N° 70

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 2002

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 2003 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME I

AGRICULTURE

Par M. Gérard CÉSAR,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Gérard Larcher, président ; MM. Jean-Paul Emorine, Marcel Deneux, Gérard César, Pierre Hérisson, Jean-Marc Pastor, Mme Odette Terrade, vice-présidents ; MM. Bernard Joly, Jean-Paul Émin, Patrick Lassourd, Bernard Piras, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Philippe Arnaud, Gérard Bailly, Bernard Barraux, Mme Marie-France Beaufils, MM. Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Jacques Bellanger, Jean Besson, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Marcel-Pierre Cleach, Yves Coquelle, Gérard Cornu, Roland Courtaud, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, Yves Detraigne, Mme Evelyne Didier, MM. Michel Doublet, Bernard Dussaut, Hilaire Flandre, François Fortassin, Alain Fouché, Christian Gaudin, Mme Gisèle Gautier, MM. Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Charles Guené, Mme Odette Herviaux, MM. Alain Journet, Joseph Kergueris, Gérard Le Cam, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Jean-Yves Mano, Max Marest, Jean Louis Masson, Serge Mathieu, René Monory, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Claude Saunier, Bruno Sido, Daniel Soulage, Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, André Trillard, Jean-Pierre Vial.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 230 , 256 à 261 et T.A. 37

Sénat : 67 (2002-2003)

Lois de finances.

Mesdames, Messieurs,

Les résultats économiques de l'agriculture en 2001 sont ceux d'un secteur fragilisé par les crises. Certes, la hausse des prix (+3,3 % en moyenne) a permis une relative tenue de la production en valeur, malgré une forte diminution des volumes produits, en particulier dans les productions végétales confrontées à de mauvaises conditions climatiques. Cette hausse n'a pourtant pas concerné toutes les productions, le secteur bovin, notamment, subissant un effondrement des cours lié à une nouvelle crise de confiance. Si le résultat net de l'agriculture progresse de 3 % en 2001, c'est en partie grâce aux soutiens publics versés dans le cadre des plans anti-crises, tels ceux adoptés en faveur des éleveurs bovins.

Pour l'année 2002, les prix semblent, au contraire, de nouveau orientés à la baisse , en raison de meilleures récoltes. Les productions porcine et avicole subissent les conséquences de la reprise de la consommation de viande bovine, après avoir bénéficié de reports de consommation en 2001.

Surtout, nos productions souffrent de plus en plus de l'affaiblissement de la préférence communautaire et de la concurrence des importations à bas prix qui en résulte. Il convient, à cet égard, d'évoquer les importations massives de blés en provenance des pays de la Mer Noire, mais également la concurrence que fait subir au secteur avicole français l'entrée, sur le marché européen, de volailles sous-taxées en provenance d'Amérique du Sud. Le contingent d'importations de vin à droits nuls accordé par l'Union européenne à l'Afrique du Sud dans le cadre d'un accord signé en début d'année, et qui pourrait être reproduit avec d'autres pays viticoles, risque d'avoir les mêmes effets désastreux dans le secteur du vin.

Les négociations conduites actuellement au niveau international et communautaire sont, de ce point de vue, lourdes d'enjeux pour l'agriculture française. Dans le cadre de l'OMC, le dossier agricole reste le plus sensible et cristallise les oppositions, un accord sur le calcul des engagements de réduction des soutiens agricoles devant être établi pour le 31 mars 2003, afin de préparer la prochaine conférence interministérielle qui se tiendra à Cancun en septembre 2003.

Surtout, au plan européen, le périmètre de la révision à mi-parcours de la politique agricole commune (PAC) reste encore indéterminé. Si des adaptations apparaissent souhaitables dans un certain nombre de secteurs, tel que celui de la viticulture, il ne saurait être question d'anticiper sur une réforme de fond, qui ne peut avoir lieu avant 2006, conformément aux accords de Berlin de mars 1999. A ce propos, votre rapporteur pour avis se félicite de l'accord passé entre le Président de la République et le chancelier allemand Gerhard Schröder, repris lors du Conseil européen de Bruxelles, qui pose le principe d'un maintien des aides directes jusqu'en 2006, contre l'engagement de contenir les dépenses ultérieures de la PAC à leur niveau de 2006.

