Mardi 15 juillet 2014

- Présidence de Mme Michèle André, vice-présidente -

La réunion est ouverte à 14 h 20

Loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013 - Examen des amendements

La commission procède à l'examen des amendements sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013.

Mme Michèle André, présidente. - Deux amendements ont été déposés sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013 par Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. - Par ces amendements, je souhaitais effectivement relever deux faits marquants dans ce projet de loi :

- 2,2 milliards d'euros de recettes fiscales sont comptabilisés au titre du contentieux avec Orange alors que cette somme n'est pas définitive ;

- les avances de l'État non encore remboursées par le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », pour un montant total d'1,2 milliard d'euros. Il me semblerait utile de disposer d'un rapport du Gouvernement sur les avances de l'État au profit des budgets annexes, l'état d'avancement de leur remboursement et les possibilités de les limiter pour l'avenir. Alors que le budget annexe de l'aviation civile est lourdement endetté, comment justifier son mode de financement ?

Article premier

M. François Marc, rapporteur général. - L'amendement n° 1 de Vincent Delahaye, qui propose de minorer les recettes de 2,2 milliards d'euros, correspondant au versement d'un montant équivalent par Orange à l'État, dans le cadre d'un contentieux fiscal, me semble en contradiction avec les règles de la comptabilité budgétaire.

Les recettes fiscales issues du contentieux avec Orange ont bien été versées au budget de l'État et doivent donc être retracées à l'article d'équilibre de la loi de règlement et pour le calcul du solde budgétaire.

En outre, s'agissant des avances de l'État au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », poser comme principe le remboursement immédiat du stock d'avances ne résoudrait pas la question du déséquilibre structurel du budget annexe.

Pour toutes ces raisons, avis défavorable à cet amendement.

M. Vincent Delahaye. - Même si je le rectifie en proposant de faire une provision ?

M. Francis Delattre. - Pouvez-vous nous apporter quelques précisions sur les règles applicables ?

M. François Marc, rapporteur général. - La comptabilité budgétaire retrace les dépenses effectuées et les recettes encaissées au cours de l'année écoulée sans tenir compte des éléments, tels que les provisions, qui sont pris en compte dans le cadre de la comptabilité générale. L'article d'équilibre et le solde présentés dans la loi de règlement relèvent bien de la comptabilité budgétaire.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1.

Article additionnel après l'article 8

M. François Marc, rapporteur général. - L'amendement n° 2 de Vincent Delahaye prévoit la remise d'un rapport au Parlement sur les avances de l'État au profit des budgets annexes, y compris « sur l'état du remboursement de ces avances ainsi que les possibilités de les limiter à l'avenir ». Tout d'abord, la date de remise du rapport, fixée au 1er octobre 2014, me semble très rapprochée. Ensuite, la question soulevée est légitime mais ne nécessite pas, à mon sens, un rapport du Gouvernement car les paramètres sont déjà bien connus. Je demande donc le retrait de cet amendement.

La commission décide de demander le retrait de l'amendement n° 2.

La réunion est levée à 14h26

Mercredi 16 juillet 2014

- Présidence de M. Philippe Marini, président -

Musée national du sport - Contrôle budgétaire - Communication

La commission entend une communication de M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial, sur le musée national du sport.

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. - Dans la culture française, associer dans un même nom les mots « musée » et « sport » peut paraître insolite, voire relever de la provocation, tant la vision élitiste que nous avons de la culture en général et des musées en particulier s'accorde mal avec l'univers populaire du sport. Pourtant, il existe un musée national du sport (MNS), même si encore trop peu de nos concitoyens le savent.

Comme nous allons le voir, ce défaut de popularité vient, en partie, d'une histoire mouvementée, ponctuée par des déménagements. Il vient aussi d'une incapacité à présenter les riches collections qu'il possède dans des conditions optimales - du moins, jusqu'à présent.

Alors que le musée aborde une étape cruciale de son existence en déménageant à Nice, pour ce qui peut s'apparenter à une dernière chance de trouver son public, et dans des conditions financières dont nous reparlerons, il m'a paru nécessaire porter un regard d'ensemble sur cet établissement public.

L'idée que la France dispose d'un tel musée pluridisciplinaire date de 1963, à l'initiative de Maurice Herzog, alors secrétaire d'État à la jeunesse et aux sports. Cependant, la naissance du musée prendra du temps. De fait, pendant plus de deux décennies, le musée, à défaut d'être complètement virtuel - puisqu'il a acquis ses collections au cours de cette période - ne disposait pas de lieu d'exposition et n'était donc pas identifiable par le public.

Ce n'est qu'en 1988, soit vingt-cinq ans après le lancement du projet, qu'un espace a pu lui être consacré au sein du Parc des princes.

Néanmoins, dix ans plus tard, les travaux engagés pour l'organisation de la Coupe du monde de football de 1998 et les besoins propres du Paris Saint-Germain, club résident du Parc des princes, conduisent à la fermeture des galeries du MNS. Seules restent sur place l'administration et les réserves du musée, qui redevient en quelque sorte « virtuel ». La Cour des comptes, en 2011, n'a pas manqué de relever le paradoxe qui a voulu que ce soit au cours de cette période d'absence de musée physique que le MNS s'est vu accorder le label de « Musée de France » par le ministère de la culture. De même, c'est en 2006 qu'il a accédé au statut d'établissement public à caractère administratif (EPA).

Enfin, après avoir disposé à compter de 2008 d'un espace au rez-de-chaussée des locaux du ministère des sports, dans le treizième arrondissement de Paris, qui ne lui a pas permis de trouver son public, le ministère a fait le choix, en 2010, d'un déménagement à Nice qui vient tout juste de se concrétiser.

La Cour des comptes, qui a consacré au MNS une partie de son rapport public annuel de 2011, a effectué, à cette occasion, quelques constats cinglants.

Ses critiques portaient sur la tutelle du ministère des sports, qu'elle a qualifiée de « déficiente ». En effet, la tutelle était éclatée entre la direction des sports et la direction des ressources humaines du ministère, dans des conditions peu claires de partage des rôles. À titre d'illustration, le contrat de performance de l'établissement public n'a été signé qu'en 2010, quatre ans après sa création.

Au-delà de ces problèmes administratifs, c'est surtout l'échec du musée sur ses missions fondamentales qui était préoccupant. La « vitrine » parisienne au rez-de-chaussée du ministère n'attirait que moins de cinquante visiteurs par jour en moyenne. D'un point de vue scientifique et culturel, les constats n'étaient pas meilleurs, les quelque 1 200 m2 alors disponibles ne permettant d'exposer de manière permanente qu'environ 350 objets sur le site, c'est-à-dire une partie très restreinte des collections.

Les conditions de travail du personnel (une vingtaine d'emplois) étaient compliquées par l'éclatement des sites : administration au bois de Boulogne, réserves au Parc des princes, exposition dans le treizième arrondissement. Les témoignages que j'ai recueillis m'ont montré la situation très difficile à vivre d'un point de vue humain par les employés du musée face à cette situation d'échec très frustrante.

En 2010, comme l'a souligné la Cour des comptes, c'est donc bien l'existence même du musée national du sport qui était en question. Constat amer au vu, d'une part, de la réelle richesse des collections du MNS et, d'autre part, du succès que des lieux comme le musée du Comité international olympique à Lausanne ou le musée du Barça (lieu le plus visité de toute la Catalogne), qui montrent le grand potentiel de tels établissements.

Le ministère des sports a alors décidé un déménagement en province, dans une ville où le musée pourrait être davantage mis en valeur qu'à Paris et disposer de plus d'espace. Très vite, le choix s'est porté sur Nice, ville qui avait alors lancé son projet de nouveau stade « Allianz Riviera ».

Selon ce que m'ont dit mes différents interlocuteurs, cette candidature était la seule vraiment concrète - ce qui peut d'ailleurs sembler surprenant pour un équipement de ce type.

S'agissant des locaux, le musée dispose d'un espace total de 5 860 m2, dont 2 000 m2 pour le seul espace d'exposition. Celui-ci est donc sensiblement plus vaste qu'à Paris, ce qui permet de montrer davantage d'objets et de prévoir un espace réservé à des expositions temporaires. Le musée dispose également d'une boutique pour vendre des produits dérivés. De plus, l'établissement public dispose enfin d'un même lieu pour l'espace d'exposition, son personnel et ses réserves, ce qui est une réelle source d'optimalité.

Je tiens à souligner la grande mobilisation du personnel, très motivé et désireux de faire de cette expérience un succès. On relèvera toutefois que neuf agents, soit environ la moitié d'entre eux, n'ont pas souhaité suivre le musée à Nice. Selon les éléments qui m'ont été transmis, le coût total des mesures de reclassement s'est élevé à 110 000 euros.

Le financement du déménagement mérite un développement particulier - d'autant qu'il a évolué au fil du temps. Outre la préparation du déménagement des précédents locaux du Parc des princes, qui a coûté un peu plus d'un million d'euros répartis sur 2010 et 2011, l'opération a entraîné le versement par l'État au musée d'une subvention d'investissement de 143 000 euros en 2012 pour préparer le déménagement à Nice, puis d'une subvention de 1,256 million d'euros en 2013 qui tient compte des dépenses consécutives à la libération des locaux parisiens - pour l'essentiel, la remise en état de la vitrine.

En revanche, en 2012, la question du financement de l'emménagement à Nice, avec la conception et l'aménagement des nouveaux locaux, restait pendante et n'avait pas été réglée par le gouvernement sortant. Or, à l'échelle du musée - et même du programme « Sport », il ne s'agissait pas d'un montant négligeable, l'effort exceptionnel à réaliser s'élevant à 4,5 millions d'euros pour l'année 2013.

Des négociations menées entre la précédente ministre, Valérie Fourneyron, et le maire de Nice, Christian Estrosi, ont abouti, du fait de la commune volonté des parties de clore le dossier, à un accord en mars 2013. Ainsi, c'est la Ville de Nice qui a avancé la somme nécessaire en 2013 sous forme d'une subvention forfaitaire. En contrepartie, le musée versera, pour solde de tout compte à la ville, une redevance d'occupation de 537 221 euros hors taxes par an pendant dix ans - ce qui couvrira l'emprunt municipal et les intérêts. Au terme de cette période, le musée occupera ses locaux à titre gracieux. On relèvera enfin que le fonds de roulement du musée a fait l'objet de deux ponctions, de 600 000 euros en 2013 puis de 430 000 euros en 2014.

Compte tenu de ce qui précède, on constate que l'évolution de la subvention de l'État au musée hors charges de personnel reste maîtrisée au vu de l'ampleur de l'opération en cours.

Après une exécution 2013 élevée en crédits de paiement (CP) du fait de la remise en état des locaux parisiens, on note que l'année 2014 intègre le premier versement de redevance de 537 221 euros à la mairie de Nice. Ensuite, la subvention 2015 devrait augmenter à nouveau pour tenir compte des besoins dans ces nouveaux locaux plus vastes. Puis, à compter de 2016, la subvention devrait baisser en tenant compte de l'augmentation des recettes propres du musée. Bien entendu, après 2023, il n'y aura plus à financer la redevance annuelle à la Ville de Nice.

S'agissant du personnel, après le creux logiquement enregistré à la suite des départs des agents ne souhaitant pas aller à Nice, le niveau normal de 19 emplois en équivalent temps plein (ETP) devrait être de nouveau atteint dès la fin de l'année. Il a vocation à rester stable au fil des ans.

