ITALIE

La Camera dei deputati a approuvé, en dernière lecture, le 2 avril 2014, un projet de loi d'habilitation autorisant le Gouvernement à procéder par voie de décret-loi (équivalent des ordonnances prévues par la Constitution du 4 octobre 1958) en matière de peine de détention non carcérale et tendant à insérer dans le code pénal diverses dispositions relatives au régime de suspension de la procédure avec mise à l'épreuve. Ce texte n'a pas encore été publié à la Gazzetta ufficiale (équivalent italien du Journal Officiel ).

Ce texte contient plusieurs dispositions destinées à étendre aux adultes un dispositif existant d'ores et déjà dans le domaine de la justice des mineurs en matière de suspension du procès assortie d'une mesure de probation. Son deuxième chapitre prévoit d'insérer :

- d'une part, trois nouveaux articles, 168- bis à 168- quater , au code pénal au Titre IV « De l'extinction du crime et de la peine » du Premier livre du Code pénal intitulé « Des crimes (reati) en général » ;

- et, d'autre part, huit articles, 464- bis à 464- novies au livre VI, consacré aux procédures spéciales, du code de procédure pénale.

Il dispose également que s'il s'avérait nécessaire de modifier l'organisation et les moyens en personnel des services chargés de son application, le ministre de la Justice en informerait le Parlement afin que des mesures soient prises.

1. Cas dans lesquels le tribunal peut ordonner la suspension de la procédure assortie d'une mesure de probation

Le juge peut ordonner la « suspension de la procédure avec mise à l'épreuve » (sospensione del procedimento con messa alla prova) à la demande de l'accusé formulée oralement ou par écrit, accompagnée soit d'un programme de traitement élaboré avec le service d'exécution des peines soit de la demande d'élaboration d'un tel programme. Le juge ordonne cette suspension lorsqu'il considère que ce programme est adapté, que l'accusé s'abstiendra de commettre d'autres délits et que son domicile, mentionné dans le programme de traitement, est tel que la protection de la victime est assurée.

Le programme, élaboré par le service d'exécution des peines, dont le contenu doit être approuvé par la personne faisant l'objet de la suspension du procès, prévoit nécessairement :

- les modalités de participation de cette personne, de son milieu familial et de son environnement dans le processus de réinsertion sociale, lorsque cela est nécessaire et possible ;

- les obligations de comportement et les autres engagements spécifiques que l'accusé prend afin de faire disparaître ou d'atténuer les conséquences du délit (dédommagement, mesures de réparation et de restitution, contenu du travail d'intérêt général ou social qu'il peut accomplir...) ;

- et les mesures de nature à promouvoir, si possible, la médiation avec la victime.

Cette demande ne peut intervenir que dans les affaires concernant des délits passibles d'une amende ou d'une peine de détention qui n'excède pas 4 ans, qu'elle s'ajoute ou non à la peine pécuniaire, ainsi que les délits de violence, menace ou résistance à un officier public, outrage à magistrat, violation des scellés, rixe aggravée, vol aggravé et recel.

La suspension du procès avec mise à l'épreuve ne peut être ordonnée plus d'une fois, pas plus que pour des délits commis par des « délinquants d'habitude » ou des « délinquants professionnels » (art 102-105 et 108 du code pénal).

Au cours de la période de probation, le service chargé de l'exécution des peines informe le juge, au moins chaque trimestre ou au rythme prévu par l'ordonnance, de l'activité et du comportement de la personne faisant l'objet de la suspension du procès en proposant, si nécessaire, des modifications au programme, son raccourcissement, ou bien en proposant qu'il y soit mis fin en cas de non-respect grave et réitéré. Ses rapports seraient déposés au greffe du tribunal où les parties auraient la faculté de les consulter et d'en prendre copie.

2. Le contenu de l'ordonnance de probation

La mise à l'épreuve impliquerait que la personne faisant l'objet de la suspension de la procédure :

- effectue un travail d'intérêt général déterminé compte tenu de la profession et des aptitudes au travail du délinquant ;

- accomplisse des actes tendant à l'élimination des conséquences dommageables ou dangereuses résultant du délit ;

- dédommage la victime du préjudice occasionné par le délit ;

- et soit confiée aux services sociaux dans le cadre d'un programme qui peut impliquer, notamment, une activité de volontariat de caractère social, ou bien le respect d'obligations vis-à-vis du service social ou d'une structure de soins ou encore d'obligations concernant son lieu de résidence, sa liberté de mouvement ou l'interdiction de fréquenter certains lieux.