Cependant, l'élargissement aux dix pays d'Europe centrale et orientale impliquera nécessairement un redéploiement des dépenses agricoles dans le respect du nouveau plafond budgétaire, ce qui apparaît préoccupant pour nos agriculteurs.

En ce qui concerne les crédits destinés à l'agriculture pour 2003 , ils bénéficient d'une progression modeste (+0,9 %), mais toutefois appréciable dans un contexte budgétaire tendu .

Cette contrainte budgétaire est notamment inhérente, s'agissant du ministère de l'agriculture, à l'insuffisance des crédits prévus, l'année dernière, en faveur des contrats territoriaux d'exploitation (CTE) , alors que le dispositif connaissait un emballement imputable au développement d'une logique de guichet, ou encore à l'absence de financement prévu pour les retraites complémentaires agricoles, dont l'instauration a été votée au début de l'année 2002.

Le montant total des dépenses de ce ministère s'établit pour 2003 à 5,1 milliards d'euros hors BAPSA, dont l'essentiel (4,9 milliards d'euros) correspond à des dépenses ordinaires. Cependant, cette année, les dépenses en capital progressent davantage (2,4 % en autorisations de programme et 16,4 % en crédits de paiement) que les dépenses ordinaires (+0,3 %), l'accent ayant été mis sur la maîtrise des moyens des services, en particulier des dépenses de personnel.

Il convient, cependant, de rappeler que l'ensemble des dépenses publiques en faveur de l'agriculture ne se résume pas aux crédits du ministère de l'Agriculture, mais renvoie également aux fonds perçus de l'Union européenne au titre de la PAC (environ 9,7 milliards d'euros en 2001), aux dépenses consenties par les collectivités territoriales (800 millions d'euros), ainsi qu'aux crédits des autres ministères (700 millions d'euros).

Ce projet de budget affirme un certain nombre de priorités :

- la volonté de soutenir le développement de la production agricole dans le respect de l'environnement ;

- l'accent mis sur la sécurité sanitaire des aliments et la qualité des produits ;

- la redynamisation de la politique en faveur de l'espace rural, dont les crédits augmentent de 13,7 %, un effort particulier étant consenti en faveur du secteur forestier ;

- un souci de régler les contentieux pendants avec l'enseignement agricole privé.

Les crédits qui vous sont présentés dans le cadre de cet avis bénéficient, dans leur globalité, d'une évolution favorable.

Votre rapporteur pour avis relève tout d'abord, avec satisfaction, l'augmentation des crédits consacrés à la politique de l'installation, des structures et de la modernisation des exploitations.

La progression (+2 %) des crédits à l'installation doit permettre de relancer les programmes pour l'installation des jeunes en agriculture (PIDIL), alors que l'augmentation de 60 millions d'euros des moyens affectés à l'amélioration des structures et à la modernisation des exploitations servira à conforter la dotation du CNASEA (à 49 millions d'euros), et surtout à revaloriser l'enveloppe consacrée aux prêts bonifiés à l'agriculture (+ 40 %), qui atteint 192 millions d'euros.

Les crédits consacrés à la multifonctionnalité de l'agriculture sont plus que doublés, passant de 164 à 333 millions d'euros .

Il s'agit de relancer la politique agri-environnementale, avec la mise en place d'une nouvelle prime herbagère, destinée à prendre le relais de l'actuelle prime à l'herbe qui disparaîtra en 2003. Il convient de se féliciter de cette initiative, qui apparaît très en phase avec les attentes exprimées tout récemment par le rapport de la mission d'information sénatoriale pour l'avenir de l'élevage.

La dotation affectée aux CTE est, quant à elle, fortement revalorisée, à 200 millions d'euros, afin d'honorer les engagements déjà contractés et de permettra la conclusion de nouveaux contrats dans le cadre d'un dispositif rénové et simplifié.

Les crédits destinés aux mécanismes de solidarité en faveur des agriculteurs enregistrent une diminution .

