Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Cédric O, secrétaire dÉtat. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

M. Vincent Capo-Canellas. Ces propositions nous rappellent que la question centrale est de savoir comment le secteur aérien peut mener à bien sa mutation technologique et réduire son empreinte carbone. Il ne souhaite que cela ! Ce secteur, dans sa relation au monde et à l’environnement – il vit en l’air, si j’ose dire –, est soucieux d’innovation technologique, de réduire son impact et les nuisances qu’il occasionne, par exemple pour les riverains. Il a toujours accompli des mutations, mais celle-ci représente une marche importante.

Les conclusions des Assises nationales du transport aérien montrent que nous taxons le secteur du transport aérien de 700 millions à 800 millions d’euros de plus que nos grands homologues européens. Arrêtons de dire que ce secteur n’est pas taxé, au prétexte que le kérosène ne le serait pas. Cette non-taxation du kérosène répond à des conventions internationales, sur lesquelles il nous faudra sans doute revenir. Pour le moment, cette question dépasse le cadre national. Le transport aérien paie plus de 2,3 milliards d’euros de taxes. Il va même jusqu’à financer son administration et son contrôle. La DGAC est entièrement financée par les compagnies aériennes, ce qui n’a pas d’équivalent dans d’autres secteurs.

Nous avons voté l’année dernière une écocontribution. En parallèle, avec le rapporteur général, nous avions proposé de diminuer d’autres taxes, par souci de cohérence au regard de la compétitivité du secteur.

Nous devons poursuivre le dialogue et essayer de mener à bien cette transformation, qui passera par des mutations technologiques. Le secteur aérien a la volonté farouche d’aller en ce sens. Mais, comme l’a dit à l’instant M. le rapporteur général, il est à terre : le trafic, au niveau national, s’élèvera, au mois de novembre, à 10 % du trafic par rapport à l’année dernière, à la même période. Dans nos régions, l’emploi et la connectivité sont ainsi mis à mal. Les difficultés sont immenses.

En sortie de crise, au moment du rebond, nous devrons nous interroger sur notre relation au monde et sur les potentiels de croissance dont nous disposons. L’industrie du transport aérien en fait partie, parce que, là, nous avons des avantages compétitifs. Faisons attention à ne pas les diminuer nous-mêmes. Je crois à la transition, non par la décroissance du trafic, mais par sa mutation technologique et grâce à des dispositifs d’encouragement.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Si le transport aérien est en ce moment quasiment à l’arrêt, ce n’est pas lié au prix des billets. J’ai beaucoup travaillé sur le secteur ferroviaire. Je peux vous dire que, dans une première étape de la crise, le secteur aérien a largement été pris en compte. Peut-être faudra-t-il y revenir, parce que la situation est extrêmement grave, mais le tout premier plan de relance a immédiatement ciblé le secteur aérien.

Monsieur le rapporteur général, monsieur le secrétaire d’État, monsieur Capo-Canellas, je vous ai écoutés. Aucun d’entre vous n’a répondu à l’argument de justice sociale. Actuellement, quand je prends mon véhicule diesel pour aller bosser, je ne profite pas d’une convention internationale comme la convention de Chicago de 1944 qui m’exonère de toute taxe ; en revanche, si je prends l’avion pour aller en vacances, je suis exonéré !

On dit que le secteur aérien est très taxé, certes, mais ces taxes permettent de faire fonctionner les aéroports. Il ne faut pas les comparer avec la TICPE, qui, elle, abonde le pot général du budget.

Toujours concernant cet argument de justice, vous n’avez pas non plus réagi sur le fait que le secteur de l’aviation d’affaires, des jets privés, a été oublié en 2020. Vous n’en dites pas un mot !

