le II de l’article L. 912-4, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis. – Les membres des conseils du comité national, des comités régionaux et des comités départementaux et interdépartementaux sont âgés de moins de soixante-cinq ans à la date de leur élection ou de leur désignation. » ;

4° et 5° (Supprimés)

5° bis Le premier alinéa de l’article L. 923-1-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ces schémas recensent également les possibilités d’installation de fermes aquacoles en milieu fermé. » ;

6° L’article L. 931-2 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « à responsabilité limitée » sont remplacés par les mots : « de capitaux » et le taux : « 100 % » est remplacé par le taux : « au moins 51 % » ;

b) (Supprimés)

c) Après les mots : « société est », la fin de la même phrase est remplacée par trois alinéas ainsi rédigés :

« 1° Soit totalement propriétaire ou copropriétaire majoritaire, y compris suite à une opération de financement participatif et de mobilisation de l’épargne locale ;

« 1° bis Soit copropriétaire avec un armement coopératif agréé dans le cadre d’une accession progressive à la propriété dans un délai qui ne peut excéder quinze ans ;

« 2° Soit exploitante. » ;

d) La seconde phrase est supprimée ;

e) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l’application du présent article, les parts détenues par les ascendants, les descendants ou les conjoints des marins pêcheurs sont assimilées à celles détenues par ces derniers. » ;

7° Au second alinéa de l’article L. 942-2, les références : « à l’article L. 942-3, aux 1° et 2° de l’article L. 942-4 » sont remplacées par les références : « aux articles L. 942-3 et L. 942-4 » et les références : « , aux 1° et 2° de l’article L. 942-6 » sont remplacées par la référence : « à l’article L. 942-6, » ;

8° Le chapitre VI du titre IV est complété par un article L. 946-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 946-8. – Les organisations de producteurs mentionnées à l’article L. 912-11 peuvent, en application de l’article L. 912-12-1 :

« 1° Infliger une sanction pécuniaire dont le montant ne peut excéder le chiffre d’affaires de l’expédition maritime au cours de laquelle les manquements aux règles de gestion durable des sous-quotas ont été constatés ;

« 2° Suspendre ou retirer les autorisations de pêche qu’elles délivrent en application de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 921-2.

« Les adhérents intéressés sont avisés au préalable des faits relevés à leur encontre et des sanctions qu’ils encourent, ainsi que du délai dont ils disposent pour faire valoir leurs observations.

« La sanction pécuniaire, la suspension ou le retrait des autorisations de pêche ne peuvent être prononcés au-delà d’un délai d’un an à compter de la date de constatation des faits.

« En cas de carence de l’organisation de producteurs, l’autorité administrative peut se substituer à celle-ci dans son pouvoir de sanction en exerçant les pouvoirs prévus à l’article L. 946-1. »

Article 15
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Article 15 bis B

Article 15 bis A

(Texte de la commission mixte paritaire)

L’article L. 912-16 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

« Art. L. 912-16. – I. – Les ressources des organismes créés en application des articles L. 912-1 et L. 912-6 sont notamment assurées par le produit de cotisations professionnelles prélevées, en fonction de leur objet, sur tout ou partie des membres des professions qui y sont représentées et qui, nonobstant leur caractère obligatoire, demeurent des créances de droit privé.

« II. – Toute action en recouvrement des cotisations professionnelles obligatoires dues en application du I du présent article est obligatoirement précédée d’une mise en demeure adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception invitant le redevable à régulariser sa situation dans un délai d’un mois.

« III. – La mise en demeure précise le montant des cotisations professionnelles obligatoires restant exigibles et les périodes concernées.

« IV. – Le délai de prescription de l’action civile en recouvrement des cotisations professionnelles obligatoires court à compter de l’expiration du délai d’un mois imparti par la lettre de mise en demeure. »

Article 15 bis A
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Article 16

Article 15 bis B

(Texte du Sénat)

Le code des transports est ainsi modifié :

1° Le 6° de l’article L. 5552-16 est complété par quatre phrases ainsi rédigées :

« Au sein des organisations professionnelles, sont visées les fonctions permanentes de président des comités mentionnés aux articles L. 912-1 et L. 912-6 du code rural et de la pêche maritime. Les services du marin dans l’exercice des fonctions précitées peuvent faire l’objet d’un surclassement de deux catégories par rapport à la dernière activité embarquée, dont les conditions et modalités sont fixées par décret. Ce surclassement fait l’objet d’appel de contributions et de cotisations sur la base du taux applicable aux services embarqués. La durée de validation de ces services ne peut excéder la durée du mandat ; »

2° Après l’article L. 5553-11, il est inséré un article L. 5553-11-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 5553-11-1. – La différence de contribution patronale et salariale correspondant au surclassement des marins mentionnés au 6° de l’article L. 5552-16 est compensée par l’État au profit de l’Établissement national des invalides de la marine. »

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Article 15 bis B
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Article 18

Article 16

(Texte de l’Assemblée nationale)

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport portant sur les possibilités et les conditions, pour les pêcheurs et les aquaculteurs, d’une diversification de leur activité par le tourisme, notamment le pescatourisme et la commercialisation directe des produits de la pêche, transformés ou non.

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Article 16
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TITRE II BIS

Article 18

(Texte de la commission mixte paritaire)

Le code de l’environnement est ainsi modifié :

1° et 2° (Supprimés)

3° Le II de l’article L. 211-3 est ainsi modifié :

a à c) (Supprimés)

d) Il est ajouté un 9° ainsi rédigé :

« 9° Fixer les dispositions particulières applicables à la protection des ressources conchylicoles et piscicoles. Ces dispositions peuvent prévoir une surveillance renforcée de la qualité physique, chimique, biologique, bactériologique et microbiologique des eaux, ainsi que toute mesure de lutte contre les pollutions. » ;

4° (Supprimés)

5° Le 3° de l’article L. 213-1 est complété par les mots : « et conchylicoles » ;

6° Le II de l’article L. 321-1 est ainsi modifié :

a) Au 4°, après le mot : « sylvicoles, », sont insérés les mots : « des activités aquacoles, » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le respect de l’objectif de développement durable, l’action des collectivités publiques en matière de planification contribue à la réalisation de cette politique d’intérêt général. »

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Article 18
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Article 18 ter

TITRE II BIS

DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES AUX COLLECTIVITÉS, RÉGIONS ET DÉPARTEMENTS D’OUTRE-MER

TITRE II BIS
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Article 18 quater

Article 18 ter

(Texte du Sénat)

L’article L. 4433-15-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Dans les régions de Guadeloupe et de La Réunion, les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, le Département de Mayotte, les compétences en matière de gestion et de conservation des ressources biologiques de la mer, dévolues à l’autorité administrative en application des articles 2, 3, 4 et 5 du décret du 9 janvier 1852 sur l’exercice de la pêche maritime sont exercées par la collectivité territoriale, sous réserve des engagements internationaux de la France, du respect de la compétence communautaire, et dans le cadre de la politique commune des pêches. » ;

2° Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’État veille à favoriser la participation des régions de Guadeloupe et de la Réunion, des collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, du Département de Mayotte, de la collectivité territoriale de Saint-Martin, de la collectivité territoriale de Saint-Barthélemy et de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon aux discussions relatives à la gestion et à l’évaluation des ressources halieutiques dans leur bassin océanique d’implantation au sein des organisations régionales et internationales compétentes, en y associant les organismes scientifiques compétents en matière halieutique, et les organismes professionnels en tant que de besoin. »

Article 18 ter
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Article 18 quinquies

Article 18 quater

(Texte du Sénat)

Au début du titre V du livre IX du code rural et de la pêche maritime, il est ajouté un chapitre Ier A ainsi rédigé :

« CHAPITRE IER A

« Objectifs de la politique des pêches maritimes et de l’aquaculture dans les outre-mer

« Art. L. 951-1 A. – Outre ceux définis à l’article L. 911-2, la politique des pêches maritimes et de l’aquaculture dans les outre-mer a pour objectif, dans un contexte spécifique lié à une insularité, à un éloignement marqué, à une faible superficie, à un relief et des climats difficiles et à une dépendance économique, de valoriser au mieux les productions locales de la pêche et de l’aquaculture en s’appuyant sur les dispositions de la politique commune de la pêche applicable aux régions ultrapériphériques. »

Article 18 quater
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Article 19

Article 18 quinquies

(Supprimé)

TITRE III

DISPOSITIONS DIVERSES

Article 18 quinquies
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Article 19 bis AA

Article 19

(Texte du Sénat)

Le code des assurances est ainsi modifié :

1° Le 1° de l’article L. 111-6 est complété par un d ainsi rédigé :

« d) Les installations d’énergies marines renouvelables définies par un décret en Conseil d’État ; »

2° Au deuxième alinéa de l’article L. 125-5, après le mot : « fluviaux, », sont insérés les mots : « les installations d’énergies marines renouvelables au sens de l’article L. 111-6, ».

Article 19
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Article 19 bis A

Article 19 bis AA

(Texte de la commission mixte paritaire)

À partir du 1er janvier 2025, le rejet en mer des sédiments et résidus de dragage pollués est interdit. Une filière de traitement des sédiments et résidus et de récupération des macro-déchets associés est mise en place. Les seuils au-delà desquels les sédiments et résidus ne peuvent être immergés sont définis par voie réglementaire.

Article 19 bis AA
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Article 19 ter

Article 19 bis A

(Texte de la commission mixte paritaire)

Le VII de l’article 52 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte est complété par les mots : « , en vue de l’implantation, au plus tard le 31 décembre 2025, sur les ports du réseau central RTE-T, d’une part, d’un nombre approprié de points de ravitaillement en gaz naturel liquéfié, et, d’autre part, d’un nombre approprié de bornes d’alimentation électrique à quai à moins qu’il n’y ait pas de demande et que les coûts soient disproportionnés par rapport aux avantages, y compris les avantages environnementaux ».

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Article 19 bis A
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Article 21

Article 19 ter

(Texte du Sénat)

Le chapitre Ier du titre II du livre Ier de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° L’article L. 5121-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’assureur qui couvre la responsabilité des personnes mentionnées à l’article L. 5121-2 à l’égard des créances soumises à limitation est en droit de se prévaloir de celle-ci dans la même mesure que l’assuré lui-même. » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 5121-6, les mots : « le propriétaire ou toute autre personne » sont remplacés par les mots : « une personne » et les mots : « du propriétaire, de cette personne ou de toute autre personne à eux » sont remplacés par les mots : « de cette personne, de son assureur ou de toute autre personne à elle » ;

3° À l’article L. 5121-7, les mots : « Lorsque le propriétaire ou une autre » sont remplacés par les mots : « Lorsqu’une » et, après la référence : « L. 5121-2 », sont insérés les mots : « ou son assureur » ;

4° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 5121-9, les mots : « qu’elle a constitué le fonds ou fourni » sont remplacés par les mots : « que le fonds a été constitué ou qu’ont été fournies » ;

5° L’article L. 5121-11 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « le propriétaire d’un navire » sont remplacés par les mots : « une personne mentionnée à l’article L. 5121-2 ou son assureur », les mots : « il est autorisé » sont remplacés par les mots : « cette personne ou son assureur est autorisé » et les mots : « de son créancier » sont remplacés par les mots : « du créancier » ;

b) À la fin du second alinéa, les mots : « du propriétaire » sont remplacés par les mots : « des personnes mentionnées à l’article L. 5121-2 ».

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Article 19 ter
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Article 22

Article 21

(Texte du Sénat)

La section 7 du chapitre II du titre Ier du livre V du code monétaire et financier est ainsi modifiée :

1° L’article L. 512-68 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, les mots : « Conformément aux orientations définies par le ministre chargé des pêches maritimes, » sont supprimés ;

b) (Supprimé)

2° L’article L. 512-69 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « quatre » ;

b) Le 3 est abrogé ;

c) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le crédit maritime mutuel comporte une société centrale qui est une union d’économie sociale. Elle représente le crédit maritime mutuel au sein des entités nationales ou régionales du secteur maritime. » ;

d) À la fin de la seconde phrase du dernier alinéa, les mots : « , dont les statuts sont soumis à approbation ministérielle » sont supprimés ;

2° bis Au premier alinéa de l’article L. 512-70, les références : « 1 à 3 » sont remplacées par les références : « 1 et 2 » ;

3° L’article L. 512-71 est abrogé ;

3° bis L’article L. 512-72 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « elle » est remplacé, deux fois, par le mot : « il » ;

b) Au second alinéa, les mots : « la caisse centrale » sont remplacés par les mots : « l’organe central des caisses d’épargne et des banques populaires » ;

3° ter L’article L. 512-74 est ainsi modifié :

a) Au début du 1, les mots : « Dans les conditions déterminées par le décret prévu à l’article L. 512-84, » sont supprimés ;

b) Au 3, le mot : « elle » est remplacé par le mot : « il » ;

c) À la fin du 4, le mot : « côtiers » est remplacé par les mots : « du ressort territorial de la caisse régionale » ;

3° quater L’article L. 512-76 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « trois ans et renouvelable par tiers tous les » sont remplacés par le mot : « six » ;

b) Au deuxième alinéa, le mot : « Deux » est remplacé par le mot : « Un » ;

3° quinquies Au premier alinéa de l’article L. 512-80, les mots : « ou aux orientations prévues à l’article L. 512-68, » sont supprimés ;

4° À l’article L. 512-83, les mots : « sur proposition » sont remplacés par les mots : « par décision » et les mots : « et par décision du ministre chargé des pêches maritimes » sont supprimés.

