Avis n° 74 (2003-2004) de M. Philippe NACHBAR , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 20 novembre 2003

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N° 74

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 2003

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 2004 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME I

CULTURE

Par M. Philippe NACHBAR,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Ambroise Dupont, Pierre Laffitte, Jacques Legendre, Mme Danièle Pourtaud, MM. Ivan Renar, Philippe Richert, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Philippe Nogrix, Jean-François Picheral, secrétaires ; M. François Autain, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Jean-Louis Carrère, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Fernand Demilly, Christian Demuynck, Jacques Dominati, Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Daniel Eckenspieller, Mme Françoise Férat, MM. Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Marcel Henry, Jean-François Humbert, André Labarrère, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Serge Lepeltier, Mme Brigitte Luypaert, MM. Pierre Martin, Jean-Luc Miraux, Dominique Mortemousque, Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jacques Pelletier, Jack Ralite, Victor Reux, René-Pierre Signé, Michel Thiollière, Jean-Marc Todeschini, Jean-Marie Vanlerenberghe, André Vallet, Marcel Vidal, Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 1093 , 1110 à 1115 et T.A. 195

Sénat : 72 et 73 (annexe n° 6 ) (2003-2004)

Lois de finances .

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le budget du ministère de la culture et de la communication doit répondre à une double exigence -paradoxale dans ses termes- qui consiste à la fois à assurer dans de bonnes conditions le fonctionnement des institutions, de plus en plus nombreuses, qui relèvent de sa tutelle ou qu'il subventionne, et à renouveler les instruments dont l'Etat dispose pour conduire une politique culturelle ambitieuse.

La résolution de cette équation délicate, qui oppose la dynamique de l'action et la rigidité d'un budget grevé par des dépenses reconductibles, sera rendue plus aisée en 2004 grâce à une progression significative des dotations affectées à la culture.

En effet, le projet de loi de finances prévoit une augmentation de 5,79 % de ces dotations, qui s'élèveront à 2 632,70 millions d'euros.

S'il saluera la volonté du Gouvernement de conserver à l'action culturelle de l'Etat son caractère prioritaire -particulièrement méritoire dans un contexte budgétaire fortement contraint-, votre rapporteur se félicitera également de l'esprit de réforme qui inspire les priorités affichées par le ministère.

En effet, dans des domaines aussi variés que le spectacle vivant, dont les équilibres ont été profondément affectés par la réforme du régime de l'intermittence ou que le patrimoine monumental, secteur dans lequel les besoins sont considérables, les défis auxquels doit répondre le ministère exigent une adaptation des moyens d'intervention de l'Etat.

C'est au regard de cette impérieuse nécessité que votre rapporteur a analysé le projet de budget de la culture pour 2004.

I. LE PROJET DE BUDGET POUR 2004 : DES CAPACITÉS D'ACTION RENFORCÉES

A. LA PROGRESSION DES DOTATIONS

1. Des capacités d'action restaurées

• L'évolution générale des dotations

Le budget du ministère de la culture et de la communication s'élève en 2004 à 2 632,70 millions d'euros, contre 2 488, 71 millions d'euros en 2003, en progression de 5,79 %.

Ces chiffres soulignent la volonté du Gouvernement de conduire une politique ambitieuse dans le domaine de la culture dans un contexte budgétaire contraint. On rappellera que les dépenses de l'Etat progressent en 2004 de 1,5 %, soit une augmentation égale à l'inflation prévisionnelle.

Le projet de loi de finances marque également le souci de reconstituer les capacités d'engagement du ministère après un réajustement des dotations en 2003, qui s'était traduit par la suppression d'une réserve de crédits de paiement non consommés.

Les craintes suscitées l'an dernier par cette « opération vérité » sur le risque d'un repli durable du budget de la culture se révèlent donc infondées.

• Les différentes catégories de dépenses

Le tableau ci-après retrace l'évolution du budget de la culture par catégorie de dépenses entre la loi de finances initiale pour 2003 et le projet de loi de finances pour 2004.

ÉVOLUTION DU BUDGET DE LA CULTURE
ENTRE LA LOI DE FINANCES POUR 2003 ET LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2004

En millions d'euros

LFI 2003

PLF 2004

Variation en montant 2004/2003

Variation 2004/2003 en %

Variation 2004/2003 en  % à structure constante

Moyens des services

1 309,93

1 391,97

82,04

6,26 %

1,42 %

Personnel

534,78

526,76

- 8,01

- 1,50 %

0,44 %

Fonctionnement des services

102,73

89,59

- 13,15

- 12,80 %

2,86 %

Expérimentation LOLF (DRAC Rhône-Alpes)

0,00

61,94

61,94

ns

ns

Travaux d'entretien

24,46

23,90

- 0,56

- 2,27 %

0,36 %

Subventions de fonctionnement aux établissements publics

647,96

689,78

41,81

6,45 %

2,05 %

Interventions

860,62

817,84

- 42,78

- 4,97 %

2,14 %

Dotation générale de décentralisation

161,62

165,06

3,44

2,13 %

2,13 %

Intervention des administrations

211,99

203,04

- 8,94

- 4,22 %

2,42 %

Interventions déconcentrées

446,13

409,63

- 36,49

- 8,18 %

2,15 %

Commandes artistiques et achats d'oeuvres d'art

40,88

40,09

- 0,79

- 1,92 %

0,73 %

Dépenses en capital

318,16

422,89

104,74

32,92 %

33,99 %

Investissements exécutés par l'Etat

55,02

203,91

148,89

###,##

281,91 %

Subventions d'investissement accordées par l'Etat

263,14

218,98

- 44,16

- 16,78 %

- 17,85 %

Dont subventions d'équipement courant aux établissements publics

57,95

76,24

18,29

31,57 %

26,40 %

TOTAL

2 488,71

2 632,70

144,00

5,79 %

5,84 %

(Source : ministère de la culture)

L'évolution contrastée des différentes catégories de dépenses reflète l'effort engagé pour reconstituer le « stock » des crédits de paiement après la remise en ordre de la présentation des enveloppes effectuée en 2003.

* La progression des crédits du titre III (+ 82 millions d'euros) s'élève à 6,25 % .

Ce gonflement des moyens des services est pour une large part optique sous l'effet d'un double transfert de crédits du titre IV vers le titre III lié, d'une part, à la création de nouveaux établissements publics (Cité de l'architecture et du patrimoine) et, d'autre part, à l'expérimentation conduite en région Rhône-Alpes, dans le cadre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

Cette expérimentation destinée à appliquer les mécanismes budgétaires et les règles de gestion résultant de la loi organique imposent, en effet, la création d'une nomenclature spécifique au sein du titre III, destinée à accueillir l'ensemble des dépenses ordinaires gérées au niveau déconcentré par la direction régionale des affaires culturelles de Rhône-Alpes.

Le principal avantage attendu de ces règles consiste dans la souplesse de gestion qui résulte de la répartition des dotations par objectifs et de la possibilité -connue sous le nom barbare de « fongibilité asymétrique »- d'abonder les crédits de fonctionnement et d'intervention grâce aux crédits de personnels.

A cette fin, et comme ce sera le cas pour l'ensemble du ministère à partir du 1 er janvier 2006, les crédits de la DRAC Rhône-Alpes ont été répartis entre les trois programmes destinés à l'avenir à structurer le budget du ministère : connaissance, préservation, enrichissement et promotion des patrimoines ; développement et diffusion de la création ; transmission des savoirs et démocratisation de la culture.

Les crédits consacrés à cette expérimentation s'élèvent à 61,93 millions d'euros, dont 50,6 millions d'euros transférés du titre IV.

Si l'on excepte ces transferts, les moyens des services n'augmentent que de 1,42 % à structure constante.

Cette progression résulte principalement de l'augmentation des subventions de fonctionnement versées aux établissements publics relevant de la tutelle du ministère de la culture et de la communication et des moyens de fonctionnement des services, qui atteint respectivement 2,05 % et 2,86 % à structure constante. En effet, les dépenses de personnel sont stables sous l'effet des mesures prises par le ministère pour maîtriser ses effectifs.

* A structure constante, les dépenses d'intervention (titre IV) progressent de 2,14 % pour s'établir à 817,84 millions d'euros.

Le projet de budget pour 2004 marque à l'évidence un infléchissement par rapport aux précédents exercices caractérisés par une forte progression de ces dépenses.

Les mesures nouvelles, qui représentent 18,4 millions d'euros, bénéficieront principalement à la direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (12,56 millions d'euros) et dans une moindre mesure, à la direction de l'architecture et du patrimoine (4,34 millions d'euros) et à la direction du livre et de la lecture (2,31 millions d'euros).

* Les dépenses d'investissement inscrites au titre V (investissements exécutés par l'Etat) et au titre VI (subventions d'investissement accordées par l'Etat) s'élèvent en crédits de paiement à 422,89 millions d'euros , en progression de 33,59 % par rapport à l'exercice précédent .

Cette forte augmentation constitue la contrepartie de la résorption en 2003 des crédits de paiement non consommés à hauteur de 40,35 % de leur montant total.

En ce qui concerne le titre V, les crédits de paiement s'établissent en 2003 à 203,91 millions d'euros, en progression de 281,91 % par rapport à 2003, mais en recul de 11,46 % par rapport à 2002.

S'agissant du titre VI, les crédits de paiement s'élèvent en 2003 à 218,98 millions d'euros, en recul de 17,85 % à structure constante par rapport à 2003, et de 22,18 % par rapport à 2002.

Traduisant la préservation des capacités d'investissement du ministère, les autorisations de programme demeurent à leur niveau de 2002 et de 2003, soit 567,20 millions d'euros.

Cette stabilité recouvre toutefois une évolution contrastée des investissements de l'Etat, qui diminuent significativement (- 8,53 %) pour atteindre 265,81 millions d'euros, et des subventions d'investissement, qui progressent de 9,98 % atteignant 301,38 millions d'euros.

Au regard de cette brève analyse, il apparaît que les marges de manoeuvre dégagées en 2003 à la faveur d'une diminution des crédits d'investissement réputés excédentaires ont permis d'accroître les moyens d'intervention de l'Etat dans des proportions qui ne peuvent être atteintes cette année où il convient d'augmenter les dotations des titres V et VI indispensables au ministère pour faire face à ses engagements, engagements dont le volume n'a pas au demeurant varié au cours des deux derniers exercices.

Les dividendes de l'« opération vérité » ne pouvant être perçus deux fois, les marges de manoeuvre dont disposera le ministère en 2004 résulteront, d'une part, des conditions dans lesquelles sont exécutées les lois de finances afin d'assurer au mieux la mobilisation des crédits votés et, d'autre part, des redéploiements qui pourront être effectués afin d'atténuer la rigidité d'un budget dont près de 50 % des dotations sont constituées par des dépenses de personnel et les subventions aux établissements publics et, donc, de fait intangibles.

2. Une exécution satisfaisante du budget

La loi de finances pour 2003 traduisait la volonté de rompre avec une tradition d'affichage qui conduisait le ministère de la culture à présenter des budgets flatteurs qu'il n'était pas capable en pratique de dépenser.

On rappellera que cette incapacité chronique à consommer les crédits votés par le Parlement avait eu tendance à s'accentuer dans les années récentes. En effet, sur la période 1999-2001, l'écart entre, d'une part, les dépenses nettes et, d'autre part, les crédits votés et les crédits ouverts s'était sensiblement accru ; ainsi, alors que sur cette période, les crédits votés en loi de finances initiale progressaient de 6,4 % et les crédits ouverts, de 9,9 %, les dépenses réelles n'augmentaient que de 2,5 %.

Ce phénomène était particulièrement sensible pour les dépenses d'investissement. En effet, entre 1998 et 2001, le taux de consommation des crédits de paiement avait fortement diminué, passant de 82 % en 1998 à 57,2 % en 2001.

L'analyse du budget comme au demeurant l'évaluation même des besoins du ministère s'en trouvait faussée. Par ailleurs, le surdimensionnement des enveloppes conduisait invariablement en cours d'année à des mesures de régulation budgétaire, mesures d'autant plus faciles à faire accepter que le ministère disposait en quelque sorte d'un « matelas » lui permettant d'en atténuer les effets sur le volume des crédits exécutés.

En adoptant une présentation plus sincère du budget en 2003, il convenait donc parallèlement d'améliorer la gestion des crédits, notamment pour ceux affectés à l'investissement, et, d'autre part, de mettre un terme à la tradition des annulations en cours d'exercice.

Un effort de dynamisation de la dépense a été entrepris afin de permettre une utilisation plus rapide des crédits et donc la consommation effective d'une plus grande partie des crédits votés. Cet effort, engagé dès 2002, se manifeste dans les conditions d'exécution du budget 2003, qui fait apparaître une amélioration significative du taux de consommation des crédits.

En 2003, d'après les informations communiquées par le ministère, il est anticipé une consommation des crédits portant sur 2 560 millions d'euros, contre 2 400 millions d'euros en 2002. L'effort de gestion a donc permis une progression effective de 6,6 % du budget de la culture alors que la loi de finances pour 2003 prévoyait une diminution de 4,7 % de ses crédits.

Cette amélioration des conditions d'exécution des crédits est particulièrement sensible pour les dépenses d'investissement des titres V et VI.

Ces résultats tiennent à un meilleur suivi de la dépense, action qui passe notamment par un contrôle étroit du taux de consommation des crédits grâce à des réunions trimestrielles associant les directions d'administration centrale et qui sera facilité en 2004 par la fixation aux services centraux et déconcentrés d'objectifs de consommation en termes de taux d'affectation et d'engagement des autorisations de programme.

Le graphique ci-dessous permet de mesurer le resserrement significatif de l'écart entre crédits ouverts et crédits consommés en dépenses ordinaires et crédits de paiement entre 1997 et 2003.

Au-delà de cet effort accompli pour dynamiser la gestion des crédits, le ministère de la culture n'a eu à supporter aucune mesure d'annulation budgétaire en 2003 .

Ce traitement favorable résulte de l'engagement pris par le ministère de la culture, en contrepartie de la garantie du ministère de l'économie et des finances de l'exempter de toute annulation nette, de ne pas demander d'ouverture nette en cas d'apparition en cours d'année de besoins nouveaux et donc de financer par redéploiements les dépenses imprévues.

Cette logique « d'auto assurance » pour reprendre le terme utilisé par les services a conduit le ministère à financer par de tels redéploiements les besoins nés du déficit de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) et de l'annulation des festivals d'été à la suite de la crise provoquée par l'accord du 26 juin dernier relatif au régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle.

Ces redéploiements devraient se traduire par des mouvements de crédits des titres V et VI, où subsiste un volume de crédits non consommés, vers les titres III et IV dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2003.

Il convient toutefois de souligner que, si le ministère de la culture n'a fait l'objet d'aucune annulation, la régulation budgétaire s'est traduite par des mesures de gel de crédits, qui ont été levées en contrepartie d'un engagement de reports sur l'exercice 2004.

Deux séries de mesures ont été prises.

Une mise en réserve a été notifiée le 3 février dernier, afin de permettre au Gouvernement de faire face aux différents aléas de gestion, de respecter ses engagements vis-à-vis du Parlement et de répondre à des besoins nouveaux.

Le tableau ci-dessous indique la ventilation par chapitre de ces mesures.

(en euros)

Chapitre

Crédits mis en réserve

34-97

6 930 000

34-98

4 980 000

35-20

4 650 000

36-60

20 960 000

43-20

27 960 000

43-30

59 010 000

43-92

8 140 000

TOTAL

132 630 000

Sur les 132 millions d'euros mis ainsi en réserve, un montant de 69 millions d'euros a été dégelé en août par le ministère de l'économie et des finances : 19,52 millions d'euros pour le titre III et 49,48 millions d'euros sur le titre IV.

Par ailleurs, la mise en réserve intervenue en avril des crédits reportés de l'exercice 2002 sur les titres III et IV a été levée en contrepartie d'un engagement de report sur l'année 2004 d'un même montant, soit 222 millions d'euros, ce qui représente 8,89 % des crédits inscrits au budget du ministère par la loi de finances pour 2003.

Enfin, le solde des crédits gelés a été transformé en octobre en objectifs de reports.

B. LA POURSUITE DE LA MODERNISATION DU MINISTÈRE

Comme l'a souligné le ministre de la culture et de la communication devant votre commission le 22 octobre dernier lors de son audition sur le projet de loi de finances, la croissance du budget de la culture pour 2004, qui intervient dans un contexte de stabilisation de la dépense publique, exige que « le ministère de la culture s'associe pleinement à l'effort de réforme et d'efficacité conduit par le Gouvernement ».

1. Dégager des marges de manoeuvre

• Un objectif salutaire

Dans le contexte budgétaire actuel, l'augmentation des dotations ne peut constituer le seul moyen de financer des actions nouvelles. L'objectif affiché par le Gouvernement de respecter la norme « zéro volume » pour déterminer l'évolution de la dépense publique exige que soient dégagées des marges de manoeuvre dans le cadre des dotations existantes grâce à un effort de redéploiement.

C'est pourquoi le ministère de la culture et de la communication a demandé à chaque direction de réaliser un redéploiement de 10 % de ses crédits d'intervention d'ici 2006.

Cet objectif suppose que soit systématiquement réalisée l'évaluation des actions entreprises. Certes, la mise en oeuvre des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances devrait permettre de réaliser des progrès en ce sens. Cependant, au-delà, il est évident que les services du ministère doivent accomplir un effort pour définir des procédures permettant d'apprécier l'efficacité de leurs interventions. Cela exige notamment que puisse être amélioré le suivi des dépenses déconcentrées, qui représentent désormais 66 % des crédits d'intervention proprement dits, que l'on rompe avec une logique de guichet, qui prévaut souvent dans l'attribution des subventions, mais également que soient élaborés, dès que cela est possible, des indicateurs de performance, à l'image, par exemple, de ceux à l'établissement desquels travaille la direction des musées de France.

• Les redéploiements mis en oeuvre en 2003 et 2004

* Les mesures prises par les services en 2003

Votre rapporteur s'est intéressé plus spécifiquement aux mesures prises par deux directions en 2003 pour procéder à une réallocation des enveloppes qui leur sont attribuées par la loi de finances. Les données recueillies soulignent l'ampleur de l'effort à accomplir pour mettre en oeuvre l'objectif poursuivi par le ministre.

- La délégation aux arts plastiques

Sur les 120,77 millions d'euros de crédits d'intervention qui lui ont été affectés en 2002 et 2003, la délégation aux arts plastiques a redéployé un montant de 789 000 euros. Sur cette enveloppe, outre des mesures liées à la déconcentration ou à la « reconcentration » de certains crédits, les redéploiements effectifs liés à des infléchissements dans les actions conduites s'élèvent à 517 000 euros.

On notera toutefois avec satisfaction la capacité de la direction à remettre en cause certains partenariats et à réallouer les sommes dégagées à des actions correspondant à des priorités du ministère, et notamment les actions de diffusion des arts plastiques (mise en place de la galerie nationale du Jeu de Paume ; renforcement des dotations affectées à l'exposition Les 20 ans des FRAC ).

- La direction du livre et de la lecture

En 2003, la direction du livre et de la lecture a opéré des redéploiements concernant ses crédits d'intervention, conformément aux directives données par le ministre, afin de réserver des marges de manoeuvre permettant d'instaurer de nouveaux partenariats ou de redéfinir les missions des institutions partenaires du ministère.

Ainsi, 80 000 euros ont été déconcentrés vers la DRAC Aquitaine afin de soutenir le projet patrimonial de la ville de Bordeaux et 50 000 euros vers la DRAC Nord-Pas-de-Calais pour accompagner le développement des « Ruches ».

Compte tenu de la date d'entrée en vigueur de la loi du 18 juin 2003 sur le droit de prêt en bibliothèque 1 ( * ) , la dotation prévue à cet effet a été revue à la baisse (- 3 millions d'euros) au bénéfice d'autres actions du ministère, notamment afin de soutenir l'INRAP.

Enfin, un redéploiement « positif » de 255 000 euros a permis d'abonder les crédits affectés à un programme d'acquisitions patrimoniales d'intérêt national.

* Les redéploiements prévus pour 2004

Les redéploiements de crédits prévus par le projet de budget pour 2004 s'élèvent à 17,28 millions d'euros pour les dépenses ordinaires, soit 0,7 % de leur montant total et à 100 millions d'euros pour les dépenses en capital, soit 23,64 % de leur montant total.

Au-delà de ces redéploiements, un ajustement a été possible sur les crédits de paiement, compte tenu de l'exécution 2002 et de la prévision d'exécution pour 2003. Cet abattement s'élève à 100 millions d'euros pour les crédits de paiement inclus dans les services votés.

2. La maîtrise des dépenses de structure

Traduisant la participation du ministère de la culture à l'effort de maîtrise des dépenses publiques, ses crédits de personnel et de fonctionnement ne progressent que de 0,7 % à structure constante.

• L'évolution des effectifs en 2004

Les crédits de rémunération des personnels en activité s'élèvent à 537,12 millions d'euros -y compris ceux consacrés aux agents de la DRAC Rhône-Alpes, mais hors charges sociales-, en augmentation de 0,44 % par rapport à 2003.

Cette évolution résulte de la diminution des effectifs budgétaires du ministère de 187 emplois, titulaires et contractuels confondus, résultant du non remplacement de 94 départs à la retraite et du transfert de 91 emplois du budget de l'Etat vers ceux de plusieurs établissements publics.

Les effectifs de titulaires diminueront ainsi de 172 emplois du fait de la mise en oeuvre des mesures suivantes :

- suppression nette de 81 emplois au titre des départs à la retraite ;

- transformation de 3 emplois de titulaires en emplois de contractuels, qui feront ensuite l'objet d'un transfert sur le budget du Conservatoire national supérieur de musique de Paris (CNSM) dans le cadre de la poursuite du plan de contractualisation des professeurs des écoles d'enseignement artistique ;

- suppression de 5 emplois au titre de mesures de transformation ;

- transfert de 83 emplois du budget de l'Etat sur le budget de l'établissement public du musée du Louvre (soit 30 emplois transférés dans le cadre de l'application du contrat d'objectifs et de moyens ; 8 au titre du plan engagé en 2002 au titre de la prise en charge par l'établissement public des actes de gestion et 45 emplois transférés correspondant aux emplois de personnels du Louvre reçus aux concours organisés en application du dispositif dit « Sapin »).

Les effectifs de contractuels diminueront de 19 emplois en raison :

- de la suppression d'un emploi au titre des mesures de transformation ;

- de la suppression nette de 13 emplois au titre des départs à la retraite ;

- du transfert de 5 emplois du budget de l'Etat vers le budget des établissements publics d'enseignement : quatre emplois transférés sur le budget de l'Institut national du patrimoine et un emploi transféré sur le budget de l'École nationale supérieure des arts décoratifs (ENSBA) de Paris.

• La poursuite de la résorption de l'emploi précaire

Le recours important à l'emploi précaire au sein du ministère de la culture est directement imputable au cours des deux dernières décennies à l'ouverture de nouveaux établissements culturels, à l'extension des espaces ouverts au public et à l'« effet de ciseau » -bien connu- qui veut que les investissements ne s'accompagnent pas de l'accroissement proportionnel des dépenses ordinaires nécessaires pour permettre aux équipements de fonctionner dans de bonnes conditions.

L'ampleur du phénomène peut être mesurée à l'aune du recensement établi par le ministère de la culture pour la mise en oeuvre du dispositif prévu par la loi du 3 janvier 2001 dite « loi Sapin ». Selon les données recueillies à cette occasion, 1 800 agents -dont 1 000 contractuels sur emplois et 800 rémunérés sur crédits- étaient susceptibles de remplir les conditions posées par la loi Sapin : il s'agissait pour 21 % d'agents de catégorie A, pour 33 % d'agents de catégorie B et pour 46 % d'agents de catégorie C.

Les mesures de stabilisation des vacataires sont financées depuis la loi de finances pour 2001 grâce à des transformations de crédits de vacation en emplois inscrits au budget du ministère de la culture et au budget de certains établissements.

En 2003, la loi de finances prévoyait, au titre du plan de résorption de l'emploi précaire, la création de 150 emplois.

L'effort sera poursuivi en 2004 avec la création de 90 emplois, qui sera effectuée, non par la transformation en emplois de crédits, mais sur un nombre équivalent d'emplois vacants.

Ces créations d'emplois se répartissent de la manière suivante :

- 10 attachés d'administration centrale ;

- 15 techniciens d'art ;

- 5 bibliothécaires adjoints spécialisés ;

- 20 magasiniers spécialisés ;

- 20 maîtres ouvriers ;

- 20 agents techniques d'accueil, de surveillance et de magasinage.

Elles concernent, pour 69 d'entre elles, les établissements publics ; pour 5, les services à compétence nationale et pour 16, l'administration centrale.

3. Responsabiliser les établissements publics

Toujours plus nombreux chaque année, héritiers pour les plus budgétivores d'entre eux de la politique des grands travaux, les établissements publics relevant de la tutelle du ministère de la culture, qui représentent environ 40 % de son budget, apparaissent comme un facteur d'inertie préjudiciable à une gestion plus dynamique des crédits alloués par les lois de finances.

Toutefois, il convient de souligner que ces établissements, souvent prestigieux, constituent les relais privilégiés de l'action du ministère.

L'accroissement prévu par le projet de loi de finances des subventions qui leur sont affectées, témoigne de la volonté du ministère de leur permettre d'assumer le coût de l'exemplarité, tandis que les réformes administratives engagées en 2003 et poursuivies en 2004 leur confèrent une plus grande autonomie dans une perspective de responsabilisation de leur gestion.

• Les dotations pour 2004

Les crédits inscrits au chapitre 36-60 du titre III s'élèvent en 2004 à 689,82 millions d'euros , contre 647,9 millions d'euros en 2003, soit une progression de 6,45 % .

Si l'on raisonne à structure constante , c'est-à-dire hors la création de nouveaux établissements publics issus de la transformation de services à compétence nationale, l'augmentation des dotations de fonctionnement s'élève à 2,05 % par rapport à 2004 .

On rappellera qu'en 2003, le taux de progression de ces dotations avait atteint 4,05 %.

Le montant des mesures nouvelles s'établit à 9,66 millions d'euros. Parmi les plus significatives d'entre elles, on relèvera l'effort consacré, d'une part, à la Bibliothèque nationale de France (+ 1 426 000 euros) et, d'autre part, au musée du quai Branly (+ 2 575 000 euros).

Le tableau ci-après récapitule la répartition entre établissements publics des mesures nouvelles inscrites au projet de budget pour 2004.

MESURES NOUVELLES INSCRITES AU CHAPITRE 36-60 EN 2004

(en euros)

Bibliothèque publique d'information

+ 38 000

Bibliothèque nationale de France

+ 1 426 009

Institut national d'histoire de l'art (installation rue Vivienne)

+ 501 503

Institut national du patrimoine

+ 355 000

Musée Gustave Moreau

+ 3 000

École du Louvre

+ 30 000

École nationale supérieure des Beaux Arts

+ 100 000

École supérieure des arts décoratifs

+ 34 000

Académie de France à Rome

+ 70 000

Comédie française

+ 95 883

Théâtre national de Chaillot

+ 30 000

Théâtre national de l'Odéon

+ 224 620

Théâtre national de la Colline (accompagnement du projet artistique)

+ 100 000

Théâtre national de Strasbourg (accompagnement du projet artistique)

+ 42 000

Conservatoire national supérieur d'art dramatique

+ 47 000

Opéra national de Paris

+ 730 000

Conservatoire national supérieur de musique de Paris (réforme du statut des enseignements)

+ 184 252

Conservatoire national supérieur de musique de Lyon (réforme du statut des enseignements)

+ 239 675

Centre national de la danse (ouverture du nouveau bâtiment)

+ 340 000

École nationale supérieure des métiers de l'image et du son (création d'un nouveau mastère)

+ 55 000

Écoles d'architecture

+ 519 000

Centre national des arts plastiques

+ 60 000

École nationale supérieure de création industrielle

+ 50 000

Musée du Louvre (contrat d'objectifs et de moyens)

+ 880 000

Établissement public du parc et de la grande halle de la Villette (projet Villette numérique)

+ 100 000

Écoles d'art

+ 135 378

Établissement public du musée du quai Branly

+ 2 575 000

Centre national d'art et de culture Georges Pompidou

+ 700 000

On rappellera que cinq établissements bénéficient de près de 56 % des subventions inscrites au chapitre 36-60 : il s'agit de la Bibliothèque nationale de France (97,55 millions d'euros), de l'Opéra national de Paris (93,46 millions d'euros), du Centre national d'art et de culture Georges Pompidou (69,54 millions d'euros), de la Cité des sciences et de l'industrie (47,13 millions d'euros) et du musée du Louvre (81,65 millions d'euros).

En 2003, ces établissements représentaient 60 % du chapitre 36-60. Leur poids relatif diminue, en effet, en raison de la montée en puissance d'autres institutions de constitution plus récente ou de la création de nouveaux établissements publics.

On notera ainsi l'accroissement significatif des dotations de fonctionnement du musée du quai Branly, qui passent de 6,37 millions d'euros en 2003 à 9,33 millions d'euros en 2004, soit une progression de près de 50 % qui répond à la mise en oeuvre des opérations de préfiguration et à la préparation des manifestations d'ouverture en janvier 2006.

LE MUSÉE DU QUAI BRANLY

La création du musée du quai Branly, sur l'initiative du Président de la République, met un terme à plusieurs décennies d'interrogations sur l'avenir du musée de l'Homme et du musée national des arts d'Afrique et d'Océanie (MNAAO).

Cette institution, implantée sur le site du quai Branly, est placée sous la double tutelle du ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche et du ministère de la culture et de la communication, et aura vocation à regrouper principalement les collections du MNAAO et celles du laboratoire d'ethnologie du musée de l'Homme dans la perspective, d'une part, de leur conservation et de leur présentation et, d'autre part, d'une contribution à la recherche et à l'enseignement.

L'établissement public du musée du quai Branly est maître d'ouvrage de ce projet conformément aux dispositions du décret n° 98-1191 du 23 décembre 1998 ; la maîtrise d'oeuvre du musée a été confiée, à l'issue d'un concours international, à M. Jean Nouvel.

Parallèlement à la construction du musée, qui est entrée depuis 2002 dans une phase opérationnelle, l'établissement public mène plusieurs opérations : préparation des collections, création d'une médiathèque, chantier multimédia.

- La construction du musée

Les travaux de terrassement et de fondation ont commencé en janvier 2003. La structure des deux bâtiments « Branly » et « Auvent », qui abriteront la médiathèque et les services administratifs sera achevée à l'automne 2003. Le calendrier des travaux prévoit, en 2004, l'achèvement des travaux de génie civil et de génie technique en superstructure ainsi que la poursuite des travaux de second oeuvre en infrastructure. Seront également engagés les travaux d'aménagement des jardins. Une livraison des bâtiments administratifs est prévue à l'automne 2004, avec le transfert du siège social sur le terrain du quai Branly. La livraison complète des autres ouvrages se déroulera au début de l'été 2005, les travaux d'installation et l'aménagement du jardin se finissant à l'automne 2005. En décembre 2005, le musée devrait être totalement opérationnel et l'ouverture au public est prévue pour le mois de janvier 2006.

- Le chantier des collections

Lors d'une visite qu'elle a effectuée le 5 mars dernier, votre commission a pu prendre conscience de l'ampleur de la tâche accomplie en ce domaine par l'établissement, mais également de son exemplarité.

Dans la perspective de son ouverture au public, le musée du quai Branly a conçu et mis en place un vaste chantier des collections qui comprend l'ensemble des opérations permettant d'assurer le transfert et la mise à niveau, tant sur le plan matériel que documentaire, des 280 000 objets du laboratoire d'ethnologie du musée de l'Homme et des 25 000 objets du MNAAO.

L'ensemble de ces objets est récolé, puis prélevé dans chacun des musées d'origine, avant de rejoindre une chaîne de traitement dans laquelle une quarantaine de spécialistes procède à l'anoxie des objets comportant des matières organiques, puis au nettoyage et au dépoussiérage de l'ensemble des collections, et enfin à des prises de vues en deux ou trois dimensions. Le suivi des opérations qui constituent le chantier des collections est entièrement informatisé, ce qui a permis la création d'une base de données multimédia qui assure la traçabilité permanente des collections et rassemble toutes les informations matérielles, scientifiques et documentaires disponibles sur chacun des objets.

Ce chantier des collections, auquel sont affectées 70 personnes, a été engagé en 2001 et devrait s'achever en septembre 2004, dans la perspective d'une installation des collections dans les salles et les réserves à l'été 2005.

- La médiathèque

Le chantier de la médiathèque suppose également la réalisation d'une importante campagne de traitements physiques des ouvrages par la numérisation et l'indexation des fonds des bibliothèques du musée de l'Homme et du MNAAO, soit 180 000 volumes dont 25 000 en libre accès, 40 000 fascicules de périodiques, 350 000 photographies et de nombreux documents sonores et audiovisuels.

Le transfert des ouvrages antérieurs à 1978 de la bibliothèque du musée de l'Homme a commencé fin août 2003 (70 000 ouvrages). Ce chantier s'étalera sur 16 mois. Les ouvrages postérieurs à 1978, en meilleur état et dont l'informatisation est plus avancée, feront ultérieurement l'objet d'un traitement plus superficiel, mais pas avant mi-2005.

- Le multimédia

Le multimédia constitue un élément central du projet muséographique.

Le projet du musée du quai Branly sera l'occasion de proposer un concept de système d'information multimédia profondément moderne à la fois en termes d'adaptation des nouvelles technologies à la muséologie et à l'ethnologie et d'offre aux publics.

Seront proposées au cours du parcours des visiteurs des bornes consultables destinées à documenter les objets présentés mais également des instruments à vocation plus large.

- Le pavillon des sessions

Le pavillon des sessions au Louvre, inauguré en 2000, constitue l'antenne du nouveau musée. L'établissement public a passé avec le Louvre une convention de cinq ans, renouvelable par tacite reconduction, afin de régler les conditions administratives de son occupation. On notera que les recettes de billetterie sont conservées par le Louvre. Cette observation n'est pas sans signification lorsque l'on sait que ces salles accueillent un public de plus en plus nombreux.

En 2004, apparaissent dans la nomenclature du chapitre 36-60 les musées nationaux Guimet et Orsay qui, de services à compétence nationale, deviennent des établissements publics, le Centre des monuments nationaux, qui bénéficiait jusque-là de subventions au titre des crédits d'intervention, mais également la Cité de l'architecture et du Patrimoine, institution créée par la loi sur le droit de prêt du 18 juin 2003 à partir du musée des monuments français, de l'école de Chaillot et de l'Institut français d'architecture.

Le projet de loi de finances prévoit, au profit des établissements la création de 25 emplois non budgétaires , dont 11 sont autofinancés par redéploiement des crédits des établissements concernés.

Les établissements publics bénéficieront de subventions d'équipement courant qui s'élèvent à 76,24 millions d'euros, en progression à structure constante de 26,40 % par rapport à 2003, ce qui porte, sur deux ans, le taux annuel de progression de ces dotations à 21,16 %.

Votre rapporteur ne pourra que se féliciter de cette tendance qui traduit le souci bienvenu du ministère de faire face dans de bonnes conditions à l'entretien des bâtiments accueillant ces établissements. Les besoins sont, en ce domaine, croissants, compte tenu des caractéristiques techniques de ces bâtiments, qui comportent de plus en plus d'équipements technologiques coûteux caractérisés par une fréquence de renouvellement élevée. Faute de prendre en compte ces besoins, le ministère s'exposerait dans l'avenir à un alourdissement significatif de ces dépenses d'investissement.

• Une modernisation des conditions d'exercice de la tutelle

Le ministère de la culture s'est engagé dans une réforme des conditions d'exercice de son pouvoir de tutelle sur les établissements publics.

Cette réforme, qui vise à responsabiliser les établissements en accroissant leur autonomie de gestion et en précisant les engagements pris avec la tutelle, trouvera à s'appliquer en 2004, à l'occasion d'une modification en profondeur des relations entre les services centraux du ministère et les musées nationaux.

* Vers une plus grande autonomie

La réforme de la tutelle passe en priorité par un accroissement des compétences des établissements publics pour la gestion de leurs personnels et par le développement de relations contractuelles avec la tutelle.

=> En matière de gestion du personnel , les mesures prises s'articulent autour de deux axes : d'une part, le transfert des emplois du budget de l'Etat sur le budget des établissements, qui s'accompagne simultanément d'une rénovation de la gestion de ces emplois et, d'autre part, la déconcentration aux établissements publics de certains actes de gestion des personnels.

Depuis 2000, le ministère de la culture et de la communication a entrepris de transférer certains emplois d'agents non titulaires inscrits au budget de l'Etat vers ceux des établissements publics .

Ce sont surtout les établissements d'enseignement artistique (École nationale supérieure des Beaux Arts, École nationale supérieure des arts décoratifs, Conservatoires supérieurs de musique de Paris et de Lyon, Conservatoire national d'art dramatique) qui, les premiers, ont bénéficié de cette mesure portant sur les emplois contractuels.

En 2003, une nouvelle étape a été franchie avec l'inscription des emplois de titulaires sur le budget de l'établissement public du musée du Louvre. Le transfert des emplois de titulaires et de non titulaires du budget de l'Etat sur le budget du Louvre, inscrit dans le contrat d'objectifs et de moyens, a concerné 1 233 emplois au 1 er janvier 2003 (1 162 emplois pourvus au titre de 2002 et 71 emplois vacants à pourvoir au cours de l'année 2003) pour un coût total en 2003 de 31,4 millions d'euros au titre du transfert, auquel se sont ajoutés 9,7 millions d'euros de mesures nouvelles afin de compenser l'assujettissement de la rémunération des agents transférés à la taxe sur les salaires et à des charges de pensions civiles à un taux de 33 %.

En 2004, conformément au contrat d'objectifs et de moyens conclu au printemps 2003, 82 emplois nouveaux seront transférés, notamment aux fins de stabilisation de personnels précaires, pour un coût total de 977 000 euros au titre du transfert et 282 000 euros de mesures nouvelles. Ce transfert d'emplois restitue à l'établissement une marge de manoeuvre dans la gestion de son personnel d'autant plus grande que la gestion par l'établissement public des emplois inscrits à son budget s'inscrira dans le cadre d'une convention pluriannuelle de gestion du personnel conclue avec le contrôleur financier. Le contrat d'objectifs et de moyens prévoit ainsi d'aboutir à une gestion des emplois fondée sur l'identification de trois enveloppes de crédits limitatifs et étanches, l'une pour les titulaires, une seconde pour les contractuels et une troisième pour les agents rémunérés sur crédits.

Concernant les emplois de non titulaires, une gestion globalisée de la masse salariale indiciaire, dans le respect d'un plafond d'emplois autorisés, devrait permettre à cet établissement et à ceux à qui, dans l'avenir, la même procédure sera appliquée, d'assouplir les conditions de recrutement et de gestion de leurs personnels contractuels.

En 2004, si l'exemple du Louvre n'a pas été appliqué à la Bibliothèque nationale de France, comme cela avait pu être envisagé, la politique de transferts d'emplois sera poursuivie en direction de l'Institut national du Patrimoine, du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris et de l'École nationale supérieure des arts décoratifs.

Le second axe de la réforme destinée à accroître l'autonomie des établissements dans la gestion de leur personnel s'articule autour des mesures prises pour favoriser la déconcentration de certains actes de gestion du personnel .

Le Louvre joue également en ce domaine un rôle pilote.

Les projets de textes réglementaires portant délégation de pouvoirs en matière de gestion des personnels au profit du président de l'établissement public du musée du Louvre sont actuellement en cours d'examen au Conseil d'Etat.

En application de ces textes, seuls devraient être exceptés de la délégation les actes qui ont un effet en dehors du champ de compétence du Louvre (mutations vers l'extérieur, détachements...) ou qui relèvent du pouvoir de nomination ministériel (comme les titularisations ou les sanctions des 2 e , 3 e et 4 e groupes).

Le musée du Louvre se verra donc confier l'essentiel des actes de gestion de proximité ainsi que des attributions nouvelles dans les domaines de la formation et de la prise en charge sociale des agents. Toutefois, la tenue du dossier individuel de chaque agent restera sous la responsabilité de l'administration centrale. Seront donc mis en place des circuits sécurisés de partage de l'information entre les différents services impliqués. A cette fin, la mise en service du nouvel outil informatique de gestion des personnels, Rh@psodie , commun aux différents services du ministère, devrait faciliter l'extension des mesures de déconcentration des actes de gestion sur l'exemple du Louvre à d'autres établissements publics relevant du ministère de la culture et de la communication.

=> Au-delà des mesures destinées à renforcer la maîtrise de la gestion de leurs personnels, le processus de contractualisation entre l'Etat et ses établissements publics sera poursuivi en 2004.

Après la signature d'un contrat d'objectifs et de moyens en 2003 avec le Louvre, un contrat de même type devrait être conclu en 2004 entre l'Etat et la Bibliothèque nationale de France.

Ce contrat, qui couvrirait les années 2004 à 2006, aurait vocation à succéder à l'actuel projet d'établissement (2001-2003). Dans cette perspective, un audit préalable à été confié aux inspections générales des affaires culturelles et des bibliothèques, assistées par un cabinet privé de consultants, afin d'identifier les besoins de cet établissement, ainsi que les moyens dont il dispose à l'heure actuelle pour remplir ses missions.

D'après les informations communiquées à votre rapporteur, le contrat porterait sur un nombre limité d'objectifs, dont la réalisation serait évaluée par des indicateurs définis conformément aux dispositions de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Ce document devrait comprendre également un « code de conduite » destiné à régir les relations entre le ministère et la Bibliothèque nationale de France, dont les règles garantiraient à la fois la prise en compte des besoins de cette dernière, l'accroissement de son autonomie de gestion et sa nécessaire insertion dans la politique conduite par l'Etat.

S'il se félicite de la négociation d'un contrat d'objectifs et de moyens avec une institution qui, par le poids des subventions qu'elle reçoit de l'Etat, arrive en tête des établissements publics relevant de la tutelle du ministère de la culture, votre rapporteur regrettera néanmoins que le processus de contractualisation ait pris dans son ensemble un certain retard et ne permette pas de clarifier à un rythme plus rapide les conditions dans lesquelles les grandes institutions culturelles doivent remplir leurs missions.

* Une réforme en profondeur des modalités de gestion des musées nationaux

La volonté exprimée par le ministre de réformer les services de son administration afin d'accroître l'esprit de responsabilité, trouve pleinement sa traduction dans les mesures prises pour réorganiser les relations entre la direction des musées de France et les musées nationaux.

Ces mesures correspondent à une nécessité que votre commission a maintes fois soulignée, notamment dans le cadre du rapport de la mission d'information constituée en son sein sur la gestion des collections des musées 2 ( * ) .

Le mode de fonctionnement des musées nationaux reste en effet encore largement marqué par une tradition de gestion directe qu'illustrent notamment l'octroi tardif et parcimonieux du statut d'établissement public aux deux grands musées que sont le Louvre et Versailles et la faible autonomie que leur accordent leurs statuts.

Cette organisation semble toutefois avoir trouvé définitivement ses limites dans les difficultés financières rencontrées par la Réunion des musées nationaux (RMN) au cours des dernières années.

Le versement d'une partie des droits d'entrée perçus par les musées dotés du statut d'établissement public et la mutualisation qui en résultait pour les autres musées ne pouvaient plus se justifier dès lors que la RMN affectait les ressources ainsi dégagées à combler le déficit de ses activités industrielles et commerciales et de sa mission éditoriale. La mutualisation, loin de profiter aux « petits » musées nationaux rendait en effet possible une fuite en avant de la gestion de l'établissement public préjudiciable à l'ensemble des institutions concernées.

La réforme engagée est inspirée par le souci de clarifier les relations entre les musées nationaux et la RMN, d'une part, et entre les musées nationaux et la Direction des musées de France, d'autre part.

La RMN demeure l'éditeur et le diffuseur privilégié des musées nationaux ainsi que l'organisateur majeur des expositions nationales.

Ce recadrage des missions est mis en oeuvre parallèlement à une modification substantielle du mode d'administration des musées qui se traduit par :

- la simplification des procédures financières et la poursuite de la déconcentration administrative pour les services à compétence nationale ;

- la transformation au 1 er janvier 2004 en établissements publics des musées Guimet et d'Orsay, actuellement organisés sous forme de services à compétence nationale ;

- le renforcement de l'autonomie statutaire du Louvre et du musée et du domaine national de Versailles, dont les présidents voient leurs prérogatives renforcées pour promouvoir de réelles politiques d'établissement.

Conséquence de cette autonomie statutaire renforcée, les musées érigés en établissements publics 3 ( * ) cesseront de verser à la RMN une partie de leurs droits d'entrée, qu'ils conserveront dans leur intégralité. En contrepartie, la subvention de l'Etat à ces établissements publics sera diminuée à due concurrence, le montant correspondant étant dorénavant affecté à la RMN au titre du financement de ses activités de service public. Par ailleurs, les crédits et les emplois affectés correspondants aux compétences dévolues aux musées leur seront transférés. Enfin, ces derniers devront financer sur leur propre budget leurs acquisitions : à ce titre, il est prévu, et l'on s'en félicitera, que 20 % au moins des droits d'entrée acquittés pour l'accès aux collections permanentes soient affectés à leur financement. Le décroisement des financements impliquera également une refonte des procédures d'acquisition, fondée sur la mise en place de commissions propres à chaque établissement.

Cette réforme, très substantielle, suppose pour porter ses fruits que deux conditions soient remplies : d'une part, que l'Etat consolide sa tutelle sur les établissements publics, et, d'autre part, que l'effort de redressement de la RMN soit poursuivi. Si cette dernière condition n'était pas réunie, il y a à craindre que ce soient les petits musées nationaux qui paient le prix de l'émancipation -depuis longtemps revendiquée- des institutions les plus prestigieuses. Cette évolution serait regrettable à maints égards, et notamment au regard d'une préoccupation d'aménagement culturel du territoire. En effet, l'ensemble des grands musées désormais dotés du statut d'établissement public se trouvent à Paris ou en Ile-de-France.

II. DES PRIORITÉS RÉAFFIRMÉES

S'il consacre le soutien à la création dans la diversité de ses expressions, le projet de budget pour 2004 permet également d'apporter un soutien bienvenu à des actions plus « traditionnelles », à l'image de la politique du livre et de la lecture, avec le souci d'en renouveler les instruments.

A. UN EFFORT BIENVENU EN DIRECTION DE LA POLITIQUE DU LIVRE ET DE LA LECTURE

1. L'évolution des dotations

Le budget consacré à la politique du livre et de la lecture s'élève en 2004 à 312,87 millions d'euros en dépenses ordinaires et crédits de paiement, contre 301,74 millions d'euros en 2003, soit une progression de 3,69 %.

Cet effort porte à 8,73 % le taux de progression de ces dotations entre 2002 et 2004.

Le tableau ci-après retrace l'évolution des dotations consacrées au livre et à la lecture entre la loi de finances pour 2002 et le projet de loi de finances pour 2004 par catégories de dépenses.

DÉPENSES CONSACRÉES AU LIVRE ET À LA LECTURE
(hors dépenses de personnel et de fonctionnement courant
des services centraux et déconcentrés)

(en millions d'euros)

 

Loi de
finances
2002
*

Loi de
finances
2003
*

Mesures nouvelles

PLF
2004

Evolution
2003/2004
en  %

Variation
en montant
2002/2004

Taux de
progression 2002/2004
en  %

Entretien du patrimoine monumental

0,03

0,03

0

0,03

0

0

0

Subventions aux établissements publics

110,53

113,21

2,31

115,63

2,14 %

5,10

4,62 %

dont fonctionnement courant

100,13

101,46

1,41

102,98

 

2,85

2,84 %

dont équipement courant (AP)

10,39

11,75

0,91

12,65

 

2,26

21,72 %

Crédits d'intervention

176,28

186,84

6,17

193,95

3,38 %

16,87

9,57 %

DGD Bibliothèques

149,17

152,59

3,25

155,84

 

6,67

4,47 %

Interventions hors commandes et acquisitions

26,10

33,23

2,92

36,17

 

10,08

38,62 %

Commandes et acquisitions

1,02

1,02

0

1,14

 

0,12

11,66 %

Investissements AP

0,92

1,67

2,39

4,06

143,66 %

3,14

343,39 %

Total dépenses ordinaires + autorisations de programme

287,76

301,74

10,88

312,87

3,69 %

25,12

8,73 %

* Loi de finances initiale hors réserve parlementaire et hors BCRD.

Votre rapporteur se félicitera de la réaffirmation du caractère prioritaire de la politique conduite dans le domaine du livre et de la lecture.

En effet, tandis que se développe la part prise par les nouvelles technologies dans l'accès à la connaissance et dans le traitement de l'information, l'écrit comme vecteur culturel peut apparaître menacé, alors que les études révèlent que 40 % des Français ne lisent pas un livre par an.

2. Un renouvellement des instruments

Les crédits inscrits au projet de loi de finances permettront à la direction du livre et de la lecture de développer plus particulièrement son action dans deux domaines :

- le développement de la lecture publique ;

- le soutien à l'économie du livre.

• La modernisation et la diversification du réseau des bibliothèques

* Le soutien apporté par l'Etat aux bibliothèques territoriales

Les actions en faveur du développement de la lecture se traduisent en premier lieu par le soutien financier apporté par l'Etat aux opérations de construction, d'extension ou d'informatisation des bibliothèques des collectivités territoriales, à partir d'un concours particulier inclus dans la dotation générale de décentralisation.

L'objectif poursuivi à travers cette politique est de renforcer le maillage territorial du réseau des bibliothèques, qui a bénéficié au cours des vingt dernières années d'un essor sans précédent.

Résultat de l'effort conjugué de l'Etat et des collectivités territoriales, la fréquentation des bibliothèques s'est en effet généralisée. La dernière enquête du ministère de la culture sur les pratiques culturelles des Français, publiée en 1998, fait apparaître une forte progression des inscriptions dans les bibliothèques : en 1997, 21 % des Français étaient inscrits dans une bibliothèque ou une médiathèque, contre seulement 17 % en 1989.

Cette pratique concerne notamment les plus jeunes. Ainsi, l'inscription dans une bibliothèque ou une médiathèque municipale est fortement liée à l'âge : les 15-19 ans sont proportionnellement quatre fois plus nombreux à être inscrits que les 55 ans et plus. En 2001, le nombre total des inscrits atteignait 6,7 millions et les bibliothèques desservaient 63,2 % de la population.

L'emprunt de livres est donc devenu une pratique courante, principal moyen d'accès au livre, alors que, paradoxalement, la lecture a reculé. On a, en effet, assisté à une forte progression, parmi les inscrits dans les bibliothèques, de la part de ceux qui empruntent des livres, qui est passée de 17 % en 1989 à 21 % en 1997.

Ces chiffres soulignent donc le caractère primordial des aides accordées par l'Etat au réseau des bibliothèques dans une politique de promotion de l'égalité d'accès à la culture.

Ces aides sont constituées, d'une part, de la part de la dotation générale de décentralisation afférente aux bibliothèques des collectivités territoriales et, d'autre part, des dépenses d'intervention gérées à l'échelon déconcentré par la direction du livre et de la lecture.

A la suite des transferts effectués par la loi du 22 juillet 1983, sont regroupés depuis 1986 au sein de la dotation générale de décentralisation :

- les crédits précédemment inscrits au budget de l'Etat au titre de la construction, de l'équipement, du fonctionnement des bibliothèques municipales ;

- les crédits destinés à compenser le transfert de la compétence aux départements en matière de bibliothèques départementales de prêt ;

- les crédits destinés à soutenir la construction et l'équipement de bibliothèques municipales à vocation régionale (BMVR). Ce dispositif créé par la loi du 13 juillet 1992 dite « loi Sueur » 4 ( * ) , à vocation temporaire, était destiné à favoriser la création de bibliothèques municipales qui, par la richesse de leurs collections ou par leur localisation, jouent un rôle essentiel dans la structuration du réseau régional et national des bibliothèques françaises.

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution entre la loi de finances pour 2003 et le projet de loi de finances pour 2004 des différents concours de la dotation générale de décentralisation.

DOTATION GÉNÉRALE DE DÉCENTRALISATION POUR LES BIBLIOTHÈQUES
(Nomenclature du budget du ministère de l'intérieur)

(en millions d'euros)

 

Bénéficiaire

LFI 2003

PLF 2004

Évolution (en %)

Chapitre 41-56
article 10 § 63 et 73

Concours particulier « Bibliothèques municipales »

64,93

66,18

+ 1,92 %

Chapitre 41-10
article 10

Régions d'outre-mer

1,91

1,94

+ 0,6 %

Chapitre 41-56
article 20 § 12

Fonctionnement des bibliothèques départementales (y compris frais de personnel des services d'archives)

79,61

81,15

+ 1,93 %

Chapitre 41-56
article 20 § 30

Concours particulier « Investissement bibliothèques départementales »

6,13

6,25

+ 1,95 %

TOTAL DES CRÉDITS BIBLIOTHÈQUES

152,58

155,53

+ 1,9 %

Il convient de préciser que le programme des BMVR s'achevant, et le financement des opérations en cours étant assuré en majeure partie par le report des exercices précédents, les crédits antérieurement consacrés à la troisième part ont été répartis depuis la loi de finances pour 2002 sur l'ensemble du concours particulier destiné aux bibliothèques municipales.

En 2004, la DGD permettra notamment :

- au titre du concours particulier départemental, de soutenir les opérations d'investissement des conseils généraux, à hauteur de 6,2 millions d'euros. Plus spécifiquement, le projet de nouvelle bibliothèque départementale de prêt de l'Hérault bénéficiera d'une mesure nouvelle exceptionnelle de 2,56 millions d'euros -hors DGD ;

- au titre du concours particulier pour les bibliothèques municipales (66,18 millions d'euros), de financer plus de 300 opérations d'investissement ;

- grâce aux crédits destinés au programme des BMVR, l'ouverture de la bibliothèque de l'Alcazar à Marseille et de la médiathèque José Cabanis à Toulouse.

Votre rapporteur se félicitera de la volonté affichée par le ministre de mettre à l'étude un nouveau dispositif, comparable à celui des BMVR, permettant de garantir une aide significative de l'Etat à la réalisation de grands projets en région.

Au titre des actions financées sur les crédits d'intervention de la direction du livre et de la lecture, votre rapporteur se félicitera du renforcement de la mission de « tête de réseau » de la Bibliothèque publique d'information (BPI) installée à Beaubourg dans le cadre de la préparation de son projet d'établissement. A ce titre, la BPI bénéficie d'une mesure nouvelle de 100 000 euros afin de développer son action territoriale. Par ailleurs, elle animera le programme CAREL 5 ( * ) , conduit avec d'autres bibliothèques publiques, afin d'optimiser leurs capacités d'action de ressources électroniques en ligne.

* Un nouveau programme d'action : les Ruches

Le rôle majeur joué par les médiathèques et les bibliothèques dans l'accès à la culture a conduit le ministère de la culture à mettre en oeuvre un nouveau programme national de développement des médiathèques de proximité dans les zones rurales et les quartiers urbains périphériques.

Ce programme, baptisé les « Ruches » , sera doté en 2004, de 10,5 millions d'euros, enveloppe qui inclut 1,5 million d'euros de crédits provenant du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire et 5,5 millions d'euros financés par la dotation globale de décentralisation. Ces moyens s'ajouteront à ceux dégagés en 2003 qui ont permis de soutenir 58 projets.

Le programme se traduit par un soutien apporté aux projets des collectivités territoriales tant pour les investissements, la participation de l'Etat pouvant atteindre 50 % des montants investis, que pour le fonctionnement, l'aide étant principalement destinée à favoriser la création d'emplois qualifiés. En effet, le dispositif est destiné, au-delà de la création de nouveaux équipements, à développer la qualité de l'accueil et des services proposés au public à travers cette nouvelle génération de médiathèques.

• Le soutien à l'économie du livre

La loi du 18 juin 2003 relative au droit de prêt en bibliothèque a complété et renforcé la loi du 10 août 1981 sur le prix du livre, qui visait à maintenir un réseau de proximité de diffusion du livre et, par ce biais, à favoriser la diversité éditoriale.

En plafonnant les rabais pour les ventes aux collectivités à 9 % du prix public de vente, la loi du 18 juin dernier tend à rééquilibrer l'économie au livre au profit des petits détaillants. Cette mesure répond à une revendication déjà ancienne fondée sur la place croissante de la part du « marché » des collectivités dans les ventes de livres. En effet, le développement de ces achats -qui échappaient jusqu'ici à la règle du prix unique- a bénéficié non pas aux libraires mais aux grossistes, capables à la différence de ces derniers, de consentir des rabais significatifs sans remettre en cause leurs conditions d'exploitation. Selon des sources professionnelles concordantes, les ventes aux collectivités représenteraient aujourd'hui 18 % de l'activité des libraires, contre près de 22 % en 1993. En 2000, le taux de rabais moyen consenti par l'ensemble des fournisseurs des bibliothèques s'élevait à 22,4 %, tous types de commandes confondus, et à 25,1 % pour les seuls achats réalisés dans le cadre de marchés publics.

Le plafonnement des rabais prévu pour ces ventes revient donc à instaurer en pratique un « prix unique » spécifique pour les ventes aux collectivités.

Votre rapporteur considère que cette disposition, si elle présente l'avantage de mettre un terme à la dégradation des marges des libraires, ne garantit pas pour autant une amélioration décisive de leur situation financière. En effet, il n'est pas à exclure que seuls les grossistes et les libraires les plus importants, dont les marges progresseront significativement du fait du plafonnement des rabais, et qui seront capables de répondre aux exigences de prix et de service des collectivités, bénéficient de cette mesure.

A cet égard, votre commission sera particulièrement attentive aux conditions de mise en oeuvre de cette disposition et à son impact économique, qui devra notamment être évalué dans le cadre du rapport sur l'application de la loi du 18 juin 2003, rapport qui sera présenté au Parlement par le Gouvernement deux ans après son entrée en vigueur.

Si l'impact de la loi sur les libraires de proximité est incertain, son effet inflationniste sur le coût des acquisitions des bibliothèques est en revanche inévitable. A cet égard, votre rapporteur se félicitera qu'à travers une enveloppe gérée par le Centre national du livre (CNL), d'un montant de 3 millions d'euros pour les exercices 2004 et 2005, l'Etat accompagne l'effort des collectivités territoriales qui s'engageraient à accroître leurs crédits d'acquisition en vue de préserver, voire d'augmenter, le volume de leurs achats.

Par ailleurs, la réflexion engagée par le ministère pour renforcer les aides aux libraires apparaît également bienvenue dans un contexte marqué par une dégradation de leur situation financière et une concentration accrue des secteurs de l'édition et de la distribution.

C'est dans ce cadre que s'inscrit la convention passée entre les ministères de la culture et des petites et moyennes entreprises qui crée un nouveau programme d'aide financière à la création et au développement des commerces culturels de proximité -dont la librairie- dans le cadre du FISAC (Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce).

La relance de l'action de l'Etat en ce domaine supposera également une réorganisation du CNL et une refonte des dispositifs d'aide qu'il gère. En 2004, cet organisme accordera des subventions à hauteur de 1,3 million d'euros au secteur de la librairie.

B. UN ENGAGEMENT MARQUÉ EN FAVEUR DE LA CRÉATION

1. Le spectacle vivant : un effort poursuivi

• Une augmentation des dotations

La crise provoquée par l'accord du 26 juin dernier relatif aux annexes VIII et X de la convention générale d'assurance chômage a posé avec acuité, à travers les interrogations sur l'avenir du régime de l'intermittence, la question des missions de l'Etat dans le domaine du spectacle vivant.

Le projet de budget y apporte une réponse partielle : poursuivant l'effort engagé au cours des précédents exercices, il prévoit une augmentation de 4,42 % des dotations consacrées à la direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (DMDTS).

Avec 54,36 millions d'euros de mesures nouvelles, le spectacle vivant apparaît comme le secteur le mieux « servi » par le projet de budget pour 2004.

Cette évolution confirme sa prééminence au sein des dépenses d'intervention du ministère ; les crédits affectés à la direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (415,57 millions d'euros) en représentent en effet plus de la moitié, sur une enveloppe globale de 817,84 millions d'euros.

Renvoyant pour un examen plus détaillé des crédits du théâtre à l'avis de notre collègue Marcel Vidal, votre rapporteur se limitera à une présentation générale de l'évolution des crédits et à une analyse succincte des priorités pour 2004.

Le tableau ci-après retrace l'évolution des crédits consacrés au spectacle vivant et à la musique entre la loi de finances pour 2002 et le projet de loi de finances pour 2004.

CRÉDITS CONSACRÉS AU SPECTACLE VIVANT ET À LA MUSIQUE ENTRE LA LOI DE FINANCES POUR 2002 ET LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2004
(hors dépenses de personnel et de fonctionnement courant
des services centraux et déconcentrés)

En millions d'euros

LF 2002*

LF 2003*

Mesures nouvelles

PLF 2004

Évolution 2003/2004 en %

Variation en montant 2002/2004

Taux de progression 2002/2004

Subventions aux établissements publics

257,66

271,57

14,06

288,51

6,23

30,84

11,97

Dont fonctionnement courant

242,97

251,93

4,36

256,08

 

13,11

5,40

Dont équipement courant (AP)

14,70

19,64

9,71

32,42

 

17,73

120,65

Crédits d'intervention

392,14

403,01

12,56

415,57

3,12

23,43

5,97

Interventions hors commandes et acquisitions

390,90

401,77

12,56

414,33

 

23,43

5,99

Commandes et acquisitions

1,24

1,24

0,00

1,24

 

0,00

0,00

Investissements (AP)

37,39

35,55

5,07

37,48

5,42

0,09

0,24

Total dépenses ordinaires + autorisations de programme

687,19

710,14

31,69

741,55

4,42

54,36

7,91

Source : ministère de la culture

* Loi de finances initiale, hors réserve parlementaire et hors BCRD

Cet effort financier permet d'engager dans de bonnes conditions le débat national lancé par le ministre sur l'état des politiques publiques et les enjeux pour le spectacle vivant, dont l'organisation a été confiée à M. Bernard Latarjet, président de l'établissement public du parc de la grande halle de La Villette. Ce débat, qui débouchera en janvier 2004 sur la tenue d'assises nationales, devrait aboutir à l'élaboration d'un plan national en faveur de l'emploi et au dépôt d'un projet de loi d'orientation pour le spectacle vivant.

Issu d'une politique volontariste de décentralisation initiée par André Malraux, le secteur du spectacle vivant a connu depuis les années 1980 un développement sans précédent sous l'effet conjugué de l'augmentation des crédits que lui a consacré le ministère et de l'implication croissante des collectivités territoriales.

Cette dynamique a reposé sur une multiplication des sources de financement qui a abouti à la généralisation des subventions croisées mais également sur la « facilité de caisse » que représente le recours au travail intermittent.

Dans ce contexte, la redéfinition des modalités d'indemnisation du chômage des intermittents, rendue inévitable en raison du déficit croissant des annexes VIII et X, a eu pour effet de mettre en évidence la précarité de l'économie du secteur, mais également les failles de l'intervention publique.

Les difficultés soulevées exigent une analyse sereine à la fois des objectifs que doit poursuivre la politique conduite en ce domaine et des conditions dans lesquelles les artistes exercent leur activité de création. Cette analyse ne doit pas toutefois se limiter au spectacle vivant. C'est dans cette perspective et avec la volonté de nourrir le débat engagé par le Gouvernement que votre commission a créé un groupe de réflexion sur la création culturelle, dont les travaux se sont engagés au début de cette session.

• Les subventions aux établissements publics

Les subventions attribuées aux établissements publics progresseront de 6,2 % pour atteindre 288,51 millions d'euros, contre 271,57 millions d'euros en 2003.

Un effort spécifique sera consacré à l'aboutissement du projet du Centre national de la danse, institution à laquelle sont dévolues des missions à la fois de création, de diffusion et d'enseignement. La progression de 5,3 % des subventions qui lui sont attribuées permettra à cette nouvelle institution de fonctionner dès le premier trimestre 2004.

Une mesure nouvelle, d'un montant de 750 000 euros, est destinée à la mise en oeuvre de la réforme du statut des enseignants des deux conservatoires de musique et de danse. Cette action s'inscrit dans l'action engagée par le ministère pour redéfinir le cadre de l'enseignement spécialisé -en l'espèce supérieur- dans les différentes disciplines du spectacle vivant.

Les dotations des grands établissements publics de production -en particulier les théâtres nationaux et l'Opéra national de Paris- sont renforcées (+4 millions d'euros) pour faire face à l'actualisation de leurs charges et préserver ainsi leur capacité de production. Par ailleurs, des crédits supplémentaires (+12,4 millions d'euros) seront dégagés pour assurer la mise en sécurité de l'outil de production de ces établissements, et notamment l'Opéra national de Paris et la Grande Halle de La Villette.

Seront également soutenus des projets plus innovants tels le développement du festival « La Villette numérique » ou le renforcement de la vocation internationale du Conservatoire national d'art dramatique.

• Un effort de remise en ordre de l'enseignement artistique

L'enseignement artistique dans le domaine du spectacle vivant, au-delà des établissements d'enseignement supérieur sous la responsabilité de l'Etat, relève de l'initiative et de la responsabilité des collectivités territoriales, sous le contrôle scientifique et technique des services du ministère.

Le réseau des établissements d'enseignement musical, chorégraphique et théâtral spécialisé contrôlés par l'Etat est constitué de 36 conservatoires nationaux de région (CNR), de 104 écoles nationales de musique, de danse et de théâtre (ENMDT) et de 245 écoles municipales de musique et de danse agréées (EMA). Ces établissements sont dans leur quasi-totalité des services municipaux gérés en régie directe.

Alors même que l'Etat ne dispose plus de compétences en ce domaine depuis que l'enseignement artistique a été décentralisé en 1983, les CNR et les ENMDT continuent à bénéficier du soutien financier du ministère de la culture tant pour leurs dépenses de fonctionnement que leurs dépenses d'investissement. On soulignera que ces aides, qui représentent en moyenne 9 % du budget de ces établissements, ne correspondent pas à la prise en charge d'une dépense particulière.

Cette enveloppe qui s'élevait à 28,65 millions d'euros en 2003, ne devrait pas évoluer en 2004.

Au-delà des subventions accordées aux établissements, le ministère apporte un soutien financier spécifique à la structuration territoriale de l'enseignement à travers, d'une part, les schémas départementaux et, d'autre part, les protocoles de décentralisation.

En 2003, 1,32 million d'euros a été consacré à la mise en oeuvre des schémas départementaux qui sont destinés à assurer une meilleure mise en réseau des établissements.

Les protocoles de décentralisation visent à identifier les responsabilités respectives des différents niveaux de collectivités à l'égard des établissements d'enseignement. En 2001, la région Nord-Pas-de-Calais a été la première à expérimenter ce dispositif pour une période de trois ans. Le montant global des crédits engagés par l'Etat dans cette expérimentation s'élève à 2,28 millions d'euros, dont 1,52 million d'euros pour le spectacle vivant. En 2003, les régions Haute-Normandie et Rhône-Alpes se sont engagées dans ce processus. Les actions prévues seront mises en oeuvre en 2004 sur des crédits de la délégation au développement et à l'action territoriale du ministère.

L'objectif poursuivi, au-delà d'une clarification des conditions d'intervention des collectivités territoriales, est d'accroître l'offre d'enseignement, pour l'heure très inégalement répartie entre les régions, mais également de parvenir à une plus grande lisibilité des parcours de formation.

C'est dans cette perspective qu'a été introduit dans le projet de loi relatif aux responsabilités locales un article visant à préciser les responsabilités respectives des départements, des communes et des régions en matière d'enseignement artistique.

Le dispositif prévoit que :

- l'enseignement initial relève des communes ;

- les départements élaborent des schémas départementaux destinés à assurer la mise en réseau des établissements et participent à la prise en charge du coût d'accès à l'enseignement initial des élèves résidant dans des communes ne disposant pas d'établissement, cela dans le souci d'alléger la charge que représente pour les communes l'enseignement artistique ;

- les régions financent les enseignements à vocation professionnelle.

Cette clarification des compétences devrait s'accompagner du transfert aux régions et aux départements des dotations consacrées aux CNR et aux ENMDT.

Si les principes sur lesquels repose cette répartition des compétences correspondent peu ou prou à l'engagement actuel des collectivités, sa mise en oeuvre supposera toutefois, pour certains établissements ou formations, un décroisement des financements et exigera, de la part de l'Etat, une clarification des différentes formations préparées par ces établissements, qui sont pour l'heure très hétérogènes.

Cette clarification est en cours dans les différentes disciplines artistiques, parallèlement à l'élaboration d'un schéma directeur de l'enseignement supérieur.

DES DISPOSITIFS DE FORMATION PLUS LISIBLES

• Musique

L'action engagée vise à

- définir un diplôme d'enseignement supérieur à destination des interprètes et à préfigurer des pôles d'enseignement supérieur, ce qui, s'appuyant sur les structures de formation existantes -en particulier les Centres de formation des enseignants de la musique et de la danse (Cefedem), les Centres de formation des musiciens intervenants à l'école élémentaire et préélémentaire (CFMI) et certains enseignements de haut niveau déjà mis en place dans plusieurs CNR- permettra, en lien avec les universités, de renforcer dans cette discipline une offre de formation supérieure, actuellement limitée aux deux seuls conservatoires nationaux supérieurs de musique et de danse de Paris et de Lyon ;

- développer des dispositifs de formation continue à destination des enseignants et mettre en place des formations diplômantes conduisant à la délivrance, par les Cefedem, d'un certificat d'aptitude aux fonctions de professeur chargé de direction dans les écoles de musique, de danse et d'art dramatique, répondant ainsi à un besoin important dans ce type d'établissements.

• Théâtre

En ce domaine, le ministère prépare la création d'un diplôme d'Etat (DE) d'enseignement de l'art dramatique. Ce DE validera la capacité à enseigner le théâtre et garantira le développement d'une offre de formation de qualité mais permettra également d'inscrire l'enseignement de l'art dramatique au sein des certifications reconnues par l'Etat, au même titre que la musique et la danse. Une première session de ce diplôme, sur épreuve, devrait être organisée en 2004.

La création de ce diplôme implique une réflexion plus globale sur le renforcement et la cohérence des dispositifs certifiant les compétences des enseignants de l'art dramatique et donc, en parallèle, une modification des textes régissant le certificat d'aptitude (CA) aux fonctions de professeur d'art dramatique. Rappelons que le CA, dont une unique session a été organisée en 1992 dans la discipline « art dramatique », constitue le niveau le plus élevé en terme de certification.

Par ailleurs, la signature de la plate-forme de l'enseignement supérieur pour la formation du comédien en avril 2002, au-delà des orientations et des principes qui la constituent, prévoit la création d'un diplôme national commun sanctionnant les enseignements dispensés au sein des écoles supérieures de théâtre qui permettra une reconnaissance officielle du caractère supérieur de leurs formations. La création du diplôme commun des écoles supérieures de théâtre est inscrite au programme de travail de la direction pour le dernier trimestre de l'année.

Enfin, chaque école supérieure, en partenariat avec les conseils régionaux, devra progressivement mettre en oeuvre des dispositifs d'insertion des jeunes comédiens issus de leur cursus de formation.

• Danse

L'action du ministère vise la création d'un dispositif d'insertion en partenariat avec les centres chorégraphiques nationaux et la mise en place de formations diplômantes conduisant à la délivrance du certificat d'aptitude (CA) aux fonctions de professeur de danse dans les écoles territoriales de musique, de danse et d'art dramatique, au Centre national de la danse ainsi qu'au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon.

• Arts de la rue

Le ministère est engagé dans la mise en place de la formation supérieure dispensée dans le cadre de la Cité des arts de la rue à Marseille. Cette formation avancée et itinérante aux arts de la rue (FAIAR) est en phase de préfiguration depuis l'année 2002.

• Une progression sensible des investissements

Les dépenses d'investissement de la DMDTS s'élèvent en 2004 à 37,48 millions d'euros, en progression de 5,42 % par rapport à 2003.

La capacité d'investissement ainsi dégagée permettra de poursuivre la politique de construction, d'aménagement et de remise aux normes des lieux de production, de diffusion et d'enseignement sur l'ensemble du territoire.

Ces crédits viendront compléter ceux des conseils régionaux dans le cadre des contrats de plan Etat/Région sur de nombreuses opérations comme la restructuration du Conservatoire national de région de l'agglomération de Bayonne-Anglet-Biarritz, la rénovation du théâtre des Ilets à Montluçon ou encore les travaux sur l'Arsenal à Perpignan, fabrique des arts de la rue.

Ils permettront également de financer en partenariat avec des collectivités territoriales des opérations d'intérêt national portant sur le réseau institutionnel du spectacle vivant, tant dans le domaine de la formation (l'ENM du Puy-en-Velay, construction d'une école nationale de musique à Mantes-la-Jolie, réaménagement du CNR de Marseille...) que dans celui de la production et de la diffusion des formes artistiques (lancement de l'opération Sextius Mirabeau à Aix-en-Provence, réhabilitation du centre dramatique national (CDN) de Reims, nouvelle salle pour le CDN de Montreuil, construction du CCN de Rilleux-la-Pape, restructuration du théâtre national populaire à Villeurbanne, Théâtre national de Bretagne, scène nationale auditorium de Poitiers, scène nationale Le Channel à Calais...).

2004 sera enfin l'année du financement de deux Zéniths, l'un à Saint-Etienne, l'autre à Amiens, conjointement avec les collectivités sièges de ces équipements de diffusion musicale.

2. Les arts plastiques : une action relancée

• Les moyens mis à la disposition de la délégation aux arts plastiques

* Les missions de la délégation aux arts plastiques

La délégation aux arts plastiques (DAP), dont les modalités d'organisation ont été sensiblement modifiées à la suite de la transformation du Centre national des arts plastiques en établissement public conformément au décret du 23 décembre 2002, exerce trois missions essentielles : apporter un soutien à la création, constituer et diffuser un patrimoine public dans le domaine de l'art contemporain et organiser et contrôler l'enseignement des arts plastiques.

Le soutien à la création repose sur des dispositifs d'aides individuelles gérées par les DRAC, à l'échelon déconcentré, et par le Centre national des arts plastiques (CNAP). Ces aides visent à soutenir des projets personnels et s'appuient sur le développement et la gestion d'un parc d'ateliers.

Par ailleurs, certaines institutions sous la tutelle du ministère (Académie de France à Rome, Villa Arson) ou en partenariat avec celui-ci (37 centres d'art), contribuent également à l'accueil d'artistes en résidence et à la production d'oeuvres.

En outre, le ministère apporte son soutien à des institutions de recherche et de développement des techniques (par exemple, centre de recherche sur les arts du feu et de la terre à Limoges) ou au maintien de savoir-faire traditionnels.

La constitution d'un patrimoine public dans le domaine de l'art contemporain et sa diffusion passe par un ensemble d'actions et d'établissements.

L'acquisition d'oeuvres d'artistes vivants par l'Etat contribue à la constitution de ce patrimoine mais constitue également un outil de soutien aux artistes ainsi qu'aux galeries d'art. Cette politique d'acquisition est conduite, au plan national, par le FNAC (Fonds national d'art contemporain), et, au plan régional, en partenariat avec les régions, par les 24 FRAC (fonds régionaux d'art contemporain).

Concourent aussi à cette action patrimoniale les commandes publiques initialement développées par le CNAP, désormais relayées par les collectivités territoriales. Le Mobilier national et les manufactures contribuent également à cette politique en créant, pour le compte de l'Etat, prototypes, meubles et oeuvres d'après des projets d'artistes contemporains.

La DAP exerce le contrôle pédagogique des sept écoles nationales d'art , qui délivrent des diplômes d'Etat. Il convient de souligner que ces écoles ont été dotées par le décret du 23 décembre 2002 du statut d'établissement public à caractère administratif ; elles étaient jusque là pour six d'entre elles abritées au sein du CNAP, sans bénéficier de l'autonomie et, pour l'une d'entre elles, gérée sous un statut associatif (École nationale de la photographie d'Arles).

* Un effort budgétaire poursuivi

En 2004, les crédits affectés à la DAP s'élèveront en dépenses ordinaires et autorisations de programme à 110,85 millions d'euros, en progression de 2,44 % par rapport à 2003 et de 8,94 % par rapport à 2002.

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution du budget de la DAP entre la loi de finances initiale pour 2002 et le projet de loi de finances pour 2004.

