B. AMÉLIORER L'INTÉGRATION SCOLAIRE DES ÉLÈVES HANDICAPÉS

1. L'obligation scolaire des enfants handicapés : quelle réalité ?

L'obligation éducative pour les enfants et adolescents handicapés a été affirmée par la loi du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées, et réaffirmée par la loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989.

L'objectif prioritaire est l'intégration en milieu scolaire ordinaire des enfants handicapés, la fréquentation des établissements spécialisés devant être réservée aux enfants pour lesquels elle apparaît plus profitable.

Toutefois, comme l'a révélé le rapport de la Cour des comptes rendu public en juin 2003 et intitulé « La vie avec un handicap » , la question de la scolarisation des enfants handicapés demeure « très préoccupante » : « parmi les 125 000 jeunes accueillis en établissements médico-sociaux, plus de 30 000 ne seraient pas scolarisés (25 000 selon l'Education nationale), soit près du quart, une proportion qui atteint 78 % en cas de retard mental profond et 94 % en cas de polyhandicap ». Chez les enfants entre 6 et 16 ans vivant à domicile, entre 5 et 14 000 n'ont jamais été scolarisés.

En outre, en octobre 2003, un rapport du député Yvan Lachaud, « Mieux vivre ensemble » , rédigé dans le cadre d'une mission sur l'intégration scolaire des enfants handicapés, et remis à MM. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire et Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapés, fait vingt propositions pour concrétiser l'objectif de « scolarisation des enfants handicapés » . L'angle d'approche consiste à réaffirmer que « la scolarisation des enfants handicapés n'échappe pas au droit commun », et qu'elle doit « relever de la seule responsabilité du ministère de l'éducation nationale » : « L'inscription à l'école est un droit. Et s'il faut trouver un autre établissement, cela doit revenir à l'éducation nationale. Ce parcours du combattant ne doit plus être celui des parents ».

Le rapport propose la création d'un secrétariat d'Etat chargé de la scolarisation des élèves en situation de handicap auprès du ministre de l'éducation nationale, pour donner à cette question davantage de « lisibilité » et une « impulsion supplémentaire ». Il propose en outre d'imposer un module obligatoire de 12 heures dans les IUFM pour former tous les enseignants du 1 er et du 2 nd degrés à l'accueil des enfants handicapés.

Si des efforts significatifs ont été réalisés au cours des dernières années dans le cadre du plan Handiscol, mis en oeuvre depuis 1999 (augmentation du nombre d'élèves intégrés, financement de matériels informatiques, développement des auxiliaires de vie scolaire, introduction de modalités diversifiées de formation des enseignants...), des progrès restent encore à accomplir pour permettre à tous les élèves handicapés de bénéficier de réponses appropriées à leurs besoins tout au long de leur scolarité.

Les ruptures de parcours scolaires demeurent encore trop fréquentes, notamment à l'issue de la scolarité élémentaire. Un certain nombre d'enfants handicapés se retrouve ainsi sans solution. Si, pour certains, la gravité même du trouble ou la sévérité du handicap expliquent cette situation, pour d'autres, les incohérences ou les faiblesses du dispositif sont en cause.

Au présent budget, des moyens supplémentaires sont alloués à cette « cause nationale », l'une des priorité du quinquennat, qui aboutiront, après l' « Année du handicap » déclarée en 2003, à une nouvelle loi d'orientation en faveur de l'intégration des personnes handicapées qui sera présentée en 2004.

LES MODALITÉS DE SCOLARISATION DES ÉLÈVES HANDICAPÉS

- En milieu ordinaire

La scolarisation s'effectue chaque fois que cela est possible dans les établissements scolaires ordinaires, grâce à la mise en place de modalités adaptées d'intégration :

intégration individuelle et scolarisation dans une classe ordinaire.

intégration collective et scolarisation dans l'enseignement spécialisé. L'enfant ou l'adolescent est scolarisé dans une classe spéciale au sein d'un établissement scolaire ordinaire. Ce type de structure présente l'avantage d'accueillir un effectif d'élèves réduit et de dispenser un enseignement aménagé avec une pédagogie adaptée. Tout élève bénéficie de plages d'intégration dans une classe ordinaire. Une scolarisation à temps plein comme à temps partiel peut y être organisée. Les dispositifs sont les suivants :

- à l'école primaire : les CLasses d'Intégration Scolaire (CLIS) , régies par la circulaire n°2002-113 du 30 avril 2002, différenciées selon le type de handicap : CLIS 1, pour les élèves présentant des troubles importants des fonctions cognitives ; CLIS 2, pour les élèves présentant une déficience auditive grave ou une surdité ; CLIS 3, pour les élèves présentant une déficience visuelle grave ou une cécité ; CLIS 4, pour les élèves présentant soit une déficience motrice grave, soit une maladie chronique ou invalidante ;

- dans le 2 nd degré : les Unités Pédagogiques d'Intégration (UPI ), créées en 1995 en collèges pour accueillir des élèves présentant un handicap mental. La circulaire n°2001-035 du 21 février 2001 a prévu leur extension aux lycées et leur diversification afin d'assurer, si nécessaire, une meilleure continuité avec les CLIS des types 1, 2, 3 et 4.

A la rentrée 2002, étaient recensées 3.600 CLIS environ (contre 3.380 à la rentrée 2001), et 461 UPI (303 à la rentrée 2001, 147 à la rentrée 2000).

intégration partielle. Cette formule consiste à permettre à des jeunes pris en charge par un établissement médico-social d'éducation spéciale de participer à certaines activités d'un établissement scolaire ordinaire, et peut conduire, le cas échéant, à une intégration progressive à temps complet. Elle nécessite une étroite coopération entre les équipes des établissements concernés.

Quelles que soient les modalités retenues, un projet individuel, institué par une circulaire interministérielle du 29 janvier 1983, doit être élaboré, associant familles, enseignants, personnels spécialisés et établissements et services spécialisés intéressés, en lien avec la commission compétente, qui garantit sa mise en oeuvre : Commission de Circonscription Pré- scolaire et Elémentaire (CCPE), Commission de Circonscription du Second Degré (CCSD), Commission Départementale de l'Education Spéciale (CDES).

Au cours de l'année scolaire 2002-2003, environ 90.000 élèves présentant un handicap ont été scolarisés dans les établissements scolaires ordinaires des 1 er et 2 nd degrés :

Dans le 1 er degré : près de 67.000 élèves , soit près de 30.000 élèves intégrés individuellement, à temps plein ou à temps partiel, au sein de classes ordinaires, et 37.000 élèves scolarisés au sein des CLIS.

Dans le 2 nd degré : plus de 22.000 élèves , à temps plein ou à temps partiel, dont environ 4.000 scolarisés en intégration collective au sein des UPI.

- En dehors du milieu ordinaire

Les élèves dont la situation n'est pas compatible avec une scolarisation en milieu ordinaire peuvent :

- être scolarisés, en fonction de leurs besoins, au sein des établissements et services d'éducation spéciale (financés par l'assurance maladie et gérés le plus souvent par des associations, sous la tutelle du ministère en charge des affaires sociales) ou au sein d'établissements et services sanitaires ou hospitaliers. Pour assurer un enseignement de qualité aux élèves qui y sont accueillis, l'éducation nationale met chaque année plus de 5.000 enseignants à la disposition de ces structures ;

- bénéficier d'une prise en charge dans le cadre du Système d'Assistance Pédagogique A Domicile (SAPAD). Celui-ci mobilise des enseignants volontaires rémunérés en heures supplémentaires, en priorité ceux qui exercent dans l'école ou l'établissement où le jeune concerné est inscrit.

En 2002, près de 82.700 enfants handicapés ont été scolarisés toute l'année dans un établissement relevant du ministère chargé de la santé :

- plus de 73.000 (près de 89%) dans un établissement médico-éducatif (notamment instituts médico-éducatifs et instituts de rééducation), 6.100 dans un établissement hospitalier et 3.200 dans un établissement médico-social ;

- la majorité d'entre eux (55.000 environ) était scolarisée dans le 1er degré.

Plus de 5.000 élèves ne pouvant fréquenter l'école en raison de leur état de santé ont bénéficié, au cours de année scolaire 2001-2002, du soutien scolaire apporté par les SAPAD.

