Avis n° 76 (2003-2004) de Mme Monique CERISIER-ben GUIGA , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 20 novembre 2003

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N° 76

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 2003

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 2004 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME II

RELATIONS CULTURELLES EXTÉRIEURES
ET FRANCOPHONIE

Par Mme Monique CERISIER-ben GUIGA,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. André Dulait, président ; MM. Robert Del Picchia, Jean-Marie Poirier, Guy Penne, Michel Pelchat, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, André Rouvière, Jean-Pierre Masseret, secrétaires ; MM. Jean-Yves Autexier, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Jacques Blanc, Didier Borotra, Didier Boulaud, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Ernest Cartigny, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Paul Dubrule, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Jean Faure, Philippe François, Jean François-Poncet, Philippe de Gaulle, Mme Jacqueline Gourault, MM. Christian de La Malène, René-Georges Laurin, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Philippe Madrelle, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Louis Moinard, Jacques Peyrat, Xavier Pintat, Jean-Pierre Plancade, Bernard Plasait, Jean Puech, Yves Rispat, Roger Romani, Henri Torre, Xavier de Villepin, Serge Vinçon.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 1093 , 1110 à 1115 et T.A. 195

Sénat : 72 et 73 (annexe n° 1 ) (2003-2004)

Lois de finances .

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La « diplomatie d'influence » pratiquée par la France grâce au rayonnement de sa culture ne peut se quantifier de manière exacte.

Heureusement ! Car le Projet de Loi de Finances (PLF) pour 2004, tout comme l'exécution de la Loi de Finances de 2003, ne sont guère favorables à notre action culturelle extérieure.

Les crédits supplémentaires attribués à la Direction Générale de la Coopération internationale et du développement (DGCID) en 2004 sont, en effet, exclusivement dévolus à l'amélioration de l'Aide publique au développement et, plus modestement, à la Francophonie. Ces deux actions ont leur légitimité, et leur renforcement est salutaire.

En revanche, la nécessaire restructuration d'un réseau culturel trop étendu pour les moyens que notre pays souhaite y affecter se fait attendre. Par ailleurs, l'insuffisante dotation budgétaire allouée à l'Agence pour l'Enseignement Français à l'Etranger (AEFE) suscite des interrogations sur la cohérence de son réseau d'établissements.

Mais d'autres éléments présentent des évolutions positives : ainsi, l'extension des audiences respective de RFI et de TV5 Monde est une bonne nouvelle. Il reste à déterminer la place qu'occupera dans ce dispositif la future chaîne d'information internationale.

Les étudiants étrangers reviennent en France, alors que peu est fait, en terme pratique (logement, notamment), pour les y accueillir. Et, surtout, notre pays dispose à l'étranger de nombreux relais qui sont mal connus dans notre pays : anciens boursiers, bi-nationaux, présidents d'Alliance française...

Ce rapport évoque leurs actions très diverses, qui concourent toutes à un rayonnement français qui doit nécessairement accompagner une diplomatie se fondant sur le multilatéralisme.

I. LE FINANCEMENT DE L'ACTION CULTURELLE EXTÉRIEURE EST GLOBALEMENT STABLE

A. D'IMPORTANTES RESTRICTIONS ONT MARQUÉ L'EXÉCUTION DU BUDGET EN 2003

L'ensemble des crédits consacrés par les différents ministères à l'action culturelle extérieure régresse optiquement de 1,37 million d'euros de 2003 à 2004, en passant de 1,366 milliard d'euros en LFI 2003 à 1,365 inscrit au PLF 2004, soit - 0,1 %.

Cependant, cette évolution globale n'est qu'indicative, pour une double raison : d'une part, le total des dépenses agrège, non des dépenses effectives, mais le coût de projets déclarés par les différents ministères, d'autre part, la loi de finances exécutée en 2003 diffère sensiblement de la LFI , votée fin 2002 , du fait des opérations de gels et de régulation qui ont particulièrement affecté le ministère des affaires étrangères.

Les crédits alloués à l'action culturelle en LFI 2003 et en PLF 2004 sont les suivants :

EVOLUTION DE 2003 À 2004 DES CRÉDITS D'ACTION CULTURELLE DES DIFFÉRENTES SECTIONS BUDGÉTAIRES

crédits exprimés en M€

BUDGET GÉNÉRAL

ACTION CULTURELLE
2003 (LFI)
DO/CP

ACTION CULTURELLE
2004 (PLF)
DO/CP

A - Dépenses civiles

Affaires étrangères

1 108,16

1 100,02

Culture et communication

31,64

31,48

Economie, finances et industrie

0,00

0,00

Education nationale

115,51

118,91

Emploi et solidarité

0,00

0,00

Equipement, transports et logement

44,79

46,40

Intérieur et décentralisation

0,00

0,00

Jeunesse et sports

1,56

1,99

Totaux dépenses civiles

1 301,66

0,00

B - Défense (services à l'étranger)

1 298,80

Totaux comptes spéciaux du Trésor

64,95

66,44

Total général

1 366,61

1 365,24

Quant aux crédits du ministère des Affaires étrangères proprement dits, consacrés à l'action culturelle extérieure, ils baissent, sous les mêmes réserves, de 1,108 milliard d'euros en 2003 à 1,1 en 2004, soit une baisse de 0,74 %, en diminution de 8,14 millions d'euros. L'évolution effective doit être cependant appréciée au regard des nombreuses amputations qui ont affecté l'exécution budgétaire en 2003, particulièrement dans le périmètre de la DGCID (Direction générale de la coopération internationale et du développement). Cette direction présente ainsi son évolution budgétaire durant l'année 2003 :

Le dispositif de la régulation budgétaire par le gouvernement, a été mis en place dès mars 2003. Il s'articule autour de deux réserves, l'une de précaution appliquée aux crédits concourant à l'aide publique au développement, l'une réserve d'innovation appliquée aux autres crédits, et dont une partie a fait l'objet d'un arrêté d'annulation le 14 mars 2003.

La régulation s'est traduite sur les crédits de la DGCID, pour les principaux crédits affectés à l'action culturelle, par :

- une annulation de 15,70 M€ par arrêté du 14 mars (dont 11,23 M€ sur le chapitre 42-15 « coopération internationale et développement »),

- une mise en réserve de 8,89 M€ (dont 7,32 M€ sur le chapitre 42-15 et 1,39 M€ sur celui des opérateurs audiovisuels).

Ces gels ou annulations ont imposé à la DGCID de revoir l'ensemble de la programmation de l'administration centrale et des postes. Elle a ainsi procédé à un abattement de 18 % sur les crédits programmés en titre IV hors assistance technique, hors bourses et hors rémunération des personnels des Alliances françaises. La réduction de 18 % s'applique notamment aux :

- stages de courte durée,

- subventions et commandes aux opérateurs et autres organismes,

- subventions aux établissements à autonomie financière (Centres culturels, instituts ...) et Alliances françaises,

- invitations,

- crédits délégués et déconcentrés.

En outre, les crédits de reports ouverts en 2003 au titre de la gestion 2002, par arrêtés du 12 mars pour les dépenses en capital, et du 17 avril pour les dépenses ordinaires, ont également fait l'objet d'un gel, ce qui a conduit à un report de charges sur 2003 de près de 22 M€ sur le chapitre 42-15 . La DGCID a dû chercher des économies sur des actions jusqu'ici épargnées : bourses de longue durée, et l'assistance technique, pour laquelle l'économie a été obtenue sans rupture de contrats. Le ministère n'a donc pas pourvu à la rentée de septembre 2003 plus de 400 postes dont la création venait d'être décidée, ou qui faisaient l'objet d'un renouvellement. Les experts dont l'affectation a ainsi été suspendue devraient être affectés en janvier 2004.

Enfin, l'effet change-prix a été plutôt favorable cette année et n'a pas eu de conséquence négative sur l'exécution budgétaire des crédits de la DGCID.

L'impact de ces régulations est récapitulé dans les tableaux suivants :

VENTILATION DES CRÉDITS DGCID PAR SECTEURS (année 2003)
Crédits de coopération internationale et développement
Dépenses ordinaires Titres III et IV
*(Crédits géographisés et crédits centraux)
Après régulation budgétaire
montants en milliers d'euros

Direction

Secteur

Titre IV Crédits d'intervention

Titre III dont EAF et AEFE

Total

Régulation

Définitif

1)

Opérateurs de l'action audiovisuelle

165 000

165 000

5 180

159 820

DATC

Cinéma et coopération culturelle

18 143

18 143

2 589

15 554

DATC

Nouvelles technologies de l'information

892

892

195

697

Total DATC

184 035

0

184 035

7 934

176 071

2)

AEFE

338 115

338 115

338 115

DCCF

Personnels Alliances françaises

28 239

28 239

28 239

DCCF

Coopération culturelle et artistique

67 902

44 228

112 130

9 048

103 082

DCCF

DCCF

53 959

53 959

2 547

51 412

Total DCCF

150 099

382 343

532 442

11 594

520 848

3)

Développement. économique et environnement

49 763

49 763

6 740

43 023

DDCT

Développement social et coopération éducative

74 997

74 997

6 382

68 615

DDCT

Coopération institutionnelle

47 201

47 201

8 286

38 915

DDCT

Appuis financiers et études économiques

14 339

14 339

2 865

11 474

Total DDCT

186 299

0

186 299

24 272

162 027

VENTILATION DES CRÉDITS DGCID PAR SECTEURS (année 2003)
Crédits de coopération internationale et développement
Dépenses ordinaires Titres III et IV
*(Crédits géographisés et crédits centraux)
Après régulation budgétaire
montants en milliers d'euros

Direction

Secteur

Titre IV Crédits d'intervention

Titre III dont EAF et AEFE

Total

Régulation

Définitif

4)

Coopération universitaire et scientifique

99 435

99 435

1 753

97 682

DSUR

Recherche

54 957

7 013

61 970

6 765

55 205

Total DSUR

154 392

7 013

161 405

8 518

152 887

SME

Communication

1 997

1 997

105

1 892

SME

Evaluation/études

462

462

462

SME

Multilatéral

10 352

10 352

2 591

7 761

SME

Interdirections et non ventilé

7 774

7 774

13

7 761

Total SME

18 126

2 459

20 585

2 709

17 876

CNG

Coopération non gouvernementale

34 146

34 146

4 200

29 946

TOTAL

727 096

391 815

1 118 911

59 256

1 059 655

B. LES PRINCIPALES MESURES NOUVELLES RETENUES POUR 2004 NE BÉNÉFICIENT GUÈRE À L'ACTION CULTURELLE EXTÉRIEURE

En dehors des augmentations dévolues à l'Aide publique au Développement, et de celle de 10 millions d'euros affectée au renforcement des programmes de bourses attribuées par la Francophonie, toutes les autres lignes budgétaires sont affectées par la politique de restriction des dépenses publiques.

Ainsi, la dotation attribuée à l'AEFE régresse de 1,7 % , en diminution de 5,78 millions d'euros par rapport aux 340,083 millions d'euros de 2003.

Cette diminution découle d'une baisse du financement de la réforme des personnels résidents (10,3 millions d'euros contre 15,5 millions d'euros en 2003), à l'impact négatif de l'effet change/prix sur les rémunérations des personnels (- 5,1 millions d'euros), et à une réduction (- 6 millions d'euros) des indemnités servies aux personnels expatriés. En sens contraire, 10,5 millions d'euros d'ajustement atténuent ces réductions.

Quant aux établissements culturels et de recherche , ils bénéficient d'une mesure nouvelle de 2 M€ pour la revalorisation des rémunérations allouées aux recrutés locaux, mais subissent un abattement de - 2,4 M€ pour réduction des dépenses de l'Etat.

Les subventions allouées aux opérateurs de l'action audiovisuelle (chapitre 42-14) restent stables, à 165 millions d'euros, montant qui avait alors régressé de 1,9 % par rapport à 2002.

Les crédits du chapitre 42-13 -articles 30 et 40- consacrés à la coopération décentralisée régressent de près de 6 millions d'euros (- 8,7 %). Cependant, certaines des utilisations de ces crédits faites durant l'année 2003 laissent pour le moins perplexes, et atténuent l'impact effectif de cette baisse. On constate, en effet, que l'article 40 (crédits non déconcentrés) de ce chapitre a financé, à hauteur de 24 000 euros, une rencontre franco-québécoise sous l'égide du Conseil régional d'Aquitaine, et pour 14 000 euros, la rencontre franco-allemande organisée par le Conseil régional de Poitou-Charentes.

Ces sommes sont, certes, modestes. Mais il faut néanmoins espérer que les crédits seront utilisés en 2004 de façon plus conforme à leur objectif initial.

C. LA CRÉATION DE LA DGCID S'EST ACCOMPAGNÉE D'UNE NOMENCLATURE BUDGÉTAIRE TROP LÂCHE POUR ÊTRE CORRECTEMENT ANALYSÉE

Le regroupement, effectué en 1999 dans le cadre du rapprochement entre les ministères des affaires étrangères et de la coopération, des actions culturelles et du développement au sein d'une direction générale nouvellement créée, la DGCID, s'est accompagné d'un regroupement analogue au sein de la nomenclature budgétaire, avec le rassemblement, dans l'article 42-15 : « Coopération internationale et développement », des sommes auparavant distinctement affectées aux actions culturelles, et aux actions de développement. Aux financements contenus dans l'article 42-15 s'ajoutent ceux affectés au Fonds de Solidarité Prioritaire (FSP - article 68-91), qui comporte, de façon croissance, des actions de développement culturel.

Ainsi, le Comité d'orientation stratégique du FSP a-t-il retenu, pour 2003, l'initiative « Education Pour Tous  - Procédure accélérée », qui se traduit dans deux aides-programmes destinées au Burkina-Faso et au Niger.

Cependant, l'objectif même de la création de la DGCID est de considérer le développement culturel comme indissociable des actions générales d'appui au développement des 54 pays intégrés dans la Zone de Solidarité Prioritaire (ZSP).

II. L'ÉVOLUTION DU RÉSEAU DES CENTRES CULTURELS ET DES ALLIANCES FRANÇAISES

A. LA RESTRUCTURATION EN COURS

J'avais évoqué, dans mon précédent rapport sur le projet de budget pour 2003, la nécessité de restructurer et de resserrer notre réseau culturel, qui est trop étendu pour les moyens que les gouvernements successifs semblent disposés à lui affecter.

Il faut se rendre au principe de réalité. Nous ne sommes plus en 1960, quand la France compensait l'affaiblissement de sa puissance dû à la perte de son empire colonial par un investissement considérable, en personnels et en moyens budgétaires pour soutenir son influence culturelle dans le monde et maintenir ses liens avec ses anciennes colonies par un dispositif impressionnant de coopération technique et culturelle.

De nos jours, l'influence culturelle, ce que les Américains appellent le « softpower », dont l'importance est reconnue et proclamée, n'est plus la priorité budgétaire d'aucun gouvernement et il y a bien longtemps qu'en ce domaine la distance entre les discours et les actes s'accroît ; force est de reconnaître que nul ne peut tout financer à la fois. Le développement réussi de l'audiovisuel extérieur a eu un coût, même s'il est en réalité modique. Les financements nécessaires ont été prélevés sur les outils traditionnels de proximité que sont les Centres culturels et les Alliances françaises. L'examen du dispositif actuel prouve que des synergies remarquables s'instaurent entre ce réseau de proximité et l'audiovisuel. Mais la pénurie budgétaire se conjugue avec l'obligation de faire évoluer les modes d'intervention culturelle pour valoriser de façon efficace le travail accompli par les personnels des quelque 151 centres culturels de statuts divers, répartis dans pas moins de 84 pays.