Cela étant, je vais faire un effort, car il est compliqué d’imposer une nouvelle taxe dans une période de crise : je retire mon amendement n° I-730, mais je souhaite que l’amendement de repli n° I-939 de M. Dantec soit adopté. Je dirai moi aussi qu’il y va de l’honneur du Sénat ! Ce serait un geste clair envoyé aux Français qui leur montrerait que cet oubli est réparé. Celui qui achète un trajet à 10 000 euros peut contribuer de quelques centaines d’euros !

Mme la présidente. L’amendement n° I-730 est retiré.

La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Lorsqu’on a parlé de la contribution à la lutte contre le changement climatique, j’ai entendu plusieurs fois dans cet hémicycle : « mouvements sociaux », « bonnets rouges », « gilets jaunes ». Mais pourquoi y a-t-il ces mouvements sociaux ? C’est parce qu’il y a une grande défiance envers ces politiques de gribouille, sans justice sociale.

On vient de nous refuser, deux fois de suite, de taxer le luxe et ses symboles mêmes : les paquebots de croisière et les jets privés. Voilà des gens qui échappent à cette contribution au climat. Comment voulez-vous faire entendre à une personne qui prend son véhicule diesel tous les jours qu’elle va payer une taxe supplémentaire sur son gazole si ceux qui jouissent de grands avantages n’en paient pas ? C’est impossible !

Mme Cécile Cukierman. Ce n’est pas comme ça qu’on va régler les problèmes des gilets jaunes !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-938 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-939.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 15 - Amendements n° I-730, n° I-938 rectifié et n° I-939
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2021
Article additionnel après l'article 15 - Amendements n° I-932, n° I-253, n° I-252, n° I-1218, n° I-928 et n° I-320 rectifié

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° I-469 rectifié est présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, MM. Daubresse et Lefèvre, Mmes V. Boyer et Gruny, M. Paccaud, Mmes Goy-Chavent, Dumas, M. Mercier et Micouleau, MM. Laménie, Charon et Vogel, Mme Deromedi, MM. Milon, Meurant, Genet, E. Blanc, Bascher et Brisson, Mmes Imbert et Delmont-Koropoulis et MM. Savary et Cuypers.

L’amendement n° I-500 rectifié bis est présenté par MM. Bizet, Bonhomme et Bonne, Mme Boulay-Espéronnier, MM. Bouloux, Chaize, Chatillon, de Legge et de Nicolaÿ, Mme Demas, MM. Duplomb et B. Fournier, Mme F. Gerbaud, MM. Grand et Gremillet, Mmes Jacques et Joseph, MM. Longuet et Piednoir, Mme Raimond-Pavero et M. Sol.

L’amendement n° I-774 rectifié bis est présenté par MM. Capo-Canellas, J.M. Arnaud et Prince, Mme Billon, MM. S. Demilly et Duffourg, Mme Férat, M. Levi, Mme Létard, MM. Le Nay et P. Martin, Mmes de La Provôté, Saint-Pé, Sollogoub et Vermeillet et M. Canevet.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 1609 quatervicies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le II est ainsi rédigé :

« II. – La taxe est due par le passager ou le donneur du transport de fret. Le redevable paie la taxe entre les mains de l’entreprise de transport aérien en sus du prix de la prestation acquitté par le client. L’entreprise de transport aérien public reverse le montant de la taxe perçue au service chargé de recouvrer la taxe dans les conditions prévues au IV et V du présent article. » ;

2° À la seconde phrase du dernier alinéa du IV, le mot : « redevables » est remplacé par les mots : « entreprises de transport aérien public » ;

3° Au VI et à la seconde phrase du VII, les mots : « pour les passagers » sont remplacés par les mots : « par les passagers ».

