II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N° 2857 (2010-2011)

Observations et décision de la Commission :

Le présent article introduit un nouvel outil de maîtrise de la dépense fiscale visant à réduire de manière homothétique (10 %) les avantages fiscaux compris dans le champ du plafonnement global, à l'exception de certains.

À l'instar du plafonnement global, le rabot établit une distinction entre les dépenses fiscales que les finances publiques peuvent assumer et celles qui ne justifient plus un niveau de dépense aussi élevé. Cet article s'inscrit ainsi dans la continuité du travail de rationalisation de l'accès à la dépense fiscale et de son coût mené par le Parlement depuis 2008.

La réduction de certaines dépenses fiscales par le biais du rabot est justifiée au regard de l'augmentation de leur coût et complète les dispositions de plafonnement visant à modérer l'accès à la dépense fiscale (I). Les choix de périmètre et de taux opérés par cet article soulignent néanmoins la volonté de présenter une mesure équilibrée au regard des efforts d'ores et déjà consentis par les ménages dans le cadre de ce budget (II).

I.- L'ÉVOLUTION DU COÛT DE LA DÉPENSE FISCALE JUSTIFIE UNE RÉDUCTION CIBLÉE SUR CERTAINS AVANTAGES

L'opportunité d'introduire un rabot sur les niches fiscales s'inscrit dans la continuité des propositions de la mission d'information sur la dépense fiscale, réalisée de façon transpartisane au sein de la commission des Finances de l'Assemblée nationale 1 ( * ) .

Ces propositions se sont concrétisées par la mise en oeuvre :

- d'une transformation systématique des mesures d'assiette en réductions d'impôt plafonnées (à l'exception du régime applicable aux monuments historiques) ;

- du plafonnement spécifique des niches les plus coûteuses ;

- du plafonnement global de certaines niches.

Cet encadrement de l'accès à la dépense fiscale poursuit une double finalité. Il s'agit, d'une part, d'assurer que l'imposition des contribuables ne soit pas décorrélée du niveau de revenus dont ils disposent et ainsi de renforcer l'équité de traitement entre les contribuables au regard de l'impôt, et, d'autre part, de préserver les recettes de l'impôt sur le revenu fortement grevées par l'accumulation des niches.

Cependant, ces dispositifs visent davantage à limiter les situations d'optimisation fiscale excessives, qu'à limiter le coût global des dépenses fiscales activées par les contribuables. Par ailleurs, en raison de leur création récente, ceux-ci n'ont pas produit tous leurs effets et par conséquent, le coût des principales niches à l'impôt sur le revenu n'a pas diminué (certaines continuent même d'augmenter) .

Or, pour parvenir à atteindre l'objectif intangible de 6 % de déficit public en 2011, la préservation des recettes par le biais de l'encadrement plus strict de la dépense fiscale est essentielle.

À partir de ce constat, l'application d'un « rabot » sur un périmètre large permettait de réduire le coût global de certaines niches, sans remettre en question leur intérêt pour les contribuables (du fait d'une baisse modérée des taux).

Au cours de la présentation des mesures contenues dans le présent projet de loi, le terme de « réduction homothétique » s'est substitué au terme de rabot. Ce changement d'appellation souligne l'évolution dans le temps de l'objectif poursuivi par ce dispositif. Si à l'origine, le rabot visait un montant d'économie conséquent et devait donc porter sur un périmètre large, la réduction homothétique constitue davantage une mesure de toilettage du taux des niches concernées, comprises dans un périmètre restreint. Cette évolution s'explique par la volonté de ne pas faire peser un effort trop important sur les ménages, d'ores et déjà impactés par de nombreuses mesures prévues par le présent projet de loi.

1.- Le coût des niches fiscales au regard du produit de l'impôt sur le revenu

Les avantages fiscaux relatifs à l'impôt sur le revenu constituent l'ensemble le plus important (en termes de nombre et de coût) des dépenses fiscales présentées dans le fascicule « Voies et moyens ». Sur un montant total de 74,8 milliards d'euros pour 468 dépenses fiscales, le montant de celles propres à l'impôt sur le revenu est de 37,5 milliards d'euros en 2010, soit un peu plus de 50 % de l'ensemble des dépenses.

VENTILATION DU COÛT DES DÉPENSES FISCALES PAR TYPE D'IMPÔT

Mds€

%

Impôt sur le revenu (hors mesures communes IR-IS)

37,5

50,16 %

TVA

17,2

23,01 %

Impôt sur les bénéfices (yc IR)

10,2

13,64 %

Taxes intérieures énergétiques

3,1

4,18 %

Droits d'enregistrement

2,7

3,61 %

Impôts locaux

2,2

2,99 %

ISF

1,1

1,47 %

Divers

0,7

0,94 %

Total

74,8

100 %

Source : Fascicule « Voies et moyens » pour 2010, tome II

Le tableau suivant retrace l'augmentation de la dépense fiscale propre à l'impôt sur le revenu depuis 2007 (+ 12 %, dont une augmentation de 18 % du coût des crédits d'impôt).

VENTILATION DU COÛT DES DÉPENSES FISCALES RELATIVES À L'IMPÔT SUR LE REVENU
PAR TYPE DE DÉPENSE

(en milliards d'euros)

Coût 2007

Coût 2008

Coût 2009

Coût 2010

Estimation Coût 2011

Dépense fiscale à l'impôt sur le revenu:

- dont crédit d'impôt

- dont réduction d'impôt

Total seuls RI / CI

32

7,8

5

12,8

34,5

9,8

4,3

14,1

38,9

12

4,7

16,7

37,5

10,9

4,9

15,8

33,3

9,5

5

15,5

Source : Fascicule « Voies et moyens » pour 2011, tome II

La baisse du coût de la dépense fiscale depuis 2010 doit être interprétée de façon prudente puisque des déclassements conséquents sont intervenus depuis 2009 (déclassement de l'abattement de 40 % sur certains revenus distribués de sociétés françaises ou étrangères chiffré à 1 milliard d'euros en 2009 ou de la déduction du revenu imposable des cotisations de retraite complémentaire des non-salariés chiffrée à 800 millions d'euros en 2011).