Le ministère des affaires étrangères semble avoir pris la mesure du caractère inadapté, car démesuré, de ce réseau . Ainsi, la « Stratégie ministérielle de réforme », qui décrit les futures missions du ministère pour préparer l'application de la Loi organique relative aux Lois de Finances, adoptée en 2001, et qui entrera en vigueur pour le PLF de 2006, retient l'objectif de promouvoir la création française à l'étranger dans les termes suivants : « les moyens d'interventions seront modernisés, les méthodes repensées en privilégiant la médiation culturelle. Le recours à des opérateurs spécialisés, qui disposent de l'expertise technique nécessaire , s'inscrira dans des contrats d'objectifs et de moyens qui seront élaborés en 2004 avec l'Association française pour l'action artistique (AFAA) et avec l'Association pour la diffusion de la pensée française (ADPF) ».

L'objectif global est donc de déléguer à des opérateurs la gestion quotidienne des éléments de ce réseau, en réservant au ministère la charge de « pilotage stratégique » , un peu à l'image de nos actions d'aide au développement, dont la réalisation est confiée, de façon croissante, à l'Agence française de développement (AFD). En fait, depuis la création de l'AEFE (1990) et les diverses formes d'autonomie financière expérimentées au niveau des Services d'action culturelle ou des Centre eux-mêmes, cette évolution est largement entamée.

Cette inflexion peut être positive si elle s'accompagne d'une démarche active de reconfiguration du réseau qui est partiellement exsangue, car démesuré et si elle est réalisée en concertation avec les acteurs de terrain et dans des conditions respectueuses des personnels. Votre rapporteur est conscient que l'application de ce principe d'opportunité générale sera difficile, et qu'il n'existe pas de lignes de partage incontestables entre les établissements à sauvegarder, et ceux à fermer. Seule une démarche pragmatique peut permettre d'aboutir à des résultats concrets : si les bâtiments sont excentrés, difficiles d'accès, mal entretenus et donc peu fréquentés, il faut les fermer : il y va de l'image même de la France.

S'il existe une Alliance française dynamique dans la même ville qu'un centre culturel, elle doit être privilégiée, et réciproquement. Mais cela suppose que l'Alliance française soit en mesure de proposer des statuts et des conditions de rémunération convenables au personnel qui serait ainsi contraint à changer d'employeur. La complémentarité doit être recherchée, au détriment d'une concurrence souvent stérile, et toujours mal comprise par nos partenaires.

Une telle restructuration s'impose d'autant plus que notre pays dispose, sous une forme ou une autre, de près de 600 implantations culturelles sur tout le globe, alors que la Grande-Bretagne, souvent citée, à juste titre, en exemple, pour son réseau de « British Councils » n'en a que 220, et l'Allemagne 140 « Goethe Institut ».

Les centres devraient être dotés d'une réelle autonomie financière, condition indispensable à une gestion responsable par des directeurs et des agents comptables préparés à cette tâche. Les postes libérés par la fermeture de certains centres culturels devraient être affectés à un renforcement de ceux qu'il faut dynamiser, et non rendus au ministère du budget. Sinon, toute restructuration sera perçue par les agents du réseau culturel comme un sabordage déguisé.

Le ministère avance à pas comptés dans cette voie : les évolutions récentes intervenues dans le réseau sont très modestes, et plus liées à la situation intérieure des pays considérés qu'à une volonté déterminée, hormis le cas de l'Allemagne.

Ainsi, en 2002, des centres culturels ont-ils été ouverts à Tachkent et Tbilissi et, en 2003, à Kaboul, Sarajevo et Bakou.

En revanche, les fermetures sont toutes intervenues en Allemagne : 2002 : Hanovre, Rostock et Fribourg ; 2003 : Sarrebruck.

Des rapprochements et coordinations d'actions entre établissements et alliances situés dans une même ville ont été conduits à Zagreb, Lisbonne et Londres.

Quant aux moyens financiers, ils sont en légère décroissance pour les subventions accordées aux alliances, et en légère augmentation pour les centres culturels.

BILAN DES SUBVENTIONS ACCORDÉES AUX ALLIANCES,
ET AUX INSTITUTS ET CENTRES CULTURELS


Années

Montants
(en millions de francs)

Alliances françaises

Centres et Instituts

2000

11,6 M€

71 M€

2001

11,4 M€

69 M€

2002

11,8 M€

70 M€

2003

10,9 M€

72 M€

B. DEUX EXEMPLES DE FONCTIONNEMENT DÉLÉGUÉ : L'AFAA ET L'ADPF

* L'AFAA (Association française d'action artistique) est un opérateur délégué de la DGCID, dont elle met en oeuvre la politique d'échanges culturels internationaux définie par les deux ministères des Affaires étrangères et de la Culture. Cette association régie par la loi de 1901 doit conclure d'ici à la fin de l'année en cours, avec ces deux ministères, un contrat triennal d'objectifs et de moyens, actualisant la convention signée avec ces mêmes ministères en 2000.

En 2002, les recettes de l'AFAA se sont élevées à 21,06 millions d'euros, toutes sources confondues.

Les recettes et dépenses 2003 se récapitulent de la façon suivante :

- Recettes : 21,780 M€ dont :

16,662 M€ du ministère des Affaires étrangères (dont FSP)

2,345 M€ du ministère de la Culturel et de la Communication

2,6 M€ de recettes de partenariats (collectivités territoriales, entreprises)

0,171 M€ autres produits

- Dépenses : 21,780 M€ dont :

5,595 M€ de frais de structure (dépenses d'investissement comprises)

16,185 M€ de dépenses de programmes

Les recettes en provenance du ministère, initialement affectées par les mesures de régulation budgétaire intervenues au cours de l'année 2003, n'ont finalement été amputées que de 0,7 million d'euros, au terme d'âpres négociations.

Les actions les plus marquantes menées durant l'année 2003 ont été, en France, « l'année de l'Algérie et à l'étranger », les rencontres de la photographie de Bamako, et la participation au tricentenaire de Saint-Pétersbourg.

Pour 2004, l'AFAA déclare vouloir favoriser le développement de « programmes pluriannuels thématiques et géographisés ».

L'Asie constituera ainsi un continent-cible, avec le programme « Circasia » destiné, d'après l'AFAA, à « promouvoir les nouvelles formes d'expression du cirque français », et l'organisation d'un « Printemps français en Asie ».

* l'ADPF (Association pour la diffusion de la pensée française) est également une association constituée selon la loi de 1901, qui regroupe une équipe de trente-sept agents.

Créée en 1945 pour diffuser dans le monde la pensée scientifique française, sa mission a été étendue en 1999 aux domaines artistique et littéraire. Parallèlement, l'ADPF a été chargée, depuis 1980, d'éditer des ouvrages scientifiques et artistiques au profit des médiathèques et des centres culturels français. S'y ajoute la publication d'ouvrages ponctuels sur des événements particuliers, comme le Sommet de la Terre, à Johannesburg, en 2000.

Un certain nombre de ces publications sont traduites en anglais (un financement de 500 000 € est ainsi affecté à cette tâche en 2003), ce qui suscite d'ailleurs des difficultés pour mobiliser les compétences adéquates, notamment pour la traduction d'ouvrages scientifiques.

Le catalogue d'ouvrages produit par l'ADPF évolue en fonction des besoins constatés : ainsi, le succès de la revue de l'actualité éditoriale française : « Vient de paraître », créée il y a trois ans, a conduit à doubler son tirage, passant de 3 000 à 6 000 exemplaires. Le bicentenaire du Code civil conduira en 2004 à la publication, en coopération avec la Cour de Cassation, de « 200 ans du Code civil ».

Au total, cette activité éditoriale foisonnante est cependant la plus touchée par la réduction continuelle des financements alloués à l'ADPF qui ont été divisés par deux de 1999 à 2003, de 16 à 8 millions d'euros.

L'ADPF a élaboré un site internet aisément accessible par le « portail » du MAE, qui enregistre un nombre croissant de consultations ; aujourd'hui, le nombre de télé-chargement de documents est déjà supérieur au nombre de publications traditionnelles.

L'ADPF apporte un appui très appréciable aux Centres de ressources et aux bibliothèques traditionnelles des centres culturels et Alliances françaises, mais il serait certainement générateur d'économie de mieux coordonner certaines de ses actions avec le Centre national de la documentation pédagogique relevant du Ministère de l'Education nationale.

Parallèlement à cette activité éditoriale, le « Fonds d'Alembert », créé en 2002, est doté de 0,305 million d'euros pour « soutenir la promotion de la pensée française dans le débat d'idées international ». Les instituts culturels à l'étranger ont élaboré, dans ce cadre, « vingt-trois projets de colloque sur les thèmes liés à la mondialisation ».

C. LA SITUATION CONTRASTÉE DES ALLIANCES FRANÇAISES

Dans mon rapport pour 2003, j'avais évoqué la trop grande diversité des statuts juridiques des Alliances, même s'ils ont toujours été soumis pour approbation à l'Alliance française de Paris.

Pour y remédier, l'Alliance française de Paris envisage d'établir un modèle de statut-type comportant quelques lignes directrices susceptibles d'être compatibles avec les diverses législations des pays abritant les Alliances.

Les plus importantes d'entre elles (263) ont passé des conventions de partenariat avec le ministère des affaires étrangères, qui leur accorde des subventions d'intervention (titre IV), et met les personnels à leur disposition. Ces crédits de personnel bénéficient d'une mesure nouvelle de 950 000 € en 2004, avec un total de 29,19 millions €, permettant le détachement à l'étranger de 260 personnes (ce nombre s'élevait à 450 en 1994).

Pour 2003, l'Alliance française de Paris a été touchée par des gels de crédits : 21 % au total (11,5 millions €) ont ainsi été annulés. Ces réductions amputent nécessairement la réactivité aux demandes quotidiennes des directeurs d'alliance ; or ce rôle de soutien et de conseil est particulièrement précieux pour la vie des Alliances. Actuellement, ce sont les profits, très fluctuants, de l'école de langue de l'Alliance de Paris qui permettent de poursuivre cette tâche de coordination et de conseil indispensable à la cohérence du réseau .

Le ministère des affaires étrangères a conclu des conventions de partenariat, particulièrement avec les Alliances situées en Amériques, Asie et Océanie, où les centres culturels sont peu implantés. L'activité principale, mais non exclusive, des Alliances consiste dans les cours de langue française.

Le dernier exercice quantifié, portant sur l'année scolaire 2001-2002, a recensé un total de 344 615 élèves ; le nombre de personnes fréquentant les Alliances est inférieur à ce total, car certains élèves suivent plusieurs cursus au sein d'une même Alliance.

Ces établissements évoluent au rythme des pays où ils sont implantés, comme en témoignent les exemples opposés de Buenos Aires et Sao Paulo :

BUENOS AIRES ET SAO PAULO :
DES ALLIANCES FRANCAISES ALLIEES POUR LE MEILLEUR ET POUR LE PIRE AVEC LEUR PAYS HOTE

Les Alliances françaises, dans leur diversité, pourraient être décrites comme des indicateurs de santé de leurs pays hôtes. En voici deux cas opposés, observés au mois de mai 2003.

BUENOS AIRES

Autrefois fleuron du réseau latino-américain, cette alliance survit grâce au talent et au courage de sa directrice, confrontée, dès sa prise de fonction,  à une situation de quasi-faillite provoquée par la crise générale mais aussi par des gestions antérieures typiquement argentines. L'Alliance de Buenos Aires vivait sur un grand train, grâce à la générosité de sa présidente et mécène, madame Fortabat et, depuis dix ans, grâce au soutien des entreprises françaises qui pariaient sur l'Argentine et y investissaient. L'effondrement financier venu, il a fallu en tirer les conséquences.

En dix ans, le nombre d'élèves avait été divisé par deux, descendant à 5 000 inscrits par an. L'équipe de 198 professeurs et administratifs étaient, en grande majorité, titulaires de leur poste mais dépourvus de formation continue. Tout comme l 'Argentine, l' Alliance avait été gérée avec générosité mais  sans aucune vision de l'avenir.

La baisse générale des salaires  (- 23 % pour les plus élevés, - 10 % pour les plus faibles) qui aurait dégagé un délai pour gérer la crise et sauver des emplois, a été refusée par le personnel. En conséquence, 28 licenciements ont été effectués dans les pires conditions financières, car les 400 000 euros que le poste avait dû accepter de prélever sur ses crédits de programmation culturelle pour financer les indemnités de licenciements des personnels de l'Alliance ont été versés par Paris avec neuf mois de retard. De ce fait, et en raison de la législation argentine, les licenciements ont été réalisés 13 mois après la décision : on mesure les coûts d un tel délai.

En mai dernier, l'Alliance de Buenos Aires était convalescente : les cours se sont concentrés sur la plage horaire 17h-22h, donnés par 58 professeurs à temps souvent partiel, mais avec une administration encore pléthorique de 33 agents. Faute de mécènes et de sponsors, l'Alliance ne peut plus organiser de manifestations culturelles ; sauf financées par des Argentins : elle n a plus les moyens de faire de communication.

L'Alliance n'a pas fait naufrage, car elle a su réduire sa voilure, mais trop tard. Toutefois, elle n' est pas sauvée, car son avenir est totalement dépendant de la capacité de l Argentine à opérer son redressement économique.

SAO PAULO

Capitale économique de l'Etat le plus développé du Brésil et, en fait, de l'ensemble du Brésil, Sao Paulo offre à une Alliance française dynamique le cadre idéal de la réussite. C est aussi une capitale culturelle, en particulier pour le cinéma. Pour fêter, en 2004, le 450éme anniversaire de la ville, les 80 ans du lycée Pasteur et ses 70 ans, l'Alliance française a complètement rénové ses locaux. Elle a su réaliser sa restructuration financière et retrouver l'équilibre des comptes à partir de 1999, après 10 ans de déficit. 70 licenciements ont été nécessaires durant cette période et ont été effectués dans des conditions correctes.

Au cours des cinq dernières années, l'effectif des élèves a doublé, atteignant 4 500 élèves par semestre. Beaucoup de cours sont donnés « hors les murs ». De nombreuses Alliances ont été ouvertes dans l'Etat de Sao Paulo, surtout dans les universités, où elles constituent des petits départements de langue française. L'Alliance française de Sao Paulo a les moyens financiers d'un riche programmation culturelle qui répond aux attentes d'un public pauliste exigeant.

L'Alliance française est un des « opérateurs » extérieurs les plus efficaces du ministère . Au moment où celui-ci s'engage dans la voie de la déconcentration de ses tâches pour se consacrer au pilotage stratégique, il devrait accorder beaucoup plus d'autonomie à cet opérateur, et cesser de le soumettre à des régulations budgétaires qui le mettent en danger. La comparaison entre le coût du réseau de Centres culturels et celui des Alliances serait très cruelle pour les premiers si on disposait des moyens de comparer efficacement le rapport « qualité -prix » de l'un et de l'autre en matière d'influence culturelle et de diffusion de la langue française.

D. LES INSTITUTS ET CENTRES DE RECHERCHE A L'ÉTRANGER : DES PÔLES D'EXCELLENCE À VALORISER

Les travaux en sciences sociales et humaines, qui sont -ou ont été ?- un des points forts de la recherche française, sont effectués, au sein de la DGCID, par un réseau de 25 instituts et centres de recherche à l'étranger, de 2 collèges universitaires en Russie, ainsi que grâce à l'envoi de missions ponctuelles de chercheurs.

La mission de ce réseau est de contribuer au développement de nos connaissances sur les sociétés contemporaines de régions encore peu ou mal étudiées en France, et susceptibles de jouer un rôle dans les équilibres politiques, économiques et culturels de la planète.

Cette mission est particulièrement d'actualité aujourd'hui, car l'instabilité globale constatée dans les relations internationales requiert de meilleures connaissances sur des ensembles politiques et humains qui se déterminent, de façon croissante, selon des valeurs opposées à celles en vigueur dans les démocraties occidentales.

