MM. Gérard MIQUEL, François FORTASSIN, Mme Marie-Hélène des ESGAULX, rapporteurs spéciaux

VI. LE PROGRAMME 159 « INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET CARTOGRAPHIQUE »

Rapporteur spécial : François Fortassin

A. L'INSTITUT GÉOGRAPHIQUE NATIONAL DE L'INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET FORESTIÈRE (IGN)

1. Un établissement issu de la fusion entre l'Institut géographique national et l'Inventaire forestier national

Le programme 159 « Information géographique et cartographique » comprend les moyens dévolus à la production de l'information géographique et aux activités de recherche menées dans cette discipline.

La quasi-totalité des crédits du programme est consacrée à la subvention pour charge de service public de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN), qui résulte de la fusion de l'Institut géographique national et de l'Inventaire forestier national 26 ( * ) (IFN), et est placé sous la double tutelle des ministres chargés de l'écologie et des forêts 27 ( * ) .

La vocation principale de cet opérateur est de rendre compte de la surface du territoire national et de l'occupation de son sol, d'élaborer et d'actualiser l'inventaire permanent des ressources forestières nationales .

Par ailleurs, l'Institut conçoit et commercialise des produits et services à partir des données recueillies dans le cadre de ses missions de service public.

Le cadre juridique de l'IGN est défini par le décret n° 2011-1371 du 27 octobre 2011.

2. Les orientations stratégiques du nouvel établissement

L'Institut national de l'information géographique et forestière est doté d'un contrat d'objectifs et de performance (COP) pour la période 2010-2013, qui reprend aussi les orientations de celui de l'IFN (période 2007-2012). Le nouvel établissement vise notamment à :

- promouvoir une politique nationale d'information géographique partagée, renforcer la coopération entre ses différents acteurs et mettre en oeuvre la directive INSPIRE ;

- généraliser l'accès à l'information géographique par Internet ;

- dresser l'inventaire de la ressource forestière et observer l'évolution des écosystèmes forestiers.

Cependant, un certain nombre de facteurs et d'évolutions rendront nécessaires la définition d'un nouveau contrat d'objectifs et de performance, dès le premier semestre 2013. Des discussions ont actuellement lieu sur ce point entre le personnel de l'IGN et les tutelles. Par ailleurs, le schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) adopté en 2011 et couvrant le périmètre de l'Institut géographique national, devra être mis à jour de façon à inclure l'intégralité du périmètre du nouvel établissement et les projets immobiliers liés à la fusion.

Le dispositif de performance n'évolue pas entre 2012 et 2013, bien que les indicateurs tiennent compte de la partie IFN lorsque celle-ci est susceptible d'impacter le résultat .

B. L'ÉVOLUTION DES MOYENS PAR RAPPORT À 2012

1. Une stabilité des crédits
a) Les déterminants du projet de budget pour 2013

Le projet de loi de finances pour 2013 propose pour le programme 159 « Information géographique et cartographique » une dotation de 96,2 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) comme en crédits de paiement (CP) . Ce montant est stable par rapport à 2012 (+ 0,1 %), après une hausse de 17,9 % l'an dernier, qui s'expliquait par l'intégration de l'IFN dans le périmètre du programme 159.

Cette budgétisation prend en compte la maîtrise de la masse salariale de l'IGN, une réduction des dépenses de fonctionnement de l'établissement, la couverture de ses besoins en investissement (notamment l'immobilisation des bases de données), ainsi que l'accompagnement du changement de son modèle économique, marqué par la chute des recettes commerciales de l'IGN sur les marchés professionnels et grand public.

b) Une ventilation entre trois actions

Les crédits sont ventilés entre trois actions :

- l'action 1 « Production de l'information géographique » : dotée de 80,5 millions d'euros (dotation stable par rapport à 2012), soit 83,7 % des crédits du programme, elle comporte les ressources allouées à l'IGN pour le financement des activités de formation de l'Ecole nationale des sciences géographiques, de celles relatives au maintien des réseaux géodésiques et de nivellement, de prise de vue aérienne et de documentation, ainsi que des travaux d'entretien, de mise à jour et de diffusion du référentiel à grande échelle (RGE) et de celles des autres bases de données, des fonds cartographiques et du Géoportail de l'Institut. Ses crédits financent aussi le coût des missions de service public de l'IFN ;