Cette évolution du coût de la dépense fiscale est à apprécier au regard de celle du produit net de l'impôt sur le revenu qui correspond à 48 milliards d'euros pour 2011.

ÉVOLUTION DU PRODUIT NET DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

(en milliards d'euros)

2007

2008

2009

2010

Estimation
2011

Impôt sur le revenu

48,5

50,7

50,4

48,9

47,8

Par ailleurs, l'introduction de nouvelles niches fiscales dans des véhicules législatifs très différents et la difficulté de modifier ces mesures une fois adoptées, légitiment d'autant plus le recours à des outils transversaux comme le rabot sur les niches fiscales ou le plafonnement global qui permettent de traiter uniformément l'ensemble des niches comprises dans leur périmètre.

2.- Le rabot constitue un dispositif de rendement complémentaire des mesures de plafonnement

a) L'évolution du coût des niches comprises dans le champ du plafonnement global

À l'initiative de l'Assemblée nationale, le législateur a introduit un nouvel article 200-0 A dans le code général des impôts (CGI) disposant que le total de certains avantages fiscaux relatifs à l'impôt sur le revenu ne peut procurer une réduction de l'impôt dû par le foyer concerné supérieure à 25 000 euros majorés de 10 % du revenu imposable de 2009, et à 20 000 euros et 8 % du revenu imposable de 2010.

Par conséquent, tout avantage supérieur au plafonnement global ainsi déterminé ne permet plus de minorer l'imposition du contribuable. L'objectif poursuivi est d'empêcher des personnes bénéficiant de hauts revenus d'annuler totalement leur imposition par l'utilisation excessive de certaines niches fiscales grâce à la fixation du montant maximal que peut atteindre la réduction d'impôt ainsi obtenue.

Le plafonnement global ne vise pas à réduire le coût de la dépense fiscale (bien qu'il y participe indirectement), mais garantit que ce recours ne soit pas excessif au point d'annuler l'imposition de contribuables disposant de revenus importants.

Ce plafonnement s'exerce par ailleurs sur un périmètre réduit de dépenses fiscales. Ainsi, sont explicitement exclus de l'application de l'article 200-0 A du CGI les dispositifs accordés au titre d'une situation subie (situation familiale, situation professionnelle...). À ceux-ci s'ajoutent les avantages liés à la poursuite d'un intérêt général sans contrepartie (les dons). Seuls les avantages en impôt reçus en contrepartie d'un investissement ou du recours à une prestation sont donc susceptibles d'être plafonnés au regard de l'avantage total en impôt que le contribuable en retire.

Cette distinction doit en principe permettre d'assurer une certaine équité fiscale entre les contribuables dont les dépenses subies sont importantes et ceux dont l'épargne est majoritairement tournée vers des activités à caractère économique.

Parmi les dix-sept dépenses fiscales les plus coûteuses (qui représentent plus de 50 % du coût total des dépenses fiscales), douze sont relatives à l'impôt sur le revenu pour un montant de 21 milliards d'euros, parmi lesquelles quatre sont comprises dans le champ du plafonnement global pour un montant de 7 milliards d'euros 2 ( * ) .

Le plafonnement global porte donc sur un ensemble de niches dont le coût cumulé est conséquent (voir infra ) et en constante évolution. Le tableau suivant retrace l'évolution du coût des plus importantes d'entre elles pour la période 2008-2011 :

(en millions d'euros)

2008

2011

Évolution en %
par rapport à n-3

Réduction d'impôt salarié

Total RI/CI salarié à domicile

2 595

3050

+ 15

Crédit d'impôt frais de garde des jeunes enfants

840

900

+ 7

Crédit d'impôt équipements habitation principale

2 100

1 950

- 7

Réduction d'impôt investissements outre-mer

940

1 130

+ 17

Crédit d'impôt intérêt d'emprunt

249

1 900

+ 87

b) Le rabot a été conçu de manière à s'appliquer à l'ensemble des contribuables bénéficiant des niches comprises dans le périmètre du plafonnement global

La référence au périmètre du plafonnement global fait du rabot une mesure strictement réservée aux ménages, bien qu'il aurait pu être envisagé d'élargir ce périmètre.

Toutefois, le rabot se distingue nettement du plafonnement global en ce qu'il ne poursuit qu'un objectif de rendement. Alors que le plafonnement global et les plafonnements propres aux réductions d'impôt ne concernent que les personnes les plus aisées, le rabot est d'application universelle et touche les ménages proportionnellement au montant de dépenses qu'ils réalisent.

Pour un même montant d'investissement, les contribuables bénéficieront donc d'une moindre réduction d'impôt. Seules les personnes disposant de revenus suffisants pourront décider d'augmenter leur investissement pour parvenir au même montant d'avantage fiscal. L'ensemble des dispositifs étant plafonné, cette faculté reste néanmoins limitée.

En 2011, un contribuable décide d'investir 250 000 euros dans un logement Scellier respectant la norme « bâtiment basse consommation ». En application du droit en vigueur, il bénéficie d'une réduction d'impôt de 25 % de son investissement, soit 62 500 euros, répartie en parts égales sur neuf ans (6 944 euros par an).

En application du rabot, le taux est abaissé à 22 % (25*0,9 arrondis à l'unité inférieure). Si le contribuable souhaite maintenir son niveau de réduction d'impôt initial, il est contraint d'investir 284 090 euros, soit 12 % de plus.

Dans ce cas, l'économie générée par le rabot est remise en cause par la modification de comportement du contribuable.

Si ce même contribuable réalise un investissement au plafond, soit 300 000 euros, dans un même type de logement, il bénéficie en application du droit en vigueur d'un taux de 25 %, soit d'une réduction d'impôt de 75 000, répartie sur neuf ans (8 333 euros par ans).