Au total, un peu moins de quatre semaines après l'ouverture du musée au public, seul l'avenir dira si le pari de la délocalisation est réussi. Je voudrais dire, cependant, qu'à mes yeux, cette opération « de la dernière chance » méritait d'être tentée. En premier lieu parce que le MNS propose une expérience culturelle originale, qui méritait un écrin plus valorisant que ses anciens locaux parisiens. En deuxième lieu parce que ce musée possède de riches collections, susceptibles d'attirer aussi bien les amateurs de musées traditionnels qu'un public nouveau pour ce genre d'endroits. Et en troisième lieu parce que l'opération a un coût finalement raisonnable, qui sera bien absorbée par le budget du programme « Sport » grâce à la négociation menée entre Valérie Fourneyron et la ville de Nice.

Les facteurs de succès existent. Ils existeront d'autant mieux à l'avenir si le quartier de l'Allianz Riviera, aujourd'hui relativement mal desservi par les transports en commun, se développe dans les années à venir comme le prévoit la mairie.

Une fois formulés ces constats, au stade où nous en sommes (déménagement réalisé, ouverture effectuée), mes préconisations seront nécessairement limitées. Elles concerneront l'État et le musée lui-même.

L'État devra exercer une tutelle efficace sur l'établissement, en particulier en fixant des objectifs clairs à la direction. Ceux-ci devront notamment concerner la fréquentation du musée, qu'il s'agisse de la fréquentation globale ou du niveau d'entrées de certains publics cibles. Ils devront également inclure des objectifs financiers comme le développement des recettes propres (billetterie, boutique, etc.). Même s'il est probablement illusoire de prévoir un autofinancement à brève échéance, on pourrait imaginer qu'à terme, le musée ne coûte pas plus cher à l'État qu'au temps de sa « vitrine » parisienne.

Quant au musée, il lui reviendra de se faire connaître dans son nouvel environnement - mieux qu'à Paris. Cela passera sans doute, dans un premier temps, par de classiques opérations de communication, notamment lors des pics de la saison touristique. Mais il faudra surtout, à terme, donner envie au public local de revenir. Cela passera par l'organisation d'expositions temporaires. Et, loin de Nice, des prêts et des échanges avec des lieux d'exposition plus classiques pourraient aussi permettre à ce musée trop méconnu de rayonner auprès d'un public plus habitué des musées. Le contrat d'objectifs ou la lettre de mission gagneraient donc également à aborder ces thématiques.

M. François Marc, rapporteur général. - Je remercie le rapporteur spécial pour cette communication, dont j'avoue qu'elle m'a fait connaître un musée dont j'ignorais l'existence. Vous avez parlé d'opération de la dernière chance. On peut espérer qu'à Nice, ville peuplée et accueillant de nombreux visiteurs, le MNS pourra susciter de l'intérêt. Malgré tout, il sera difficile d'atteindre la fréquentation des musées plus ciblés dont vous avez parlé, comme le musée du Barça, où les visiteurs sont attirés par un club et une discipline particulière.

Au bout du compte, pensez-vous qu'un musée omnisports comme le MNS trouvera un rythme de croisière à un niveau élevé de visiteurs ?

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. - Il n'existe que très peu de musées parfaitement comparables, pouvant servir de points de référence. Le plus proche est sans doute le musée de Cologne, qui connaît un réel succès. Pour le reste, à Lausanne, on ne s'intéresse qu'aux sports olympiques, certes assez nombreux. Quant à Barcelone, on ne s'intéresse qu'à un seul club.

À mes yeux, l'un des facteurs clés de succès du MNS, qui ne pourra pas s'appuyer sur de tels fondements, sera sa capacité à se renouveler au travers d'événements ou d'expositions provisoires. Ses collections sont immenses et pourront tourner au gré de l'actualité sportive. Il devra aussi collaborer avec d'autres institutions, en prêtant des oeuvres ou en prenant des dépôts des oeuvres d'autres musées.

Dix jours avant l'ouverture, même si tout n'était pas encore en place, j'ai pu voir un superbe écrin, avec une muséographie bien faite. Il reste donc à trouver les moyens d'attirer du public toute l'année.

M. Philippe Marini, président. - Quels sont les objectifs en termes de fréquentation ?

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. - Comme je l'ai indiqué, il n'y en a pas à ce jour car, après avoir failli mourir, le MNS repart de zéro avec ce déménagement. Mais il va falloir déterminer rapidement de tels objectifs à l'issue des premières observations sur le potentiel du lieu. Le premier week-end a attiré 3 000 visiteurs mais la visite était exceptionnellement gratuite...

M. Philippe Marini, président. - On risque de finir vers 15 à 20 000 visiteurs par an. Où le musée est-il situé dans Nice ?

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. - Il est dans le nouveau stade, excentré vers l'ouest de la ville. Pour l'instant, l'accès en transport en commun pèche un peu, même si le train des Pignes s'y arrête. Cependant, le quartier devrait se développer et être desservi par le tramway d'ici à 2018.

M. Vincent Delahaye. - Je suis assez sceptique sur le concept de ce musée mais, comme l'indique le rapporteur spécial, l'État et la ville de Nice ont déjà consenti des efforts financiers. Il est tout de même gênant qu'un tel lieu soit difficile d'accès. L'enjeu n'est pas majeur du point de vue des finances publiques. Je trouve néanmoins illogique que cet établissement ne se soit pas vu assigner d'objectifs chiffrés précis.

M. Aymeri de Montesquiou. - À mes yeux, l'État devrait avoir d'autres priorités en matière d'investissement et laisser la ville de Nice gérer cet établissement et assumer les dépenses correspondantes.

Mme Michèle André. - Il y a quelque part une contradiction entre ce qu'est un musée, c'est-à-dire la conservation d'oeuvres matérielles ou immatérielles, et l'identité du sport, lié à la vie et à l'éphémère. De plus, le caractère omnisports n'est pas toujours très valorisé. Qu'expose donc le MNS ? Et quelles expositions temporaires a-t-il prévu, le cas échéant ?

M. Richard Yung. - Même si l'enjeu budgétaire est faible, je suis saisi d'un doute face à ce musée. Avec 20 000 visiteurs par an, même à dix euros le billet, ce qui serait cher, on ne parviendrait qu'à 200 000 euros de recettes, bien loin du niveau des charges et de la seule redevance à verser à la ville de Nice. Peut-être faut-il considérer ce musée comme un investissement, par exemple à l'égard du jeune public, mais certainement pas comme un établissement potentiellement rentable...

M. Yvon Collin. - J'ai la même interrogation que Michèle André. Qu'expose-t-on au MNS ? Car l'engouement immédiat que suscite le sport n'est pas de même nature que le souvenir d'exploits passés. Il faut que ce musée raconte une histoire, qu'il fasse rêver le public. Par ailleurs, son accessibilité sera sans doute une question clé.

M. Éric Doligé. - Certains l'ont dit, l'enjeu budgétaire est faible, la subvention de l'État représentant à peine un mois de salaire d'une star du football... Le musée pourrait d'ailleurs probablement attirer du monde en faisant venir en ses murs, une fois par mois, un sportif très connu qui signerait des autographes aux visiteurs. Quant à nous, laissons la ville de Nice assumer ses choix et dressons le bilan de ce déménagement d'ici un ou deux ans.

M. Philippe Marini, président. - Un musée en province coûte moins cher qu'à Paris...

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. - Plusieurs intervenants ont parlé de laisser faire la ville de Nice, mais le MNS est un musée d'État, d'ailleurs labellisé « Musée de France ». L'État ne peut donc s'en désintéresser.

Il est situé dans le nouveau stade de Nice. Il est visible et accessible de l'extérieur.

J'ai moi-même, comme certains d'entre vous, évoqué la nécessité de fixer des objectifs à ce musée. Mais je reconnais la difficulté de l'exercice car ce lieu n'a pas d'équivalent dans notre pays. J'ajoute que, même s'il est possible que les choses changent à l'avenir, les musées niçois sont aujourd'hui gratuits, les habitants n'ayant donc pas l'habitude de payer pour se rendre dans un musée.

S'agissant du quartier, je vous ai parlé de sa situation actuelle. Il est, en effet, excentré et relativement peu desservi par les transports en commun. Mais la mairie m'a souligné qu'il devrait se transformer dans les années à venir, à l'instar d'autres quartiers environnant des grands stades. Le tramway devrait venir d'ici quatre ans. Or, au minimum, le musée vivra dix ans. C'est, en quelque sorte, sa vraie naissance, cinquante ans après sa création officielle, d'où la difficulté d'avoir des références claires dans cette phase.

Les objets exposés sont très divers. Il y a de nombreux accessoires de sport, comme des voitures de course, des vélos de champions, les gants de Marcel Cerdan, des médailles des différentes olympiades, etc. Mais on y trouve aussi de nombreuses affiches et d'autres illustrations des à-côtés du sport. Les expositions temporaires auront vocation à accompagner de grands événements comme l'Euro 2016, dont plusieurs matchs se joueront à Nice. Mais certaines pourront aborder des thématiques hors de l'actualité immédiate, comme les rapports entre le sport et la mode.

Je vous invite à aller voir ce musée, plaisant à visiter. A l'origine, mes travaux ont été motivés par les incertitudes concernant le financement du déménagement à Nice. Depuis lors, les choses se sont aplanies, notamment grâce à l'effort de la ville sans laquelle il n'y aurait sans doute plus de MNS mais, peut-être, des fragments de collections présentées ici ou là.

M. Philippe Marini, président. - On peut imaginer que l'activité du musée sera liée à celle du stade.

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial. - Ce n'est pas si sûr, le musée devant fermer au moment des matchs. Il devra donc attirer son public par lui-même.

La commission donne acte de sa communication à M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial, et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information.

- Présidence de M. Philippe Marini, président -

Sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public - Examen en deuxième lecture du rapport et du texte de la commission

La commission procède ensuite à l'examen du rapport de M. Jean Germain, rapporteur, et à l'élaboration du texte de la commission sur le projet de loi n° 721 (2013-2014) relatif à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public.

EXAMEN DU RAPPORT

M. Jean Germain, rapporteur. - Le projet de loi relatif à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public revient en seconde lecture devant le Sénat.

Nous l'avions adopté, en première lecture, le 13 mai dernier. Il a été examiné et adopté par l'Assemblée nationale le 10 juillet. Sur les quatre articles du projet de loi, trois ont été adoptés sans modification par l'Assemblée nationale et seul l'article premier reste en discussion.

En première lecture, j'avais eu l'occasion de souligner le caractère indispensable et urgent de ce texte qui procède à une validation législative suite à deux jugements relatifs à des contrats d'emprunts structurés rendus par le tribunal de grande instance de Nanterre (TGI). Il y a eu depuis une nouvelle décision concernant la ville d'Angoulême.

M. Francis Delattre. - Et Saint-Leu-la-Forêt.

M. Jean Germain. - Le TGI avait fondé son jugement sur un motif formel. Ayant constaté l'absence ou l'erreur de taux effectif global (TEG) sur des documents contractuels ou pré-contractuels, il a décidé que le taux d'intérêt légal devait s'appliquer depuis la signature du contrat.

Ces jugements sont de nature à mettre gravement en péril Dexia mais aussi la Société de financement local (SFIL), qui a repris une grande partie du portefeuille de prêts de Dexia Crédit Local. Au total, on estime que les deux établissements, majoritairement détenus par l'Etat, pourraient provisionner jusqu'à 10 milliards d'euros, auxquels il faudrait ajouter 7 milliards d'euros si la SFIL devait être mise en extinction.

Ce projet de loi vise donc à éviter un risque potentiel pour les finances publiques de l'ordre de 17 milliards d'euros.

La loi de finances rectificative pour 2013 a mis en place un fonds de soutien aux collectivités territoriales, d'un montant d'1,5 milliard d'euros, afin de les aider à sortir des emprunts structurés. Ce fonds est financé pour près de deux tiers par le secteur bancaire. Il apportera une aide qui pourra aller jusqu'à 45 % du montant de l'indemnité de remboursement anticipé que la collectivité territoriale pourrait être amenée à payer. Le décret relatif au fonds de soutien a été publié début mai. Il devrait donc fonctionner dans les toutes prochaines semaines.

