M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Éliane Assassi. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Le 2 juillet, le député du groupe La République En Marche Olivier Véran a fait adopter en catimini par la majorité de la commission des lois de l’Assemblée nationale un amendement visant à supprimer toute référence explicite à la sécurité sociale dans la Constitution.

Faut-il rappeler que ce pilier de notre société, issu du programme du Conseil national de la Résistance, y a été inscrit par l’Assemblée constituante les 22 mai et 22 août 1946 ?

Cet amendement tend à remplacer les mots : « sécurité sociale » par les mots : « protection sociale ». Il porte en lui la destruction de ce grand service public solidaire et protecteur de notre population. Il porte en lui la destruction de ce système qui « vise à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail » et « est financé par les cotisations des employeurs et des salariés, géré paritairement par les syndicats de travailleurs et les organismes patronaux ».

Monsieur le Premier ministre, vous le savez bien, les Françaises et les Français sont très attachés à notre système de sécurité sociale, malgré les nombreuses coupes budgétaires imposées par les gouvernements successifs. La « sécu » est un véritable trésor national, un joyau de notre patrimoine, un pilier central de la Nation. Je vous le dis solennellement, monsieur le Premier ministre : nous saurons nous mobiliser pour empêcher sa disparition ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la sénatrice, vous évoquez votre attachement et celui de nos compatriotes à la sécurité sociale. Permettez-moi de vous dire que je le partage, comme d’ailleurs tous ceux qui savent combien cette formidable construction, progressive, de solidarité a refondé le socle de notre pays après la Seconde Guerre mondiale.

Vous avez indiqué qu’un député avait, dans l’optique de la révision constitutionnelle à venir, présenté un amendement. Je respecte trop les parlementaires…

M. Roger Karoutchi. Bien sûr ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Édouard Philippe, Premier ministre. … pour formuler un quelconque commentaire ou avis sur cet amendement. Mais je voudrais vous répondre très clairement sur ses motivations : il ne s’agit en aucune façon – je crois que, au fond de vous-même, vous le savez – de remettre en cause la sécurité sociale. (M. Robert del Picchia applaudit.)

Je veux lever tous les malentendus, toutes les incompréhensions, peut-être aussi toutes les peurs que certains – ce n’est pas votre cas, madame Assassi – voudraient parfois susciter dans le débat public. Il s’agit simplement, tout en préservant la sécurité sociale, de faire en sorte que la loi puisse également prendre en compte des domaines qui n’en relèvent pas aujourd’hui.

Imaginez que, l’année prochaine, à l’occasion de la réforme des retraites, nous voulions compléter le dispositif des retraites actuel par un dispositif adapté à la dépendance.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Techniquement, un tel dispositif ne relèverait pas de la sécurité sociale.

Mme Éliane Assassi. C’est bien là où nous ne sommes pas d’accord !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Notre objectif est de faire en sorte que la sécurité sociale soit préservée, évidemment, et au-delà renforcée, pour que la solidarité qui lie les Françaises et les Français trouve de nouvelles richesses, de nouvelles forces pour accomplir sa mission initiale.

Ne mésinterprétons pas la volonté de parlementaires d’essayer d’améliorer ce qui est au cœur de notre cohésion nationale, ce que l’ensemble des Français considèrent comme un élément constitutif de leur identité. Peut-être m’exprimé-je un peu solennellement, mais il ne s’agit nullement d’une remise en cause de la sécurité sociale. Il s’agit de faire en sorte que ce qui nous lie et nous permet d’accompagner ceux de nos concitoyens qui en ont besoin puisse être plus fort et plus durable ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour la réplique.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le Premier ministre, comment accepter l’idée même que des députés…

M. Michel Savin. Des députés En Marche !

Mme Éliane Assassi. … veuillent enterrer notre sécurité sociale au détour de la présentation furtive d’un amendement ?