Toutefois, en application du rabot, le taux appliqué à ce montant d'investissement au plafond n'est plus que de 22 % et la réduction d'impôt de 66 000 euros (7 333 euros par an). Ainsi, même dans le cas où le contribuable déciderait de dépenser davantage, il ne bénéficierait pas d'une réduction d'impôt supérieure.

Dans ce cas, le rabot génère une véritable économie.

Le rabot ne s'oppose donc pas à ce que les contribuables puissent continuer de diminuer autant qu'auparavant leur imposition :

- soit en recourant plus intensivement à des niches qu'ils ne plafonnent pas ;

- soit en recourant à des niches exclues de son périmètre.

Cependant, il faudra pour cela que ces contribuables disposent de ressources financières suffisantes pour investir ou dépenser davantage afin de parvenir au niveau de réduction d'impôt totale dont ils bénéficiaient avant l'introduction du rabot. Par conséquent, le montant des avantages fiscaux des ménages les plus modestes ou des ménages peu sensibles aux démarches de défiscalisation devrait baisser plus sensiblement que celui des ménages les plus aisés.

Le rabot pourrait donc être utilement complété par l'abaissement du niveau du plafonnement global afin que les contribuables les plus aisés et optimisant au maximum leur recours aux niches fiscales ne puissent continuer à diminuer autant qu'auparavant leur imposition.

Ce nouvel outil est donc complémentaire des mesures de plafonnement mises en oeuvre ces dernières années puisqu'il garantit que les personnes maximisant leur avantage fiscal contribuent davantage à cette mesure de rendement, tout en réduisant l'intérêt d'une dépense supplémentaire pour les personnes en deçà des plafonds. De plus, à l'instar des plafonnements, il ne remet pas en cause la légitimité de la dépense fiscale, mais uniquement une partie de son coût au regard des capacités actuelles des finances publiques.

Les choix qui ont présidé à la rédaction du présent article emportent néanmoins des conséquences sur le rendement de la mesure afin d'en atténuer l'impact pour les ménages concernés.

II.- UN RABOT AUX CONSÉQUENCES LIMITÉES SUR LE COÛT DES DÉPENSES FISCALES

Le rabot proposé par le présent article applique une réduction de taux de 10 % à un ensemble de réductions d'impôt dont le périmètre est plus restreint que celui du plafonnement global.

1.- Une réduction des taux modérée par la volonté de ne pas remettre en cause la légitimité des dépenses fiscales ciblées

a) Le choix d'une minoration de chacun des taux des réductions et crédits d'impôts concernés

Le taux de 10 % proposé par le présent article est cohérent au regard de l'objectif poursuivi par le rabot qui vise à réduire le coût global de certaines niches sans remettre en question leur légitimité. Il a vocation à s'appliquer à la fois aux taux des réductions et des crédits d'impôt, aux plafonds d'imputation annuelle de ces avantages, ainsi qu'aux plafonds de ces avantages admis en imputation, qu'ils soient exprimés en euros ou en pourcentage d'un revenu.

Concrètement, ces montants ou ces taux sont multipliés par 0,9, puis arrondis à l'unité inférieure. Le rabot ne s'applique qu'une seule fois en application des dispositions définies par la loi. Les taux ainsi modifiés seront ensuite substitués par décret en Conseil d'État aux taux en vigueur dans le code général des impôts.

Une alternative à cette solution aurait consisté à prévoir la réduction de 10 % du montant de l'avantage cumulé au titre de ces réductions et crédits d'impôts. Les taux en vigueur auraient ainsi été maintenus et un tel rabot aurait constitué une nouvelle étape de calcul de l'impôt venant réduire le montant cumulé de ces avantages avant leur imputation sur l'imposition due. Il aurait alors été possible, au cours des années, d'en ajuster le périmètre.

Les conséquences du rabot tel que défini par cet article, soit la réduction de l'ensemble des taux et des montants d'avantages obtenus, sont néanmoins plus lisibles pour le contribuable.

b) La traduction mathématique de cette minoration

Un contribuable marié qui décide d'acquérir un logement faisant partie d'une résidence de tourisme classée située dans une zone de revitalisation rurale pour un montant de 100 000 euros (soit au plafond) bénéficie actuellement d'un taux de 25 % qui lui procure un avantage en impôt de 25 000 euros. Cet avantage peut être réparti pendant six ans dans la limite d'un plafond annuel d'imputation égal au sixième de 25 000 euros.

En application du présent rabot, ce contribuable bénéficiera pour un investissement équivalent, d'un taux de 22 % (25*0,9 arrondis à l'unité inférieure), soit d'un avantage de 22 000 euros.

Le plafond annuel d'imputation est diminué dans les mêmes proportions (soit au sixième de 22 000 euros).

L'application du rabot aux réductions d'impôt accordées au titre d'investissements réalisés outre-mer dont une partie est restituée à l'exploitant ultramarin (soit au titre des investissements productifs prévus à l'article 199 undecies B) est plus complexe.

En effet, la réduction des taux proposée porte sur la totalité de la réduction d'impôt sans distinction entre la part rétrocédée et la part non rétrocédée.

Afin de ne pas pénaliser les exploitants ultramarins, l'article prévoit donc de majorer le taux de la part rétrocédée à hauteur de la réduction du taux de la part non rétrocédée. Les exemples suivants présentent schématiquement les conséquences de l'application du rabot à ces avantages.

En application de l'article 199 undecies B, un investissement de 100 000 euros donne droit à une réduction d'impôt de 50 %, soit 50 000 euros. La part de cette réduction d'impôt rétrocédée à l'exploitant ultramarin est quant à elle de 50 %, soit de 25 000 euros. Le contribuable bénéficie donc d'un avantage net en impôt de 25 000 euros.