II. – L’article 302 bis K du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du 1 du I après les mots : « est due par », sont insérés les mots : « les passagers et les donneurs d’ordre de fret transportés par » ;

2° Au 4 du même I, après les mots : « dérogation au 1, », sont insérés les mots : « les passagers et le fret transportés par » ;

3° Au début du premier alinéa du 2 du II, sont insérés les mots : « Les redevables paient la taxe entre les mains des entreprises de transport aérien » ;

4° À la seconde phrase du 3 du même II, le mot : « redevables » est remplacé par les mots : « entreprises de transport aérien » ;

5° Le 1 du VII est ainsi rédigé :

« 1. Les passagers et le fret des vols mentionnés au 4 du I sont soumis à une contribution destinée à couvrir les coûts des missions d’intérêt général assurées par l’administration française de l’aviation civile à l’occasion de l’utilisation de l’aérodrome où les entreprises de transport aérien effectuent ces vols. »

III. – La perte de recettes résultant pour l’État de I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jérôme Bascher, pour présenter l’amendement n° I-469 rectifié.

M. Jérôme Bascher. Il s’agit d’un excellent amendement de M. Bazin, qui vise à ce qu’on cesse de mettre de la TVA sur les taxes. On ne sait plus jusqu’où on va aller ! Ainsi, on a des taxes aéroportuaires qui sont soumises à la TVA, ce qui rend difficile de savoir ce qui est déductible. Ce système est totalement kafkaïen. Un peu de clarté fiscale serait bienvenue !

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Bouloux, pour présenter l’amendement n° I-500 rectifié bis.

M. Yves Bouloux. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour présenter l’amendement n° I-774 rectifié bis.

M. Vincent Capo-Canellas. Payer de la TVA sur les taxes, voilà l’illustration même de cette taxation du secteur ! C’est singulier ! Nous avions voté cet amendement l’année dernière, mais l’Assemblée nationale lui avait réservé un sort peu enviable.

Nous ne devons pas opposer compétitivité et transition écologique. Il faut garantir les deux et, aussi, préserver l’emploi et la connectivité dans les régions.

S’agissant de l’aviation d’affaires, je pense qu’il ne reste que deux ou trois compagnies en France ; en disant trois, je suis optimiste. Pour des raisons de compétitivité, elles sont de moins en moins nombreuses.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. L’avis est favorable, dans la droite ligne des mesures votées les années précédentes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Cédric O, secrétaire dÉtat. Nous sommes là à front renversé par rapport au sujet précédent.

Le Gouvernement ne souhaite pas diminuer le montant des taxes pesant sur les billets d’avion, compte tenu des enjeux environnementaux évoqués. En outre, le coût budgétaire d’une telle mesure ne serait pas négligeable.

Enfin, je le dis pour Mme Cukierman, je ne suis pas en mesure de garantir complètement la robustesse du dispositif, qui risque d’être considéré par la Commission européenne comme un contournement visant à limiter les ressources propres de l’Union européenne. L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Non seulement on continue d’exonérer l’aviation d’affaires, et de fait ceux qui ont le plus de moyens, mais on va aussi jusqu’à vouloir baisser le coût du transport aérien pour tous. Voilà un signal qu’il faudra assumer !

Si je peux me permettre, je constate une légère manipulation sémantique. Ces « taxes » ne sont là que pour financer les services nécessaires pour accéder à l’avion. En fait, il s’agit d’une prestation, ce qui n’a absolument rien à voir avec les taxes qui abondent le budget de l’État ou des régions. Il ne s’agit que d’un coût nécessaire. Instaurer une TVA sur un coût nécessaire, voilà qui est tout à fait logique. Dire que ces coûts sont des taxes, ce n’est pas vrai. Nous parlons d’une prestation, et le terme « taxes » n’est qu’une commodité de langage qui ne correspond pas à la réalité.