Article 21
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Article 22 quinquies A

Article 22

(Texte de l’Assemblée nationale)

La section 10 bis du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de la consommation est complétée par un article L. 121-82-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 121-82-3. – Les personnes ou les entreprises qui transforment ou distribuent des produits alimentaires dans le cadre d’une activité de restauration commerciale ou collective ou de vente à emporter de plats préparés, permanente ou occasionnelle, principale ou accessoire, peuvent préciser sur leurs cartes ou sur tout autre support la zone de capture ou de production des produits aquatiques qu’ils proposent. La zone de capture ou de production est déterminée dans les conditions prévues à l’article 38 du règlement (UE) n° 1379/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l’aquaculture, modifiant les règlements (CE) n° 1184/2006 et (CE) n° 1224/2009 du Conseil et abrogeant le règlement (CE) n° 104/2000 du Conseil.

« Les modalités de mise en œuvre du présent article sont fixées par décret. »

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Article 22
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Article 22 quinquies

Article 22 quinquies A

(Texte du Sénat)

Le b du 1° de l’article L. 480-13 du code de l’urbanisme est complété par les mots : « , sauf s’il s’agit d’une construction en bois antérieure au 1er janvier 2010, d’une superficie inférieure à mille mètres carrés, destinée à une exploitation d’agriculture biologique satisfaisant aux exigences ou conditions mentionnées à l’article L. 641-13 du code rural et de la pêche maritime et bénéficiant d’une appellation d’origine protégée définie à l’article L. 641-10 du même code ».

Article 22 quinquies A
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Article 22 septies

Article 22 quinquies

(Suppression maintenue)

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Article 22 quinquies
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Article 23

Article 22 septies

(Texte de la commission mixte paritaire)

I. – L’article L. 123-6 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l’application de l’article L. 121-82-3 à Saint-Barthélemy et à Saint-Pierre-et-Miquelon, les mots : “à l’article 38 du règlement UE n° 1379/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits de pêche et de l’aquaculture, modifiant les règlements n° 1184/2006 et n° 1224/2009 du Conseil et abrogeant le règlement n° 104/2000 du Conseil” sont remplacés par les mots : “par les règles applicables en métropole en vertu de l’article 38 du règlement UE n° 1379/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits de pêche et de l’aquaculture, modifiant les règlements n° 1184/2006 et n° 1224/2009 du Conseil et abrogeant le règlement n° 104/2000 du Conseil.” »

II. – Au premier alinéa des articles L. 5763-1, L. 5773-1 et L. 5783-1 du code des transports, les références : « L. 5332-1 à L. 5332-7 » sont remplacées par les références : « L. 5332-1 A à L. 5332-8 ».

III. – Le 4° bis de l’article L. 346-2 du code de la sécurité intérieure est ainsi rédigé :

« 4° bis L’article L. 321-3 est ainsi rédigé :

« Par dérogation aux articles L. 324-1 et L. 324-2, il peut être accordé aux casinos installés à bord des navires de commerce transporteurs de passagers battant pavillon français immatriculés à Wallis-et-Futuna l’autorisation temporaire d’ouvrir au public des locaux spéciaux, distincts et séparés où sont pratiqués certains jeux de hasard dans les conditions fixées au présent chapitre.

« L’autorisation d’exploiter les jeux de hasard dans les casinos mentionnés au premier alinéa est accordée par arrêté du ministre de l’intérieur à une personne morale qualifiée en matière d’exploitation de jeux de hasard ayant passé une convention avec l’armateur conforme à une convention type approuvée par décret en Conseil d’État.

« L’arrêté d’autorisation de jeux fixe la durée de l’autorisation. Il détermine la nature des jeux de hasard autorisés, leur fonctionnement, les missions de surveillance et de contrôle, les conditions d’admission dans les salles de jeux et leurs horaires d’ouverture et de fermeture. L’autorisation peut être révoquée par le ministre de l’intérieur, en cas d’inobservation des dispositions de l’arrêté ou des clauses de la convention passée avec l’armateur.

« Les locaux mentionnés au premier alinéa ne peuvent être ouverts que dans les eaux internationales. Ils ne sont accessibles qu’aux passagers majeurs, titulaires d’un titre de croisière.

« Dans l’enceinte du casino, le capitaine et l’officier chargé de sa suppléance sont garants du bon ordre, de la sûreté et de la sécurité publiques. »

IV (nouveau). – A. – Les articles 12 et 12 quater ne sont pas applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon.

B. – L’article 12 bis A est applicable à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

C. – Les articles 12 bis D, 12 bis DA, 18 et 22 bis ne sont pas applicables à Saint-Barthélemy.

D. – L’article 12 bis est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

E. – L’article 12 quinquies est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

F. – L’article 12 sexies A est applicable en Nouvelle-Calédonie, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

G. – L’article 12 sexies est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

H. – L’article 12 septies A est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

I. – Les articles 12 octies, 12 nonies, 12 decies, 12 undecies et 12 terdecies sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie Française et à Wallis-et-Futuna.

J. – L’article 12 quaterdecies A est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises

K. – L’article 15 bis n’est pas applicable à Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon.

L. – L’article 19 bis A est applicable à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

M. – L’article 19 bis est applicable à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française uniquement pour les 1° et 4°, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

N. – L’article 19 ter est applicable en Nouvelle-Calédonie, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Article 22 septies
Dossier législatif : proposition de loi pour l'économie bleue
Articles 1er bis A à 9 bis A

Article 23

(Texte de la commission mixte paritaire)

I. – Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur la création d’un code de la mer rassemblant l’ensemble des dispositions législatives et réglementaires en vigueur relatives aux questions maritimes. Ce rapport fait également le point sur l’adaptation de ces dispositions aux départements et régions d’outre-mer et sur leur extension aux collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 de la Constitution et à la Nouvelle-Calédonie et indique les évolutions souhaitables dans ce domaine.

II. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de regrouper, d’ordonner et de mettre à jour les dispositions relatives aux espaces maritimes.

Ces mesures visent à :

1° Préciser la définition et la délimitation des espaces maritimes, notamment en ce qui concerne les eaux intérieures, la mer territoriale, la zone contiguë, la zone économique exclusive, la zone de protection écologique, la zone de protection halieutique et le plateau continental ;

2° Définir les conditions d’exercice des compétences de l’État dans le domaine de la navigation dans les espaces maritimes mentionnés au 1° ;

3° Définir les conditions d’exercice du contrôle des personnes physiques ou morales de nationalité française du fait de leurs activités dans les fonds marins constituant la Zone au sens de l’article 1er de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer signée à Montego Bay le 10 décembre 1982 et bénéficiant du patronage de l’État, au sens du paragraphe 2 de l’article 153 de ladite convention, aux fins de l’exploration ou de l’exploitation de ses ressources minérales dans le cadre d’un contrat conclu avec l’Autorité internationale des fonds marins ;

4° Définir les incriminations et les sanctions pénales relatives aux manquements aux dispositions édictées en vertu des 1° à 3°, ainsi que la liste des agents compétents pour rechercher et constater les infractions ;

5° Prendre les mesures permettant, d’une part, de rendre applicables, avec les adaptations nécessaires, les dispositions mentionnées aux 1° à 4° en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises, pour celles qui relèvent de la compétence de l’État, et, d’autre part, de procéder aux adaptations nécessaires en ce qui concerne les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution et les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon ;

6° Prendre toutes mesures de cohérence résultant de la mise en œuvre des 1° à 5°.

III. – L’ordonnance prévue au II est prise dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi. Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.

M. le président. Nous allons maintenant examiner les amendements déposés par le Gouvernement.

Article 23
Dossier législatif : proposition de loi pour l'économie bleue
Article 9 ter

Articles 1er bis A à 9 bis A

M. le président. Sur les articles 1er bis A à 9 bis A, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

Articles 1er bis A à 9 bis A
Dossier législatif : proposition de loi pour l'économie bleue
Articles 9 quater à 21

Article 9 ter

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 27

Remplacer les mots :

, les I et II de l’article 6 ter et l’article 6 quater

par les mots :

et les I et II de l’article 6 ter

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État. Cet amendement vise à corriger une erreur matérielle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Mandelli, rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Favorable.

M. le président. Le vote est réservé.

Article 9 ter
Dossier législatif : proposition de loi pour l'économie bleue
Article 22

Articles 9 quater à 21

M. le président. Sur les articles 9 quater à 21, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

Articles 9 quater à 21
Dossier législatif : proposition de loi pour l'économie bleue
Articles 22 quinquies A et 22 quinquies

Article 22

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre IV du code de la consommation, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation, est complétée par un article L. 412-6 ainsi rédigé :

II. – Alinéa 2

Remplacer la référence :

L. 121-82-3

par la référence :

L. 412-6

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État. Il s'agit d’un amendement de mise en cohérence.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Mandelli, rapporteur. Favorable.

M. le président. Le vote est réservé.

Article 22
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Article 22 septies

Articles 22 quinquies A et 22 quinquies

M. le président. Sur les articles 22 quinquies A et 22 quinquies, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

Articles 22 quinquies A et 22 quinquies
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Article 23 (début)

Article 22 septies

M. le président. L'amendement n° 3, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Remplacer les mots :

L. 123-6 du code de la consommation

par les mots :

L. 251-1 du code de la consommation, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation,

II. – Alinéa 2

Remplacer la référence :

L. 121-82-3

par la référence :

L. 412-6

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État. Il s'agit également d’un amendement de mise en cohérence.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Mandelli, rapporteur. Favorable.

M. le président. Le vote est réservé.

Article 22 septies
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Article 23 (fin)

Article 23

M. le président. Sur l’article 23, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur cet article ?…

Le vote est réservé.

Personne ne demande la parole pour explication de vote sur l’ensemble de la proposition de loi ?…

Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi pour l’économie bleue, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement.

(La proposition de loi est adoptée définitivement.)

M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de Mme Jacqueline Gourault.)

PRÉSIDENCE DE Mme Jacqueline Gourault

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 23 (début)
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8

Modernisation des principales filières agricoles dans le cadre de la réforme de la PAC

Débat organisé à la demande du groupe Les Républicains

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Les Républicains, sur le thème : « Restructuration et modernisation des principales filières agricoles dans le cadre de la réforme à mi-parcours de la PAC ».

La parole est à M. Jean Bizet, orateur du groupe auteur de la demande.

M. Jean Bizet, au nom du groupe Les Républicains. Madame la présidente, monsieur le ministre de l’agriculture, mes chers collègues, je me réjouis de la tenue de ce débat sur la nécessaire modernisation de l’agriculture française.

La première modernisation à envisager est celle de la PAC. Il faut bien le reconnaître, ce système à 55 milliards d’euros par an est à bout de souffle. Chaque État aide ses agriculteurs comme il le peut, avec néanmoins une différence de taille : certains ont adopté une stratégie offensive, alors que d’autres restent dans une attitude de sauve-qui-peut.

Je n’accuse personne. Les querelles politiciennes autour de la fin des quotas laitiers sont stériles dans le contexte actuel. Il est inutile de s’accuser mutuellement. Si on relit les textes, on doit avoir l’honnêteté de reconnaître que cette fin était prévue dès 1984.

La France a toujours fait ce qu’elle a pu pour maintenir un succédané de réglementation. Voilà quelques années, elle a imposé la contractualisation avec un succès mitigé, il faut le reconnaître. Aujourd'hui, elle active un article du règlement de la PAC autorisant les ententes entre producteurs. C’est une victoire française sur le dogme européen de la concurrence et un pas politique important pour la Commission, qu’il faut saluer, même si la plupart des observateurs sont réservés sur l’efficacité de ces ententes.

Face à cela, nous avons tous entendu un cri de désespoir : « Des prix, pas des primes ! » Tout le monde peut être d’accord avec ce beau slogan de champ de bataille. Il est fort, simple et clair, mais, hélas, sans portée, ou plutôt il est porté par des marchands d’illusions. Beaucoup d’agriculteurs se réfèrent encore au temps de la PAC à l’ancienne, avec ses prix administrés et ses garanties d’écoulement. À l’époque, un bon ministre était un ministre qui ramenait de bons prix. Voilà pourtant vingt-cinq ans que ce système n’existe plus. Il n’y a plus de prix officiel européen, les ministres ne fixent plus les prix agricoles.

Dans un système de marché, le prix est un rapport entre une offre et une demande, et un rapport de force. Ce n’est pas le prix qu’il faut fixer, c’est le rapport de force qu’il faut changer, en renforçant le poids et l’efficacité des producteurs. Tel est l’enjeu de la modernisation.

Je l’ai dit, le système PAC est à bout. Il faut accepter une introspection et une remise en question de son organisation, quitte à bousculer un peu les habitudes et les mentalités françaises.

Nous avons aujourd’hui deux piliers : un premier pilier d’aides aux revenus, financé par l’Union européenne, qui représente les trois quarts de la PAC, et un deuxième pilier dit de développement rural, cofinancé par les États et l’Union, qui en représente le dernier quart. Ce partage évolue lentement ; rien ne bouge ou presque ; la situation semble presque figée. Pourquoi ? Parce que les Français, premiers défenseurs et premiers bénéficiaires de la PAC, y tiennent plus que tout. Parce que les États ayant adhéré en 2004 ont attendu dix ans pour y avoir accès à taux plein et n’ont donc aucune intention d’y renoncer.

Pourtant, il faudra bien se poser la question de la pertinence des aides directes. Les deux questions majeures sont celles de la justice et de l’efficacité. Un tiers des agriculteurs ne vivrait pas sans ces aides directes. Un tiers vit un peu mieux avec et constitue notre cible. Le tiers restant n’en a pas toujours besoin, surtout quand les prix sont élevés, ce qui arrive parfois. Cela me permet de dire : paiement unique, paiement inique !

À défaut d’être juste, le système est-il au moins efficace ? On peut en douter. Les paiements directs permettent souvent à nos agriculteurs de garder la tête hors de l’eau, mais n’impulsent rien. Le premier pilier soutient, mais ne prépare pas l’avenir.