Dans le cas où seul le taux de la part non rétrocédée aurait été modifié, l'exploitant ultramarin aurait été perdant à la mesure au même titre que le contribuable défiscalisant une partie de ses revenus. En effet, le taux de la réduction d'impôt aurait alors été de 45 % ouvrant droit à un avantage de 45 000 euros. Le taux de la part rétrocédée serait resté inchangé et l'exploitant n'aurait plus bénéficié que de 22 500 euros (45 000*50 %).

Par conséquent, le présent article prévoit que la part rétrocédée soit majorée de façon à assurer un avantage équivalent pour les exploitants. En application du rabot, le taux appliquée à la part non rétrocédée est de 45 %, donnant lieu à un avantage de 45 000 euros. Le taux applicable à la part rétrocédée est quant à lui augmenté de 6 % et donne lieu à une restitution de 25 200 euros (45 000*56 %). Le contribuable métropolitain ne perçoit plus qu'un avantage net de 19 800 euros.

Le raisonnement est le même dans le cas d'investissement de montants supérieurs.

Dans le cadre d'un investissement de 1 million d'euros, le taux de la réduction de 50 % est abaissé à 45 % (soit 450 000 euros de réduction d'impôt). La part de l'avantage rétrocédé qui, en application du droit en vigueur, est de 60 % correspond dans le cadre du rabot au deux tiers de la réduction d'impôt.

L'exploitant se voit restituer 300 000 euros (450 000*2/3), tandis que le contribuable perçoit 150 000 euros (450 000 - 300 000).

TABLEAU RÉCAPITULATIF DE LA MODIFICATION DES TAUX APPLICABLES À L'ARTICLE 199 UNDECIES B

Investissement = 300 000 euros

Investissement = à 1 million d'euros

Réduction d'impôt

Part rétrocédée

Réduction d'impôt

Part rétrocédée

Taux en vigueur

50 %

50 %

50 %

60 %

Taux après application du rabot

45 %

56 %

45 %

66,66 %

Par ailleurs, ces modifications entraînent des conséquences sur le calcul du plafonnement spécifique des réductions d'impôt propres à l'outre-mer.

Dans un premier temps, l'article prévoit que, lorsque plusieurs avantages fiscaux sont soumis à un plafond commun, celui-ci est également soumis au rabot. Le plafond spécifique à l'outre-mer portant sur les réductions d'impôt prévues aux articles 199 undecies A, 199 undecies B et 199 undecies C est donc abaissé de 40 000 euros à 36 000 euros. Le plafond optionnel de 15 % du revenu du foyer est abaissé à 13 %.

Ces deux plafonds ne prennent en compte que la part non rétrocédée de la réduction d'impôt, c'est-à-dire l'avantage fiscal définitif du contribuable.

Le montant maximal imputable des fractions ou reports de réductions d'impôt correspondant à la part rétrocédée de l'avantage et non retenus dans le plafond de 40 000 euros, est soumis à un plafonnement particulier limité à 60 000 euros dans le cas où l'avantage est rétrocédé à hauteur de 60 % à l'exploitant et à 40 000 euros dans le cas où la rétrocession s'élève à 50 %. Par conséquent, l'avantage maximal en impôt que peut obtenir un contribuable au titre de l'un des investissements visés par l'article 199 undecies B est de 100 000 euros (part rétrocédée comprise).

Ce plafond est maintenu par le présent article. Au contraire, les plafonds applicables à la réduction d'impôt de l'article 199 undecies A sont diminués de 10 %. De la même façon les plafonds spécifiques aux investissements réalisés par des exploitants agissant à titre professionnel au sein de leur propre entreprise sont limités à 90 000 euros pour une année (contre 100 000 euros précédemment) et à 270 000 euros pour une période de trois ans (contre 300 000 euros).

On constate donc que le rabot tel qu'il est proposé dans cet article favorise l'investissement intermédié prévu à l'article 199 undecies B au regard des investissements directs de l'exploitant ou des investissements prévus à l'article 199 undecies A.

TABLEAU RÉCAPITULATIF DES PLAFONDS DE RÉDUCTIONS D'IMPÔT POUR DES INVESTISSEMENTS EN OUTRE-MER SOUMISES AU RABOT

(en euros)

Plafonds en vigueur

Nouveaux plafonds

199 undecies A

40 000

36 000

199 undecies B

- part rétrocédée de 50%

- part rétrocédée de 60%

40 000 + 40 000 = 80 000

40 000 + 60 000 = 100 000

36 000 + 45 800 = 81 800

36 000 + 72 000 = 108 000

Investissement direct de l'exploitant

100 000 ou 300 000 (pour une période de 3 ans)

90 000 ou 270 000
(pour une période de 3 ans)

2.- Le choix d'un périmètre restreint

Le rabot a été conçu comme une mesure de rendement appliquée aux avantages fiscaux contenus dans le périmètre du plafonnement global, soit ceux obtenus en contrepartie d'un choix d'investissement ou du recours à une prestation. Les réductions d'impôt venant compenser des situations subies (familiales ou professionnelles) ne sont pas concernées par cette mesure. Cependant, certaines dépenses fiscales ont été exclues de son périmètre d'application alors qu'elles sont soumises au plafonnement global. Le Gouvernement a ainsi limité l'impact du rabot sur les ménages d'ores et déjà contributaires d'une part importante de l'effort de réduction des dépenses fiscales porté par le présent projet de loi.

a) Le périmètre du rabot représente moins du tiers de celui du plafonnement global en montant cumulé d'avantages fiscaux

Sur la base des éléments disponibles dans le « Voies et moyens » consacré aux dépenses fiscales, annexé au projet de loi de finances pour 2011, le montant cumulé des réductions d'impôt et crédits d'impôt pris en compte par le plafonnement global correspond à 10 milliards d'euros.