Le ministère des affaires étrangères n'a pas vocation à conduire seul ces activités, il lui appartient de fournir un cadre à la recherche , et de faire valoir sa compétence propre dès qu'il s'agit d'organiser, ou d'animer l'action de l'Etat à l'étranger, dans une démarche de coopération. Ces centres, multidisciplinaires, développent donc leurs programmes avec des partenaires locaux et internationaux, et offrent un accueil aux chercheurs européens, en s'efforçant de bénéficier de programmes de l'Union européenne.

Ce réseau s'est progressivement constitué, à partir d'initiatives individuelles, puis, après 1945, avec la volonté d'accroître les études pluridisciplinaires sur des sociétés contemporaines complexes.

Les principales étapes de la constitution de ce réseau sont les suivantes :

1922 : Institut Français d'Etudes Arabes de Damas

1924 : Maison Franco-Japonaise de Tokyo créée sur l'initiative de Paul Claudel, alors ambassadeur de France au Japon

1930 : Institut Français d'Etudes Anatoliennes (IFEA)

1946 : Institut Français d'Archéologie du Proche-Orient (IFAPO) à Beyrouth, avec deux antennes à Damas et Amman

1947 : Institut Français d'Archéologie de Téhéran (IFRI)

1948 : Institut Français d'Etudes Andines de Lima (IFEA), avec trois antennes, à Bogota, La Paz et Quito

1968 : Le Caire, Centre d'Etudes et de Documentation économique, Juridique et Sociale (CEDEJ)

1977 : Beyrouth, Centre d'Etudes et de Recherches sur le Moyen-Orient Contemporain (CERMOC)

1978 : Hong Kong, Centre d'Etudes Français sur la France Contemporaine (CEFC)

1980 : Nairobi, Institut Français de Recherche sur l'Afrique (IFRA)

1983 : Mexico, Centre Français d'Etudes Mexicaines et Centraméricaines (CEMCA)

1989 : New Delhi, Centre de Sciences Humaines (CSH)

1991 : Prague, Centre Français de Recherche en Sciences Sociales (CEFRES)

1992 : Berlin, Centre Marc Bloch (sciences sociales) ; Techkent, Institut Français d'Etudes sur l'Asie Centrale (IFEAC) ; Tunis, Institut de Recherche sur le Maghreb Contemporain (IRMC)

1994 : Johannesburg : Institut Français d'Afrique du Sud (IFAS)

1999 : Rabat, Centre d'Etudes en Sciences Humaines (CESHS) ; Bangkok, Institut de Recherche sur l'Asie du Sud-Est Contemporain (IRASEC)

2001 : Moscou, Centre franco-russe en sciences sociales et humaines

2003 : Institut Français du Proche-Orient (IFPO).

Pour renforcer les capacités interdisciplinaires de ces centres, un accord interministériel a été signé, le 5 décembre 2000, par les ministres des Affaires étrangères, de l'Education, et de la Recherche.

Depuis cette date, ces ministères sont associés avec le CNRS, pour financer et définir l'orientation scientifique de ces centres.

L'application de l'accord du 5 décembre 2000 se traduit par :

* le regroupement des centres du pourtour méditerranéen en quatre pôles géographiques :

- un pôle Turquie-Iran-Asie centrale

- un pôle Egypte-Soudan-Péninsule arabique

- un pôle Proche Orient

- un pôle Maghreb

* la création, le 1 er janvier 2003, d'un Institut Français du Proche-Orient (IFPO), réunissant le CERMOC, l'IFAPO et l'IFEAD, qui vise à renforcer la recherche française au Proche Orient.

* l'allocation de moyens humains et financiers par les ministères partenaires, comme l'affectation de chercheurs du CNRS, ou le financement partage des bourses.

* l'évolution de ces centres vers le statut d'unités associées au CNRS.

Les postes diplomatiques implantés dans les mêmes pays que ces centres souhaiteraient les voir contribuer à leur activité et leur documentation par la fourniture de notes ponctuelles entrant dans leur domaine de compétence. Cette nécessaire complémentarité semble loin d'être acquise, ce qui ne peut qu'accentuer l'insuffisant financement dont pâtit ce réseau scientifique de qualité. Certes, le chercheur travaille selon un calendrier différent de celui du diplomate, et est légitimement soucieux de son indépendance. Cependant, le ministère des affaires étrangères qui soutient et finance son activité souhaite, tout aussi légitimement, qu'elle soit valorisée au profit de nos postes diplomatiques.

Parmi ces thèmes d'études retenus par ces centres, on peut citer :

Beyrouth - Centre de Recherche sur le Moyen-Orient Contemporain (CERMOC)

Champ de recherche : « Etats et sociétés du Moyen-Orient contemporain (Liban, Syrie, Cisjordanie et Gaza, Jordanie, Irak). Logiques de ruptures et logiques de paix dans la recomposition des espaces, des communautés et des pouvoirs ».

Delhi - Centre de Sciences Humaines (CSH)

Champ de recherche : « L'Inde contemporaine au sein de l'Asie du Sud : ordre et complexités dans la gestion des héritages face au défi de l'internationalisation ».

Johannesbourg - Institut Français d'Afrique du Sud (IFAS)

Champ de recherche : « Reconstruction de l'espace (ville, région, territoire) et des identités (politiques, sociales, historiques) en Afrique du Sud dans un contexte post-apartheid ».

Lima - Institut Français d'Etudes Andines (IFEA)

Champ de recherche : « Les pays andins : multiplicité des milieux naturels et des héritages historiques à l'épreuve du développement ».

Tokyo - Maison Franco-Japonaise (MFJ)

Champ de recherche : « L'intégration du Japon en Asie et dans le monde industrialisé : transformations «économiques, sociales et culturelles ».

Ces exemples illustrent l'apport de ces recherches à la connaissance du monde contemporain, ainsi que leur caractère transversal et multidisciplinaire.

Par ailleurs, deux projets d'universités françaises à l'étranger méritent d'être cités ; car c'est une forme de coopération universitaire que la France met trop peu en oeuvre. Galatasaray repose sur un large réseau d'écoles dont le prestigieux lycée du même nom.

L'Université Galatasaray d'Istanbul
Une université francophone pour relier l'Europe à l'Asie :

- créée en 1992 par un accord intergouvernemental franco-turc, l'Université Galatasaray, qui a ouvert ses portes en 1993, s'insère avec ses 2 000 étudiants dans le projet intégré qu'elle constitue avec le lycée de Galatasaray, lié à la France depuis 1868 et qui scolarise pour sa part 1 100 élèves.

- installée dans un ancien palais situé sur les rives du Bosphore, l'Université ouvre aujourd'hui de nouvelles perspectives pour la Turquie qui se destine à jouer un rôle clé dans la région. Son emplacement au pied du pont reliant l'Europe et l'Asie en est un symbole significatif.

- le réseau scolaire des 15 lycées turcs francophones, regroupant au total près de 10 000 élèves, a désormais la possibilité d'accéder en Turquie aux études supérieures francophones correspondant aux critères européens. Mais ces lycéens ne constituent que la moitié des 300 étudiants entrant, après une sélection sévère, à l'Université Galatasaray. L'autre moitié, issue des écoles turques ou anglophones, accroît chaque année le nombre des futurs cadres francophones du pays.

Aujourd'hui, les quelques mille diplômés des sept premières promotions de l'Université Galatasaray issus des facultés de Droit, de Sciences économiques et administratives, d'Ingénierie et de Technologie, de Communication, de Sciences et Lettres, occupent déjà des postes-clés sur le marché du travail, dans le secteur privé turc ou français et dans la haute fonction publique turque.

L'effort de la France sur ce projet-phare de la coopération est exceptionnel : avec notamment 33 postes d'enseignants sur l'Université et 30 sur le lycée, il est de l'ordre de 3 millions d'euros annuels depuis 10 ans.

L'université française d'Egypte est un premier pas vers la création d'un pôle universitaire en français au Caire, qui constituera un débouché pour les lycéens égyptiens où une partie de l'enseignement est donnée en français (anciens lycées de la Mission laïque nationalisés).

L'Université Française d'Egypte est une université égyptienne privée (sans but lucratif) reposant sur un partenariat fort avec des universités et institutions supérieures françaises. Elle a ouvert ses portes en octobre 2002.

Trois facultés fonctionnent aujourd'hui qui rassemblent 109 étudiants :

- une faculté de gestion et systèmes d'information en partenariat avec l'université Paris IX Dauphine (71 étudiants : 38 en 2003, 33 en 2002),

- une faculté de langues appliqués, en partenariat avec l'université Paris III Sorbonne nouvelle (19 étudiants : 13 en 2003, 6 en 2002),

- une faculté d'ingénierie qui a débuté en octobre 2003, en partenariat avec un consortium composé de l'Institut National Polytechnique de Grenoble,  l'Ecole Nationale Supérieure des Télécommunications, l'Ecole Nationale des Arts et Métiers, l'Ecole nationale des ponts et chaussées et le lycée Louis le Grand (20 étudiants ont intégré cette faculté).

Malgré le doublement du nombre d'étudiants inscrits en première année entre 2002 et 2003 (39 en 2002, 72 en 2003), les résultats sont en recul par rapport aux prévisions. Parmi les raisons invoquées, on doit signaler la diminution de près de 30 % du cours de la livre égyptienne par rapport à l'euro durant ces derniers mois, ainsi que l'ouverture, en octobre 2003, de l'université allemande du Caire, université privée de langue anglaise.

La présence en Egypte de plus de 60 établissements scolaires bilingues (français-arabe) qui totalisent environ 45 000 étudiants (2500 bacheliers chaque année) constitue néanmoins un facteur d'optimisme pour le futur de ce projet.

E. L'ACTION CULTURELLE « HORS LES MURS »

La suppression du « détachement administratif » de fonctionnaires à l'étranger relevant du ministère des affaires étrangères, a mis en lumière un versant largement ignoré de l'influence culturelle extérieure de la France. Il s'agit de l'activité de milliers de Français, dont plus de 2.350 fonctionnaires, dans des établissements tels que des écoles primaires et secondaires, des institutions de formation continue, des universités, des centres de production et de diffusion de la culture et des arts, des laboratoires de recherche scientifique, cette liste n'étant pas exhaustive.

Ces Français sont dispersés dans le monde entier avec une dominante en Amérique du Nord et dans l'Union européenne. Ils sont totalement intégrés dans leur structure de travail où leur carrière évolue comme celle de leurs pairs : leur promotion dans des fonctions de directeur de recherche, de chef de département, de conseiller pédagogique fait d'eux des personnalités reconnues, et ils sont perçus, dans leur milieu professionnel, comme des symboles de la France, même s'ils ont acquis la nationalité de leur pays de résidence.

Un urbaniste français à Harvard :

un bel exemple d'action culturelle française « hors structures »

Architecte diplômé du MIT et docteur en urbanisme (Ph .D. in City and régional Planning) François Vigier a été, au sein de l'université d'Harvard l'un des précurseurs de l'enseignement moderne de l'urbanisme et de la planification urbaine .

Directeur du Département de planification urbaine (1992-1998) il réforme en profondeur l'enseignement de l'aménagement à Harvard, avec, notamment, une collaboration entre la School of Design et la Faculté des sciences politiques ( Kennedy School of Government ). Plusieurs urbanistes français viennent y enseigner. Dominique Perrault et Jean Nouvel sont invités à donner des conférences très appréciées.

En 1987, grâce à une donation de Son Altesse l'Aga Khan, François Vigier fonde le Centre de recherches sur le développement urbain.

Ce centre rassemble une équipe de chercheurs spécialisés dans les problèmes du développement, tant aux Etats Unis qu'en Europe et dans les pays du Tiers-Monde. Ses activités sont financées par l'USAID américaine, la Banque Mondiale, la Banque Interaméricaine de Développement, les gouvernements intéressés et des fondations. Depuis deux ans, le Centre a des rapports soutenus avec des chercheurs français sur le thème de la participation des organisations de résidents à l'amélioration de l'habitat et des espaces publiques au niveau des quartiers .

Durant ces six dernières années, les principaux travaux du Centre se sont localisés dans les pays suivants :

  • Europe de l'Est : Albanie - Plan stratégique de la région de Tirana . Pologne - Plan stratégique de la ville de Szczecin ; Politique de l'habitat à Lublin . Roumanie et Bulgarie - Politique de dévolution de l'aménagement urbain .
  • Proche Orient : Egypte - Rénovation de l'habitat social ; Jordanie - Régularisation de l'habitat informel .
  • Afrique du Nord : Maroc - Réforme de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat insalubre ; Stratégie de sauvegarde et de rénovation de la médina de Fez . Tunisie - Evaluation des projets de rénovation de la médina de Tunis .
  • Afrique de l'Ouest : Côte d'Ivoire - Participation communautaire dans les collectivités locales de la région d'Abidjan . Mauritanie - Réforme de la politique urbaine nationale .
  • Etats Unis - Evaluation de la politique de transformation des bases militaires désaffectées ; Actions communautaires dans les quartiers démunis .
  • Amérique Latine : Evaluation de l'impact des budgets participatifs sur les quartiers informels ; Rôle du microcrédit dans l'amélioration du logement .

En plus de l'assistance technique qu'il apporte, le Centre organise des programmes de formation pour des décideurs du secteur publique. Il participe également à plusieurs activités internationales: Comité Directeur de l'initiative « meilleurs projets mondiaux » de UN/HABITAT; Forum des Nations Unies sur le micro-crédit; Initiative « culture et développement économique » organisée par la Banque Mondiale et l'UNESCO.

Ainsi, que ce soit par l'enseignement dispensé à Harvard en urbanisme ou par les activités d'expertises menées par le Centre de recherche sur le développement urbain, des spécialistes de toutes nationalités, dirigés par un Français, son adjointe américaine d'origine égyptienne, francophone, Mme Mona Serageldin, son correspondant pour la France, le Proche-Oient et l'Afrique du Nord, M .Samir Abdulac (directeur du conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement d'Eure-et-Loir) la France est présente, la langue française est pratiquée dans un secteur clé du développement des pays pauvres et émergents. Voilà qui relativise le discours étriqué sur la « fuite des cerveaux ». Cet exemple, parmi tant d'autres, prouve que l'influence internationale de la France dépend tout autant de l'initiative personnelle de Français dynamiques que de plans technocratiques souvent inadaptés aux objectifs recherchés, faute de connaissance du milieu universitaire ou technique dans lequel on prétend opérer.

Lors de ses visites aux communautés françaises, votre rapporteur a le bonheur de les rencontrer et de découvrir grâce à eux des résultats tangibles et démultipliés de l'action publique « colbertiste » en faveur de la diplomatie culturelle depuis le début du XXème siècle.

Un exemple : visite du centre de recherche de Los Alamos, organisée par le consul honoraire de France à Santa Fé au Nouveau Mexique en 2000.

Le directeur du laboratoire de recherche sur les champs magnétiques en haute pression (ce qui a donné naissance aux IRM médicales), de nationalité mexicaine, a fait ses études de physique et obtenu son doctorat à Grenoble (de l'utilité des bourses universitaires...). Grâce aux relations qui se sont nouées pendant les années d'études du directeur, des chercheurs français confirmés sont régulièrement invités à venir travailler à Los Alamos et bénéficient ainsi des installations exceptionnelles de ce laboratoire pour la réalisation de leurs expériences. Des échanges fréquents de chercheurs et des programmes communs de recherche sont organisés entre ce laboratoire et les facultés de Sciences de Grenoble et de Toulouse, les plus en pointe dans ce domaine en Europe. Lors de ma visite, des étudiants français en post doctorat étaient accueillis et rémunérés par le laboratoire pour y achever leurs travaux.

L'influence culturelle de la France, dans ce cas comme dans des centaines d'autres, différents, originaux, résulte de la synergie entre l'action de l'Etat sur des points-clés (les bourses universitaires) dont l'effet n'est perceptible (mais pas mesurable) que sur le long terme, la mobilité des chercheurs et étudiants français, la capacité de certaines de nos facultés à développer les échanges internationaux. Cela ne se met pas en graphiques, pas plus que cela ne s'évalue en termes monétaires. Il n'empêche que c'est la multiplication de ce type de situation qui maintient la France dans le mouvement brownien de la vie culturelle internationale et contribue à lui garder un rang de puissance culturelle et politique dans le monde.

