M. Richárd HÖRCSIK, Président de la Commission des Affaires européennes du Parlement hongrois

Monsieur le Président,

Monsieur l'Ambassadeur,

Chers invités,

Avant toute chose, permettez-moi d'exprimer ma reconnaissance à MM. Simon Sutour, László Trócsányi, Michel Billout et au groupe d'amitié France-Hongrie du Sénat pour l'organisation de cette journée.

Le dialogue constitue à mon sens le meilleur moyen de résoudre les difficultés lorsque celles-ci se posent. Depuis trois ans, la Hongrie et le Parlement hongrois ont été ouverts au dialogue, prêts à discuter des questions sensibles et à réévaluer toute mesure jugée non conforme au droit européen. Je pourrais d'ailleurs citer d'innombrables exemples de discussions intervenues entre le gouvernement hongrois et la Commission européenne. Je sais que le Sénat et le Parlement français consacrent une attention toute particulière à l'actualité hongroise, qu'il s'agisse de droit constitutionnel ou de politique économique. Nous sommes honorés de cette attention.

Nos deux pays sont membres de la même union. Il est naturel et même nécessaire qu'ils se préoccupent mutuellement l'un de l'autre. Néanmoins, nous regrettons que le législateur français n'ait pas une image plus nuancée de la situation en Hongrie. À travers les trois thèmes que nous aborderons aujourd'hui, l'intégration européenne, la situation économique et les questions constitutionnelles et de droit public, j'espère que nous dresserons un bilan de la situation plus conforme à la réalité. Les intervenants hongrois et français qui se succéderont à cette tribune sont tous des personnalités reconnues, dotées des compétences théoriques et pratiques nécessaires à une bonne compréhension de notre situation.

Permettez-moi à présent de vous faire part de quelques réflexions personnelles sur les thèmes de ce colloque.

En premier lieu, les changements en cours en Hongrie ne peuvent être compris que dans le cadre de l'observation complète des changements majeurs intervenus depuis deux décennies.

Sur l'aspect économique, comme vous le savez, depuis le changement de gouvernement intervenu il y a trois ans, la politique économique hongroise est marquée par la volonté de maintenir le déficit public sous la barre des 3 %. Les dépenses budgétaires et la dette de l'État diminuent. La réduction de la dette, problématique inconnue auparavant, est désormais inscrite dans la Constitution. En février dernier, un cadre financier décisif pour les sept années à venir a été adopté. Il a, par miracle, fait l'objet d'un consensus au Parlement.

Concernant l'état de droit, la Hongrie est souvent accusée d'aller à l'encontre du droit européen, s'agissant par exemple de l'indépendance de la Banque centrale, ou encore de la nomination et de l'âge de départ à la retraite des juges. Le Parlement hongrois travaille sur ces questions et saura répondre à ces critiques. De mon côté, je préconise de ne pas se contenter de lire la presse, mais d'examiner les faits en toute objectivité. La Commission européenne a ouvert plusieurs procédures d'infraction au droit contre la Hongrie. La Hongrie y fera face. La Commission européenne et le Parlement européen examinent la quatrième modification constitutionnelle intervenue en mars dernier. Le gouvernement hongrois a demandé que soit constatée l'invalidité de cette procédure. J'annonce que la commission compétente a confirmé la semaine dernière son caractère infondé. Une première étape est close.

Monsieur János Martonyi, ministre des Affaires étrangères, a demandé à ses homologues européens de formuler un avis sur les amendements constitutionnels. Nous estimons que les modifications apportées, en particulier dans le cadre du quatrième amendement, peuvent être rendues compatibles avec les normes européennes. Nous espérons que celles-ci recueilleront un avis favorable et que la Cour européenne de justice révisera son jugement.

L'Union européenne fait elle-même l'objet de nombreux débats. Sous l'effet de la crise, elle a beaucoup évolué et un nouveau système d'union économique et financière est né. Il en est de même pour la zone euro. Si la Hongrie n'en est pas membre, toutes les mesures budgétaires qu'elle prend doivent être mises en conformité avec la zone euro et réciproquement. La Hongrie est ainsi largement impactée par toutes les décisions qui sont prises dans la zone. C'est pourquoi, il est primordial que les conditions soient égales entre les États membres de la zone euro et les États non-membres et que l'ensemble des États membres de l'Union européenne soient unis. Le principe de solidarité doit rester au coeur de l'Union européenne.

La Hongrie est un pays fier de ses traditions, de son histoire et de sa culture. Celles-ci doivent être respectées. L'union économique et monétaire doit dresser des principes communs pour garantir le respect mutuel des identités et des traditions des États, indissociables de leurs institutions politiques. Les 27 États membres disposent de régimes politiques et économiques spécifiques, qu'ils soient inscrits dans une constitution écrite ou non. Il me semble impossible de les comparer ou d'y poser un jugement de valeur tant ces régimes diffèrent. Dans ma circonscription, la région viticole de Tokaj, nous avons ainsi coutume de dire qu'il ne faut pas mélanger un vin à un autre.

Par ailleurs, toutes les compétences des États membres doivent être respectées. Le principe de subsidiarité est fondamental dans l'Union européenne actuelle. Les Parlements nationaux et les procédures réglementées dans le Traité de Lisbonne doivent être respectés. Je me félicite d'ailleurs que ce traité reconnaisse aux Parlements un rôle important.

Au sein des Parlements nationaux, il faut assurer la légitimation démocratique de l'exécution de toutes les mesures associées à l'Europe, notamment les mesures économiques. L'union économique et financière doit quant à elle endosser un rôle de cadre de vérification, en toute transparence.

Enfin, il est fondamental de ne pas creuser les lignes de fracture au sein de l'Union européenne, entre les pays membres de la zone euro et les autres, entre les pays du Nord et les pays du Sud, entre les anciens États membres et les nouveaux.

Mesdames et Messieurs, voilà les quelques idées que je souhaitais partager en ouverture de ce débat et qui, je l'espère, nous aideront à maintenir le dialogue. Je suis persuadé qu'au terme de cette journée, nos deux pays se connaîtront et se comprendront mieux.

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