PÉRIMÈTRE DU PLAFONNEMENT GLOBAL

(en millions d'euros)

Réduction d'impôt ou crédit d'impôt accordés au titre :

Base légale

Dépense fiscale en 2010

- des souscriptions de parts de fonds d'investissement de proximité situé en métropole et en Corse

art. 199 terdecies

83

- des souscriptions de parts de fonds communs de placement dans l'innovation

art. 199 terdecies

110

- des souscriptions au capital des petites et moyennes entreprises

art. 199 terdecies

230

- de l'emploi d'un salarié à domicile

art. 199 sexdecies

3 050

-  des souscriptions au capital des Sofica et Sofipêche

art. 199 unvicies

art. 199 quatervicies

30

-

- des travaux de restauration et de conservation d'objets classés

art. 199 duovicies

1

- des investissements immobiliers locatifs dans le secteur du tourisme ou hôtelier à vocation sociale

art. 199 decies E à 199 decies G art. 199 decies I

50

-

- des investissements forestiers

art. 199 decies H

8

- des investissements immobiliers locatifs

art. 199 septvicies

art. 199 sexvicies

art. 31, I-1°, h et 31 bis

art. 31, I-1°, l

100

20

400

100

- des investissements en outre mer (1)

art. 199 undecies A

art. 199 undecies B

art. 199 undecies C

370

700

60

- de la télédéclaration

art. 199 novodecies

-

- des opérations de restauration immobilière

art. 199 tervicies

5

- des intérêts d'emprunt pour l'acquisition de l'habitation principale

art. 200 quaterdecies

1 900

- des équipements de l'habitation principale favorable au développement durable

art. 200 quater

1 950

- des frais de garde des jeunes enfants

art. 200 quater B

900

- des dépenses en faveur de la prévention des risques technologiques

art. 200 quater C

nc

- des revenus distribués

art. 200 septies

-

- des primes d'assurance pour garantir les loyers impayés

art. 200 nonies

6

TOTAL

10 073

(1) Dans les cas où la loi impose la rétrocession d'une partie de la réduction d'impôt obtenue (selon les cas de 65 %, 60 % ou 50 %), celle-ci n'est retenue que pour la fraction de son montant correspondant à l'avantage réel dont bénéficie in fine le contribuable (soit respectivement 35 %, 40 % ou 50 %).

Par conséquent, l'application d'un rabot de 10 % sur l'ensemble des niches comprises dans ce périmètre aurait permis un rendement d'un milliard d'euros.

Cependant, le Gouvernement a fait le choix d'exclure du rabot deux des mesures les plus coûteuses au regard de l'impôt sur le revenu, soit les crédit et réduction d'impôt au titre des dépenses réalisées pour l'emploi d'un salarié à domicile (3 050 millions d'euros) et les frais de garde des jeunes enfants (900 millions d'euros).

Enfin, la réduction d'impôt prévue par l'article 199 undecies C est également exclue du rabot au titre de l'effort prioritaire que représente la construction de logements sociaux en outre-mer (60 millions d'euros).

Si l'on ajoute à ces exclusions la suppression - prévue par l'article 56 du présent projet de loi - de l'article 200 quaterdecies portant sur le crédit d'impôt au titre des intérêts d'emprunt supportés pour l'acquisition de l'habitation principale, le rendement de la mesure n'est plus que de 366 millions d'euros.

PÉRIMÈTRE DU RABOT SUR LES DÉPENSES FISCALES

(en millions d'euros)

Réduction d'impôt ou crédit d'impôt accordés au titre :

Base légale

Dépense fiscale en 2010

- des souscriptions de parts de fonds d'investissement de proximité situé en métropole et en Corse

art. 199 terdecies-0 A

83

- des souscriptions de parts de fonds communs de placement dans l'innovation

art. 199 terdecies-0 A

110

- des souscriptions au capital des petites et moyennes entreprises

art. 199 terdecies-0 A

230

-  des souscriptions au capital des Sofica et Sofipêche

art. 199 unvicies

art. 199 quatervicies

30

-

- des travaux de restauration et de conservation d'objets classés

art. 199 duovicies

1

- des investissements immobiliers locatifs dans le secteur du tourisme ou hôtelier à vocation sociale

art. 199 decies E à 199 decies G art. 199 decies I

50

-

-  des investissements forestiers

art. 199 decies H

8

- des investissements immobiliers locatifs

art. 199 septvicies

art. 199 sexvicies

100

20

- des investissements en outre mer (1)

art. 199 undecies A

art. 199 undecies B

370

700

- des opérations de restauration immobilière

art. 199 tervicies

5

- des dépenses en faveur de la prévention des risques technologiques

Art. 200 quater C

nc

- des équipements de l'habitation principale favorable au développement durable

art. 200 quater

1 950

- des primes d'assurance pour garantir les loyers impayés

art. 200 nonies

6

TOTAL

3 663

Par conséquent, l'objectif de rendement de la mesure est nettement subordonné à la préservation de certains avantages fiscaux, ce qui est cohérent avec la volonté de ne pas pénaliser trop fortement les ménages concernés.

b) La préservation de deux types de dispositifs

? Les avantages en faveur de l'emploi à domicile

Les réduction et crédit d'impôt en faveur de l'emploi à domicile et le crédit d'impôt au titre des frais de garde pour jeunes enfants sont exclus du champ du rabot au motif qu'ils sont favorables au développement de ces services et donc de l'emploi (108 000 équivalents temps plein ont été créés dans ces secteurs entre 2006 et 2008). Les contribuables eux-mêmes n'auraient a priori pas renoncé à employer une personne à domicile puisque la réduction des taux en application du rabot est modérée et n'est donc pas désincitative en elle-même. Elle renchérit néanmoins le coût du service.

Un contribuable ayant recours à un jardinier pour un montant annuel de dépenses de 2 500 euros et au service d'une assistante maternelle pour la garde d'un enfant de moins de 6 ans pour un montant de 2 300 euros (soit au plafond de l'assiette du crédit d'impôt) aurait bénéficié, en application du rabot de :

- 1 125 euros au lieu de 1 250 (soit 2 500*45 % au lieu de 2 500*50 %)

- 1 035 euros au lieu de 1 150 euros (soit 2 300*45 % au lieu de 2 300*50 %).