Le projet de loi fait donc partie d'un ensemble équilibré proposé l'année dernière par le Gouvernement.

J'en viens maintenant plus directement au texte qui nous est transmis par l'Assemblée nationale. Les articles 2, 3 et 4 ont été adoptés sans modification. Les modifications apportées par le Sénat, en particulier l'ajout de l'article 4 demandant un rapport sur la réforme du taux effectif global, ont été conservées.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, a précisé la rédaction de l'article premier en modifiant une référence au sein du code de la consommation. L'article premier faisait référence à l'article L. 313-1 du code de la consommation et il apparaît effectivement plus pertinent, d'un point de vue juridique, de viser l'article L. 313-2.

M. Vincent Delahaye. - Cela nous avait échappé...

M. Jean Germain. - Cette précision me paraît bienvenue et je souhaite donc que le Sénat adopte l'article premier dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale de sorte que le projet de loi puisse être définitivement adopté par le Parlement.

M. Philippe Marini. - Vous préconisez donc un vote conforme qui vaudra adoption définitive du texte par le Parlement.

M. François Marc. - Je me réjouis de ce que les propositions du rapporteur que nous avions adoptées aient été retenues par les députés. La modification apportée par l'Assemblée nationale était utile. Dès lors, je suis notre rapporteur dans sa préconisation d'adopter ce texte sans modification.

M. Philippe Marini. - La semaine dernière, la commission des finances a procédé à la désignation des membres du Sénat qui siégeront au comité national d'orientation et de suivi du fonds de soutien : Jean Germain sera suppléé avec beaucoup de vigilance par Francis Delattre.

M. Francis Delattre. - Devant de tels enjeux, le vote conforme ne me paraît pas inatteignable.

Nous savons que les contentieux ne vont pas s'arrêter puisque seuls des jugements de première instance ont été rendus jusqu'à présent. Il va y avoir des appels. Que va-t-il se passer durant la période interstitielle entre le jugement de première instance et l'appel ?

N'y a-t-il pas un problème constitutionnel ? On légifère pour contrarier une décision de justice et nous savons que les communes sont décidées à utiliser tous les moyens juridiques possibles, y compris une question prioritaire de constitutionnalité, qui pourrait nous placer en situation de précarité devant un dossier qui demande à être réglé définitivement.

Je voudrais être sûr que, après le vote de ce texte, les problèmes seront réglés. Est-il possible de mieux « verrouiller » le texte d'un point de vue juridique ?

M. Philippe Marini. - C'est un débat que nous avons eu longuement lors de l'examen en première lecture et même auparavant lors de différentes auditions de notre commission.

M. Jean Germain, rapporteur. - D'un point de vue juridique, les périodes interstitielles sont toujours très compliquées à gérer. Il y avait déjà eu une validation législative, mais qui avait été censurée par le Conseil constitutionnel car la rédaction n'était pas assez précise et ne distinguait pas selon les personnes morales, publiques ou privées, ni selon les prêts, structurés ou non. Ce point a été vu dans la nouvelle réécriture. On ne peut savoir à l'avance ce que va décider le Conseil constitutionnel, mais selon sa jurisprudence actuelle et récente, on peut penser que la rédaction proposée passerait l'examen du Conseil constitutionnel avec succès.

Je rappelle que le but du texte n'est pas d'empêcher les collectivités territoriales de former un recours, mais d'empêcher que ce soit pour un motif de forme. Un recours sera toujours possible, mais sur un autre motif, par exemple, pour défaut de conseil ou conseil erroné... Cela empêche simplement de fonder le recours sur le défaut de mention ou l'erreur du taux effectif global (TEG).

EXAMEN DE L'ARTICLE

M. Philippe Marini, président. - Je mets aux voix l'article premier et donc l'ensemble du projet de loi. Je rappelle que le rapporteur est favorable à une adoption conforme.

Le projet de loi est adopté sans modification.

Questions diverses - Taxation des produits énergétiques et de l'électricité - Communication

La commission entend une communication de M. Philippe Marini, président, au sujet de la proposition de résolution de Mme Bernadette Bourzai sur la taxation des produits énergétiques et de l'électricité.

M. Philippe Marini, président. - La commission des affaires européennes a adopté le 25 juin une proposition de résolution européenne sur la taxation des produits énergétiques et de l'électricité, à l'initiative de notre collègue Bernadette Bourzai.

En application de l'article 73 quinquies du règlement du Sénat, notre commission, saisie au fond sur cette proposition de résolution, dispose d'un mois pour rendre un avis. A défaut, celle-ci est considérée comme tacitement adoptée.

La proposition de résolution de la commission des affaires européennes aborde avec prudence la poursuite des négociations sur la révision de la directive 2003/96/CE du Conseil restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité, actuellement au point mort en raison de divergences entre les États membres.

Elle n'est contradictoire ni avec la position du Gouvernement français, ni avec les préoccupations exprimées l'an dernier par la commission des finances sur l'aménagement des taxes intérieures de consommation sur les produits énergétiques.

Elle prend notamment en compte le souhait de voir maintenue dans la future directive la dérogation existant en matière de modulation infranationale de la taxation de l'énergie (carburants et électricité par exemple).

Pour ces raisons, le rapporteur général et moi vous proposons de ne pas désigner de rapporteur sur ce texte.

M. François Marc, rapporteur général. - Tout à fait.

Mme Michèle André. - La suggestion du président et du rapporteur général me semble judicieuse.

Contrôle de la politique d'aide publique au développement de la France au Vietnam - Contrôle budgétaire - Communication

M. Yvon Collin, rapporteur. - Dans le cadre de mes fonctions de rapporteur spécial de la mission « Aide publique au développement », j'ai souhaité travailler cette année sur notre aide au Vietnam.

Ce choix s'explique par plusieurs particularités de ce pays.

Tout d'abord, le Vietnam est l'un des principaux bénéficiaires de l'aide publique au développement (APD) française. Notre pays est le deuxième donateur bilatéral du Vietnam après le Japon, avec 18,4 milliards de dollars d'engagements cumulés depuis 1993, et le Vietnam est le troisième récipiendaire de nos financements.

L'Agence française de développement (AFD) y est présente depuis 1993 et ses engagements cumulés se sont élevés depuis lors à 1,5 milliard d'euros ; sur les dernières années, ce pays représente environ 100 millions d'euros d'engagements par an pour l'AFD.

Par ailleurs, l'économie vietnamienne a connu un développement très important ces dernières années, suite à la politique d'ouverture entamée au début des années 1990 : depuis lors, le PIB par habitant a été multiplié par trois et le Vietnam a accédé à l'OMC en 2007. Certes, la mauvaise conjoncture internationale a entraîné un ralentissement de l'activité dans le pays, mais il demeure tout de même sur un rythme de croissance de 5 %.

Nos relations économiques apparaissent néanmoins déséquilibrées et loin d'être à leur potentiel. Premier investisseur occidental au Vietnam jusqu'à une date récente, la France est aujourd'hui le deuxième investisseur européen et le quinzième investisseur mondial, ainsi que le treizième fournisseur - seulement - du Vietnam. Notre déficit commercial bilatéral s'est profondément creusé, pour atteindre 2,1 milliards d'euros en 2012, sous l'effet conjugué d'une forte hausse des importations et d'une forte baisse des exportations.

Enfin, le dynamisme économique du Vietnam lui a permis de passer, en 2010, de la catégorie des « pays les moins avancés » à celle des « pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure », ce qui emporte plusieurs conséquences en termes d'aide publique au développement : une baisse de la concessionalité des financements, un risque de désengagement de certains bailleurs et d'une réduction du montant global de l'aide, mais aussi une nécessité de réorienter l'aide vers le secteur privé et de modifier les outils mobilisés. Je reviendrai sur ces différents points au cours de l'exposé.

Dans le cadre ce contrôle, je me suis rendu sur place du 19 au 23 mai dernier, afin de m'entretenir avec les responsables français et vietnamiens et de visiter certains projets.

Comme je le disais à l'instant, le changement de catégorie du Vietnam a entrainé le désengagement de plusieurs bailleurs. Il s'agit notamment du Royaume-Uni, dont le départ sera effectif en 2016, de la Suède, du Luxembourg et du Danemark.

Je sais que certains collègues critiquent parfois l'aide française aux pays qui ont déjà accédé à un certain niveau de développement, mais je considère pour ma part que la présence française au Vietnam est nécessaire et justifiée, car elle n'est pas coûteuse et représente un levier d'influence dans un pays en plein développement et avec lequel nous avons des liens privilégiés.

Au demeurant, le dispositif de l'AFD est relativement limité. Je rappelle avant toute chose que l'AFD est un établissement public industriel et commercial (EPIC) et que ses emplois ne sont donc pas des « emplois budgétaires » : les salaires sont payés par les intérêts des prêts qu'elle accorde. Au total, l'agence emploie vingt-cinq personnes, dont seulement trois expatriés, assistés de trois volontaires internationaux en entreprise (VIE). Le coût de fonctionnement de l'agence représente environ 1 million d'euros par an, en baisse par rapport aux dernières années. Depuis 2004, les engagements signés par l'agence ont été multipliés par quatre, alors que dans le même temps les frais généraux n'ont été multipliés que par deux.

Il n'est pas vraiment possible de calculer un résultat par pays, car les coûts fixes sont prépondérants et il serait nécessaire de pouvoir les ventiler par poste. Mais si l'on regarde le produit net bancaire de l'agence, diminué de ses charges bancaires et de ses frais généraux, l'on constate que la présence de l'AFD au Vietnam est « rentable ».

J'ajoute qu'on ne peut réduire l'activité de l'AFD à des données bancaires : elle participe également à notre diplomatie et joue un rôle d'influence de moyen terme. S'agissant du Vietnam, l'AFD exerce en particulier un rôle central en matière de diplomatie climatique pour sensibiliser ce pays à cette problématique, dans la perspective de la Conférence Paris Climat 2015 (COP 21) l'an prochain dans notre capitale.

Je voulais également souligner que, dans son souci d'économie, le groupe AFD a supprimé le poste de représentant de la filiale de l'AFD, Promotion et Participation pour la Coopération économique (Proparco), à Hô Chi Minh-Ville. Ce point n'est pas anodin, car il a pour conséquence de réduire considérablement la visibilité de la présence du groupe AFD dans le Sud du Vietnam.

Or, le clivage Nord / Sud est relativement fort dans le pays, qu'il s'agisse de cuisine... ou d'économie et de politique.

J'ai pu m'entretenir avec la vice-présidente chargée des finances du comité populaire de Hô Chi Minh-Ville qui m'a fait part de ses regrets que la présence française dans le Sud du pays ne soit pas plus forte, alors que cette région représente une part significative du PIB vietnamien et abrite la part la plus importante et la plus dynamique du secteur privé. Le fait que j'ai commencé mon déplacement par le Sud a d'ailleurs été apprécié.

Enfin, mon sentiment personnel est que le directeur de l'agence et ses collaborateurs effectuent un travail de grande qualité, avec un vrai souci de promouvoir le développement du pays, tout en défendant les intérêts de la France.

Je le répète, l'accès du Vietnam en 2010 à la catégorie des « pays à revenu intermédiaire » emporte des conséquences sur l'aide dont il bénéficie. Ces effets ne sont pas immédiats et les changements seront ressentis que progressivement, du fait du « temps long » de cette politique.