Un secteur a renoncé aux aides directes, et ce n’est pas celui qui se porte le plus mal – je me tourne vers mon collègue Gérard César –, c’est celui du vin. Il faut tirer les leçons de ce qui marche plutôt que voir uniquement ce qui rentre dans le portefeuille. Une réforme s’impose. Ce n’est pas parce que les Anglais ont posé cette question qu’elle est forcément mauvaise. Affaire à suivre, donc.

Le prochain chapitre concerne le deuxième pilier. C’est un régime méconnu et injustement décrié par nos agriculteurs, qui y voient une concession au courant environnementaliste et même paysagiste. Je dois avoir l’honnêteté intellectuelle de le dire, j’ai fait partie de ces gens qui n’accordaient pas au deuxième pilier le poids qu’il mérite. Pourtant, il me semble aujourd'hui que le potentiel de la PAC réside précisément dans ce deuxième pilier. En effet, il est cofinancé et mesure ainsi le véritable engagement des États. Il est multiforme et offre une liberté de choix. Il engage les acteurs régionaux, étonnamment absents pendant la crise. Surtout, bien orienté, il permet ce qui nous manque le plus, à savoir la modernisation non seulement des exploitations, mais aussi de notre outil industriel agroalimentaire. Quand on sait que nous avons perdu pratiquement trois places en moins de dix ans dans ce secteur, nous pouvons être inquiets. Nous avons donc l’obligation de regarder cette évolution avec beaucoup plus d’intérêt que par le passé.

S’interroger sur ce deuxième pilier, c’est s’interroger d’abord sur le rôle des régions. Il y a, en Europe, des stratégies régionales qui réussissent. J’ai souvent évoqué le cas de l’Allemagne. La force stratégique des Allemands est de savoir ce qu’ils veulent. Ils se fixent un objectif unique et font en sorte d’y parvenir. Mais ils ont aussi des stratégies régionales. La Bavière n’est plus le seul Land laitier. La Basse-Saxe est devenue l’autre grand Land agricole, ce qui ne les empêche pas d’avoir des positions communes. Voilà un mois, les ministres de l’agriculture des Länder se sont réunis pour adopter une position commune sur la crise laitière qui se manifeste, à son tour, outre-Rhin. Les grandes surfaces, qui, là-bas aussi, font la loi, ont prévu de nouvelles baisses de prix de 25 % !

L’Allemagne commence à se rendre compte des dégâts des mesures de libéralisation non contrôlées. Les positions ne paraissent plus aussi figées. Nos voisins allemands commencent à être un peu plus réceptifs aux appels que nous leur lançons en vain depuis déjà quelques mois. Ce sont les régions qui ont impulsé cette orientation. Les Länder représentent une force que la Chancelière a écoutée.

Il existe d’autres pays où l’agriculture réussit, souvent sur des bases régionales. Je pense notamment à l’Italie. On en entend peu parler sur les questions agricoles. Pourtant, elle réussit dans l’agroécologie et certains créneaux d’excellence. Les performances commerciales à l’export de ses produits à label – AOP et IGP – sont souvent bien meilleures que les nôtres.

Nous aurions intérêt à prendre exemple sur ce qui marche chez nos voisins, à nous ouvrir, à comparer, non pas pour copier, mais pour faire mieux. Car nous le pouvons sans craindre nos concurrents ! Celui qui a peur de la concurrence a déjà perdu la compétition…

S’interroger sur le deuxième pilier, c’est aussi s’interroger sur les financements.

Les circuits doivent être simplifiés. Plusieurs élus régionaux font état des difficultés de procédure pour avoir accès aux fonds européens. Quelles sont les responsabilités, monsieur le ministre ? Viennent-elles des régions, de l’État, des organismes payeurs ? Il y a urgence à effectuer un audit afin de régler ce problème.

La logique du deuxième pilier est celle du menu, chaque région pouvant cofinancer des actions qui correspondent à ses priorités.

Puisque ce débat s’inscrit dans l’actualité, je me permettrai d’ouvrir des pistes à un moment où il faut penser à l’avenir et être constructif. On peut parfaitement imaginer un système à deux niveaux : le premier serait celui des cofinancements régionaux, chaque région étant libre de définir ses priorités dans le menu ; le deuxième niveau reposerait sur une forte implication de l’État, qui serait cofinanceur d’actions qu’il considère comme stratégiques. C’est le cas pour l’ICHN, l’indemnité compensatoire de handicap naturel. La modernisation des exploitations et de l’outil industriel est un axe possible, voire nécessaire. C’est précisément mon souhait et, à mon avis, l’intérêt de la « ferme France » et de la filière agroalimentaire française.

Le règlement PAC permet la flexibilité entre les deux piliers. Nous arriverons bientôt en 2017, année où la réforme à mi-parcours peut précisément s’opérer avec un peu plus d’acuité. Ainsi, onze États ont choisi d’augmenter l’enveloppe du deuxième pilier. La France l’a fait, en transférant simplement 3,3 % de son enveloppe provenant du premier pilier. C’est 30 % de moins que les Pays-Bas, 50 % de moins que l’Allemagne et 70 % de moins que le Royaume-Uni. Regardons comment ont évolué ces pays en matière de compétitivité agricole : on a peut-être là le début d’une réponse. Le transfert maximum autorisé permettrait d’atteindre 1,1 milliard d’euros, contre 250 millions d’euros actuellement. Cette somme pourrait servir à la modernisation de nos exploitations. Les professionnels estiment les besoins financiers à 3 milliards d’euros par an. Dans le cadre de cofinancements, on pourrait trouver une grande partie de ce qui est nécessaire pour moderniser la « ferme France ».

Je voudrais également insister sur le plan Juncker. Je le rappelle, avec notre collègue Jean-Claude Lenoir, nous avions interpellé fermement Phil Hogan, pour l’inviter à souscrire à l’intégration du plan Junker dans le financement d’un certain nombre d’outils industriels.

Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jean Bizet. Je conclus, madame la présidente.

La France vient juste de le faire au travers d’une participation de la Banque européenne d’investissement dans la construction d’une unité laitière dans la Manche. Je voudrais que de telles opérations soient déclinées dans de nombreux autres pays.

Plutôt que de redouter une nécessaire mutation, l’agriculture française doit l’assumer et s’y engager dès maintenant, en reprenant contact avec ses partenaires allemands et italiens. La commission des affaires européennes s’y emploie désormais, car il est urgent d’élaborer un programme commun agricole avec nos principaux partenaires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Mercier applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pourvu que ce nouveau débat sur la PAC n’engendre pas une maigre moisson pour tous les exploitants en souffrance, qui attendent avant tout des actes !

Personne ne se souvient avoir connu, au cours des cinquante dernières années, une situation aussi dégradée économiquement, socialement et moralement dans nos campagnes. Pour le monde agricole, le symptôme est clair : une crise de confiance et un sentiment d’incompréhension. Le diagnostic est partagé : la résignation et la saturation devant l’absence de perspectives.

La PAC représente l’un des postes budgétaires les plus importants de l’Union européenne. Elle a jalonné l’histoire de l’intégration européenne et, aujourd’hui encore, elle dessine les lignes de fracture des débats entre acteurs européens. Cela s’explique en grande partie par l’hétérogénéité des représentations que se font les États membres du rôle de l’agriculture dans les économies contemporaines. Certains la considèrent comme un secteur en déclin et estiment la PAC obsolète et coûteuse, tandis que d’autres y voient une activité essentielle et estiment nécessaire une politique commune et forte dans ce domaine.

Le rôle primordial de l’agriculture ne doit pas être amoindri ou dévalorisé. Loin de se limiter à l’aménagement du paysage ou à la gestion de l’environnement, sa fonction première est de nourrir les peuples. Nous avons besoin d’une production agricole forte, et il est nécessaire de rappeler que l’agriculture n’est pas un secteur comme les autres, dans la mesure où il réclame une régulation pour produire de manière suffisante et continue et, surtout, pour assurer un revenu digne aux agriculteurs.

Voilà pourquoi la réforme et la consolidation de la PAC doivent constituer une priorité de l’Union européenne, en particulier dans la perspective inquiétante d’une hausse des prix agricoles à moyen terme et, surtout, dans un contexte de négociation du TAFTA et de libéralisation des échanges.

De six États membres à l’origine, nous sommes passés à vingt-huit. À l’égard de la PAC, les situations sont très hétérogènes et les distorsions de concurrence deviennent ainsi inévitables.

Prenons l’exemple du montant des aides à l’hectare du premier pilier. Les pays de l’Est, dont les pays baltes, sont les premiers à protester contre cette distorsion de concurrence. Nos voisins allemands n’ont recouplé aucune aide directe. Ainsi, un éleveur laitier ne reçoit pas la même aide directe, selon qu’il se trouve en Savoie ou en Bavière. Ces différences sont encore plus notables au sein du second pilier. Que d’inégalités !

Les orientations de la PAC ont aggravé la situation. De nombreux observateurs notent aujourd’hui une pression des concurrents dans les filières, et celle-ci est d’autant plus forte que la PAC joue de moins en moins son rôle de régulateur.

Pour résumer la situation, nous ne sommes pas vraiment dans une politique agricole commune, mais dans un système de production ultra-concurrentiel, avec une politique qui est très loin d’harmoniser et de maîtriser. À cet égard, l’exemple des travailleurs détachés est éclairant : c’est un dumping social institutionnalisé qui est aujourd’hui mis en place !

La tentation est grande pour la Commission européenne de rappeler dans ses objectifs de réforme la nécessaire redistribution des aides compensatrices pour mieux cadrer le démantèlement des outils de régulation. De prochaines crises sectorielles sont à prévoir et les chèques nationaux ne remplaceront jamais une vraie PAC juste, durable et efficace socialement pour les paysans.

Je souhaiterais également aborder la filière bio. Les soutiens pour la conversion à l’agriculture biologique ou son maintien sont passés en France en trois ans d’un pilier de la PAC à un autre. Cette instabilité a entraîné de nombreuses difficultés. Le retour de la mesure « conversion à la bio » dans le pilier développement rural a apporté un peu plus de cohérence, mais la pérennité est loin d’être assurée.

De plus, la distinction entre les mesures bio et les autres paiements environnementaux a été préconisée par la Cour des comptes européenne, de sorte que l’agriculture biologique s’exerce sur tout le territoire, sans zonage particulier. Cette démarche témoigne d’une volonté de ne pas cantonner l’agriculture biologique à un territoire ou à un marché, mais bien de la développer largement avec des moyens dédiés.

Compte tenu de ces grands principes, les deux principales déficiences de la politique agricole sont les suivantes : les aides actuelles DPU entraînent des surcoûts d’installation pour les nouveaux agriculteurs et ne donnent pas les bonnes incitations à la préservation de l’environnement dans les régions rurales. D’autres défaillances de marché subsistent, comme la volatilité des prix, dont l’importance a été largement sous-estimée lors des récentes réformes.

Le groupe CRC propose une nouvelle ambition, qui vise à construire la politique agricole et alimentaire européenne du XXIe siècle. Dès maintenant, la mise en place d’outils de régulation des marchés, des stocks européens de sécurité alimentaire et de mesures contre la spéculation est nécessaire. Nous portons une politique agricole au service d’une agriculture de qualité et reconnaissant le droit à une juste rémunération du travail, ce qui passe notamment par la répartition de la valeur ajoutée dans les filières.

Pour pouvoir récolter, il faut semer ! Aussi, alors que la campagne PAC 2015 n’est toujours pas close, nous proposons de remplacer les coûteux et complexes systèmes de paiement actuels par un système simplifié. Il est primordial de maintenir une intervention publique afin de garantir un prix « plancher » ou un « filet de sécurité » se limitant à des circonstances exceptionnelles. Il faudrait supprimer ou réduire les contradictions entre les programmes comme le soutien à l’agriculture intensive et les taxes sur la pollution, ou comme les paiements élevés aux cultures arables et les modestes aides agroenvironnementales. Il s’agit de mettre du bon sens dans l’ensemble de nos réglementations pour qu’elles cessent d’être contre-productives, tout en rendant concret, très rapidement, le contenu des différentes mesures d’accompagnement.

Dans notre secteur agricole, les prochaines années vont être décisives pour garder des exploitations et des agriculteurs. Maintenir et maîtriser les volumes de production, soutenir l’investissement, c’est soutenir l’agriculture, mais c’est aussi soutenir la richesse économique et sociale de notre pays ; c’est dynamiser tous nos territoires ! Notre agriculture a besoin de signes pour retrouver confiance en l’avenir, mais elle attend un revenu, une plus juste rémunération par le marché, ainsi que de la stabilité.

Mme la présidente. La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat, proposé à un moment opportun du processus de réflexion sur la PAC post-2020, est bienvenu, et j’en remercie ses initiateurs.

Nous partageons tous ici le souci du devenir de l’agriculture française, une agriculture confrontée, au plan national comme européen, à des enjeux de sécurité et de qualité alimentaires, à des défis économiques, environnementaux, territoriaux. Elle doit de surcroît faire preuve de résilience à l’égard des nombreux aléas dont elle est en permanence l’objet.

Pour répondre à ces enjeux, nous devons faire une analyse juste du fonctionnement de la PAC actuelle et en déduire des objectifs pertinents pour la prochaine, en cours de préparation.

À nos yeux, la PAC post-2020 doit être construite sur les objectifs suivants : croissance, emploi et compétitivité ; contribution aux enjeux climatiques et environnementaux ; développement de la ruralité ; gestion des risques de toute nature pour une agriculture plus résiliente et plus durable.

Compte tenu du peu de temps qui m’est imparti, et sachant que nous présenterons le 30 juin prochain, avec Henri Cabanel et Didier Guillaume, une proposition de loi visant à mettre en place des outils de gestion des risques en agriculture, je me limiterai à traiter la question de la nécessaire résilience de la future PAC face aux aléas sanitaires, climatiques et économiques.