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

M. Jérôme Bascher. Hélas, monsieur Dantec, j’aimerais bien que vous ayez raison, mais vous avez tort. Ce n’est pas parce que vous pensez ainsi qu’il s’agit d’un abus de langage. C’est de la fiscalité ! C’est comme ça qu’elle est reconnue au niveau de l’Union européenne. Une taxe, c’est une taxe, point barre ! La définition des taxes et des impôts est très claire. La taxe aéroportuaire en fait partie.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-469 rectifié, I-500 rectifié bis et I-774 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 15 - Amendements n° I-469 rectifié, n° I-500 rectifié bis et n° I-774 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2021
Article 15 bis (nouveau)

Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-932, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Parigi, Fernique et Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Gontard et Labbé, Mme Poncet Monge et M. Salmon, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 302 bis ZB du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« Le tarif de la taxe est fixé à :

« - 21,96 € par 1 000 kilomètres parcourus par les poids lourds, autocars et autres véhicules à 3 essieux et plus ;

« - 7,32 € par 1 000 kilomètres parcourus pour les autres véhicules. » ;

2° La première phrase du deuxième alinéa est supprimée ;

3° Les quatrième à dernier alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« Le produit de la taxe est affecté à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France. »

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. L’abandon de l’écotaxe poids lourds en 2014 représente des milliards d’euros perdus, au détriment des particuliers et des collectivités territoriales, avec des conséquences majeures aux niveaux environnemental, social et sanitaire. Cet abandon coûteux a fait perdre à l’Afitf une ressource pérenne de 1 milliard d’euros annuels. La compensation de cette perte de ressources n’a été que partielle, avec l’affectation d’une partie de la TICPE au budget de l’Afitf, à hauteur de 400 millions d’euros annuels.

Moduler la taxe d’aménagement du territoire pour instaurer une contribution du transport routier de marchandises permettra de faire contribuer l’ensemble des poids lourds, y compris les pavillons étrangers, à l’amélioration des infrastructures de transport, en accroissant les moyens de l’Afitf. Nous proposons, pour les poids lourds, autocars et véhicules assimilés de plus de 7,5 tonnes, un montant de taxe augmenté de 50 % par rapport à la taxe perçue par les autres véhicules.

Mme la présidente. L’amendement n° I-253, présenté par MM. Jacquin, Féraud, Kanner et Raynal, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas, P. Joly, Lurel et Antiste, Mme Artigalas, M. J. Bigot, Mmes Blatrix Contat, Bonnefoy et Conconne, MM. Durain, Fichet et Gillé, Mmes Harribey, G. Jourda, Le Houerou et Lubin, MM. Marie, Mérillou et Montaugé, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l’article 302 bis ZB du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Pour les véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises et dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 7,5 tonnes comme pour les autres catégories de véhicules, le tarif de la taxe est fixé par décret pris en Conseil d’État, selon une logique progressive par tranche de 1 000 kilomètres parcourus. La taxe s’applique à partir du cent cinquantième kilomètre parcouru. »

La parole est à M. Olivier Jacquin.

M. Olivier Jacquin. Cet amendement vise à augmenter la taxe due par les sociétés concessionnaires d’autoroutes de façon à augmenter le prix des péages pour les poids lourds de plus de 7,5 tonnes. Cette taxe serait fixée avec une logique progressive, par tranches de 1 000 kilomètres : plus on va loin, plus la contribution augmente. Elle serait applicable uniquement à partir du cent cinquantième kilomètre parcouru, pour ne pas affecter le transit local et les circuits courts.

Mme la présidente. L’amendement n° I-252, présenté par MM. Jacquin, Féraud, Kanner et Raynal, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas, P. Joly, Lurel et Antiste, Mme Artigalas, M. J. Bigot, Mmes Blatrix Contat, Bonnefoy et Conconne, MM. Durain, Fichet et Gillé, Mmes Harribey, G. Jourda, Le Houerou et Lubin, MM. Marie, Mérillou et Montaugé, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du deuxième alinéa de l’article 302 bis ZB du code général des impôts, le montant : « 7,32 € » est remplacé par le montant : « 8,50 € ».

La parole est à M. Olivier Jacquin.

M. Olivier Jacquin. Cet amendement obéit à une tout autre logique. Il vise à augmenter le taux de base de la taxe d’aménagement du territoire portant sur l’activité des sociétés concessionnaires d’autoroutes.