J'ai cependant souhaité disposer d'éléments à ce sujet et m'en suis entretenu avec les différents bailleurs internationaux, avec le vice-ministre du plan et de l'investissement, avec le vice-ministre des ressources naturelles et de l'environnement, ainsi qu'avec des fonctionnaires du ministère des finances et de celui du développement.

Pour l'instant, l'aide globale dont bénéficie le Vietnam n'a pas diminué, même si le pays doit s'y préparer. La concessionnalité est appelée à décroître. En réalité, ce mouvement est déjà engagé, mais de façon indolore.

Le représentant de la Banque mondiale a ainsi indiqué que le Vietnam continuerait à avoir accès aux prêts très concessionnels de l'Agence internationale de développement (AID) pendant trois ans. De même, ce n'est que progressivement que l'Agence japonaise de coopération internationale (JICA) va diminuer le montant de ses subventions et augmenter la part des prêts.

Quant à l'AFD, le passage du Vietnam dans la catégorie des « pays à revenu intermédiaire » a pu se faire de façon indolore, grâce à la réduction concomitante de son taux de refinancement. Ainsi, la concessionnalité des prêts a diminué sans que le taux d'intérêt acquitté par le Vietnam n'augmente.

Mais la situation de taux historiquement bas que nous connaissons actuellement ne durera pas éternellement et nous retrouvons ici la discussion que nous avions la semaine dernière sur le débat d'orientation des finances publiques quant à notre propre financement. L'encours de la dette augmente, mais le service de la dette diminue sous l'effet du faible niveau des taux d'intérêt.

La remontée des taux d'intérêt impliquerait pour le Vietnam une hausse de son coût de financement, qui sera d'autant plus douloureuse qu'elle risque de se conjuguer à une baisse de la concessionnalité, toutes choses égales par ailleurs.

Je souligne d'ailleurs que l'AFD est le bailleur international qui propose l'offre de prêt la moins intéressante, ce qui tient à ses conditions de refinancement. La baisse de la concessionnalité des bailleurs internationaux, notamment de la Banque mondiale, aura donc un effet positif quant à la compétitivité de notre offre. Je souligne également un autre effet bénéfique de cette baisse de la concessionnalité : le renchérissement des prêts devrait inciter les autorités vietnamiennes à être plus rapides dans la mise en oeuvre des projets.

Enfin, le Vietnam est confronté à un déficit budgétaire de 4,8 % du PIB, qui le rend particulièrement soucieux de disposer d'aides budgétaires directes. La commission des finances est traditionnellement plutôt réservée sur cette forme d'aide, du fait de sa faible visibilité et de sa moindre « traçabilité ». Une seule aide budgétaire directe est accordée par la France au Vietnam, à travers l'AFD : il s'agit du programme national de réponse au changement climatique (le SPRCC), qui représente un prêt de 80 millions d'euros sur quatre tranches, débloquées en fonction de l'atteinte d'objectifs.

Je souhaite également souligner que l'Allemagne développe une stratégie « d'aides programmes », qui vise à véritablement influencer une politique publique dans son ensemble, en conjuguant des « aides-projets », des aides budgétaires et surtout une impressionnante coopération technique.

Nous aurons probablement l'occasion de parler de la faiblesse de la coopération technique française lors de l'examen du prochain projet de loi de finances, dans le prolongement de la réforme initiée par nos collègues de la commission des affaires étrangères.

Au stade de développement qu'a atteint le Vietnam, il est nécessaire de réorienter l'aide, au moins partiellement, des investissements dans les infrastructures vers le renforcement du secteur privé. En dix ans, la part de celui-ci dans la production est passée de 40 % à 60 % et cette évolution va se poursuivre.

Mes interlocuteurs sur place - responsables diplomatiques, mais aussi entrepreneurs français et le directeur-pays adjoint de la BNP - m'ont fait part de leur confiance dans le développement du pays, qui bénéficie notamment d'une population jeune, dynamique et éduquée. Néanmoins, la santé du système bancaire vietnamien suscite des inquiétudes. La réorientation de l'APD vers le secteur privé est d'autant plus importante, dans un contexte où le crédit bancaire est insuffisant.

Le secteur bancaire vietnamien souffre d'un émiettement excessif, avec une cinquantaine de banques privées et autant de banques publiques, et un taux de créances douteuses extrêmement élevé, compris entre 10 % et 20 %, et qui pourrait atteindre 50 % pour certains établissements.

Cette situation s'explique par la proximité entre certaines grandes entreprises et les banques qu'elles détiennent pour se financer : les premières étant mal gérées, les créances douteuses s'accumulent, le tout dans un contexte de bulle immobilière - les prix anticipés ont atteint le niveau de Londres - alors que les emprunts sont souvent gagés sur des biens immobiliers.

Certains acteurs nous ont fait part de l'inquiétude causée par la possibilité d'un effondrement du système bancaire, en expliquant que si les normes IFRS (International Financial Reporting Standards) étaient appliquées, tous les établissements seraient en grande difficulté. Mais la Banque centrale semble avoir pris la mesure du problème et a mis en place une structure de défaisance temporaire, en espérant que la situation sera meilleure dans cinq ans.

Dans ce contexte, j'ai souhaité m'intéresser particulièrement aux partenariats public-privé (PPP), outil extrêmement récent au Vietnam, qui présente l'avantage d'un financement et d'une gestion privés. Combiné à un financement par l'aide publique au développement (APD), il est un gage de sérieux à la fois dans le financement et dans l'exploitation.

J'ai ainsi visité la centrale électrique à cycle combiné au gaz naturel de Phu My 2.2, qui a été financée par un PPP : un investisseur privé (détenu majoritairement par EDF) a construit l'infrastructure et en assure l'exploitation commerciale et la maintenance pendant une durée de vingt ans, avant rétrocession au secteur public.

Ce premier grand PPP au Vietnam a nécessité la création d'outils spécifiques. On pensait alors que ce modèle essaimerait largement, d'autant que les autorités vietnamiennes avaient manifesté leur grand intérêt pour ce mode de financement.

Mais, quelques années après l'achèvement de ce projet, force est de constater qu'il n'a pas vraiment fait école, malgré un succès certain pour EDF comme pour les autorités vietnamiennes. Le directeur d'Électricité du Vietnam m'a assuré de son grand intérêt pour cette forme de financement, mais pourtant aucun nouveau projet de centrale financé par PPP n'a été présenté.

Le diagnostic des différents bailleurs internationaux est concordant : il manque un véritable cadre légal, qui rassure les investisseurs, notamment occidentaux. Un autre projet de PPP a ainsi connu un échec commercial retentissant : le pont de Phu My est une réussite technique mais le trafic n'atteint que 25 % de la prévision, car la route d'accès au pont n'a pas été construite, contrairement à l'engagement des autorités.

La frilosité d'une partie des autorités vietnamiennes s'explique aussi par le fait que, dans leur esprit, le financement et la gestion privée d'une infrastructure publique ne vont pas de soi.

Espérons que cette situation s'améliorera bientôt : un décret est en cours de rédaction sur les PPP et quelques projets intéressants sont en préparation.

Le rythme de décaissement de l'aide est relativement bas au Vietnam, puisqu'il n'atteint que 63 %. Ainsi, entre 2006 et 2010, 7 milliards de dollars d'APD ont été contractés sans être déboursés, ce qui traduit une capacité insuffisante d'absorption de l'aide.

Les bailleurs internationaux sont tous confrontés à ce problème et l'abordent avec les autorités vietnamiennes au sein du « groupe des six banques ».

Pour ma part, je me suis limité aux projets de l'AFD, en étudiant le taux de décaissement de chaque projet encore actif. Le taux moyen n'est pas problématique en tant que tel, puisqu'il atteint 20 % par an, c'est-à-dire que l'ensemble d'un prêt est décaissé en cinq ans. Il pourrait néanmoins être plus élevé.

En revanche, certains projets ont des taux de décaissement excessivement bas. Il s'agit en particulier du projet de métro de Hanoï, qui fait l'objet d'un prêt de 110 millions d'euros de l'AFD et d'un soutien de la « Réserve pays émergents » (RPE) à hauteur de 250 millions d'euros.

La convention relative à la première tranche du prêt (80 millions d'euros) a été signée en février 2007, mais sept ans plus tard, seuls 21 % ont été décaissés. La convention relative à la seconde tranche (30 millions d'euros) a été signée en juillet 2011 et son décaissement n'a pas encore commencé.

Il faut dire que le projet de métro connaît des retards importants : il devait être inauguré en 2015, mais ne sera achevé, dans le meilleur des cas, que début 2019. Les responsables vietnamiens du projet de métro - ainsi que le cabinet français Systra, qui assure la maîtrise d'oeuvre - m'ont expliqué qu'ils avaient rencontré des difficultés dans les expropriations.

Les différents bailleurs internationaux considèrent unanimement que les retards dans les décaissements s'expliquent surtout par une bureaucratie extrêmement lourde. Les décisions peinent à être prises et les circuits de décision sont longs.

Le vice-ministre du développement m'a assuré que le problème était identifié et qu'il existait une volonté de le résoudre.

Je me suis également demandé dans quelle mesure notre politique d'APD favorisait les intérêts économiques français.

Le « taux de retour », s'agissant du Vietnam, n'est pas très bon et s'établit à environ 30 %. Cependant, ce taux ne s'applique pas à la subvention de l'État, mais aux engagements de l'AFD, ce qui implique de tenir compte de l'effet de levier de ses prêts, évalué à 13 en 2013 : en d'autres termes, pour un euro de subvention de l'État, l'AFD accorde 13 euros de prêts sur lesquels un peu moins de 4 euros vont à des entreprises françaises. Il y a donc un vrai soutien aux entreprises françaises, mais il n'en demeure pas moins que ce résultat pourrait être amélioré.

Je m'en suis entretenu avec plusieurs interlocuteurs, à commencer par l'ambassadeur de France au Vietnam. Chaque projet financé par l'AFD fait l'objet d'un avis de l'ambassade, qui traite notamment des retombées potentielles pour les entreprises françaises et qui est joint au dossier soumis au comité d'administration. L'ambassadeur m'a assuré de sa grande vigilance sur cette question.

Je peux également témoigner de l'implication de l'AFD locale sur ce sujet, qui se trouve cependant confrontée trop souvent à une absence d'offre française. Notre APD ne finance ni l'aéronautique, ni le nucléaire, qui sont deux de nos principaux secteurs d'exportation. Il est dommage de ne pas disposer d'un tissu de PME dans le secteur de l'électromécanique, contrairement à nos voisins allemands et italiens.

En tout état de cause, les entrepreneurs français que j'ai pu rencontrer sur place et la chambre de commerce n'ont pas adressé de reproches à l'action de l'AFD et ont même salué ses efforts pour informer les entreprises françaises des appels d'offres qu'elle lançait, par des messages personnels et ciblés.

Leurs préoccupations se sont plutôt portées sur les différents systèmes d'aide à l'exportation et de financement des petites et moyennes entreprises (PME), qui dépassent malheureusement le sujet de l'aide publique au développement.

Le nouveau contrat d'objectifs et de moyens de l'AFD prévoit un suivi du critère du taux de retour pour les entreprises françaises.

Enfin, je concluerai en abordant le problème du « ratio grand risque ». En vertu des règles prudentielles, l'AFD ne peut engager plus de 25 % de ses fonds propres auprès d'un même emprunteur ou garant.

L'action de l'AFD au Vietnam n'est pas encore entravée par ce ratio, mais la donne changera dès l'an prochain : les signatures de nouvelles conventions de prêt seront alors limitées aux remboursements en capital.

L'agence de Hanoï espère cependant pouvoir surmonter cette difficulté grâce au développement d'une offre de prêts non souverains. Ceci ne se fait pas sans difficulté car il est nécessaire de préalablement identifier des débiteurs intéressés et intéressants, c'est-à-dire offrant des garanties de sérieux suffisantes.

