ARTICLE 86 OCTIES : PROROGATION DE QUATRE ANS DE LA TAXE ASSURANT LE FINANCEMENT DU CENTRE NATIONAL DE GESTION DES ESSAIS DE PRODUITS DE SANTÉ (CENGEPS)

I. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE DU 2 NOVEMBRE 2010

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 43, ainsi rédigé :

APRÈS L'ARTICLE 86, insérer l'article suivant :

Santé

À la fin du dernier alinéa de l'article 23 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, l'année : « 2009 » est remplacée par l'année : « 2013 ».

La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Cet amendement a pour objet de proroger pour quatre ans la taxe additionnelle destinée au financement du CeNGEPS, le Centre national de gestion des essais de produits de santé, constitué sous la forme d'un GIP, qui a pour objet de faciliter la coordination et la gestion des essais cliniques à promotion industrielle réalisés soit dans les établissements de santé, soit dans les réseaux de soins.

Ce groupement a tout d'abord été constitué pour une durée de quatre ans, qui court jusqu'au 27 mars 2011. Le bilan du fonctionnement de cet organisme est très positif, notamment en ce qui concerne les actions concrètes qui ont pu être réalisées, et le syndicat Les Entreprises du médicament - LEEM, l'organisation professionnelle des industriels du secteur - a constaté un effet bénéfique pour la recherche à l'hôpital, un effet jugé structurant, notamment par le financement des réseaux d'investigateurs, ainsi qu'une meilleure visibilité de ladite recherche. Le LEEM est donc favorable à une reconduction de la taxe additionnelle servant à financer les activités du GIP CeNGEPS et son conseil d'administration a donné son accord lors de sa réunion du 20 avril 2010 à une prorogation du GIP de quatre ans, avec un rapport d'étape au bout de deux ans. La reconduction est également soutenue par le conseil stratégique des industries de santé.

Il est donc envisagé de prolonger la durée d'existence du GIP pour une période de quatre ans, jusqu'en mars 2015. Cette prorogation du CeNGEPS, pour être approuvée, doit évidemment être couverte par un financement correspondant aux recettes perçues dans le cadre de l'article 23 de la loi du 30 décembre 2005.

Pour permettre à cet organisme de perdurer, je vous propose donc de proroger de quatre années la perception de la taxe additionnelle recouvrée par l'AFSSAPS, sans en changer le taux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur . La commission n'ayant pas non plus examiné celui-ci, je souhaiterais, madame la ministre, qu'elle puisse en règle générale examiner les amendements, notamment ceux de ce type, qui ne résultent pas d'une urgence ou d'un compromis avec la majorité.

L'an dernier, nous avions donné notre accord à la prolongation d'un an de la perception de la taxe, dans la mesure où, au terme des quatre ans, les actions étaient encore en cours.

S'agissant de l'objectif visé, nous ne pouvons qu'être favorables à ce que les essais cliniques soient réalisés dans les hôpitaux français afin qu'ils puissent être aussi pertinents et crédibles que possible. Je suis pour ma part extrêmement inquiet lorsque des essais cliniques sont réalisés pour l'essentiel à l'étranger, notamment en Roumanie et en Bulgarie, dont on peut penser - c'est le moins que l'on puisse dire, surtout s'agissant de pays qui ont un besoin criant du financement apporté par les laboratoires - qu'ils sont moins crédibles.

Le bilan est positif, dites-vous, madame la ministre. Certes, mais sachant que vous déposiez cet amendement, j'ai consulté le site du CeNGEPS pour me faire une opinion sur le prétendu caractère positif de l'activité de ce centre. Or je n'ai rien trouvé confortant cette assertion. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

À titre personnel, je m'abstiendrai dans le vote sur cet amendement. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Mais l'an prochain, je vous donnerai mon opinion en tant que rapporteur spécial après y avoir regardé de plus près.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton.

Mme Catherine Lemorton. Si l'objectif poursuivi par le Gouvernement - faire en sorte que les essais cliniques se pratiquent de préférence en France - est vertueux et louable, les moyens pour y parvenir posent problème.

Le Président de la République a plaidé en faveur d'une République transparente, et l'Assemblée nationale a annoncé la mise en place d'un groupe de travail sur les conflits d'intérêts, qui sont en effet une source de difficultés.

À cet égard, permettez-moi de vous éclairer sur le parcours du président actuel du CeNGEPS, M. Jaillon. En 1999, il était président de la commission de la publicité et de la diffusion des recommandations sur le bon usage du médicament, commission rattachée à l'AFSSAPS. En 2007, M. Jaillon devient président du conseil scientifique du LEEM-recherche, l'année même de la mise en place du CeNGEPS ; le calendrier est parfois bien fait. C'est ce qu'on appelle du pantouflage. Alors là, s'il n'y a pas de conflit d'intérêts...

Le CeNGEPS est satisfait de son travail, nous dit-on. Pour ma part, j'aimerais qu'il soit procédé à des audits indépendants pour vérifier si son bilan est réellement positif.

Il me paraît pour le moins suspect que l'industrie pharmaceutique, qui pousse des cris d'orfraie dès qu'on lui applique une taxe, soit d'accord avec la prolongation de la taxe additionnelle. On n'est jamais mieux servi que par soi-même, dit-on, et nous avons nettement l'impression que c'est ce qui est en train de se passer avec cet organisme. Plutôt que d'investir cet argent dans les essais cliniques que, au demeurant, l'industrie pharmaceutique peut payer, car elle est florissante même en cette période de crise...

M. le président. Il faut conclure.

Mme Catherine Lemorton. Permettez-moi de parler de la pharmacovigilance, monsieur le président.

Il semble que la pharmacovigilance soit en train d'échapper à la sphère publique à cause d'une directive européenne qui n'a pas fait l'objet d'un débat en commission des affaires sociales, ce que je déplore. Il suffit de se rappeler l'affaire du Mediator, du Vioxx, du Kétoprofène, et je vous ai interpellé sur le sujet en début d'année, madame la ministre. En fait, nous ne faisons pas d'essais cliniques, mais de la prestation de services pour l'industrie privée du médicament.

M. le président. Il faut vraiment conclure.

Mme Michèle Delaunay. C'est important.

Mme Catherine Lemorton. Il vaudrait mieux que cet argent vienne renforcer la pharmacovigilance en servant à créer des postes de praticiens hospitaliers.

Nous nous abstiendrons donc sur le vote de cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(L'amendement n° 43 est adopté.)

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- mardi 2 novembre 2010 ;

- mardi 2 novembre 2010 (suite) .