Quel rapport avec la suppression du détachement administratif des fonctionnaires par ministère des affaires étrangères ? C'est que, parmi les Français impliqués, plus de 2.350 sont des fonctionnaires qui relèvent de différents ministères, en majorité du Ministère de l'Education Nationale. Le détachement administratif leur permettait de mener leur action à l'étranger, pour l'essentiel dans le secteur de l'enseignement et de la recherche (1.517 d'après le ministère des affaires étrangères) et dans les organisations internationales (plus de 8.000). Ils n'étaient rémunérés que par leur employeur étranger, mais cela avait tout de même un coût pour la France :

- gestion administrative de ces fonctionnaires par la direction des ressources humaines du ministère des affaires étrangères,

- versement, pour les enseignants, d'une cotisation de 1 % assise sur la base de leur salaire de référence français, au régime d'assurance maladie des fonctionnaires, afin de leur assurer une couverture pour leurs soins médicaux lors de leurs séjours en France,

- à terme, versement de la pension pour laquelle ces fonctionnaires détachés étaient astreints à cotiser.

L'encadré ci-dessous explique dans quelles conditions le ministère des affaires étrangères a décidé de mettre fin à cette modalité de détachement de fonctionnaires à l'étranger. La difficulté a été résolue, dans des conditions désavantageuses mais qui préservent l'essentiel de leurs droits (rester fonctionnaire de l'Etat français) pour les enseignants. En revanche, rien n'est assuré pour les autres fonctionnaires et, même en ce qui concerne les enseignants, on peut craindre que le ministère de l'Education nationale ne mène, dès l'an prochain, une politique beaucoup plus restrictive de détachement que ne le faisait le ministère des affaires étrangères, car l'enjeu d'influence internationale est accessoire pour lui. Les non-fonctionnaires continueront leur action comme par le passé, mais il faut tout faire pour que des agents issus de la fonction publique continuent à pouvoir contribuer à cette action « hors les murs ». Enfin, il faudrait obtenir que les postes diplomatiques soient beaucoup plus attentifs à ces acteurs de l'influence française, veille à ce que les distinctions honorifiques qu'ils méritent à ce titre leur soient attribuées et participent à la création d'une banque de données sur ce versant méconnu de la présence française à l'étranger.

DU DÉTACHEMENT ADMINISTRATIF
AU DÉTACHEMENT DIRECT

Le « détachement administratif » n'a jamais existé en droit . Le ministère des Affaires étrangères a « créé » cette notion au début des années 70 comme un moyen simple de détacher des fonctionnaires qui partaient en poste à l'étranger, sur toute catégorie de poste. C'était une application extensive du décret 61-421 du 2 mai 1961 destiné aux seuls personnels de coopération technique et culturelle .

Au milieu des années 80, la direction du budget a alerté le ministère des Affaires étrangères sur l'irrégularité de la procédure et ce, d'autant plus que le décret de 1961 sur lequel se fondaient ces détachements, avait été abrogé par les décrets 73-321 du 15 mars 1973 et 80-344 du 12 mai 1980. Mais, cela constituait une telle facilité de gestion pour l'administration et un tel avantage pour les agents, puisqu'ils étaient en pratique « agents du ministère des Affaires étrangères », qu'ils cotisaient pour leur retraite et que leur carrière administrative se poursuivait, que le ministère des Affaires étrangères a persisté dans ce système. De plus, la direction du budget n'a jamais donné l'injonction ferme d'y mettre fin.

Les agents concernés occupaient des fonctions diverses : universitaires et chercheurs, enseignants employés dans des structures telles que les établissements d'enseignement homologués par le MEN, des écoles de l'AEFE, des écoles étrangères.

Le détachement « direct » est une facilité de langage. En réalité , si un fonctionnaire est « détaché », il ne peut l'être que par son ministère de rattachement et auprès de son employeur véritable.

Rappelons que ce détachement administratif avait un coût pour le ministère des Affaires étrangères : coût de la gestion des agents et versement à la sécurité sociale d'une cotisation de 1% assise sur le traitement indiciaire dans le corps d'origine de l'agent, afin qu'ils bénéficient de l'assurance-maladie pendant leurs congés en France. Ce coût modique était accepté par le ministère des Affaires étrangères en contrepartie des services rendus par les agents ainsi détachés.


• Jugement Papet-Perin (5 février 2002).

M. Papet-Perin, détaché administratif auprès d'un établissement de l'OSUI (Mission Laïque) au Maroc a porté plainte devant le tribunal administratif de Strasbourg contre le fait que la rémunération (équivalente à celle d'un « résident » de l'AEFE) que lui versait cette école privée ne comprenait pas l'indemnité de résidence prévue tant par le décret du 28 mars 1967 que par le décret du 5 mai 1950. Pour le tribunal, la requête de M. Papet-Perin est recevable car, même si son détachement était irrégulier, au regard de la législation et des décrets d'application, l'administration devait assumer ses turpitudes et lui verser des indemnités de résidence.

Le ministère ayant été condamné à verser une indemnité de résidence à M. Papet-Perin, il en a tiré la conséquence que le « détachement administratif » ne pouvait plus servir de base au détachement à l'étranger de tout fonctionnaire exerçant dans un établissement privé étranger, hors assistance technique ou réseau de l'AEFE, soit plus de 2350 agents dans le monde.

Le jugement « Papet-Perin » a donc signé l'arrêt de mort du « détachement administratif ».

La solution retenue comme base juridique de remplacement a été le « détachement » selon le décret du 16 septembre 1985 qui autorise le détachement des fonctionnaires dès lors que la fonction accomplie relève de l'enseignement (même si le fonctionnaire n'est pas enseignant).Rien n'est précisé, à la connaissance de votre rapporteur, pour toutes les autres fonctions exercées, que le décret de 1985 ne concerne pas.

La perte de l'assurance-maladie du régime des fonctionnaires

Le versement d'une cotisation de 1% du salaire pour faire bénéficier les agents détachés de la sécurité sociale pour les soins effectués en France a été supprimée par le ministère de l'éducation nationale qui est désormais le ministère gestionnaire des détachés enseignants à l'étranger (hors AEFE et assistance technique), pour les personnels détachés, à la demande du ministère des Affaires sociales.

FONCTIONS EXERCÉES PAR LES « DÉTACHÉS ADMINISTRATIFS »
NE SERVANT PAS DANS LES SERVICES DE L'ETAT À L'ÉTRANGER
( données au 1 er mai 2003 )

Fonctions exercées par les « détachés administratifs »

Nombre
d'agents

Solution envisagée

Enseignement à l'étranger

1.335

Solution envisagée : Détachement direct auprès de la personne morale avec laquelle l'agent a souscrit un contrat.

Base réglementaire : Décret n° 85-986 du 16 septembre 1985, art. 14, 6°

Avis du ministre chargé de la Fonction publique : accord par lettre n° 6183 DGAFP/FP3 du 22 novembre 2002.

Avis du ministre chargé du Budget : accord par lettre n° 2E-02-4923 MINEFI/DB/2E du 4 décembre 2002

Enseignant-chercheur

13

Chercheur

74

Activité dans une organisation internationale

809

Activité privée

3

Archéologue

4

Assistant technique

2

Bibliothécaires et documentalistes

2

Chef d'un établissement d'enseignement

75

Comptable

2

Conseiller auprès d'un chef d'Etat, d'un gouvernement ou d'une autorité administrative

3

Conseiller pédagogique

4

Conservateur

3

Documentaliste

5

Directeur technique auprès d'une fédération sportive

4

Entraîneur sportif dans un club

5

Editeur

1

Fonctions d'administration générale et de gestion

4

Pilote

1

Psychologue

2

Responsable de développement

3

Responsable pédagogique

3

Enseignants du second degré en détachement direct

Corps

A.E.

10

AGREGE

159

Continent

C.P.E.

3

AFRIQUE

79

CERTIFIE

507

Etablissement

AMERIQUE

202

CH.ENS.EPS

7

secondaire

548

ASIE

85

CHAIRE SUP

1

supérieur

216

EUROPE

241

COP

1

Total

764

OCEANIE

6

P.L.P.

48

UE

151

PEGC

3

Total

764

PROF. EPS

25

Total

764

Pays

Pays

Pays

BURKINA FASO

2

BAHREIN

1

HONGRIE

2

COTE D'IVOIRE

1

CAMBODGE

2

LITUANIE

1

DJIBOUTI

2

CHINE

13

MONACO

141

GABON

3

COREE DU SUD

2

NORVEGE

9

GUINEE

2

HONG-KONG

1

POLOGNE

2

GUINEE EQUA

2

INDONESIE

4

REP CHEQUE

2

MAROC

46

ISRAEL

5

ROUMANIE

2

MAURICE

2

JAPON

25

SUISSE

27

MOZAMBIQUE

1

KOWEIT

1

TURQUIE

55

NIGERIA

3

LIBAN

17

Total Europe

241

SENEGAL

10

MALAISIE

1

ALLEMAGNE

53

TUNISIE

4

PHILIPPINES

1

AUTRICHE

7

ZIMBABWE

1

SYRIE

7

BELGIQUE

3

Total Afrique

79

TAIWAN

2

DANEMARK

1

ARGENTINE

2

THAILANDE

3

ESPAGNE

18

BRESIL

6

Total Asie

85

FINLANDE

4

CANADA

11

GRECE

1

COLOMBIE

2

IRLANDE

3

EU

179

ITALIE

15

MEXIQUE

1

LUXEMBOURG

2

VENEZUELA

1

PAYS-BAS

3

Total Amérique

202

PORTUGAL

4

AUSTRALIE

6

ROYAUME-UNI

37

Total Océanie

6

Total UE

151

Enseignants du cycle primaire en détachement direct
par continents

Continent

primaire

secondaire

supérieur

Afrique

84

23

Amérique

43

5

4

Asie

29

6

Australie

5

3

Europe - UE

111

19

9

Europe - hors UE

58

5

TOTAL

330

61

13

Source : ministère des affaires étrangères

III. LE RÉSEAU D'ÉTABLISSEMENTS RELEVANT DE L'AEFE SUBIT DES ÉVOLUTIONS DIVERGENTES

« Parce qu'il offre, partout dans le monde, d'irremplaçables points d'appui à notre projection extérieure, parce qu'il est le plus efficace des outils d'influence lorsqu'il s'agit de former des élites locales, parce qu'il ouvre des espaces privilégiés de dialogue entre les cultures, notre réseau scolaire constitue sans doute l'un de nos meilleurs atouts dans la mondialisation qui est compétition de contenus, de normes, d'approches, de regards sur le monde »

Cet éloge du réseau d'écoles de l'AEFE, prononcé par M. Dominique de Villepin, ministre des Affaires étrangères, devant le Conseil économique et social, le 28 octobre 2003, souligne la place singulière occupée par cette agence dans le dispositif de nos relations culturelles extérieures, et justifie la place que ce rapport lui réserve.

Confrontée à la nécessité de financer le coût de l'application du décret du 4 janvier 2002, qui améliore la rémunération des personnels « résidents », l'AEFE avait bénéficié d'une notable amélioration financière l'an passé. En effet, la subvention de l'Etat avait atteint au total 340 millions d'euros , et s'y était ajoutée une mesure nouvelle de 15,5 millions d'euros, non reconductible . La mesure d'économie dite de « rationalisation du réseau » d'un montant de 6,4 millions d'euros initialement prévue par le projet de budget, qui aurait contraint l'AEFE à supprimer une centaine de postes d'enseignants titulaires en plus des suppressions déjà prévues, et à déconventionner de nombreux établissements dès la rentrée 2003, a, en effet, été supprimée, grâce à l'action déterminée du ministère des affaires étrangères, vigoureusement soutenu par le Parlement.

L'AEFE fait face avec succès à des situations locales parfois très critiques, le SRAS en Asie, au dernier trimestre de l'année scolaire 2002, et les troubles politiques africains (RCA, Côte d'Ivoire).

LA RENTRÉE SCOLAIRE EN CÔTE D'IVOIRE

Quelle gageure ! C'était la rentrée de tous les dangers : des établissements pillés, vandalisés, incendiés (Mermoz et Jacques Prévert), remis en état avec diligence pour épargner aux enfants le traumatisme supplémentaire de voir leurs salles de classe dévastées ; une incertitude totale du service d'action culturelle et de coopération sur le nombre d'élèves qui s'inscriraient et d'enseignants qui reprendraient leur poste ; des mesures à prévoir en cas d'émeutes ou même d'attaques des établissements pour garantir la sécurité des enfants.

En dépit des troubles persistants, cette rentrée 2003 à Abidjan a été une réussite : bonheur de rouvrir les écoles, de retrouver les enfants et les enseignants, ceux qui étaient restés et ceux qui sont revenus.

Les prévisions du SCAC se sont révélées exactes : 4600 élèves sont rentrés, soit 45 % des effectifs de 2002 encadrés par 82 enseignants titulaires (160 en 2002) ainsi que par le personnel recruté localement. Le ministère de l'éducation nationale avait géré, au cas par cas, la situation administrative de chacun pendant la crise. Les enseignants en sont satisfaits, et sont porteurs de projets pédagogiques en dépit de la précarité de la situation politique générale. On attend de l'AEFE qu'elle mette en oeuvre les accords informels, passés au cours de la crise sur la compensation des pertes de frais d'écolage, et des frais de licenciement. La perte d'exploitation résultant de la fermeture du lycée Blaise Pascal, par exemple, s'élève à 900 000 euros. Les frais de la reconstruction et du ré-équipement de l'école Jacques Prévert se montent à 650 000 euros. L'une des aides de l'AEFE aux établissements consiste à prendre en charge l'intégralité du salaire des résidents.

La persistance de l'incertitude politique et de la crise économique abaisse les revenus des familles, au pouvoir d'achat amoindri aussi par l'inflation. Dans ces conditions, la hausse de 15 % des droits de scolarité demandée par l'AEFE inquiète les familles.

Malgré tout, leur confiance, le dévouement des enseignants, les mesures de sécurité prises en concertation entre le consulat, le SCAC et les établissements, prouvent que le pari de la réouverture méritait d'être pris et tenu, non seulement pour les enfants mais aussi pour la Côte d'Ivoire à qui la France et les Français de Côte d'Ivoire ont donné un signal fort de confiance dans l'avenir. Tous les acteurs de cette rentrée scolaire méritent un témoignage de reconnaissance de la part de la représentation nationale.

L'année scolaire 2003 a cependant été marquée par la rupture des conventions existantes entre l'AEFE et la majorité des établissements scolaires des Etats-Unis , et par l'annonce du « déconventionnement » du lycée Victor Segalen de Hong Kong, de plusieurs écoles d'Espagne, et de celle de Luxembourg . Pour financer l'augmentation des rémunérations des enseignants résidents, 128 postes d'expatriés ont été transformés en postes de « résidents » à cette rentrée 2003. La subvention prévue par le projet de budget 2004 s'élève à 334,22 millions d'euros , alors qu'elles s'élevaient à 340 millions d'euros en 2003, soit une baisse de 1,72 % .

Pour être appréciée avec justesse, cette situation doit être explicitée : qu'est-ce que ce « réseau » de l'AEFE ? Qui le finance et dans quelles proportions ? Quelles sont les évolutions notables des 5 dernières années ? Pourquoi l'AEFE supprime-t-elle des postes d'expatriés pour les remplacer par des postes de résidents ? Quelles en sont les conséquences ? Dans quel but entreprend-elle de rompre, de façon soutenue, des conventions la liant à des établissements ? Quelles en sont les conséquences pour le réseau, les écoles, les coûts supportés par les familles ? Quel avenir pédagogique, statutaire et financier se dessine -t-il ainsi à court et moyen terme  ?

