B. LA POLYNÉSIE FRANÇAISE

1. Les évolutions institutionnelles et politiques

L'année 2002 a été marquée par la disparition des chefs de file des partis non indépendantistes opposants au Tahoeraa du président Gaston Flosse, par une modification du mode de scrutin municipal et par l'engagement d'une réforme constitutionnelle devant permettre à la Polynésie française d'obtenir de nouvelles avancées institutionnelles dans le sens d'une autonomie encore plus poussée. Dans l'attente de l'adoption d'un nouveau statut déclinant les possibilités offertes par le cadre constitutionnel consacré aux collectivités d'outre-mer, on observera que les dispositifs institutionnels novateurs résultant du statut du 12 avril 1996 sont largement mis en oeuvre, en particulier le recours à la procédure de consultation du juge administratif en matière de répartition des compétences et la procédure de consultation de l'assemblée territoriale en matière de conventions internationales.

a) 2002 : une opposition non indépendantiste décapitée et la modification du mode de scrutin municipal
(1) La disparition accidentelle des chefs de file de l'opposition non indépendantiste

La campagne pour les élections législatives de juin 2002 a été marquée par la disparition des plus hauts responsables de l'opposition non indépendantiste dans un accident d'avion le 23 mai 2002. Ont ainsi disparu M. Boris Leontieff, conseiller territorial, maire d'Arue et président du Fetia Api, M. Lucien Kimitete, conseiller territorial et maire de Nuku Hiva, chef du parti marquisien, M. Arsen Tuairau, conseiller territorial du Fetia Api et candidat aux législatives ainsi que Mme Ferfine Besseyre sa suppléante, en campagne aux Tuamotu-Gambier. Rappelons qu'aux élections territoriales de mai 2001, le parti autonomiste Fetia Api avait obtenu 6 sièges sur 49, devenant la troisième force politique du territoire derrière le Tahoeraa et le Tavini, parti indépendantiste.

(2) La modification du mode de scrutin municipal

Le scrutin majoritaire à deux tours avec panachage et vote préférentiel s'appliquait jusqu'à présent dans les 48 communes du territoire quelle que soit l'importance de leur population.

L'existence d'un seul mode de scrutin pour toutes les communes, quelle qu'en soit l'importance démographique, qui correspond à celui des communes de moins de 3.500 habitants en vigueur en métropole et dans les départements d'outre-mer, avec une possibilité de panachage qui est en réalité peu utilisée, ne permettait pas une représentation au sein des conseils municipaux des minorités politiques. La réforme avait donc pour objectif d'introduire une représentation pluraliste et de favoriser de véritables débats sur la gestion municipale tout en assurant à la majorité un nombre de sièges suffisants pour le bon fonctionnement de l'institution communale, encore récente en Polynésie française puisque sa généralisation ne date que de 1972. Cette réforme a été introduite par voie d'amendement au projet de loi relatif à la démocratie de proximité, devenu la loi du 27 février 2002 .

Sont désormais étendues aux seules communes ne comportant pas de communes associées les dispositions du régime mixte en vigueur en métropole dans les communes de 3.500 habitants et plus . Les communes concernées sont au nombre de huit, toutes situées dans l'île de Tahiti , ayant une population variant entre 7.934 habitants et 25.595 habitants au dernier recensement de 1996. Leur population totale, soit 122.975 habitants, représente 56,44 % de la population du territoire.

b) Des procédures novatrices du statut de 1996 largement utilisées en attendant l'avènement d'une autonomie encore plus avancée dans un cadre constitutionnel rénové

La fréquence d'utilisation de dispositifs novateurs résultant de la loi organique statutaire du 12 avril 1996 atteste du bon fonctionnement de ce statut et des institutions. Il s'agit notamment de la procédure de consultation de l'assemblée de la Polynésie française en matière internationale et des procédures administrative et contentieuse de demande d'avis au Conseil d'Etat en matière de répartition des compétences.

En vertu de l'article 68 du statut, l'assemblée de la Polynésie française doit être consultée sur les projets de loi autorisant la ratification ou l'approbation de conventions internationales et sur les propositions d'actes communautaires . Ces consultations sont en moyenne au nombre d' une vingtaine par an et portent principalement sur les conventions relatives à la protection des investissements et à l'environnement.