CRÉDITS DE LA DÉLÉGATION AUX ARTS PLASTIQUES
(hors personnel et fonctionnement courant administration centrale et déconcentrée)

En millions d'euros

LFI 2002*

LFI 2003*

PLF 2004

Évolution 2003/2004 en  %

Variation en montant 2002/2004

Taux de progression 2002/2004

Entretien du
patrimoine monumental

0,00

0,47

0,48

3,00

0,48

Ns

Fonctionnement courant des
services à compétence nationale**

0,00

3,29

3,70

12,50

3,70

Ns

Subventions aux
établissements publics

33,14

34,49

35,42

2,70

2,28

6,87

Dont fonctionnement courant

28,95

30,29

31,12

 

2,17

7,51

Dont équipement courant (AP)

4,19

4,20

4,29

 

0,10

2,43

Crédits d'intervention

58,92

61,85

60,74

- 1,80

1,82

3,09

Interventions hors commandes
et acquisitions

49,59

52,52

51,08

 

1,49

3,01

Dont interventions centrales

11,56

12,99

11,46

 

-0,10

-0,87

Dont interventions
déconcentrées ***

38,03

39,54

39,62

 

1,59

4,19

Commandes et acquisitions

9,33

9,33

9,66

3,54

0,33

3,48

Investissements (AP)

9,85

8,12

10,52

29,60

0,67

6,80

Total dépenses ordinaires
+ autorisations de programme

101,91

108,21

110,85

2,44

8,94

8,78

* Hors réserve parlementaire et hors BCRD

** Mobilier national et Manufacture de Sèvres (transformés en SCN en 2003)

***Pour ce qui concerne les crédits d'intervention déconcentrés, les montants sont donnés à titre estimatif pour 2003 et à titre indicatif pour 2004. En effet, les crédits étant globalisés au sein de 3 articles de prévisions (hors crédits d'entretien), la répartition fine de ces crédits ne peut être réalisée avant les conférences budgétaires d'automne avec les DRAC. La base 2002 est en revanche fondée sur le réalisé. Les tableaux présentés en conférence de presse seront désormais actualisés ainsi.

• Les priorités pour 2004

L'évolution des dotations fait apparaître deux priorités :

- une nouvelle dynamique de diffusion de l'art contemporain ;

- une relance de la politique d'investissement de la DAP.

* Renforcer la diffusion de l'art contemporain

En 2003, le ministère, rappelons-le, avait souhaité mettre en valeur la contribution des FRAC à la diffusion de l'art contemporain. Dans ce cadre, ont été notamment organisées l'exposition « Trésors publics, 20 ans de création contemporaine », qui a attiré 300 000 visiteurs et a permis de présenter plus de 800 oeuvres venant de tous les FRAC dans quatre villes -Arles, Avignon, Nantes et Strasbourg-, mais également des manifestations plus locales (« Détours en France ») initiées par les FRAC autour de l'art contemporain.

En 2004, la priorité est donnée à la constitution d'un nouvel établissement public consacré à l'image, la Galerie nationale du Jeu de Paume. Outre les crédits dégagés par les institutions concourant à ce projet (Jeu de Paume actuel, Centre national de la Photographie, ...), la DAP affectera une mesure nouvelle à hauteur de 120 000 euros à ce futur établissement.

Ce projet traduit le souci de la DAP de diversifier les disciplines artistiques qu'elle soutient, souci qu'illustre également la réalisation d'une importante exposition sur le site de l'ancien MNAAO à la Porte Dorée consacrée aux collections de design du Fonds national d'art contemporain. Une enveloppe de 500 000 euros sera accordée à cette manifestation qui se tiendra à la fin de l'année 2004.

Votre rapporteur soulignera également la progression de 3,5 % des crédits affectés à l'achat d'art contemporain et à la commande publique, qui, en 2004, atteindront 9,6 millions d'euros .

* Relancer la politique d'investissement de la DAP

Les dépenses d'investissement de la DAP s'élèvent en 2004 en autorisations de programme à 10,52 millions d'euros, contre 8,12 millions d'euros en 2003, soit une progression significative (29,60 %).

Ces crédits bénéficieront, d'une part au réseau d'enseignement et, d'autre part, aux institutions de diffusion des arts plastiques.

L'augmentation des dotations destinées aux écoles d'art permettra :

- pour les écoles territoriales, la poursuite ou l'achèvement de travaux déjà engagés, l'acquisition de matériels pédagogiques ou informatiques (écoles de Mulhouse, Strasbourg, Clermont-Ferrand ou Montpellier) ; la nouvelle implantation de l'école de Caen ; l'équipement de l'école d'Angoulême ; la rénovation et la mise en réseau des écoles du Nord-Pas-de-Calais ;

- pour les écoles nationales, la poursuite des nécessaires programmes de rénovation.

L'effort dégagé en 2004 bénéficiera également au réseau de la diffusion des arts plastiques, et en particulier :

- aux FRAC « de deuxième génération », afin de doter les institutions des équipements nécessaires à leurs missions patrimoniales, pédagogiques et culturelles. Ce programme concerne en 2004 les FRAC des régions Auvergne, Bretagne, Centre, Lorraine, Picardie et Poitou-Charentes ;

- aux centres d'art, associations labellisées par l'Etat, dans le prolongement des actions engagées dès 1998 pour développer leur action en partenariat avec les collectivités territoriales ;

- à la création ou à la rénovation d'ateliers et résidences d'artistes en Languedoc, en Basse-Normandie, en Midi-Pyrénées et à Paris.

On notera également, pour s'en féliciter, la poursuite des travaux de mise en sécurité et de restructuration des Manufactures nationales, désormais dotées du statut de services à compétence nationale, auxquels seront consacrés des crédits à hauteur de 1,5 million d'euros.

III. UN NOUVEL ÉLAN POUR LA POLITIQUE DU PATRIMOINE ?

L'effort budgétaire en faveur du patrimoine, nécessaire après l'opération-vérité conduite en 2003, s'accompagne d'une réforme des modalités d'intervention du ministère dans ce domaine.

A. UN EFFORT BUDGÉTAIRE QUI DOIT S'INSCRIRE DANS LA DURÉE

1. Un sursaut budgétaire

• L'évolution des crédits pour 2004

Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit une augmentation des enveloppes consacrées à la restauration des monuments historiques -hors grandes opérations- de 10 %. Les crédits passeront ainsi en autorisations de programme de 204 millions d'euros en 2003 à 224 millions d'euros en 2004.

Le tableau ci-après récapitule l'évolution des crédits d'investissement destinés aux monuments historiques entre la loi de finances pour 2001 et le projet de loi de finances pour 2004.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS D'INVESTISSEMENT MONUMENTS HISTORIQUES 2001-2004

(en autorisations de programme)

 

LFI 2001

LFI 2002

LFI 2003

PLF 2004

Monuments historiques appartenant à l'Etat

102,83

108,72

98,04

110,12

Monuments historiques n'appartenant pas à l'Etat

111,16

111,16

105,96

114,26

Grandes opérations (Grand Palais, Cité de l'architecture et du patrimoine, Palais Garnier, Versailles, Louvre)

31,34

35,74

42,00

12,67

TOTAL

245,33

255,62

246,01

237,06

(Source : ministère de la culture et de la communication)

Dans le cadre de l'annonce, le 17 septembre dernier, d'un plan national pour le patrimoine, le ministre de la culture a précisé que cet effort serait poursuivi au cours des cinq années à venir avec l'objectif de porter ces enveloppes -hors grandes opérations- à 260 millions d'euros en 2008. Il semble que cet engagement -dont votre rapporteur se félicitera- se substitue au dépôt et au vote d'une loi de programme sur le patrimoine monumental, ce qu'il ne pourra que regretter.

En tout état de cause, le renforcement des dotations consacrées aux monuments historiques répond à une impérieuse nécessité, si l'on prend en compte les besoins nécessaires pour assurer dans de bonnes conditions la conservation du patrimoine classé.

Le document élaboré en janvier 2003 par la direction de l'architecture et du patrimoine (DAPA) du ministère souligne l'« état sanitaire » préoccupant des monuments classés qui, pour près de 20 % -soit 2 800 sur 15 000 environ- seraient en péril. Si l'incendie du château de Lunéville ou l'effondrement d'un plancher du château de Chambord ont souligné le mauvais état de monuments prestigieux, il convient toutefois de souligner que les édifices en grandes difficultés appartiennent pour leur majorité à des communes de moins de 2 000 habitants qui, à de rares exceptions près, ne disposent pas de ressources suffisantes pour financer sans l'aide de l'Etat ou d'autres collectivités publiques, les investissements nécessaires. S'agissant des monuments appartenant à l'Etat, qui représentent seulement 9 % du parc classé, la DAPA estime à 9 % d'entre eux la proportion d'immeubles en difficulté. Cette appréciation satisfaisante doit être nuancée dans la mesure où l'Etat possède essentiellement des édifices de très grande importance tels les cathédrales, les abbayes, les domaines nationaux ou encore des monuments comme le Grand Palais ou le Palais de Chaillot à Paris.

D'après cette étude, il conviendrait de consacrer à la conservation stricto sensu des monuments classés, environ 6 milliards d'euros dont le quart serait directement affecté à remédier aux situations de péril, données significatives du caractère très dégradé des monuments.

A cet égard, votre rapporteur regrettera que n'ait pas été poursuivi l'effort engagé par la loi de finances pour 2003 en faveur d'une réévaluation du montant des crédits d'entretien .

Traditionnellement sous-dimensionnés, ces crédits ne permettent pas d'assurer dans de bonnes conditions l'entretien courant des monuments, ce qui est regrettable dans la mesure où l'emploi de ces crédits soumis à des procédures souples permet d'éviter une dégradation des monuments, et partant, un renchérissement du coût des travaux de restauration.

En 2003, ces crédits avaient progressé de près de 50 %.

En 2004, le montant des crédits d'entretien s'élèvera à 30,99 millions d'euros, en recul de 3,7 % par rapport à 2003 dont :

- 18,42 millions d'euros inscrits sur le chapitre 35-20/20 pour les bâtiments relevant de la DAPA, contre 18,93 millions d'euros en 2003 ;

- 12,56 millions d'euros inscrits sur le chapitre 43-30/40 pour les monuments historiques n'appartenant pas à l'Etat, contre 13,26 millions d'euros en 2003.

• Les priorités retenues pour l'affectation des crédits en 2004

* En ce qui concerne les monuments appartenant à l'Etat , la poursuite de la restauration des 87 cathédrales demeurera une priorité.

L'achèvement de la restauration de l'élévation nord de la cathédrale de Strasbourg, ainsi que la poursuite des travaux concernant la flèche, sont envisagés pour 2004. L'année 2004 verra également le financement de la seconde tranche de la 10è phase de création de vitraux de la cathédrale de Nevers, qui parachève un exceptionnel programme de restauration des baies et de création de vitraux contemporains, faisant appel aux plus grands artistes et maîtres verriers. La deuxième et dernière tranche (2 millions d'euros) de restauration de la façade est de la tour de Beurre de la cathédrale de Rouen marquera également la fin de la restauration de cette tour emblématique, dont les autres façades ont été traitées ces dernières années. Sont également envisagés pour 2004 la poursuite de la consolidation de la cathédrale de Beauvais, qui pourrait s'accélérer grâce au soutien financier apporté par les collectivités territoriales, l'engagement des travaux de restauration de la face nord de la tour nord-ouest de la cathédrale Notre-Dame de Paris ainsi que la deuxième des trois tranches, évaluées à 1 million d'euros chacune, de la restauration du choeur et des terrasses de la cathédrales de Limoges, l'achèvement de la restauration de la façade est du clocher de la cathédrale de Rodez et la poursuite des programmes de restauration des cathédrales d'Amiens et de Marseille.

Outre ces travaux sur les cathédrales, est également programmée la restauration du clos et du couvert de la villa Cavrois, oeuvre de Mallet-Stevens à Croix (Nord), acquise par l'Etat en 2001, pour laquelle sont prévues trois tranches de 2 millions d'euros chacune, financées de 2003 à 2005. La seconde tranche de consolidation et de restauration générale du donjon de Vincennes, dont le coût total est estimé à 13,5 millions d'euros, a été financée en 2003 ; restera à mener en 2004 la restauration des casemates entourant le donjon, pour 4,57 millions d'euros. Seront également engagées l'opération de restauration des remparts du Mont-Saint-Michel, dans le cadre du projet de rétablissement du caractère maritime de sa baie ainsi que la poursuite des travaux sur le Panthéon.

Enfin, sera lancé, en 2004, le vaste programme de travaux concernant le château et le domaine de Versailles, qui devrait aboutir au projet de « Grand Versailles ». La première phase de ce programme, à laquelle 135 millions d'euros sont affectés, devrait s'achever en 2009. Elle permettra la mise en sécurité des bâtiments, l'installation des services administratifs au Grand commun, ce qui aura pour effet d'accroître les espaces ouverts au public, et la poursuite de la restauration du château et du domaine.

* S'agissant des monuments historiques n'appartenant pas à l'Etat , les crédits continueront d'une manière générale à être prioritairement consacrés au traitement des urgences « sanitaires » et à financer des opérations déjà engagées sur les exercices budgétaires précédents.

Le financement des divers programmes exceptionnels ayant fait l'objet d'engagements du ministère de la culture sera poursuivi en 2004.

On citera le programme de restauration des grands monuments de la Ville de Paris (en particulier l'église Saint-Sulpice et la tour Saint-Jacques), la restauration de l'ancien couvent des Bernardins à Paris, la réhabilitation du parc de Méréville, la restauration des menuiseries de la cité de la Muette à Drancy, le programme de restauration du patrimoine emblématique de la ville de Lille dans le cadre de l'opération « Lille 2004 », la restauration de la tour abbatiale de Saint-Amand-les-Eaux (Nord-Pas-de-Calais), la restauration de l'église Saint-Maclou à Rouen, le sauvetage de l'église Saint-Jacques de Dieppe, le plan pour le patrimoine antique de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur qui comprend notamment la restauration de l'amphithéâtre d'Arles, le programme relatif au patrimoine du XVIIIe siècle de la ville de Nancy dans la perspective de la commémoration en 2005 du patrimoine de la Lorraine de Stanislas, ainsi que le traitement des urgences sanitaires du Palais des Papes à Avignon. Les opérations engagées sur le grand théâtre de Bordeaux, l'ancienne prison de Guingamp, les hospices de Beaune, la collégiale de Dole, le château neuf de Laval et l'ancienne cathédrale de Laon seront par ailleurs poursuivies.

Au nombre des nouveaux chantiers qui devraient débuter en 2004, votre rapporteur évoquera, parmi les plus remarquables, les restaurations de l'ancienne abbaye de Lavoute-Chilhac (futur centre culturel de rencontre sur le thème du paysage), des halles de Reims (projet de réutilisation en musée), du rempart effondré du château de Saumur et du château de Dampierre-sur-Boutonne à la suite de son incendie.

Après une année consacrée à des travaux de protection et de consolidation d'urgence, la restauration du château de Lunéville, en partie ravagé par un incendie en janvier 2003, débutera en 2004. L'effort particulier engagé dans certaines régions pour le financement du volet patrimonial des contrats de plan (notamment le patrimoine roman d'Auvergne, les édifices emblématiques en péril de Haute-Normandie) sera poursuivi.

* La diminution des besoins liés au financement des grandes opérations situées pour l'essentiel à Paris ou en Ile-de-France, dont les enveloppes passent de 42 millions d'euros en 2003 à 12,67 millions d'euros en 2004, permettra d'assurer une meilleure répartition territoriale des crédits du patrimoine .

Ainsi, si l'on considère les dotations inscrites aux chapitres 56-20 et 66-20, soit l'enveloppe budgétaire consacrée largo sensu au patrimoine monumental, 82,55 % de ces crédits bénéficieront aux opérations en région en 2004 contre seulement 71,8 % en 2003.

2. La gestion des crédits du patrimoine : un effort à poursuivre

Votre rapporteur avait souligné dans son précédent rapport la difficulté chronique que représentait la sous-consommation des crédits d'investissement, et en particulier ceux destinés au patrimoine. Les causes de cette sous-consommation ont été analysées dans le cadre du rapport de M. Rémi Labrusse, conseiller référendaire à la Cour des comptes, remis au ministre de la culture en février 2002.