M. Philippe Dallier. Vous n’avez pas l’impression d’exagérer un peu ?

Mme Éliane Assassi. Cet amendement a d’ailleurs été retiré, devant le tollé qu’il a provoqué.

Monsieur le Premier ministre, si l’on veut préserver la sécurité sociale, on peut la moderniser, la développer, mais on ne touche pas à ce qu’Ambroise Croizat qualifiait, à l’occasion de la création de la sécurité sociale, de « loi humaine et de progrès » ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Donc, vous êtes d’accord avec nous !

organisation du travail législatif

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Patrick Kanner. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Il n’y a pas si longtemps, lorsqu’une loi d’envergure arrivait devant le Parlement, tout était fait pour que les élus de la Nation s’en emparent, en débattent et l’amendent dans les meilleures conditions. Ce temps est désormais révolu ; permettez-nous de le regretter.

En ce temps, nous examinions une loi d’envergure pendant deux, voire trois semaines. Je prendrai l’exemple de la loi Macron, une belle loi, vous en conviendrez ! Son examen avait pris le temps parlementaire nécessaire : trois semaines à l’Assemblée nationale et trois semaines au Sénat en première lecture, de très nombreux amendements, des heures utiles de débat en commission, le tout avec une promulgation à peine huit mois après sa présentation en conseil des ministres et un ministre qui, à l’époque, avait goût au débat parlementaire…

Monsieur le Premier ministre, avec votre gouvernement, dans le laps de temps consacré naguère à la discussion de la loi Macron, nous devons désormais examiner trois textes de la même importance : le projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable, voilà deux semaines, le projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, la semaine prochaine, et le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique dans la foulée, sans parler du projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, actuellement en débat.

Sur des sujets fondamentaux, vous donnez au Sénat trois fois moins de temps pour débattre !

Nous nous plaignons non pas d’un trop-plein, mais d’un « trop mal ». Nous ne voulons pas moins travailler ; nous voulons mieux travailler, parce que nous avons le souci de faire des lois de qualité et bien écrites pour les Français : c’est l’honneur du bicamérisme.

Monsieur le Premier ministre, après les dysfonctionnements du calendrier législatif de ce printemps, allez-vous établir en septembre, puis en janvier, un programme équilibré de travail et vous y tenir, pour le bon fonctionnement du Parlement, afin que le temps nécessaire au débat et à l’écriture de la loi soit respecté ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur la qualité et l’organisation du travail parlementaire, sur le temps qu’il est nécessaire d’accorder au débat pour que le Parlement puisse élaborer et voter la loi, conformément au rôle qui lui est confié par la Constitution.

Vous indiquez finement qu’il fut un temps où tout était parfait et qu’aujourd’hui tout est sombre. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. Roger Karoutchi. Attendons la suite.

M. Martial Bourquin. La dérision au lieu d’arguments !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. C’est ce que j’ai cru comprendre de votre question, monsieur le président Kanner.

En 2017, les Français nous ont, me semble-t-il, indiqué qu’ils voulaient une forme de rupture avec ce qui avait jusqu’alors prévalu. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Gérard Longuet. Ils ne voulaient pas de Marine, c’est tout !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Ils nous ont dit qu’il fallait une forme de rupture, non pas avec l’essentiel de ce qu’est notre République, avec le bicamérisme, avec le rôle du Parlement, mais avec l’incapacité de transformer notre pays, peut-être en assumant et en prenant des décisions qui, pendant longtemps, ne l’avaient pas été.

En tout cas, c’est comme cela que j’ai, pour ma part, interprété l’élection du Président de la République et la très forte majorité donnée, à l’Assemblée nationale, à ceux qui soutenaient son programme.