- l'action 2 « Recherche dans le domaine géographique » : dotée de 15,1 millions d'euros (montant stable par rapport à 2012), soit 15,7 % des crédits du programme, elle regroupe les moyens dédiés aux activités de recherche et de développement de l'opérateur. Les principaux objectifs en la matière concernent la préparation du Référentiel à grande échelle de nouvelle génération, les infrastructures de données géographiques et la mise en oeuvre de la directive INSPIRE, la contribution à la réalisation des engagements du Grenelle de l'environnement, et la préparation de l'arrivée du système de référence terrestre Galileo ;

- l'action 3 « Pilotage de la politique d'information géographique » : dotée de 560 000 euros contre 598 942 euros l'an dernier, soit 0,6 % des crédits du programme, elle retrace le financement de l'activité d'animation et de coordination interministérielle assurée par le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et du Géoportail national. Elle outre, elle porte les moyens destinés au fonctionnement et aux activités du Conseil national de l'Information géographique (CNIG), réorganisé par le décret n° 2011-127 du 31 janvier 2011, pour devenir la structure de coordination nationale prévue par la directive INSPIRE. Enfin, cette action intègre le soutien de l'Etat aux activités d'animation de la communauté des acteurs du domaine exercées par l'Association française pour l'Information géographique (AFIGEO).

2. Une réduction du plafond d'emplois

Le projet de loi de finances pour 2013 accorde à l'IGN 1 707 emplois sous plafond, contre 1 760 en 2012 (-53 ETP), soit une réduction de 3 %, supérieure à la moyenne de 2,5 % prévue pour les opérateurs du ministère. L'opérateur compte sur le non-remplacement des 41 départs en retraite prévus en 2013 pour atteindre cette cible élevée .

En revanche, le nombre d'emploi hors plafond augmentera de 22 à 37 entre 2012 et 2013 (+ 68 %). Le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2013 explique cette évolution par un recours croissant à des agents sur contrats pour les projets de recherche et de développement menés par l'IGN , en particulier en réponse aux appels d'offres de l'Agence nationale de la recherche.

3. Les priorités de l'IGN en 2013

L'année 2013 marquera l'adoption du nouveau contrat d'objectifs et de performance, qui devra notamment définir les modalités d'élaboration d'une représentation unique du parcellaire cadastral, en lien avec la Direction générale des finances publiques. Parallèlement, l'IGN poursuivra l'effort de rationalisation de ses implantations en région engagé depuis la fusion du 1 er janvier 2012 avec l'IFN.

C. UN BILAN MITIGÉ POUR L'ANNÉE 2012

1. Une fusion inutile ?

L'année dernière, votre rapporteur spécial s'était interrogé sur les économies attendues de la fusion, ainsi que sur ses conséquences pour le personnel des deux instituts.

Les informations transmises par le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie permettent de répondre partiellement à ces questions.

S'agissant de l'impact social de la fusion , il est prévu que les trois premières années - du 1 er janvier 2012 au 31 décembre 2014 - constitueront une période de transition au cours desquelles seront opérés des regroupements et des transferts de personnel entre les sites. Trois cadres supérieurs de l'ex-IFN ont vu leurs postes supprimés du fait de la fusion, mais restent à la charge de l'IGN le temps de trouver un nouveau travail.

Par ailleurs, des dispositifs spécifiques - soutien psychologique, aide à la recherche d'emploi dans un autre service public pour les agents refusant la mobilité géographique - ont été instaurés par les deux ministères de tutelle, afin d'accompagner les personnels de Lattes et de Nogent-sur-Vernisson dont les postes sont transférés à Aix-en-Provence et Saint-Mandé.

S'agissant des mutualisations attendues , de façon surprenante, le ministère estime que, dans la mesure où les activités des deux établissements fusionnées étaient « complémentaires mais distinctes », « peu de mutualisations sont possibles à court terme. Celles qui pourront être dégagées dans les services techniques nécessitent une période d'adaptation et de formation des personnels à de nouveaux métiers et prendront plusieurs années avant d'être effectives ».