Dès l'exercice 2003, plusieurs mesures ont été prises pour mettre en oeuvre certaines des propositions préconisées par ce rapport.

Ainsi, dès le vote de la loi de finances pour 2003, la clé d'ouverture des crédits de paiement pour les travaux réalisés par l'Etat a été modifiée afin de retenir une ouverture sur cinq ans, et non plus quatre, délai plus conforme aux modalités de déroulement des chantiers. Par ailleurs, l'enveloppe des crédits d'entretien a été accrue.

En cours d'exercice, la gestion des crédits affectés au patrimoine a été guidée par le souci de développer la déconcentration et la globalisation des crédits afin de permettre une meilleure allocation des enveloppes.

Ainsi, a été mis en place le logiciel « Accord » qui devrait, une fois résolues les difficultés de démarrage qu'a connues ce programme, permettre à terme une mise à disposition plus rapide des crédits. Par ailleurs, une réforme des procédures de gestion des autorisations de programme provisionnelle a été mise en oeuvre afin de résoudre les retards dans l'ouverture de crédits liés au versement des fonds de concours. Enfin, une circulaire du 8 août 2003 a été envoyée aux services déconcentrés pour permettre une amélioration de la consommation des crédits, tant pour les autorisations de programme, grâce, notamment, à une meilleure anticipation des besoins au niveau régional et à un recours plus parcimonieux aux études préalables, que pour les crédits de paiement afin de les dimensionner au mieux aux besoins réels et immédiats.

Cependant, force est de constater que les mesures de régulation prises en cours d'année ont réduit l'impact de ces mesures.

Pour les dépenses ordinaires, le gel des reports 2002 sur le premier semestre 2002 puis le blocage d'environ 20 % des dotations a contraint à ralentir le versement des subventions sur le titre IV. S'agissant des dépenses en capital, un gel sur les crédits de paiement à hauteur de 78,5 millions d'euros sur le chapitre 56-20 et de 18,05 millions d'euros sur le chapitre 66-20 a conduit à diminuer le rythme des délégations et à ajuster les dotations. Enfin, et surtout, l'application du principe d'auto-assurance évoqué plus haut par votre rapporteur a contraint le ministère à prélever 15 millions d'euros sur les chapitres consacrés au patrimoine et à l'architecture afin de dégager les sommes nécessaires à la couverture du déficit de l'INRAP.

B. UNE RÉFORME INDISPENSABLE DES MODALITÉS D'INTERVENTION DE L'ETAT

1. Une responsabilisation accrue des acteurs de la politique conduite par l'Etat

Lors de la présentation du plan pour le patrimoine, le ministre de la culture a insisté sur la nécessité pour l'Etat de réorganiser son administration. Il soulignait, notamment, que « la transversalité des approches n'est pas suffisamment assurée en matière d'architecture et de patrimoine, tant en administration centrale qu'au sein des services déconcentrés. Les attentes des acteurs et notamment des collectivités territoriales, vont pourtant dans le sens d'une approche globale des territoires qui transcende les divers champs scientifiques patrimoniaux ».

Afin de remédier à cette difficulté, les mesures prises visent, d'une part, à réorganiser les services de l'Etat et, d'autre part, à moderniser les établissements et à en responsabiliser la gestion.

Ces deux axes de réforme sont, pour le premier, encore à l'état d'ébauche et, pour le second, en revanche, bien engagé.

• La réorganisation des services de l'Etat

* Les services du ministère

Une réflexion sur la réorganisation des services déconcentrés chargés de l'architecture et du patrimoine a été lancée par une circulaire du 30 juin 2003 adressée aux préfets de région et de département, et donc en l'espèce aux directeurs régionaux des affaires culturelles et aux chefs des services départementaux de l'architecture et du patrimoine.

D'après les informations communiquées par le ministère, les « préfigurations » de la nouvelle organisation seront mises en place dès le début de l'année 2004. Les objectifs poursuivis sont le développement de l'échelon départemental de proximité, qui correspond au-delà du simple aspect de la réforme administrative, à la montée en puissance du rôle des départements dans la politique du patrimoine, à la mise en place d'un guichet unique pour les autorisations de travaux et à une plus grande pluridisciplinarité architecture et patrimoine dans les interventions des services.

En ce qui concerne les services centraux , le ministre a souhaité que puisse être mise en oeuvre une réforme de l'organisation de la DAPA en tenant compte des mêmes objectifs mais également de la nécessité de mieux assurer certaines de ses missions et de clarifier les rôles respectifs de la direction et des établissements publics intervenant dans les domaines de l'architecture et du patrimoine.

* Des procédures réformées

La spécificité des travaux réalisés sur les monuments historiques justifie que leur soient appliquées des règles spécifiques, notamment en ce qui concerne la maîtrise d'oeuvre.

En vertu de ces règles, qui résultent des dispositions statutaires applicables aux architectes en chef des monuments historiques (ACMH) et aux architectes des bâtiments de France (ABF), la maîtrise d'oeuvre des travaux de restauration des monuments classés, dont l'Etat est maître d'ouvrage ou qu'il finance, est assurée par l'ACMH tandis que celle des travaux d'entretien et de réparations ordinaires est confiée à l'ABF.

L'application de ces règles, qui se heurtent à l'insuffisance des effectifs des ACMH comme à la surcharge de travail à laquelle sont confrontés les ABF a souvent été considérée comme une des principales causes des retards pris dans le déroulement des chantiers... mais aussi d'exaspération des propriétaires publics ou privés de monuments historiques.

Le rapport remis par la commission présidée par M. Jean-Pierre Bady au ministre de la culture en novembre 2002 a réitéré ce constat et a formulé diverses propositions destinées à assouplir le dispositif réglementaire.

En ce qui concerne la maîtrise d'oeuvre, deux séries de mesures, de portée contrastée, devraient être prises.

Les assouplissements, depuis longtemps attendus, devraient porter pour la maîtrise d'oeuvre des travaux de restauration :

- sur un accroissement du nombre des ACMH, de l'ordre de 50 % sur trois ans, selon les indications figurant dans le plan national pour le patrimoine. Dix postes supplémentaires seront ouverts au concours d'ici mi-2004 ;

- sur l'aménagement du principe de territorialité et d'affectation obligatoire des ACMH. Les propriétaires pourront choisir leur maître d'oeuvre sur une liste de trois ACMH. Il convient toutefois de rappeler que cette possibilité de choisir son ACMH est déjà ouverte aux propriétaires et que l'administration répond presque systématiquement de façon favorable aux demandes qui lui sont adressées.

On soulignera que l'organisation des études dispensées par le Centre des hautes études de Chaillot et celle du concours d'ACMH ont d'ores et déjà été modifiées par un arrêté du 31 juillet 2003.

S'agissant des travaux d'entretien, les avancées proposées sont beaucoup plus modestes. En effet, les aménagements des règles de maîtrise d'oeuvre sont limités au cadre de l'expérimentation de gestion décentralisée des crédits du patrimoine prévue par l'article 74 du projet de loi relatif aux responsabilités locales. Pour l'application de ce dispositif, un décret devrait prévoir les conditions de recours à une maîtrise d'oeuvre spécialisée, qui ne sera pas limitée au seul ABF.

Parallèlement à ces évolutions, le ministère a engagé une réforme visant à laisser aux propriétaires la maîtrise d'ouvrage des travaux qu'ils souhaitent engager.

Cette volonté de ne plus voir l'Etat assumer systématiquement la maîtrise d'ouvrage répond à la volonté de responsabiliser les propriétaires, mais également de recentrer l'action des services de l'Etat sur leurs missions régaliennes que sont, notamment, la délivrance des autorisations de travaux et le contrôle scientifique des travaux. Elle se traduit dans le projet de loi de finances pour 2004 par le transfert des crédits d'investissement du titre V vers le titre VI.

Afin de permettre aux propriétaires de s'organiser, il a été décidé une mise en oeuvre progressive sur trois ans de cette réforme ; les transferts des crédits pour les monuments n'appartenant pas à l'Etat s'effectueront à hauteur de 20 % en 2004 puis 30 % en 2005 et, enfin, 50 % en 2005. Parallèlement sera engagée une réflexion avec les collectivités territoriales sur l'assistance qui peut être apportée aux propriétaires qui ne peuvent assumer, faute de moyens, la maîtrise d'ouvrage, ce qui concerne tout autant les collectivités publiques de dimension modeste que les propriétaires privés.

• Réformer les établissements publics concourrant à la politique du patrimoine

* Le Centre des monuments nationaux

Le Centre des monuments nationaux, après une réforme statutaire intervenue en avril 2000 6 ( * ) destinée à distinguer ses responsabilités propres de celles de la DAPA, puis les difficultés qui ont marqué sa gestion, devra relever en 2004 deux défis : d'une part, la réforme de son organisation interne et, d'autre part, le transfert de propriété aux collectivités territoriales de certains monuments historiques dont il est affectataire.

Les difficultés rencontrées par l'établissement public jusqu'en 2002 l'ont conduit à modifier son organisation autour d'un projet d'établissement, fondé sur cinq programmes :

- mettre en place une organisation déconcentrée propre à développer les capacités d'initiative des administrateurs de monuments et à recentrer le siège sur ses missions d'impulsion, de conseil, d'expertise, d'évaluation et de contrôle ;

- améliorer les conditions d'accueil et de visite ;

- renouveler et diversifier la politique et les offres culturelles ;

- améliorer le dialogue social et les conditions de travail ;

- faire du projet de monument un outil de pilotage au service de la politique culturelle de l'établissement.

Ce projet d'établissement devrait être soumis au conseil d'administration de l'établissement avant la fin de l'année 2003. En parallèle, sera adopté un nouvel organigramme qui permettra, en particulier, de rationaliser les fonctions de gestion et de simplifier les modes de relation entre les monuments et les services du siège.

Cependant, force est de reconnaître que l'exercice de réorganisation n'est pas simple dans la mesure où les perspectives de transferts de propriété au profit des collectivités territoriales ne permettent pas aujourd'hui de connaître le périmètre futur du CMN.

Les travaux de la commission présidée par M. René Rémond pour définir les critères de « transférabilité » des monuments devraient s'achever prochainement. Cependant, le décret fixant la liste des monuments effectivement transférables ne pourra être publié qu'une fois la loi relative aux responsabilités locales définitivement adoptée.

Par ailleurs, au-delà de ce changement de périmètre, des discussions ont été engagées, à la demande du ministre, entre le CMN et la RMN afin d'identifier les possibilités de rapprochement des activités comparables gérées en parallèle par les deux établissements publics.

Sans être hostile à cet éventuel rapprochement, votre rapporteur relèvera que, si les activités éditoriales et commerciales qu'ils conduisent présentent de grandes similitudes, force est de constater que les conditions dans lesquelles elles sont, pour l'heure, gérées sont également peu satisfaisantes, qu'il s'agisse de la RMN ou du CMN. La mise en oeuvre de synergies suppose au préalable une refonte profonde de leur gestion. A cet égard, l'action engagée par la RMN pour remédier aux déficits de ses activités commerciales et éditoriales peut avoir valeur d'exemple pour le CMN.

* La Cité de l'architecture et du patrimoine

Longtemps ajourné, le projet de Cité de l'architecture et du patrimoine a enfin pris corps en 2003.

Dotée désormais du statut d'établissement public à caractère industriel et commercial, la nouvelle institution, dont le programme de travaux est désormais bien avancé, devrait contribuer à renforcer les liens entre l'architecture, domaine souvent négligé par nos concitoyens, et le patrimoine, qui, à l'inverse, bénéficie d'un engouement populaire qui ne se dément pas.

L'article 8 de la loi du 18 juin dernier relative à la rémunération au titre du prêt en bibliothèque a conféré à la Cité de l'architecture et du patrimoine les missions suivantes :

- promouvoir la connaissance du patrimoine et de l'architecture, de leur histoire et de leur insertion dans les territoires ainsi que la diffusion de la création architecturale, tant en France qu'à l'étranger ;

- participer à la valorisation de la recherche et à la formation des agents publics et des professionnels du patrimoine et de l'architecture.

Cet établissement public regroupera trois entités, qui fonctionnaient jusque-là, sous la forme de services à compétences nationales, pour le musée des monuments français et l'Ecole de Chaillot et, d'association, pour l'Institut français d'architecture.

Dans l'attente de leur installation au Palais de Chaillot, dans l'aile de Paris, ces entités sont provisoirement installées au Palais de la porte dorée.

Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit le regroupement au sein d'un nouvel article 23 du chapitre 36-60 des dotations jusque-là attribuées à ses composantes (soit 6,48 millions d'euros). Un montant de 4 millions d'euros de mesures nouvelles est affecté à la nouvelle institution dans la perspective de sa mise en oeuvre, dont 300 000 euros destinés à financer les acquisitions du musée des monuments nationaux qui, après bien des tribulations, devrait connaître une nouvelle jeunesse.

En ce qui concerne les investissements nécessaires à la mise en oeuvre de ce projet, les travaux de rénovation ont commencé en début d'année 2003 et devraient s'achever au cours du premier semestre 2005. Le budget d'investissement prévu pour la rénovation de l'aile de Paris du palais de Chaillot est de 59,93 millions d'euros. La maîtrise d'ouvrage a été déléguée à l'établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels (EMOC).

2,82 millions d'euros d'autorisations de programme sont demandés (chapitre 56.20/50) en 2004 afin de poursuivre le chantier. Au total, y compris ces crédits, 56,43 millions d'euros d'autorisations de programme ont d'ores et déjà été ouvertes pour ce projet.

Un des défis les plus importants que devra relever la Cité de l'architecture et du patrimoine consistera à répondre à la demande des collectivités territoriales mais également des propriétaires privés de disposer d'un vivier plus large d'architectes du patrimoine. En effet, aujourd'hui leur nombre est insuffisant, ce qui constitue un inconvénient majeur alors que les architectes sont peu formés à l'histoire et au patrimoine et que la formation initiale et continue nécessite d'être améliorée en ces domaines.

Dans cette perspective, le Centre des hautes études de Chaillot (CEDHEC) a pour mission de proposer et de mettre en oeuvre des dispositions susceptibles de répondre à ce besoin, tant directement, par l'accroissement du nombre des architectes formés par la Cité de l'architecture et du patrimoine notamment par l'organisation de promotions annuelles, qu'indirectement, par le développement d'un réseau de partenariat à créer avec des écoles d'architecture.

La reconnaissance du diplôme délivré par le CEDHEC dans le cadre de la loi relative à l'enseignement supérieur consacrera le positionnement de cette formation dans l'espace européen de l'enseignement supérieur. Cette formation conservera sa valeur pratique et professionnelle qui a fondé, depuis l'origine, le rayonnement de l'enseignement dispensé par l'école de Chaillot.

Le second axe de développement concerne les architectes de l'Etat, architectes en chef des monuments historiques (ACMH) et architectes urbanistes de l'Etat (AUE) et, sans doute, à terme, ceux que souhaiteront recruter les collectivités territoriales. Le CEDHEC a pour mission de contribuer à l'élargissement de leur recrutement, à leur formation et en particulier au développement de la formation continue des architectes et urbanistes de l'Etat.

Parallèlement, comme cela a déjà été entrepris, le CEDHEC participera à l'offre de formation continue pour les autres personnels de l'Etat, et, à terme, des collectivités territoriales si elles le souhaitent, relevant des corps techniques participant à la maîtrise d'oeuvre ou à la maîtrise d'ouvrage des interventions sur le patrimoine architectural, urbain et paysager.

• Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP)

La loi du 1 er août 2003 7 ( * ) a profondément réformé l'organisation administrative de l'archéologie préventive qui résultait de la loi du 17 janvier 2001.

Cette réforme était nécessaire pour remédier aux difficultés rencontrées par l'INRAP, établissement public doté de droits exclusifs, pour réaliser les sondages et les fouilles préventives dans un contexte marqué par une forte progression des prescriptions archéologiques émises par les services déconcentrés de l'Etat et un rendement insuffisant de la redevance.

En effet, dès la mise en oeuvre de la loi du 17 janvier 2001, les prescriptions archéologiques ont considérablement augmenté : au total, sur les onze premiers mois de l'exercice 2002, 3 700 prescriptions de diagnostics et 455 de fouilles ont été émises alors que dans les années précédentes, l'AFAN recevait environ 2 000 commandes par an.

Face à ces charges accrues, les redevances d'archéologie préventive, au-delà des inconvénients liés à l'inégale répartition de leur coût sur les opérations d'aménagement, se sont révélées insuffisantes pour assurer le financement de l'établissement public.

Selon les prévisions établies lors de l'élaboration de la loi de 2001, la redevance archéologique devait couvrir, toutes opérations confondues et une fois déduites les exonérations, 140 % du coût des opérations. Ce taux de couverture aurait du permettre de financer les missions scientifiques de l'INRAP ainsi que les frais généraux de l'établissement. Par prudence, le taux de rendement retenu lors de la construction du budget 2002 avait été évalué à 130 %.

Ces estimations ont été cruellement démenties par la réalité, comme l'avait au demeurant prévu la Haute Assemblée. Dans les faits, le rendement de la redevance s'est, en effet, avéré beaucoup plus faible que prévu, avoisinant 88 % après exonération et plafonnement pour l'ensemble des opérations correspondant aux conventions de diagnostics et de fouilles signées entre février et décembre 2002. Cet écart s'explique notamment par le fait que, par rapport à l'échantillon utilisé pour simuler le rendement de la redevance, le coût au m² des fouilles s'est dans les faits révélé moins élevé et, à l'inverse, le coût au m² des diagnostics, plus élevé. Par ailleurs, le taux ne tenait pas compte de la moins value induite par l'exonération des lotissements.

D'après les indications fournies par le ministère de la culture, sur les deux années 2002 et 2003, le déficit de l'INRAP devrait atteindre une quarantaine de millions d'euros, le déficit 2002 étant toutefois moins important que celui de 2003, dans la mesure où la majeure partie des ressources de cet exercice était constituée de la facturation des opérations commandées à l'AFAN avant le 1 er février 2002.

Compte tenu de la situation financière de l'établissement à compter de la fin 2002, et malgré le besoin d'intervention archéologique induit par le niveau de prescription atteint, les ministères de tutelle ont été conduits à plafonner les effectifs de l'établissement bénéficiant d'un contrat à durée déterminée (CDD) à 180 ETP et à demander aux préfets de région de limiter les prescriptions archéologiques.

L'INRAP a fonctionné les six premiers mois de l'année 2003 sur la base d'autorisations mensuelles accordées par le contrôleur financier pour la mise en place des crédits nécessaires à son fonctionnement et en appliquant une instruction de forte réduction des effectifs de CDD par l'interruption des nouveaux recrutements ou le non renouvellement des contrats en cours.

C'est dans ce contexte financier très dégradé qu'est intervenue la loi du 1 er août 2003.

Ce texte a profondément modifié les conditions de financement des opérations d'archéologie préventive.

S'agissant des diagnostics, la loi prévoit une redevance d'un faible montant (32 centimes par m²) à laquelle sont assujetties un plus grand nombre d'opérations. Cette redevance a vocation à financer, d'une part, la réalisation des diagnostics qui sont opérés par l'INRAP ou les services archéologiques des collectivités territoriales et, d'autre part, un fonds de péréquation destiné à compenser le coût des fouilles pour les aménageurs dotés de faibles capacités contributives.

Les fouilles dont la réalisation est confiée à l'INRAP ou à tout autre opérateur agréé sont facturées au prix de leur coût de réalisation. Les logements sociaux et les constructions individuelles ainsi que les lotissements ou ZAC accueillant ces deux précédents types de logements verront le financement de leurs fouilles pris en charge automatiquement par le fonds de péréquation ; d'autres projets d'aménagement pourront également être subventionnés par ce fonds, s'ils sont soumis à prescription de fouilles, sur avis d'une commission, afin de faciliter la conciliation entre les objectifs de préservation du patrimoine archéologique et de développement des territoires, en particulier ruraux.

La mise en oeuvre de ce dispositif devrait permettre à l'INRAP d'équilibrer son budget.

Pour un budget de 105 millions d'euros environ, correspondant au budget de croisière envisagé par le législateur en 2001, les ressources de l'INRAP devraient se décomposer ainsi :

- près de 40 millions d'euros issus de la nouvelle redevance archéologique. Le produit global de la redevance devrait s'élever à 83 millions d'euros. Par prudence, compte tenu de l'absence d'historique précis permettant de fiabiliser les simulations statistiques sur lesquelles se fonde le paramétrage de la redevance mais également des aléas de conjoncture possibles, une marge de précaution de 17 millions d'euros a été déduite de cette prévision. Sur les 66 millions d'euros restants, 30 % seront reversés à un fonds de péréquation et une partie de la redevance bénéficiera aux collectivités territoriales qui réalisent des diagnostics. Le produit de la redevance conservé par l'INRAP devrait lui permettre de couvrir les coûts des diagnostics et des activités d'exploitation scientifique des opérations préventives ainsi qu'une partie des frais de structure ;

- près de 65 millions d'euros issus de la facturation des fouilles archéologiques préventives. Les fouilles seront facturées en fonction des moyens humains et matériels mis en oeuvre pour les réaliser, de manière à couvrir ces coûts et la part des frais de structure de l'établissement non financée par la redevance.

Sur ces ressources, l'INRAP pourra réaliser les opérations prescrites dont environ 80 % de diagnostics (représentant près de 30 % des budgets opérationnels) et 20 % de fouilles (représentant 70 % des budgets opérationnels). Les activités scientifiques hors réalisation des opérations prescrites devraient disposer d'un budget de près de 5 % du budget total de l'INRAP.

Il convient de souligner que ces perspectives supposent un effectif contractuel à durée indéterminée identique à celui autorisé aujourd'hui, soit 1 428 postes de contractuels à durée indéterminée et 170 contractuels à durée déterminée.

Dans ce schéma, le Fonds national pour l'archéologie préventive est doté d'environ 20 millions d'euros.

La loi du 1 er août 2003 s'applique sur le plan financier à compter du 1 er novembre 2003. Il est toutefois vraisemblable qu'aucune redevance relevant de la loi de 2003 ne sera reversée à l'établissement avant le 1 er janvier 2004, tandis que la plupart des fouilles réalisées durant les deux derniers mois de l'année 2003 auront été programmées avant l'entrée en vigueur de la loi.

L'année 2004 sera une année de transition. En effet, de nombreux diagnostics réalisés en 2004 auront été prescrits avant le 1 er novembre 2003 et une grande partie des fouilles sera réalisée en 2004 sur la base de conventions conclues avant le 1 er novembre 2003. Ces diagnostics et fouilles relèveront donc de l'ancien dispositif financier.

S'agissant d'un établissement public autofinancé et dont les effectifs sont intégralement constitués d'emplois non budgétaires, aucun crédit et aucun emploi budgétaire ne sont inscrits dans le cadre du projet de loi de finances pour 2004, en dehors de la reconduction de la subvention de recherche de 608 000 euros sur le chapitre 66-98 et d'une subvention au titre des aides à la publication de 500 000 euros sur le chapitre 43-20. Il appartient par ailleurs au conseil d'administration de l'INRAP de déterminer ses effectifs pour l'année prochaine dans le cadre de l'adoption du budget 2004 de l'établissement, qui interviendra en fin d'année.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, votre rapporteur ne peut qu'encourager la commission à une grande vigilance sur la situation de cet établissement public, dont la situation a lourdement pesé en 2003 sur les conditions d'exécution du budget.

2. Vers une politique nationale du patrimoine ?

Le rapport de la commission présidée par M. Jean-Pierre Bady précédemment évoqué prônait l'avènement d'une « politique nationale du patrimoine ».

Demeurée à l'écart des transferts de compétence opérés par les lois de décentralisation de 1982 et de 1983, la compétence de l'Etat dans le domaine de la protection et de la valorisation du patrimoine porte encore l'empreinte d'une tradition régalienne, à l'évidence mal vécue par les collectivités territoriales et les propriétaires privés.

L'ouverture de la politique du patrimoine conduite par l'Etat à de nouveaux partenaires apparaissait donc nécessaire tant pour renforcer l'efficacité de l'action publique et augmenter les moyens toujours insuffisants qu'y affecte le ministère de la culture que pour tenir compte de l'implication croissante des collectivités territoriales.

Les mesures prises par le Gouvernement pour répondre à cette nécessité poursuivent deux objectifs : la relance de la décentralisation et l'encouragement apporté à l'action des propriétaires privés.

• L'encouragement apporté aux propriétaires privés

Cet axe de réforme constitue à l'évidence un point positif pour conforter les actions entreprises par les propriétaires privés. Il s'agit là d'un calcul simple et de bon sens : si les propriétaires privés sont incités à investir, ce sera autant de moins que l'Etat devra financer.

Votre rapporteur rappellera, à cet égard, que c'est à l'initiative de votre commission qu'a été introduite dans la loi du 1 er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations, une disposition visant à clarifier le régime très contraignant d'exonération de droits de mutation mis en place en 1988 pour faciliter la transmission des monuments historiques en mains privées que prévoit l'article 795 A du code général des impôts.

Il se félicitera que cette mesure puisse être complétée par des assouplissements réglementaires concernant la réduction du nombre de jours d'ouverture au public exigé pour l'octroi de l'exonération et le cas où la convention ne peut être respectée en raison de la maladie ou de l'invalidité du propriétaire.

On soulignera, par ailleurs, que le régime de déduction des charges de l'impôt sur le revenu propre aux monuments historiques instauré par la loi du 23 décembre 1964 en faveur des monuments historiques devrait être assoupli afin de rendre déductibles les primes d'assurance des biens protégés pour les édifices ouverts au public.

Au-delà de ces avancées fiscales, le ministre de la culture a annoncé plusieurs mesures de simplification bienvenues :

- l'adaptation du chèque emploi service pour faciliter l'embauche de guides saisonniers ;

- et l'amélioration des textes régissant les conditions d'ouverture au public des monuments historiques afin de mieux prendre en compte l'organisation d'actions d'animation culturelle.

• La relance de la décentralisation

La décentralisation de la politique du patrimoine reste encore à conduire.

Les expérimentations menées en ce domaine, à l'image des protocoles de décentralisation culturelle prévus par la loi relative à la démocratie de proximité, n'ont pas permis de mettre en oeuvre des transferts de compétence malgré les revendications émises en ce sens par les collectivités territoriales, qui investissent pour leur part de plus en plus dans le patrimoine.

Votre commission n'a donc pu que se féliciter de l'introduction dans le projet de loi relatif aux responsabilités locales de dispositifs permettant une participation plus large des collectivités territoriales à l'exercice des compétences patrimoniales.

Il convient toutefois de signaler que les mesures proposées n'affectent pas les compétences que détient l'Etat en vertu de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques.

Seul est proposé le transfert de la compétence de l'inventaire, qui, d'ailleurs, n'a jamais été reconnue par la loi comme compétence de l'Etat et qui, en pratique est d'ores et déjà exercée pour l'essentiel par les collectivités territoriales, et au premier chef par les départements.

En ce qui concerne les compétences financières, le projet de loi propose :

- d'une part, de transférer (article 73) aux départements les crédits du patrimoine rural non protégé, soit environ 5,8 millions d'euros à répartir entre une centaine de départements. On soulignera que le projet de loi de finances pour 2004 n'a pas anticipé ce transfert qui ne s'effectuera qu'une fois la loi promulguée ;

- d'autre part, d'expérimenter (article 74) selon des modalités au demeurant quelque peu complexe, une gestion décentralisée des enveloppes inscrites au budget de l'Etat consacrées à l'entretien et à la restauration des monuments historiques n'appartenant pas à l'Etat.

A l'évidence, ces transferts ont moins vocation à opérer une décentralisation au sens propre du terme qu'à exercer un effet d'entraînement sur les collectivités territoriales afin de les inciter à développer leurs interventions dans le domaine patrimonial.

C'est dans cette perspective que s'inscrit d'ailleurs le dispositif prévu à l'article 73 du projet de loi qui ouvre la possibilité de transférer aux collectivités qui en feront la demande la propriété de monuments historiques de l'Etat affectés au ministère de la culture.

Les monuments concernés -sur les 400 que gère le ministère- seront déterminés par un décret en Conseil d'Etat, en application de critères définis par une commission présidée par M. René Rémond, président de la Fondation nationale des sciences politiques. D'après les informations communiquées à votre commission, l'application de ces critères, fondés sur la valeur symbolique, artistique ou historique des monuments, devrait permettre le transfert d'une centaine de monuments.

Compte tenu de la qualité des travaux préfigurant ces transferts comme de leurs modalités, qui reposent sur des conventions passées entre l'Etat et les collectivités territoriales, il semble que puisse être écarté le double écueil redouté par le rapport de M. Jean-Pierre Bady, qui avait recommandé « d'éviter que ce(s) transfert(s) apparai(ssent) comme une opération vide-grenier et que les collectivités viennent faire leur marché ».

La portée des dispositions prévues par le projet de loi dépendra donc étroitement de la volonté des collectivités d'assumer des responsabilités patrimoniales.

A cet égard, il semble utile de pouvoir bénéficier d'une évaluation de l'application de ces mesures. Tel est notamment le sens d'une des modifications proposées par votre commission à l'article 74 du projet de loi relatif aux responsabilités locales qui, conformément aux dispositions de la loi organique relative à l'expérimentation prévoit un rapport du Gouvernement au Parlement sur la gestion décentralisée des crédits du patrimoine protégé, assorti des observations des collectivités territoriales concernées.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une séance tenue le mercredi 12 novembre 2003, sous la présidence de M. Jacques Valade, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Philippe Nachbar sur les crédits de la culture pour 2004 .

Mme Danièle Pourtaud s'est inquiétée des enveloppes qui seraient consacrées, en 2004, par le ministère de la culture, à la restauration de la chapelle et du grand amphithéâtre de la Sorbonne. Ces bâtiments se trouvent en effet dans un état préoccupant qui nécessite l'intervention rapide de travaux.

M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis , s'est engagé à interroger le ministre sur ces points en séance publique.

Suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission a alors donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la culture pour 2004 .

* 1 Loi n° 2003-517 du 18 juin 2003 relative à la rémunération au titre du droit de prêt en bibliothèque et renforçant la protection sociale des auteurs.

* 2 Rapport d'information (n° 379, 2002-2003) fait au nom de la commission des affaires culturelles par la mission d'information chargée d'étudier la gestion des collections des musées par MM. Philippe Richert et Philippe Nachbar.

* 3 Le Louvre, Versailles, Orsay, Guimet.

* 4 Loi n° 92-651 du 13 juillet 1992 relative à l'action des collectivités territoriales en faveur de la lecture publique et des salles de spectacle cinématographique.

* 5 CAREL (Consortium pour l'achat de ressources électroniques en ligne)

* 6 Décret n° 2000-357 du 21 avril 2000.

* 7 Loi n° 2003-707 du 1 er août 2003 modifiant la loi n° 2001-44 du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie préventive.

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