Son avantage en impôt serait ainsi passé de 2 400 euros à 2 160 euros.

? Le logement social en outre-mer

L'article 199 undecies C introduit par la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer permet aux personnes physiques et aux entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu d'investir dans le secteur du logement locatif social.

30 000 logements sociaux manquent en effet à ces territoires et un certain nombre de projets devraient être réalisés pour un coût estimé en termes de réduction d'impôt à 60 millions d'euros pour 2011.

3.- La neutralisation du rabot au titre du bouclier fiscal

Le présent article prévoit de modifier l'article 1649-0 A du code général des impôts relatif au bouclier fiscal afin de neutraliser l'effet du rabot pour les contribuables en bénéficiant. L'impôt sur le revenu retenu est donc calculé sans prendre en compte la réduction de 10 % des avantages fiscaux concernés.

a) A priori , les contribuables au bouclier n'ont pas d'intérêt à recourir aux niches fiscales

Le recours aux niches fiscales est neutre pour les contribuables bénéficiant du bouclier. Le droit à restitution est en effet calculé sur la base des revenus considérés avant toute mesure de minoration et des impôts réellement acquittés, soit après application des éventuels réductions ou crédits d'impôt. Par ailleurs, les seules niches à l'impôt sur le revenu ne permettent pas à des personnes au bouclier de réduire leur imposition en deçà de 50 % de leurs revenus puisque même dans le cas de revenus imposés au barème très élevés, il serait impossible de dépasser un taux moyen d'imposition de 50 %, sans que n'intervienne une imposition au titre du patrimoine détenu.

Les contribuables au bouclier fiscal ne peuvent donc pas optimiser davantage leur imposition par la seule utilisation de niches fiscales afférentes à l'impôt sur le revenu. Par ailleurs, le recours aux niches fiscales diminue pour l'avenir le montant de leur restitution. Ils n'ont donc pas d'intérêt à les actionner.

b) Les contribuables au bouclier les plus aisés peuvent néanmoins bénéficier d'importants montants de réductions d'impôt du fait des crédits d'impôt visant à éviter la double imposition et de certains investissements.

2 646 contribuables ayant bénéficié du bouclier fiscal en 2009 ont actionné des montants moyens de réductions d'impôt et de crédits d'impôt conséquents, puisque l'avantage moyen est de 11 483 euros et que l'avantage maximal est de 1,83 million d'euros au titre des revenus de 2009. 23 personnes auraient bénéficié de réductions d'impôt de plus de 100 000 euros.

MONTANT DES AVANTAGES FISCAUX DES FOYERS TAXÉS MARGINALEMENT À 40 %
ET SOUMIS AU BOUCLIER

Nombre de foyers

Montant cumulé des RI-CI (en M€)

Montant moyen des RI-CI (en €)

Montant médian des RI-CI (en €)

Montant maximal de l'avantage fiscal (en M€)

2 646

30,38

11 483

6 115

1,83

Ces chiffres s'expliquent notamment par le crédit d'impôt neutralisant la double imposition au titre des impôts retenus à la source à l'étranger et des crédits d'impôt prévus par les conventions internationales. Selon le Gouvernement, ils s'expliqueraient également par le recours à des investissements en outre-mer (éventuels reports compris).

La mesure de neutralisation proposée par le présent article est donc nécessaire dans le cas où des contribuables au bouclier réaliseraient des investissements ou auraient recours à des prestations ouvrant droit à l'un des avantages en impôt compris dans le périmètre du rabot. En effet, en l'absence d'une telle mesure, le montant de cet avantage serait alors diminué par la réduction des taux, ce qui aurait pour effet d'augmenter le montant d'impôt acquitté, ainsi que le montant de la restitution.

L'article prévoit ainsi que les restitutions et les dégrèvements d'impôt sont retenus pour des montants calculés sans application du rabot sur les éventuelles dépenses déclarées ouvrant droit à réduction d'impôt. Le supplément d'imposition lié à la diminution de 10 % de l'avantage fiscal sera donc effectivement acquitté par les contribuables bénéficiant du bouclier fiscal, s'ils continuent de déclarer ces dépenses.

III.- LES ÉCONOMIES INDUITES PAR LE DISPOSITIF

Le Gouvernement estime le gain budgétaire à 430 millions à compter de 2012 (les estimations étant réalisées sur un chiffrage de 2010). Ce gain serait de 366 millions si l'on se fondait sur les estimations de chiffrage pour 2011.

1,9 million de foyers fiscaux sont concernés sur 36 millions de foyers fiscaux.

*

* *

La Commission examine l'amendement II-CF 259 de M. Gaël Yanno, ainsi rédigé :

I.- À l'alinéa 1, après la référence : « 199 sexdecies », insérer la référence : « 199 undecies B ».

II.- Après l'alinéa 6, insérer un II bis ainsi rédigé :

« II bis . - À l'exclusion du 2 du I, les I et II sont applicables à l'avantage en impôt prévu à l'article 199 undecies B.

« Toutefois, lorsque cet avantage est acquis dans les conditions prévues aux vingt-sixième et vingt-neuvième alinéas de cet article, la diminution mentionnée au premier alinéa du I porte sur la seule fraction non rétrocédée. »

III.- À l'alinéa 9, substituer aux mots : « les mots : "les deux tiers" », les mots : « le taux : "62,5 %" » et au taux : « 56 % », le taux : « 52,63 % ».

IV.- Aux alinéas 10 et 11, substituer aux mots : « les mots : "les deux tiers" », les mots : « le taux : "62,5 %" ».

V.- À l'alinéa 13, substituer aux mots : « les mots : "le tiers" », les mots : « le taux : "37,5 %" ».

VI.- À l'alinéa 14, substituer au taux : « 44 % », le taux : « 47,37 % ».

