SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES (Février 2005)

SUÈDE

En 1993, le ministère des affaires sociales a chargé une commission d'enquêter sur la violence envers les femmes et d'émettre des recommandations pour lutter contre ce problème. La commission a présenté son rapport en juin 1995.

Plusieurs mesures ont été adoptées sur la base de ce rapport : création en 1998 d'une nouvelle infraction, la violation grossière de l'intégrité, applicable en particulier dans les cas de violences conjugales ; formations spécifiques pour les membres des professions qui s'occupent des victimes (fonctionnaires de police, juges, procureurs, médecins...) ; amélioration de la coopération entre les diverses parties prenantes ; augmentation des aides financières versées aux associations de défense des droits des femmes...

En 2003, la loi de 1988 sur l'interdiction de visite , qui permet au procureur d'interdire à un agresseur potentiel d'entrer en contact avec sa victime, a été modifiée, de façon à pouvoir s'appliquer à deux personnes qui partagent le même logement.

1) La qualification pénale des violences conjugales

Depuis 1998, le code pénal comporte , au chapitre 4 de la deuxième partie, relatif aux infractions contre la liberté, un article qui sanctionne explicitement les violences conjugales.

Cet article a créé une nouvelle infraction , la « violation grossière de l'intégrité » , qui est définie comme la répétition de certaines infractions susceptibles d'entamer la confiance en soi de la victime, l'agresseur ayant ou ayant eu des liens étroits avec sa victime . Les infractions dont la répétition peut constituer la violation de l'intégrité d'une personne sont les infractions contre la vie et la santé, les infractions contre la liberté (violation du domicile par exemple) ainsi que les infractions sexuelles.

La nouvelle infraction est sanctionnée d'une peine de prison dont la durée est comprise entre six mois et six ans. Lorsqu'elle est commise par le conjoint, le compagnon, l'ex-conjoint ou l'ex-compagnon, elle est qualifiée de « violation grossière de l'intégrité d'une femme » et sanctionnée de la même manière. Au cours de l'année 2003, 1 860 plaintes ont été reçues pour violation grossière de l'intégrité d'une femme, 219 personnes ont été poursuivies à ce titre, et 179 condamnées.

La condamnation pour cette infraction n'empêche pas que le coupable soit également condamné à d'autres titres : pour coups et blessures par exemple. La réforme de 1998 permet donc au juge de prononcer des peines plus lourdes qu'auparavant pour des faits identiques.

2) Le déclenchement de la procédure pénale

Toute personne détenant des informations sur des actes de violence peut déclencher la procédure pénale, de sorte que la plainte de la victime n'est pas nécessaire.

3) Les mesures d'éloignement

a) Les mesures judiciaires

D'après la loi n° 688 de 1988 sur l'interdiction de visite , toute personne qui s'estime harcelée par une autre peut obtenir du procureur, directement ou non, une décision interdisant à son agresseur tout contact avec elle, par quelque moyen que ce soit (visites à domicile, appels téléphoniques, SMS...). Une telle interdiction ne peut être prononcée que pour empêcher l'agresseur de continuer à persécuter le demandeur ou de commettre une infraction contre ce dernier. Sa durée de validité est limitée à un an, mais peut être prolongée d'un an en cas de besoin. Cette mesure peut par exemple être prise pour protéger une femme contre un ex-époux, qui ne réside plus au même endroit.

Depuis la réforme de 2003, l'instigateur de la procédure n'est plus nécessairement la victime : il peut s'agir par exemple de la police ou d'un service social.

Si la mesure paraît insuffisante, le procureur peut prononcer une interdiction élargie , qui s'applique aux environs immédiats du logement, au lieu de travail ou à tout endroit que l'intéressée a l'habitude de fréquenter.

Depuis la réforme de 2003, la loi sur l'interdiction de visite peut également s'appliquer lorsque l'agresseur et sa victime résident au même endroit , à condition toutefois que le demandeur fonde sa requête sur un risque manifeste pour sa vie, sa santé, sa liberté ou sa quiétude. L'interdiction peut donc par exemple viser l'époux violent. À la différence des autres interdictions, celles qui concernent les personnes qui cohabitent ont une durée de validité de trente jours, qui peut être prolongée de sept jours.

Dans tous les cas, les interdictions prononcées par le procureur peuvent faire l'objet d'un appel devant le tribunal. Leur application est cependant immédiate. La loi dispose que les décisions consécutives à des demandes d'interdiction de visite doivent être prises sans retard et que celles qui concernent deux personnes résidant au même endroit doivent l'être particulièrement rapidement. L'instruction ad hoc du Procureur général, relative aux interdictions de visite générales, précise que le délai doit être d'au plus une semaine.

Le non-respect d'une interdiction de visite constitue une infraction pénale, punissable d'une amende ou d'une peine de prison d'au plus un an. En outre, le non-respect d'une interdiction élargie entraîne l'extension du champ géographique de l'interdiction. Cependant, les interdictions de visite sont fréquemment enfreintes, de sorte que la surveillance électronique des contrevenants est envisagée.

Au cours des dernières années, quelque 6 500 demandes d'interdiction ont été présentées chaque année et environ la moitié ont été acceptées. Le plus souvent, les demandes émanent de femmes qui cherchent à se protéger d'un homme dont elles ont été très proches, mais les interdictions peuvent également concerner des personnes unies par des relations d'une toute autre nature, par exemple un locataire et un bailleur.

b) Les mesures policières

La police peut arrêter les auteurs de certaines agressions, mais, dans les cas de violences conjugales, elle ne dispose pas de compétences particulières pour éloigner l'agresseur de la victime.

4) Les autres dispositions


• Depuis 1992, chaque commissariat de police peut prêter des équipements d'alerte aux femmes menacées. Dans les cas les plus graves, des gardes du corps peuvent être mis à la disposition des intéressées, qui ont par ailleurs la possibilité de changer d'identité.


• En 1994, l'État et le département d'Uppsala ont décidé la création du Centre national pour les femmes victimes de violences au sein du centre hospitalier universitaire d'Uppsala . Cet établissement assure des examens médicaux, des soins, un soutien et un service d'assistance vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Il mène également des travaux de recherche sur les moyens de lutte contre les violences conjugales ainsi que sur les mesures d'aide aux victimes et assure la formation de tous les professionnels concernés par le problème.


• Au cours des dernières années, l'attention s'est portée vers les hommes auteurs de violences : des méthodes de prévention de la récidive sont expérimentées dans le cadre de projets locaux qui bénéficient de fonds publics.


• En 2001, la loi sur les services sociaux a été amendée : une nouvelle disposition a alors été introduite, selon laquelle les services sociaux municipaux ont l'obligation d'aider les victimes d'infractions ainsi que leur famille. Le texte précise que les femmes victimes de violences conjugales méritent une attention particulière.

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