2. La poursuite du Plan quinquennal en faveur de l'accueil des jeunes handicapés

D'ores et déjà, de nouvelles mesures ont été mises en place en vue d'augmenter le nombre d'élèves handicapés scolarisés en milieu ordinaire, dans le cadre du plan pluriannuel (2003-2007) d'amélioration de la scolarisation des élèves handicapés présenté le 21 janvier 2003 par MM. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire et Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées.

Ce plan quinquennal, applicable depuis cette rentrée scolaire, représentera un effort financier de près de 800 millions d'euros sur 5 ans. Il portera les crédits actuellement consacrés à la scolarisation des élèves handicapés (621 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2001) à 833 millions d'euros au terme de 5 ans, soit une progression de 34 %.

Il s'articule autour de trois axes prioritaires :

- garantir le droit à la scolarité pour tous les jeunes handicapés ou malades et la continuité des parcours scolaires ;

- améliorer les conditions de scolarisation des élèves handicapés ou malades en préservant et en développant les aides à l'intégration scolaire ;

- former l'ensemble des personnels et développer la formation spécialisée des enseignants du premier comme du second degré.

a) Une priorité pour 2004 : améliorer l'accueil et l'accompagnement des élèves handicapés

Les principales mesures nouvelles inscrites au projet de loi de finances pour 2004 répondent aux priorités définies au titre du plan d'adaptation et d'intégration scolaires des élèves handicapés :

- une mesure nouvelle de 1,06 million d'euros (auxquels s'ajoutent au titre IV 0,266 million d'euros pour l'enseignement privé), sous la forme d' heures supplémentaires pour les enseignants qui interviennent dans les UPI ou qui participent au soutien pédagogique des élèves malades ;

- une mesure nouvelle de 10 millions d'euros est destinée à la mise en oeuvre d' actions de formation au bénéfice des AVS et des enseignants impliqués.

Sur les 1 500 créations d'emplois d'enseignants du premier degré, il est prévu 100 emplois supplémentaires de professeurs des écoles spécialisés.

Les priorités en matière de scolarisation des enfants handicapés consistent dans un premier temps à lutter contre les inégalités et les ruptures de parcours scolaires , encore trop fréquentes notamment à l'issue de la scolarité élémentaire. Plusieurs mesures y contribuent :

- la création de 200 nouvelles UPI, afin de garantir la continuité des parcours entre le primaire et l'enseignement secondaire.

Il existe en effet aujourd'hui un fort déséquilibre entre les possibilités offertes dans le 1 er degré (30 000 élèves intégrés individuellement et 37.000 scolarisés au sein des CLIS) et dans le 2 nd degré (si plus de 17 000 élèves sont intégrés individuellement, seuls 4 000 peuvent être accueillis dans les 460 UPI).

Le plan quinquennal prévoit, d'ici à 5 ans, d'ouvrir 1 000 nouvelles UPI, soit 200 par an, facilitant la scolarisation d'environ 10 000 élèves , sans préjudice toutefois du développement de l'intégration individuelle des élèves qui continuera d'être favorisée chaque fois qu'elle est possible.

A la rentrée 2003, 200 emplois supplémentaires ont été affectés pour permettre le fonctionnement des 200 nouvelles UPI. En prévision de la rentrée 2004, 100 emplois ont été délégués aux académies pour faciliter l'ouverture des UPI.

Par ailleurs, on rappellera la nécessité de poursuivre l'effort engagé pour rationaliser l'implantation et l'organisation des CLIS et améliorer leur fonctionnement.

- L'amélioration du fonctionnement des SAPAD : pour développer encore les possibilités offertes par ces services, le plan prévoit d' accroître leurs moyens horaires de 26.000 heures supplémentaires effectives par an pendant quatre ans à compter de la rentrée scolaire 2004.

- La pérennisation et le développement des fonctions d'auxiliaires de vie scolaire sous contrats emplois-jeunes, par la création du statut d'assistant d'éducation, sans pour autant recourir à la création d'un nouveau métier.

Au cours de l'année scolaire 2002-2003, 2 400 aides éducateurs environ étaient affectés à l'intégration d'élèves handicapés (pour un coût annuel de 49 millions d'euros). A compter de la rentrée scolaire 2003 , 6 000 emplois rémunérés et gérés par l'éducation nationale (aides éducateurs encore en fonction ou assistants d'éducation nouvellement recrutés) sont par ailleurs réservés à l'exercice de ce type de fonctions, permettant à plus de 9 000 élèves de bénéficier d'un accompagnement à titre individuel et à environ 11 000 autres d'un accompagnement à titre collectif.

D'autres mesures sont en outre destinées, dans la continuité du Plan Handiscol, à améliorer les conditions de scolarisation des élèves handicapés :

- Le financement de matériels pédagogiques adaptés, dans le cadre du plan triennal (2001-2003), d'accès à l'autonomie des personnes handicapées (23 millions d`euros en 2003, mesure consolidée en 2004), en particulier pour favoriser la scolarisation des élèves déficients sensoriels et moteurs ou présentant des troubles très sévères du langage.

- La modernisation de l'application informatique des CDES (« Opales ») : l'objectif poursuivi est de mieux évaluer les besoins de chaque jeune et de proposer des réponses adaptées et évolutives. De même qu'en 2003, 862 000 euros sont prévus en 2004 pour poursuivre le déploiement de l'application qui devrait être achevé fin 2004.

- La mise en place d'un Groupement d'Intérêt Public pour l'Edition Adaptée (GIPEA) au cours de l'année 2004, en vue d'organiser et coordonner au plan national la production de documents en braille et en gros caractères, et en particulier de manuels scolaires.

b) Un accent spécifique sur la formation des personnels

A la rentrée scolaire 2003, plus de 5 600 emplois du 1 er degré contribuent à rendre possible l'intégration des élèves handicapés :

- près de 4 000 emplois d'enseignants de CLIS et UPI ;

- 264 postes itinérants de soutien à l'intégration ;

- 1 158 emplois d'enseignants pour les commissions d'éducation spéciale (CCPE, CCSD, CDES).

Ces moyens représentent un coût annuel de 180,87 millions d'euros.

S'y ajoutent environ 5 400 emplois mis à la disposition des établissements et services médico-éducatifs relevant du ministère de la santé.

Environ 370 emplois du 2 nd degré sont par ailleurs implantés dans les Etablissements Régionaux d'Enseignement Adapté (EREA) accueillant exclusivement des élèves handicapés (soit 8 des 80 EREA).

En 2002-2003, plus de 2 000 enseignants du 1 er degré ont suivi un stage de spécialisation dans le cadre de la formation au Certificat d'Aptitude aux actions Pédagogiques Spécialisées de l'Adaptation et de l'Intégration Scolaire (CAPSAIS), au diplôme de directeur d'établissement spécialisé et adapté (DDEEAS), au diplôme d'état de psychologue scolaire.

En outre, trois mesures nouvelles d'un montant total de 10 millions d'euros sont prévues dans le cadre du plan d'adaptation et d'intégration scolaires des élèves handicapés au titre de la formation des personnels , enseignants du 1 er et du 2 nd degré (1,8 million d'euros), AVS (8 millions d'euros) et personnels d'encadrement (250 000 euros).

L'objectif est de rénover la formation spécialisée des enseignants du 1 er degré pour la rendre plus modulaire, plus souple et donc plus attractive. En effet, de nombreux postes spécialisés sont actuellement tenus par des enseignants non formés, et notamment des postes très difficiles : à titre d'exemple ce sont près de 40% des postes de CLIS qui sont tenus par des enseignants non spécialisés .

Il s'agit d'autre part de donner une formation adaptée aux enseignants du 2 nd degré, de plus en plus souvent concernés par l'accueil des élèves présentant des maladies invalidantes ou des handicaps. Il est également envisagé dès la rentrée 2004 de favoriser pour ceux qui le souhaitent l'accès à une certification complémentaire de la discipline ou de la spécialité au titre de laquelle ils ont été recrutés.

La formation dont bénéficieront les assistants d'éducation recrutés pour exercer des fonctions d'AVS a pour objet de leur permettre de remplir leur mission auprès des élèves et d'envisager à l'issue de leur contrat l'accès à des carrières du travail social. Les associations spécialisées de familles d'enfants handicapés seront étroitement associées à leur formation.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS
CONSACRÉS À LA FORMATION CONTINUE DES ENSEIGNANTS

(en millions d'euros)

2001

2002

2003

2004

1er degré

20,48

20,48

20,48

24,76

2nd degré

38,06

36,84

36,61

37,89

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