M. Jean-Marc Todeschini. Lequel consistait, par exemple, à ne pas toucher aux retraites ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Il y a beaucoup à faire, en matière d’accès à l’enseignement supérieur, de droit du travail, de réforme du ferroviaire, de budget… Nous avons même parfois à prendre en compte des éléments auxquels nous ne nous attendions pas. Je remercie à cet égard le Sénat d’avoir su, en fin d’année dernière, adapter son calendrier pour étudier le projet de loi de finances rectificative qu’il a fallu déposer en raison de l’annulation d’un certain nombre de mesures par le Conseil constitutionnel et des coûts afférents.

Nous avons donc beaucoup de travail. Nous assumons le fait que le rythme législatif soit intense. Les débats le sont également, que ce soit à l’Assemblée nationale ou au Sénat. Sur tous les textes qui ont été présentés, ils ont été riches. Je ne crois pas que l’on puisse dire – mais peut-être avons-nous une différence d’appréciation sur ce point – que ces débats ont été tronqués. Ils auraient sans doute pu durer plus longtemps –c’est le propre des débats –, mais l’important est de savoir si les arguments ont bien pu être échangés, mûris, pesés. Mon sentiment est que ceux qui voulaient faire valoir des positions ont pu le faire, heureusement !

La question du volume horaire des débats est évidemment importante, mais je crois que celle de leur qualité l’est plus encore. Je serai, comme aujourd’hui, toujours disponible pour y participer. Permettez-moi de saluer, sans ironie aucune, la qualité du travail législatif effectué dans cet hémicycle. M. le président du Sénat peut en témoigner : je la souligne systématiquement. Je me plais à penser que la qualité de ce travail permettra d’enrichir encore l’action du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour la réplique.

M. Patrick Kanner. Monsieur le Premier ministre, vous avez employé le mot « rupture ». S’il s’agit, dans votre esprit, d’instaurer un parlementarisme de plus en plus rationalisé face à un pouvoir exécutif de plus en plus débridé, nous ne nous comprenons effectivement pas ! Nous vous demandons de respecter le Parlement, son travail d’enrichissement. En tout cas, vous ne m’avez pas répondu sur le calendrier des travaux à venir ; je le regrette. Merci néanmoins de reconnaître la qualité du travail de la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

effondrement du marché des moteurs diesel

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

M. Alain Fouché. Ma question porte sur les mesures que compte prendre le Gouvernement pour soutenir et accompagner les entreprises qui subissent l’effondrement du marché de la motorisation diesel.

Si la motorisation diesel a longtemps été favorisée par les pouvoirs publics, sa part dans la vente de véhicules neufs et d’occasion diminue fortement en Europe et en France. Les inconvénients du diesel d’ancienne génération pour l’environnement et la santé ont conduit les pouvoirs publics à mettre fin à une fiscalité avantageuse. Plusieurs grandes villes, comme Paris, se sont engagées à sortir du diesel. Le 15 juin dernier, le PDG de l’alliance Renault-Nissan a annoncé vouloir diviser par deux son offre de véhicules roulant au diesel d’ici à 2022.

Si l’on ne peut qu’adhérer à l’objectif de préservation de l’environnement, ce « diesel bashing » semble aujourd’hui hermétique à toute innovation, notamment à celle de l’équipementier Bosch qui permettra de réduire les émissions d’oxydes d’azote des moteurs diesel à un niveau bien inférieur à la future norme prévue pour 2020.

En août 2017, les conclusions de la mission sur les conséquences industrielles et sociales du déclin des motorisations diesel étaient claires : « Bien que le diesel soit plus favorable que l’essence au regard des objectifs d’émission de CO2 et que les moteurs diesel les plus récents soient beaucoup moins polluants […] la chute du diesel est inéluctable. » La mission préconisait une action volontariste des pouvoirs publics pour accompagner la reconversion des sites.

En France, le diesel représente 12 000 emplois. Dans mon département, la Vienne, deux entreprises, implantées sous l’impulsion de René Monory, sont concernées : Fonderie du Poitou Fonte et Saint-Jean Industries, situées dans le Châtelleraudais. Cette situation ne manque pas d’inquiéter les élus et le président de la communauté d’agglomération, M. Abelin. Près de 1 000 emplois sont en jeu.