Les agriculteurs nous le disent, et ils ont raison : « Nous ne voulons pas des primes, mais des prix ! » Cela suppose des marchés correctement rémunérateurs qui leur donnent une visibilité suffisante pour définir la bonne stratégie d’exploitation, pour faire les choix pertinents d’investissement, qui demeurent, on le sait, la condition majeure de leur compétitivité dans la durée. Ils réclament des marchés « justes » en quelque sorte.

Mais quelle est la réalité actuelle ? Force est de le constater, les mécanismes de régulation des marchés ont soit disparu – c’est le cas des quotas –, soit n’existent pas, ou alors sous des formes quasi embryonnaires.

Depuis 1962, de réforme de la PAC en réforme de la PAC, avec celle de 1992 en particulier, les principes du libre marché autorégulé ont fini par modeler l’agriculture de nos nations, de nos régions et de nos terroirs, en même temps qu’ils ont fait disparaître et souffrir trop souvent, parfois jusqu’à l’insupportable, nos paysans. Dans ce contexte éminemment politique, mais je devrais plutôt dire dogmatique, la résignation n’est pas de mise et la réaction doit être inspirée par des principes politiques empreints de pragmatisme économique et de solidarité à l’égard du monde paysan.

Dans notre réflexion, nous partons d’un fait que nous devons toujours avoir en tête : les agriculteurs n’ont pas de pouvoir de marché. Pis, quand la valeur dont ils devraient bénéficier prioritairement augmente, c’est surtout l’amont et l’aval qui en profitent. La question se pose donc immédiatement : quel rôle devrait jouer l’Europe dans ce contexte d’adossement – le mot « affrontement » serait plus approprié – aux marchés européens et mondiaux, qui détermine pour une large part les revenus de nos producteurs ?

La PAC actuelle n’intègre pas, de façon adéquate en tout cas, de mécanisme de gestion du risque de prix. À cet égard, l’observation des dispositifs mis en œuvre dans les grands pays producteurs hors de l’Union européenne est riche d’enseignements et doit être prise en compte pour définir notre boîte à outils de gestion et de couverture des différents types de risques.

Pour les risques individuels de type usuel, la gestion relève de choix privés, soutenus par des aides publiques, tels que la diversification des cultures, l’épargne de précaution, le lissage par la fiscalité ou les baisses de charges.

Quand l’aléa est maîtrisable, interventions collectives et publiques se complètent à travers la coopération de producteurs, les fonds de mutualisation des risques, les assurances récoltes au regard des risques climatiques et les assurances revenus.

Enfin, lorsque le risque est systémique ou que l’aléa est catastrophique, c’est au public d’intervenir pour rééquilibrer les marchés avec des aides contracycliques et au titre de la solidarité nationale pour les calamités naturelles.

À partir de cette typologie des risques et de l’analyse des politiques nationale et européenne dans ce domaine, quel constat peut-on faire ? Où sont les marges de manœuvre, les possibilités de progrès, les orientations à privilégier ?

D’abord, l’État intervient sur les baisses de charges et sur le lissage de la fiscalité. Il encourage les organisations collectives, telles que les coopératives, les GAEC et les GIEE, qui sont gages d’efficience accrue et de mutualisation des risques. Il intervient aussi dans le financement des assurances récoltes pour le risque climatique au moyen du contrat socle, ainsi qu’en matière de calamités sanitaires ou environnementales grâce au Fonds de mutualisation sanitaire et environnemental, le FMSE.

L’État pourrait utilement approfondir la mise en œuvre des articles 36 à 39 du règlement 1305/2013 de l’UE, qui traitent de la gestion des risques. Ce point fera l’objet de la proposition de loi que nous examinerons le 30 juin prochain.

Quant à l’Union européenne, dans la perspective de la PAC post-2020, elle devrait se mettre en position de pouvoir évaluer finement les pertes de revenus agricoles. À cet égard, les retards pris en matière de numérique et de big data agricole sont importants. Elle devrait également favoriser la création de comptes d’épargne de précaution, soutenir les tests de terrain pour valider ou pas les concepts de gestion de risque et les méthodes nouvelles, développer des processus d’apprentissage à partir d’expérimentations et de modélisations et prévoir un financement suffisamment flexible pour les outils de gestion des risques en utilisant les réserves spéciales de l’Union.

Enfin, il faudrait organiser l’UE pour la supervision de la gestion des risques – c’est la question de l’assurance chiffre d’affaires et des outils de stabilisation du revenu – en restructurant le premier pilier et en lui fixant des objectifs stratégiques. Il faut aussi traiter la question de l’efficience des aides découplées et, enfin, adapter le cycle de gestion budgétaire de la PAC. En effet, la PAC peut-elle être efficace, réactive face aux situations aléatoires dans le cadre d’un cycle budgétaire annualisé ?

Je soumets à notre débat ces pistes possibles de réflexion et d’étude.

En définitive, pour penser la PAC de demain, pour la sauver, ne faut-il pas changer radicalement de mode de raisonnement ou de paradigme, comme diraient les scientifiques ? Je répondrai par l’affirmative, mais je sais aussi qu’on ne fait pas table rase d’un tel système d’un simple trait de plume. Cette réorientation stratégique nécessite de voir loin et de penser la transition pour que le remède ne soit pas plus dévastateur que le mal.

Pour aller dans ce sens, l’expérimentation, la modélisation et l’évaluation doivent être engagées sans tarder sous forme de tests ou d’expérimentations pour aboutir à des stratégies européennes de filière. Nombre d’acteurs intéressés y sont prêts.

Sur un plan plus politique, je reste convaincu que la construction d’un rapport de force impliquant toutes les parties prenantes – gouvernements des pays membres, organismes professionnels de filières, etc. – sera indispensable pour mener à bien une telle réforme.

Associer et former au plus tôt les agriculteurs eux-mêmes à ce processus de transition majeur sera aussi une condition incontournable du succès. Je sais que vous y travaillez sans relâche, monsieur le ministre, et je vous en remercie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – MM. Michel Le Scouarnec et Raymond Vall applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la crise agricole que nous traversons actuellement met à rude épreuve des filières, notamment l’élevage.

Des mécanismes d’intervention européens ont été mis en œuvre : doublement des plafonds d’intervention pour le lait et le beurre, mesures de stockage privé pour le porc, relance de l’investissement innovant et structurant, régulation temporaire à travers la dérogation au droit de la concurrence, aides financières, notamment en direction des producteurs laitiers. Cependant, ces mécanismes ne répondent en rien aux problèmes sur le fond et les signaux d’alarme sont toujours au rouge. Aussi le Gouvernement les a-t-il complétés par un certain nombre de mesures de nature à soulager les agriculteurs dans cette période difficile pour leur trésorerie : « année blanche » pour les dettes bancaires et plan d’investissement s’élevant à 3 milliards d’euros sur trois ans. Malheureusement, ces mesures apparaissent comme de simples pansements.

Si la nouvelle PAC a rééquilibré les subventions vers les petites et moyennes exploitations, vers de meilleures pratiques environnementales, avec la diversification des cultures, le maintien des prairies permanentes et des surfaces d’intérêt écologique, le partage de ces aides n’est pas satisfaisant.

Dans le cas des aides à l’agriculture biologique, une avalanche de demandes d’aides à la conversion a épuisé les crédits prévus jusqu’en 2020. En conséquence, certaines régions ont réagi en urgence en plafonnant les aides afin de mieux répartir l’enveloppe.

Ce plafonnement pourrait être mis en œuvre pour les nombreuses aides de la PAC afin d’éviter que seules les grosses exploitations en profitent, et ce au détriment des jeunes agriculteurs et des exploitations familiales. Les écologistes pensent qu’il serait également intéressant de transférer une partie des aides du premier pilier de la PAC vers le deuxième pilier. Cela n’est pas un problème strictement français, puisque l’Allemagne connaît le même phénomène de pénurie des aides à la conversion dans plusieurs Länder.

C’est dire à quel point avait été sous-estimé le dynamisme de la filière bio en Europe, qui apparaît aujourd’hui comme un rempart contre la crise et une assurance de pouvoir vendre ses produits à un prix couvrant enfin les coûts de l’exploitation. Or tel n’est pas le cas actuellement pour 60 % des exploitations en France, qui ont un revenu courant avant impôt et hors subvention négatif.

Avec cette PAC, les agriculteurs travaillent à perte et souffrent du moindre retard de paiement des aides.

Je veux aussi revenir sur l’échec des aides aux légumineuses fourragères, qui ne couvrent finalement que 150 000 hectares au lieu des 700 000 attendus. Il s’agissait pourtant d’un point très important du plan Protéine visant à relocaliser une partie de l’alimentation animale aujourd’hui importée et souvent issue d’OGM.

Le problème restera entier tant qu’existera un mouvement de fond d’une partie de la profession qui souhaite une financiarisation totale de l’agriculture, des terres agricoles et des activités associées, ou qui prône en permanence l’extension, l’automatisation et la standardisation des produits à outrance, nous conduisant à des aberrations environnementales comme la ferme des mille vaches.

Au rythme actuel, si l’on ne change pas de logique, 15 % de la profession aura disparu d’ici à 2020. Ne resteront que des exploitations toujours plus grandes et consommatrices de pesticides, d’antibiotiques, d’intrants chimiques.

Il convient de noter l’incohérence entre les objectifs affichés de la PAC et la réalité de l’évolution actuelle des filières. Nous devons dès à présent réfléchir à la PAC d’après 2020, qui devra visiblement accentuer les efforts vers la transition agroécologique, le soutien à l’agriculture bio, le stockage naturel du carbone dans les sols avec le « 4 pour 1 000 », dont la France fait la promotion à travers l’agenda des solutions issu de la COP 21, ou encore vers l’autonomie fourragère et la polyculture élevage. (M. Michel Le Scouarnec applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Raymond Vall.

M. Raymond Vall. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, près de 40 % du budget de l’Union européenne étant absorbé par la PAC, il serait souhaitable que cette politique commune exprime sa pleine efficacité en matière de maintien de l’emploi et de pérennisation des exploitations agricoles, lesquelles concourent à l’équilibre des territoires, en particulier ruraux. Pourtant, selon le rapport de l’eurodéputé Éric Andrieu présenté en avril dernier, la PAC n’a ni créé d’emplois ni ralenti la concentration des exploitations.

Sur le terrain, c’est une dure réalité : la crise frappe la filière de l’élevage depuis deux ans et l’influenza aviaire a sévèrement touché les départements du sud-ouest, en particulier le Gers. J’en profite, monsieur le ministre, pour vous remercier de votre efficacité pendant cette crise. La dernière visite que vous avez effectuée dans ce département montre à quel point vous avez pris ce dossier à cœur. Vous avez réussi à redonner de l’espoir à cette filière.

Chaque année, notre pays voit disparaître des fermes qui ne survivent pas à la pression des normes, au poids des charges, non plus qu’à la guerre des prix, qui se fait le plus souvent au détriment des producteurs et en faveur de la grande distribution.

Monsieur le ministre, comme vous l’avez plusieurs fois souligné dans cet hémicycle, l’agriculture européenne est confrontée à une crise de surproduction sur un marché mondial de plus en plus difficile, et la France a été plus durement touchée que ses partenaires. À cet égard, les allégements de charges mis en œuvre dans les plans de sauvetage successifs étaient opportuns. Allez-vous pouvoir les pérenniser ?

La contractualisation, dont nous aurons l’occasion de débattre dans le cadre du projet de loi Sapin II et la question de l’organisation de producteurs sont également des chantiers à approfondir.

Les dispositifs nationaux s’inscrivent dans un cadre communautaire, à l’égard duquel nous devrions avoir plus d’exigences. Nous ne voulons pas voir triompher un modèle qui éliminerait les plus fragiles et aurait un impact négatif sur l’emploi et les territoires ruraux. La première de ces exigences serait de reconnaître clairement que la stabilisation des marchés est l’une des conditions de la survie de nombreuses filières agricoles. Ainsi, nous mesurons bien aujourd’hui l’impact négatif de la suppression des quotas laitiers. Les outils de régulation apparaissent donc indispensables pour renforcer la résilience du secteur agricole. C’est pourquoi la proposition de loi de nos collègues Cabanel, Guillaume et Montaugé sera utile pour encourager cette nouvelle gestion des aléas économiques en agriculture.

Monsieur le ministre, pour surmonter la crise du lait, vous aviez demandé la réactivation de certains instruments de régulation. Dans la perspective de la PAC post-2020, c’est un sujet qui devra revenir à l’ordre du jour pour être défendu face à nos partenaires.

Faut-il opposer loi du marché et régulation, alors que de nombreux pays mettent en place des systèmes d’aides plus ou moins directes, comme le dernier Farm Bill américain, l’opération « Faim zéro » du Brésil ou encore la politique agricole chinoise, fondée sur des prix garantis plus élevés que les prix mondiaux ? Les règles de l’OMC sont-elles équitablement respectées partout ? Certainement pas !

D’une manière générale, l’Europe doit être extrêmement vigilante dans ses relations commerciales. Les négociations sur le partenariat transatlantique, sur l’accord commercial avec le Canada ou sur les sanctions vis-à-vis de la Russie sont particulièrement sensibles. L’Union européenne doit faire preuve de la plus grande pugnacité pour défendre son modèle et ses agriculteurs.

J’en viens à une troisième exigence, celle d’une PAC plus solidaire, cette solidarité étant entendue comme l’acceptation de la complémentarité des modèles agricoles ; c’est ce qui vient d’être expliqué. Il serait illusoire de penser que les pays européens pourront à terme rivaliser avec des géants agricoles comme le Brésil ou l’Argentine, dont les coûts de production sont imbattables.

Les exploitations de taille modeste sont un atout sur le segment de la qualité. On peut d’ailleurs reconnaître que la PAC 2014-2020 a intégré cette approche de la diversité par la subsidiarité pour les États membres. En effet, la nouvelle architecture des paiements directs, mieux ciblés et plus équitables, a permis à chacun d’affirmer ses priorités. La France a ainsi fait des choix que l’on peut partager : la priorité accordée à l’élevage, l’accompagnement à la modernisation des exploitations et l’installation des jeunes agriculteurs, le soutien appuyé et simplifié aux zones de montagne et l’encouragement à l’agroécologie.

L’étiquetage de l’origine des viandes et du lait sur les produits transformés est un autre sujet, à l’origine d’âpres débats. La Commission doit rendre son avis sur le projet de décret soumis par la France au mois de mars dernier. Quel en sera le calendrier ?

La simplification des normes PAC est vitale pour les agriculteurs. Nous attendons les conclusions de la mission de Mme Herviaux avec impatience.

Mes chers collègues, la crise que traverse l’agriculture incite à repenser les mécanismes de crise et les outils de régulation du marché.

Monsieur le ministre, votre mission est essentielle. Le groupe du RDSE, dont l’engagement européen est constant, vous soutiendra pour défendre notre agriculture et obtenir un consensus européen. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Claude Lenoir. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon ami Jean Bizet a bien décrit les raisons qui ont conduit le groupe Les Républicains à souhaiter un tel débat : évoquer les mesures à prendre pour restructurer et moderniser les filières agricoles dans le cadre de la politique agricole commune.

J’ai été frappé, en entendant plusieurs des intervenants qui m’ont précédé à cette tribune, de constater les convergences entre nous. Elles sont naturelles, compte tenu de l’ampleur de la crise que nous connaissons dans les différents départements. Or, voilà encore quelques mois, nous étions en désaccord sur les causes et les remèdes à cette crise. Mais les professionnels attendent aujourd'hui que nous dépassions nos clivages et que nous prenions les dispositions nécessaires pour permettre à notre agriculture de retrouver la place qu’elle a malheureusement perdue.

À l’instar de nombreux collègues, je constate la détresse du monde agricole sur nos territoires. Des questions reviennent souvent : pourquoi la France voit-elle sa production baisser quand d’autres bassins de production, comme l’Irlande ou l’Allemagne, explosent ? Pourquoi certaines productions sont-elles aujourd'hui, sinon en déclin, du moins en train d’être dépassées par des concurrents que l’on n’attendait pas voilà encore quelques années ?

L’occasion nous est donnée de réfléchir ensemble – c’est là où il y a des convergences – sur une nouvelle manière de penser la politique agricole commune. Il est vrai que nous avons empilé des mesures pendant des années, voire des dizaines d’années, sans véritablement changer le cadre, le cap, voire la conception même de ce qui est bon et nécessaire pour l’agriculture. Nous avons aujourd'hui la possibilité de le faire. Au demeurant, nous en avons déjà débattu ici même, lors de l’examen d’une proposition de loi que j’avais déposée avec nombre de mes collègues pour rendre l’agriculture plus compétitive et lui permettre de faire face à la concurrence.

Aujourd'hui, l’Europe doit être regardée comme l’institution, le cadre, non pas qui empêche, mais qui permet ! Déjà, dans un passé récent, le Gouvernement, à la faveur de la nouvelle politique agricole commune, avait orienté certaines des dispositions de l’Europe en faveur de l’élevage. C’était une bonne orientation ; elle tranchait par rapport à des habitudes qui avaient été prises. Aujourd'hui, nous devons aller plus loin et, peut-être, réfléchir à d’autres systèmes.

Je rejoins totalement notre collègue Jean Bizet sur la viticulture. Cette filière a renoncé à des aides directes, et elle a utilisé les aides de l’Europe pour se restructurer, se moderniser et promouvoir ses productions.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Jean-Claude Lenoir. Les résultats sont là. Ils sont particulièrement convaincants. Pourquoi ne pas s’en inspirer aujourd'hui ? C’est une piste qui vous est suggérée, monsieur le ministre.

Toujours à propos de l’Europe, il y a peut-être également des dispositions à prendre en matière d’assurance. C’est un sujet essentiel. Notre collègue Jean-Jacques Lasserre y travaille avec beaucoup de détermination au sein de la commission des affaires économiques, que je préside. D’ailleurs, les idées qu’il a formulées sont tellement bonnes qu’elles ont été reprises dans la proposition de loi que nous examinerons le 30 juin prochain.

M. Daniel Raoul. Quelle OPA ! C’est gonflé !

M. Jean-Claude Lenoir. Cela montre qu’il peut, là aussi, y avoir des convergences et que nous pouvons, les uns et les autres, trouver les voies et moyens pour soutenir notre agriculture.

En matière de concurrence, l’Europe n’a pas hésité à desserrer l’étau lors de la crise qui a frappé la production laitière, notamment en utilisant l’article 222 de l’OCM unique. Pourquoi ne pas conforter un système assurantiel à l’échelon européen ?

Je profite de l’occasion qui m’est offerte pour vous donner lecture d’un texte rédigé par Jean-Paul Fournier, sénateur du Gard, qui souhaitait s’exprimer au nom des élus de son département et de ceux des Bouches-du-Rhône sur la riziculture. Notre collègue écrit ceci : « Depuis le refus par le Gouvernement en 2014 de la mise en place d’une aide européenne couplée pour la production rizicole, la production a été divisée par deux, et les surfaces exploitées se sont effondrées.

« Le Gouvernement avait proposé à la place une mesure agroenvironnementale, qui n’est pas totalement aboutie, provoquant une désorganisation totale de la filière. Les conséquences sont donc tout à fait dommageables pour la production de riz, mais aussi pour l’écosystème camarguais, étant rappelé que la Camargue est la plus grande zone humide de France.

« Le retour à l’aide couplée dans le cadre de la réforme à mi-parcours de la PAC serait un signe fort de la volonté nationale de soutenir une production de riz française. Les autres pays européens producteurs de riz, comme la Grèce, l’Italie ou l’Espagne, ont préservé l’aide couplée, garantissant ainsi la production rizicole. »

Je me faisais un devoir de faire part d’une telle préoccupation, largement partagée par les élus du territoire concerné.

Enfin, je tiens à insister auprès du Gouvernement sur la nécessité de défendre nos droits et la place que nous occupons dans les négociations sur l’accord commercial avec le Canada – nous aurons d’ailleurs un débat sur le sujet jeudi prochain – et, bien entendu, sur le TTIP. Le fait que j’utilise l’expression « TTIP » est un signe que j’y suis plutôt favorable, ceux qui y sont hostiles préférant parler de « TAFTA ». (Sourires.)

Monsieur le ministre, vous avez un vrai devoir de défendre ce qui fait l’excellence française, c'est-à-dire la qualité et l’originalité de nos produits, qui sont souvent exceptionnels. Comme je constate que vous ne prêtez guère attention à mes propos,…

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Mais si ! D’ailleurs, je vais vous répondre !

M. Jean-Claude Lenoir. … je vous remercie donc de bien vouloir lire le compte rendu de nos travaux à l’issue de ce débat pour savoir ce que j’ai dit ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Lasserre.

M. Jean-Jacques Lasserre. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je remercie les initiateurs de ce débat.

Comme cela a été rappelé, nous fonctionnons sur deux piliers clairement identifiés : d’une part, les aides directes, couplées et découplées ou droit à paiement unique, aussi appelé DPU, représentent 70 % du budget de cette politique ; d’autre part, la politique de développement rural. L’Union européenne cofinance les mesures qui contribuent au dynamisme socio-économique des territoires et à la préservation des paysages, à hauteur de 25 % du budget de la politique agricole commune.

Les enjeux nationaux ont été abordés lors de la réunion des ministres européens de l’agriculture à Amsterdam la semaine dernière. Cette rencontre, que nous avons suivie, a bien montré que la politique agricole commune d’après 2020 se jouait dès maintenant. Plusieurs points délicats, mais fondamentaux qui avaient déjà été discutés en 2013 le seront de nouveau.

Le premier concerne la convergence dans la redistribution des aides.

Sous la pression de certains « gros pays », notamment l’Allemagne, il avait été décidé d’abandonner le plafonnement des aides directes. En échange, le principe de dégressivité était appliqué. Une convergence externe et interne devrait – nous y tenons – conduire à plus de justice.

Nous ne pouvons qu’être favorables à une distribution plus juste des aides, notamment pour aider les plus petites exploitations. Je le rappelle, ces dernières années, les grosses exploitations ont récupéré plus de 80 % des aides directes.

Le deuxième point est relatif à l’élevage. Nous devons défendre une orientation toujours plus marquée en ce sens.

Certes, le taux pour les aides couplées a été renforcé, passant de 10 % à 13 %, avec une possibilité supplémentaire de 2 % pour la production de protéines végétales. Cela permettra de soutenir le développement de l’autonomie fourragère protéique, donc l’élevage. Une telle démarche s’accompagne d’un mécanisme de « limitation des pertes ».

Mais c’est évidemment insuffisant. L’ensemble mérite d’être amélioré. Il faut à tout prix utiliser la totalité des mesures disponibles pour accorder le soutien maximum aux exploitations, notamment, de bovins-viande. Il s’agit, je le répète, du couplage, de la compensation du handicap – j’y reviendrai – et des mesures adaptées de soutien au deuxième pilier. Il faut aussi préserver le niveau des DPU des systèmes naisseurs-engraisseurs et engraisseurs.

La pleine utilisation de toutes les mesures disponibles vaut également pour la production laitière, dont la situation s’aggrave toujours, comme l’a encore démontré la triste journée mondiale du lait de la semaine dernière.

Le troisième point porte sur le verdissement. J’imagine que nous aurons l’occasion d’en reparler. C’est un sujet fondamental et récurrent. Un tiers des aides directes dépendraient de la mise en œuvre de bonnes pratiques environnementales de base. En outre, 30 % des aides indirectes, rurales, iront en direction de ceux qui feront plus d’efforts pour la biodiversité ou le climat.

Bien entendu, une agriculture écoresponsable est souhaitable. Elle est d’ailleurs souhaitée par les consommateurs, qui sont de plus en plus demandeurs.

Mais ne tombons pas dans les clichés ! Regardons objectivement les efforts et la contribution de nos agriculteurs à la qualité de l’environnement. La plupart font déjà d’énormes efforts, en prêtant une très grande attention à leur environnement.

Nous sommes très réservés quant à l’augmentation des sommes consacrées au verdissement. Nous pensons en effet que, dans leurs retombées, au regard de leurs contraintes, elles méritent d’être revisitées.

Surtout, il me semble indispensable de prendre en compte les spécificités locales. Nous avons eu l’occasion d’en parler à plusieurs reprises. Il est absolument nécessaire d’adapter les exigences environnementales en fonction des départements, de leur climat, de leurs caractéristiques agronomiques et de leurs caractères propres.

Je souhaite également évoquer les indemnités compensatoires de handicaps naturels, ou IPHN, et la prime herbagère agroenvironnementale, ou PHA. Ces moyens doivent être préservés, voire accentués compte tenu de la situation. On ne peut plus accepter qu’ils soient distribués de manière toujours plus restrictive. Je fais notamment référence aux surfaces prises en compte.

L’avenir des jeunes agriculteurs est un autre point primordial. L’installation est évidemment une nécessité. Nous sommes véritablement à un moment de la vie agricole française et même communautaire où des signes supplémentaires d’espérance doivent être adressés en direction des jeunes agriculteurs.

Notre collègue Jean-Claude Lenoir a abordé la question des risques, ce qui a suscité quelques réactions. Je suis bien d’accord pour dire que, au-delà des enjeux récurrents, le débat doit aujourd'hui s’orienter vers les risques climatiques et les risques économiques. Si les deux sujets sont, certes, liés, nous devons les traiter en tant que tels.

Sur les risques climatiques, nous sommes plusieurs parlementaires à travailler sur l’évolution du système assurantiel. Nous faisons un constat : l’assurance concerne trop peu d’agriculteurs. Sa généralisation doit être un objectif. Son intérêt réside dans les 65 % d’aides publiques versées par l’Union européenne.

Sur les risques économiques, le débat doit s’engager sur la notion de « couverture » de tels risques, qui sont essentiellement liés à l’évolution des prix de marché.

Toutefois, et je m’adresse à mes amis du groupe socialiste, ce serait, je le crois, une grave erreur de penser réguler des prix de marché totalement hors contrainte exclusivement par des fonds publics, qu’ils soient européens, nationaux ou régionaux. Les mécanismes, même insuffisants, de régulation des échanges internationaux doivent être très scrupuleusement surveillés, leur libéralisation intégrale conduisant à des situations catastrophiques.

Les propositions formulées par la profession agricole sur les relations entre producteurs, transformateurs et distributeurs doivent être enfin mises en application. La libre circulation des produits au sein de l’espace communautaire, de même que les accords internationaux méritent de l’encadrement. À ce moment-là, la couverture des risques économiques par la puissance publique sera envisageable.

Monsieur le ministre, nous avons entendu votre proposition d’épargne de précaution obligatoire. Nous y serons attentifs.

De même, le caractère « contracyclique » de la PAC est une notion audible, à condition d’en définir très précisément l’application.

Les flambées, ou la chute, des prix mondiaux concernent essentiellement les grandes cultures. Les flambées, très conjoncturelles et limitées dans le temps, justifient une redistribution plus affinée des aides européennes. Cela peut être la base de l’épargne de précaution que vous évoquez par ailleurs.

L’exercice est différent, notamment pour l’ensemble des productions animales, qui ne connaissent pas, elles, ces caractères cycliques.

Les aides européennes devront toujours avoir un caractère de stabilité et de durée à un niveau suffisant.