Le rapporteur général me répondra probablement que, mécaniquement, le prix des péages va augmenter pour les usagers. Il aura raison, j’en ai bien conscience. J’étais membre de la commission d’enquête sur les concessions autoroutières, dont Vincent Delahaye était le rapporteur. Cet amendement reprend les propositions de cette commission. L’une des premières propositions était de ne pas proroger les contrats actuels et de tenter de les renégocier, en appelant à une grande concertation, que Vincent Delahaye a nommée « Défense des autoroutes ». L’augmentation de la taxe d’aménagement du territoire permettrait d’engager cette discussion.

Mme la présidente. L’amendement n° I-1218, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 302 bis ZB du code général des impôts est ainsi modifié :

1° À la deuxième phrase du deuxième alinéa, les mots : « les années civiles ultérieures » sont remplacés par les mots : « l’année civile ultérieure » ;

2° Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2021, le tarif est fixé à 21,96 € par 1 000 kilomètres parcourus pour les véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 7,5 tonnes et à 7,32 € par 1 000 kilomètres parcourus pour les autres véhicules. Pour les années civiles ultérieures, il est égal à ce montant, majoré de 70 % de l’évolution de l’indice des prix à la consommation hors tabac et arrondi au centième d’euro par 1 000 kilomètres, la fraction égale à 0,005 comptant pour 0,01. »

La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Le Haut Conseil pour le climat et le Président de la République lors de ses interventions télévisées au printemps dernier nous ont invités à imaginer le monde d’après et à revoir l’ensemble de nos schémas anciens.

Nous proposons d’augmenter la taxe d’aménagement du territoire due par les concessionnaires d’autoroutes à raison du nombre de kilomètres parcourus par les usagers. Cette taxe est directement répercutée par les concessionnaires sur les péages perçus, comme les contrats de concession les y autorisent.

Le présent amendement vise à augmenter cette taxe pour les poids lourds de plus 7,5 tonnes, avec un coefficient multiplicateur de trois par rapport à la taxe perçue pour les autres véhicules. Une telle mesure permettra de faire contribuer l’ensemble des poids lourds, y compris les pavillons étrangers, à l’amélioration des infrastructures de transport en accroissant les moyens de l’Afitf, se rapprochant ainsi du scénario 3 du Conseil d’orientation des infrastructures.

M. Albéric de Montgolfier. Merci Ségolène Royal !

Mme la présidente. L’amendement n° I-928, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Parigi, Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge et M. Salmon, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 302 bis ZB du code général des impôts est ainsi modifié :

1° À la deuxième phrase du deuxième alinéa, les mots : « les années civiles ultérieures » sont remplacés par les mots : « l’année civile ultérieure » ;

2° Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2021, le tarif est fixé à 10,98 € par 1 000 kilomètres parcourus pour les véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 7,5 tonnes et à 7,32 € par 1 000 kilomètres parcourus pour les autres véhicules. Pour les années civiles ultérieures, il est égal à ce montant, majoré de 70 % de l’évolution de l’indice des prix à la consommation hors tabac et arrondi au centième d’euro par 1 000 kilomètres, la fraction égale à 0,005 comptant pour 0,01. »

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Nous avons fixé un tarif plus modeste de la taxe d’aménagement du territoire pour les poids lourds, à 10,96 euros, soit un coefficient multiplicateur de 1,5 par rapport aux autres usagers. Voilà une manière simple et efficace de renflouer les caisses de l’Afitf et de pénaliser un mode de transport particulièrement polluant !

Mme la présidente. L’amendement n° I-320 rectifié, présenté par MM. Delahaye, Janssens et Cadic, Mmes Doineau, Billon, Vermeillet et Guidez, MM. Laugier, Bonnecarrère, Canevet et Longeot, Mme Vérien, M. Cazabonne, Mme Gatel et MM. S. Demilly et Bonneau, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article 302 bis ZB du code général des impôts, les mots : « de 70 % » sont supprimés.