Mon collègue sénateur de la Vienne Yves Bouloux et moi-même souhaiterions savoir quel est l’avenir du diesel en France et connaître les mesures pouvant être prises pour soutenir et accompagner la filière industrielle du diesel. Enfin, quels sont les partenariats envisagés avec les constructeurs et les régions pour trouver des orientations, en termes de reconversion, permettant de préserver l’outil de travail et le savoir-faire, quasiment unique en Europe, de ces ouvriers ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Bruno Le Maire, ministre de léconomie et des finances. Monsieur le sénateur Alain Fouché, il n’y a aucune raison de stigmatiser le diesel, ni de le favoriser par rapport à la motorisation essence. Le ministre d’État Nicolas Hulot et moi-même avons donc pris, sous l’autorité du Premier ministre, la décision, que nous assumons, d’aligner la fiscalité du diesel sur celle de l’essence. Je le répète, il n’y a aucune raison de favoriser un carburant plutôt qu’un autre : chacun a ses défauts en termes d’émissions de particules fines ou de CO2. C’est une mesure de justice, d’efficacité, conforme à nos objectifs environnementaux. Le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l’économie et des finances travaillent main dans la main à cette politique énergétique.

La première réponse est d’accompagner les industries concernées, afin de protéger les 12 000 emplois susceptibles d’être menacés, tout le savoir-faire, toutes les entreprises, toutes les usines, à l’instar de la Fonderie du Poitou Fonte ou de l’usine Bosch de Rodez. Tel est l’objet du plan pour le soutien à la filière que j’ai présenté le 7 décembre dernier. Le maître mot est diversification. Il faut aider ces entreprises à se diversifier. Chez Bosch, à Rodez, 1 800 emplois sont concernés ; dans votre département, il s’agit de 1 000 emplois. L’État accompagne et continuera d’accompagner la filière diesel. S’agissant plus spécifiquement de la Fonderie du Poitou Fonte, la difficulté est qu’elle a quasiment un client unique, Renault. J’interviendrai aussi auprès de Renault pour me faire l’avocat de cette entreprise et faire en sorte que nous trouvions ensemble des solutions pour aider à son développement et à sa diversification.

Il y a un aspect plus général : le soutien à l’innovation et le développement de technologies nouvelles. C’est l’objet du fonds pour l’innovation industrielle, doté de 10 milliards d’euros issus de cessions d’actifs. C’est par l’innovation que nous trouverons les meilleures réponses pour soutenir notre industrie. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

état des forces de sécurité

M. le président. La parole est à M. François Grosdidier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Grosdidier. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre, car elle porte à la fois sur l’intérieur, la justice et le budget.

Les policiers et les gendarmes vont mal. Les suicides, les manifestations de policiers en colère ont révélé un malaise aux causes multiples. D’où l’idée de notre collègue Gérard Longuet, relayée par notre président Bruno Retailleau, de constituer une commission d’enquête sénatoriale. Elle a travaillé cinq mois, sous la présidence de Michel Boutant, dans le consensus le plus large, sans aucun présupposé, en toute objectivité.

En cinq mois d’investigations, nous avons pu constater l’étendue et la profondeur du malaise. Nous en avons aussi identifié les causes : insuffisance de moyens, locaux vétustes et même indignes, véhicules usés jusqu’à la corde, mettant en danger les personnels, équipements insuffisants.

En termes de moyens humains, se posent la question des effectifs, mais surtout celle de la répartition du temps : les deux tiers sont « mangés » par la procédure pénale, il ne reste qu’un tiers pour l’opérationnel. Il nous est également apparu un problème profond de management, surtout dans la police. Nos forces de sécurité sont sollicitées comme jamais : 22 millions d’heures supplémentaires non payées et pas récupérables, des vies de famille rendues impossibles, des risques physiques accrus, du terrorisme aux violences quotidiennes, doublés de risques juridiques. On le voit encore à Nantes, où certains présument la bavure et commettent des violences urbaines.