Nous sommes prêts à examiner le principe contracyclique des aides européennes. Des modèles qui existent dans le monde nous apparaissent beaucoup plus performants que l’organisation de la PAC. Nous serons très attentifs aux initiatives prises. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean Bizet. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat d’aujourd’hui – j’en remercie moi aussi ses initiateurs – est une occasion essentielle de rappeler que la crise agricole a des facteurs à la fois conjoncturels et structurels : concurrence internationale accrue, perte de compétitivité, volatilité et tendance à la baisse des prix, perte de débouchés… Car l’agriculture n’a pas échappé à la mondialisation et à ses conséquences !

Mais, nous le savons aussi, le contexte européen et les politiques agricoles européennes, depuis plusieurs dizaines d’années, ont leur pertinence dans l’interprétation de la crise que nos agriculteurs traversent. La volonté politique de dérégulation a fait perdre à la PAC sa capacité modératrice des marchés agricoles.

Alors que nous nous trouverons à mi-parcours en 2017, nous devons nous interroger sur ce que la PAC peut encore apporter à l’agriculture française. Comment doit-elle se redéfinir pour continuer à remplir ses objectifs, c'est-à-dire assurer un niveau de vie équitable à nos agriculteurs, stabiliser les marchés et garantir la sécurité des approvisionnements et des prix raisonnables aux consommateurs ?

Malgré tout, notre agriculture nous garantit une qualité reconnue, que nous maîtrisons. C’est pourquoi il nous faut nous appuyer sur cette image et penser une stratégie à long terme, sur le modèle de la viticulture. À cet égard, une fois n’est pas coutume, je partage ce que vous avez dit, monsieur Lenoir.

M. Jean-Claude Lenoir. C’est plus fréquent qu’on ne le croit ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Henri Cabanel. La filière viticole, que je connais particulièrement bien, constitue un exemple bien vivant de ce qu’une PAC efficace peut apporter à notre agriculture.

À partir de 2008, une vaste réforme de l’organisation commune du marché du vin a été mise en place. Son objectif était d’équilibrer le marché vitivinicole pour limiter, voire éliminer les mesures d’intervention. Les budgets ont ainsi été réorientés au profit de mesures plus positives et ont renforcé la compétitivité de nos vins. Cette réforme prévoyait une restructuration rapide du secteur vitivinicole, basée notamment sur un régime d’arrachage volontaire primé sur une durée de trois ans. Il s’agissait de permettre aux producteurs ne pouvant pas affronter la concurrence de sortir dignement de la filière et d’éliminer du marché les excédents de production et les vins ne correspondant plus au marché, donc au goût des consommateurs.

Les subventions destinées à la distillation de crise et à la distillation en alcool de bouche ont été progressivement supprimées. Les montants correspondants ont été réaffectés sous la forme d’enveloppes nationales.

Le montant des paiements de l’enveloppe 2014-2015 du programme quinquennal français de l’OCM vitivinicole a été consommé sur une stratégie de filière voulue par les professionnels : 103 millions d’euros pour les investissements des entreprises, 101 millions d’euros pour la restructuration et reconversion du vignoble, 45 millions d’euros pour la promotion sur les marchés des pays tiers et 34 millions d’euros pour les prestations viniques.

Ce programme assurera ainsi le financement de mesures structurantes sur le premier pilier. Cela permettra au secteur de rester dynamique. La restructuration du vignoble, les aides à la promotion à l’export et l’effort sur les investissements ont été privilégiés, avec les résultats que l’on connaît !

La viticulture n’a pas choisi le droit à paiement de base comme dans les autres filières. Cela constitue un modèle duplicable. Les négociations sur la future réforme de la PAC doivent le prendre en compte.

Par ailleurs, et nous sommes nombreux à le dire, la volatilité des prix est malheureusement désormais la norme des marchés agricoles. Elle constitue aujourd'hui l’enjeu majeur de la politique agricole commune. Les politiques doivent accompagner les acteurs les plus exposés pour atténuer les effets négatifs des variations vertigineuses des prix.

Dans ce contexte, comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner ici, l’Europe ne peut plus uniquement fonder sa politique agricole sur des aides directes découplées. Celles-ci ne sont pas adaptées aux situations de volatilité des prix, alors que l’objectif de « stabiliser les marchés » est souhaitable.

Il s’agit aujourd’hui de passer d’une politique de soutien direct à l’hectare à une politique de gestion des risques mutualisée. Nous avons déposé une proposition de loi en ce sens avec mes collègues socialistes Franck Montaugé et Didier Guillaume. Elle fait suite à notre proposition de résolution, qui a été discutée ici même le 6 avril dernier. Elle visait à mettre en œuvre des mécanismes de stabilisation des revenus au niveau européen et elle a été adoptée à l’unanimité.

La gestion des risques climatiques, sanitaires et environnementaux est une mesure économique structurante. Les récentes catastrophes naturelles que viennent de connaître certains agriculteurs montrent la nécessité d’ouvrir ce débat.

Dans le cadre du second pilier a été créé le programme national de gestion des risques et d’assistance technique. Il nous faut continuer à consolider le financement de la gestion de risques à l’horizon de 2020.

Dans cette logique, si nous souhaitons une PAC réellement efficiente, il est inéluctable d’opérer un basculement d’une partie du montant des aides découplées vers des mécanismes de gestion des risques soit par une plus grande mobilisation des outils déjà existants au sein du second pilier, soit par la création de nouveaux outils au sein du premier pilier.

Lors du Conseil informel des ministres européens de l’agriculture à Amsterdam le 31 mai dernier, vous avez, monsieur le ministre, mis l’accent sur le fait que les dispositifs relatifs aux risques climatiques et sanitaires doivent être complétés par un outil efficace de prise en charge des aléas économiques – assurance chiffre d’affaires, outil de stabilisation des revenus. Nous partageons votre analyse.

Nous vous soutenons encore quand vous défendez le remplacement de la réserve de crise européenne par une mesure d’épargne de précaution obligatoire afin de donner un caractère contracyclique à la PAC.

Le Parlement a son mot à dire ! Nous aurons à en rediscuter ce mois-ci lors du débat de la proposition de loi visant à mettre en place des outils de gestion des risques en agriculture.

La PAC 2014-2020 a innové en ajoutant du paiement vert au paiement de base. Il est conditionné par le maintien des prairies permanentes, la diversité des assolements et l’aménagement de surfaces d’intérêt écologique. Ces mesures permettent d’accompagner les exploitations agricoles qui s’engagent dans le maintien ou le développement de pratiques combinant performance économique et environnementale.

Là encore, la position exprimée par la France à Amsterdam est allée dans ce sens puisque vous avez, monsieur le ministre, défendu avec ambition la conservation et la simplification du dispositif de verdissement.

La réelle difficulté de la PAC réside dans sa complexité. Malgré la volonté du commissaire à l’agriculture Phil Hogan de la simplifier, le fossé est considérable entre l’administration qui produit la réglementation et les acteurs qui ont d’énormes difficultés à l’appliquer. Si l’on comprend aisément que des règles sont nécessaires, encore faut-il qu’elles soient applicables et surtout qu’elles ne changent pas aussi souvent.

Les régions sont devenues autorités de gestion du Fonds européen agricole pour le développement rural et participent ainsi au plus près des agriculteurs à la mise en place des programmes régionaux, auxquels s’ajoute un programme national pour la gestion des risques en agriculture qu’il me semble nécessaire d’activer.

Il est primordial, monsieur le ministre, que vous puissiez convaincre vos collègues européens de la nécessité de construire un projet agricole européen pouvant répondre aux défis alimentaires, environnementaux et sociétaux. Ce projet devrait avoir pour ambition d’offrir à nos agriculteurs une vision suffisante à moyen et long terme. Ils pourront ainsi vivre dignement de leur métier. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous débattons ce soir de la modernisation de l’agriculture.

Le premier point sur lequel nous devons nous accorder sont les objectifs que nous fixons à l’agriculture, qu’elle soit française ou européenne. Il me semble que nous sommes cependant tous d’accord pour dire que la « ferme France » comme la « ferme Europe » doivent rester très solides sur le plan économique. La France doit rester une ferme exportatrice.

Qu’est-ce que la modernisation en matière d’agriculture ? Qu’est-ce qu’une agriculture moderne ?

Cessons tout d’abord, qu’il s’agisse des médias ou parfois de certains d’entre nous, de vendre malhonnêtement de la nostalgie mal fondée. Dire que c’était mieux avant et qu’il faut recommencer à faire de l’agriculture comme dans le passé, c’est oublier certaines réalités. Le ministère de l’agriculture a publié une petite brochure très bien faite sur la gestion par les services de l’État des différentes maladies, qu’il s’agisse des animaux ou des végétaux – de la forêt comme des plantes cultivées. En la lisant, on s’aperçoit qu’il serait illusoire de vouloir supprimer tous les produits de traitements et ignorer toutes les avancées scientifiques réalisées autour de l’agriculture. Ce serait revenir au XIXe siècle ! Nous serions confrontés à un certain nombre de maladies que nous ne pourrions plus maîtriser, qu’elles soient animales ou végétales.

L’agriculture moderne n’est pas le fruit du hasard. La raison d’être de certaines pratiques n’est pas non plus de faire plaisir aux agriculteurs ou à ceux qui les entourent, en amont comme en aval.

Monsieur le ministre, des crises agricoles, il y en a déjà eu. Certes, vous n’avez pas de chance, si tant est que vous soyez sensible à la crise, ce qui ne nous a pas toujours semblé être le cas.

Mme Pascale Gruny. C’est vrai !

M. Michel Raison. Quoi qu’il en soit, ce n’est pas votre faute s’il y a une crise. Et si l’on est un ministre sensible, ce n’est pas chose facile que d’être confronté à une crise aussi longue et aussi dure. Des crises, il y en a déjà eu. Malheureusement, il y en aura peut-être encore davantage dans le futur.

Quand il est question d’économie agricole, il ne faut négliger aucun levier. Je n’ai aucune recette ni aucune leçon à donner à quiconque, mais on oublie trop souvent de manipuler le levier de l’agriculteur lui-même. On pense plus souvent au levier de l’État et au levier de la politique agricole commune.

Le levier de l’agriculteur, personne n’ose en parler : serait-ce un affront d’avouer qu’un certain nombre d’agriculteurs ont des progrès à faire en matière de gestion, qu’elle soit administrative, financière ou parfois même technique ? Il faut avoir le courage d’aborder ce problème.

Le levier de l’État, nous le connaissons tous, même si nous le connaissons parfois mal. Je n’y insisterai pas, car nous sommes avant tout réunis ce soir pour débattre de la politique agricole commune. Quoi qu’il en soit, tout est combiné.

Quant à la politique agricole commune, plusieurs orateurs l’ont souligné, qu’il s’agisse de Jean Bizet ou de Jean-Claude Lenoir, il me semble très sincèrement qu’il va falloir la bouleverser.

M. Jean Bizet. Très bien !

M. Michel Raison. Le premier pilier de la politique agricole commune devrait plus ou moins ressembler au Farm Bill américain.

À force de replâtrer et d’apporter modification sur modification, comme pour nos politiques de l’emploi ou nos politiques fiscales, plus personne n’y comprend rien ! Plus personne ne sait comment appliquer ces politiques.

Il faut une politique qui servirait, qui serait beaucoup plus souple et qui viendrait justement en accompagnement des politiques nationales, fiscales et autres. Il est important d’avoir une politique qui puisse accompagner la fluctuation des prix et des marchés. La loi de l’offre et de la demande est ainsi faite que lorsqu’on produit 101 % par rapport à la consommation, les cours commencent à baisser. À 102 %, c’est la crise ! Bref, ce n’est pas si simple à gérer.

L’Europe doit mettre en place des systèmes de régulation à peine plus performants que ceux dont elle dispose aujourd'hui. Mais réguler l’Europe seule, au milieu du monde, ce n’est pas forcément très efficace.

Une autre solution pour réguler le revenu des agriculteurs serait de se servir du volume des aides du premier pilier pour passer le cap en cas de besoin. Il est inutile de donner des aides à un agriculteur l’année où il a réalisé une bonne récolte et a bénéficié de bons cours. À quoi bon lui faire payer des impôts ? Creusons-nous la tête au niveau européen pour trouver un système simple et efficace !

En ce qui concerne le deuxième pilier, décentralisons. C’est le sens de l’intervention de Jean Bizet. Lorsque nous avons décentralisé les transports ferroviaires dans nos régions, ils se sont mis à mieux fonctionner. Idem lorsque nous avons décentralisé la construction des collèges et des lycées. Décentralisons le deuxième pilier de la politique agricole, car telle région, en zone de colline ou de montagne difficile, aura besoin d’aménagement pour éviter que le ramassage de la production laitière ne cesse un jour.

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Michel Raison. Plutôt que de promouvoir une politique nationale uniforme, régionalisons ce deuxième pilier pour l’adapter et le rendre plus efficace.

Par ailleurs, les aides doivent également servir à orienter. J’irai dans le sens de mon ami et collègue écologiste : l’agriculture moderne est certes une agriculture qui n’abandonne pas les progrès scientifiques, mais c’est aussi une agriculture qui sait revenir à un certain nombre de méthodes plus intelligentes. Que l’Europe produise plus de légumineuses ! Arrêtons d’importer bêtement du soja et réalisons des assolements avec des légumineuses, qui évitent d’utiliser des désherbants et apportent gratuitement de l’azote dans les sols. L’aide financière doit aussi servir de levier pour mieux manipuler les systèmes d’assolement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean Bizet. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet.

M. Daniel Gremillet. Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, un bilan à mi-parcours est très intéressant à réaliser pour plusieurs raisons.

Premièrement, si l’on reprend l’histoire depuis que l’Union européenne a instauré la politique agricole commune, nous assistons à une dégradation sans précédent, presque historique.