Par ailleurs, la répartition des compétences entre l'Etat et le territoire est garantie par la possibilité de demander son avis au Conseil d'Etat , tant à l'occasion d'un recours contentieux que dans le cadre d'une procédure purement administrative. Rappelons que l'article 113 de cette loi prévoit une procédure de saisine pour avis du Conseil d'État par le tribunal administratif de Papeete lorsque celui-ci est saisi d'un recours pour excès de pouvoir à l'encontre de délibérations de l'assemblée de la Polynésie française ou d'actes pris sur leur fondement, motivé par une inexacte application de la répartition des compétences entre l'État, le territoire et les communes. L'article 114 prévoit une procédure comparable susceptible d'être initiée soit par le président du gouvernement de la Polynésie française, soit par le président de l'assemblée territoriale, en cas d'incertitude sur une question de répartition des compétences.

Depuis 1996, le Conseil d'État s'est ainsi prononcé sur 33 dossiers, 11 au titre de la procédure contentieuse de l'article 113 et 22 au titre de la procédure administrative de l'article 114 .

En matière contentieuse , outre le rejet d'une demande d'avis comme n'entrant pas dans le champ de l'article 113, les avis rendus depuis 1997 ont conclu sur six points à la compétence du territoire (fixation des règles applicables aux loteries proposées au public autres que les règles relatives au contrôle de leur installation et de leur fonctionnement ; réglementation en matière de procédure d'attestation de conformité et de marquage des équipements terminaux des télécommunications utilisant des fréquences radioélectriques sous réserve du respect des règles étatiques fixant les conditions d'utilisation des fréquences ; nomination des agents des établissements publics territoriaux sous réserve des compétences de l'État en matière de fonction publique de l'État ; allocation d'une indemnité complémentaire à une salariée en congé de maternité ; organisation des liaisons aériennes internationales au départ de la Polynésie française à l'exception de celles qui font escale sur d'autres points du territoire français ; dispositions prévoyant une procédure de citation des incapables, des cas de dispense de ministère d'avocat et les règles relatives aux procédures d'exécution) et sur sept autres points à la compétence de l'État (recherche et constatation des infractions à la réglementation territoriale en matière de protection des végétaux ; création d'un service d'assistance et de sécurité du territoire chargé d'une mission de police et délivrance des autorisations de port d'arme aux agents de ce service ; création d'un service territorial du travail ; placement des fonds libres des établissements publics territoriaux à caractère industriel et commercial ; mise à la charge des employeurs d'une indemnité créée par le territoire ; création d'un service des relations internationales ; procédure civile tendant à instaurer un délai pour faire l'inventaire d'une succession et procédure de prise à partie des juges).

En matière de procédure consultative administrative de l'article 114, sur les vingt-deux dossiers examinés , le Conseil d'État s'est prononcé à sept reprises dans le sens de la compétence territoriale (mission dévolue en matière d'adoption au service d'aide sociale à l'enfance ; organisation des transports en commun sur l'île de Tahiti sous réserve des compétences reconnues par la loi aux communes ; imputation des dépenses des services de sécurité et d'assistance aux aéronefs des aérodromes territoriaux ; réglementation applicable aux biens culturels maritimes dans le domaine public maritime du territoire ; délimitation des zones à risque et établissement des plans de prévention en matière de risques naturels ; prévention et règlement amiable des difficultés des entreprises à l'exception des principes fondamentaux des obligations commerciales ; réglementation des recours administratifs non contentieux) et par quinze fois dans le sens de la compétence de l'État (mesures de saisie et de destruction opérées par les agents habilités et assermentés du service d'hygiène et de salubrité publique dans le cadre d'une police sanitaire ; fixation du taux d'alcoolémie dans le sang au-delà duquel le conducteur d'un véhicule se trouve en infraction et fixation du taux de l'amende ; création de groupements d'intérêt public dans les domaines de compétence du territoire et en particulier dans le domaine de l'insertion sociale des jeunes ; réglementation des services financiers de l'office des postes et télécommunications ; réglementation de l'aide juridictionnelle en matière civile et administrative et création du service public y afférent ; réglementation applicable aux biens culturels maritimes dans la zone économique contiguë au domaine public maritime du territoire ; réglementation des concentrations économiques ; règles d'immatriculation au registre du commerce, à l'exception de celles applicables aux coopératives et mutuelles ; accès à la qualité de pupille de l'État et règles régissant ce statut ; instauration d'un service public pour l'approvisionnement du territoire en hydrocarbures ; en matière de règlement des difficultés liées au surendettement des ménages, règles de procédure civile applicables à l'instance en cas de saisine du juge de l'exécution et aux voies de recours contre les décisions de celui-ci ; instauration d'un régime de publication d'urgence des actes réglementaires territoriaux ; définition des droits et obligations des transporteurs aériens ; mise en place d'un dispositif de dépistage des substances classées comme stupéfiants en cas d'accidents de la route ; réglementation de l'utilisation des fréquences radioélectriques par des opérateurs de téléphonie mobile).