Si la dotation prévue pour la réinsertion professionnelle est reconduite à 3 millions d'euros, la ligne budgétaire consacrée aux actions en faveur des exploitations en difficulté, qui finançait jusqu'ici la réalisation de plans de redressement, et qui regroupe désormais également les crédits destinés au Fonds d'allégement des charges (FAC), voit ses crédits diminuer de 12,6 %, pour s'établir à 41 millions d'euros. Ces dotations, mobilisées en cas de difficultés conjoncturelles, ont toutefois vocation à être complétées, en cas de besoin, dans le cadre des collectifs budgétaires.

Il en est de même à propos du Fonds national de garantie des calamités agricoles , qui ne reçoit pas de dotation cette année : outre qu'il dispose d'une réserve financière de 173 millions d'euros en cette fin d'année 2002, le Gouvernement s'engage à lui verser une dotation complémentaire en cas de nouveaux sinistres.

L'enveloppe réservée aux pré-retraites est, quant à elle, en augmentation de 22 %, afin de faire face au besoin de financement généré par les indemnités viagères de départ, un dispositif en extinction, mais dont le coût avait été largement sous-estimé dans le budget de l'année dernière.

Enfin, les crédits destinés au soutien des filières et à la régulation des marchés sont en diminution, en raison de la réduction de près de 15 % de la dotation destinée aux offices. Il est vrai que cette réduction devrait affecter, en priorité, les dépenses que les offices consacrent aux actions structurelles nationales. Cependant, le Gouvernement a, là encore, assuré qu'il pourvoirait aux besoins susceptibles d'apparaître en cas de crise conjoncturelle dans une filière.

En revanche, parmi les autres dépenses concourant au soutien des filières, il convient de se féliciter de la dotation de 2 millions d'euros prévue pour le futur Fonds de communication en agriculture, dont la création, prévue par la LOA, est attendue depuis plus de trois ans.

Estimant que ce budget de l'agriculture est globalement équilibré, malgré un contexte budgétaire tendu, votre rapporteur pour avis vous proposera de donner un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

CHAPITRE 1ER -

LE CONTEXTE DU PROJET DE BUDGET

I. ÉVOLUTION DU REVENU AGRICOLE EN 2001

A. RÉSULTATS GÉNÉRAUX

Selon les résultats établis dans les comptes de l'agriculture publiés par l'INSEE et le service central des enquêtes et études statistiques du ministère de l'agriculture (SCEES), l'année agricole 2001 a été marqué par des conditions climatiques défavorables aux cultures et, dans le domaine des productions animales, par la crise bovine et l'épizootie de fièvre aphteuse.

La faiblesse de l'offre a été cependant compensée par une progression des prix. Deux secteurs font exception : celui du vin, en raison des excédents, et celui de l'élevage bovin, dont la production a été durablement affectée par la crise de confiance des consommateurs. Par ailleurs, la revalorisation des aides, prévue par l'Agenda 2000, s'est poursuivie.

1. Un volume de production en baisse

En 2001, le volume de la production agricole a fortement diminué (- 3,3 %) par rapport à 2000 . Cette baisse résulte principalement du repli des productions végétales, dû à des conditions climatiques défavorables : une pluviosité importante a perturbé les semis, et le développement des cultures, le froid ayant ensuite affecté les productions maraîchères de fin de campagne.

Les productions de céréales (- 8,2 %) et d'oléagineux (- 12,3 %) baissent fortement sous l'effet conjugué du recul de la sole et des rendements.

Des rendements en baisse et une faible teneur en sucre provoquent également une chute de la production des betteraves industrielles (- 12,6 %).

La production de vins de champagne diminue en raison de l'abaissement du rendement plafond permettant d'obtenir l'appellation. Une partie des vins de table est orientée vers la distillation, pour résorber les excédents. Les récoltes de pommes de terre, de fruits et de fleurs diminuent également.

Le volume de la production animale est stable en 2001 . Certes, la production de gros bovins recule, en raison de la faible demande consécutive à la crise de confiance des consommateurs déclenchée à la mi-octobre 2000. Mais les autres productions animales, stimulées par les reports de consommation, compensent cette baisse.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page