NOTE DE SYNTHESE

La présente étude analyse les mesures prises en Allemagne , en Angleterre et au Pays de Galles , en Autriche , en Belgique , au Danemark , en Espagne , en Italie , en Suisse et aux États-Unis pour lutter contre la pornographie enfantine, c'est-à-dire pour empêcher la production, la diffusion, ou même la possession de documents pornographiques mettant en scène des mineurs. Pour les États-Unis, seule la législation fédérale a été prise en compte. Les dispositions européennes ont également été étudiées.

On a donc recherché les règles correspondant à l'article L 227-23 du code pénal français selon lequel :

« Le fait, en vue de sa diffusion, de fixer, d'enregistrer ou de transmettre l'image ou la représentation d'un mineur lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 F d'amende.

» Le fait de diffuser une telle image ou représentation, par quelque moyen que ce soit, de l'importer ou de l'exporter, de la faire importer ou de la faire exporter, est puni des mêmes peines.

» Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 500 000 F d'amende lorsqu'il a été utilisé, pour la diffusion de l'image ou de la représentation du mineur à destination d'un public non déterminé, un réseau de télécommunications.

» Les dispositions du présent article sont également applicables aux images pornographiques d'une personne dont l'aspect physique est celui d'un mineur, sauf s'il est établi que cette personne était âgée de dix-huit ans au jour de la fixation ou de l'enregistrement de son image. »

Les dispositions françaises résultent de la loi 98-468 du 17 juin 1998, qui a étendu le champ des infractions liées à la pornographie enfantine, notamment en remplaçant le mot « image » par l'expression « image ou représentation », et alourdi les sanctions, en portant de un à trois ans la durée de la peine de prison.

L'examen des dispositions correspondantes dans les neuf pays étrangers retenus fait apparaître que :

- dans tous les pays étudiés, il existe des dispositions particulières à la lutte contre la pornographie enfantine ;

- les interdictions concernent le plus souvent les seuls supports visuels et excluent les enregistrements sonores, mais la plupart des formulations permettent de prendre en compte les représentations virtuelles ;

- l'âge au-dessous duquel la protection des mineurs est assurée varie entre quatorze et dix-huit ans.

1) Dans tous les pays étudiés, il existe des dispositions particulières à la lutte contre la pornographie enfantine


a) La production et la diffusion de représentations pornographiques d'enfants constituent des infractions spécifiques dans tous les pays

Relativement anciennes dans les autres pays, les dispositions interdisant la production et la diffusion des images pornographiques mettant en scène des mineurs, ainsi que les opérations préalables, comme le stockage ou la publicité, sont assez récentes en Autriche, en Belgique, en Espagne et en Italie. Elles ont été instaurées respectivement par un amendement de 1994 au code pénal autrichien, par la loi belge du 25 avril 1995, par le nouveau code pénal espagnol, en vigueur depuis mai 1996, et par la loi italienne dite anti-pédophiles du 3 août 1998. Dans tous les pays étudiés sauf l'Italie, la législation a déjà été modifiée au moins une fois pour élargir le champ des infractions.

Elle l'a été également pour alourdir les sanctions. Cependant, ces infractions demeurent diversement punies. L'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, l'Espagne et l'Italie les sanctionnent toujours d'une peine privative de liberté. En revanche, dans les autres pays, la sanction peut n'être qu'une amende.

Par ailleurs, l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne et la Suisse prévoient des sanctions renforcées lorsque le coupable agit dans un but lucratif ou appartient à un groupe organisé qui se livre de manière régulière à de tels faits.

b) Tous les pays étudiés sauf la Suisse interdisent également la simple détention de représentations pornographiques d'enfants

Même dans les pays où les dispositions réprimant la pornographie enfantine existent depuis assez longtemps, l'interdiction relative à la possession de représentations pornographiques d'enfants a été ajoutée relativement récemment. Elle l'a été en 1988 en Angleterre, en 1993 en Allemagne, en 1994 au Danemark, et plus récemment encore dans les autres pays.

Dans tous les pays étudiés, cette infraction est moins lourdement sanctionnée que la production ou la diffusion de représentations pornographiques d'enfants.

La Suisse demeure le seul pays où la détention de représentations pornographiques d'enfants ne constitue pas une infraction. Cependant, le projet de loi que le gouvernement fédéral a déposé le 10 mai 2000 prévoit de faire cesser cette exception.

2) Les interdictions concernent le plus souvent les seuls supports visuels, mais la plupart des formulations permettent de prendre en compte les représentations virtuelles

a) Seules les législations allemande, espagnole, italienne et suisse ont étendu les interdictions aux documents sonores, et, de manière générale, à tout type de représentations

En Allemagne et en Suisse, le code pénal évoque explicitement les enregistrements sonores et toute autre reproduction ou représentation. Le code pénal espagnol, tout comme le code pénal italien, font allusion à tous les documents, quelle que soit leur nature.

En revanche, dans les autres pays, la formulation retenue ne permet de prendre en compte que les supports visuels. Si la législation autrichienne emploie l'expression « représentation sous forme d'image », la plupart des autres textes énumèrent les principaux supports visuels (photographie, film, diapositive, image..) et y ajoutent « tout autre support visuel », ce qui permet de faire face à l'évolution technologique.

b) Seules les législations belge, espagnole et italienne empêchent la prise en compte des représentations virtuelles
Les législations anglaise et américaine sont particulièrement explicites en ce qui concerne les représentations virtuelles. La première mentionne les « pseudo-photographies », c'est-à-dire les représentations qui ont l'apparence de photographies. Quant au code fédéral américain, il a été enrichi, en 1996, de l'article 2252A, qui vise précisément les représentations pornographiques d'enfants qui sont par exemple fabriquées à partir de montages ou de transformations, ainsi que les images purement virtuelles. Cet article concerne donc toutes les représentations, même si elles ne résultent pas de l'exploitation réelle d'enfants.

Les textes allemand, autrichien, danois et suisse sont moins explicites. Les deux premiers évoquent respectivement la représentation de scènes « proches de la réalité » et le fait que le spectateur ait l'« impression » qu'un acte sexuel a eu lieu, tandis que le troisième et le quatrième se réfèrent à des représentations d'enfants. Toutefois, dans son exposé des motifs, le projet de loi suisse, qui vise à faire de la détention de documents pornographiques représentant des enfants une infraction, précise que la possession de documents virtuels doit être punie.

En revanche, en Belgique, en Espagne et en Italie, le code pénal, en mentionnant expressément l'implication, la présentation, l'utilisation ou l'exploitation de mineurs, empêche la prise en compte des représentations virtuelles.

3) L'âge au-dessous duquel la protection des mineurs est assurée varie entre quatorze et dix-huit ans

Il est de quatorze ans en Allemagne et en Autriche, de quinze ans au Danemark, de seize ans en Angleterre et au Pays de Galles ainsi qu'en Suisse, et de dix-huit ans en Espagne, en Italie et aux États-Unis.

En Belgique, la loi du 28 novembre 2000 relative à la protection pénale des mineurs l'a porté de seize à dix-huit ans.

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La législation fédérale américaine apparaît comme la plus complète : elle vise la pornographie enfantine sous tous ses aspects et des mesures très détaillées permettent de punir tous les comportements constitutifs d'infractions. On comprend ainsi que la proposition de décision-cadre adoptée en janvier 2001 par la Commission de l'Union européenne pour lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants et contre la pornographie enfantine reprenne en partie ses dispositions et sa formulation.

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