LES ENTREPRISES DU SECTEUR
DE L'ÉNERGIE EN EUROPE

À la demande de Mme Sophie Primas, présidente de la Commission des Affaires économiques du Sénat, la Division de la Législation comparée a effectué une recherche sur l'organisation des principales entreprises du secteur de l'énergie en Europe.

Neuf groupes caractéristiques ont été retenus afin de permettre une meilleure appréciation des projets de réorganisation d'EDF : Enel (Italie) et sa filiale Endesa (Espagne), Iberdrola (Espagne), E.ON (Allemagne), RWE (Allemagne) et EnBW (Allemagne), Vattenfall (Suède), Fortum (Finlande) et Centrica (Royaume-Uni). La présente étude précise leur statut juridique, la répartition de leur capital et la structuration de leurs activités, en particulier dans la production d'énergie nucléaire.

Le statut de société anonyme sous ses différentes guises et variations nationales est unanimement retenu. Le capital est ouvert et la cotation en bourse généralisée, sauf dans le cas de l'électricien d'État suédois, Vattenfall. Les États ne détiennent plus la majorité du capital à l'exception des pays nordiques, tandis que l'État italien demeure le premier actionnaire d'Enel sans détenir la majorité. EnBW présente un cas particulier où l'actionnariat est dominé par les communes et le Land du Bade-Wurtemberg.

Il s'agit systématiquement de groupes organisés autour d'une holding et d'une constellation de filiales par métier et par produit, ces filiales pouvant elles-mêmes constituer des subholdings contrôlant d'autres sociétés filiales. Le secteur a connu également des séries de fusions-acquisitions, réabsorptions, échanges, reventes et scissions. Il en résulte des organisations matricielles très complexes.

Les activités nucléaires ne font pas exception mais on retrouve en général une filiale-pays dédiée à la production d'énergie nucléaire qui contrôle ou possède une participation dans des sociétés propriétaires ou exploitantes de chaque centrale. On notera qu'en Espagne, la plupart des centrales nucléaires sont exploitées par des groupements d'intérêt économique rassemblant les principaux énergéticiens du pays.

1. Europe du Sud
a) Enel

L'énergéticien historique italien Enel jouit du statut de société anonyme ( società per azioni - SpA ). Constitué en 1962 comme établissement public d'État, l' Ente nazionale per l'energia elettrica est conçu initialement comme un instrument au service du développement économique du pays par l'unification du système électrique national et par la conduite d'une politique énergétique unifiée sous l'égide de l'État. Il est créé par la loi 223 ( * ) en procédant à l'acquisition contre indemnisation de la quasi-totalité des entreprises de production, de transport et de distribution d'énergie électrique en Italie. EDF a servi de modèle influent.

Les années 1990 sont marquées par la libéralisation du marché de l'électricité en Europe. En 1992, Enel est transformé en société anonyme avec l'État italien comme seul actionnaire. En 1999, un décret législatif 224 ( * ) assure la transposition de la directive 96/92/CE. C'est l'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité, ce qui signifie pour Enel la fin de son monopole et la séparation des activités de production d'énergie électrique, de transport, de distribution et de vente avec la constitution de sociétés distinctes. En outre, un plafond de production est imposé à Enel qui ne peut produire plus de 50 % de la production globale sur le territoire national et qui doit vendre des capacités de production à d'autres acteurs économiques pour créer des opérateurs électriques concurrents.

Enfin, l'État italien procède à une privatisation partielle d'Enel en 1999, qui est coté à la bourse de Milan depuis le 2 novembre de cette même année tout en conservant son siège à Rome.

D'après l'autorité italienne des marchés financiers, la CONSOB, les actionnaires significatifs d'Enel sont l'État italien, actionnaire principal, avec 23,6 % des actions et le groupe financier Blackrock à hauteur de 5,6 % des actions, avec des droits de vote proportionnels. L'ensemble des investisseurs institutionnels - dont 40 % sont américains - représente 57,6 % du capital et les porteurs individuels 18,8 %.

L'activité du groupe Enel couvre la production et la distribution d'électricité et de gaz dans 35 pays, avec environ 69 000 employés au sein de l'ensemble. Il fait partie des plus grands énergéticiens mondiaux. D'après la présentation aux investisseurs de mars 2020, le groupe Enel est à la fois le premier opérateur de réseau d'électricité et de gaz du monde avec 73 millions d'utilisateurs finaux, l'acteur sur le marché mondial disposant des plus grandes capacités installées en énergies renouvelables (46 GW) et l'énergéticien servant le plus grand nombre de consommateurs au détail sur l'ensemble des marchés libres et régulés (70 millions).

L'organisation du groupe Enel répond à un schéma matriciel complexe croisant des segments d'activité et des structures par zones géographiques auxquels s'ajoutent des fonctions support et holding 225 ( * ) au niveau central.

Les cinq segments d'activité au niveau global sont la production d'énergie conventionnelle (charbon, gaz, nucléaire), la production d'énergies renouvelables, les réseaux de transport et de distribution d'électricité et de gaz, Global Trading et Enel X. Global Trading est la structure fonctionnelle du groupe chargé de l'optimisation globale de son portefeuille d'actifs et de la réduction de son exposition au risque par l'achat de matières premières et d'énergie en gros. Elle intervient sur les marchés de gros, financiers et physiques, d'électricité, de gaz, de pétrole et de permis d'émissions de CO 2 . Enel X est dédié aux services numériques : e-city , mobilité électrique, domotique, solutions d'optimisation de l'utilisation d'énergie pour l'industrie.

Les unités géographiques gèrent les relations avec les gouvernements et les autorités de régulation ainsi que la vente d'électricité et de gaz

En 2019, les recettes et produits se sont élevés à 80,3 milliards d'euros pour 17,9 milliards d'euros d'excédent brut d'exploitation ( EBITDA) 226 ( * ) . Ces bénéfices avant retenues se répartissent ainsi : 46 % pour les réseaux d'électricité et de gaz, 26 % pour la production d'énergies renouvelables, 18 % pour la vente au détail d'électricité et de gaz, 9 % pour la production d'énergie conventionnelle, 1 % pour Enel X.

Le groupe Enel intervient principalement sur trois marchés essentiels : l'Italie et la péninsule ibérique via Endesa, ainsi que l'Amérique du Sud, via deux filiales cotées, l'une pour le Chili où sa position est très forte et l'autre pour le reste de l'Amérique du Sud (Argentine, Brésil, Pérou). L'Italie lui fournit 42 % de ses bénéfices avant retenues, l'Amérique latine 29 % et l'ensemble Espagne-Portugal 21 %.

En Italie, le groupe Enel intervient via des filiales nationales qu'il contrôle. C'est le cas notamment pour la vente d'électricité où interviennent deux sociétés-filles :

- Servizio Elettrico Nazionale (SEN) pour la vente d'électricité sur le marché régulé au moins jusqu'en 2022. Elle est née en 2007 au moment de la transposition 227 ( * ) de la directive communautaire de libéralisation de 2003 imposant la séparation en sociétés distinctes des activités de distribution et de vente aux clients qui n'ont pas choisi un fournisseur du marché libre ;

- Enel Energia pour la vente d'électricité sur le marché libre et de gaz au consommateur final.

En matière de distribution en Italie, Enel opère via E-distribuzione anciennement Enel distribuzione. Le changement de nom a été imposé par l'autorité de régulation de l'électricité italienne, l'ARERA, pour éviter que les sociétés de distribution et de vente ne portent une marque convergente. Elle a été créée par le décret législatif Bersani de 1999 mais elle a cédé ses activités de vente sur le marché régulé à l'autre filiale SEN en 2007.

Si l'on prend en compte la totalité des filiales et non la seule holding , le groupe Enel présente une organisation extrêmement complexe et l'on peut constater de régulières modulations des constructions juridiques, soit à cause de l'évolution de la réglementation dans tel ou tel pays, soit pour des raisons opérationnelles et financières. La gestion de la production d'énergies renouvelables en offre un exemple.

Ainsi a été constituée en 2008 une filiale chargée des énergies renouvelables au niveau mondial, Enel Green Power. Elle a rassemblé les activités renouvelables opérées par Enel Produzione SpA en Italie et celles des autres compagnies étrangères contrôlées par Enel, notamment l'espagnole Endesa. Enel Green Power, cotée à Milan et à Madrid entre 2010 et 2016, gérait initialement les activités internationales dans les énergies renouvelables via une holding financière de droit néerlandais. En 2016, Enel a modifié sa stratégie en rachetant les actions d'Enel Green Power pour réaliser une fusion partielle par récupération par Enel en direct de cette holding financière néerlandaise. Ce mouvement s'est accompagné d'une sortie de cotation d'Enel Green Power. Parallèlement, Endesa, la filiale espagnole d'Enel a racheté à Enel la filiale espagnole d'Enel Green Power pour l'absorber.

La position d'Enel dans le domaine nucléaire est désormais modeste et portée uniquement par l'activité d'Endesa en Espagne ( cf. infra ). C'est le résultat d'une évolution drastique de la politique énergétique italienne.

En effet, la catastrophe de Tchernobyl a conduit à l'organisation les
8 et 9 novembre 1987 de deux référendums abrogatifs conformément à l'article 75 de la Constitution italienne. Le premier référendum abrogatif a porté sur l'implantation des centrales nucléaires en Italie et a abouti à l'abrogation du pouvoir de décision du comité interministériel pour la programmation économique en matière de localisation des centrales 228 ( * ) . Dans la foulée, ont été ordonnés la fermeture des trois centrales en activité et l'arrêt de la construction en cours d'une quatrième, qui a été finalement reconvertie. L'Italie est ainsi sortie du nucléaire.

Vingt ans après, entre 2008 et 2011, sous l'impulsion du gouvernement Berlusconi, la question nucléaire est redevenue un sujet de débat et de tensions entre les régions et l'État. Une nouvelle stratégie énergétique nationale incluant le nucléaire a été définie 229 ( * ) . Puis, le décret législatif du 15 février 2010 sur l'implantation des sites nucléaires a donné lieu à un rude contentieux entre plusieurs régions et l'État. Les régions ont porté le texte devant la Cour constitutionnelle, qui l'a finalement validé sous quelques réserves. L'État a contre-attaqué en faisant censurer les lois régionales d'interdiction d'implantation nucléaire adoptées par l'Émilie-Romagne, les Pouilles et la Toscane. Finalement, la question a été tranchée par un nouveau référendum abrogatif les 12 et 13 juin 2011 dans la foulée de l'accident de Fukushima. Cela a abouti à l'abrogation de la base légale de la reprise des activités nucléaires par 94 % des suffrages exprimés avec 54 % de participation. De fait, le programme nucléaire italien n'a pas repris, même à l'expiration du délai de cinq ans après le référendum abrogatif qui rouvrait théoriquement la possibilité d'adoption d'une nouvelle loi sur le nucléaire. L'Italie reste clairement hors du nucléaire et Enel ne peut s'impliquer en la matière qu'à l'étranger, après avoir surmonté toutefois quelques autres obstacles juridiques.

Le second référendum abrogatif de 1987 a porté sur l'interdiction pour Enel de participer à des implantations nucléaires à l'étranger 230 ( * ) . Cela porta un coup d'arrêt à tous les investissements d'Enel à l'étranger dans le nucléaire jusqu'à la loi Marzano de 2004. Le législateur a alors autorisé les producteurs d'électricité nationaux à s'implanter à l'étranger, y compris en partenariat, avec des entreprises étrangères et, y compris à des fins de réimportation de l'énergie produite vers l'Italie, sans restriction portant sur la source d'énergie 231 ( * ) . En conséquence, dès 2005, Enel, déjà transformé en société anonyme cotée, a signé des accords avec EDF sur le développement de l'EPR de Flamanville et exercé des activités nucléaires via des filiales ou des participations dans des sociétés étrangères, notamment en Slovaquie. Surtout avec sa prise de contrôle d'Endesa en 2007, c'est un acteur essentiel du nucléaire en Espagne.

L'évolution et la prise de contrôle d'Endesa par Enel

Société anonyme de droit espagnol cotée à la bourse de Madrid, Endesa est l'ancienne entreprise nationale d'électricité créée comme société d'État sous Franco en 1944 sous l'égide de l' Instituto Nacional de Industria (INI). Ce dernier était un organe de reconstruction et de planification économique 232 ( * ) qui contrôlait notamment, outre le secteur de l'électricité via Endesa, l'industrie automobile avec SEAT, l'aviation civile avec Iberia, les chantiers navals, le secteur pétrochimique avec l'ancêtre de Repsol. L'INI était le fer de lance d'un capitalisme d'État très marqué jusque dans les années 1980 où est intervenue une série de privatisations.

Endesa est partiellement privatisée en 1986, date à laquelle l'État espagnol contrôle encore 75 % du capital. L'INI est dissous en 1995 avec transfert de son patrimoine et de certaines attributions à la Société des participations industrielles de l'État espagnol (SEPI). En 1997 et en 1998, la privatisation se poursuit et l'État s'efface progressivement du capital. C'est également le moment de la transposition de la première directive communautaire de 1996 qui ouvre le marché de l'électricité 233 ( * ) . Enel remporte une OPA contre E.ON en 2007 et rachète Endesa. Enel va porter sa participation jusqu'à 92 % du capital en 2009, le solde étant du flottant. Enel a revendu une partie des parts et stabilisé sa participation à 70,1 % des parts et des droits de vote depuis 2014.

Endesa, par l'intermédiaire de sa filiale Endesa Generación 234 ( * ) participe avec d'autres industriels comme Iberdrola et Gas Natural aux groupements d'intérêts économiques qui gèrent la plupart des centrales nucléaires espagnoles (pour le schéma complet, cf. infra la section sur Iberdrola). Globalement, Endesa maîtrise 47,1 % des capacités nucléaires installées en Espagne 235 ( * ) .

b) Iberdrola

Iberdrola est une entreprise privée constituée sous forme de société anonyme de droit espagnol ( sociedad anónima ). Elle est née de la fusion en 1992 des sociétés Iberduero (S.A.R.L.) et Hidroeléctrica Española (S.A.), la première ayant lancé une OPA sur la seconde. Iberdrola est donc issue de deux entreprises privées, qui furent fondées au début du XX e siècle par des industriels basques avec l'apport de la Banque de Biscaye et qui entretinrent toujours des liens capitalistiques forts. Le siège d'Iberdrola demeure à Bilbao, tandis que la société est cotée à Madrid.

L'État espagnol n'a enregistré une participation au capital d'Iberdrola, à hauteur de 5,37 %, qu'entre 2012 et 2014 à la suite de la nationalisation du groupe bancaire privé Bankia. Les principaux investisseurs sont étrangers : le Qatar via son fonds souverain, Qatar Investment Authority, détient 8,7 %, le fonds d'investissement américain BlackRock environ 5,1 % et la Banque centrale de Norvège, 3,1 %.

De façon classique, Iberdrola S.A. est une holding contrôlant plusieurs sociétés espagnoles et étrangères 236 ( * ) . Ces filiales qui reflètent les acquisitions progressives d'Iberdrola et son extension à d'autres marchés sont organisées sur une base géographique :

- Iberdrola España, en Espagne qui a le statut de sociedad anónima unipersonal (SAU), une société anonyme qui n'a qu'un seul associé actionnaire en l'occurrence la holding Iberdrola S.A. ;

- Scottish Power Ltd au Royaume-Uni, l'ancienne compagnie d'électricité publique en Écosse privatisée en 1991 et rachetée par Iberdrola en 2006 après l'échec d'une offre d'E.ON. Il s'agit d'une private limited company ; son actionnariat n'est donc pas ouvert et elle n'est pas cotée ;

- Iberdrola México, au Mexique, sociedad anónima de capital variable (S.A. de C.V.) la forme la plus commune de société commerciale en droit mexicain ;

- Avangrid Inc., aux États-Unis, est une société cotée disposant de davantage d'autonomie par rapport à la holding Iberdrola S.A., actionnaire majoritaire à hauteur de 81,50 % ;

- Neoenergia S.A., au Brésil est également une société cotée disposant de davantage d'autonomie par rapport à la holding Iberdrola S.A., actionnaire majoritaire à hauteur de 50 % plus une action.

Outre les filiales-pays, le groupe Iberdrola a constitué trois filiales transversales qu'elle détient et contrôle intégralement : Iberdrola Energía Internacional S.A.U, subholding pour toutes les activités énergétiques en dehors des pays mentionnés ci-dessus où opère une filiale dédiée, ainsi que deux filiales mondiales traitant de l'ingénierie et construction (centrales de production, y compris nucléaire, réseaux et énergies renouvelables) et de la gestion immobilière du groupe.

L'ensemble des filiales-pays contrôlées par Iberdrola S.A. agissent comme subholding , contrôlant elles-mêmes des filiales par branches d'activité. On considérera l'exemple d'Iberdrola España S.A.U. qui structure l'activité en Espagne, en sachant que Scottish Power Ltd est structurée de façon symétrique sur le marché écossais. Iberdrola España S.A.U. contrôle à 100 % trois filiales : l'une dédiée aux énergies renouvelables, une autre aux réseaux électriques 237 ( * ) et la dernière à la production d'électricité hors renouvelables et à la commercialisation d'électricité et de gaz. Cette activité de commercialisation sur le marché libéralisé de la filiale Iberdrola Generación España est menée à bien par une sous-filiale à 100 %, Iberdrola Clientes S.A.U. Une autre sous-filiale à 100 % de la filiale de production en Espagne est chargée de la gestion des activités nucléaires : Iberdrola Generación Nuclear S.A.U. En 2019, la production d'électricité d'Iberdrola en Espagne a atteint 58,6 GWh dont 38 % issus d'énergies renouvelables, 40,5 % du nucléaire, 16,5 % du gaz, 4 % de cogénération et 1 % du charbon.

Les activités nucléaires en Espagne sont régies par la loi n°25/1964 du 29 avril 1964 sur l'énergie nucléaire dans sa dernière version modifiée en 2011. Le développement du nucléaire, actif à partir des années 1960, fut freiné par un moratoire décidé dès 1982 lors de l'arrivée au pouvoir de Felipe González et consolidé par la loi en 1994 238 ( * ) . Les projets de sept réacteurs en construction furent définitivement arrêtés et abandonnés. Un mécanisme de compensation des investissements réalisés fut établi au profit des entreprises privées titulaires (Iberdrola, Endesa et Unión Fenosa).

Il demeure aujourd'hui en Espagne sept réacteurs en activité sur cinq sites. Il faut distinguer trois opérateurs structurés différemment 239 ( * ) :

- la filiale Iberdrola Generación Nuclear, déjà évoquée, qui détient à 100 % et gère la centrale de Cofrentes ;

- le groupement d'intérêt économique ( agrupación de interés económico - AIE ) CNAT qui gère les centrales nucléaires d'Almaraz et de Trillo. Pour la centrale d'Almaraz, il est constitué par Iberdrola, Endesa et Naturgy Energy Group, nouveau nom de la société constituée par la fusion de Gas Natural et d'Unión Fenosa en 2009. Pour la centrale de Trillo, il est constitué par Iberdrola, Naturgy Energy, EDP HC Energía - une filiale espagnole d'Energias de Portugal (EDP) - et Nuclenor, une société filiale à part égale d'Iberdrola et d'Endesa, qui possède et opérait une centrale arrêtée en 2012 à Santa María de Garoña 240 ( * ) ;

- le groupement d'intérêt économique ANAV qui gère les centrales d'Ascó et de Vandellós pour les seules Iberdrola et Endesa, cette dernière étant majoritaire 241 ( * ) .

2. Allemagne
a) E.ON

L'entreprise E.ON est constituée en société européenne (SE), une forme de société anonyme régie par le droit communautaire, qui permet de gérer des activités dans plusieurs pays européens en utilisant un ensemble de règles unique 242 ( * ) . Elle naquit en 2000 de la fusion de deux groupes industriels allemands : VEBA et VIAG. Il s'agissait avant leur privatisation et le désengagement de l'État fédéral dans les années 1980 de deux conglomérats d'État, le premier à base prussienne et le second à base bavaroise, constitués dans les années 1920 pour assurer la reconstruction. Le siège d'E.ON se situe à Essen dans la Ruhr. Elle est cotée à la bourse de Francfort.

La structure de son actionnariat se décompose en 80 % d'investisseurs institutionnels et 20 % d'investisseurs particuliers. Parmi ses investisseurs institutionnels, le groupe RWE possède 15 % des parts suite à un échange d'actifs opéré entre les deux sociétés en 2018-2019 ( cf. infra ). Les autres actionnaires principaux sont des fonds du type The Capital Group Companies Inc (10,16 %), Capital Income Builder (5,07 %), BlackRock (4,41 %) ou encore l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada (3,13 %) 243 ( * ) . Les actionnaires allemands détiennent 31 % du capital.

La recherche n'a pas permis de mettre en évidence une participation autre que marginale de collectivités territoriales ou d'organismes publics au capital d'E.ON. On peut relever toutefois, selon le rapport 2019 sur les participations du Land de Bavière 244 ( * ) que celui-ci détenait encore au 31 décembre 2018 environ 1,31 % d'E.ON. Cette participation historique n'a cessé de diminuer au cours des 15 dernières années.

Le groupe E.ON a complètement revu son positionnement sur le marché de l'électricité au cours des dernières années. Fin 2014, il a annoncé qu'il se séparait de ses activités traditionnelles de production d'électricité en Europe pour se concentrer sur les réseaux, les énergies renouvelables et les services aux consommateurs. Il a séparé alors ses activités de production d'énergies fossiles et d'opérations sur les marchés de l'énergie des autres activités du groupe et les a transférées dans une nouvelle entreprise nouvellement créée, Uniper. En 2016 et 2017, E.ON a revendu la totalité de ses parts dans Uniper sur les marchés financiers, puis à Fortum, l'énergéticien finlandais ( cf. infra ).

En 2018 et 2019, E.ON a encore évolué en procédant à un échange d'actifs avec RWE. Le groupe a ainsi récupéré la société Innogy, sauf son segment de production d'énergies renouvelables, et 1,5 milliard d'euros. En contrepartie, E.ON a concédé son secteur d'énergies renouvelables, 16,67 % de ses parts et les intérêts minoritaires dans deux centrales nucléaires allemandes dont il détenait des parts via sa filiale PreussenElektra GmbH : Gundremmigen (25 %) et Emsland (12,5 %).

En conséquence, E.ON est aujourd'hui structuré autour de deux principales activités : les réseaux d'énergie et les solutions clients.

S'agissant des réseaux d'énergie, l'intégration d'Innogy permet à E.ON d'exploiter désormais des réseaux réglementés de distribution dans huit pays européens. En 2019, E.ON a transmis 178,1 milliards de kWh d'électricité et 133,8 milliards de kWh de gaz. Outre l'Allemagne, E.ON est également présent en Suède pour l'électricité, ainsi qu'en Europe centrale et en Turquie autant pour l'électricité que pour le gaz.

S'agissant des solutions clients, l'intégration d'Innogy permet à E.ON de disposer d'une base de 40 millions de clients. En la matière, E.ON vise la réduction des coûts grâce à la numérisation et de nouvelles solutions client allant au-delà de la stricte vente de gaz et d'électricité.

La société Innogy mérite une présentation spécifique au sein du groupe E.ON. Les segments « réseaux », « vente » et les fonctions internes ont été transférés à E.ON en septembre 2019 lors de l'échange d'actifs avec RWE. Le segment « réseaux » englobe la distribution d'électricité et de gaz en Allemagne, la distribution de gaz en Croatie et la distribution d'électricité en Pologne et en Hongrie. Le segment « vente » comprend les activités de vente au détail d'énergie qui, outre la vente d'électricité et de gaz, comprennent la fourniture de solutions énergétiques innovantes. Innogy opère principalement en Allemagne, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Belgique et en Europe de l'Est, et gère un portefeuille de 14,4 millions de clients pour l'électricité et 4,7 millions de clients pour le gaz.

Bien qu'ayant recentré ses activités, E.ON, par l'intermédiaire de filiales, intervient dans d'autres secteurs. Ainsi, la société à responsabilité limitée PreussenElektra GmbH, filiale détenue à 100 % par E.ON exploitait des centrales nucléaires avant le retournement de la politique énergétique allemande en 2011 en faveur d'une sortie du nucléaire d'ici 2022. Par l'intermédiaire de PreussenElektra, E.ON opérait :

- le site de Brokdorf, détenu à 80 % par PreussenElektra et à 20 % par Vattenfall, l'électricien d'État suédois ;

- le site de Grohnde détenu à 83,3 % par PreussenElektra et à 16,7 % par Stadtwerke Bielefeld, la régie d'eau, de gaz, de l'électricité et de chauffage de la commune de Bielefeld ;

- le site d'Isar. Le réacteur II détenu en totalité par PreussenElektra est encore en fonctionnement, tandis que le réacteur I détenu à 75 % par PreussenElektra et à 25 % par Stadtwerke München, la régie communale de Munich, est en cours de démantèlement 245 ( * ) .

Le rapport annuel 2019 d'E.ON indique un chiffre d'affaires de l'ordre de 41,5 milliards d'euros en 2019 contre 30 milliards d'euros l'année précédente. L'EBITDA ajusté s'élève à 5,5 milliards d'euros contre 4,8 milliards en 2018.

b) RWE

La société RWE (Rheinisch-Westfälisches Elektrizitätswerk) a été créée en 1898 sous la forme d'une société anonyme de droit allemand ( Aktiengesellschaft - AG ) . Son siège est également situé à Essen et elle est cotée à la bourse de Francfort.

Au 1 er janvier 2020, le capital était ainsi réparti 246 ( * ) entre investisseurs institutionnels (86 % des actions), investisseurs particuliers (14 %) et salariés (1 %). Les trois plus importants actionnaires sont la société de gestion d'actifs américaine BlackRock (7 % du capital souscrit), une société de participation des communes de Rhénanie-du-Nord-Westphalie KEB Holding AG 247 ( * ) (5 %) et la ville d'Essen (3 %). On relèvera que 24 % du capital de RWE est détenu par des investisseurs institutionnels allemands.

Une myriade de communes de Rhénanie-du-Nord-Westphalie sont indirectement présentes au capital de RWE. La société KEB Holding AG est en effet détenue :

- à 65,12 % par Dortmunder Stadtwerke AG 248 ( * ) , régie communale de la ville de Dortmund ;

- à 17,52 % par une société de gestion du patrimoine de l'intercommunalité couvrant la moitié Nord-Est du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie 249 ( * ) ;

- à 17,33 % par la compagnie publique de transport par autocar de Westphalie 250 ( * ) .

Le chiffre d'affaires réalisé en 2019 par le groupe RWE s'élevait à 13,1 milliards d'euros pour un EBITDA de 2,1 milliards d'euros.

Comme il a été mentionné précédemment, entre 2018 et 2019, RWE et E.ON ont procédé à un échange d'actifs : RWE a cédé sa part dans Innogy et a reçu en retour le secteur des énergies renouvelables d'E.ON, 16,67 % des actions d'E.ON (part ramenée à 15 % depuis) et les intérêts minoritaires dans deux centrales nucléaires encore exploitées aujourd'hui, soit Gundremmigen et Emsland ( cf. infra ). RWE a payé une contrepartie financière de 1,5 milliard d'euros. Sont aussi comprises dans l'échange la rétrocession d'E.ON à RWE des segments d'activités d'Innogy dans les énergies renouvelables, des installations de stockage de gaz en Allemagne et en République tchèque et une participation de 37,9 % dans l'entreprise autrichienne Kelag.

Avec ces transferts, le positionnement de l'entreprise est désormais tourné vers les énergies renouvelables : fin 2019, la capacité totale de la production renouvelable était de 9,9 GW, dont 8,6 GW au titre des parcs éoliens offshore et sur terre. Dans son rapport d'activité 2019, RWE se présente comme le numéro deux mondial de l'éolien offshore et vise à renforcer sa capacité éolienne et solaire en la portant à 13 GW fin 2022. Outre ces installations déjà existantes, RWE a acquis également divers projets encore en développement, en particulier dans le domaine de l'éolien et du photovoltaïque.

Actuellement, le domaine opérationnel du groupe RWE AG est réparti entre plusieurs filiales de statuts variés :

- RWE Renewables GmbH ;

- RWE Generation SE ;

- RWE Power AG ;

- RWE Supply & Trading GmBH ;

- et RWE Nuclear GmbH.

RWE Renewables GmbH est la filiale la plus récente de RWE AG. Cette société à responsabilité limitée gère les activités liées aux énergies renouvelables de RWE dans plus de 15 pays. Elle détient en particulier une série de filiales-pays en Suède, aux États-Unis, en Italie, au Royaume-Uni, au Japon et en Pologne La stratégie de RWE vise à investir cinq milliards d'euros d'ici 2022 dans les énergies renouvelables et les technologies de stockage, dans l'éolien offshore et terrestre, dans le photovoltaïque.

RWE Generation SE est en charge de la production d'électricité à partir du gaz, de la houille, de l'hydroélectricité et de la biomasse au sein du groupe RWE. Sur quatre pays (Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas et Turquie), cette filiale au statut de société européenne exploite des centrales électriques d'une capacité totale d'environ 25 GW. RWE Generation occupe le quatrième rang en Europe pour la production d'énergie à partir de gaz. L'entreprise utilise la biomasse, notamment aux Pays-Bas où elle a converti à cet effet deux centrales au charbon.

RWE Power AG se divise en deux segments : la production d'énergie conventionnelle (lignite) et la production d'énergie nucléaire. Cette société anonyme extrait près de 100 millions de tonnes de lignite par an, dont environ 90 % sont transformées en électricité dans les centrales électriques du district minier rhénan. Le lignite rhénan fournit un peu plus de 70 milliards de kWh d'électricité par an, soit environ 12 % de la demande totale d'électricité en Allemagne.

RWE Supply & Trading GmbH fait le lien entre la production et la vente d'énergie sur les marchés. La société à responsabilité limitée échange de l'électricité, du gaz, des matières premières et des certificats d'émission de CO 2 . Elle crée également des solutions d'approvisionnement pour les entreprises ou encore commercialise les énergies renouvelables produites par RWE Renewables.

RWE Nuclear GmbH englobe depuis 2018 tout l'aspect nucléaire du groupe et est en charge de l'exploitation, de la gestion opérationnelle, ainsi que de la phase de sortie d'activité (fermeture, déclassement, démantèlement des installations nucléaires de RWE). Les exploitants de centrales sont responsables de leur déclassement et de leur démantèlement ainsi que du conditionnement des déchets radioactifs.

En Allemagne, la transition énergétique se traduit simultanément par une sortie du nucléaire qui sera achevée fin 2022 et la fin de la production d'électricité à partir de charbon à horizon 2038. Sur les quatre centrales nucléaires exploitées par RWE AG, l'une est encore complétement en activité (Emsland), une deuxième est partiellement en activité (Gundremmingen) tandis que les deux dernières sont arrêtées (Biblis et Mülheim-Kärlich).

La centrale d'Emsland est exploitée par la société à responsabilité limitée Kernkraftwerke Lippe-Ems GmbH (KKW Lippe-Ems), qui appartient désormais à 100 % à RWE Nuclear GmbH 251 ( * ) , la filiale nucléaire du groupe RWE, puisque les intérêts minoritaires (12,5 %) détenus précédemment par PreussenElektra GmbH, la filiale nucléaire du groupe E.ON 252 ( * ) , ont été transférés à RWE en septembre 2019 lors de l'échange d'actifs entre les deux sociétés (voir supra ).

Selon le même schéma, la centrale de Gundremmingen est exploitée par la société à responsabilité limitée Kernkraftwerk Gundremmingen GmbH (KGG), qui appartient désormais à 100 % à RWE Nuclear GmbH 253 ( * ) puisque les 25 % détenus précédemment par E.ON ont été transférés à RWE en 2019. Initialement composée de trois réacteurs, un seul est encore en service aujourd'hui, et ce jusqu'à la fin de l'année 2021.

S'agissant des deux centrales qui ne sont plus en service, celle de Biblis a cessé de fonctionner en 2011 et est en cours de démantèlement depuis 2017. RWE était à la fois propriétaire et opérateur de la centrale. La centrale de Mülheim-Kärlich, quant à elle, est en cours de démantèlement depuis 2004. Auparavant, la centrale était exploitée par RWE Power AG, en étant la propriété de la Société Luxembourgeoise de Centrales Nucléaires S.A., dissoute depuis 2005 mais dont RWE détenait 30 %.

c) EnBW

Energie Baden-Württemberg (EnBW) forme le troisième acteur principal du secteur de l'énergie en Allemagne derrière RWE et E.ON. Son coeur d'activité demeure centré sur le sud-ouest de l'Allemagne même si elle s'est étendue à toute l'Allemagne et même à l'étranger, notamment en Suède et au Danemark dans l'éolien, mais aussi en Suisse et en Tchéquie. Elle est constituée comme une société anonyme ( Aktiengesellschaft - AG) dont le siège social se trouve à Karlsruhe et dont les titres s'échangent sur le Xetra, la plateforme électronique opérée par Deutsche Börse .

La société est née en 1997 de la fusion des deux entreprises régionales de l'énergie : Badenwerk AG, basée à Karlsruhe et contrôlée par le Land de Bade-Wurtemberg, et Energieversorgung Schwaben (EVS) AG, basée à Stuttgart et contrôlée par un groupement de communes.

La structure de l'actionnariat a connu quelques vicissitudes. En effet, le Land de Bade-Wurtemberg vendit en 2000 ses parts dans EnBW à EDF. Un pacte d'actionnaires valide jusqu'en 2011 fut conclu entre EDF et le consortium de communes souabes pour assurer une gouvernance paritaire et des règles de rachat prioritaire en cas de cession des parts. Des droits de tirage sur l'électricité produite par le nucléaire en France pour EnBW et en Allemagne pour EDF furent aussi prévus. Cependant, en 2010, EDF qui regardait comme défavorable l'évolution de la politique énergétique allemande, et le Land de Bade-Wurtemberg, qui s'inquiétait finalement des velléités d'opérateurs étrangers sur l'approvisionnement énergétique régional, négocièrent pour organiser le rachat des parts d'EDF dans EnBW. Les parts vendues pour 2,4 milliards d'euros en 2000 furent rachetées par le Land pour 4,7 milliards d'euros en 2010. Les élections régionales aboutirent en 2011 au renversement du gouvernement régional qui avait réalisé l'opération. La nouvelle majorité lança une enquête et engagea un recours devant la cour constitutionnelle du Bade-Wurtemberg qui sanctionna la procédure suivie pour racheter les actions d'EnBW. Juridiquement complexe et politiquement sensible, le contentieux entre EDF et le Land de Bade-Wurtemberg fut porté en 2012 pour arbitrage devant la Chambre de commerce internationale de Paris, qui rejeta en 2016 les demandes allemandes de remboursement partiel.

Le capital d'EnBW est quasiment intégralement dans les mains d'actionnaires publics allemands sans participation de l'État fédéral. Les deux actionnaires principaux sont aujourd'hui à parité :

- l'établissement public de coopération intercommunale dans le domaine de l'énergie mis en place par les communes d'un arrondissement de Souabe 254 ( * ) , qui possède 46,75 % des parts via sa société à responsabilité limitée OEW Energie-Beteiligungs GmbH ;

- et le Land du Bade-Wurtemberg qui possède également 46,75 % des actions, via une filiale à 100 % de sa société de participation et d'investissement Neckarpri GmbH.

Les actionnaires résiduels sont la société EnBW elle-même qui possède 2,08 % de ses parts et d'autres groupements de communes 255 ( * ) .

L'activité d'EnBW est structurée en quatre segments :

- la vente d'électricité et de gaz, ainsi que les services aux industriels ;

- le transport et la distribution d'électricité et de gaz, ainsi que les services associés à la gestion des réseaux électriques, et l'approvisionnement en eau ;

- les énergies renouvelables, avec une forte implication dans l'éolien terrestre et offshore ;

- production et négoce : production électrique par ressources conventionnelles (charbon, gaz, nucléaire), production de chauffage, stockage de gaz, trading sur les marchés de gros, services de démantèlement.

Son activité est impactée directement par le retournement de la politique énergétique allemande et le retrait du nucléaire. EnBW possédait et gérait en effet les trois centrales nucléaires du Bade-Wurtemberg à Neckarwestheim, à Philippsburg et à Obrigheim. Seul le réacteur II de Neckarwestheim est encore en activité et produira de l'électricité jusqu'en 2022. Le décommissionnement et le démantèlement d'Obrigheim est ancien et date de 2007, ceux de Neckarwestheim I et Philippsburg I de 2017. L'autorisation de démantèlement de Philippsburg II a été obtenue en 2019.

Pour la gestion des centrales nucléaires, EnBW avait fait le choix de constituer à compter du 1 er janvier 2007 un opérateur unique chargé de toute la gestion, l'administration, l'activité proprement industrielle, y compris la mise à l'arrêt et le démantèlement. Une filiale a été constituée à cette fin, EnBW Kernkraft (EnKK), sous la forme d'une société à responsabilité limitée possédée directement à 98,45 % par la holding EnBW, les autres actionnaires étant d'autres filiales d'EnBW et de façon extrêmement résiduelle la Deutsche Bahn, les chemins de fer allemands. EnKK agissait dans les trois centrales nucléaires sur instruction et pour le compte des propriétaires, eux-mêmes constitués sous la forme de filiales intégralement contrôlées par EnBW. Des contrats internes et des accords de transferts financiers lient au sein du groupe la holding , les sociétés propriétaires des centrales et l'opérateur EnKK jusqu'à l'achèvement du démantèlement.

3. Pays nordiques et Royaume-Uni
a) Vattenfall

Vattenfall est constituée en société anonyme de droit suédois ( Aktiebolag - AB). Jusqu'en 1992, année au cours de laquelle elle est devenue une société anonyme, c'était une entreprise d'État (statligt affärsverk) . Vattenfall AB, la société-mère du groupe Vattenfall, n'est pas une société cotée en bourse. Elle est détenue à 100 % par l'État suédois. Quant aux activités du groupe, la plus grande partie est exercée dans des filiales en propriété exclusive ou partielle.

Vattenfall AB compte une cinquantaine de filiales, par pays et par activité. Ses marchés principaux sont la Suède, l'Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark et le Royaume-Uni.

Le groupe Vattenfall se tourne depuis quelques années de plus en plus vers les énergies renouvelables. Le groupe affiche un objectif d'élimination des productions basées sur les énergies fossiles en l'espace d'une génération. En 2019, la part de la production d'électricité sans énergie fossile était de 76 %. Au cours de l'année écoulée, Vattenfall a ainsi mis en service un parc éolien offshore au large du Danemark et a commencé la construction d'un nouveau parc éolien dans la mer Baltique. Ces deux parcs ensemble devraient produire l'énergie nécessaire à la consommation énergétique d'un million de foyers. Il a aussi commencé à construire sa première installation autonome à grande échelle en énergie solaire, aux Pays-Bas. Un projet hybride combinant énergie éolienne, énergie solaire et stockage d'énergie dans une seule et même installation a également été lancé.

Le groupe Vattenfall AB a organisé son activité en segments opérationnels :

- le segment « clients et solutions », qui est en charge de la vente d'électricité, de chauffage et de gaz. Vattenfall fournit des solutions aux particuliers et aux entreprises et compte 10,2 millions de contrats clients en Europe ;

- le segment « production d'énergie », qui regroupe notamment les opérations liées à l'énergie hydraulique et nucléaire. Il exploite un portefeuille d'une capacité de 7,2 GW d'énergie nucléaire et de 11,7 GW d'hydroélectricité en Suède, en Finlande et en Allemagne. Vattenfall se définit ainsi comme l'un des plus grands fournisseurs européens d'électricité sans combustibles fossiles. Ce segment gère à la fois la production d'électricité et les questions liées aux marchés commerciaux, pour garantir un approvisionnement compétitif et sécuriser les approvisionnements des clients ;

- le segment « éolien, solaire et services énergétiques ». Vattenfall dispose d'une capacité éolienne totale offshore et terrestre d'environ 3,3 GW dans cinq pays. Les services énergétiques couvrent le stockage d'énergie à travers les batteries et services de réseau, les solutions de recharge pour les véhicules électriques, les panneaux solaires, les pompes à chaleur, ainsi que les solutions pour l'autoproduction d'énergie ;

- le segment « chauffage » comprend les activités de chauffage et de condensation ;

- et le segment « distribution », qui possède et exploite des réseaux de distribution d'électricité en Suède et en Allemagne (Berlin) et compte environ 3,3 millions de clients, entreprises et particuliers. Ce pôle est particulier, dans le sens où les activités de distribution d'électricité sont réglementées en Suède par la loi sur l'électricité du 20 novembre 1997 (Ellag) 256 ( * ) et en Allemagne par la loi sur l'industrie énergétique du 7 juillet 2005 (Energiewirtschaftsgesetz) 257 ( * ) . Elles sont dissociées des autres activités de Vattenfall. En 2017, Vattenfall a créé une nouvelle unité commerciale pour l'exploitation et la propriété de nouveaux réseaux au Royaume-Uni.

S'agissant du parc nucléaire, Vattenfall opérait en Suède jusqu'en 2019 sept réacteurs nucléaires basés sur deux centrales 258 ( * ) : quatre sur la centrale de Ringhals, trois sur celle de Forsmark.

La centrale de Ringhals est possédée et gérée par la société Ringhals AB 259 ( * ) , détenue conjointement par Vattenfall (70,4 %) et par Sydkraft Nuclear Power AB (29,6 %), la filiale nucléaire suédoise d'Uniper, qui fait désormais partie du groupe finlandais Fortum. En 2015, Vattenfall a décidé de fermer les deux plus anciens réacteurs de la centrale de Ringhals en 2019 et 2020. Ringhals II a donc fermé fin décembre 2019, Ringhals I devrait suivre en fin d'année 2020. La centrale produit 15 % de toute l'électricité utilisée en Suède.

La centrale de Forsmark, quant à elle, produit 1/6 e de toute l'électricité consommée en Suède. La centrale est gérée et exploitée par la société Forsmarks Kraftgrupp AB, propriété à 66 % du groupe Vattenfall, qui la détient conjointement avec Mellansvensk Kraftgrupp (filiale de l'énergéticien finlandais Fortum avec 25,5 % des parts) et Sydkraft Nuclear Power AB (8,5 %) 260 ( * ) .

Vattenfall était un acteur important du nucléaire en Allemagne. La volonté allemande de sortir du nucléaire a conduit en 2011 à l'arrêt immédiat de huit centrales nucléaires sur 17, dont les deux que Vattenfall opérait. À Brunsbüttel, Vattenfall possédait 66,7 % des parts contre 33,3 % à E.ON, la société Kernkraftwerk Brunsbüttel GmbH (KKW Brunsbüttel) exploitant la centrale. À Krümmel, la propriété était partagée à égalité entre Vattenfall et E.ON, Vattenfall étant responsable de l'exploitation de l'installation. Enfin, Vattenfall est actionnaire minoritaire (20 %) de la centrale de Brokdorf, propriété à 80 % de la filiale nucléaire d'E.ON et exploitée par cette dernière. Cette centrale cessera de fonctionner au 31 décembre 2021.

En 2019, Vattenfall a amélioré son bénéfice par rapport à l'année précédente de 2,9 milliards de couronnes suédoises (SEK, soit environ 270 millions d'euros), pour le porter à 14,9 milliards de SEK (1,37 milliard d'euros). Le comité directeur va proposer à la prochaine assemblée générale annuelle du groupe qu'un dividende de 7,2 milliards de SEK (660 millions d'euros) soit versé au propriétaire du groupe, l'État suédois 261 ( * ) .

b) Fortum

L'entreprise finlandaise Fortum est constituée comme julkinen osakeyhtiö ( oyj ) 262 ( * ) , l'équivalent d'une société anonyme. Ce statut est nécessaire pour pouvoir être cotée en bourse, en l'espèce à la bourse d'Helsinki depuis le 18 décembre 1998. Sa capitalisation à la valeur de marché d'avril 2020 est environ de 12 milliards d'euros.

Historiquement, Fortum est née de la fusion en 1998 de deux sociétés d'État non cotées, l'énergéticien Imatran Voima (Ivo Oy) et le pétrolier Neste Oy. Cette initiative coïncidait avec le mouvement de libéralisation et d'ouverture des marchés de l'énergie et de l'électricité. En 2005, cette fusion a été défaite et la compagnie pétrolière Neste a été rétablie comme société indépendante cotée en bourse avec l'État finlandais comme actionnaire majoritaire.

Le droit des sociétés finlandais semble influencé par le droit anglais, y compris dans les choix terminologiques et la julkinen osakeyhtiö correspond à la Public limited company (Plc) ou société ouverte à responsabilité limitée aux apports. Ce type de société n'est pas nécessairement une société à capitaux publics, ni une SARL, contrairement à ce que certains articles de presse prétendent à partir de traductions littérales erronées 263 ( * ) . L'achat des parts est ouvert au public contrairement au cas des yksityisen osakeyhtiön (oy) qui ne peuvent être cotées en bourse et s'apparentent à une private company limited by shares .

Cependant, l'actionnaire principal de Fortum est bien public : l'État finlandais détient la majorité du capital, précisément 50,76 %des actions. Quelques fonds de pension finlandais ainsi que l'organisme finlandais de sécurité sociale sont aussi actionnaires mais à hauteur d'environ 1 % chacun. Quelques communes disposent d'actions mais seule la ville de Kurikka possède une fraction un tant soit peu significative quoique modeste (0,7 %) du capital. Entre les ménages finlandais et les investisseurs institutionnels finlandais, le capital n'est détenu qu'à hauteur de 27,5 % des parts par des investisseurs étrangers.

Fortum exerce des activités de production et de vente d'électricité et de chaleur en Finlande et en Scandinavie, dans les pays baltes, en Russie et en Pologne essentiellement. Les pays nordiques (Finlande et Scandinavie) représentent son marché le plus important : elle y réalise 69 % de son chiffre d'affaires contre 20 % en Russie et 7 % en Pologne. Sur cette zone, Fortum est le troisième plus gros producteur d'électricité après le suédois Vattenfall et le norvégien Statkraft. Son atout majeur dans le cadre de la transition énergétique est d'être le deuxième plus bas émetteur de CO 2 de toute l'Europe après Statskraft, 96 % de sa flotte étant décarbonée. Les sources de production d'électricité qu'elle emploie sont ainsi distribuées : le gaz naturel pour 37 %, le nucléaire pour 31 % et l'hydraulique pour 26 %. Dans sa production de chaleur, surtout en Russie et en Pologne, elle recourt surtout au gaz naturel (59 %), à des ressources de recyclage et de biomasse (19 % combinées) et au charbon (18 %).

Fortum présente un chiffre d'affaires en 2019 de 5,4 milliards d'euros pour un bénéfice avant intérêt, impôt, dépréciation et amortissement (EBITDA) de 1,8 milliard d'euros. Ses actifs pèsent 23 milliards d'euros. Elle emploie environ 8 200 salariés 264 ( * ) .

L'appréciation de la taille et des activités de Fortum doit prendre en compte son acquisition toute récente d'un autre énergéticien allemand de taille comparable, Uniper, dont s'est séparé E.ON 265 ( * ) . Au terme de sa première offre d'achat, Fortum détenait 49,9 % des actions et des droits de vote d'Uniper au 31 décembre 2018. Sa participation s'est ensuite portée à 69,6 % en mars 2020, à 73,4 % en mai 2020 puis 75,01 % en août 2020 Le rachat d'Uniper représente un investissement de 6,8 milliards d'euros. Les agences de notation Fitch et S&P ont maintenu leur note à BBB avec une perspective négative en tenant compte de la nécessité de parachever la prise de contrôle effective d'Uniper par Fortum et de mettre en place un plan d'action commun, d'autant que les prix de l'énergie baissent et qu'Uniper est exposé à la fermeture des centrales thermiques en Allemagne notamment.

Les deux groupes combinés, dont l'association ne préfigure qu'imparfaitement le résultat d'un futur groupe intégré, renforcent leurs positions dans les pays nordiques et en Russie. Surtout grâce à Uniper, Fortum bénéficie indirectement d'une position forte en Allemagne et pénètre indirectement les marchés anglais, néerlandais et hongrois. Pour l'instant, les deux sociétés demeurent distinctes et présentent leurs comptes et résultats financiers séparément. La prise de contrôle d'Uniper représente théoriquement pour Fortum une augmentation de 60 % environ de la capacité d'énergie décarbonée ( CO 2 -free ) et triple la production d'électricité à partir de gaz. Elle rehausse en revanche fortement la proportion du charbon parmi les sources d'énergie utilisées, qu'il faudra baisser en fermant des centrales thermiques pour se conformer à l'évolution des législations dans divers pays européens.

La structuration actuelle du groupe Fortum est extrêmement complexe et divisée en une myriade de filiales finlandaises et étrangères 266 ( * ) . C'est pourquoi il est préférable de la décrire en termes d'unités de reporting financier suivant les normes IFRS 267 ( * ) . C'est la présentation retenue dans le rapport annuel de la société et par les agences de notation. De ce point de vue, l'activité de Fortum est répartie en cinq segments :

- « Production d'électricité » (51 % des bénéfices avant retenues), où sont regroupées notamment les activités nucléaires ;

- « Russie » (25 % EBITDA) avec production et vente d'électricité et de chauffage en Russie uniquement ;

- « Services urbains » (16 % EBITDA) pour le chauffage, la climatisation, les solutions d'économie circulaire, ainsi que la seule production d'électricité par énergie solaire 268 ( * ) ;

- « Services aux consommateurs » (8 % EBITDA) avec le commerce au détail d'électricité et de gaz dans les pays nordiques et en Pologne ;

- « Autres activités », comprenant notamment les parts dans Uniper.

Le parc nucléaire de Fortum comprend quatre centrales, deux en Finlande 269 ( * ) et deux en Suède 270 ( * ) . Fortum n'est seul propriétaire que de la centrale de Loviisa en Finlande, dont elle est en même temps le détenteur de la licence d'exploitation et l'opérateur. C'est la seule centrale pour laquelle elle assume directement les responsabilités attribuées par la réglementation sur le nucléaire. Dans les trois autres centrales, Fortum n'est ni le détenteur de la licence, ni l'opérateur et ne constitue qu'un actionnaire important mais minoritaire. Toutefois le rachat d'Uniper est en train de changer la donne pour les centrales nucléaires suédoises.

La seconde centrale finlandaise à Olkiluoto est opérée par Teollisuuden Voima (TVO), une société par actions non cotée ( listaamaton ) contrôlée par un consortium des industriels finlandais du papier et de la cellulose 271 ( * ) . Globalement, la distribution du capital est la suivante : 27,6 % pour Fortum dans les parts correspondant aux deux réacteurs en activité et 57,1 % pour le consortium. TVO possède elle-même deux filiales, l'une pour la production d'énergie nucléaire qu'elle possède intégralement, et l'autre pour le retraitement des déchets dont elle partage les parts avec Fortum. C'est sur ce site qu'a été construit par Areva un troisième réacteur, sous forme d'EPR, qui devrait être mis en service commercial en 2021 après de nombreuses années de retard et un contentieux financier soldé en 2018.

La centrale suédoise d'Oskarshamn est opérée par une société de droit suédois (OKG AB) que Fortum possède en partie elle-même (à hauteur de 43,4 %) mais qu'elle contrôlera surtout via le rachat d'Uniper, dont la filiale suédoise Sydkraft est l'actionnaire majoritaire de la société gérant la centrale. De même, le site de Forsmark est aussi géré par une société suédoise (Forsmark Kraftgrupp AB) dont Vattenfall l'énergéticien public suédois est l'actionnaire majoritaire, mais où sont aussi bien présents Fortum et Uniper via leurs filiales suédoises 272 ( * ) .

Enfin, on peut relever qu'un nouveau réacteur est en cours de construction en Finlande à Hanhikivi par la société russe Rosatom. Cette centrale ne sera pas possédée, ni opérée par Fortum mais par une autre compagnie nucléaire finlandaise Fennovoima Oy, possédée aux deux tiers par une coopérative d'industriels qui cherchent à maîtriser leur approvisionnement électrique et pour un tiers par une filiale de Rosatom après le désengagement d'E.ON. La centrale ne serait pas opérationnelle avant 2028.

c) Centrica

Cotée à la bourse de Londres (LSE), Centrica revêt la forme d'une public limited company (plc) , équivalent en droit anglais d'une société anonyme.

Ses principaux actionnaires sont des sociétés d'investissement, au premier rang desquelles Schroders Investment Management Limited (11,133 % des parts), BlackRock Inc. (6,59 %), Standard Life Aberdeen plc (5,06 %), Majedie Asset Management Limited (4,99 %) et Newton Investment Management Limited (4,99 %) 273 ( * ) . La recherche n'a mis en évidence aucune participation publique au capital de Centrica.

Centrica plc est issue de la scission en 1997 de l'ancienne compagnie nationale britannique de distribution de gaz. Remontant au début du XIX e siècle, l'entreprise d'origine chargée de l'approvisionnement du grand Londres a été nationalisée en 1949 lors de l'entrée en vigueur du Gas Act 1948 . En 1973, les différentes régies régionales de gaz ont fusionné pour former la British Gas Corporation, qui a été privatisée en 1986, devenant British Gas plc. En 1997, l'entreprise a été séparée en trois sociétés différentes, dont Centrica plc, centrée sur le négoce, la vente et la distribution de gaz. L'année 1998 marque la fin du monopole de Centrica plc en la matière et l'entreprise commence également à se diversifier en entrant sur le marché de la fourniture d'électricité.

Aujourd'hui, le groupe Centrica plc est structuré autour de plusieurs sociétés-filles, parmi lesquelles British Gas pour la distribution de services énergétiques au Royaume-Uni, Bord Gáis Energy pour la distribution de gaz et d'électricité en Irlande, Centrica Business Solutions pour les solutions aux entreprises, Centrica Hive pour les produits « maison connectée » ou encore Direct Energy pour la fourniture d'électricité et de gaz aux États-Unis.

Le chiffre d'affaires du groupe s'est établi en 2019 à 26,8 milliards de livres (30,65 milliards d'euros) pour un EBITDA de 2,1 milliards de livres environ (2,4 milliards d'euros).

Globalement, ses activités se développent autour de trois pôles :

- Centrica Consumer , à destination des clients particuliers, lui-même subdivisé en trois domaines : fourniture d'énergie (électricité et gaz), service à domicile et solutions pour la maison. Centrica est le plus grand fournisseur d'énergie sur le marché britannique et compte 9,23 millions de clients sur cette zone, auxquels s'ajoutent près de 500 000 clients en Irlande et 2,78 millions de clients en Amérique du nord ;

- Centrica Business , orienté vers les entreprises et également subdivisé en trois domaines : fourniture d'énergie (gaz et électricité), optimisation,services et solutions pour les entreprises par l'intermédiaire de la société Centrica Business Solutions. Centrica est le plus grand fournisseur d'énergie pour les PME au Royaume-Uni et conserve une présence significative sur le marché industriel et commercial ;

- Upstream , qui regroupe le secteur de l'exploration et la production, subdivisé en deux sociétés, Spirit Energy Limited et Centrica Storage Limited, et celui de la production d'énergie nucléaire.

Spirit Energy Limited est une joint-venture lancée en 2017 pour créer une entreprise européenne d'exploration et production de gaz de premier plan. Constituée sous la forme d'une private limited company et par conséquent non cotée, elle résulte d'une fusion d'activités entre Centrica et Bayerngas Norge AS. Cette dernière avait été constituée en 2006 comme une société de droit norvégien à responsabilité limitée et non cotée ( aksjeselskap - AS ) pour sécuriser l'alimentation en gaz de la Bavière. Ses actionnaires, désormais partenaires de Centrica dans la joint-venture , sont uniquement des acteurs publics allemands, autrichiens et suisses, au premier rang desquels la société Stadtwerke München, régie communale de la ville de Munich. Centrica plc possède encore 69 % des parts de Spirit Energy.

Au sein du même segment, Centrica Storage Limited produit et traite du gaz à partir du champ de gaz Rough dans la partie sud de la mer du Nord pour le compte de Centrica plc, grâce à deux installations offshore dans lesquelles 30 puits ont été forés.

En matière de production nucléaire, Centrica possède des parts dans huit centrales britanniques 274 ( * ) en tant qu'actionnaire minoritaire, la majorité revenant à EDF. Le schéma de contrôle du parc nucléaire britannique est le suivant : après le rachat de British Energy en 2009, EDF l'a transformé en filiale intégrée au groupe et rebaptisée EDF Energy. Cette filiale possède et opère l'ensemble des réacteurs nucléaires du Royaume-Uni. EDF Energy a constitué avec Centrica une filiale sous la forme d'une société à responsabilité limitée non cotée qui détient formellement la propriété des centrales, Lakes Aquisitions Limited, dont EDF Energy détient 80 % et Centrica 20 % 275 ( * ) .

Parallèlement, EDF Energy a constitué une autre filiale chargée de construire et d'opérer les nouveaux réacteurs de Hinkley Point C et Sizewell C : Nuclear New Build Generation Company (NNB GenCo). En 2013, Centrica a renoncé à s'associer au projet d'EDF et a renoncé à son option dans l'opération qui a été finalement reprise par la compagnie nucléaire d'État chinoise, China General Nuclear Power Group (CGN).

En 2018, Centrica a annoncé son intention de se désengager complètement du nucléaire en cédant ses 20% dans le parc nucléaire britannique opéré par EDF Energy avant la fin de 2020 276 ( * ) . Devant le coût du projet de Hinkley Point C, EDF lui a emboîté le pas et a annoncé vouloir vendre jusqu'à 29,99 % de ses parts, si bien que 49,99 % de la propriété des huit centrales existantes sont à la vente 277 ( * ) . Des acteurs chinois, coréens et japonais sont intéressés mais la conjoncture est difficile et les montants considérables.

En outre, Centrica a annoncé en juillet 2019 vouloir se recentrer sur la relation client et renoncer aux activités hors de ce coeur de cible, c'est-à-dire son segment d'exploration et de production. Par conséquent, Centrica a fait part de sa volonté de se défaire de l'intégralité de sa participation dans Spirit Energy au cours de l'année 2020 278 ( * ) .


* 223 Legge 6 dicembre 1962, n. 1643, Istituzione dell'Ente nazionale per la energia elettrica e trasferimento ad esso delle imprese esercenti le industrie elettriche.

* 224 Décret législatif « Bersani » du 16 mars 1999, n. 79.

* 225 Enel SpA joue proprement le rôle de holding du groupe.

* 226 Les différents documents emploient généralement la notion d'Earnings before Interest, Taxes, Depreciation, and Amortization ou EBITDA qu'on reprendra dans la suite de la note.

* 227 Décret-loi du 18 juin 2007, n. 73 de transposition en urgence de la directive 203/54/CE et sa ratification par la loi n° 125 du 3 août 2007.

* 228 Oui à près de 80 % pour une participation de 65 %.

* 229 Art. 25 & 26, loi du 23 juillet 2009 n 99 de développement et d'internationalisation des entreprises portant diverses dispositions en matière d'énergie. L'art. 29 de la même loi régule l'autorité de sûreté nucléaire italienne.

* 230 Oui à près de 72 % pour une participation de 65 %.

* 231 Art. 1 er al. 42, legge 23 agosto 2004, n. 239 de réorganisation du marché de l'électricité.

* 232 Ley de 25 de septiembre 1941 por la que se crea el Instituto Nacional de Industria. Le modèle était évidemment l'Istituto per la Ricostruzione industriale (IRI) italien, un conglomérat très diversifié. Établi en 1933 sous la forme d'un établissement public d'État, l'IRI a joué un rôle clef dans le développement industriel italien des Trente glorieuses, jusqu'à la privatisation des entreprises membres et sa dissolution en 2002.

* 233 Ley 54/97 de 27 de septiembre del Sector Eléctrico.

* 234 Endesa Generación a le statut de sociedad anónima unipersonal (SAU), une société anonyme qui n'a qu'un seul associé actionnaire.

* 235 https://www.endesa.com/es/nuestro-compromiso/nuestro-compromiso/gestion-actividad-nuclear

* 236 https://www.iberdrola.com/gobierno-corporativo/estructura

* 237 L'activité de cette filiale espagnole I-DE Redes Eléctricas Inteligentes SAU est régulée par la loi espagnole 24/2013 du 26 décembre 2013 relative au secteur électrique.

* 238 Disposiciones adicionales quinta - novena, Ley 40/1994, de 30 de diciembre, de ordenación del Sistema Eléctrico Nacional (modifications de la loi sur l'énergie nucléaire de 1964).

* 239 https://energia.gob.es/nuclear/Centrales/Espana/Paginas/CentralesEspana.aspx

* 240 Centrale d'Almaraz : Iberdrola Generación Nuclear (52,7 %), Endesa Generación (36,0 %) et Naturgy Energy Group (11,3 %) ; centrale de Trillo : Iberdrola Generación Nuclear (52,7 %), Endesa Generación (36,0 %) et Naturgy Energy Group (1,3 %).

Centrale de Trillo : Iberdrola Generación Nuclear (48 %), Naturgy Energy Group (34,5 %), EDP HC Energía (15,5 %) et Nuclenor (2 %).

* 241 Ascó I est détenu à 100 % par Endesa Generación ; Ascó II : Endesa Generación (85 %) et Iberdrola Generación Nuclear (15 %) ; Vandellós I détenue et opérée par une société hispano-française dont EDF détenait 25 % fut arrêtée en 1989 ; Vandellós II : Endesa Generación (72 %) et Iberdrola Generación Nuclear (28 %).

* 242 https://europa.eu/youreurope/business/running-business/developing-business/setting-up-european-company/index_fr.htm

* 243 https://www.eon.com/content/dam/eon/eon-com/investors/annual-report/JA19_D_final.pdf

* 244 https://www.bestellen.bayern.de/application/eshop_app000005?SID=1897139421&ACTIONxSESSxSHOWPIC(BILDxKEY:%2706005001%27,BILDxCLASS:%27Artikel%27,BILDxTYPE:%27PDF%27)

* 245 Pour mémoire, les intérêts minoritaires de deux centrales, celles de Gundremmigen et Emsland, ont été transférés à RWE dans le cadre de l'échange d'actifs entre les deux sociétés.

* 246 https://www.group.rwe/en/investor-relations/the-rwe-share/shareholder-structure

* 247 KEB : Kommunale Energie-Beteiligungsgesellschaft,

* 248 Aussi appelée DSW21 ; https://www.einundzwanzig.de/3277.html

* 249 Westfälisch-Lippische Vermögensverwaltungsgesellschaft mbH, assurant la promotion des intérêts économiques de l'organisation intercommunale Landschaftsverband Westfalen-Lippe (LWL) qui rassemble 8,3 millions d'habitants hors du pôle de la Ruhr.

* 250 Regionalverkehr Ruhr-Lippe GmbH (RLG), détenue par des diverses communes https://www.rlg-online.de/upload/29432776-190617-GB-RLG-Versand-digital.pdf

* 251 https://www.kkw-gundremmingen.de/kkw_p.php

* 252 https://www.group.rwe/-/media/RWE/documents/01-der-konzern/rwe-nuclear/Gesonderter-Bericht-KLE_28062019.pdf

* 253 https://www.kkw-gundremmingen.de/kkw_p.php

* 254 Zweckverband Oberschwäbische Elektrizitätswerke, implantée au sud-est du Land, vers le lac de Constance et les frontières suisse et autrichienne.

* 255 Badische Energieaktionärs-Vereinigung (BEV), Gemeindeelektrizitätsverband Schwarzwald-Donau (G.S.D.) et Neckar-Elektrizitätsverband (NEV).

* 256 https://www.riksdagen.se/sv/dokument-lagar/dokument/svensk-forfattningssamling/ellag-1997857_sfs-1997-857

* 257 https://www.gesetze-im-internet.de/enwg_2005/EnWG.pdf

* 258 Vattenfall n'intervient pas sur la troisième centrale nucléaire suédoise à Oskarhamn, opérée par Fortum et Uniper.

* 259 https://group.vattenfall.com/se/var-verksamhet/ringhals

* 260 https://group.vattenfall.com/se/var-verksamhet/forsmark

* 261 Au titre de l'année 2018, le dividende versé s'était élevé à 2 milliards de couronnes suédoises (environ 180 millions d'euros).

* 262 Ou en suédois publikt aktiebolag, abréviée AB en Suède et Abp pour les suédophones de Finlande.

* 263 On rappelle qu'en droit français, la responsabilité des actionnaires d'une SA est aussi limitée au montant de leurs apports, la SARL présentant des caractéristiques supplémentaires d'une société de personnes.

* 264 Pour une synthèse de données financières sur Fortum, voir https://www.fortum.com/about-us/investors/key-facts

* 265 Constituée sous la forme d'une société européenne (SE), Uniper est basée à Düsseldorf et cotée à la bourse de Francfort. Elle est née d'une scission d'E.ON en 2016. E.ON a vendu ses parts à Fortum en 2018 à hauteur de 47 % du capital.

* 266 Pour une liste de filiales réparties par segment d'activité : https://www.fortum.com/fortums-subsidiaries-and-legal-entities

* 267 Les IFRS (International Financial Reporting Standards) sont depuis 2005 le référentiel comptable applicable aux sociétés cotées sur un marché européen.

* 268 Développée en Inde.

* 269 Centrales de Loviisa (deux réacteurs) et de Olkiluoto (deux réacteurs et un troisième en construction).

* 270 Centrales d'Oskarshamnn (initialement trois réacteurs mais deux sont arrêtés et en cours de démantèlement) et de Forsmark (trois réacteurs).

* 271 Cette société s'appelle Pohjolan Voima. Hormis Fortum, d'autres petites compagnies d'électricité locales sont des actionnaires mais occupent une position très minoritaire.

* 272 La filiale suédoise d'Uniper, Sydkraft, est aussi associée à Vattenfall dans la gestion de la troisième centrale nucléaire suédoise à Rindhals.

* 273 https://www.centrica.com/investors/centrica-as-an-investment/ownership-profile/

* 274 Les huit centrales opérationnelles sont Hinkley Point B, Hunterston B, Hartlepool, Heysham I, Dungeness B, Heysham II, Torness et Sizewell B. Il est prévu qu'elles ferment toutes entre 2024 et 2035. Une construction est en cours (Hinkley Point C) et EDF projette une autre construction (Sizewell C). Près d'un cinquième de l'électricité au Royaume-Uni est produite par ces huit centrales.

Voir https://www.edfenergy.com/energy et https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/789655/Nuclear_electricity_in_the_UK.pdf

* 275 https://www.edfenergy.com/about/governance/business-strategy

* 276 https://www.thetimes.co.uk/article/cracks-appear-as-centrica-sells-stake-in-nuclear-power-plants-df6bdv7z0

* 277 https://www.ft.com/content/0ee65d16-4e35-11ea-95a0-43d18ec715f5

* 278 https://www.centrica.com/investors/annual-report-2019/group-highlights/upstream-performance-highlights/

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