En outre, le ministère indique que la mutualisation des fonctions support est en cours, mais qu'elle s'appuie sur des « regroupements de services et des déplacements de personnels qui ne peuvent pas être réalisés rapidement », en concluant que les « activités support, la mutualisation ne devrait toucher qu'un nombre limité d'agents compte tenu de l'effectif très faible de l'ex-IFN dans ces activités ».

Votre rapporteur spécial s'étonne de ce constat et s'interroge en conséquence sur l'opportunité et la pertinence véritables de cette fusion .

2. Une situation financière toujours fragile
a) Des recettes commerciales revues à la baisse

L'année 2012 a confirmé la fragilité de la situation financière de l'IGN. En effet, les recettes commerciales ont été prévues à 43,2 millions d'euros, en baisse de 0,8 million d'euros par rapport à la réalisation 2011. Cette régression concerne le marché grand public (diminution tendancielle des ventes de cartes sur support papier) mais aussi le marché professionnel (diminution des ventes de licences en lien avec la quasi gratuité du RGE dans la sphère publique). La répartition des recettes commerciales est la suivante :

Répartition des recettes commerciales de l'IGN

(en millions d'euros)

Grand public : cartes, marchandises, produits numériques

12,3

Marché professionnel : licences de bases de données, prestations

16,4

Marché Défense et Espace

14,0

Divers

0,4

Source : réponse au questionnaire budgétaire de vos rapporteurs spéciaux

b) Une hausse des charges de personnel

Parallèlement, l'IGN a anticipé une hausse des charges de personnel par rapport à l'exécution 2011, à hauteur de 1,1 million d'euros, dont 0,5 million d'euros sur la masse salariale, du fait des facteurs suivants :

- l'effet de la progression du taux de CAS pension de 65,72 % à 68,59 % ;

- les mesures catégorielles et le GVT ;

- 0,4 million d'euros au titre de la taxe sur les salaires.

En conséquence, les dépenses de personnel représentent 79 % des charges décaissables sur l'exercice 2012 .

c) Un résultat net déficitaire

D'après les informations transmises à vos rapporteurs spéciaux, l'exercice devrait se solder par un résultat net déficitaire de l'ordre de 0,4 million d'euros , un prélèvement sur le fonds de roulement de 7,8 millions d'euros, pour un niveau de fonds de roulement de 31,4 millions d'euros et une trésorerie de l'ordre de 15,4 millions d'euros, correspondant à 39 jours de fonctionnement. De surcroît, le niveau de la capacité d'investissement (8,3 millions d'euros) apparaît faible pour être en mesure de financer les investissements .

Les principales observations de votre rapporteur spécial sur le programme 159 « Information géographique et cartographique »

1) La quasi-totalité des crédits du programme est consacrée à la subvention pour charges de service public de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) , qui résulte de la fusion de l'Institut géographique national et de l'Inventaire forestier national (IFN) opérée l'année dernière.

2) Des discussions seront bientôt ouvertes pour élaborer un nouveau contrat d'objectifs et de performance plus ambitieux et adapté à la nature durale du nouvel établissement. De même, le schéma pluriannuel de stratégie immobilière devra être mise à jour .

3) Les crédits du programme restent stables par rapport à 2012 , à hauteur de 96,2 millions d'euros. Ce niveau se fonde sur une prévision de maîtrise de la masse salariale de l'IGN, une réduction de ses dépenses de fonctionnement, la couverture de ses besoins en investissements et l'adaptation de son modèle économique pour répondre à la décroissance de ses recettes commerciales.

4) Le plafond d'emplois de l'opérateur prévoit une réduction de 53 ETP par rapport à 2012, soit une contraction de 3 % supérieure à la moyenne de 2,5 % prévue pour les opérateurs du ministère. Cette prévision optimiste s'appuiera notamment sur le non-remplacement des 41 départs en retraite prévus en 2013 .

5) La situation financière de l'IGN demeure fragile et devra être suivie avec attention. Enfin, votre rapporteur spécial s'interroge sur l'opportunité et la pertinence de la fusion entre l'IGN et l'IFN, dans la mesure où très peu de mutualisations en sont attendues.


* 26 Jusqu'à l'année dernière, celui-ci était rattaché au programme 149 « Forêt » du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

* 27 Pour mémoire, cette fusion résulte d'une décision du conseil de modernisation des politiques publiques, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP).