C. LA PROGRESSION DES DOTATIONS BUDGÉTAIRES AFFECTÉES À LA PRÉVENTION DES POLLUTIONS ET DES RISQUES

Dans le projet de loi de finances pour 2001, les crédits consacrés à la prévention des pollutions et des risques s'élèvent à 2,47 milliards de francs, en hausse de 7,85 % et le montant des autorisations de programme est fixé à 2,22 milliards de francs, en diminution de 6,77 %.

Cette évolution globale recouvre -cela a été exposé plus haut- des évolutions diverses, puisque, d'une part sont intégrés les crédits de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN) mais que, d'autre part, les crédits d'intervention de l'ADEME ont fait l'objet " d'une remise à niveau technique ", se traduisant par une forte baisse des crédits de paiements inscrits sur ce chapitre.

Les priorités affichées en matière de prévention des pollutions concernent la prévention des risques naturels, la lutte contre la pollution de l'air -même si celle-ci prend du retard-, la lutte contre le bruit, l'instauration d'une co-tutelle en matière de sûreté nucléaire. Ces priorités ne doivent pas faire oublier la gestion des déchets ménagers, dont la responsabilité incombe aux collectivités locales.

1. Les priorités en matière de prévention des pollutions

a) La prévention des risques naturels

La politique de prévention des risques naturels reste une des priorités du ministère à travers un objectif -actualisé en 1998- de réalisation de 5.000 plans de prévention des risques (PPR) pour 2005. Par ailleurs, l'information des populations (à travers la réalisation de dossiers communaux synthétiques) et une meilleure prise en compte des risques par les collectivités locales et la société civile dans leurs décisions d'aménagements constituent également des axes prioritaires.

Depuis 1997, les crédits relatifs à l'élaboration des PPR et des documents d'information préventive des citoyens ont doublé. En 2001, ces actions seront financées à hauteur de 76 millions de francs -soit 3,5 millions de francs supplémentaires- seront consacrés aux plans de prévention des risques naturels ainsi qu'à l'élaboration des dossiers d'information départementaux ou communaux. A la suite des inondations importantes de la fin de l'année 1999, l'augmentation des crédits permettra en particulier de renforcer les PPR inondations, comme cela a été indiqué plus haut.

Par ailleurs, le Fonds de prévention des risques naturels majeurs contribuera au financement des PPR en application de l'article 55 de la loi de finances rectificative pour 1999 du 30 décembre 1999, du 1 er janvier 2000 au 1 er septembre 2006, pour les études nécessaires à la préparation et à l'élaboration de ces plans. Cette contribution permettra de financer la réalisation de PPR pour un montant de 50 millions de francs. Compte tenu de la parution tardive du décret d'application, cette mesure n'a pu être que partiellement mise en oeuvre en 2000.

Enfin, il faut signaler la création d'un comité interministériel de la prévention des risques majeurs, à la suite du CIADT du 28 février 2000. Son secrétariat est assuré par le délégué aux risques majeurs. Il s'agit par là d'améliorer l'efficacité des politiques publiques, de mieux assurer la cohérence de l'action de l'Etat, d'améliorer la connaissance des risques et de renforcer les dispositifs d'alerte.

Au 1 er août 2000, 2.344 PPR, anciens PER et périmètres de risques délimités en application de l'article R.111-3 du code de l'urbanisme, approuvés, étaient recensés, auxquels il convient d'ajouter 1.948 plans de surfaces submersibles qui valent PPR. Les services déconcentrés prévoient d'approuver 300 PPR supplémentaires d'ici la fin de l'année. Par ailleurs, 2.638 PPR ont été prescrits, mais n'ont pas fait à ce jour l'objet d'une approbation.

Documents

Approuvés

En cours

PER

368

-

R.111-3

892

-

PZSIF

0

-

PPR

1 084

2 638

TOTAL

2 344

2 638

1. PPR : plan de prévention des risques

2. documents antérieurs ou en cours valant PPR :

PER : plan d'exposition aux risques

R.111.3 : périmètre de risques (article R.111-3 du code de l'urbanisme)

PZSIF : plan de zones sensibles aux incendies de forêt

Ainsi, depuis octobre 1995, 3.722 PPR ont été prescrits et 1.084 documents approuvés. Il convient aussi de souligner, depuis cette même date, l'accélération du rythme de prescription, puis d'approbation des PPR. Cette tendance devrait se poursuivre en 2001 avec, en particulier, une accélération des documents approuvés.

b) Des moyens supplémentaires pour la lutte contre le bruit

On peut rappeler que l'ensemble du dispositif de prévention du bruit des transports terrestres a été défini par la loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit. Cette loi est complétée par :

- le décret n° 95-21 du 9 janvier 1995 et l'arrêté du 30 mai 1996 définissant les modalités d'application du classement des voies et les obligations relatives à l'isolation acoustique renforcée des bâtiments construits dans des zones exposées au bruit des transports terrestres ;

- le décret n° 95-22 du 9 janvier 1995 et les arrêtés du 5 mai 1995 (routes) et du 8 novembre 1999 (voies ferrées) définissant les prescriptions applicables en matière de bruit lors de la construction ou de la modification d'une infrastructure de transport terrestre.

En outre, le développement du trafic routier et ferroviaire et une urbanisation mal maîtrisée aux abords des infrastructures de transports ont créé des situations critiques nécessitant un traitement approprié et qui ont fait l'objet du rapport réalisé en 1998 par M. Claude Lamure, ingénieur général des ponts et chaussées.

Sur la base de ce rapport qui évalue à 200.000 le nombre de logements concernés par les nuisances sonores provoquées par les infrastructures routières et ferroviaires du seul réseau national, le Gouvernement a présenté en novembre 1999 une politique d'ensemble traitant à la fois de la prévention et de la résorption des points noirs.

Ainsi, en matière de prévention, les recherches concernant la diminution du bruit des trains, notamment par l'amélioration du dispositif de freinage, seront plus développées, et l'échéance de la fin 2000 a été fixée à la SNCF pour que soit examinée la mise en oeuvre d'un programme de remplacement systématique de ce dispositif.

Dans le domaine routier, afin de prévenir la création de nouveaux points noirs, les nuisances sonores induites sur les voies d'accès aux infrastructures nouvelles ou modifiées seront traitées et l'utilisation des revêtements peu bruyants sera généralisée.

Pour résorber les points noirs existants, les préfets sont chargés de recenser les zone fortement exposées au bruit des infrastructures de tous les réseaux, en collaboration avec les collectivités locales intéressées, la SNCF et RFF, et de déterminer, pour le réseau routier national et les voies ferrées, la liste des points noirs du bruit devant faire l'objet d'un rattrapage. Ils inviteront les collectivités locales à engager, avec l'aide technique des services de l'Etat, une démarche analogue sur leur réseau.

Le programme de rattrapage, engagé dès l'an 2000, porte en priorité sur la protection des habitations exposées à des nuisances sonores nocturnes excessives et des bâtiments publics " sensibles " (écoles, crèches, hôpitaux, ...) par la construction de murs antibruit et l'isolation de façade des bâtiments. Outre l'augmentation de l'aide à l'insonorisation des logements sociaux, les propriétaires privés recevront, en complément des primes à l'amélioration de l'habitat existantes, une subvention permettant de porter l'aide publique à un niveau comparable à celui existant au voisinage des aérodromes. Ce programme sera poursuivi en 2001 avec une mesure nouvelle de 100 millions de francs (DO + AP).

c) L'extension du périmètre d'intervention du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement en matière de sûreté nucléaire

Afin de renforcer l'indépendance de l'Institut de protection de sûreté nucléaire (IPSN), cet institut sera placé sous la co-tutelle du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement. En conséquence, ses dotations, jusqu'alors inscrites au budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, seront transférées en 2001 au budget du ministère de l'environnement. Cette première étape préfigure de l'intégration à court terme de l'IPSN au sein d'un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) doté d'une autonomie administrative et financière.

Pour l'année 2001, les moyens consacrés au fonctionnement et aux analyses de sûreté sont répartis ainsi : 968,5 millions de francs (AP + CP) pour les prestations de recherche et d'expertise, et 366 millions de francs (DO) pour le soutien à l'autorité de sûreté nucléaire. L'Institut doit ainsi poursuivre ses travaux de recherche et d'expertise sur la maîtrise des risques nucléaires et leurs conséquences sur l'homme et l'environnement.

Les crédits inscrits en fonctionnement pour 2001 permettent la création de 54 nouveaux postes, ce qui portera les effectifs de l'institut de 1.389 à 1.443 parmi ces nouveaux emplois, 22 seront créés au titre de la réduction du temps de travail.

2. Un soutien aux réseaux de surveillance de la qualité de l'air, mais des retards dans l'application de la loi sur l'air

a) Le retard dans la mise en oeuvre des instruments de concertation dans la lutte contre la pollution de l'air

Prévus par le titre II de la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation de l'énergie, les plans régionaux pour la qualité de l'air, élaborés par les préfets de région, doivent répondre à un triple objectif :

- établir un état précis de la pollution atmosphérique dans la région concernée ;

- dicter des orientations pour satisfaire les objectifs de qualité de l'air prescrits dans l'annexe du décret du 6 mai 1998 ;

- sensibiliser et informer les différents acteurs régionaux aux enjeux de la pollution atmosphérique.

Quatre PRQA ont été arrêtés par le préfet de région. Il s'agit des PRQA des régions Provence-Alpes-Côte d'Azur, Ile-de-France, Rhône-Alpes et Midi-Pyrénées. Neuf autres projets ont été mis à la disposition du public, dans le cadre de la consultation prévue par le décret du 6 mai 1998 et la quasi-totalité des autres régions prévoient d'avoir terminé la rédaction de leur projet avant la fin 2000.

En ce qui concerne les plans de déplacements urbains (PDU) prescrits par l'article 14 de la loi sur l'air, dans les périmètres de transports urbains des 58 agglomérations de plus de 100.000 habitants, le retard dans la mise en oeuvre est important. A ce jour, dix autorités organisatrices seulement ont approuvé leur plan de déplacements urbains. Il s'agit de Bordeaux, Grenoble, Lille, Lyon, Nancy, Orléans, Rouen, Saint-Etienne, Strasbourg et Troyes. Vingt-huit autres collectivités ont délibéré sur leur projet de plan, celui-ci étant donc actuellement en consultation auprès des personnes publiques, en enquête publique ou en attente d'approbation suite aux modifications éventuelles apportées par l'enquête. L'enquête publique est achevée ou en cours pour 12 agglomérations.

Les travaux du PDU d'Ile-de-France se poursuivent : l'enquête publique a eu lieu du 2 juin au 13 juillet 2000 et son approbation est prévue d'ici la fin 2000.

Enfin, après la validation de leur diagnostic et l'élaboration de scénarios, une vingtaine d'agglomérations arrêteront prochainement, ou avant la fin de l'année, leur projet de PDU (Amiens, Le Havre, Aix-en-Provence, Etang de Berre, Maubeuge,...).

Plus généralement, une enquête réalisée récemment en concertation avec le groupement de autorités responsables des transports (GART), et le centre d'étude sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques (CERTU) indique que 36 agglomérations en sont à la phase de concertation et d'approbation, 13 au stade de l'élaboration des scénarios ou du projet, et 9 au stade de lancement de la démarche ou de la constitution des structures de travail.

Une instruction a été donnée aux préfets, le 18 septembre 2000, par les ministères chargés des transports et de l'environnement, notamment pour les inciter à prendre des initiatives, lorsque la démarche est au point mort.

Enfin, les dispositions de la récente loi relative au renforcement de l'intercommunalité comme celles du projet de loi " solidarité et renouvellement urbains " devraient permettre d'améliorer la pertinence de l'échelle à laquelle les décisions sont prises en matière de déplacements, et relancer ainsi le processus.

En revanche, on ne peut que déplorer le retard de l'administration s'agissant de la parution du décret en Conseil d'Etat permettant d'appliquer l'article 11 de la loi instaurant les plans de protection de l'atmosphère (PPA). Ces plans, obligatoires pour les agglomérations de plus de 250.000 habitants, élaborés par les préfets, devaient être mis en place à compter du 1 er janvier 2000. Ils devaient regrouper l'ensemble des mesures préventives, à caractère temporaire ou permanent, destinées à garantir, de manière durable, le respect des valeurs limites définies par l'Union européenne et inclure l'ensemble des émetteurs de polluants, y compris ceux ne relevant pas de la législation sur les installations classées, notamment les installations de chauffage. Ce retard est d'autant plus préjudiciable à la cohérence de la politique gouvernementale, que la mise en place de ces PPA est souvent citée, dans l'arsenal des mesures de réduction des émissions de substances polluantes ou de lutte contre l'effet de serre 6 ( * ) .

b) Dispositifs de surveillance de la qualité de l'air et moyens budgétaires

S'agissant du dispositif de surveillance de la qualité de l'air, l'article 3 dispose qu'au 1 er janvier 2000, l'ensemble du territoire national doit être couvert.

D'ici à la fin de l'année, ou au plus tard en 2001, les 39 associations de gestion de réseaux, en place, devraient pouvoir assurer la couverture du territoire, à l'exception de la Corse, où aucune association n'a encore été créée. Actuellement, 330 personnes environ sont employées par ces associations qui gèrent un parc de plus de 2.000 analyseurs automatiques.

Le programme d'équipement des réseaux de surveillance a privilégié, au-delà de l'extension de la surveillance sur le plan territorial, la surveillance de nouveaux polluants, en référence à la directive-cadre du 27 décembre 1996. Ont ainsi été ajoutés certains composés organiques volatils (COV - dont en particulier, le benzène), les particules fines de moins de 10 microns puis de moins de 2,5 microns, ainsi que dans quelques réseaux, certains métaux (cadmium, nickel, mercure, arsenic) et les hydrocarbures polycycliques aromatiques (HAP).

Par ailleurs, ont été renforcés les moyens de surveillance mobile, des outils de prévision par modélisation informatique, la mise en place de procédures d'assurance qualité ainsi que les moyens d'information du public.

Les moyens budgétaires affectés à la lutte contre la pollution de l'air et à la surveillance de la qualité de l'air sont fixés à 375 millions de francs, en baisse de 6,33 % car le programme d'acquisition des capteurs de surveillance est quasiment achevé.

La répartition des crédits est ainsi proposée pour 2001 :

- 14 millions de francs pour la réalisation d'études préalables à l'élaboration des plans prévus par la loi et la mise en oeuvre d'actions de communication, dont 1 million de francs pour la réalisation des plans de déplacements urbains (chapitre 34.98 - articles 60 et 70) ;

- 70 millions de francs d'aide au fonctionnement des associations de gestion des réseaux de surveillance de la qualité de l'air et de la banque de données sur la qualité de l'air ; cette augmentation de 15 millions de francs par rapport à l'année précédente est justifiée par les besoins encore insatisfaits dans le domaine de la surveillance de la pollution atmosphérique : extension de la surveillance, tant sur le plan géographique qu'en ce qui concerne les paramètres suivis, notamment pour mieux contrôler les polluants qui présentent les risques sanitaires les plus importants, prévision de la qualité de l'air, assurance de la qualité des mesures (chapitre 44.10 - articles 80 et 90) ;

- 56 millions de francs d'études et travaux divers, dans le domaine de la pollution de l'air (chapitre 57.20 - article 50) ;

- 159 millions de francs pour la prévention et le traitement de la pollution (par l'intermédiaire de l'ADEME) (chapitre 67.30 - article 60) ;

- 75,35 millions de francs pour la surveillance de la pollution atmosphérique (équipement par l'intermédiaire de l'ADEME) en baisse de 34,67 % ; l'équipement des réseaux par l'acquisition de capteurs de surveillance de la pollution atmosphérique peut être ralenti au profit d'autres actions dans le domaine du fonctionnement des réseaux de surveillance de la pollution de l'air (chapitre 67.30 - article 70).

3. La nécessité du soutien aux investissements dans le domaine du traitement des déchets

a) Rappel du contexte budgétaire et fiscal dans le domaine des déchets depuis la mise en place de la TGAP le 1er janvier 1999

Il est certain que la succession des modifications d'ordre économique ou fiscal intervenues depuis le 1 er janvier 1999 et qui concernent le traitement des déchets ont compliqué, voire retardé, les décisions d'investissements d'un certain nombre de collectivités territoriales.

On les évoquera brièvement :

Depuis le 1 er janvier 1999, un taux réduit de TVA à 5,5 %, est applicable aux opérations de collecte, de tri et de traitement des déchets, ce qui a incité les collectivités locales à s'orienter d'avantage vers le recyclage. Cette disposition ne s'applique aux opérations de collecte, de tri et de traitement des déchets que lorsque les collectivités locales ont contracté avec un organisme agréé par les pouvoirs publics au titre du décret n° 92-377 du 1 er avril 1992 relatif à l'abandon des emballages ménagers (Eco-emballages ou Adelphe), pour la mise en place d'une collecte multimatériaux.

Selon une étude de l'ADEME, la disposition susvisée a induit pour les collectivités concernées en 1999, une économie de 1,5 milliard de francs par an sur une dépense totale évaluée à 24,4 milliards de francs TTC, mais le bénéfice de cette mesure pour les collectivités varie selon le niveau d'avancement de la collecte sélective sur cinq matériaux, la nature juridique de l'exploitant du service et le régime fiscal de la collectivité ;

Le nouveau barème de soutien aux collectivités locales, validé par le renouvellement de l'agrément d'Eco-emballages intervenu le 11 juin 1999, est appliqué rétroactivement à compter du 1 er janvier 1998, et il est nettement plus favorable que le précédent, notamment à travers une prise en compte des spécificités du milieu rural ou des zones d'habitat vertical.

A été décidée de manière unilatérale une révision à la baisse des barèmes d'intervention de l'ADEME, en mai 1999, et avec effet rétroactif au 1 er janvier 1999, faisant suite à l'accroissement rapide des investissements des collectivités locales dans le domaine des déchets municipaux et pour éviter les " files d'attente ".

En moyenne, les taux de subvention sont réduits de 38 %, et ce malgré l'hostilité déclarée du collège représentant les collectivités locales au sein du conseil d'administration de l'agence. Le nouveau système d'aide distingue le plus souvent un taux d'aide de référence et un taux plafond de 10 % plus élevé pour tenir compte, d'une part, de la qualité des projets et, d'autre part, des contextes locaux spécifiques (zones rurales ou de montagne, DOM).

Votre rapporteur pour avis avait dénoncé avec force, l'an dernier, cette remise en cause unilatérale des taux d'intervention de l'ADEME. Celle-ci avait été d'autant plus mal ressentie que la fusion des cinq taxes gérées par l'ADEME dans la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) s'était accompagnée d'une forte augmentation du produit de ces taxes. Malgré les 400 millions de francs supplémentaires encaissés au titre de la TGAP, l'ADEME avait diminué de 38 % son taux de subvention à l'investissement des collectivités locales , annulant ainsi une partie des effets positifs résultant de la baisse de TVA ou du nouveau barème d'Eco-emballages.

Dans ce contexte, les dotations budgétaires de l'ADEME dans le projet de loi de finances pour 2000, s'agissant de la gestion des déchets, étaient simplement reconduites à hauteur de 811 millions de francs en crédits de paiement, alors que le montant des autorisations de programme progressait de 12 %, ce que nombre de parlementaires avaient estimé insuffisant au regard du volume prévisible d'investissements envisagés par les collectivités territoriales.

En réponse à ces interrogations et au cours du débat budgétaire au Sénat, une mesure exceptionnelle de 325 millions de francs en autorisations de programme a d'ailleurs été obtenue, mais elle ne sera que partiellement reconduite pour 2001.

b) L'ultime remise en ordre des dotations de l'ADEME dans le projet de loi de finances pour 2001

Succédant à cette série de mesures aux effets contradictoires, la mesure, présentée par le Gouvernement comme une simple remise en ordre technique opérée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2001, ne contribue pas à éclaircir le débat.

En effet, dans le projet de loi de finances pour 2001, les crédits de paiement destinés à l'ADEME diminuent très fortement pour passer de 1.717,6 millions de francs à 491,7 millions de francs, soit une baisse de 71%.

Ce mouvement suscite de nombreuses inquiétudes de la part des élus locaux, qui s'interrogent sur les capacités de l'établissement à faire face à leurs demandes de subventions, compte tenu de la forte progression des investissements à réaliser pour se conformer à l'échéance de 2002.

Selon les explications apportées par la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement lors de son audition devant la commission des affaires économiques, cette diminution ne portera en rien atteinte aux capacités d'intervention de l'ADEME, compte tenu des très importants reports de crédits de paiement d'une année sur l'autre, qui sont constatés depuis longtemps.

Cette situation, a-t-elle expliqué, s'est accentuée avec la mise en place en 1999 de la TGAP et le remplacement consécutif des taxes affectées par des crédits budgétaires, compte tenu de la règle de financement qui a été retenue à cette date. En effet, afin de ne pas pénaliser l'établissement dans un contexte de mutation profonde, il a été décidé de le doter pour ses premières années d'un montant de crédits de paiement égal à celui des autorisations de programmes ouvertes, par dérogation aux règles de financement habituellement retenues. Or, les investissements soutenus par l'ADEME étant par nature de grande ampleur et conduits sur un échéancier pluriannuel, le rythme réel des dépenses effectives s'est situé très nettement en-dessous des crédits de paiement disponibles.

De plus, le calendrier de préparation de la loi de finances pour 2000, s'élaborant au premier trimestre de l'année 1999, était trop rapproché de la mise en place de la TGAP pour disposer du recul suffisant et envisager une adaptation des modalités de financement de l'établissement. C'est pourquoi, la règle d'un crédit de paiement pour une autorisation de programme a été maintenue en 2000.

En revanche, au vu des reports disponibles à la fin de l'exercice 1999, connus avec certitude au moment de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2001, et qui s'établissent à 3.648 millions de francs dont 1.493 millions de francs sur crédits budgétaires, le Gouvernement a décidé d'adapter le montant des crédits de paiement pour 2001 aux besoins effectifs de l'établissement.

AGENCE DE L'ENVIRONNEMENT ET DE LA MAÎTRISE DE L'ÉNERGIE
CRÉDITS D'INTERVENTION - PLF 2001

(millions de francs)

Chapitre 67-30

Autorisations de programme

Crédits de paiement

art.

Dotations 2000

Demandées pour 2001

Dotations 2000

Services votés 2001

Mesures nouvelles 2001

Total pour 2001

10

Energie

293

293

293

-

56,7

56,7

20

Déchets ménagers et assimilés

1 234

1 034

811

-

199,9

199,9

30

Dépollution des sols

119

89

119

-

17,3

17,3

40

Ramassage des huiles

141,5

141,5

141,5

-

141,5

141,5

50

Isolation acoustique au voisinage des aérodromes

159,5

159,5

84,5

-

30,9

30,9

60

Lutte contre la pollution atmosphérique, hors surveillance de la qualité de l'air

159

159

159

-

30,8

30,8

70

Surveillance de la qualité de l'air

115,3

75,35

109,6

-

14,6

14,6

Totaux pour le chapitre

2 221,3

1 951,35

1 717,6

-

491,7

491,7

Source : MATE

On ne peut que prendre acte de ces explications qui, d'un point de vue technique, sont certes rigoureuses, mais " chat échaudé craint l'eau froide " :

- en 1999, l'ADEME, victime de son succès et de l'afflux de dossiers à subventionner, n'obtient pas de crédits supplémentaires, mais diminue ses taux de subventions ;

- en 2000, le montant des autorisations de programmes est calculé de façon trop juste dans le projet de loi de finances initiale, et " à l'arraché ", le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement obtient une rallonge exceptionnelle de 325 millions de francs en autorisations de programme. Mais celle-ci n'est que très partiellement pérennisée en 2001, à hauteur de 125 millions de francs alors que celle obtenue pour la lutte contre le bruit l'est intégralement ;

- en 2001, les autorisations de programme ne retrouvent donc pas le niveau atteint en loi de finances pour 2000 et le montant des crédits de paiement fait l'objet d'un réajustement technique à la baisse drastique...

Cette succession de péripéties budgétaires est du plus mauvais effet en termes d'affichage d'une volonté politique forte en faveur d'une modernisation du traitement des déchets. Ce sont les collectivités locales qui risquent d'en faire les frais alors même que les besoins d'investissements restent très importants.

c) Les perspectives à moyen terme de la politique de traitement des déchets

Nombre de questions restent, en effet, en suspens, même si l'effort d'investissement consenti par les collectivités locales n'a pas diminué ces dernières années. Ainsi, en 1999, le montant des investissements réalisés par les communes ou leur groupement s'est élevé à 6,48 milliards de francs, soit plus de 2 milliards supplémentaires par rapport à 1998 qui constituait déjà une année de forte demande. Les aides de l'ADEME se sont élevées à 1,02 milliard de francs, niveau un peu plus élevé qu'en 1998, et jamais atteint depuis 1993. En 2000, l'Association des Maires de France estime que les investissements réalisés pourraient atteindre 8,7 milliards de francs. L'ADEME estime, enfin, qu'une quarantaine de milliards de francs ont été engagés ou sont en projet sur une facture globale de 60 milliards de francs.

Mais, beaucoup reste à faire si on veut atteindre l'objectif du taux de recyclage de 50 % des déchets ménagers affiché par la circulaire de la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement du 18 avril 1998.

Aujourd'hui, la population française produit globalement environ 25 millions de tonnes d'ordures dont 43 % vont en décharge, 48 % sont incinérés -avec ou sans récupération d'énergie- et 9 % font l'objet d'un recyclage à l'issue de collectes sélectives. Mais il reste encore quelques 6.000 décharges illégales en France, alors que près de 3.000 sites non autorisés ont été fermés depuis 1990. Il faudra investir des sommes considérables pour réhabiliter ces décharges illégales et, jusqu'à présent, 300 seulement l'ont été.

Le cadre général des décisions à prendre est en train d'évoluer avec la révision des plans départementaux d'élimination des déchets (PDED) pour se conformer aux nouvelles orientations de la circulaire du 18 avril 1998 précitée, qui prévoient une valorisation accrue et un moindre recours à l'incinération. A cette occasion, la définition du déchet ultime admissible en décharge après 2002 a été élargie : au-delà du résidu d'incinération, pourront être acceptés les refus de recyclage provenant d'une déchetterie, d'un centre de tri ou de compostage.

Actuellement, sur les 86 PDED devant couvrir le territoire, seuls six répondaient dans leur version initiale aux nouvelles orientations arrêtées en 1998. Dix plans ont été publiés dans leur forme révisée et treize sont prévus d'ici au deuxième trimestre 2001. Les cinquante-sept autres sont en cours de refonte ou d'élaboration puisque neuf départements n'ont pas encore de plan, parfois du fait de l'annulation de ce dernier par le tribunal administratif.

Plutôt que d'évoquer l'échéance de 2002, comme une date couperet, il vaut mieux privilégier la continuité de l'effort financier soutenu depuis 1999, pour permettre d'atteindre les objectifs fixés par la loi.

Mais il est vrai également que l'on peut s'interroger sur la nécessité d'une refonte du cadre législatif ou de son adaptation aux nouvelles règles communautaires adoptées depuis 1992 ou encore de sa mise en cohérence avec plusieurs lois récentes, en matière d'électricité, d'intercommunalité ou encore de délégation de service public. En tout état de cause, un bilan détaillé s'impose.

* 6 Question écrite de M. Marc Dumoulin du 14 février 2000 - Réponse Journal Officiel Assemblée nationale : 20 mars 2000 (p. 1791) ;

Question écrite de M. Arnaud Jung du 13 septembre 1999 - Réponse Journal Officiel Assemblée nationale du 29 novembre 1999 (p. 6818).

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