M. Michel Canevet, rapporteur spécial

III. LE PROGRAMME « PROTECTION DES DROITS ET LIBERTÉS » : UNE AUGMENTATION DES MOYENS ET DES MISSIONS DE CERTAINES AUTORITÉS INDÉPENDANTES

A. DES MISSIONS RENFORCÉES ET DES MOYENS EN HAUSSE, NOTAMMENT POUR LA CNIL ET LA HAUTE AUTORITÉ POUR LA TRANSPARENCE DE LA VIE PUBLIQUE

Au total, les crédits du programme 308 « Protection des droits et libertés » augmentent de 2,84 millions d'euros (CP), soit +2,96 %.

1. Le changement de statut juridique du Conseil supérieur de l'audiovisuel

La loi n° 2013-1028 du 15 novembre 2013 a transformé le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) en une autorité publique indépendante, dotée de la personnalité morale.

Il est prévu, en 2015, de verser à cette nouvelle autorité publique indépendante 38 millions d'euros ; à périmètre constant, entre 2014 et 2015 les crédits augmentent de 0,74 million d'euros, soit moins de 2 %.

Pour la première fois en 2015, le CSA pourra délibérer sur les crédits nécessaires à l'accomplissement de ses missions.

2. La poursuite de la hausse des crédits de la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) et de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP)
a) La CNIL

Les crédits destinés à la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) devraient augmenter (à périmètre constant) de 5,5 %, soit près de un million d'euros (980 000 euros), pour un budget estimé à 18,9 millions d'euros.

Son plafond d'emplois est en hausse de 7 équivalent temps plein (ETP) et ainsi porté à 189 ETP. En 2014, la CNIL avait déjà bénéficié d'un relèvement de son plafond d'emplois de 7 ETP.

Selon les réponses au questionnaire budgétaire, le renforcement des moyens de la CNIL est justifié par la nouvelle mission relative au traitement des notifications des failles de sécurité confiée à la CNIL par le législateur en 2011 9 ( * ) . Ainsi, la CNIL peut, « en cas d'atteinte portée aux données d'une ou plusieurs personnes physiques, d'une part, exiger que les responsables de traitement avertissent les intéressés et, d'autre part, diligenter des contrôles, mettre en demeure ces responsables de prendre les mesures correctrices, voire engager des procédures de sanction en cas de manquement aux obligations de sécurité qui leur incombe 10 ( * ) ».

b) La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique

Les crédits demandés en 2015 pour la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), créée en 2014 11 ( * ) , s'élèvent à 3,6 millions d'euros.

Ils augmentent de 28 %, (+ 0,8 million d'euros), afin de prendre en compte l'augmentation des effectifs (+10 ETP), ceux-ci passant de 20 à 30.

La Haute autorité reçoit et contrôle les déclarations de situation patrimoniale et d'intérêts des 10 000 plus hauts responsables publics.

B. RECONSIDÉRER LA POSSIBILITÉ DE REGROUPER LE DÉFENSEUR DES DROITS ET LE CONTRÔLEUR GÉNÉRAL DES LIEUX DE PRIVATION DE LIBERTÉS

En 2013, la commission des finances de l'Assemblée nationale a confié à la Cour des comptes, en vertu de l'article 58-2° de la LOLF, une enquête sur le Défenseur des droits.

L'enquête de la Cour des comptes a été rendue publique en septembre 2014.

Les recommandations de la Cour des comptes

La Cour des comptes formule six recommandations :

- simplifier l'organigramme et réduire le nombre de cadres dirigeants ;

- améliorer les tableaux de bord permettant le suivi des travaux des délégués ;

- adapter les effectifs au sein des pôles à la nature et au flux moyen des réclamations ;

- revoir les modalités de la coordination entre le Défenseur des droits et le Contrôleur général des lieux de privation de liberté pour prendre en compte les conséquences des dispositions de la loi du 26 mai 2014 ;

- rationaliser le circuit de la dépense en fusionnant le centre de service partagé du Défenseur des droits avec celui de la direction des services administratifs et financiers du Premier ministre ;

- regrouper les services de la promotion des droits et de l'égalité et de la communication en une seule entité.

Source : « Le Défenseur des droits : missions et gestion », Cour des comptes, septembre 2014.

Lors de la création du Défenseur des droits, en 2008, il avait été décidé d'exclure de son périmètre le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), créé en 2007, afin de ne pas interrompre le premier mandat du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Selon la Cour des comptes, une convention, signée en 2011 entre le Défenseur des droits et le CGLPL prévoit « que le Défenseur des droits a vocation à traiter les cas individuels et non les questions de principe, à l'inverse du Contrôleur général ».

Toutefois, la frontière est poreuse et le Défenseur des droits comme le Contrôleur général sont amenés à traiter des mêmes sujets.

La loi n° 2014-528 du 26 mai 2014 modifiant la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté « donne au CGLPL des pouvoirs très comparables à ceux dont dispose le Défenseur des droits. La loi a ainsi rapproché les pouvoirs des deux institutions dont les champs de compétences sont devenus proches, pour ne pas dire concurrents » 12 ( * ) .

Votre rapporteur spécial regrette que la fin du mandat du premier Contrôleur général des lieux de privation de liberté n'ait pas été l'occasion d'un regroupement des deux autorités. En effet, alors qu'il est indispensable que l'État réalise des économies, la création de « doublons » et la multiplication des structures sont préoccupantes : il en va de la rationalisation et de la lisibilité de l'action publique.

Ces rationalisations pourraient permettre de dégager des marges de manoeuvre supplémentaires susceptibles de permettre au Défenseur des droits de réaliser son projet de multiplier les points de contacts sur le territoire national (d'environ 400 aujourd'hui sur l'ensemble du territoire à 500).

Certes, les budgets de ces deux autorités sont relativement modestes : en 2015, il est prévu que le Défenseur des droits dispose de 29,24 millions d'euros (CP), en baisse de 0,78 %, tandis que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté verrait ses crédits augmenter de 7,89 % (+0,36 million d'euros) à 4,92 millions d'euros (CP). Cette hausse des crédits est justifiée par les nouvelles missions qui lui sont confiées - en particulier le contrôle des exécutions des mesures d'éloignement prononcées à l'encontre d'étrangers jusqu'à leur remise aux autorités de l'État de destination.

Ainsi, selon le programme annuel de performance, « la mise en place des premières opérations d'accompagnement des mesures de reconduites va engendrer des frais de déplacements supplémentaires ».


* 9 Article 17 de la loi n° 2011-302 du 22 mars 2011 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques.

* 10 Réponse au questionnaire budgétaire.

* 11 Lois organique et ordinaire n° 2013-906 et 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.

* 12 Rapport de la Cour des comptes précité.