Le Conseil d'État s'est enfin prononcé en octobre 1999 sur la question des conflits entre les lois et les délibérations de l'assemblée de la Polynésie française occasionnés par les transferts de compétence opérés par la loi organique statutaire : il a affirmé la prééminence de la loi organique et de la loi sur lesdites délibérations à l'exception des lois antérieures à la loi organique et portant sur des matières transférées dans le domaine de compétence du territoire.

Sur ces vingt-deux avis, quatre ont été rendus en 1997, un en 1998, sept en 1999, cinq en 2000, trois en 2001 et deux en 2002 . On constate donc que ces procédures de demande d'avis au Conseil d'État sont très régulièrement utilisées et constituent d'appréciables mécanismes de régulation .

Avec l'aboutissement de la réforme constitutionnelle en cours d'examen, la répartition des compétences devrait être garantie par un nouveau mécanisme. Il résulterait en effet du nouvel article 74 fixant le statut constitutionnel des collectivités d'outre-mer que, pour celles dotées de l'autonomie, la loi organique pourrait déterminer « les conditions dans lesquelles l'assemblée délibérante [pourrait] modifier une loi promulguée postérieurement à l'entrée en vigueur du statut de la collectivité, lorsque le Conseil constitutionnel, saisi notamment par les autorités de la collectivité, a constaté que la loi était intervenue dans le domaine de compétence de cette collectivité ».

2. Les concours financiers de l'État au développement de la Polynésie française

a) La politique contractuelle

Le contrat de développement conclu entre l'État et le territoire de la Polynésie française, signé le 31 octobre 2000, porte sur un montant de 341,49 millions d'euros à parité entre l'État et le territoire, soit une augmentation annuelle de 11,5 % par rapport au contrat précédent. Sa durée est fixée à quatre années correspondant à la période 2000-2003 .

Ce nouveau contrat s'articule autour de quatre axes majeurs :

- promouvoir le développement économique de la Polynésie française en favorisant l'emploi et en améliorant les dispositifs de formation, notamment par une meilleure connaissance des ressources halieutiques et la modernisation des outils de production, par une meilleure qualité en matière d'équipement touristique et la mise en valeur de nouvelles zones en encourageant la création d'entreprises artisanales et de petites industries ;

- aménager le territoire et gérer l'environnement en préservant et en mettant en valeur les ressources naturelles par une meilleure prévention des risques naturels, la réalisation d'études d'assainissement, la collecte et la gestion des déchets, le développement des énergies renouvelables et de l'alimentation en eau potable ;

- réduire les inégalités entre les populations par la réalisation d'équipements scolaires et universitaires, la construction de logements sociaux, la rénovation et la création d'équipements sanitaires, la poursuite des actions de formation et d'insertion et l'aménagement d'équipements sociaux ;

- poursuivre la déconcentration administrative et le développement des archipels .

Pour le financement de ce contrat, les deux principaux ministères contributeurs sont le ministère de l'outre-mer dont la participation s'élève à 68,92 millions d'euros et le ministère de la jeunesse, de l'éducation et de la recherche dont la participation s'élève à 67,7 millions d'euros.

Ce contrat , qui a démarré avec presque une année de retard en raison de sa signature tardive le 31 octobre 2000, était engagé au 31 décembre 2001 à hauteur de 21,4 % , soit 36,54 millions d'euros. S'il n'a pas été possible d'engager toutes les opérations prévues, des avancées significatives ont cependant été réalisées en 2001 en matière d'éducation et de formation, de logement social, d'agriculture, d'adduction d'eau potable et de politique de la ville.

b) La convention pour le développement de l'autonomie économique de la Polynésie française

En vue d'aider à la reconversion de l'économie polynésienne à la suite du démantèlement du Centre d'expérimentation du Pacifique et pour compenser le tarissement des flux financiers corrélatifs, une convention a été signée entre l'État et la Polynésie française le 25 juillet 1996 .