Nous sommes au mois de juin 2016 et les engagements pris par l’Union européenne et la France n’ont pas été complètement tenus. En clair, l’Europe et la France doivent encore de l’argent eu égard au travail réalisé par les agriculteurs sur l’ensemble de nos territoires. Cela ne s’était jamais produit dans l’histoire de l’Union européenne !

Deuxièmement, ce bilan doit nous interpeller sur les signes et les encouragements à adresser aux femmes et aux hommes qui travaillent sur nos territoires et prennent des risques. La politique agricole commune est arrivée à un niveau de suradministration et à un stade d’incompréhension absolument gigantesque. Je citerai deux exemples.

Tout d’abord, en ce qui concerne les surfaces non agricoles, l’incompréhension est complète. Demain, les paysans se trouveront accusés d’avoir coupé tel ou tel arbre. Nous sommes parvenus à un niveau de gestion territoriale totalement incroyable.

Ensuite, le plus grave, les paysans de France ont reçu un document relatif à la déclaration de la politique agricole commune pour l’assolement 2016 leur expliquant qu’elle ne se ferait plus dorénavant sur papier. N’oublions pas qu’un certain nombre d’exploitants n’ont pas internet ! Ce document leur expliquait gentiment que s’ils n’avaient pas internet, ils devaient se déplacer à la DDT…

Soyons attentifs à la considération que nous manifestons à l’égard de femmes et d’hommes sur le territoire qui peuvent se sentir rejetés ou avoir le sentiment de ne plus avoir leur place. Nous devrions à l’inverse les encourager et surtout les accompagner. Ils en ont besoin !

Un autre point que je voudrais évoquer concerne la gestion des marchés et des risques. Jean Bizet l’a très bien expliqué, et je partage complètement son propos ainsi que celui du président de la commission des affaires économiques, Jean-Claude Lenoir. Il me semble que, quelles que soient nos sensibilités, nous sommes tous d’accord. C’est tout l’objet de la proposition de loi tendant à généraliser l’assurance récolte obligatoire.

Car, monsieur le ministre, il convient d’aborder la question du transfert entre le premier et le deuxième pilier. Nul ne peut imaginer qu’un jeune s’installe en prenant le risque que sa production, nécessaire à l’équilibre économique, ne soit pas au rendez-vous. Il faut donc que l’on bouge. C’est ce que nous avons proposé au travers d’une proposition de loi en faveur de la compétitivité de l’agriculture et de la filière agroalimentaire.

Par ailleurs, il est nécessaire de se soucier de la gestion et de l’organisation des marchés. Sur ce plan, nous avons là aussi complètement atteint nos limites. Il est impératif d’innover et de retrouver la stratégie offensive que l’Union européenne a totalement perdue depuis sa création. Retrouvons une organisation des marchés au sein de l’Union si nous voulons être une force de frappe sur le plan de l’agriculture et de l’agroalimentaire.

L’autre exemple le plus flagrant vécu aujourd'hui par les paysans est celui de la politique extérieure de l’Europe. Rien n’a été pris en compte pour les accompagner. Ils sont seuls, exposés et complètement démunis.

Il est important de revenir aux fondamentaux du traité de Rome, qui prévoyait que l’Europe apporterait aux agriculteurs la garantie d’un revenu décent et équitable, comparable à celui des autres catégories socio-professionnelles.

M. Daniel Gremillet. Il faut aussi bien sûr penser au renouvellement des générations. Faisons attention de ne pas sacrifier celles et ceux qui ont investi : ce sont les plus exposés.

La question de la compétitivité de notre agriculture et de nos entreprises agroalimentaires est également aujourd'hui clairement posée. Le taux de pénétration de nos productions agricoles et agroalimentaires sur le marché de l’Union européenne et le marché mondial, voire, plus grave, dans notre propre pays, est fragilisé.

Je terminerai tout simplement en constatant que l’Asie, notamment la Chine, les USA et beaucoup d’autres pays à travers le monde mettent en place des politiques offensives sur le plan agroalimentaire. L’Union européenne constitue aujourd'hui une chance absolument formidable. L’Europe a été une chance pour notre agriculture et notre population au moment de sa création. L’Europe sera encore une chance pour notre agriculture, pour notre économie et surtout pour garantir la sécurité alimentaire de notre population. Pour cela, il faut que la France retrouve une place stratégique qui donne envie à une majorité de pays de l’Union européenne de la suivre, ce qui n’est plus le cas. Tout un travail reste à faire. À mi-parcours, il est nécessaire de se remettre en cause. Ce travail, nous souhaitons le faire tous ensemble ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean Bizet. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, comme à chaque fois, je suis très heureux de participer à un débat dans cet hémicycle sur la question de l’agriculture.

Je répondrai tout d’abord au doute émis par un sénateur sur ma sensibilité au sujet des questions agricoles.

Il y a plus de quatre ans que je suis dans ce gouvernement. Dans l’histoire de la Ve République, je fais partie des ministres qui sont restés le plus longtemps à la tête du ministère de l’agriculture. Compte tenu des difficultés que j’ai pu rencontrer, il faut bien que j’aie une sensibilité agricole ! Elle n’est pas liée au fait que je suis ministre de l’agriculture. Elle s’explique parce que je suis né dans le monde rural, dans un village de 256 habitants, que mes grands-parents étaient agriculteurs et que j’ai fait moi-même un BTS agricole. Si je n’étais pas sensible aux questions agricoles, je ne crois pas que je serais resté aussi longtemps à ce poste, en ayant la volonté à chaque fois d’essayer de trouver des solutions. Voilà pour vos doutes, monsieur Raison !

Mme Pascale Gruny. Il a raison !

M. Stéphane Le Foll, ministre. C’est votre point de vue, madame la sénatrice.

Plusieurs sujets ont été évoqués au cours de ce débat très intéressant.

Vous avez tout d’abord abordé une question d’actualité, à savoir la triple crise porcine, bovine et laitière.

En ce qui concerne la crise du porc, l’actuelle remontée du prix sur le marché européen est liée à une reprise du marché chinois. Je ne m’attribue donc aucun mérite. Néanmoins, au-delà de cette embellie, il est important de consolider notre capacité exportatrice. Il faut surtout, je le dis aux Bretons,…

M. Stéphane Le Foll, ministre. … veiller à consolider la contractualisation. Il est essentiel de mieux organiser notre filière. Les producteurs de porcs français ne doivent pas uniquement être des producteurs de matière première que d’autres se chargent de transformer. Tels sont les enjeux liés à la contractualisation. Il est important de structurer le marché et de se fixer des objectifs précis. C’est primordial. Je l’ai déjà dit et je ne cesserai d’insister sur ce point.

S’agissant de la crise laitière, celle-ci a des conséquences sur la crise bovine : les excédents de production conduisent de nombreux pays à abattre des vaches laitières, ce qui pèse ensuite sur le marché de la viande bovine.

Vous doutez, monsieur Gremillet, du poids de la France à l’échelle européenne et de sa capacité à entraîner les autres États. Mais si notre pays n’avait pas demandé que se réunisse un Conseil extraordinaire en septembre 2015 et mobilisé 500 millions d’euros, je ne sais pas qui l’aurait fait !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Avez-vous entendu un autre pays alerter sur la profondeur de cette crise ?

J’ai dit, en septembre dernier, au commissaire européen que l’aide de 500 millions d’euros ne suffirait pas et ne permettrait pas de répondre au problème posé. Car on peut toujours donner des aides, mais si l’on ne règle pas le problème de la production et de la surproduction, il faudra en redonner d’autres… Un certain nombre de pays considèrent que, face à une crise, il faut leur venir en aide immédiatement. C’est ne pas prendre la dimension structurelle du marché ! Qui l’a dit, sinon la France ?

Au début de cette année, un nouveau Conseil a été réuni durant lequel le commissaire européen a lui-même reconnu qu’il avait fait une erreur en considérant que les prix allaient remonter sur le marché international et que les aides annoncées au mois de septembre allaient suffire. Ce n’est pas moi qui l’ai dit, mais bien lui !

Qui a proposé de s’appuyer – M. Lenoir l’a évoqué – sur l’article 222 du règlement sur l’organisation commune de marché, proposition qui a été acceptée par la Commission européenne ? La France !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je ne dis pas que c’est le ministre de l’agriculture, car cela serait considéré par certains comme une manifestation d’orgueil démesuré de ma part…

La France continue de peser. La preuve en est que j’espère – enfin ! – obtenir à Varsovie, où je vais me rendre jeudi prochain, un engagement de l’Allemagne et de la Pologne sur la mise en œuvre concrète de l’article 222, dont nous avons voulu l’application à l’échelle européenne.

Vous avez dit, monsieur Bizet, que ce n’était pas la peine de refaire le débat sur la fin des quotas. Je respecte ces propos : c’est vrai, ce qui est fait est fait. Mais quand l’opposition vous attaque en vous reprochant de ne rien faire et de ne rien comprendre, il faut bien rappeler que les décisions précédentes peuvent avoir des conséquences qui perdurent, alors même que vous êtes aux responsabilités ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.) Je n’y reviendrai pas, car, encore une fois, vous avez raison, il nous faut avancer.

Avec l’application de l’article 222, nous parviendrons à faire bouger l’Europe et à maîtriser – certes, de façon temporaire – la production laitière, afin de rétablir de nouveau quelque peu l’équilibre entre l’offre et la demande. Nous avons doublé au début de l’année le plafond des interventions à l’échelle européenne, ce qui représente, en six mois, 218 000 tonnes de poudre de lait.

Je rappelle à tous les pays qui sont très attachés à la logique du marché et au libéralisme qu’il faut faire un choix entre le marché et l’interventionnisme ! On ne peut pas invoquer le marché en toute occasion et réclamer une intervention lorsque la situation est mauvaise. On peut toujours continuer à verser de l’argent ; mais si l’on ne parvient pas à mieux équilibrer l’offre et la demande, les prix demeureront bas !

La mise en œuvre de l’article 222 sera utile pour ceux qui seront aux affaires après nous. Nous nous sommes dit, en effet, que d’autres crises surviendraient. Depuis que je suis ministre, nous avons subi trois crises profondes liées à une réorganisation complète de l’agriculture à l’échelle tant européenne que mondiale, laquelle faisait suite à des décisions qu’il faut désormais assumer. C’est très important de le rappeler !

J’espère réussir jeudi prochain, à Varsovie, à faire bouger l’Allemagne. Elle a d’ailleurs commencé à évoluer, vous l’avez rappelé. Mais combien de fois aura-t-il fallu que je dise que nous constations une augmentation de la production et un décalage entre les débouchés espérés et la réalité du marché ? Il aura fallu attendre huit mois pour que les choses bougent !

Je le dis aux représentants de la nation que vous êtes, comme je l’ai fait devant la FNPL, au début de l’année : tandis que je faisais bouger l’Europe, le COPA et le COGECA n’ont pas pris position ! En revanche, Thierry Roquefeuil, président de la FNPL, et Xavier Beulin, président de la FNSEA, se sont mobilisés pour que le COPA et le COGECA acceptent enfin de dire, au bout de sept ou huit mois, qu’il fallait maîtriser la production et recourir à l’article 222. Si cet objectif est atteint, tant mieux ! Mais, je le redis, le mérite en reviendra à la France.

Soyons honnêtes, on ne peut pas dire que, depuis le début de cette crise, la France ne pèse pas. De la même manière, le Président de la République a voulu, dès son élection, le maintien du budget européen de l’agriculture, du Fonds de cohésion et de la politique agricole commune. Le deuxième pilier de la PAC a même été renforcé à hauteur de plus de 60 %. Tout cela, c’est la France qui l’a voulu !

Cessons de rabaisser le poids, la place et le rôle de la France ! Ce faisant, nous nous affaiblissons nous-mêmes. Ne savez-vous pas que les autres pays écoutent ce que nous disons ici ? Si vous dites que la France est petite, faible et qu’elle n’a plus de voix, nos concurrents prendront cela pour argent comptant. Or ce n’est pas vrai, la France a pesé, notamment sur les objectifs de la prochaine politique agricole commune. Nous avons en effet été le seul pays à déposer un texte à l’occasion de cette évaluation à mi-parcours.

Ce texte comprenait trois grands axes, portant sur l’ensemble de la PAC. Aucun autre pays n’a déposé de projet prévoyant clairement les objectifs d’une nouvelle politique agricole commune ! Je vais d’ailleurs organiser prochainement une réunion sur ce sujet.

Quelques pays nous ont dit qu’ils suivraient la France. Je ne vais pas m’en plaindre ! Certains sont dirigés par des gouvernements de gauche – il n’y en a pas beaucoup en Europe –, d’autres par la droite ou une coalition.

Quels sont les trois axes du projet français ? Il faut les rappeler, car c’est la voix de la France qui portera au cours des prochains débats.

On a évoqué les mécanismes contracycliques. Il serait formidable de disposer de dispositifs de type Farm Bill américain, si ce n’est que les États-Unis sont un État fédéral, dont le budget est voté tous les ans par la Chambre des représentants et le Sénat : il peut donc être augmenté une année, et diminué la suivante. L’Europe ne fonctionne pas ainsi puisque son budget est pluriannuel, financé par les contributions de chaque État membre, lequel calcule ensuite son « retour sur investissement ».

Cela nous renvoie au débat actuel chez nos amis britanniques, qui examinent toujours ce qu’ils versent et obtiennent en retour, oubliant que, du fait de la solidarité européenne, ils bénéficient d’un marché et de consommateurs solvables. Tous les États membres en profitent, y compris ceux qui sont les plus puissants et qui exportent. Personne ne dit que le pays qui tire le plus de profits des politiques européennes en matière de solidarité, en particulier des politiques de cohésion, c’est-à-dire de distribution au niveau européen, est le premier exportateur d’Europe : l’Allemagne. Car, en Grèce ou ailleurs, on achète aussi des Volkswagen et des Mercedes… Or on ne le dit jamais !