La situation vietnamienne se distingue de celle d'autres pays, par exemple le Maroc, où se développe également le prêt non souverain : dans le droit vietnamien de l'APD, il n'existe pas d'autre bénéficiaire que l'État. L'APD est en fait une relation bilatérale d'État à État.

En l'absence de véritables collectivités territoriales, il n'est pas toujours facile, pour les autorités locales, d'imaginer qu'une grande entreprise puisse entretenir des relations directes avec un bailleur international.

Pourtant, j'ai perçu un intérêt réel pour cet outil au ministère des finances vietnamien, qui l'analyse comme un moyen de ne pas augmenter l'endettement de l'État.

En conséquence, l'AFD a négocié avec les autorités locales un protocole régissant les modalités de développement de l'activité de crédit non souverain au Vietnam, à la signature duquel j'ai d'ailleurs pris part.

Ce protocole constitue une novation pour l'APD au Vietnam : l'AFD est le premier bailleur à avoir négocié un tel accord et les autorités locales espèrent que les autres suivront. Ce protocole suscite l'enthousiasme et a été évoqué par la plupart de mes interlocuteurs. Plusieurs projets de prêts non souverains sont déjà annoncés, notamment en faveur d'une banque mutualiste agricole - dont j'ai eu l'occasion de visiter une agence et plusieurs projets qu'elle avait financés - et du fonds financier du comité populaire de Hô Chi Minh-Ville, afin de financer le développement d'une université, dans laquelle j'ai également pu me rendre.

M. Edmond Hervé. - Je félicite notre collègue Yvon Collin, avec lequel j'ai été co-rapporteur du budget de l'aide publique au développement. À cet égard, j'ai toujours été surpris de constater que le Gouvernement se complaisait dans une vision limitée de l'APD : il serait nécessaire de mieux prendre en compte la coopération décentralisée, dont le poids est important. En tant que maire de Rennes, j'ai développé un jumelage avec la ville de Hué, qui m'a permis d'apprécier combien les Vietnamiens étaient attachants et courageux. En matière scolaire, nombre de collectivités françaises se sont ainsi impliquées dans la construction d'établissements.

Le tourisme français au Vietnam constitue une composante importante de nos relations bilatérales, mal prise en compte dans les retombées de nos actions de coopération, alors que sur ce plan la France dépasse l'Allemagne et les autres pays européens.

Mme Michèle André. - Le Vietnam fait partie de l'organisation internationale de la francophonie, à l'instar du Laos et du Cambodge. Nous ne pouvons cependant que constater combien la pratique de la langue française a reculé. Sans les subventions aux établissements du réseau français, il n'y aurait probablement plus d'enseignement du français au Vietnam.

L'économie administrée a montré ses limites, qu'illustre l'exemple du pont de Phu My : ce pont a été construit sans voie d'accès suffisante par la route.

La forte présence économique et politique de la Chine fait débat. Ainsi, lors de la dernière réunion de l'Assemblée parlementaire de la francophonie (APF) à Ottawa, les représentants vietnamiens ont soumis une résolution protestant contre l'implantation par la Chine d'une plateforme pétrolière en mer du Sud, dans la zone économique exclusive du Vietnam. Mais la position vietnamienne n'a pas été unanimement partagée, notamment par le Cambodge, en raison du poids économique de la Chine.

M. François Trucy. - Yvon Collin a mis en avant l'importance du Vietnam sur l'échiquier géopolitique. Pourrait-il nous expliquer pour quelles raisons les habitants de Hô Chi Minh-Ville lui ont été reconnaissants d'avoir commencé sa visite par le Sud du pays ?

M. Yvon Collin, rapporteur spécial. - L'histoire récente a aiguisé la concurrence entre le Nord et le Sud du pays. Le Sud reste le principal centre économique et industriel, quand le pouvoir politique est basé au Nord. La plus forte dynamique économique est au Sud du pays : c'est là que se sont mis en place les PPP et que le secteur privé est le plus associé aux projets de développement. Une certaine rigidité administrative est davantage ressentie au Nord. Dans ce contexte, à chaque fois qu'une délégation officielle commence sa visite au Sud, cela est perçu comme une marque de considération par les Vietnamiens vivant au Sud.

Edmond Hervé a raison de souligner l'importance des coopérations décentralisées. J'en citerais deux, ayant eu l'occasion d'en croiser des représentants lors de mon séjour au Vietnam : les actions menées par le centre de prospective et d'études urbaines (PADDI) de la région Rhône-Alpes dans les transports urbains et les opérations de dépollution de la baie d'Halong conduites par la communauté urbaine de Brest. Les coopérations décentralisées devraient effectivement être mieux prises en compte dans le calcul de l'APD.

Pour rebondir sur les propos de Michèle André, j'ai effectivement été témoin du recul de l'apprentissage du français en l'espace de vingt ans. L'anglais domine en tant que langue véhiculaire, accédant au statut que l'esperanto ambitionnait d'atteindre ! Les Français sont perçus positivement au Vietnam et j'ai été bien accueilli. Les Vietnamiens sont attachés aux témoignages historiques, notamment architecturaux, qui subsistent de la présence française.

La commission donne acte de sa communication à M. Yvon Collin, rapporteur spécial, et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information.

La réunion est levée à 11 h 08

Jeudi 17 juillet 2014

- Présidence de M. Philippe Marini, président -

La réunion est ouverte à 10 h 35

Loi de finances rectificative pour 2014 - Examen en nouvelle lecture du rapport

La commission procède tout d'abord à l'examen en nouvelle lecture du rapport de M. François Marc, rapporteur général, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2014.

M. François Marc, rapporteur général. - La commission mixte paritaire a échoué. Comme le Sénat avait rejeté le projet de loi de finances rectificative, c'est sur la base des trente-six articles de son texte de première lecture que l'Assemblée nationale a statué hier en nouvelle lecture. Elle a modifié douze articles. Trente-quatre amendements ont été adoptés, dix-huit à l'initiative du Gouvernement et quatre à celle de la commission des finances. Cinq amendements adoptés par le Sénat, portant sur quatre articles, ont été repris, mais le principe de l'entonnoir prive nos articles additionnels de cet heureux sort.

Si le Sénat rejette le texte en nouvelle lecture, l'Assemblée nationale ne pourra reprendre aucun des amendements qu'il aura adoptés. Compte tenu des positions exprimées en première lecture par les différents groupes politiques, il est raisonnable de penser qu'il n'y aura pas davantage de majorité pour voter ce texte en nouvelle lecture : le Sénat ne sera guère en mesure de faire évoluer le projet de loi de finances rectificative pour 2014. Dans ces conditions, je ne représenterai pas les amendements que j'avais déposés en première lecture.

L'Assemblée nationale a repris certaines dispositions que nous avions adoptées en première lecture. À l'article liminaire, elle est revenue, comme le Sénat l'avait souhaité, à la prévision de solde structurel et de solde conjoncturel de la version initiale du projet de loi.

M. Philippe Marini. - La vertu l'a emporté !

M. François Marc, rapporteur général. - À l'article 1er ter, elle a adopté un amendement, que notre assemblée avait voté à l'initiative de notre collègue Jacques Mézard, prévoyant que les entreprises ne sont responsables que de l'éligibilité à l'éco-prêt à taux zéro des travaux qu'elles réalisent, notamment lorsque ceux-ci sont inclus dans un bouquet de travaux. À l'article 2 bis, elle a retenu un amendement, sous-amendé par le Gouvernement, reprenant celui qu'avait adopté le Sénat à l'initiative de François Patriat et d'André Reichhardt. Il crée un fonds de péréquation géré par l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat et répartit le plafond de la taxe affectée en fonction de la situation financière de chaque chambre consulaire.

En outre, l'Assemblée nationale a également modifié sept articles. À l'initiative du Gouvernement, elle a approuvé une nouvelle rédaction de l'article 1er quater, relatif au marquage et à la traçabilité des produits de tabacs, pour le rendre conforme à la directive européenne, ainsi que cela avait été annoncé en séance au Sénat.

À l'article 2, elle a adopté deux amendements du Gouvernement tenant compte de la relance de l'apprentissage annoncée par le Premier ministre à l'issue de la grande conférence sociale des 7 et 8 juillet derniers, et réaffirmant l'objectif de progression du nombre d'apprentis à 500 000 d'ici 2017. Ces amendements majorent de 21 % à 26 % la fraction de la taxe d'apprentissage affectée aux centres de formation des apprentis et aux sections d'apprentissage et réduisent de 56 % à 51 % celle affectée aux régions. Cette diminution des ressources des régions serait compensée par l'affectation d'une fraction de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Selon le Gouvernement, ces deux amendements devraient dégager, dès 2015, 146 millions d'euros supplémentaires en faveur de l'apprentissage.

Le Gouvernement a également annoncé que les régions verseraient une nouvelle aide de 1 000 euros pour soutenir spécifiquement le développement de l'apprentissage au sein des entreprises de moins de 250 salariés. Cette aide sera compensée par l'affectation d'une fraction complémentaire de TICPE (de l'ordre de 50 millions d'euros) dans le cadre de la loi de finances pour 2015.

À l'article 4 bis, les députés ont, contre l'avis du Gouvernement, supprimé l'annulation de crédits de 204 200 euros portant sur l'INA et majoré à due concurrence celle portant sur France Télévisions. À l'article 5 bis, relatif à la création du péage transit poids lourd, ils ont fixé dans la loi le seuil de 2 500 véhicules assujettis par jour à partir duquel le réseau routier sera concerné par ce péage de transit et ont exonéré les véhicules dédiés au transport de déchets d'animaux ou de carcasses non destinés à la consommation humaine.

M. Philippe Marini, président. - Y en a-t-il beaucoup ?

M. François Marc, rapporteur général. - Une préoccupation légitime s'exprimait sur l'équarrissage...

M. Philippe Marini, président. - Une préoccupation sanitaire et environnementale.

M. François Marc, rapporteur général. - À l'article 5 quater, relatif au versement transport pour les associations et fondations de l'économie sociale et solidaire, elle a adopté un amendement demandant au Gouvernement, avant le 1er octobre 2014, un rapport sur l'impact financier de cet article sur les fondations et associations à but non lucratif à caractère social.

À l'article 5 sexies, portant sur la taxe communale sur la consommation finale d'électricité, l'Assemblée nationale a adopté un amendement, qui avait été proposé par notre commission, pour corriger une erreur de rédaction qui aurait été lourde de conséquences.

Enfin, l'Assemblée nationale a supprimé, à l'initiative du Gouvernement, les deux articles relatifs à la taxe de séjour (relèvement du plafond de la taxe nationale et création d'une taxe spécifique à l'Île-de-France). Ces suppressions procèdent de la philosophie qui nous avait conduits à proposer de reporter l'application de ces deux articles au 1er janvier 2015. En effet, ainsi que l'écrit le Gouvernement dans l'objet de ces amendements, les propositions d'évolution de la taxe de séjour « doivent faire l'objet d'une concertation approfondie en vue d'un réexamen lors de la prochaine loi de finances initiale ».

Compte tenu du stade de la navette auquel nous sommes parvenus, et de l'équilibre global satisfaisant du texte voté par l'Assemblée nationale, je vous propose d'adopter le projet de loi de finances rectificative pour 2014 sans modification.

M. Francis Delattre. - Les modifications mineures qui ont été adoptées ne nous convainquent pas. Nous ne changeons pas de point de vue. Nous voterons résolument contre.

M. Vincent Delahaye. - Les modifications intervenues ne changeront pas notre vote non plus. Je suis content de la suppression de la hausse de la taxe de séjour. Quels sont les crédits nouveaux consacrés à l'apprentissage ? Vous évoquez 146 millions, alors que nous avions voté 200 millions en séance. De plus il semblerait que 500 millions aient été supprimés les années passées. Est-ce le cas ?