Le mécanisme de compensation financière est le suivant : le Haut-commissaire constate les flux financiers réels après consultation du président du gouvernement de la Polynésie française, à l'aide des chiffres fournis par le commandement supérieur des forces armées en Polynésie française, et le montant de ces flux réels est déduit du montant de la compensation de référence (151 millions d'euros) pour déterminer les sommes attribuées à la Polynésie française.

En 2001, les flux réels ont été constitués par :

- des dépenses effectuées par les forces armées au titre des activités résiduelles liées au Centre d'expérimentation du Pacifique, soit 12,8 millions d'euros contre 23,2 millions d'euros en 2000 ;

- des dépenses du SMA, soit 6,2 millions d'euros ;

- les frais du délégué et notamment les crédits des études de bilan, soit 0,5 million d'euros.

Le solde par rapport au montant de référence de 150,92 millions d'euros qui s'élève à 132 millions d'euros , est ventilé de la façon suivante :

- un versement de nature fiscale au budget de la Polynésie française : la convention garantit un montant de recettes de 33 millions d'euros, valeur 1996 indexée, soit environ 35,04 millions d'euros pour 2001 à verser à la Polynésie française ;

- un versement de la somme restante au fonds pour la reconversion économique de la Polynésie française, soit 96,37 millions d'euros. Cette dotation est inscrite au budget du ministère de la Défense, au chapitre 66-50.

Les années précédentes, les dotations attribuées au fonds ont été successivement de 1,6 million d'euros pour 1996, 23,934 millions d'euros pour 1997, 57,32 millions d'euros pour 1998, 82,93 millions d'euros pour 1999 et 86 millions d'euros pour l'année 2000.

Les décisions d'affectation des aides du fonds pour la reconversion économique de la Polynésie française sont prises par le comité de gestion État-territoire . Celui-ci ne s'est pas réuni en 2000, ni au premier semestre 2001 du fait de difficultés à conclure des discussions engagées entre l'État et le territoire puis de l'absence de délégué. Un nouveau délégué a pu être désigné en août 2001 par le haut-commissaire et le président du gouvernement de la Polynésie française et le comité de gestion a dès lors pu retrouver un fonctionnement normal en se réunissant à trois reprises en 2001 .

Quinze décisions de financement ont été prises pour un montant de 120 millions d'euros et des paiements ont été effectués pour 78,86 millions d'euros.

Les décisions de financement sur l'exercice 2001 se répartissent de la façon suivante : 33,6 millions d'euros pour l'aide au logement, 8,4 millions d'euros pour les aides à l'emploi, 9,6 millions d'euros pour les infrastructures routières et portuaires, 15,6 millions d'euros pour les aides aux entreprises, 1,9 million d'euros pour l'aide aux communes, 43,2 millions d'euros pour l'aide à l'achat d'un Airbus par Air Tahiti nui et 7,8 millions d'euros pour l'aide aux technologies de l'information et de la télécommunication. A ceci s'est ajouté un remboursement d'avances faites par le territoire pendant les trois premières années où les dotations du fonds ne permettaient pas de couvrir les programmes prioritaires en matière de logement social et d'aides à l'emploi, soit 16,77 millions d'euros. Le comité de gestion du fonds pour la reconversion économique de la Polynésie française a également décidé d'affecter 3 millions d'euros au financement d'études de deux projets de grands travaux sur l'île de Tahiti concernant respectivement l'aménagement du port de Faratea et d'une nouvelle liaison routière entre Papeete et la presqu'île, afin de contribuer au désenclavement de celle-ci. Il a enfin donné un avis favorable à la participation du fonds à l'achat par le territoire d'un avion Twin-Otter destiné à la desserte des îles Marquises.