Policiers et gendarmes sont en quête de sens et de reconnaissance : de reconnaissance, quand ils ne sont soutenus ni par leur hiérarchie ni par les magistrats ; de sens, quand ils pédalent sur un vélo sans chaîne, faute de réponse pénale adaptée.

Nous proposons des solutions : un rattrapage en investissement, à portée du budget de l’État ; des révolutions culturelles en termes de management dans la police, de procédure et de réponse pénales, qui ne demandent que de la volonté politique. Avez-vous, monsieur le Premier ministre, cette volonté ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste. – Mme Nathalie Delattre applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur François Grosdidier, votre assemblée a rendu publiques, avant-hier, les conclusions de la commission d’enquête qu’elle a consacrée à l’état des forces de sécurité intérieure.

Le ministre d’État, ministre de l’intérieur, avait lui-même été entendu par cette commission d’enquête. Vous avez eu l’occasion d’analyser avec lui les causes de ce malaise. J’insisterai sur trois d’entre elles : la sollicitation croissante des policiers et des gendarmes dans le contexte de la menace terroriste, bien sûr ; le sentiment d’une perte de sens devant la lourdeur de certaines procédures ; enfin, la diminution régulière des effectifs entre 2007 et 2012, avec la suppression de 12 500 postes de policier ou de gendarme. (Mme Catherine Procaccia sexclame.)

Pour répondre à ce malaise qui, bien entendu, ne remonte pas à une année, le Gouvernement a donné une priorité très marquée à la sécurité. Permettez-moi de souligner que cela faisait longtemps qu’un gouvernement n’avait pas fait autant dans ce domaine. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe socialiste et républicain.)

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Depuis un an, des engagements financiers ont été pris. Les crédits consacrés à la seule police nationale, par exemple, ont augmenté, en un an, de 2 %.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Un effort particulier a été réalisé en matière d’investissements immobiliers, avec 196 millions d’euros de crédits par an pendant trois ans pour la police et 100 millions d’euros pour la gendarmerie, c’est-à-dire 9 % de plus pour l’une et 5 % de plus pour l’autre.

Par ailleurs, sur le plan humain, il sera créé 10 000 postes supplémentaires de policier et de gendarme au cours du quinquennat.

M. le président. Il va falloir conclure !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Nous avons mis en place la police de sécurité, nous avons créé trente quartiers de reconquête républicaine (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains), nous avons renforcé les effectifs de gendarmerie.

M. le président. Il faut conclure, madame la ministre !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Nous avons accéléré le rythme des dotations numériques pour la gendarmerie et la police. La garde des sceaux est en train de préparer…

M. le président. Il faut vraiment conclure !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. … un projet de loi simplifiant la procédure pénale ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. François Grosdidier, pour la réplique.

M. François Grosdidier. Madame la ministre, je regrette que M. le Premier ministre ne m’ait pas répondu. Vous nous confirmez ne pas avoir pris la mesure du problème. (Absolument ! sur des travées du groupe Les Républicains.) Le problème, ce n’est pas ce que droite et gauche ont fait ou n’ont pas fait avant vous ! Vous êtes aux responsabilités, la situation est urgente et des phénomènes nouveaux apparaissent. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe socialiste et républicain. – Mmes Nadia Sollogoub et Nathalie Delattre applaudissent également.)

La réforme de la procédure pénale que vous nous annoncez, ce n’est qu’un dixième de ce qu’il faudrait faire ! Vous dites vouloir renouveler le parc de véhicules de la gendarmerie, mais vous ne budgétisez que le nécessaire pour maintenir la moyenne d’âge à huit ans, en annulant 40 % des acquisitions…

M. le président. Il faut conclure !

M. François Grosdidier. … et en gelant les décisions.

Par conséquent, vous êtes très, très loin du compte. Il faut espérer que la prise de conscience se fera et que vous prendrez enfin les mesures nécessaires ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Nathalie Delattre et Gisèle Jourda applaudissent également.)

surveillance de la zone économique maritime

M. le président. La parole est à M. Gérard Poadja, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. Gérard Poadja. Ma question s’adresse à Mme la ministre des armées.