Le travail d'intérêt général - obligatoire - consiste en une prestation non rétribuée, d'une durée d'au moins 10 jours, au bénéfice de la collectivité (État, régions, provinces, communes ou organismes à but non lucratif à caractère social qui ont conclu une convention avec l'État à cette fin...). Il s'effectue dans le respect des obligations familiales, professionnelles, des études et de la santé de l'accusé, au plus 8 heures par jour.

Le juge saisi de la demande de suspension du procès la transmet au ministère public qui fait part, dans les cinq jours et par écrit, de son assentiment ou de son dissentiment motivé.

En cas de rejet, l'accusé peut renouveler sa demande avant l'ouverture du débat de première instance.

Pour statuer sur la demande de suspension du procès avec mise à l'épreuve, le juge peut obtenir, par l'intermédiaire de la police, des services sociaux et d'autres entités publiques, toutes les autres informations considérées comme nécessaires en lien avec les conditions de vie personnelle, familiale et sociale de l'accusé. Ces informations sont immédiatement portées à la connaissance du ministère public et du défenseur de l'accusé.

S'il ne doit pas prononcer une sentence d'acquittement, le juge rend son ordonnance soit au cours de l'audience, après avoir entendu les parties et la victime, soit lors d'une audience ad hoc , qui se déroule dans la chambre du conseil, du déroulement de laquelle il informe les parties et la victime.

3. Le régime de l'ordonnance de probation
a) Effets

L'ordonnance portant suspension du procès avec mise à l'épreuve a pour effet de suspendre la prescription du délit et d'obliger la personne faisant l'objet de cette mesure à se conformer aux mesures de probation édictées.

L'issue positive de la mise à l'épreuve a pour effet de faire disparaître le délit tout en laissant subsister les sanctions administratives qui pourraient y être associées.

b) Durée

La durée de la suspension du procès avec mise à l'épreuve ne peut dépasser :

- 2 ans pour les délits pour lesquels est prévue une peine de détention, que celle-ci soit autonome ou se combine avec ou se substitue à une amende ;

- 1 an quand il s'agit de délits pour lesquels est prévue une amende.

Ces délais courent à compter de la signature du procès-verbal de mise à l'épreuve.

À l'issue de cette période de probation, le juge déclare, dans une décision spécifique :

- soit que le délit a disparu en prenant en compte le comportement de l'accusé établi par un rapport du service d'exécution des peines, après en avoir informé l'accusé, les parties et la victime à l'audience au cours de laquelle il rend sa décision ;

- soit que le procès reprend son cours, les obligations imposées à l'accusé cessant alors de porter effet.

c) Modification

Le juge ayant fixé, dans son ordonnance, le délai avant le terme duquel l'accusé doit avoir satisfait aux obligations qu'il lui impose, il ne peut le proroger, à la demande de l'accusé, plus d'une fois, et seulement pour des « raisons graves ». Il peut également autoriser le paiement, en plusieurs versements, des sommes dues à titre de réparation. Le juge peut aussi, pendant la période de mise à l'épreuve avec l'assentiment de la personne faisant l'objet de la suspension et après avis du ministère public, modifier par ordonnance les mesures prévues par celle-ci.

Le juge peut aussi, d'office, abroger l'ordonnance de suspension du procès avec mise à l'épreuve ce qui aurait pour effet de rouvrir le procès.

d) Voies de recours contre l'ordonnance de suspension du procès

L'ordonnance de suspension du procès avec mise à l'épreuve peut faire l'objet d'un recours en cassation sans caractère suspensif formé par l'accusé, le ministère public ou la victime.

La décision d'abrogation d'office de l'ordonnance de suspension du procès avec mise à l'épreuve peut également faire l'objet d'un recours en cassation.

4. Sanction du non-respect de l'ordonnance de probation

L'ordonnance portant suspension du procès avec mise à l'épreuve est abrogée en cas de transgression grave ou réitérée du programme de traitement ou des obligations imposées, ou encore de refus d'effectuer le travail d'intérêt général. Elle l'est également en cas de commission, durant la période de probation, d'un délit qui n'a pas le caractère d'imprudence (delitto non colposo) ou d'un délit de même nature que celui qui a motivé la probation.

Après la reprise du procès, le ministère public déduit la période correspondant à la mise à l'épreuve qui a été exécutée pour le calcul de la nouvelle peine. Trois jours de mise à l'épreuve équivalent à un jour de prison ou à une amende de 250 euros.

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