Depuis la mise en place du fonds et jusqu'au 31 décembre 2001 , les engagements s'élèvent à 318 millions d'euros et les paiements à 175,78 millions d'euros, soit 55,3 % des engagements. Ce fonds a permis :

- la construction d'importants programmes de logements, dont le nombre dépasse à ce jour 1500 ;

- la mise en place d'aides à l'emploi qui ont permis d'éviter des fermetures d'établissements lors des chocs conjoncturels (reprise des essais nucléaires, crise asiatique, attentat du 11 septembre) dans le secteur touristique et d'instaurer des dispositifs contractuels adaptés pour permettre à des chômeurs potentiels d'exercer une activité ;

- l'émergence de la compagnie Air Tahiti nui comme compagnie de desserte internationale en lui permettant d'acquérir dans de bonnes conditions un appareil pour compléter sa flotte ;

- la réalisation d'équipements d'infrastructures (port et aménagement d'Uturoa à Raiatea, travaux routiers à Tahiti, routes aux Marquises ...) ;

- l'aide au développement de la pêche hauturière ;

- l'aide à des programmes communaux d'assainissement, comme à Bora-Bora, ou d'adduction d'eau, comme à Hao.

Depuis le 4 octobre 2002 , une nouvelle convention a été signée par le Premier ministre et le président du gouvernement de la Polynésie française, qui se substitue aux mécanismes mis en place en 1996 à compter du 1 er janvier 2003 . Cette convention pérennise le fonds pour la reconversion économique de la Polynésie française (FREPF) doté de 150,92 millions d'euros par an . Cette dotation ne fait plus l'objet de prélèvements et est désormais intégralement versée sur la section d'investissement du budget de la Polynésie française . La Polynésie française communique chaque année à l'Etat un programme d'investissements auquel est affectée la dotation globale de développement économique. Le contrôle a posteriori est mis en oeuvre sous l'égide essentiellement de la chambre territoriale des comptes qui sera destinataire de l'ensemble des pièces afférentes aux travaux réalisés.

3. L'évolution de la délinquance et la situation des établissements pénitentiaires

a) L'évolution de la délinquance

Avec 8.314 faits constatés par les services de police et de gendarmerie en 2001, le mouvement de baisse de la délinquance enregistré depuis 1997 marque le pas . La délinquance a ainsi globalement progressé l'an dernier de 2,85 % (+ 22,93 % en zone de compétence police, c'est-à-dire l'agglomération de Papeete ; - 7,27 % en zone de compétence gendarmerie). Le taux d'élucidation est élevé , oscillant depuis 1996 entre 43 % et 58 %.

Le taux de criminalité en Polynésie française est de 38,11 %o, contre 68,8 %o au plan national, 57,45 %o dans les départements d'outre-mer et 46 %o en Nouvelle-Calédonie.

L'évolution du nombre de crimes et délits constatés à la fois par les services de police et de gendarmerie depuis 1996 , date à partir de laquelle la gendarmerie nationale dispose de statistiques, est la suivante :


 

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Faits constatés par la police

3551

3441

2849

2780

2708

3329

Faits élucidés par la police

932

748

612

806

513

682

Faits constatés par la gendarmerie

6396

6693

6619

5959

5376

4985

Faits élucidés par la gendarmerie

4160

3852

4878

4257

3612

2914

Total des faits constatés

9947

10134

9468

8739

8084

8314

Total des faits élucidés

5092

4600

5490

5063

4125

3596

Sur la décennie 1991-2000 , les crimes et délits constatés en Polynésie française par la police nationale ont augmenté de 40 % . Un sommet a été atteint en 1995, année à compter de laquelle le nombre de faits constatés n'a cessé de régresser, la plus forte baisse annuelle ayant été enregistrée en 1998.

Avec 3329 crimes et délits constatés par les services de police en 2001 contre 2708 l'année précédente, la délinquance en zone police , soit l'agglomération de Papeete, enregistre une hausse brutale de 22,93 %.

La grande criminalité ou la criminalité organisée demeure quasi inexistante ; les infractions les plus courantes restent majoritairement liées aux délits d'appropriation, aux affaires de stupéfiants et aux atteintes aux personnes. On assiste à une importante augmentation des vols avec violence (+ 126,47 %). La totalité de la délinquance de voie publique (cambriolages, toutes catégories de vols) est nettement haussière, en particulier les vols à la roulotte (+ 60,11 %). Les infractions à la législation sur les stupéfiants représentent près de 9 % de l'ensemble des faits constatés en 2001 : les opérations de recherche de plantations de cannabis dans les différents archipels ont conduit à la destruction de plus de 35.000 pieds et de près de 22 kg de feuilles séchées.