A. LE RÉSEAU DE L'AEFE EN 2003

Constitué et régi par la loi du 6 juillet 1990, ce réseau est constitué de 273 établissements : 74 en « gestion directe » (c'est-à-dire équivalents par leur mode de gestion à une école publique en France, mais payants) et 199 établissements « conventionnés » (c'est-à-dire des écoles privées, gérées par une association de parents d'élèves, ou par un conseil d'administration, qui ont passé un contrat-type avec l'AEFE). S'ajoutent à ce réseau 186 écoles qui offrent un enseignement français ou bilingue dont la validité est garantie par le ministère de l'Education nationale : les écoles « homologuées » .

Ces 273 établissements scolarisent 158 866 élèves dont 68 597 Français (43,2%) , 68 728 nationaux du pays où est situé l'établissement (43,3 %) et 21 541 « étrangers tiers ». A ces chiffres s'ajoute celui des élèves scolarisés dans les écoles homologuées. C'est ainsi un total de 225 000 élèves, dont 75 000 Français, qui bénéficient d'un enseignement français à l'étranger.

B. LE FINANCEMENT DU RÉSEAU D'ÉCOLES FRANCAISES A L'ÉTRANGER

Le budget total des établissements d'enseignement du réseau pour l'année 2002-2003 , d'après la FAPEE (Fédération des associations de parents d'élèves à l'étranger), qui agrège le budget propre de l'AEFE à celui des établissements du réseau, s'élève à 833 millions d'euros selon la répartition suivante :

Coût global de l'enseignement français à l'étranger

en 2001/2002 833 millions d'Euro

751 M€ en 2000/2001

AEFE

MEN

Familles

Pays d'accueil ou sociétés

315,47

1,78

502,47

13,31

Source : FAPEE

Selon ces données, les familles concourent donc pour plus de 60 %, en moyenne mondiale, au financement de la scolarité de leurs enfants . Cette part a notablement augmenté avec les mesures d'amélioration du statut et de la rémunération des personnels titulaires « résidents » (autrefois « recrutés locaux »), résultant des décrets de 1990 et de 2002, dont la charge est largement retombée sur le budget des établissements.

Les droits de scolarités ont-ils augmenté dans les proportions suggérées par ce tableau ? Ce n'est pas l'avis de M. Jean-Daniel Tordjman, Inspecteur général des finances et ancien diplomate, auquel l'AEFE a demandé d'étudier l'évolution de ces droits. Ses conclusions font ressortir que les écoles françaises sont toujours beaucoup moins coûteuses pour les familles que les autres écoles privées étrangères comparables (américaines, anglaises, allemandes) et, surtout, que les frais de scolarité, exprimés en monnaie locale, peuvent avoir baissé dans certaines zones du fait de l'appréciation de l'euro. Le débat entre l'AEFE et les parents d'élèves sur ce point est donc loin d'être clos. Le tableau suivant décrit l'évolution contrastée des frais de scolarité par grandes zones géographiques :

EVOLUTION DES FRAIS DE SCOLARITÉ PAR ZONE

Zone

Période

Moyenne frais
de scolarité

Période

Moyenne frais
de scolarité

Evolution en %

Europe

2003/2004-1

2 885,38

2002/2003-3

2 746,91

5,04 %

Europe de l'Est

2003/2004-1

3 080,67

2002/2003-3

2 991,44

2,98 %

Afrique du Nord

2003/2004-1

1 196,66

2002/2003-3

1 111,53

7,66 %

Amérique du Nord

2003/2004-1

8 321,43

2002/2003-3

8 245,02

0,93 %

Amérique centrale et sud

2003-2

2 001,46

2002-3

2 429,32

- 17,61 %

Amérique centrale et sud

2003/2004-1

1 736,58

2002/2003-3

1 987,56

- 12,63 %

Asie Océanie

2003-2

1 259,96

2002-3

1 212,74

3,89 %

Asie Océanie

2003/2004-1

3 946,28

2002/2003-3

4 263,81

- 7,45 %

Afrique francophone

2003/2004-1

985,25

2002/2003-3

939,99

4,82 %

Afrique non francophone

2003/2004-1

2 024,82

2002/2003-3

1 885,56

7,39 %

Proche et Moyen Orient

2003/2004-1

2 279,01

2002/2003-3

2 530,36

- 9,93 %

Source : ministère des Affaires étrangères

Les familles françaises de l'étranger acceptent mal de participer financièrement au coût de scolarisation de leurs enfants car la gratuité scolaire est inscrite dans la mentalité nationale, mais ce qui les heurte surtout, c'est de constater l'économie réalisée par la collectivité nationale sur la formation de ces jeunes citoyens français, du fait que leurs familles sont établies à l'étranger.

Coût théorique d'une scolarisation en France
et coût effectif d'une scolarisation effectuée à l'étranger

Source : FAPEE

La FAPEE a calculé que le coût théorique des 68 590 élèves français de l'AEFE aurait été de 386,3 millions d'euros s'ils avaient été scolarisés en France alors qu'il n'est que de 176,1 millions d'euros, y compris les bourses, pour l'Etat, dans le cadre de l'AEFE, soit une économie de 210,17 millions d'euros . Rappelons qu'avec une subvention de 340 millions d'euros, l'AEFE a scolarisé au total, en 2002-2003, près de 159 000 élèves pour un coût inférieur à celui de la scolarisation des seuls élèves français du réseau s'ils avaient résidé en France. Ceci explique la demande générale et réitérée, tous horizons politiques confondus, d'une implication du ministère de l'Education nationale dans le financement de l'AEFE afin que ces disparités incontestables puissent être progressivement corrigées.

C. DIFFICULTÉS DE L'HEURE

L'AEFE est au centre d'une tension entre les missions que la loi lui a imparties et les contraintes, budgétaires pour l'essentiel, qui lui imposent de restreindre l'aide apportée aux établissements. Cette aide porte sur la mise à dispositions de fonctionnaires qu'elle rémunère intégralement, dans le cadre des conventions passées avec certaines des écoles privées qui s'étaient engagées, dans le cadre de l'AEFE, à participer à l'accomplissement de sa mission de service public.

L'AEFE reconnaît elle-même ces contradictions dans le compte rendu du séminaire de réflexion organisé les 6 et 7 mai 2003. Elle demeure insatisfaite des outils dont elle dispose pour les résoudre, mais dépend d'une chaîne décisionnelle lourde, et manque d'outils d'analyse statistique et financière.

Les plus préoccupantes de ces difficultés sont les suivantes :

1. Personnels : la substitution des résidents aux expatriés

a) Expatrié et résident : les différences de statut

Le décret du 31 mai 1990 a réparti les fonctionnaires employés dans les écoles françaises de l'étranger en deux catégories :

- les expatriés recrutés hors du pays d'exercice, sur la base d'un contrat de 3 ans, renouvelable une fois, et bénéficiaires d'une rémunération totale qui multipliait leur salaire de base français par un coefficient, variable selon les pays, d'une valeur de 1,7 en moyenne mondiale.

- les résidents, fonctionnaires recrutés localement par les établissements et rémunérés selon des critères locaux (ex : l'Amérique Latine) ou en référence à des grilles métropolitaines (ex : Afrique du Nord).

Le décret du 31 mai 1990 a soustrait les enseignants du décret de 1967 qui régit la majorité des agents de l'état en poste à l'étranger sans conséquence financière négative pour les expatriés. Il a amélioré la situation des recrutés locaux titulaires qui ont obtenu le statut de résident, tant sur le plan du droit que sur le plan de la rémunération, alignée, quel que soit le pays d'exercice, sur le salaire de référence français et versée par l'AEFE. Les établissements concourent à ces rémunérations par le versment d'une participation financière à l'AEFE.

b) Quelques effets pervers du décret de 1990

Le décret de 1990 constitue une « photographie » de la situation du réseau l'année de sa parution  : le nombre de supports budgétaires de postes de fonctionnaires a été bloqué à son niveau de 1990. Cette rigidité interdit à l'AEFE de répondre à l'augmentation du nombre d'élèves par la création de postes. L'AEFE ne peut gérer son personnel titulaire que par redéploiement géographique (on prend des postes en Afrique pour les affecter en Asie) ou par transformation de poste d'expatrié en poste de résident, transformation génératrice d'économie pour l'Etat, mais coûteuse pour les établissements, même dans les cas des postes de résidents dits « à coût nul » pour l'établissement. Cette rigidité conduit à des situation aberrantes : ainsi les écoles emploient-elles environ 160 fonctionnaires en qualité de « recrutés locaux », faute de supports budgétaires pour leur donner le statut de résidents. Ce sont les TNR (titulaires non-résidents) placés en position de disponibilité, dont la carrière est bloquée, qui ne peuvent pas cotiser pour leur retraite et qui seront pénalisés pour ces années d' « inactivité » au moment de la liquidation de celle-ci en vertu de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme du système de retraite !

c) Le programme de transformation de postes d'expatriés en postes de résidents

Ce programme résulte du fait que le décret de 2002, qui se substitue à celui de 1990, améliore la rémunération des résidents sans rien changer à leur statut ni à celui des expatriés, et ceci à coût nul pour l'état à l'issue de la période de transition en cours. Dans de telles conditions, l'application du décret requiert ces transformations de postes ainsi que d'autres mesures génératrices d'économies.

« A la rentrée 2004, ce sont 128 postes de titulaires qui ont été transformés (en postes de résidents). Pour les années suivantes, l'hypothèse actuellement envisagée est de poursuivre leur transformation à raison de plus d'une centaine de postes par an. Ceci porterait progressivement, d'ici à 2005, le nombre de personnels résidents à un peu moins de 4 900, et celui des personnels expatriés à un peu plus de 1 200 » (note communiquée par l'AEFE ).

CARTE SCOLAIRE 2003-2004

FERMETURES

OUVERTURES

EVOLUTION

expatriés

résidents

expatriés

résidents

expatriés

résidents

Europe

44

17

5

60

- 39

43

Amérique

31

138

8

33

- 23

- 105

Asie-Océanie
Moyen-Orient

29

10

4

44

- 25

34

Afrique

89

138

10

146

- 79

8

Total

193

303

27

283

- 166

- 20

Source : ministère des Affaires étrangères

OUVERTURE DE POSTES DE RÉSIDENTS POUR 2002-2003

COÛT NUL POUR L'ÉTABLISSEMENT

PARTICIPATION

COÛT NUL POUR L'AGENCE

TOTAL

Europe

48

18

0

66

Amérique

21

20

3

44

Asie-Océanie
Moyen-Orient

57

14

0

71

Afrique

79

24

1

104

Total

205

76

4

285

Source : ministère des Affaires étrangères

EVOLUTION DES EFFECTIFS D'ENSEIGNANTS PAR GRANDES ZONES GÉOGRAPHIQUES
(EXPATRIÉS)

ZONE GÉOGRAPHIQUE

TOTAL

97/98

98/99

99/00

00/01

01/02

02/03

Afrique Champ

452

440

419

301

287

271

Afrique hors Champ

64

62

61

60

59

54

Amérique du Nord

85

86

81

80

74

67

Amérique Latine

234

228

230

248

227

212

Asie Océanie

132

139

144

153

154

146

Océan Indien

119

122

111

Europe centrale/orientale

42

43

45

76

55

118

Europe occidentale

348

326

307

284

298

193

Maghreb

387

358

329

325

288

266

Moyen-Orient

115

127

138

150

158

149

Monde entier

1 859

1 809

1 754

1 796

1 722

1 587

EVOLUTION DES EFFECTIFS D'ENSEIGNANTS PAR GRANDES ZONES GÉOGRAPHIQUES
(RÉSIDENTS)

ZONE GÉOGRAPHIQUE

TOTAL

97/98

98/99

99/00

00/01

01/02

02/03

Afrique Champ

624

642

694

535

560

603

Afrique hors Champ

105

116

131

131

141

146

Amérique du Nord

251

263

256

252

251

231

Amérique Latine

315

335

325

384

415

447

Asie Océanie

201

215

226

234

255

274

Océan Indien

177

193

222

Europe centrale/orientale

70

74

81

160

164

411

Europe occidentale

1 243

1 266

1 306

1 256

1 087

1 185

Maghreb

701

724

775

796

827

847

Moyen-Orient

155

169

185

180

201

216

Monde entier

3 665

3 804

3 979

4 105

4 094

4 582

Source : ministère des Affaires étrangères

d) Des postes à coût nul ?

OUVERTURE DE POSTES DE RÉSIDENTS POUR 2003-2004

COÛT NUL POUR L'ÉTABLISSEMENT

PARTICIPATION

COÛT NUL POUR L'AGENCE

TOTAL

Europe

54

6

0

60

Amérique

22

4

7

33

Asie-Océanie
Moyen-Orient

24

20

0

44

Afrique

107

16

23

146

Total

207

46

30

283

Source : ministère des Affaires étrangères

Normalement la rémunération des résidents est partagée entre l'AEFE et les établissements. Mais, dans le cadre des transformations liées à l'application du décret de 2002, la rémunération des nouveaux résidents est prise en charge à 100% par l'AEFE. Ces postes sont dits « à coût nul pour l'établissement ». Ce n'est que partiellement vrai. La majorité des « résidents » sont recrutés en France, les établissements doivent donc leur consentir des avantages pour les attirer et les garder : paiement du transport et de billets pour congés, prime d'installation, paiement intégral des trois premiers mois d'exercice en qualité de recruté local et participation aux cotisations d'assurance-maladie à la Caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger. L'établissement rembourse aussi à l'AEFE une part de l'indemnité spéciale de vie locale (ISVL). Cette liste n'est pas exhaustive. Les établissements constatent souvent que leur investissement de départ sur de faux-résidents est à fonds perdus, car ceux-ci quittent fréquemment leur poste après un bref séjour. La stabilité de ces personnels est d'autant plus faible que les conditions de vie dans le pays sont difficiles.

Les établissements sont déstabilisés financièrement et dans leur fonctionnement pédagogique par cette politique. Les répercussions sur la qualité de l'enseignement sont encore rarement sensibles. Il n'empêche que, sur ce point, les inquiétudes sont partagées par toutes les composantes des communautés éducatives.

2. Le cas particulier des Etats-Unis

Aux Etats-Unis existent 33 établissements à programmes français homologués jusqu'à des niveaux de scolarité divers par le ministère français de l'éducation nationale. Depuis le 1er septembre 2003, seuls trois d'entre eux, contre huit auparavant, demeurent liés par convention à l'AEFE : les lycées Rochambeau de Washington, La Pérouse de San Francisco et l'école internationale de Denver.

En effet, l'incompatibilité entre la législation américaine et le statut des résidents tel que défini par le décret n° 2002-22 du 4 janvier 2002 a contraint l'agence à décider de ne plus affecter cette catégorie de personnel aux Etats-Unis. Il n'existe plus, dans ce pays, que des personnels au statut d' expatriés, à la charge de l'Agence, et des agents recrutés sur contrat local par les établissements auprès desquels ils sont détachés directement. Cent trente deux postes de résidents au total (87 dans le primaire et 45 dans le secondaire) y ont été supprimés, et font l'objet d'une réaffectation par l'Agence, en fonction des besoins de création de postes de résident, dans le réseau. Des régularisations de titulaires non résidents ont notamment déjà été effectuées sur ces supports.

Les cinq établissements qui ne bénéficiaient que de fonctionnaires  « résidents » ont été amenés à considérer que les conventions en vigueur devenaient déséquilibrées : des contraintes statutaires leur étaient imposées sans contrepartie suffisante de l'AEFE. Elles les ont dénoncées, souvent à contre-coeur, car c'est une part de leur légitimité d'école française qu'elles estimaient perdre ainsi.