La parole est à Mme Jocelyne Guidez.

Mme Jocelyne Guidez. Le rapport de la commission d’enquête sénatoriale sur les concessions autoroutières, évoqué par notre collègue Jacquin, estime qu’une indexation sur l’inflation n’est pas de nature à modifier l’équilibre des contrats, dès lors que l’augmentation annuelle des tarifs est supérieure à l’inflation et que ceux-ci augmentent, de toute façon, plus vite que la taxe d’aménagement du territoire. Au regard de ces éléments, rien ne justifie que la taxe due ne soit majorée qu’à hauteur de 70 % de l’inflation.

Le présent amendement de Vincent Delahaye vise à indexer le tarif de la taxe d’aménagement du territoire sur l’inflation, ni plus ni moins.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je suis défavorable à cette série d’amendements. Vous êtes chacune et chacun informés des stipulations des contrats de concession, tels qu’ils ont été signés par les concessionnaires et l’État. Nous ne souhaitons pas être hors la loi et nous engager dans des contentieux que nous sommes sûrs de perdre. Perdre deux fois ne me semble pas utile.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Cédric O, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour explication de vote.

M. Albéric de Montgolfier. Nous pouvons tous regretter l’abandon de l’écotaxe.

M. Albéric de Montgolfier. J’étais en réunion de la commission des finances lorsque nous avons appris, en direct – Christian Eckert était alors secrétaire d’État –, que Mme Royal avait décidé de nous priver de ces recettes. Nous savons combien le contentieux a coûté cher à la France.

Néanmoins, ces amendements ne me paraissent pas être une bonne solution, pour les raisons indiquées par le rapporteur général. En outre, toute augmentation de taxe, comme le stipulent les contrats de concession, serait répercutée.

Par ailleurs, si nous taxons exclusivement les autoroutes, nous verrons le trafic se reporter sur d’autres axes, sur les routes nationales, pour ce qu’il en reste, et sur les routes départementales. L’effet sera pervers, comme je peux le mesurer dans un département proche de l’Île-de-France, où je suis élu.

Derrière ces amendements pleins de bonnes intentions se cachent des conséquences potentiellement fâcheuses. Sur les routes nationales et départementales, aucune contribution ne sera demandée. Un poids lourd étranger pourra traverser la France, en faisant le plein à la frontière belge ou espagnole, et ne verser aucune contribution.

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.

M. Stéphane Sautarel. Si l’augmentation de la TAT n’est pas une solution, comme l’ont dit M. de Montgolfier et le rapporteur général, il est en revanche nécessaire de doter l’Afitf de moyens supplémentaires pour faire face à son programme d’investissements. Ce sera l’objet d’un amendement que nous proposerons avec mon collègue Hervé Maurey à l’article 24. Il visera, via la TICPE, à doter l’Afitf de ces moyens.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Je présenterai moi aussi, plus tard, un amendement pour doter l’Afitf de moyens.

Les amendements que je défends maintenant sont liés aux conclusions de la commission d’enquête sur les concessions autoroutières. J’invite mon cher collègue Montgolfier à regarder les conclusions du rapport en matière de flux économiques. C’est consternant ! Pour rappel, cette commission d’enquête avait pour objet principal d’effectuer une analyse juridique des contrats et d’interroger le rapport de force actuel qui sous-tend la contractualisation entre État et sociétés autoroutières.

Par ailleurs, la députée Christine Pires Beaune vient de déposer une proposition de résolution visant à demander au Gouvernement de solliciter l’avis du Conseil d’État sur la légalité de ces contrats – je dis bien la « légalité » de ces contrats – au vu de l’équilibre économique prévu initialement par ceux-ci et de l’équilibre financier actuel, tel que l’a révélé cette commission d’enquête. Il y a vraiment des choses importantes à faire à cet égard.