Evolution de la délinquance et de la criminalité constatées par la police nationale dans sa zone de compétence (Papeete) sur la période 1991-2001

 

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Total des faits constatés

1935

2015

2647

3026

3586

3551

3441

2849

2780

2708

3329

Délinquance de voie publique

1036

1174

1769

1826

2098

2224

1775

1278

1056

1048

1803

Nombre de personnes mises en cause

400

430

687

733

869

906

750

642

757

525

809

Nombre de mineurs mis en cause

60

90

151

96

150

90

104

102

94

89

201

Évolution du nombre de délinquants sur la période 1991-2001



Concernant la délinquance des mineurs , le nombre de mises en cause est en forte augmentation : 201 en 2001 contre 89 en 2000, soit une progression de 126 %. La proportion de mineurs dans l'ensemble des personnes mises en cause est passée de 17 % à 25 %, dépassant celle enregistrée en métropole (21,18 %). Cependant, aucun cas de délinquance de mineur de 13 ans n'a été constaté à ce jour.

En matière de toxicomanie, les mineurs consommateurs ont en moyenne 14 ans et sont à 75 % des garçons. Les mineurs sont également touchés par la délinquance en qualité de victime, notamment dans les affaires de moeurs : ainsi, en 2000 et 2001, la gendarmerie a constaté une hausse de 41,37 % des viols sur mineurs.

b) La situation des établissements pénitentiaires

Concernant les établissements pénitentiaires , ils sont au nombre de trois en Polynésie française : le centre pénitentiaire de Faa'a Nuutania dont la construction remonte à 1972, la maison d'arrêt de Taiohae à Nuku Hiva, dans l'archipel des Marquises, et la maison d'arrêt d'Uturoa à Raiatea, aux Iles Sous-le-Vent.

La population carcérale s'élevait au 1 er juillet 2002 à 254 détenus pour 149 places disponibles, soit à cette dernière date un taux de surpopulation de 170,5 %.

Les effectifs de détenus sont répartis de la façon suivante entre les différents établissements pénitentiaires :


Établissement

Capacité mise en service

Effectifs
de détenus

Densité
carcérale

Centre pénitentiaire de Faa'a Nuutania

126

244

193,7 %

Maison d'arrêt de Taiohahe (Iles Marquises)

3

3

100 %

Maison d'arrêt d'Uturoa (Raiatea)

20

7

35 %

Ensemble de la Polynésie française

149

254

170,5 %

Concernant l'amélioration des équipements , une mission technique pénitentiaire diligentée fin mai 1999 a élaboré un schéma directeur pluriannuel de restructuration et de rénovation de ces établissements et en particulier du centre pénitentiaire de Faa'a Nuutania.

Le coût total de ce programme pluriannuel est estimé à 5,35 millions d'euros. Une première tranche de travaux au cours de l'exercice 2000 a permis la rénovation des cuisines et la réfection des circuits de distribution des fluides pour une somme de 1,05 million d'euros. Une deuxième tranche, inscrite au programme d'équipement 2001 pour un montant de 762.245 euros, concerne la construction d'un ouvrage de franchissement d'une rivière et la réalisation d'une station d'épuration. La poursuite de ces travaux est inscrite au programme d'équipement 2002 pour un montant de 369.000 euros. En outre, des études sont en cours pour procéder à l'extension du centre pénitentiaire de Faa'a Nuutania.

Les effectifs des personnels pénitentiaires en fonction au 1 er janvier 2002 se répartissent de la façon suivante : 1 agent de direction, 4 agents administratifs, 9 agents socio-éducatifs, 5 agents techniques et 78 agents de surveillance, soit un effectif total de 97 agents titulaires .

Il demeure en outre au centre pénitentiaire de Faa'a Nuutania 14 agents non fonctionnaires de l'administration pénitentiaire qui n'ont pu bénéficier d'une intégration dans les corps d'État des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire en raison de leur échec à l'examen professionnel organisé en application de la loi n° 94-443 du 3 juin 1994. Pour permettre leur maintien dans les services pénitentiaires, une convention avait été conclue le 30 décembre 1999 avec le président du gouvernement de la Polynésie française en vue de la prise en charge de leurs rémunérations par le budget du ministère de la justice sous la forme d'une su bvention allouée au territoire. Cependant, une disposition a été inscrite dans la loi d'orientation et de programmation pour la justice habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures d'extension à l'outre-mer et, notamment, les dispositions fixant les modalités d'intégration de ces agents (3° du I de l'article 68 de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002).