Avec près de 1,8 million de kilomètres carrés, la zone économique exclusive, la ZEE, de la Nouvelle-Calédonie représente plus de 15 % de la zone économique exclusive totale de la France.

Cet immense espace maritime, d’une biodiversité exceptionnelle, qui abrite la deuxième plus grande barrière de corail au monde, inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, est de plus en plus la proie d’actes de pêche illégale commis par des pirates venus d’Asie.

Depuis mai 2016, 73 embarcations illégales ont été identifiées, 20 arraisonnées, 9 déroutées, et près de 34 tonnes d’holothuries ont été saisies. C’est à un véritable pillage des ressources halieutiques du pays que nous avons dû faire face.

Pour endiguer les actions de pêche clandestine, nous disposons, en tout et pour tout, d’une frégate de surveillance, de deux patrouilleurs P400 hors d’âge et d’un bâtiment multimissions B2M. Le mois dernier, lors de l’examen du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025, vous avez indiqué que ces deux patrouilleurs, vieux de près de quarante ans, seraient retirés du service actif en 2020. Vous avez également confirmé leur renouvellement à l’horizon 2022-2024.

Je vous le dis, il serait inconcevable de laisser l’espace maritime calédonien en proie aux pillages pendant deux ou trois ans de plus, en mettant ainsi à mal notre souveraineté.

Madame la ministre, ma question est la suivante : comment comptez-vous assurer la surveillance et la protection des eaux territoriales non seulement calédoniennes, mais aussi françaises, notamment entre 2020 et 2022 ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – Mme Viviane Malet et M. Gérard Longuet applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des armées.

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des armées. Monsieur le sénateur Poadja, le Gouvernement mesure parfaitement les menaces qui pèsent sur les zones économiques exclusives d’outre-mer et, singulièrement, sur celle de la Nouvelle-Calédonie.

C’est pour cette raison que, dans le cadre de la loi relative à la programmation militaire, nous avons avancé de deux ans l’arrivée des patrouilleurs et, de surcroît, augmenté leur nombre de deux unités par rapport à ce qui était prévu initialement, le faisant ainsi passer de dix-sept à dix-neuf. Ce seront onze bâtiments qui auront été livrés en 2025, renouvelant en profondeur cette composante de la défense qui avait pâti des arbitrages budgétaires antérieurs. (Exclamations sur des travées du groupe socialiste et républicain.) Le premier des six nouveaux patrouilleurs qui seront livrés à partir de 2022 sera déployé prioritairement en Nouvelle-Calédonie.

Ce qui vous inquiète, c’est bien sûr le retrait des deux derniers patrouilleurs P400 basés à Nouméa. Je confirme qu’ils seront retirés du service en 2020, en raison de leur état et du faible stock de pièces de rechange disponible. Cependant, les forces armées présentes en Nouvelle-Calédonie resteront parfaitement en mesure de protéger la ZEE pendant cette période transitoire allant de 2000 à 2022. Elles disposent notamment d’une frégate de surveillance, d’un bâtiment multimissions, de deux avions de surveillance maritime de type Falcon 200 et, en complément, de moyens d’observation spatiale permettant d’affiner la surveillance maritime des vastes espaces de souveraineté de la France et de cibler les interventions.

Enfin, je souligne que la France renforce sa relation avec ses partenaires du Pacifique, la Nouvelle-Zélande et l’Australie. Nous poursuivrons et amplifierons une coopération qui permet déjà de contribuer à la surveillance de la ZEE de la Nouvelle-Calédonie. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche. – M. Robert del Picchia applaudit également.)

feuille de route pour l’économie circulaire