M. Jean-Claude Boulard, rapporteur spécial

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 65 (nouveau)
(Art. 30 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, art. 150 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006)

Suppression de l'établissement public national de financement des retraites de La Poste (EPNFRLP)

Commentaire : le présent article a pour objet de supprimer l'établissement public national de financement des retraites de la Poste (EPNFRLP), disposant de la capacité de conclure des conventions financières avec le régime général d'assurance vieillesse, en vue d'un éventuel adossement au régime général, et chargé de recueillir les cotisations et contributions versées par La Poste au titre de ses salariés ayant le statut de fonctionnaire de l'État. Ces recettes seront désormais directement versées au CAS « Pensions ».

I. LE DROIT EXISTANT

L' établissement public national de financement des retraites de La Poste a été créé par l'article 150 de la loi du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006 27 ( * ) dans le cadre de la modification des modalités de gestion des cotisations et prestations de retraite des fonctionnaires de La Poste.

Afin de placer La Poste dans une situation d' « équité concurrentielle », la loi de finances rectificative pour 2006 a prévu de soumettre l'entreprise publique à un taux de contribution retraite équivalent à celui qui résulterait de l'application du droit commun (contribution employeur libératoire à un taux dit d' « équité concurrentielle « ) afin de libérer l'entreprise publique des engagements de retraite qu'elle aurait été dans l'obligation de provisionner en 2007 pour satisfaire aux normes comptables internationales. En contrepartie, la loi précitée a prévu le versement par La Poste d'une contribution exceptionnelle de 2 milliards d'euros, échelonnée sur plusieurs années.

L'établissement public national de financement des retraites de La Poste a ainsi été créé dans deux buts :

- recueillir auprès de La Poste la contribution forfaitaire exceptionnelle, la contribution employeur libératoire et les cotisations salariales des fonctionnaires afin de les reverser chaque mois à l'État sur le CAS « Pensions ». Le montant global des versements de cotisations et contribution employeur prévu pour 2015 est de 1,3 milliard d'euros 28 ( * ) ;

- prévoir un éventuel adossement du régime des fonctionnaires de La Poste à la Caisse nationale d'assurance vieillesse ( CNAV ). L'article 150 de la loi précitée donne en effet la capacité à l'établissement public de conclure des conventions financières avec les régimes de retraite de droit commun.

Sur la base d'un taux d'actualisation de 1,08 %, les engagements de retraite portés par l'État au titre des fonctionnaires de La Poste sont estimés à 110 milliards d'euros 29 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le I du présent article prévoit de modifier l'article 30 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public et des télécommunications afin que La Poste verse les cotisations salariales d'assurance vieillesse et les contributions employeurs à caractère libératoire , dues au titre de de ses agents ayant le statut de fonctionnaire de l'État, directement au CAS « Pensions » ; celles-ci ne transiteront plus par l'établissement public national de financement des retraites de La Poste.

Par conséquent, le II du présent article propose l'abrogation de l'article 150 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006 relatif aux missions de l'établissement public national de financement des retraites de La Poste .

III. LA POSITION DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

La suppression de l'établissement public national de financement des retraites de La Poste est présentée par le Gouvernement comme une mesure de simplification . Le versement des cotisations et contributions dues par La Poste directement à l'État, via le CAS « Pensions », simplifiera en effet le recouvrement de ces recettes. Cette modalité de versement direct est d'ailleurs déjà utilisée par l'entreprise Orange société anonyme (SA).

La fermeture de l'établissement public national de financement des retraites de La Poste marque surtout l'abandon du projet d'adossement au régime général du régime des fonctionnaires de La Poste . Dès 2006, la complexité de ce projet, visant à intégrer un groupe de fonctionnaires au régime général, avait été soulignée. Aussi, les négociations entre l'État, La Poste et le régime général n'ont pas abouti à ce jour.

L'opération d'adossement devant respecter le principe de neutralité financière, posé par l'article L 222-7 du code de la sécurité sociale, un adossement nécessiterait le versement par l'État d'une soulte au régime général. Le montant de cette soulte avait été estimé à environ 10 milliards d'euros en 2006 . Or la situation démographique des agents de La Poste dans leur ensemble étant moins défavorable que celle du régime général et le régime général enregistrant des excédents grâce aux salariés de droit privé de La Poste, l'État aurait peu d'intérêt à verser une compensation calculée strictement en référence au groupe de fonctionnaires postaux. De surcroît, le contexte budgétaire actuel semble peu propice à cette opération d'adossement.

Enfin, la montée en charge du processus de convergence entre systèmes de retraite public et privé - notamment en matière de règles d'âge et de taux de cotisations salariales - a rendu moins pertinent le recours à l'adossement des retraites des fonctionnaires de La Poste au régime général.

Votre rapporteur spécial vous propose d'adopter cet article sans modification.


* 27 Loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006.

* 28 Le taux d'équité concurrentielle prévu pour 2015 est de 36,30 %.

* 29 Cf . Annexe au compte général de l'État, 2013.