Compte tenu du taux élevé de la participation des établissements aux salaires des résidents, le surcoût induit par la disparition de cette catégorie de fonctionnaires varie de 1 % à 2,7 % du budget global des établissements (exception: Chicago: 4,4 %) Cela engendrera des hausses de droits de scolarité, qui devraient rester modérées, mais qui se répercuteront sur le budget des bourses scolaires dont leurs élèves continueront à bénéficier dans les mêmes conditions que lorsque l'établissement était conventionné.

Ces cinq établissements conserveront l'homologation accordée par le ministère de l'Education nationale dès lors qu'ils continueront à respecter les critères exigés. Les actions de formation organisées par l'agence restent ouvertes à leurs personnels.

La carrière des fonctionnaires français détachés directement dans un établissement homologué, ou dans l'un des trois établissements encore conventionnés avec l'Agence se poursuit normalement dans leur corps d'origine (situation inchangée).

La seule différence notable concerne la couverture du risque maladie : les détachés directs bénéficient, au même titre que les autres employés des établissements américains, de la protection sociale prévue par les conventions collectives. Mais ils ne sont assurés hors du territoire des Etats-Unis que si la convention le prévoit. La Mutuelle Générale de l'Education Nationale -MGEN- continue de leur servir les prestations complémentaires mutualistes, en appliquant un coefficient correcteur de 4,5 afin de tenir compte du coût des frais médicaux américains. Une éventuelle désaffiliation entraînerait l'impossibilité de redevenir adhérent lors d'un retour en France à échéance plus ou moins tardive, sauf à subir de très fortes pénalités.

Une démarche a été tentée par le ministère des Affaires étrangères auprès ministère des Affaires sociales, pour maintenir leur affiliation au régime d'assurance-maladie propre aux fonctionnaires, sans résultat à ce jour. Ces personnels peuvent toutefois adhérer, à des conditions favorables (pas de délai de carence, taux de 5,25 % pour le risque maladie) à la Caisse des Français de l'Etranger pour couvrir les différents risques: maladie, maternité, invalidité; accident du travail, maladie professionnelle; vieillesse. La MGEN envisage de créer un guichet unique avec la CFE afin de simplifier le remboursement des personnels qui seraient à la fois adhérents à la CFE et à la MGEN.

3. Les implications de la baisse des indemnités de résidence pour l'AEFE

Le ministère des affaires étrangères a décidé, dans le cadre de sa participation à l'effort de rigueur budgétaire, d'appliquer un abattement de 26 millions d'euros aux primes de résidence versées à son personnel en poste à l'étranger. Sur ce total, 3,8 millions d'euros seront affectés à l'augmentation des primes des personnels de l'administration centrale, et la même somme à l'amélioration de la rémunération des recrutés locaux, le reste revenant au budget général de l'Etat.

Cette mesure a un impact de 6 millions d'euros sur le budget de l'AEFE. Or, cette économie est difficile à réaliser sur les primes des 1 427 expatriés qui sont les seuls agents du réseau à la percevoir. Il est donc à craindre que, faute de pouvoir réaliser cette économie, l' AEFE ne soit contrainte, en cours d'année, de puiser dans son fonds de roulement alors qu'elle avait réussi à le faire remonter à 12 jours de fonctionnement (7 jours l'année dernière). Une telle ponction serait inacceptable, et le Parlement devra être très vigilant sur ce point .

D. LE MOUVEMENT DE DECONVENTIONNEMENT

Ce mouvement, qui touche actuellement une dizaine d'établissements, obéit à plusieurs logiques. L'impossibilité d'appliquer le décret 2002-22 aux résidents des Etats-Unis justifie pour une part le déconventionnement de quelques écoles, mais pas de toutes. L'avantage de n'être plus une école homologuée est patent pour le lycée Vauban de Luxembourg . Dans le cadre d'une redéfinition politique du réseau de l'AEFE en Espagne , la rupture de la convention peut être admise pour telle ou telle école ; le lycée Victor Segalen de Hong Kong fonctionne selon des normes que l'AEFE ne juge plus conforme à celles d'un établissement conventionné, ce qui l'amène à envisager de dénoncer la convention. Mais il n'en demeure pas moins que ce mouvement a pour résultat de dégager financièrement l'Etat du fonctionnement de ces établissements et de donner des marges de manoeuvre en matière de carte scolaire à l'AEFE sans qu'il en coûte un sou.

Or un tel processus porte atteinte à la capacité de l'AEFE d'atteindre les objectifs que lui avait fixés la loi de 1990 . Le réseau y perd en capacité d'accueil et en cohérence institutionnelle. Un établissement dont on résilie la convention devient un « électron libre », une école homologuée de plus, dégagée des obligations relatives au prolongement du service public à l'étranger.

L'AEFE y perd aussi en cohérence pédagogique car le lien conceptuel qui relie l'établissement déconventionné au système français tend à se distendre. L'établissement y perd une aide financière, ce qui l'oblige à accroître la participation des familles, et les personnels titulaires de la fonction publique voient disparaître les garanties statutaires qui les protégeaient face aux associations gestionnaires .

Il n'est pas étonnant que nombre d'acteurs du réseau, dont les parents d'élèves et les enseignants, s'inquiètent de cette évolution, et que l'AEFE, pour sa part, cherche des moyens pour resserrer ses liens avec les établissements homologués.

1. Luxembourg

Une nouvelle loi luxembourgeoise prévoit que l'Etat peut participer au financement des infrastructures et du fonctionnement des établissements d'enseignement privés. L'une des conditions est que l'établissement soit « l'employeur des enseignants et du personnel administratif et technique ». Cette loi entrera en vigueur au 1 er janvier 2004. Compte tenu de l'importance des aides financières prévues, l'association gestionnaire du Lycée Vauban a fait savoir à l'Agence qu'elle souhaitait se placer sous ce régime très avantageux, qui allègera considérablement la charge des familles. L'Agence a précisé que les délais prévus pour la dénonciation de la convention devaient, en tout état de cause, être respectés, et qu'il importait de donner la possibilité aux personnels de l'établissement (12 enseignants résidents et 1 proviseur expatrié), de pouvoir choisir entre une réintégration, un acte de candidature sur un poste à l'étranger ou le maintien sur un poste de recrutement local dans le respect des calendriers administratifs français.

Une négociation a été menée localement avec les autorités luxembourgeoises. Celles-ci ont accepté de prendre en compte la date du 31 août 2004 pour le lycée Vauban. L'association gestionnaire doit maintenant confirmer à l'agence la décision qu'elle entend prendre par rapport à l'actuelle convention.

2. Espagne

De nombreux rapports se sont interrogés, depuis une dizaine d'années, sur l'opportunité de conserver un réseau d'établissements aussi dense en Espagne, réseau créé à une époque où la France avait intérêt à scolariser des enfants en grande partie espagnols, demandeurs d'un système alternatif au système national franquiste. En outre, les autorités espagnoles sont favorables à une véritable coopération avec la France (mise en place d'un modèle de certification internationale).

La question du déconventionnement se pose pour le collège Molière de Saragosse et le collège français de Las Palmas , car le nombre d'élèves français est faible (respectivement 18 % sur un effectif total de 649 élèves et 15 % sur un effectif de 398, à la dernière rentrée), et il existe plusieurs intervenants, la Mission Laïque Française étant gestionnaire de ces établissements. Pour ces deux établissements, les personnels détachés par l'AEFE sont au total au nombre de 25.

L'Ambassade de France a mis en place un groupe de réflexion informel sur l'évolution de l'enseignement français en Espagne , associant l'ensemble des acteurs de la communauté éducative et des personnalités extérieures dont les délégués des Français à l'étranger. L'idée d'une charte qui regrouperait tous les établissements du réseau a, en particulier, été lancée.

Le déconventionnement de ces établissements, qui implique, en tout état de cause, une information des personnels qui choisiraient de rester dans l'établissement avec un statut de recrutement local, les différents aspects de leur situation, fait actuellement l'objet d'un examen.

3. Hong Kong

Créé en 1979 et doté, conformément à la législation locale, d'une filière internationale en partenariat avec « l'Education department » de Hong Kong, le lycée Victor Segalen fonctionne selon des normes que l'AEFE ne juge pas conformes à la convention-type. Les pourparlers entamés depuis le 31 janvier 2003 sont dans une impasse, et l'AEFE refuse de signer la convention spécifique proposée par le Comité exécutif du lycée au mois de juin. Le déconventionnement annoncé par l'AEFE alourdira la charge salariale de l'établissement et engendrera une augmentation des frais de scolarité qui inquiète les familles et les entreprises. Quant au personnel, il s'inquiète de devenir salarié d'une entreprise privée de droit local et, pour les fonctionnaires de perdre une part des garanties du statut de la fonction publique.

4. Toronto

Cet établissement de 270 élèves connaît des difficultés juridiques et financières graves provoquées par la gestion aventureuse de la précédente association de parents d'élèves. Le retrait de l'AEFE, annoncé au lendemain de la rentrée 2003, avec effet à la fin de l'année scolaire, ajoute à la fragilité de l'école. La perte de recette provoquée par le déconventionnement s'élève à 600 000 dollars canadiens. L'assainissement financier est obéré par une charge annuelle de 200 000 dollars canadiens qui pèsent sur le budget. L'association gestionnaire propose donc une augmentation des frais de scolarité de 2500 à 3000 dollars canadiens dès la rentrée 2004. Même si ces frais de scolarité restent inférieurs à ceux de la Toronto French School (qui ne prépare pas au baccalauréat français), ce déconventionnement met l'établissement en danger . C'est un rude coup porté à l'actuelle association gestionnaire qui agit efficacement pour rétablir la situation afin que la France offre l'enseignement de qualité français recherché par les familles françaises et étrangères francophiles dans la capitale économique du Canada anglophone.

E. LES BOURSES SCOLAIRES

Depuis 1998 , dans un contexte budgétaire redevenu plus favorable, l'Agence, en accord avec la Commission nationale des bourses, a pu mettre en place une politique des bourses scolaires qui tend à garantir la régularité de l'attribution des bourses durant la scolarité des enfants . Elle a ainsi revalorisé et harmonisé les barèmes d'attribution. Les bourses destinées à couvrir les frais parascolaires ont été rétablies. L'AEFE négocie avec les établissements en matière de politique tarifaire afin d'éviter ou de limiter les mesures de plafonnement des bourses, en particulier aux Etats-Unis où se pose aussi le problème de la prise en compte du patrimoine des familles dans l'évaluation de leur besoin d'aide à la scolarité. Cette question n'a pas encore trouvé de réponse satisfaisante et juste.

On observe un délai de près de deux ans entre l'augmentation des budgets et la meilleure satisfaction des demandes d'un nombre grandissant de familles. C'est pourquoi une hausse, même modérée, mais régulière des crédits affectés aux bourses est essentielle au bon fonctionnement du système . Toutefois, il est à craindre que le ralentissement de la croissance de ce budget constaté pour 2004, (2,52 % à comparer aux 5,05 % en moyenne annuelle enregistrés de 1997 à 2003) n'engendre rapidement de nouvelles tensions dans les commissions locales. Le nombre de boursiers pourrait atteindre 19 800 avec un budget de 40,71 millions d'euros (14 184 il y a 10 ans)

F. CONSTRUCTION ET  ENTRETIEN DES LOCAUX SCOLAIRES

La réduction du titre V du budget du ministère, et la faiblesse du budget d'investissement de l'AEFE suscite des préoccupations. La France se trouve ainsi dans l'impossibilité de tenir les engagements pris, pour le lycée du Caire , par exemple, dont le terrain est acheté mais dont la construction est repoussée sine die. Par ailleurs, le manque d'entretien de nombreux établissements vétustes devient préoccupant pour la sécurité des élèves . Or, l'examen du budget révèle qu'il n'y a de marge de manoeuvre ni pour les écoles en gestion directe pour lesquelles le ministère a la charge des investissements, ni pour les établissements conventionnés qui doivent investir sur leurs fonds propres sans aide de l'AEFE.

G. PERSPECTIVES D'AVENIR

Sur le plan financier, les perspectives d'avenir sont plutôt sombres : on ne voit pas comment l'Agence pourrait faire face à la croissance naturelle du nombre des élèves (1 000 de plus par an en moyenne) puisque la réaction d'un rectorat d'Académie placé devant ce type de situation (la création de postes en conséquence) lui est interdit par le plan de réduction des postes d'expatriés qui lui est imposé par le ministère du budget.

A la suite du séminaire des 6 et 7 mai 2003, l'AEFE a proposé des pistes d'amélioration qualitative du réseau qui touchent :

- l'ouverture des établissements au pays d'accueil sur le plan linguistique, culturel, et la création de diplômes qui prennent en compte l'enrichissement de l'enseignement dispensé ;

- la coopération éducative et l'extension du périmètre de l'Agence . Les établissements du réseau devraient être des opérateurs de la coopération éducative. Pour corriger l'effet réducteur des déconventionnement, l'Agence souhaite que le ministère de l'éducation nationale lui confie la gestion d' accords de partenariat, dont le contenu reste à définir avec les établissements homologués.

En Europe, l'Agence voudrait développer des complémentarités entre ses établissements et des écoles du pays d'accueil, rechercher des cofinancements avec les autorités éducatives locales et rechercher des convergences en matière de programmes et de reconnaissance de diplômes.

L'Agence voudrait pouvoir établir avec ses établissements des contrats d'objectifs sur cinq ans dont les résultats pourraient être évalués sur la base d'indicateurs établis en commun. Elle voudrait rationaliser la participation des établissement à la rémunération des enseignants, et être autorisée à créer des supports de résidents, mais aux frais des établissements, afin de mettre un terme à l'aberration que constitue la situation des titulaires non résidents ; mais votre rapporteur est sensible au risque de voir le ministère du budget s'engouffrer dans cette brèche pour mettre progressivement fin à la participation de l'Etat à la rémunération des résidents.

Les propositions de l'Agence en matière de frais de scolarité relèvent du constat d'impuissance : au total, il faudrait au moins « clarifier les éléments qui justifient l'augmentation » de ces droits

L'Agence fait quatre propositions en matière de maintenance immobilière : transférer du ministère à l'Agence la compétence en matière d'investissements pour les établissements en gestion directe, et alimenter un fonds d'investissement par des loyers que ces établissements verseraient. Il convient d'étudier les moyens de leur permettre de recourir à l'emprunt pour financer leurs investissements.

Pour les établissements conventionnés, l'Agence voudrait créer un fonds mutualisé d'investissement que les entreprises pourraient alimenter dans le cadre du mécénat

Le recours aux entreprises est à nouveau proposé pour obtenir de nouveaux financements. Une autre piste tient dans la recherche de financement auprès des Etats des pays d'accueil et des organismes multilatéraux, qui ont besoin de l'AEFE pour scolariser les enfants de leurs agents. Enfin, pour les établissements dévolus à l'APD, tels que celui de Kaboul, il convient d'obtenir des crédits de coopération.

De nouvelles modalités de gestion pourraient être envisagées, dont la programmation sur une base pluriannuelle, proposée comme un moyen de réduire l'insécurité budgétaire.

DUBLIN : PASSER DES CONCEPTS A LA REALISATION

Dans le projet d'orientation stratégique qui conclut le compte-rendu du séminaire de réflexion de l'AEFE des 6 et7 mai 2003 , on lit, page 41 :

« préconisations : 3.2.1 mener une réflexion spécifique sur l'avenir de nos établissements en Europe, qui prenne en compte les complémentarités possibles avec les établissements situés dans le pays d'accueil. »

Après bien des péripéties, la petite école française de Dublin, créée il y a 35 ans, est devenue le Lycée Français d'Irlande avec 305 élèves dont 233 pour le primaire et 72 pour le secondaire.

Ce trop petit nombre d'élèves dans le cycle secondaire, installé dans des bâtiments préfabriqués sur le site de l'école germano-irlandaise Saint-Killian, menace la pérennité du Lycée, et fragilise le niveau primaire. Comment organiser une croissance rendue nécessaire par la très forte expatriation française en Irlande (300 Français, il y a 15 ans, plus de 5 000 immatriculés en 2003) et la demande étrangère, très vivace au niveau primaire.