Son budget étant pluriannuel, l’Union européenne ne peut donc pas mener de politique contracyclique. Si tel était le cas, dès lors que l’on déciderait de fixer à zéro le montant des aides parce que les prix agricoles sont élevés, on ne pourrait pas augmenter ces aides l’année suivante, même avec des prix bas. Il faut donc trouver une autre solution et, surtout, cesser d’établir une comparaison avec le Farm Bill, un dispositif qui, d’ailleurs, coûte cher et ne répond pas à toutes les exigences des agriculteurs américains. Je peux vous le dire, je suis allé aux États-Unis… On dit que les dispositifs européens sont compliqués, mais il faut voir la complexité de leur système assurantiel ! Les agriculteurs doivent remplir un document énorme, indiquer les options qu’ils choisissent en fonction de l’évolution des prix et de la couverture qu’ils souhaitent. Renseignez-vous, et vous verrez que le dispositif américain est très complexe !

J’en viens au premier axe du projet français, qui a trait aux grands enjeux de l’innovation, de l’emploi dans l’agriculture, de l’installation et de l’organisation des filières.

Une partie des aides couplées pourrait ainsi être utilisée pour organiser les filières ; c’est un enjeu très important. Je le dis aux sénateurs français, le véritable débat sur l’avenir de l’agriculture européenne porte sur la conception que nous en avons.

Les pays du nord de l’Europe veulent une agriculture qui s’affranchit des sols et de la terre agricole, puisqu’ils en ont peu, et développent des stratégies d’élevage industriel. Ils produisent beaucoup plus que ce que devrait le leur permettre leur potentiel de surfaces agricoles utiles. Les Pays-Bas, par exemple, nous ont présenté un système d’agriculture verticale, qui consiste à produire des tomates totalement bio dans des bulles stérilisées et sous des lampes allumées jour et nuit. Telle n’est pas notre conception de l’agriculture, dans la mesure où nous disposons, pour notre part, de sols agricoles.

Pour ce qui est de l’élevage, notre conception est mixte. Nous avons, bien sûr, besoin de l’élevage hors sol, mais il nous faut aussi maintenir l’élevage en plein air de vaches, de poulets… C’est tout le débat sur les aides couplées que j’ai conduit au moment de la réforme de la PAC. Les enjeux sont colossaux !

Le premier axe consiste donc à maintenir nos stratégies, à innover et à construire une agriculture créatrice d’emplois.

Le deuxième axe est le verdissement. À cet égard, nous ne devons pas nous tromper : le verdissement doit être appliqué à l’échelle européenne, et de la même manière partout. Et c’est bien la difficulté !

L’Allemagne voulait faire du verdissement une partie du deuxième pilier. Elle avait proposé une dizaine de critères, parmi lesquels figurait la méthanisation. Il s’agissait ensuite de cofinancer ce plan : ceux qui en avaient les moyens faisaient beaucoup de verdissement et augmentaient leur compétitivité ; il y avait donc distorsion de concurrence.

Assurer une logique de verdissement à l’échelle européenne, c’est le meilleur moyen de garantir des normes partagées par tous et d’éviter les distorsions de concurrence que vous dénoncez souvent et qui sont liées à des différences normatives d’un pays à l’autre. C’est un point important.

Il faut aussi prendre en compte la question du réchauffement climatique. La France a proposé, lors de la COP 21, de retenir le projet « 4 pour 1 000 » à l’échelle mondiale. L’idée est de faire des sols agricoles des lieux de stockage du carbone, qui vont permettre d’atténuer la présence de carbone dans l’atmosphère. Nous devons acter ce point.

Les surfaces et les sols agricoles sont, à la fois, un enjeu pour le stockage du carbone et un enjeu agricole et agronomique : plus ils sont fertiles, plus les rendements sont importants.

Sur cette question, j’ai fait des propositions visant à élargir les critères. J’ai aussi préconisé d’intégrer dans les nouveaux critères la couverture des sols, point très important si l’on veut favoriser l’agroécologie et le développement des protéines fourragères, en particulier des légumineuses. Davantage de légumineuses, c’est moins d’azote minéral, donc moins d’importations de gaz ! Nous devons donc mener ces stratégies.

J’en viens à la simplification. J’ai cherché des pistes pour simplifier. Nous avons ainsi proposé des zones homogènes d’objectifs. Il s’agit de définir, dans des régions déterminées, des objectifs en fonction de trois ou quatre critères : couverture des sols, taux de matière organique dans les sols, biodiversité… On n’est plus contrôlé tous les jours sur les moyens qu’on utilise, mais sur les résultats qu’on est capable d’obtenir. On simplifie tout en fixant des objectifs ambitieux en termes écologiques et agroécologiques. Je vais aller au bout de ma logique sur les zones homogènes : le 23 juin, on fera une nuit de l’agroécologie.

Je le répète, on n’est plus contrôlé sur les moyens, on passe un contrat sur des objectifs. Cela simplifie la vie de tout le monde. Il est vrai que les surfaces d’intérêt écologique ne sont qu’une photographie : des haies, des arbres dans les champs. C'est la préservation de l’existant. On peut considérer que les choses peuvent évoluer, qu’une haie peut être remplacée par une autre haie… Par exemple, on développe un GIEE dans les Côtes-d’Armor en cherchant à adapter le parcellaire avec des haies, pour tenir compte de l’évolution des parcelles, des changements de propriétaire, de l’agrandissement quand il existe. Voilà la réalité ! Tant que l’objectif reste le même – préserver des surfaces d’intérêt écologique avec un objectif fixé –, on définit un contrat et on le met en œuvre. Après, des adaptations peuvent être apportées. Je le redis, cela simplifiera énormément les choses. Ce point – les zones homogènes – fait partie des propositions de simplification avancées par la France.

Troisième axe : la résilience de l’agriculture. Comment faire face à la volatilité des prix ?

On peut se répéter tous les jours qu’il ne faudrait pas de volatilité des prix : j’en serais le premier satisfait ! Mais je constate avec vous que, sur cette question, tant hier qu’aujourd'hui – et ce sera aussi vrai demain –, nous sommes tributaires de la situation du marché international.

Si je prends l’exemple des céréales, quand j’ai été nommé ministre en 2012 – il n’y a pas si longtemps que cela ! -, on me disait que le prix des céréales – la tonne coûtait alors 300 euros, voire plus – allait rester à ce très haut niveau, et pendant très longtemps. Résultat des courses : quelques années après, la tonne est à 120 ou 130 euros, sans que personne n’ait rien vu venir… En revanche, les marchés de Chicago, eux, ont anticipé cette baisse. Ce n’est pas le ministre de l’agriculture français qui a décidé de ce prix : il résulte de l’équilibre du marché international.

Comment réagir alors ? Par la résilience, en gardant des mécanismes de régulation et des filets de sécurité – un point qu’on a déjà évoqué – et en opérant une mutualisation globale pour assurer un effet contracyclique. C'est ce qui explique que, souvent, l’État, chaque État, vienne abonder, en plus de sa contribution au budget européen et des aides européennes versées aux agriculteurs, pour colmater les brèches. Car lorsqu’un prix baisse de 20 % ou 25 % en l’espace d’un an ou d’un an et demi, c'est énorme ! Quand s’y ajoute une crise sanitaire – on a évoqué l’influenza aviaire –, c'est aussi l’État qui doit compenser. C’est tout à fait normal.

L’idée est donc d’assurer ces mécanismes de mutualisation. La France a proposé d’intégrer une dimension contracyclique, c'est-à-dire de prévoir une épargne de précaution obligatoire lorsque les prix sont élevés. Une partie des aides du premier pilier pourrait être retenue afin que les agriculteurs disposent d’une épargne garantie, qu’ils pourraient ensuite utiliser, avec une fiscalité allégée bien évidemment, lorsqu’ils rencontrent des difficultés.

Je le dis, car c'est très important de le comprendre. Aujourd’hui, même si les prix sont élevés, les aides sont versées. Les investissements agricoles sont énormes, et c’est au moment où les prix sont bas que le poids des emprunts à rembourser est le plus élevé. L’épargne de précaution permettra à l’agriculteur de conserver une partie de ces aides et d’éviter que certains anticipent le versement de ces dernières pour contracter des prêts, qui pèseront ensuite sur leur trésorerie.

C'est la France qui a proposé ce mécanisme. La Commission européenne et un certain nombre de pays sont déjà venus nous demander de préciser les choses. Le débat est lancé, il a d’ailleurs été ouvert avec la proposition de loi que vous aviez déposée. Comment assurer un système assurantiel ? Comment faire en sorte qu’une épargne soit utilisée pour assurer cet amortissement absolument nécessaire lorsqu’on rencontre des difficultés liées à des aléas climatiques, sanitaires ou économiques ? Lorsqu’on est dans une situation d’extrême gravité, à plus de 30 % de crise, il faut un système mutualisé global.

Ce sont des sujets que nous avons mis sur la table, et ils méritent, selon moi, d’être discutés.

J’ai évoqué une agriculture de type industriel avec un important capital à investir. Si notre pays a un choix stratégique à faire, c'est celui d’utiliser notre capital foncier comme outil de compétitivité. Ce ne sont pas des gros mots, comme certains pourraient le penser, c'est la vérité. Il faut faire en sorte que ce capital foncier soit utilisé à son maximum de potentiel de durabilité et de production, qu’il s’agisse de productions végétales, fourragères ou céréalières.

Nous avons des durées de saisonnalité très longues. Je ne suis rendu en Russie pour y rencontrer des ministres au début du mois de novembre de l’année dernière. Il neigeait là-bas, et la récolte était terminée. Quand je suis rentré, je me suis rendu dans la Sarthe, chez mon ami Pastoureau. Sur des sols « post-récolte céréalière », il y avait encore 1,10 mètre de couverture de sol qui allait être utilisée soit pour stocker du carbone soit pour faire du fourrage.

Je le répète, nous avons une saisonnalité plus importante que les autres. Puisque le soleil est là, la photosynthèse peut nous aider. Nos sols sont une richesse. Moins on investira dans le capital, moins on aura besoin d’argent, et plus on pourra être compétitif. C’est ma conviction, et une certitude. Certains inventent des systèmes où, pour produire, en particulier dans l’élevage, il faut réaliser des investissements colossaux en capital. Il suffit de prendre l’exemple de l’installation des jeunes agriculteurs aujourd'hui : quand il faut investir dans d’importants bâtiments, cela devient impossible. Nous devons avoir une stratégie qui allège l’investissement en capital et utilise notre potentiel foncier.

Regardez ce que fait la Nouvelle-Zélande, qui a l’agriculture la plus compétitive : des investissements minimes en bâtiments et une gestion optimisée des parcelles en herbe et de la production fourragère. Cela vaut pour beaucoup de régions en France. Nous devons créer une stratégie. Comme nous avons un grand pays, nous avons cette potentialité que d’autres n’ont pas. Cela fera partie des atouts pour l’avenir.

Les IGP, les indications géographiques protégées, sont un véritable sujet, très important dans le débat transatlantique. La France ne cédera jamais sur cette question, surtout quand on sait – n’est-ce pas, monsieur César ? – que les Chinois reconnaissent quarante-cinq appellations bordelaises.

M. Stéphane Le Foll, ministre. César est venu, César a vu, César a vaincu !

M. Jean Bizet. Bravo César !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Alors que nous avons 600 IGP en France, j’ai appris – et cela m’a frappé – que la Chine en avait 2 000. Ils ont fait le choix du système de l’indication géographique protégée. Dans le débat mondial, notamment par rapport à d’autres pays, en particulier anglo-saxons, qui refusent cette stratégie, la Chine est un allié de poids. Quand je dis « de poids », ce n’est pas un pays, c'est un continent ! Il est donc très important de garder et de développer cette stratégie.

Je conclus en évoquant le riz, un sujet abordé par Jean-Claude Lenoir. Je connais le débat. On avait mis en place une mesure agroenvironnementale de 300 euros à l’hectare. Environ 70 % des exploitations y ont recours. La production de riz est très importante pour éviter la salinisation de la Camargue. Il s’agit de trouver un équilibre entre la production économique et les grands enjeux environnementaux. On peut essayer d’y ajouter quelques éléments. Sur ce sujet, nous continuerons à avancer.

Ce débat sur l’avenir et l’organisation de la politique agricole commune était utile. Il est très important de continuer ensemble, au-delà des sujets polémiques et au-delà même de l’actualité, à penser l’avenir. C'est aussi comme cela que nous serons en mesure de faire face aux difficultés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – MM. Michel Le Scouarnec, Jacques Mézard et Raymond Vall applaudissent également.)

Mme la présidente. Nous en avons terminé avec le débat sur le thème : « Restructuration et modernisation des principales filières agricoles dans le cadre de la réforme à mi-parcours de la PAC ».

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Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 8 juin 2016, à quatorze heures trente et, éventuellement, le soir :

Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification de l’accord de Paris adopté le 12 décembre 2015 (n° 614, 2015-2016) ;

Rapport de M. Christian Cambon, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 628, 2015-2016) ;

Texte de la commission (n° 629, 2015-2016) ;

Avis de M. Jérôme Bignon, fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (n° 652, 2015-2016).

Proposition de résolution européenne relative au régime de sanctions de l’Union européenne à l’encontre de la Fédération de Russie, présentée en application de l’article 73 quater du règlement (n° 643, 2015-2016) ;

Rapport de M. Robert del Picchia et Mme Josette Durrieu, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 659, 2015-2016) et texte de la commission.

Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi réformant le système de répression des abus de marché (n° 612, 2015-2016) ;

Rapport de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission mixte paritaire (n° 611, 2015-2016).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures quinze.)

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD