CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Article 1 er

I. - Après la première phrase du onzième alinéa de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« A compter de [année suivant celle d'entrée en vigueur de la présente loi], cette garantie évolue selon un taux égal au plus à 15 % du taux de progression de l'ensemble des ressources de la dotation globale de fonctionnement. »

II. - Pour être applicable, le dispositif visé au I du présent article doit être précédé de la remise par le gouvernement de simulations adéquates.

Article 2

Avant le 1 er septembre 2008, le gouvernement dépose devant le Parlement un rapport étudiant les modalités de la substitution éventuelle, à la part départementale de la taxe d'habitation, d'une part additionnelle à la contribution sociale généralisée.

Ce rapport explore notamment les conditions et les limites dans lesquelles le taux de la part additionnelle visée au précédent alinéa pourrait faire l'objet d'une modulation à l'initiative des départements.

Il s'appuie sur toutes simulations utiles, quant aux effets d'une éventuelle réforme pour les contribuables, pour les départements, et pour le budget de l'Etat. Il envisage les dispositifs transitoires de lissage des effets de cette réforme pour les contribuables.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 30 octobre 2007, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , la commission a procédé à l'examen de la proposition de loi n° 17 (2007-2008) d'orientation sur les finances locales .

M. Michel Mercier, rapporteur , a souligné le caractère ambitieux de l'intitulé de la proposition de loi, « relative à la solidarité financière et la justice fiscale ». Il a indiqué que son article premier avait pour objet de renforcer la péréquation, et que son article 2 prévoyait que le gouvernement élabore un rapport présentant les modalités de substitution, à la part départementale de la taxe d'habitation, d'une part additionnelle de contribution sociale généralisée (CSG).

Il a estimé que les inégalités entre collectivités territoriales étaient importantes, en particulier entre communes, rappelant qu'en France métropolitaine, l'écart de potentiel fiscal par habitant entre la collectivité la plus pauvre et la collectivité la plus riche était à peu près de 1 à 4 pour les départements et de 1 à 1,5 pour les régions, et qu'entre communes, il allait, théoriquement, de 1 à l'infini, puisque certaines communes avaient un potentiel fiscal nul.

Il a indiqué que l'article premier de la proposition de loi tendait à mettre en oeuvre une réforme d'ampleur de la péréquation, consistant non seulement à renforcer la péréquation, mais aussi à modifier certains des éléments fondamentaux du dispositif actuel. Il a indiqué qu'en particulier, elle prévoyait que le potentiel financier, qui comprenait le potentiel fiscal et la dotation forfaitaire, serait élargi, afin d'inclure, notamment, les dotations de péréquation de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Il a précisé que serait en outre définie la règle selon laquelle, dans un délai fixé par la loi, le potentiel financier ainsi « élargi » par habitant ne pourrait être inférieur à 80 % de la moyenne de leur strate pour les communes, à 90 % de la moyenne de leur catégorie pour les départements, et à 95 % de la moyenne de leur catégorie pour les régions.

Il a estimé que si l'objectif poursuivi était, bien entendu, louable, l'article premier de la proposition de loi aurait un coût élevé, qu'il a chiffré à 920 millions d'euros, dont 780 millions d'euros pour les communes. Il a jugé que, compte tenu de la situation financière actuelle, ce renforcement de la péréquation se ferait vraisemblablement à enveloppe constante, ce qui représenterait un coût important pour les collectivités qui n'en bénéficieraient pas, et qui devaient déjà subir les conséquences de la réforme de l'indexation des dotations de l'Etat. Par ailleurs, il a considéré que cet article présentait des faiblesses formelles.

Il a déclaré qu'il y avait, dès lors, deux possibilités : rejeter l'article premier, ou en présenter une nouvelle rédaction, tendant à renforcer, de manière plus modeste, et partant, plus réaliste, la péréquation. Il a indiqué que la mesure qu'il proposait consistait non à modifier l'architecture d'ensemble de la péréquation, mais à prévoir que le complément de garantie de la DGF des communes, qui augmentait de 25 % au plus du taux de croissance de la DGF, n'augmenterait plus, au maximum, que de 15 % de ce taux. Il a souligné qu'avec cette mesure, aucune commune ne verrait sa DGF diminuer, puisque les communes « perdantes » la verraient seulement moins progresser.

M. Michel Mercier, rapporteur , a indiqué que l'article 2 prévoyait qu'un rapport du gouvernement, déposé au Parlement avant le 1er septembre 2008, étudiait les modalités d'un remplacement de la part départementale de la taxe d'habitation par une part additionnelle à la CSG. Il a considéré qu'une telle substitution serait d'autant plus pertinente que les bases de taxe d'habitation étaient obsolètes, et que 80 % des dépenses de fonctionnement des départements concernaient le domaine social. Il a rappelé que cette proposition s'inscrivait dans un débat ancien et nourri, évoquant en particulier le rapport (n° 447, 1999-2000), qu'il avait présenté, en 2000, au nom de la mission commune d'information chargée de dresser le bilan de la décentralisation, et le récent rapport rédigé par M. Philippe Valletoux pour le Conseil économique et social. Dans la mesure où une réforme de la fiscalité locale avait d'ores et déjà été annoncée par le Président de la République pour l'année 2009, il a considéré qu'une telle relance du débat ne pouvait qu'alimenter utilement la réflexion sur l'avenir de la taxe d'habitation et sur les modalités du financement des dépenses sociales assumées par les départements. Il a considéré qu'en conséquence, l'article 2 de la proposition de loi pouvait être repris, moyennant quelques améliorations formelles.

M. Jean Arthuis, président , a rappelé que la taxe d'habitation faisait l'objet d'importants dégrèvements et exonérations compensées par l'Etat. Il a invité le premier signataire de la proposition de loi à s'exprimer.

M. François Marc a remercié le rapporteur pour ses « propos constructifs ». Il a considéré que le renforcement de la péréquation et la réforme de la fiscalité locale étaient, avant tout, une question de volonté politique. Il a jugé pouvoir se rallier aux conclusions du rapporteur, concernant l'article 2 de la proposition de loi. Il a en revanche maintenu sa position sur l'article premier, considérant que, par rapport au montant global de la DGF (40 milliards d'euros), les 920 millions d'euros évoqués par le rapporteur représentaient une somme d'autant plus faible que sa proposition de loi prévoyait un « lissage » sur dix ans, de sorte que les montants en jeu étaient de l'ordre de 100 millions d'euros par an, ce qu'il a jugé réaliste. Il a estimé, en particulier, qu'il ne fallait pas raisonner à « enveloppe constante » de dotations de l'Etat aux collectivités territoriales. Il a, en outre, considéré que le potentiel financier devait voir sa définition élargie, afin de mieux prendre en compte les ressources des collectivités territoriales. En conséquence, il n'a pas jugé pouvoir se rallier aux propositions du rapporteur concernant l'article premier.

M. Jean Arthuis, président , s'est interrogé sur la disposition de l'article premier, selon laquelle le potentiel financier devait être réformé,  « afin qu'il représente au mieux le pouvoir d'achat réel des collectivités locales  ».

En réponse, M. François Marc a estimé que cette rédaction pouvait être améliorée.

M. Michel Mercier, rapporteur , a indiqué que la commission ne disposait pas de simulations suffisamment précises de la mesure qu'il envisageait. Il a jugé que la rédaction qu'il proposait pour l'article premier, dont il évaluait le coût à environ 10 millions d'euros par an, présentait cependant l'avantage de renforcer la péréquation, sans pour autant bouleverser l'architecture des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales.

M. Joël Bourdin a indiqué qu'il était favorable à la péréquation, et estimé que les études à ce sujet étaient insuffisantes.

M. François Marc a considéré que la péréquation serait inefficace tant qu'elle ne s'appuierait pas sur une définition plus large du potentiel financier.

M. Charles Guené a considéré que la réforme de la péréquation devait avoir lieu dans le cadre de la réforme globale des finances locales annoncée par le Président de la République. Il a approuvé la rédaction de l'article 2 proposée par le rapporteur. Il s'est cependant demandé en quoi le texte proposé pour l'article premier renforçait la péréquation.

M. Michel Mercier, rapporteur , a précisé que le complément de garantie faisait partie de la dotation forfaitaire de la DGF. Aussi, en limiter la croissance permettait de dégager des sommes supplémentaires pour la péréquation.

M. Jean-Jacques Jégou a déploré l'insuffisance de la péréquation, et s'est interrogé sur la notion de « pouvoir d'achat réel des collectivités locales », figurant à l'article premier de la proposition de loi.

M. Michel Moreigne a considéré que la mesure proposée par le rapporteur n'était pas à la hauteur des enjeux. Il a rappelé le faible potentiel financier par habitant du département de la Creuse, et a regretté que le rapporteur ne soit pas davantage sensible à la nécessité de renforcer la péréquation entre départements. Il a considéré que la seule disposition ayant utilement renforcé la péréquation entre départements au cours des dernières décennies avait été l'instauration de la dotation de fonctionnement minimale (DFM).

M. Eric Doligé a considéré qu'il était plus utile de limiter les transferts de charges de l'Etat vers les collectivités territoriales que de renforcer la péréquation. Il a, en outre, estimé que la péréquation pouvait, parfois, nuire à la libre administration des collectivités territoriales.

M. Henri de Raincourt a considéré que le Parlement pouvait obtenir du gouvernement la présentation de rapports sans pour autant en inscrire l'exigence dans la loi. Il s'est inquiété du risque que la réforme de la péréquation envisagée par l'article premier de la proposition de loi, devant intervenir dès « la plus prochaine loi de finances », et la remise du rapport prévu par son article 2, « avant le 1er septembre 2008 », ne suscite une certaine confusion en termes de calendrier. Il a rappelé que M. Alain Lambert s'était vu confier par le Premier ministre la mission de présider un groupe de travail portant sur les relations entre l'Etat et les collectivités territoriales, qui devait remettre ses conclusions le 15 novembre 2007. De même, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, s'était vu confier par le Président de la République la tâche de faire prochainement des propositions en matière de réforme des finances locales.

M. Michel Charasse a considéré que « tout le monde était pour la péréquation, pourvu que ce soit lui qui en bénéficie », et que l'article 72-2 de la Constitution n'impliquait de péréquation qu'en matière de recettes. Il a proposé de modifier le texte proposé par le rapporteur pour l'article 2, de manière à préciser que le rapport devait prendre en compte l'impact de la réforme envisagée sur le budget de l'Etat. Il a craint que la rédaction proposée par le rapporteur pour l'article premier n'ait pour effet de réduire la DGF de certaines communes pauvres. Il a suggéré que la DGF des communes appartenant à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) soit réduite, afin de dégager des sommes supplémentaires pour la péréquation. Il a proposé diverses améliorations rédactionnelles à l'article premier de la proposition de loi, tendant à préciser la notion de « pouvoir d'achat réel des collectivités locales », et à prévoir que cet article n'entrerait en vigueur qu'en 2009, au vu de simulations. Il a évoqué la possibilité de supprimer les régularisations, négatives ou positives, de la DGF. Il a déploré l'obsolescence des valeurs locatives cadastrales.

Mme Marie-France Beaufils a considéré que la péréquation réalisée par certains EPCI était importante. Elle a jugé que le principe de l'« enveloppe normée » des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales présentait l'inconvénient de susciter des diminutions globales de dotation pour certaines communes pauvres, du fait des baisses annuelles de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP), qui servait de « variable d'ajustement » à cette enveloppe. Elle a déclaré son opposition au principe même de l'article 2, considérant que la CSG ne pouvait servir à financer les collectivités territoriales.

M. Jean Arthuis, président , a regretté qu'il n'ait pas été possible de réaliser de simulations des effets de la proposition de loi, estimant qu'en matière de finances locales on ne pouvait se contenter « d'acheter un lapin dans un sac ». Il a, par ailleurs, estimé que le comité des finances locales ne devait pas se substituer au Parlement.

M. Michel Mercier, rapporteur , a considéré que le principal problème des relations entre l'Etat et les collectivités territoriales était celui des dépenses imposées par l'Etat. Il a considéré que dans le cas de la Creuse, il conviendrait d'instaurer une « allocation de remise à niveau spécifique », dont le montant financier serait, selon ses estimations, modique. Il a exprimé son accord quant à la précision proposée par M. Michel Charasse à l'article 2.

M. Michel Mercier, rapporteur , a considéré que la réforme qu'il suggérait à l'article premier ne devait être réalisée que si le gouvernement transmettait à la commission des simulations.

M. François Marc s'est déclaré favorable à la rédaction de l'article 2 proposée par le rapporteur, telle que modifiée sur la suggestion de M. Michel Charasse, mais qu'il ne pouvait accepter la rédaction de l'article premier proposée par le rapporteur.

M. Jean Arthuis, président , a alors proposé d'adopter l'article premier complété par une disposition prévoyant que, pour être applicable, la réforme prévue devait être précédée de la remise par le gouvernement de simulations adéquates.

La commission a alors adopté par 15 voix cette rédaction, le groupe socialiste déclarant s'abstenir.

La commission, à l'exception du groupe communiste, républicain et citoyen, a ensuite adopté l'article 2 dans la rédaction modifiée, présentée par le rapporteur.

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