VII. - À l'alinéa 16, substituer aux mots : « de deux fois », les mots : « de cinq fois le tiers ».

VIII. - À l'alinéa 17, substituer aux mots : « de quatorze fois le onzième », les mots : « de dix fois le neuvième ».

IX. - À l'alinéa 18, substituer aux mots : « les mots : "le tiers" », les mots : « le taux : "37,5 %" » et aux mots : « le taux : "44 %" », les mots : « les mots : "de neuf fois le dix-neuvième" ».

M. Gaël Yanno. Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer, déclarait en 2003 : « Nous voulons stabiliser le cadre du dispositif. Sa durée de validité de quinze ans permettra aux investisseurs d'avoir la visibilité nécessaire pour réaliser leur projet sans craindre chaque année une remise en cause, comme lorsque ce dispositif était inclus dans la loi de finances. Si l'on veut rétablir un climat de confiance outre-mer, il faut impérativement conjuguer durée et stabilité ».

Pour sa part, Nicolas Sarkozy déclarait le 12 juillet 2006, lors de la convention outre-mer : « La défiscalisation est, en réalité, un outil de développement pour les économies sous-capitalisées et spontanément peu attractives pour des investisseurs. Des engagements ont été pris par l'État sur quinze ans, ils doivent être respectés. »

Fin 2008, nous avons plafonné la défiscalisation outre-mer. Dans la LODEOM, la loi pour le développement économique de l'outre-mer, nous avons recentré la défiscalisation outre-mer. Aujourd'hui, nous voulons la raboter. J'y suis favorable, mais la question est de savoir à quel niveau.

Les économies ultramarines souffrent. Le reste à recouvrer pour les caisses régionales de sécurité sociale est, en Martinique, de 25 % en 2009 contre 7 % en 2008 ; en Guadeloupe, de 36 % contre 10 % ; en Guyane, de 26 % contre 9 %. Il est de 7,1 % à La Réunion, de 8,7 % en Polynésie française, contre 3 % en métropole.

Pourquoi réduire d'un quart l'avantage net du contribuable métropolitain, alors que partout ailleurs il est demandé au « défiscaliseur » de réduire son crédit d'impôt de 10 % ?

L'amendement prévoit d'appliquer le coup de rabot sur la seule fraction non rétrocédée de l'avantage fiscal et d'augmenter de façon proportionnelle le taux de rétrocession, afin d'assurer pour l'exploitant ultramarin un niveau de rétrocession inchangé. Ainsi, l'avantage fiscal net du contribuable serait réduit de 10 %, et non de 25 % comme le prévoit le texte du Gouvernement.

M. le rapporteur général. La proposition du Gouvernement préserve le bénéficiaire de l'investissement du rabot. Autrement dit, elle augmente le taux de rétrocession.

Du point de vue du contribuable, la baisse de l'avantage fiscal n'est pas de 10 mais de 25 %, et je reconnais bien volontiers qu'il y a un problème.

Pour autant, les plafonds restent importants. Le contribuable renoncera-t-il à ce type d'investissement au motif que la partie rétrocédée augmente ? Je n'en suis pas sûr, bien que le coup de rabot soit plus important.

Précisons également que le rabot épargne l'article 199 undecies C, relatif au logement social outre-mer.

Je suis donc enclin à m'en remettre à la sagesse des commissaires. Je comprends les arguments de Gaël Yanno mais je suis persuadé que l'avantage fiscal restera important.

Il est certain que le retrait du photovoltaïque du périmètre de l'article 199 undecies B réduira considérablement le flux d'investissements. On peut espérer que celui-ci se reportera sur d'autres investissements mais un doute subsiste. Cette mesure est brutale mais nécessaire. L'application du rabot telle que prévue par cet article risque-t-elle de déstabiliser le système ? Il est très difficile de se faire une idée. M. Yanno connaissant parfaitement ces sujets, j'aurais plutôt tendance à le suivre.

M. Gaël Yanno. Je me suis toujours gardé de faire du « jusqu'au-boutisme » dans la défense des outre-mers. Je suis peu intervenu sur la question du photovoltaïque, par exemple. Mais certaines mesures portent atteinte aux économies ultramarines et cela nous reviendra en pleine figure !

Pourquoi préserver le dispositif en faveur du logement social - 50 % de crédit d'impôt - alors qu'il ne présente aucun risque ? Les organismes de logement social de l'outre-mer bénéficient déjà d'un autofinancement grâce à la LBU - ligne budgétaire unique -, ils n'empruntent qu'auprès de la Caisse des dépôts et consignations, les collectivités cautionnent ces emprunts et les loyers sont assurés. À l'inverse, on réduit de 25 % l'avantage fiscal accordé pour l'investissement outre-mer, autrement risqué, dans un hôtel, une ferme aquacole ou une entreprise de transport. C'est économiquement incompréhensible : l'investissement le plus risqué devrait être le plus rémunéré, or on est en train de faire le contraire. Il en résultera un effet d'aspiration des investissements par la défiscalisation attachée au logement social.

Enfin, le dernier rapport gouvernemental consacré à l'application de la défiscalisation outremer porte sur l'année 2007. J'ai réclamé à cor et à cri les rapports pour 2008 et 2009, en vain. Sans chiffres, nous parlons donc dans le vide. Les ultramarins sont un peu fatigués de cette situation !

En matière d'énergies renouvelables, on n'a jamais publié l'arrêté plafonnant le prix du watt installé, comme le prévoyaient pourtant les articles 16 et 17 de la LODEOM. Cela a conduit à l'abandon du photovoltaïque. Et voilà que l'on nous demande, dans le plus grand flou, une contribution de 25 %. Ce n'est pas raisonnable !

M. Claude Bartolone. Je regrette que M. Yanno n'ait pas soutenu notre amendement demandant un rapport consacré aux avantages comparés de la défiscalisation et des crédits budgétaires. Les élus ultramarins pensent parfois que la défiscalisation est plus facile à contrôler et à préserver. On a vu ce qu'il en était avec le photovoltaïque !