Le projet de construction de bâtiments sur les terrains de St Killian se heurte à l'obstacle financier. En 2002, l'établissement a connu un déficit de 10 422 euros, malgré une subvention de 100 000 euros de l'Agence. L'association parentale gestionnaire n'a pas de fonds propres, et l'endettement suscité par l'emprunt des 4 millions d'euros nécessaires à la construction, du fait de la modicité de la subvention de l'AEFE, est trop risqué. En effet, le nombre d'élèves du secondaire ne peut pas croître sans délai aux quelques centaines d'individus dont les droits de scolarité assureraient le remboursement de l'emprunt. Et ce, d'autant plus qu'une Ecole européenne (gratuite pour les enfants des fonctionnaires de l'Union européenne) va ouvrir sous peu à Dublin et concurrencer les autres écoles étrangères.

Pourtant le campus irlando-franco-allemand de Dublin a prouvé, par son fonctionnement, qu'il correspond exactement au type d'école dont l'Europe future a besoin. Les deux équipes de directions, très motivées, ont su gérer les divergences inévitables entre leurs projets : les Français se sont alignés sur le calendrier scolaire irlandais et sur le rythme de la journée scolaire. Les salles de cours spécialisées sont partagées, les décisions d'achat de matériel prises en commun, des cours mixtes mis en place. L'intégration des programmes fait prendre conscience que « les programmes comme les démarches pédagogiques sont profondément culturels, que des objectifs cognitifs semblables n'induisent pas les mêmes exigences de réaction et de raisonnement pour les élèves ».

Il faut que ce projet voie le jour, peut-être sous la forme d'une section française de St Killian , la partie française louant les locaux construits par St Killian. La condition de la réussite est que les élèves du secondaire français puissent opter pour des modules d'enseignement menant vers le baccalauréat français, ou vers l'examen d'entrée en université irlandaise, car la double certification du type « abibac » (abitur allemand + bac français) demande des années de négociation. Il faut, en effet, répondre à deux demandes distinctes : celle des familles fixées en Irlande, qui orientent leurs enfants vers les universités irlandaises, et celle dont l'expatriation est provisoire et dont les enfants retourneront en France. Dans les deux cas, ce sont des citoyens pleinement européens qui auront été formés à St Killian.

IV. LA SITUATION DES ÉTUDIANTS ÉTRANGERS EN FRANCE S'EST AMÉLIORÉE, MAIS DES EFFORTS D'ATTRACTIVITÉ RESTENT À ACCOMPLIR

A. UNE AMÉLIORATION PROGRESSIVE DEPUIS 1998

L'un des domaines où se joue l'avenir de la France dans le monde est la capacité de notre enseignement supérieur à attirer le plus grand nombre possible d'étudiants étrangers. En effet, ces étudiants renforcent la capacité de notre Université et des écoles d'ingénieurs et de commerce à s'ouvrir aux échanges internationaux, à tenir compte de la diversité culturelle dans leur cursus, et de la diversité institutionnelle dans leurs relations internationales. Aujourd'hui, tous les grands pays se disputent les meilleurs étudiants sur un « marché » devenu mondial, car il y va de leur place dans la vie économique, dans la recherche et la vie culturelle, de la place de leur langue et de leurs normes intellectuelles et juridiques dans les institutions internationales.

La France a des atouts dans ce domaine, des atouts qu'elle doit faire renaître, mais aussi des handicaps à surmonter.

La politique volontariste menée depuis 1998 commence à porter ses fruits. Le nombre total d'étudiants étrangers, qui était tombé à 122 190 en 1998 pour des raisons multiples, parmi lesquelles une politique très restrictive de délivrance des visas, et la baisse des crédits affectés aux bourses universitaires de coopération, est remonté à 221 567 en 2002.

Le rapport élaboré sur ce point par M. Patrick Weil, en 1997, suggérait des modifications en matière de pré-inscription et de délivrance de visas, la rationalisation du système d'attribution des bourses universitaires, et une meilleure sélection des boursiers en fonction des objectifs de la France. La mise en oeuvre de ses recommandations commence à porter ses fruits.

1. La répartition des étudiants par continents d'origine

D'après le ministère, la répartition par région d'origine est la suivante en 2002 :

- Afrique 51,9 %

- Europe 24,8 %

- Asie, Océanie, Proche-Orient 16,3 %

- Amérique 6,9 %

2. La répartition par domaine d'étude

RÉPARTITION PAR DOMAINE D'ÉTUDE DES ÉTUDIANTS ÉTRANGERS EN 2002

Zones

Lettres, sciences humaines et filières artistiques

Filières scientifiques (dont la santé et l'agronomie)

Filières de sciences économiques, de droit et de gestion

TOTAL
étudiants/zones géographiques

Afrique

24,5 %

41,2 %

34,3 %

92 772

Amériques et Caraïbes

57,4 %

20,4 %

22,2 %

12 499

Asie-Océanie

47,8 %

22,2 %

30,0 %

18 215

Europe

48,0 %

20,5 %

31,05 %

47 840

Moyen-Orient

24,6 %

56,3 %

19,1 %

9 019

Autres

27,0 %

46,0 %

27,0 %

149

Total discipline
(en nombre)

63 903

59 685

56 906

180 494

Total discipline
(en %)

35,4 %

33,0 %

31,6 %

Source : Ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche

B. LES OBJECTIFS POURSUIVIS PAR LA FRANCE

Le ministère des Affaires étrangères souhaite d'abord augmenter la proportion d'étudiants en provenance de pays émergents , en particulier d' Asie et d'Amérique Latine et aussi d' Europe centrale et orientale . En matière de discipline, l'objectif est d'attirer les étudiants dans les filières de formation d'ingénieurs, d'économistes, de juristes et de scientifiques. En clair, la France souhaite contribuer à la formation des futurs décideurs économiques et politiques, ainsi que des chercheurs des pays qui deviendront des partenaires de plus en plus importants dans les décennies à venir.

C. LES MOYENS MIS EN oeUVRE

1. Deux grands programmes de bourses sont destinés aux étudiants étrangers « Eiffel » et « Major » :

* Le programme Eiffel

Selon le ministère des Affaires étrangères, « le programme Eiffel a été lancé en janvier 1999 avec trois objectifs :

- constituer un produit d'appel compétitif pour attirer les meilleurs étudiants étrangers en France ;

- impliquer les filières de formation des futurs décideurs du public et du privé ;

- cibler les pays émergents, en particulier d'Asie et d'Amérique latine . »

« Depuis 2001, les lauréats sont sélectionnés (sur la base des demandes présentées par les établissements d'enseignement supérieur) au cours d'une seule session organisée assez tôt dans l'année pour permettre de présenter leurs offres à la même période que les établissements anglo-saxons, la cible du programme étant les meilleurs étudiants de l'étranger . »

En 2003, 196 établissements ont présenté des candidatures, et 55 d'entre eux ont eu au moins un admis. Sur 1 300 dossiers recevables, 362 ont été sélectionnés. Depuis 1999, le programme a permis de sélectionner 1 810 étudiants de qualité sur près de 6 000 candidatures présentées .

Le tableau suivant récapitule ces éléments :

Nombre d'établissements présentant des dossiers

Nombre de candidatures recevables

Nombre de boursiers sélectionnés

Promotion de lancement

92

312

153

Promotion 1999-2000*

164

656

278

Promotion 2000-2001*

186

1 424

348

Promotion 2002-2002

152

832

328

Promotion 2002-2003

223

1 322

341

Promotion 2003-2004

196

1 300

362

Total

5 846

1 810

* 2 sessions de sélection

La mobilisation des établissements a permis de sélectionner, en 2003, des étudiants dont 75 % d'entre eux étaient encore à l'étranger. Cette proportion est la meilleure enregistrée depuis l'origine du programme (64 % en 2000, 73 % en 2001, 57 %en 2002).

En ce qui concerne les domaines d'études, les sciences de l'ingénieur représentent 48 % des lauréats en 2003, l'économie et la gestion 38 %, le droit et les sciences politiques 14 %.

L'objectif géo-politique en matière de répartition des pays d'origine des boursiers, de favoriser en priorité les pays émergents d'Asie et d'Amérique latine, est atteint, ces régions représentant respectivement 43 % et 25 % des lauréats en 2003. Les pays d'Europe centrale en représentent 20 %, les pays du Moyen Orient 9 %, les pays du reste du monde 3 %.

Il faut également souligner que le programme Eiffel permet d'accueillir des étudiants non francophones auxquels une formation en français est offerte avant le début des cours ; en 2003, 190 des boursiers sélectionnés ont bénéficié de cette formation (175 en 2002).

Les moyens consacrés au programme Eiffel se sont élevés à 11,2 M€ en 2002 contre 10 M€ en 2001.

* Le programme Major

Lancé à la rentrée 2000 avec une promotion expérimentale de 67 boursiers, ce nouveau programme de bourses d'excellence donne une cohérence aux actions entreprises en faveur d'une catégorie particulière d'étudiants étrangers, ceux qui ont suivi leurs études secondaires dans les lycées français à l'étranger, et sont titulaires du baccalauréat français. Le programme Major prend en effet le relais du programme de bourses d'excellence de l'AEFE qui offre à ces élèves, sélectionnés parmi ceux qui obtiennent leur baccalauréat avec mention bien ou très bien, une bourse de deux ans pour entrer en classe préparatoire, ou dans un premier cycle d'études universitaires en France.

Le programme Major alloue désormais une bourse à ceux de ces étudiants qui ont réussi leur premier cycle afin de leur permettre de poursuivre leurs études trois années supplémentaires, dans les grandes écoles ou les cycles universitaires, jusqu'à l'obtention du grade de master (bac + 5). De 80 à 100 bourses sont offertes chaque année.

A la rentrée 2002, 99 nouveaux boursiers ont ainsi été sélectionnés, en provenance du Maghreb (59 %), d'Europe (13 %), du Proche et Moyen-Orient (10 %), d'Afrique subsaharienne et de l'Océan Indien (8 %), d'Amérique latine (6 %), d'Asie et du Pacifique (4 %). 46 % de ces étudiants sont inscrits en écoles d'ingénieur, 41 % en écoles de commerce, 5 % en universités, 4 % en instituts d'études politiques et 3 % dans les Ecoles normales supérieures.

LES BOURSES DU PROGRAMME MAJOR

Par filière

2000

en %

2001

en %

2002

en %

Ingénieurs

39

58

45

54

46

46

Economie-gestion

26

39

28

34

41

41

Ecoles normales supérieures

1

1

-

-

3

3

Universités

0

0

5

6

5

5

Instituts Etudes politiques

1

1

5

6

4

4

Total

67

100

83

100

99

100

Le coût du programme Major s'est élevé à 2,5 M€ en 2002 contre 1 M€ en 2001.

D. LES LIMITES RENCONTRÉES PAR LA PROMOTION DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR FRANÇAIS

1. La promotion à l'étranger par Edufrance devrait être prolongée

C'est la seule mission vraiment réussie de ce GIP fondé en 1998 : 84 bureaux ont été ouverts dans 36 pays, appuyés par les postes diplomatiques. Edufrance a activement participé à de nombreux salons de l'éducation dans le monde : Argentine, Mexique, Chili, Pérou, Brésil, Inde, Hong Kong, Taïwan, Etats-Unis, Canada, Portugal en 2002, à titre d'exemple. Mais Edufrance n'a jamais bénéficié du personnel stable et compétent nécessaire à la réussite d'une action qui doit être menée, comme toute campagne de publicité, avec des moyens adaptés et sur une durée suffisante.

2. Les bourses

Les efforts consentis en matière de bourses sont inférieurs aux besoins et aux attributions effectuées il y a seulement 10 ans. Les mesures nouvelles de 500 000 euros demandées pour les deux programmes Major et Eiffel sont primordiales ; à défaut, de nombreux candidats de grande valeur seront rejetés par la France et rejoindront les universités étrangères concurrentes. En 2003, 200 candidats bacheliers des écoles du réseau de l'AEFE auraient pu prétendre, du fait de la qualité de leur dossier, à une des cent bourses d'excellence qui couronnent les études françaises entamées dès l'enfance et dont le financement partiel a représenté un investissement lourd pour la France. Pour le valoriser il aurait fallu assurer la poursuite des études supérieures en France dont on sait qu'elles sont le vivier des francophones et des francophiles partenaires de la France dans le monde.

En l'absence de mesure nouvelle, aucune montée en puissance n'est possible dans ce secteur crucial des bourses de longue durée où les engagements pris en faveur de chaque promotion s'ajoutent à ceux pris les années précédentes . Si des crédits nouveaux ne sont pas programmés, le programme s'essouffle et les promotions nouvelles sont sacrifiées.

3. Les modalités d'attribution des visas et d'accueil en France doivent être améliorées

* Les services de visas , surtout dans les pays émergents, sont dans une situation difficile. La France voudrait attirer des étudiants de ces pays alors que les agents ont pour mission première de faire barrage aux flux migratoires. Les deux missions sont contradictoires et, pour un agent de guichet débordé de travail, rien ne ressemble plus à un immigrant clandestin potentiel qu'un jeune demandeur de visa d'études. Tant que les consulats seront les parents pauvres des postes diplomatiques, et les services de visas, les parents pauvres des consulats, il n'y a guère d'espoir à nourrir. Le premier contact du futur étudiant avec la France sera la file d'attente, et le dossier jugé incomplet, car un agent excédé y trouvera toujours une lacune.

* L'accueil en France pêche dans les établissements où l'accueil et l'aide à l'adaptation du nouvel étudiant, qu'il soit Français de France, Français de l'étranger ou jeune étranger, est encore rarement conçu par les universitaires comme une tâche noble et prioritaire. L'une des difficultés majeures, qui touche tous les étudiants, est le logement. Les cités universitaires affichent « complet » et la location dans le secteur privé relève de l'exploit, surtout à Paris et dans les grandes métropoles de province, où les garanties et cautions demandées par les propriétaires relèvent de l'impossible aussi bien pour les jeunes Français de l'étranger que pour les étudiants étrangers. Le Cnous doit mettre en oeuvre des procédures qui facilitent le logement de ces étudiants car l'éloignement de leur famille les pénalise terriblement.

Dans de telles conditions, le fait que l'enseignement supérieur public français soit quasiment gratuit n'est pas un atout . Aux yeux de l'étudiant asiatique et de sa famille, un produit gratuit ne peut guère être perçu comme un produit de qualité. Si, de plus, les conditions d'accès au territoire français, d'accueil dans l'établissement et d'accès au logement sont trop difficiles, les familles des étudiants « solvables », cibles quelque peu fantasmatique d'Edufrance dans sa version originelle, continueront de préférer à payer cher une université australienne ou nord-américaine, avec la garantie de l'accueil et d'un diplôme, plutôt que de tenter l'aventure française.

V. L'AUDIO-VISUEL EXTÉRIEUR FRANÇAIS  : UN DISPOSITIF ÉVOLUTIF DANS UN CONTEXTE INTERNATIONAL NOUVEAU ET CONCURRENTIEL

Au cours des 20 dernières années, le Ministère des affaires étrangères a animé une politique volontariste de développement d'un dispositif audio-visuel à destination de l'étranger, en appui aux efforts de diffusion internationale directe des chaînes nationales ou de leur participation à Euronews et à TV5. Cet ensemble s'ajoute au dispositif radiophonique de RFI, rénové en 1998.

Au moment où le gouvernement, répondant à la volonté du Président Chirac, cherche les voies et moyens de la création d'une chaîne internationale d'information continue, il est éclairant d'étudier l'évolution des outils de diffusion dont la France dispose et tirer les leçons de ces expériences. C'est un gage de réussite pour la CII (chaîne d'information internationale) qui, de rapport en rapport, (Baudillon, en mars 2003, Rochebloine, en juin 2003 et enfin Brochand, en octobre 2003) sort des limbes.