Enfin, 15 élèves-surveillants ont été recrutés en mars 2002 par un concours organisé localement pour renforcer les effectifs du centre.

c) Les moyens et l'activité des juridictions
(1) Les juridictions judiciaires

L' organisation de la justice judiciaire en Polynésie française repose sur une cour d'appel dont les bâtiments situés à Papeete abritent également le tribunal de première instance (TPI). Ce tribunal est pourvu de deux sections situées respectivement à Uturoa (île de Raiatea aux îles Sous-le-Vent) depuis la fin du siècle dernier et à Taihoae (île de Nuku-Hiva aux Marquises) depuis 1981. Les archipels des Tuamotu, des Gambier et des Australes ne disposent pas de section détachée et la justice y est rendue par des formations foraines.

Le montant de la dotation de fonctionnement est passé de 971.835 € en 1998 à 1.015.176 € pour 2002, soit une progression de près de 4,5 % sur cinq ans.

En outre, depuis 1999, ces juridictions ont bénéficié de mesures de modernisation s'inscrivant dans le cadre d'actions nationales ou de projets d'initiative locale. Ainsi, après avoir délégué en 1999 plus de 4.650 € pour l'acquisition de matériels audiovisuels numériques à la cour d'appel de Papeete pour l'enregistrement des mineurs victimes d'infractions sexuelles en application de la loi du 17 juin 1998, la mission modernisation a financé en 2000 pour un montant de plus de 43.753 € la création d'un centre de documentation informatisé. En 2001, elle a financé l'acquisition de six stations de travail pour les magistrats se déplaçant dans les archipels pour un coût de plus de 22.923 €.

Au 1 er août 2001, l'effectif réel des juridictions judiciaires se répartit de la façon suivante : 30 magistrats (au lieu de 32 pour l'effectif budgétaire) et 78 fonctionnaires (au lieu de 85 pour l'effectif budgétaire) dont 28 greffiers et 4 greffiers en chef, soit un total de 108 personnes (pour 117 postes budgétaires). Ajoutons que 3 interprètes assurent l'interprétariat lors des audiences civiles et pénales de la cour et du tribunal.

Concernant l'évolution du contentieux , les statistiques permettent de constater un tassement en 2001 du nombre des affaires civiles et commerciales portées tant devant le tribunal de première instance (753 en 2001 contre 813 en 2000) que devant la cour d'appel (460 au lieu de 557 en 2000) et en revanche une augmentation sensible du nombre des arrêts rendus en matière criminelle et correctionnelle devant cette même cour. Après une stagnation depuis 1997, le nombre d'arrêts d'assises est ainsi passé de 49 en 2000 à 64 en 2001.

Dans son discours d'audience solennelle pour 2002, le premier président de la cour d'appel observe que si le stock des affaires civiles varie peu, le délai de traitement de ces affaires lorsqu'elles sont en état étant de deux mois, la situation en matière pénale est préoccupante, les affaires en attente représentant quelque quinze mois d'audiences (250 affaires en stock en janvier) ce qui est peu compatible avec la notion de délai de jugement raisonnable.

Notons qu'en matière civile, le contentieux le plus lourd est celui relatif aux problèmes de terres qui trouve son origine dans la possession coutumière des terres d'avant la colonisation. La colonisation a en effet initié une appropriation individuelle des terres et les Polynésiens ont dû faire reconnaître leurs droits sur des terres occupées et appropriées selon un système traditionnel en appliquant la norme juridique métropolitaine. Cela s'est traduit par la constatation de très nombreuses situations d'indivision, le juge ayant à rétablir des généalogies entières pour pouvoir procéder à des partages le plus souvent contestés. La commission de conciliation en matière foncière sert de filtre aux nombreuses procédures qui s'engagent : elle a été saisie en 2001 de 441 nouvelles requêtes en matière de sortie d'indivision, de reconnaissance de propriété immobilière, de bornage et de tracé de servitudes immobilières. Comme le souligne le président du tribunal de Papeete dans son discours d'audience solennelle de janvier 2002, le « flux grandissant des demandes portées devant cette commission s'explique certainement par la procédure simplifiée de saisine, mais aussi et surtout par la situation endémique et persistante depuis des décennies de la propriété immobilière caractérisée en Polynésie par l'existence d'indivisions vieilles de plusieurs générations, par l'absence de cadastre à jour dans de nombreuses îles, par la précarité de certaines décisions de justice remises régulièrement en cause par la voie de la tierce opposition, par des pratiques notariales anciennes, sources de contentieux, telles que les ventes de droits indivis en proportion indéterminée ou les notoriétés prescriptives que les notaires délivraient comme titre de propriété en se contentant de témoignages aléatoires, par l'existence d'un nombre important et non déterminé de terres sans acte de revendication originel et présumées domaniales mais en réalité occupées par des familles qui en revendiquent la propriété ancestrale sans pouvoir justifier ni d'un titre, ni de la prescription acquisitive, puisque les biens du domaine public ne sont pas susceptibles de prescription ».