Mme Michèle André. - Nous non plus, nous ne changeons pas de position : nous suivrons l'avis du rapporteur général. Comment peser alors que nous n'avons pas mené notre débat jusqu'à son terme ?

M. Philippe Marini, président. - Aimant décortiquer les articles, je partage votre frustration. Espérons que le Sénat, dans sa composition issue du renouvellement de septembre, examinera tous les articles pour affirmer sa position avec plus de lisibilité...

Mme Marie-France Beaufils. - Nous ne changeons pas notre point de vue, notre vote restera négatif. Le Comité des finances locales est inquiet de la modification du versement transport. Quelles seront les conséquences de ce texte sur les finances locales ?

M. François Fortassin. - Le groupe RDSE, dans sa quasi-totalité, suivra le rapporteur général et votera le texte.

M. Philippe Dallier. - Je me réjouis de la suppression de la hausse de la taxe de séjour dans l'attente d'un rapport sur le sujet. Toutefois qu'en est-il du Grand Paris Express ? Comment sera-t-il financé ? Les annonces contradictoires se succèdent. J'avais déposé un amendement demandant au gouvernement un rapport sur ce sujet. Il s'agit tout de même d'une affaire de 30 milliards  d'euros ! Comment le Sénat pourrait-il y voir plus clair et être certain que la solution annoncée à l'automne ne sera pas un cataplasme sur une jambe de bois ?

M. François Marc, rapporteur général. - Votre sollicitude me touche, monsieur le Président. Je vous remercie de me souhaiter une majorité plus forte...

M. Philippe Marini, président. - J'ai constaté dans le passé, qu'il était précieux de disposer d'une majorité soudée et large !

M. François Marc, rapporteur général. - Merci pour vos bonnes intentions. Pour l'instant, dans les commissions mixtes paritaires, nous nous sentons un peu en infériorité...

M. Francis Delattre. - Un simple inconfort !

M. François Marc, rapporteur général. - Le Gouvernement s'est engagé en séance sur le chiffre de 200 millions d'euros pour l'apprentissage : 146 millions d'euros grâce à un abondement de la dotation en faveur de l'apprentissage plus les 50 millions de TICPE affectés aux régions en loi de finances pour 2015. Je n'ai pas les données précises sur les dernières années.

La baisse du versement transport ne devrait pas avoir d'effet sur les finances locales, car le texte se contente d'inscrire dans la loi la jurisprudence sur les exonérations au profit des établissements relevant de l'économie sociale et solidaire. Cet article répond à un souci de sécurisation.

Quant au Grand Paris Express, le Gouvernement a annoncé des solutions dans le projet de loi de finances pour 2015. Je ne peux que m'en tenir à ses engagements tout en faisant confiance à nos rapporteurs spéciaux pour nourrir notre réflexion.

La commission décide de proposer au Sénat d'adopter sans modification l'ensemble du projet de loi de finances rectificative pour 2014.

Accord entre la France et les États-Unis d'Amérique en vue d'améliorer le respect des obligations fiscales à l'échelle internationale et de mettre en oeuvre la loi relative au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers (dite « loi FATCA ») - Examen du rapport

Au cours d'une première réunion tenue le matin, la commission procède à l'examen du rapport de Mme Michèle André, rapporteure, sur le projet de loi n° 706 (2013-2014) autorisant l'approbation de l'accord entre la France et les États-Unis d'Amérique en vue d'améliorer le respect des obligations fiscales à l'échelle internationale et de mettre en oeuvre la loi relative au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers (dite « loi FATCA »)

Mme Michèle André, rapporteure. - Le projet de loi autorise la ratification de l'accord signé le 14 novembre 2013 entre la France et les États-Unis en vue d'appliquer la loi « FATCA » (Foreign Account Tax Compliance Act), auquel notre commission avait consacré des auditions le 3 juillet 2013 et le 12 février 2014. Nicole Bricq, rapporteure générale, en avait perçu les principaux enjeux dès l'année 2011, alors que la mode était aux accords « Rubik ». Désormais, les choses deviennent concrètes, et trouvent une traduction directe sur les relevés de compte adressés par les banques françaises à leur clientèle.

La loi FATCA, adopté en 2010, fait obligation aux banques et établissements financiers du monde entier de transmettre aux États-Unis les informations dont ils disposent sur les contribuables américains, sous peine d'une retenue à la source dissuasive de 30 % des flux concernés. Il a déclenché des progrès considérables dans la lutte contre l'évasion fiscale internationale. Dans le sillage de l'initiative américaine, l'Union européenne et l'OCDE se sont lancées dans l'élaboration de standards d'échange automatique d'informations, bien plus efficaces que l'actuel échange à la demande, ou plutôt « à la carte », tant il dépend de la bonne volonté des partenaires... Avec l'échange automatique, il ne sera plus possible de s'abriter derrière une demande mal formulée ou un quelconque vice de procédure pour ne pas révéler l'identité des contribuables indélicats. L'échange automatique d'informations, autre nom de la transparence fiscale, n'aurait jamais vu le jour sans la loi FATCA.

Comme l'a reconnu Pascal Saint-Amans, directeur du centre de politique fiscale de l'OCDE, le standard de l'OCDE, qui sera présenté au G20 à l'automne prochain, s'inspire directement de FATCA. Il en va de même pour la révision en cours de la directive européenne sur la coopération administrative de 2011. La directive « Épargne » de 2003 a quant à elle fait l'objet d'un accord sur sa révision le 24 mars dernier, à la suite de la levée du veto du Luxembourg et de l'Autriche - eux aussi poussés par l'« aiguillon » de la loi FATCA.

Certes, la méthode employée par les États-Unis est un peu cavalière. Tel que voté en 2010, FATCA était un dispositif unilatéral et extraterritorial, ne laissant aucun choix aux autres pays et à leurs établissements financiers : aucune grande banque, en effet, n'est prête à prendre le risque de perdre l'accès au marché américain, le plus grand du monde.

Mais l'objet de l'accord est très précisément de transformer ce dispositif unilatéral en un accord bilatéral, négocié entre Etats souverains, réciproque et assorti de multiples garanties. Grâce à l'action de la France et de ses principaux partenaires européens du « G5 », la loi FATCA a véritablement changé de nature.

L'accord signé par la France instaure une mise en oeuvre centralisée de FATCA : les données transiteront par la direction générale des finances publiques (DGFiP) au lieu d'être transmises directement par les banques. Cela diminue considérablement les surcoûts financiers, les complications techniques et les incertitudes juridiques qu'impliquait le dispositif d'origine. De plus, les entités et produits soumis à l'échange automatique reçoivent une définition compatible avec le droit français.

Grâce à la « clause de la nation la plus favorisée », la France et ses banques bénéficieront de toute stipulation plus favorable que les États-Unis accorderaient à un autre pays. De plus, nous pourrons toujours invoquer les dispositions du code fiscal américain si celles-ci sont plus favorables. Ainsi, l'accord FATCA sera susceptible d'évoluer dans un sens plus favorable, mais jamais dans un sens moins favorable.

Une incertitude demeure toutefois : la question de la réciprocité de l'accord, et donc de sa compatibilité avec le standard international qui est, lui, parfaitement réciproque. En effet, les élus républicains du Congrès bloquent la transmission du solde des comptes bancaires dans le cadre du dispositif, même si toutes les autres informations (identité du contribuable, revenus versés, banque concernée etc.) pourront être fournies par les États-Unis.

Ne surestimons pas les conséquences de ce blocage. La France pourra toujours solliciter les informations manquantes par l'échange à la demande. Mais la réciprocité est aussi une question de principe : alors que l'Union européenne et l'OCDE mettent chaque pays sur un pied d'égalité, il ne serait pas acceptable que les États-Unis puissent déroger à cette règle. L'article 6 engage explicitement les États-Unis à mettre en oeuvre une réciprocité complète dès que leur droit interne les y autorisera. Le ministre nous rendra certainement compte, en séance, des avancées en la matière - et nous en reparlerons si nécessaire à l'occasion du prochain projet de loi de finances.

Pour sa part, la France doit continuer à soutenir l'adoption d'un standard mondial unique, réciproque et harmonisé, seule réponse viable, à long terme, à la menace que l'évasion fiscale fait peser sur notre souveraineté.

Le chemin parcouru, cependant, est considérable : nous partions d'un dispositif imposé, nous avons un accord négocié, largement réciproque et assorti de multiples garanties. Comme toute négociation internationale, il s'agit d'un rapport de force : quand on se bat, il est possible de faire changer les choses. L'année dernière, par exemple, le commissaire Michel Barnier a obtenu, après d'âpres négociations, que les réglementations américaines - au départ extraterritoriales et unilatérales - et les réglementations européennes en matière de produits dérivés soient considérées comme strictement équivalentes. Surtout, il faut reconnaître à l'initiative américaine le mérite d'avoir provoqué un sursaut international en faveur de l'échange automatique. La loi FATCA n'est pas pour rien dans le changement d'attitude des banques suisses, qui encouragent leurs clients à régulariser leur situation, avec un succès qu'attestent les excellents résultats du « service de traitement des déclarations rectificatives » (STDR) mis en place en juin 2013.

Je vous recommande, pour toutes ces raisons, d'adopter sans modification le projet de loi de ratification.

M. Philippe Marini, président. - Merci pour cette présentation claire et objective.

M. François Marc, rapporteur général. - Votre présentation montre le rôle d'aiguillon du FATCA. Je me réjouis des avancées sur le traitement des dossiers, l'allègement des procédures, le rapprochement des définitions. Reste la question de la réciprocité, sujet que nous avions abordé lors de notre séminaire de juin dernier à Orléans. Des évolutions sont possibles. Comme Michèle André, je me prononce en faveur de la ratification de l'accord.

M. Francis Delattre. - Pascal Saint-Amans nous avait présenté ce premier vrai mécanisme de lutte contre l'évasion fiscale, grâce auquel les banques suisses ont changé d'attitude. Si l'on ne peut que le soutenir, il ne prendra toute sa signification que le jour où nous disposerons d'un système fiscal similaire pour les expatriés français. Un expatrié américain doit, en effet, déclarer au fisc américain l'ensemble de ses revenus, quel que soit le pays où il les a perçus, l'impôt dû au fisc américain étant égal la différence entre l'impôt qu'il devrait payer s'il avait perçu ses revenus aux États-Unis et le montant des impositions acquittées dans les autres pays. Nous devons lancer une réforme fiscale pour être aussi efficaces. Avoir les informations, c'est bien, mais ce n'est rien sans réforme fiscale. Or Bercy n'y est pas très favorable. Des 30 milliards d'euros escomptés d'un changement de réglementation fiscale, il n'y a que 15 milliards d'euros inscrits dans la loi de finances rectificative : une partie de l'écart tient à l'évasion fiscale. Les Américains sont très attachés à leur nationalité. Ils préfèrent respecter la loi plutôt que de courir le risque de la perdre. Leur système repose là-dessus. Avons-nous le même attachement ?

M. Richard Yung - Le débat est récurrent. En France la fiscalité est territoriale, perçue à l'endroit où sont produits les revenus. Passer au système américain impliquerait de renégocier les conventions fiscales que nous avons signées avec près de 150 pays. Les Etats-Unis s'appuient sur leur puissance.

Notre inquiétude concerne le déséquilibre entre les parties à l'accord. Les Etats-Unis nous forcent la main. Nous signons. Puis il suffit que d'obscurs élus au Congrès se prononcent contre la transmission des soldes bancaires pour bloquer la réciprocité. Nous devons être vigilants. Ce texte constitue néanmoins un progrès. Il facilitera l'harmonisation au niveau européen de la lutte contre l'évasion fiscale.