L'examen des cycles économiques montre que l'outre-mer entre dans la crise généralement plus tard que la métropole et en sort plus tard également. Pourtant, on abandonne les mesures pour le photovoltaïque, on maintient une défiscalisation fléchée sur le logement social alors que bon nombre d'opérateurs ne savent pas l'utiliser - ce qui risque d'avoir des répercussions sur l'activité du bâtiment - et on réduit la défiscalisation dans tous les autres secteurs productifs. Cela risque de gripper davantage les économies ultramarines.

Bref, je partage les inquiétudes de M. Yanno et les doutes du rapporteur général.

M. Charles de Courson. Pourquoi ne pas aller jusqu'au bout en votant l'amendement de M. Yanno et en y ajoutant une disposition intégrant le logement locatif social dans le calcul du rabot ? On ne peut continuer à faire croire que le logement social relève du dévouement alors qu'il permet à certains de s'enrichir considérablement !

M. le président Jérôme Cahuzac. Vous déposerez un amendement au titre de l'article 88 du Règlement.

M. Hervé Mariton. J'approuve moi aussi l'amendement de M. Yanno. Cela étant, comme beaucoup de niches, le dispositif consacré au logement social outre-mer est censé limiter la contribution budgétaire de l'État. Non sans efficacité, apparemment, puisque la ligne budgétaire est moins sollicitée qu'elle ne pourrait l'être.

La Commission adopte l'amendement II-CF 259 ( amendement n° II-458 ).

Elle est ensuite saisie de l'amendement II-CF 322 de M. Pierre-Alain Muet, ainsi rédigé :

Au premier alinéa de cet article, les mots : « 199 sexdecies »  sont supprimés.

M. Jean Launay. Cet amendement, dont je crains qu'il ne connaisse le même sort que celui que la Commission a repoussé tout à l'heure, vise à inclure le crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile dans le périmètre de la réduction globale de 10 % prévue dans le PLF. Ce serait une source d'économies pour l'État et une mesure de justice sociale.

M. le rapporteur général. Avis défavorable car le Gouvernement a choisi de jouer sur la suppression de l'allègement de 15 points de cotisations patronales. Cela dit, si ce choix venait à être remis en cause, nous pourrions trouver un certain intérêt à votre proposition.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement II-CF 178 de M. Hervé Mariton, ainsi rédigé :

Ajouter au premier alinéa, après les mots : « 199 undecies C », les mots : « le XI dès lors qu'il respecte aussi le V de l'article 199 septvicies ».

M. Hervé Mariton. Cet amendement tend à élargir au dispositif « Scellier DOM social » la dispense de « coup de rabot » pour le logement locatif social de l'outre-mer.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette cet amendement.

L'amendement II-CF 177 de M. Hervé Mariton est retiré , de même que l'amendement II-CF 198 de M. Charles de Courson .

La Commission examine ensuite l'amendement II-CF 196 de M. Charles de Courson :

Après l'alinéa 18, insérer l'alinéa suivant :

« VI.- L'avantage en impôt résultant des réductions d'impôts retenues à l'article 125-0 A du code général des impôts fait l'objet d'une diminution de 10 %, calculée selon des modalités fixées par décret. »

M. Charles de Courson. L'adoption de cet amendement permettrait 100 millions d'euros d'économies, moyennant l'amputation de 10 % du milliard d'euros que représentent les régimes dérogatoires des produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d'assurance-vie.

M. le rapporteur général. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie de l'amendement II-CF 197 de M. Charles de Courson :

Après l'alinéa 18, insérer l'alinéa suivant :

« VI.- L'avantage en impôt résultant des crédits d'impôts retenus à l'article 200 septies du code général des impôts fait l'objet d'une diminution de 10 %, calculée selon des modalités fixées par décret. »

M. Charles de Courson. Encore un coup de rabot, cette fois-ci appliqué au crédit d'impôt sur certains revenus distribués de sociétés françaises ou étrangères. Cette niche a coûté 610 millions d'euros en 2010.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement II-CF 96 de M. François Scellier :

À la fin 1° du VII de l'article 58, ajouter la phrase suivante :

« À titre transitoire, l'engagement de réaliser un investissement immobilier pourra prendre la forme d'une réservation, à condition qu'elle soit enregistrée chez un notaire ou au Service des Impôts (enregistrement) avant le 31 décembre 2010, et que l'acte authentique soit passé avant le 31 mars 2011 ».

M. Charles de Courson. La détermination d'une date butoir au 31 décembre 2010 pour continuer à bénéficier du taux plein de l'avantage fiscal avant la réduction de 10 % va créer un afflux de dossiers difficilement gérable chez les notaires et dans les banques. Dès lors, à condition que la décision d'investissement immobilier ait réellement été prise avant le 31 décembre, des dispositions transitoires doivent permettre un passage des actes authentiques jusqu'au 31 mars 2011.

M. le rapporteur général. C'est une bonne idée. Cependant, cette disposition aurait davantage sa place dans l'instruction commentant le dispositif. Le Ministre pourrait s'engager à l'y faire figurer en séance.

M. Charles de Courson. Mieux vaut néanmoins adopter l'amendement, quitte à y renoncer en séance publique si cet engagement est confirmé.

La Commission adopte l'amendement ( amendement n° II-459 ).

Puis elle adopte l'article 58 ainsi modifié.


* 1 Rapport d'information n° 946, « Maîtriser la dépense fiscale pour un impôt plus juste et plus efficace », juin 2008, de MM. Didier Migaud, Gilles Carrez, Jean-Pierre Brard, Jérôme Cahuzac, Charles de Courson et Gaël Yanno.

* 2 Soit les réduction et crédit d'impôt au titre des dépenses afférentes à l'emploi d'un salarié à domicile, le crédit d'impôt développement durable, le crédit d'impôt intérêt d'emprunt pour l'acquisition de la résidence principale.