En dehors de l'activité contentieuse, il convient de souligner que 2001 a vu aboutir un travail de cinq années réalisé par une commission spéciale chargée d'élaborer un nouveau code de procédure civile . Celui-ci a été adopté par l'assemblée de la Polynésie française le 4 décembre 2001 et est entré en vigueur le 1 er mars 2002 .

(2) La juridiction administrative

Concernant la juridiction administrative, comme l'an passé, aucune information relative à l'activité contentieuse n'a été transmise à votre rapporteur si ce n'est sous une forme globale pour l'ensemble de l'outre-mer français . Cela semble paradoxal à l'heure où chaque nouveau texte relatif aux collectivités d'outre-mer s'emploie à individualiser chaque situation et à faire du « cousu main » ! La seule information fournie concernant le tribunal administratif de Papeete est le nombre de magistrats (5) et le nombre de fonctionnaires (6) qui y sont affectés.

Grâce aux informations communiquées directement par le président du tribunal administratif, votre rapporteur est cependant en mesure de fournir quelques éléments sur les moyens et l'activité de cette juridiction.

Observant que les locaux de la juridiction sont en cours d'extension, que l'informatisation est pratiquement achevée et que l'effectif des magistrats vient d'être abondé d'une unité ainsi que l'effectif du greffe, il considère que la situation des moyens humains, immobiliers et techniques est désormais normalisée mais souligne le caractère préoccupant de la situation budgétaire.

L'évolution de l'activité du tribunal administratif de Papeete montre une nette progression au cours des deux dernières années :


 

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Affaires nouvelles

350

267

396

439

331

397

535

412

630

903

Jugements

380

317

326

428

312

340

471

485

571

820

Stock

180

113

177

170

197

254

326

283

457

619

On constate une forte augmentation du nombre d'affaires nouvelles (il a plus que doublé en deux ans) et du nombre d'affaires traitées en progression de près de 70 %. En dépit des efforts déployés par la juridiction, l'arriéré de dossiers en stock a brutalement augmenté (+ 119 % sur la même période).

Notons que le contentieux des actes concerne majoritairement des actes pris par le territoire (69 %), des actes de l'Etat dans 29 % des cas et, à titre résiduel, des actes émanant des communes (2 %).

(3) La juridiction financière

Concernant enfin la juridiction financière , rappelons que sa création a été décidée, sur une initiative sénatoriale , par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie qui a abrogé les dispositions du code des juridictions financières prévoyant que les chambres territoriales des comptes de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française pouvaient être présidées par le même président et dotées des mêmes assesseurs.

La chambre est entrée dans ses locaux en mai 2000 et l'arrivée du personnel administratif (greffier, assistants de vérification, agents) s'est faite progressivement jusqu'à la fin de l'année 2000 si bien qu'aucun jugement, avis ou observations définitives n'ont été rendus cette année-là.

Le nombre total de collectivités, établissements et organismes publics concernés par les contrôles effectués en 2001 est de 117 . Ils ont concerné 48 communes, 21 établissements publics territoriaux, 11 syndicats intercommunaux et syndicats mixtes, 1 établissement public territorial du secteur sanitaire et social, 1 établissement public territorial du secteur construction-logement et 33 établissements publics territoriaux du secteur enseignement dont 9 lycées et 22 collèges.

La chambre territoriale des comptes a prononcé 22 jugements , dont 19 premiers jugements concernant quinze communes, deux syndicats et deux établissements publics. Au total, 9 lettres d'observations provisoires ont été adressées dont sept à des communes, une à un syndicat et une à un établissement public territorial du secteur de l'enseignement. Enfin, 3 lettres du commissaire du Gouvernement ont été respectivement adressées à une commune, un syndicat et un établissement public territorial.

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