Quel est le périmètre des produits d'épargne qui doivent être déclarés ? Les contrats d'assurances-vie en font-ils partie ? En outre, envisage-t-on d'aller plus loin, en mettant en place un « FATCA européen » ? L'exposé des motifs de la loi FATCA votée en 2010 est clair : il s'agit de soutenir la création des emplois aux Etats-Unis.

M. Francis Delattre. - Pourquoi ne faisons-nous pas de même ?

M. Richard Yung. - Il le faut. Il doit y avoir réciprocité. Je voterai ce texte.

Mme Marie-France Beaufils. - La présentation de notre rapporteure montre des avancées sur des points que nous avions identifiés comme importants. Toutefois, nous devrons réfléchir à l'évolution de nos conventions fiscales. Il faut surtout traiter ce problème au niveau européen. Les Pays-Bas ont par exemple des régimes fiscaux remarquablement accueillants. Nous voterons ce texte mais serons vigilants aux autres questions qui se posent. Les conclusions de notre commission d'enquête sur l'évasion fiscale restent d'actualité.

M. Philippe Marini, président. - Comme je suis viscéralement attaché à la réciprocité, je ne voterai pas cette loi de ratification. Malgré des objectifs louables, la loi FATCA s'inscrit dans le cadre plus large de l'expansion du droit américain à l'ensemble du monde financier. Qu'il s'agisse de la régulation bancaire, de l'édiction de mesures contraignantes à l'égard d'une banque européenne pour l'autoriser à continuer à développer ses activités aux Etats-Unis, ou encore de l'encadrement des mouvements financiers en dollars compensables aux États-Unis, l'approche américaine s'appuie sur la puissance. Ceux qui n'en disposent pas restent toutefois encore libres de ne pas se lier les mains juridiquement.

M. Richard Yung. - Que se passerait-il si la France ne ratifiait pas ce texte ?

Mme Michèle André, rapporteure. - Dans ce cas, c'est la version 2010 de FATCA qui s'appliquerait, et le couperet serait une retenue à la source de 30 % des flux concernés. Je n'envisage pas que la France ne ratifie pas.

M. Philippe Marini, président. - C'est un vote contraint.

Mme Michèle André, rapporteure. - Je connais vos doutes. Mais nous avons tout à gagner. L'accord est quasiment réciproque. À l'exception du solde des comptes, toutes les informations sont couvertes : l'identité des contribuables, les revenus, le nom de la banque, etc.

Les deux élus républicains qui font obstacle sont connus : Rand Paul, sénateur du Kentucky, et Bill Posey, représentant de l'État de Floride. Nous pouvons toutefois obtenir communication des soldes par l'échange à la demande. L'expérience montre que la coopération avec les États-Unis se passe très bien.

M. Francis Delattre. - La réciprocité existe malgré tout !

Mme Michèle André, rapporteure. - On y est presque. Surtout, plutôt que de regretter la méthode, il faut se réjouir du fond, car il n'y a pas de blocage.

Pour répondre à Richard Yung, le périmètre vise les personnes physiques comme les sociétés, les assurances-vie comme les comptes bancaires.

Pour répondre à Marie-France Beaufils, un « FATCA européen » est en préparation, à l'initiative du G5. Il serait impensable que les pays européens n'aient pas accès, comme les Américains, aux informations de la Suisse - comme au rugby, il faut saisir les ouvertures pour avancer. La directive « Épargne » de 2003 a fait l'objet d'un accord de révision le 24 mars dernier. La directive sur la coopération administrative de 2011 est en cours de révision. Par ailleurs, l'Union européenne négocie avec cinq États tiers : la Suisse, le Liechtenstein, Andorre, Monaco et Saint-Marin.

En réponse à Francis Delattre, il faut rappeler que les systèmes fiscaux fondés sur la territorialité (imposition sur les revenus perçus sur un territoire) et sur la nationalité (imposition sur les revenus mondiaux après déduction de ceux perçus sur d'autres territoires) reviennent in fine à peu près au même. L'enjeu de l'échange automatique est plutôt la transparence de l'information : il s'agit de savoir où l'argent est déposé - ou caché -, et non où il est gagné. Enfin, si nous tenons notre feuille de route et si l'Europe est unie, les États-Unis finiront bien par céder sur la réciprocité.

M. Francis Delattre. - Si la réciprocité n'existait pas, nous partagerions l'analyse de Philippe Marini. Comme vous, nous constatons qu'une crise américaine née avec la faillite de Lehman Brothers a eu ses effets les plus désastreux en Europe. Le G20 s'est efforcé de réguler. Selon l'OCDE, organisme sérieux, soixante pays sont déjà d'accord sur l'échange d'informations : nous avançons. Nous avons besoin de l'échange d'informations, nous sommes un pays avec des acteurs importants, notamment les entreprises du CAC 40. En outre, les États-Unis sont véritablement sévères à l'égard de leurs banques, ce qui tranche avec notre attitude à l'égard du Crédit Lyonnais par exemple. Le G20 a travaillé ; l'OCDE est son bras séculier. Même des Gaulois incontrôlables peuvent avoir des analyses nuancées ; il n'y a pas d'autre solution que mondiale...

M. Philippe Marini, président. - J'hésitais entre voter contre le texte et m'abstenir. Vous m'avez convaincu : je me réfugie dans l'abstention.

Mme Michèle André, rapporteure. - Les Américains sanctionnent aussi sévèrement des banques américaines impliquées dans les subprimes. Citigroup, très durement frappée, s'acquittera d'une amende certes inférieure à celle qui a été infligée à BNP Paribas mais qui se chiffre en milliards de dollars. Nous avons bien vu combien les Américains se préoccupent de l'évasion fiscale, qui est bien plus importante chez eux que chez nous. Ils souhaitent y mettre un terme et leurs juges ne sont pas tendres...

Le document que je vous ai distribué indique simplement que les clients de BNP Paribas sont informés, sur leur relevé de compte, de l'entrée en vigueur de la loi FATCA.

M. Philippe Dallier. - Le document indique la date 1er juillet 2014, alors que l'accord n'a pas encore été ratifié.

Mme Michèle André, rapporteure. - La date du 1er juillet 2014 est la date du début de la collecte des données. Celles-ci seront transmises aux États-Unis à partir de 2015, une fois l'accord ratifié.

La commission adopte le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des États-Unis d'Amérique en vue d'améliorer le respect des obligations fiscales à l'échelle internationale et de mettre en oeuvre la loi relative au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers (dite « loi FATCA »).

M. Philippe Marini, président. - Notre déplacement aux États-Unis, l'année dernière, nous a permis de comprendre beaucoup de choses. En fin de compte, nous devrions effectuer chaque année une mission à Washington, où tout se décide...

- Présidence de Mme Marie-France Beaufils, vice-présidente -

Avenir des préfectures - Contrôle budgétaire - Communication

La commission entend une communication de Mme Michèle André, rapporteure spéciale, sur l'avenir des préfectures

Mme Michèle André, rapporteure spéciale de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ». - Rapporteure spéciale de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » (AGTE) depuis 2008, je vous ai rendu compte chaque année de son évolution. Mes conclusions sont le fruit du contrôle budgétaire que j'ai mené durant ces dernières semaines autant que de six ans de contrôle et de suivi.

Les préfectures et les sous-préfectures ont connu ces dernières années, une véritable révolution, silencieuse mais tangible, et qui n'est pas achevée. Elles ont fait de considérables efforts d'adaptation et ont rencontré de réelles difficultés. En quelques années, leur environnement administratif a été bouleversé. Depuis le 1er janvier 2010, la réorganisation de l'administration territoriale de l'État (RéATE) a régionalisé la plupart des services déconcentrés de l'État, désormais regroupés en huit, et non plus vingt, grandes entités régionales : les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF), de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL)...

M. Michel Berson. - Nous les connaissons bien !

Mme Michèle André, rapporteure spéciale. - ...des affaires culturelles (DRAC), de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS), des finances publiques (DRFiP), les services du rectorat et les agences régionales de santé (ARS).

Des directions départementales interministérielles (les DDI) sont apparues. Les directions départementales des territoires (DDT) regroupent les anciennes directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF) et de l'équipement (DDE). Les directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP) reprennent les compétences des anciennes directions départementales de la jeunesse et des sports (DDJS), des affaires sanitaires et sociales (DDASS) en matière d'affaires sociales, des unités départementales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (UDCCRF) et des services vétérinaires. Dans les départements les plus peuplés, une direction départementale de la cohésion sociale (DDCS) et une direction départementale de la protection des populations (DDPP) se substituent à la DDCSPP.

M. François Fortassin. - Quel ésotérisme !

M. Michel Berson. - Au-delà de trois lettres, ces acronymes sont difficiles à mémoriser...

Mme Michèle André, rapporteure spéciale. - Les préfets, surtout de région, ont dû s'adapter à cette nouvelle architecture. Leurs prérogatives budgétaires se sont étendues : le préfet de région identifie avec les directeurs régionaux les besoins des territoires et coordonne au niveau des budgets opérationnels de programme (les BOP) la ventilation des crédits entre les départements. Il apprécie les besoins en personnel dans les départements et arbitre les suppressions, les créations ou les redéploiements d'effectifs. Il lui revient d'optimiser l'allocation des moyens. Pour cela, il s'appuie de plus en plus sur un acteur relativement récent : le secrétaire général aux affaires régionales. Bien connu en région, et malheureusement moins en département, le SGAR coordonne l'action des services régionaux de l'État, s'assure de leur articulation avec les services départementaux, et met en oeuvre certaines politiques européennes. Les équipes de chargés de mission auprès des SGAR se sont rapidement étoffées. Veillons à ce qu'ils ne doublonnent pas les secrétaires généraux des préfectures départementales.

Les préfectures ont connu des évolutions technologiques majeures : passeport biométrique, nouveau système d'immatriculation des véhicules (SIV) et, depuis septembre 2013, nouveau permis de conduire (FAETON). Des difficultés d'organisation et des dysfonctionnements informatiques ont dû être surmontés. Ainsi, la mise en place du passeport biométrique a occasionné des files d'attente en mairie à l'été 2009. Saluons le sens du service public, l'engagement et la résistance des personnels des préfectures qui ont traversé des moments difficiles, aux guichets, face à des usagers parfois impatients. Sans leur abnégation, la modernisation des préfectures aurait pu tourner à l'échec.

Pari hasardeux, au lieu d'évaluer d'abord les gains de productivité qu'apporteraient les nouvelles technologies, les effectifs, ont été considérablement diminués dès 2008, d'où des tensions extrêmement fortes dans les préfectures. Voilà bien les effets pervers de la révision générale des politiques publiques (RGPP), dont le seul effet sensible aura été la réduction des emplois. Ainsi, la préfecture du Rhône a supprimé 50 emplois temps plein sur un total de 2 090 en 2014, en créant en contrepartie 54 de vacataires et de contractuels. Des emplois précaires prennent ainsi en charge des activités de guichet, alors que les personnels vacataires n'ont ni la formation professionnelle, ni l'expérience ou le sens du service public du personnel qu'ils remplacent.

Certaines réformes aideraient sans doute les préfets. La loi organique relative aux lois de finances (LOLF), qui a atteint ses limites, doit être améliorée. Pourquoi, pour certains travaux immobiliers, le préfet de la région Aquitaine doit-il faire avec trois ou quatre BOP et comptes d'affectation spéciale (CAS) ? Pourquoi ne pas créer un BOP commun « Support immobilier régional » ? La gestion des agents en préfecture et dans les DDI est un casse-tête en raison des différences de statut. Les commissions administratives paritaires (CAP) sont organisées par l'administration centrale à des dates différentes selon les ministères et les catégories. Déconcentrons la gestion des CAP pour les agents de catégorie B et C.

Quel est l'avenir des sous-préfectures ? Mieux aurait valu leur laisser l'activité de délivrance de titres plutôt que de confier les passeports aux mairies, sur la base d'un volontariat sujet à caution.

Comme tel n'a pas été le choix retenu, la question de la pérennité de certaines sous-préfectures doit être abordée dans la concertation et en tenant compte des spécificités des territoires, notamment ruraux ou de montagne. La fusion de plusieurs arrondissements et le regroupement des services de l'État dans le Bas-Rhin, le Haut-Rhin et la Moselle ont été annoncés le 4 juillet. D'ici 2016, le nombre d'arrondissements dans le Bas-Rhin passera ainsi de treize à huit. La sous-préfecture de Wissembourg sera absorbée par celle de Haguenau. Les anciens chefs-lieux d'arrondissement accueilleront des permanences de service public et les bâtiments des sous-préfectures supprimées pourront accueillir des centres d'action sociale (CAS) ou des structures de formation. Les agents des sous-préfectures qui disparaissent seront redéployés, pour une économie, modeste, de 50 000 à 65 000 euros par an et par sous-préfecture. Les salaires des sous-préfets économisés seront reversés au budget général de l'État.

Que voulons-nous faire de nos préfectures, quelles missions doivent incomber aux préfets ? Un effort de redéfinition des missions de l'État est nécessaire. Le malaise qu'éprouve le personnel des préfectures trouve aussi sa cause dans l'absence d'une ligne d'horizon claire. La réforme en cours de la carte de nos régions ajoute à la complexité de cette réflexion. Elle implique en effet une adaptation des structures de l'État déconcentré. Remettra-t-elle en question la place et le rôle des préfets de département ? Après le président de la République, le ministre de l'intérieur a récemment évoqué leur montée en gamme. L'accroissement de la taille des régions pourrait conduire à un renforcement de la présence de l'État à l'échelon départemental. Mais, comme l'a souligné Daniel Canepa, ancien préfet de la région Île-de-France, ce renforcement réclamera des moyens, y compris humains. Il en va de même des directions départementales : la direction de la cohésion sociale souffre depuis l'origine du départ des médecins vers les ARS.

Ainsi, la modernisation des préfectures est loin d'être achevée. Leur évolution est nécessaire pour garantir une présence forte et dynamique de l'État dans les territoires. Leurs moyens et leurs missions doivent donc demeurer l'objet des travaux de notre commission.

- Présidence de M. Philippe Marini, président -

M. Philippe Marini, président. - Merci pour la continuité avec laquelle vous conduisez, avec ardeur, le contrôle de la mission « AGTE ».

M. François Marc, rapporteur général. - Je vous remercie de nous faire partager votre intérêt pour cette mission que vous suivez depuis des années. J'ai appris avec surprise que le Bas-Rhin comportait treize arrondissements.

M. Philippe Marini, président. - Le Haut-Rhin en comprend aussi beaucoup.

M. François Marc, rapporteur général. - Cela suppose sans doute des simplifications.

Mme Michèle André, rapporteure spéciale. - Les préfets font des propositions de remodelage...

M. Éric Doligé. - Au fil des années, le préfet de département perd de son pouvoir. Il est mis de côté par les directions régionales et autres ARS, qu'il maîtrise de moins en moins et qui prennent leurs instructions à Paris. Résultat : il n'a plus la main sur les dossiers sensibles, et il est devenu difficile d'obtenir, comme autrefois, des réponses claires et rapides. C'est inquiétant. D'ailleurs, comment s'étonner que les agents des préfectures vivent dans un grand malaise, puisqu'on parle de supprimer les départements ? Les cadres de haut niveau partent pour d'autres collectivités territoriales, alors qu'ils sont indispensables.

M. Francis Delattre. - La réforme de 2010 a été catastrophique pour les départements d'Île-de-France, puisqu'elle a entraîné la quasi-disparition des DDE. Les membres du Conseil général des ponts et chaussées sont tous à la Défense, alors qu'ils seraient plus utiles à conduire les nombreux projets en cours...

M. Philippe Marini, président. - Il faut bien des cimetières d'éléphants...

M. Francis Delattre. - Le ministre de l'intérieur Bernard Cazeneuve annonce une montée en gamme des préfets et projette de faire disparaître les départements, curieux... Dans les grandes régions, il faudra de bons départements.

Mme Marie-France Beaufils. - Qu'attendons-nous des préfets ? S'ils sont porteurs des orientations de la politique de l'État, ils ont de vraies missions. Pour la délivrance des passeports, par exemple, les sous-préfectures demeurent l'échelon pertinent. Les préfets ont-ils gagné ou perdu du pouvoir par rapport aux directions régionales ? La baisse des moyens des directions départementales, qui a conféré plus de poids aux directions régionales, pose problème sur le terrain : celles-ci se renforcent par leur technicité, ce qui pèse parfois les orientations politiques. Le renforcement des régions accroîtra le rôle des préfets, parce que l'État voudra regagner du terrain.

M. Philippe Marini, président. - En effet, nous avons souvent le sentiment que le préfet de département n'a plus la même capacité de décision. Lui qui était le chef des services déconcentrés de l'État et dont le rôle avait été renforcé pendant des années, semble désormais n'avoir plus qu'à mettre en oeuvre les options prises par le préfet de région, voire par les directions régionales. Si un préfet de région n'intervient pas dans un dossier, il laisse un directeur régional imposer bureaucratiquement son avis au préfet de département, pourtant en prise avec les élus, d'où des allers retours, des délais plus longs. Sans prendre parti sur la RGPP, que vous avez critiquée et à laquelle j'ai participé, comment voyez-vous l'avenir des préfets de département ?

Mme Michèle André, rapporteure spéciale. - Les préfets de département ont en effet connu un moment difficile lors de la décision, en 2008, de donner plus de pouvoir aux préfets de région. Qu'allaient-ils perdre ? Eux qui étaient les patrons dans leur département, comment allaient-t-il faire face à la montée en puissance, parfois brutale, de certaines directions régionales ? Certains préfets de région s'entourent systématiquement des avis de leurs préfets de département quand d'autres tranchent systématiquement. Les ministères sont-ils capables de laisser les préfets les représenter à l'échelle du département ? En d'autres termes, les ministres sont-ils prêts à déconcentrer leur pouvoir ? Dans mon département, un projet préparé par la DREAL sans consulter les élus a été interrompu par le préfet de région à leur demande. Certains DRAC imposent une autorité très lourde. La solution passe sans doute par la mise en place d'unités territoriales des directions régionales. Quand certaines ARS ont pris des initiatives éloignées de l'intérêt public, le préfet de région les a ramenées dans la ligne objective d'un travail collectif.

Les SGAR et leurs cabinets concurrencent fortement les secrétaires généraux des préfectures, alors que ceux-ci sont confrontés au quotidien et à l'accueil du public. Savons-nous faire une réforme à froid ? Michel Rocard disait qu'en France, nous ne savons évoluer qu'avec un conflit et une loi. Nous devons réfléchir aux missions régaliennes de l'État, que le préfet doit assurer. Une précision enfin : la suppression des départements comme circonscription administrative n'a jamais été évoquée. Il est question de transformer le rôle des conseils départementaux.

M. Éric Doligé. - De les supprimer !

M. Philippe Marini, président. - Si des méga-régions se réalisent, il y aura inévitablement des méga-DIRECCTE, des méga-DREAL : l'organisation déconcentrée de l'État s'adaptera aux nouveaux schémas. Les préfets de région, moins nombreux, seront d'essence supérieure...

Mme Michèle André, rapporteure spéciale. - Vous êtes bien pessimiste !

M. Philippe Marini, président. - Directement issus de la cuisse de Jupiter tonnant, ces méga-préfets contrasteront avec des préfets de département minorés, qui demeureront les interlocuteurs des élus, mais dans un rapport de force dégradé avec les services déconcentrés sectoriels : le ministre démentira rarement ceux-ci.

Mme Michèle André, rapporteure spéciale. - Si nous sommes capables de définir une répartition utile des tâches, ces évolutions offrent une opportunité de renforcer le rôle de chacun. L'opinion des élus sur les préfets de département varie ; il reste que ceux-ci sont leurs interlocuteurs naturels, au nom de l'État, sur les problématiques des territoires.

M. François Trucy. - Si le conseil général disparaît, les maires, surtout ceux des petites communes, se retrouveront orphelins. Conséquence immédiate de ces turbulences, les sénateurs pourront regagner auprès d'eux une audience et une importance qu'ils avaient perdues ces dernières années. Le préfet de département, et à plus forte raison celui de région, sont trop lointains...

M. Michel Berson. - Il n'y aura pas de suppression de départements, mais nous nous orientons vraisemblablement vers un regroupement, dans chaque grande région, de plusieurs départements entre eux.

M. Philippe Marini, président. - Certainement.

M. Michel Berson. - Pour être équilibrée, la réorganisation territoriale doit entourer des préfets de région forts de préfets de département renforcés. C'est possible, si l'on regroupe des départements qui ont l'habitude de travailler ensemble, par exemple le Haut-Rhin et le Bas-Rhin, ou encore l'Ardèche et la Drôme. Les autorités territoriales de l'État gagneront ainsi en efficacité.

M. Philippe Marini, président. - Une France de cinquante départements, pourquoi pas ? Philippe Dallier avait proposé quelque chose d'analogue pour la petite couronne parisienne...

La commission a donné acte de sa communication à Mme Michèle André, rapporteure spéciale, et en a autorisé la publication sous forme d'un rapport d'information.

La réunion est levée à 12 h 20.

- Présidence de Mme Michèle André, vice-présidente -

La réunion est ouverte à 14 h 36

Sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public - Examen des amendements au texte de la commission (deuxième lecture)

Au cours d'une seconde réunion tenue l'après-midi, la commission procède à l'examen des amendements au texte de la commission sur le projet de loi n° 727 (2013-2014) relatif à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public (deuxième lecture).

Mme Michèle André, présidente- Nous examinons l'amendement n° 1 de nos collègues Dominique de Legge et Francis Delattre.

Article additionnel après l'article 3

M. Francis Delattre. - Je présente cet amendement déposé par Dominique de Legge, qui s'interroge sur la constitutionnalité de la validation législative. En effet, le juge n'a examiné qu'un seul moyen pour annuler les contrats de prêts, à savoir la présence du taux effectif global (TEG). Mais d'autres moyens ont été invoqués devant les tribunaux, notamment la mauvaise information des collectivités territoriales par les banques. Or, sur ce sujet, la validation ne l'emportera pas nécessairement.

L'amendement de notre collègue Dominique de Legge mérite que l'on s'y intéresse, mais je tiens à préciser que, comme en première lecture, le groupe UMP s'abstiendra, afin de favoriser un vote conforme du projet de loi.

M. Jean Germain, rapporteur. - Je remercie notre collègue Francis Delattre d'avoir combattu farouchement cet amendement de façon subtile. Cependant, vu la période et les circonstances, je comprends les raisons pouvant conduire au dépôt d'un tel amendement.

Le Conseil constitutionnel a censuré la précédente disposition traitant de ce sujet, considérant qu'elle n'était pas proportionnée à l'objectif poursuivi. Je pense qu'un risque de 17 milliards d'euros - et même s'il n'était que de 14 milliards d'euros - pesant sur les finances publiques peut être considéré comme un motif impérieux d'intérêt général.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. Francis Delattre. - Je retirerai cet amendement en séance.

M. Philippe Dallier. - Je vais suivre l'avis du rapporteur car je pense que c'est la voix de la sagesse sur un sujet difficile.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1.

La réunion est levée à 14 h 42