A. UN DISPOSITIF ANIMÉ D'UN GRAND DYNAMISME

Selon les orientations du plan de 1988, destiné à donner la priorité à l'audiovisuel dans l'action culturelle du ministère, le dispositif audiovisuel s'est à la fois rationalisé et modernisé. Le recentrage de CFI sur ses activités de banque de programme est achevé. La SOFIRAD termine lentement la cession de ses actifs 1 ( * ) . RFI ainsi que TV5 ont conquis une audience quasi -mondiale, ce qui est une belle performance sur un marché de la distribution câblée et satellitaire particulièrement concurrentiel.

Si l'on ajoute la chaîne franco-allemande ARTE, la chaîne d'information continue Euronews dont FranceTV est l'un des principaux actionnaires , la transmission directe, par le satellite, vers des zones de plus en plus étendues, de TF1 et France 2, la vente de programmes français aux chaînes étrangères (activité de TVFI) et la coopération avec les télévisions des pays émergents menée par CFI et CFI-Pro, on constate que la présence française dans le monde, tant radiophonique que télévisuelle, croît à un rythme rapide.

B. L'ÉVOLUTION DE RFI

Fondée en 1931, RFI est une société nationale placée sous la double tutelle du MAE et du ministère de la culture. En 2003, ses ressources publiques étaient composées d'une subvention du MAE de 71,4 millions d'euros et de 52,3 millions d'euros au titre de la redevance audiovisuelle (soit 42,8 % de ses ressources publiques). La société est confrontée à des pertes d'exploitation qui se sont élevées à 8,8 millions d'euros dans les comptes consolidés de l'exercice 2002. Un audit destiné à permettre son redressement financier doit être rendu public avant la fin 2003.

1. Quelques données sur les difficultés financières de RFI

Depuis 1996, tout le dispositif radiophonique international français a été rassemblé dans le pôle RFI, qui se situe à la troisième ou quatrième place dans le monde parmi les diffuseurs radio, avec 45 millions d'auditeurs réguliers, répartis dans le monde.

2. Economies réalisées et à prévoir

A partir de 1999, RFI a progressivement fermé la moitié de ses émetteurs en ondes courtes, réalisant ainsi une économie annuelle d'environ 13,70 millions d'euros. L'émetteur situé à Kourou, en Guyane devrait suivre (économie : 3,51 millions d'euros). Mais la nécessité de couvrir des zones rurales accessibles aux seules ondes courtes, comme le maintien des ondes courtes dans des pays non démocratiques où le passage en FM ferait perdre à RFI son autonomie rédactionnelle -car les relais FM ont une courte portée, et sont donc situés dans ces pays- l'empêche d'aller beaucoup plus loin dans cette voie.

Le processus d'évolution vers le tout-numérique réduira les coût de fabrication des émissions, puisque les fonctions de chargé de réalisation et de techniciens seront fusionnées. Mais une telle évolution ne suscite pas d'économie immédiate, car il faut organiser les reconversions, et gérer les réductions de personnels conformément au droit du travail.

Il est fréquemment reproché à la direction de RFI de n'avoir pas suffisamment utilisé les marges offertes par les fermetures d'émetteurs en ondes courtes pour moderniser ses méthodes et élargir son audience. En contrepartie, reconnaissons que RFI a su intégrer ses collaborateurs intermittents et créer les postes nécessaires à la mise en place des 35 heures. (31 journalistes et 30 techniciens recrutés)

RFI s'est engagée à présenter un budget en équilibre en 2004 en accélérant la réalisation d'un plan d'économies pour resserrer son budget autour de ses activités prioritaires.

3. Extension de la diffusion

La stratégie de RFI consiste à s'implanter dans toutes les grandes métropoles du monde sur le réseau FM, dont le rapport coût-efficacité est le meilleur.

En Afrique, RFI négocie des droits FM pour les quelques capitales où elle ne les a pas encore obtenus, mais aussi pour des villes de province du Cameroun, du Bénin, du Togo et de Madagascar. Des progrès sont aussi enregistrés en Afrique anglophone et lusophone.

En Europe, dans les Balkans, Mostar et Skopje sont couverts. De nouveaux relais partagés avec la BBC ont été ouverts à Budapest et à Pirna (Allemagne).

En Asie-Océanie, RFI est désormais présenté en FM à Kaboul, à Sihanouk ville, Kompong Cham et Battam-bang, au Cambodge, et à Suva, aux Iles Fidji.

Dans toute l'Australie, RFI, en français et en langues étrangères, et RFI musique seront prochainement diffusées 24 heures sur 24 sur le bouquet satellitaire TARS.

Enfin, en Amérique du Nord, RFI renforce sa présence sur plusieurs bouquets satellitaires et sur le câble, tout comme en Scandinavie, au Pays -Bas, au Japon et au Brésil.

Le Moyen-Orient constitue une priorité politique évidente : ainsi, un nouveau relais vient-il d'être implanté à Ajloun, dans le nord de la Jordanie, pour couvrir Damas, et un relais FM a-t-il été ouvert à Bagdad en juillet 2003. Des contacts ont été pris pour obtenir l'attribution de relais à Sanaa et à Aden (Yémen), à Dubaï, à Abou Dabi, à Al Aïn (Emirats Arabe Unis) et au Koweit.

a) Développement du site Internet

Le site Internet de RFI représente un atout considérable pour la chaîne et son public, car il permet l'obtention rapide d'offres de consultation à la carte ou d'émissions de radio à la demande, d'informations sur la grille de programme, ainsi que l'amélioration de la convivialité et de la fidélisation du public.

Le contenu du site sera enrichi en 2004 par le développement de la production écrite, complémentaire des programmes sonores. La production écrite devrait démarrer en langue chinoise car le site RFI est autant consulté dans les langues asiatiques qu'en français.

En complément de l'extension de la diffusion au Moyen-Orient, le site de la filiale en langue arabe RMC-MO devrait aussi être enrichi.

L'irruption de la radio sur Internet remet en cause les cloisonnements traditionnels : les stations du monde entier sont maintenant en concurrence. Une radio internationale telle que RFI doit donc proposer des services qui la distingue de ses concurrents. Le caractère thématique des émissions, et la qualité du contenu des programmes sont des facteurs importants de préservation de l'audience. La diversité culturelle, et surtout le multilinguisme, ainsi que l'accent mis sur l'actualité internationale, sont des atouts reconnus de RFI qui peuvent être démultipliés par Internet.

b) Les défis de l'avenir

Dans un contexte budgétaire tendu, RFI pourra-t-elle développer son multilinguisme (19 langues actuellement) au moins sur sa zone d'élection, l'Afrique, où des émissions en haoussa, swahili, lingala, bambara-dioula et wolof élargiraient son audience et contribueraient au développement culturel des milieux populaires et ruraux ?

RFI devra s'adapter aux possibilités de réception radio par téléphone mobile. Il lui faudra aussi se placer sur le marché des ordinateurs livrés avec des logiciels les connectant directement à des station de radio. Elle doit, enfin, continuer son travail d'amélioration des contenus et d'adaptation aux heures de grande écoute, pour rester concurrentielle face à toutes les radios de proximité qui s'offrent aux auditeurs.

Les progrès enregistrés depuis 1998 par RFI, dont l'élargissement constant de son audience, sont le gage de sa réussite future, même si les adaptations sont d'autant plus difficiles à réaliser que la contrainte budgétaire réduit ses marges de manoeuvre.

C. LE RECENTRAGE DE CFI

Dès 2002, la décision avait été prise de recentrer CFI sur celles de ses activités liées à l'action publique pour le développement , pour faire cesser des doublons coûteux avec TV5 :

* la coordination de la coopération télévisuelle internationale afin d'offrir aux pays émergents du conseil, de la formation et de l'ingénierie ;

* l'amélioration de la fourniture de programmes aux télévisions partenaires par la filiale CFI-pro.

CFI-TV disparaît donc, en décembre 2003, conformément au programme de rationalisation de notre offre télévisuelle internationale. TV5 Afrique pourrait reprendre, sur son antenne, certains des programmes africains de CFI-TV afin de garder l'audience de ses 8 millions de téléspectateurs, dont 2,4 millions quotidiens. CFI améliore sa capitalisation grâce à l'arrivée de France Télévisions (75 %) et d'ARTE France (25%).

1. Les activités de CFI-Pro

CFI-Pro constitue le coeur de la mission de coopération télévisuelle de CFI. Avec 81 pays partenaires, elle dépasse géographiquement la Zone de solidarité prioritaire. Elle fournit des programmes aux télévisions de pays émergents afin que celles-ci les rediffusent sur leurs antennes.

Ses atouts principaux et son originalité résident dans la combinaison des caractéristiques suivantes :

- des partenariats directs avec une centaine de télévisions dans plus de 80 pays qui constituent un véritable réseau permettant à CFI de bénéficier d'une expertise unique dans la télévision des pays émergents ;

- un service de distribution individualisé rendu possible par une couverture satellitaire mondiale extrêmement efficace ;

- un choix de programmes riches et variés (fiction, jeunesse, magazine, documentaire, variété, éducation) ;

- la diffusion d'émissions d'informations internationales, la présentation d'actualités concernant l'Afrique ainsi que la reprise de journaux télévisés français ;

- un savoir-faire reconnu par les professionnels dans la négociation et la retransmission d'événements sportifs à forte attractivité ;

- une popularité renforcée par la disponibilité dont CFI a fait preuve, en complément de son activité principale, pour apporter une aide technique et une formation en matière de programmation à ses partenaires.

Essentiellement alimentée à l'origine par des programmes fournis gratuitement par les chaînes publiques, la diffusion culturelle présente aujourd'hui un visage très différent avec CFI-Pro.

En effet, CFI achète désormais la majorité des programmes (6,4 millions d'euros aux producteurs français et 0,91 millions d'euros aux producteurs africains) qu'elle propose aux chaînes avec lesquelles des accords ont été signés.

2. Spécificités des partenariats de CFI-Pro selon les zones géographiques

En Afrique, l'offre de CFI-Pro correspond en moyenne à 160 heures de programmes par mois : 40% de programmes sportifs, 14% de magazines, 12% de documentaires, 7% de programmes de jeunesse, 4% de programmes de variétés et de divertissements, 6 % de fictions et 12 % d'images d'actualité. Au total, le taux de reprise moyen en Afrique est évalué à 44,6 %.

En Asie, CFI-Pro concentre son action sur la péninsule indochinoise et, au-delà, participe à la promotion de programmes français dans 7 pays avec 20 chaînes de télévision. Seuls le Sri Lanka et le Népal sont demandeurs de programmes français doublés en anglais.

En Europe centrale et orientale, CFI-Pro dessert 24 pays pour 44 télévisions, et leur offre 772 heures de programmes dont 207 heures d'information. CFI s'appuie sur un réseau de 60 correspondants francophones qui supervisent l'adaptation en langue locale par le sous-titrage.

Dans le Monde arabe, CFI-pro a concentré son offre pour en assurer une meilleure reprise. L'objectif était double : fournir des programmes en langue arabe, quitte à les faire sous-titrer ou doubler lorsqu'aucune version arabe n'était disponible, et permettre la programmation par les partenaires de soirées françaises hebdomadaires.

CFI peut désormais offrir à chaque chaîne partenaire une soirée hebdomadaire en français constituée d'une fiction de 90 minutes sous-titrée, deux heures de documentaires doublés, et une heure de dessins animés également doublés. Au total, CFI-pro diffuse environ 7 heures de programmes par semaine. Ce résultat est encore trop faible eu égard aux enjeux de la présence française sur les chaînes de télévision du Moyen-Orient et il serait hautement souhaitable que CFI-Pro développe très rapidement ce secteur.

Par zone géographique

Afrique francophone

Afrique anglophone et lusophone

Europe centrale

Proche et Moyen-Orient

Asie

Total

Nbre d'heures proposées

1 324

619

772

390

2 638

5 748

Nbre d'accords avec les Etats

20

15 + 5

24

7

10

81

Nbre de télévisions partenaires

23

19 + 5

44

11

17

119

Bassin de population desservi par voie hertzienne (en millions de téléspectateurs 15 ans et +)

27

74

135

76

34

346

3. Les nouvelles missions de coopération

Grâce au FSP, et dans le cadre d'un « plan images Afrique », d'une durée de 3 ans, CFI a la mission, depuis le 1 er juillet 2003, d'accompagner la modernisation des télévisions publiques et privées qui s'engageront à coproduire et à diffuser davantage de programmes africains.

L'incertitude sur les conséquences financières de la réforme de CFI a conduit le ministère des affaires étrangères à maintenir sa subvention annuelle à hauteur de 22,5 millions d'euros.

La réforme de CFI mérite son nom de rationalisation. Elle devrait permettre à terme une meilleure allocation des fonds publics à l'audiovisuel français destiné à l'Afrique par le seul canal de TV5. Elle apportera une aide plus efficace aux chaînes des pays pauvres et émergents tout en oeuvrant à la diffusion d'émissions françaises, rendues accessibles au grand public par la diffusion sur des chaînes locales en version sous-titrées ou doublées pour partie. Cette politique peut contribuer à éveiller le désir d'étudier le français auprès de publics élargis, dans le cadre scolaire -avec l'appui de la coopération linguistique- et dans les centres culturels et les Alliances françaises. La complémentarité entre les différents vecteurs de l'influence politique et culturelle pour la reconquête d'un public désireux de connaître la France et d'apprendre le français apparaît ici pleinement.

D. LES VINGT ANS DE TV5

En 2004, TV5 aura 20 ans ; la réussite de cette chaîne multiculturelle des pays francophone n'était pas un pari gagné d'avance. Il aura fallu bien des tâtonnements, des négociations difficiles entre les pays partenaires, un mélange de soutien public et de savoir -faire commercial pour réussir à passer d'un ensemble d'émissions sans cohérence à une chaîne multiculturelle originale, diffusée dans le monde entier, et dont la notoriété est prouvée par toutes les enquêtes.

Un hommage particulier doit être rendu aux équipes de rédaction et de commercialisation animées successivement par Patrick Imhaus, Jean Stock puis par Serge Adda pour la performance accomplie. Aujourd'hui, avec sa signature « Sur TV5, le centre du monde est partout » TV5 traduit, dans tous les registres télévisuels, l'idéal de diversité culturelle défendu par la francophonie.

Cette réussite a été très économe de moyens. La France concourt, à raison d'une subvention annuelle de 64,89 millions d'euros au financement d'une chaîne diffusée mondialement dont le budget total a atteint, en 2003, 82,2 millions d'euros, dont 7 % de ressources propres, chiffre très modique pour une entreprise de télévision. A titre de comparaison, la même année, ARTE a bénéficié d'une subvention française de 112,03 millions d'euros, et RFO de 203,05 millions d'euros.

1. Achèvement du repositionnement de TV5

A l'aube de 2004, TV5 a largement réalisé les objectifs fixés par la conférence des ministres responsables de TV5, en novembre 2001, qui étaient de construire une information mondiale, de référence, de témoigner de la diversité du monde et d'optimiser le réseau mondial de distribution.

2. TV5 : une nouvelle information mondiale de référence ?

Désormais, sur les 7 antennes de TV5 gérées depuis Paris, les journaux nationaux des partenaires ne s'enchaînent plus les uns aux autres pour former des « tunnels », mais sont limités à 4 journaux répartis sur 24 h.

Parallèlement, la rédaction de TV5 Monde a renforcé ses liens avec les rédactions des télévisions partenaires pour enrichir ses éditions propres, désormais mieux adaptées au public international. Depuis le 1er janvier 2003, à côté de 4 éditions « tout image » de 2 minutes 30, la rédaction de TV5 réalise quotidiennement 6 grands journaux adaptés à la diffusion sur les groupes de fuseaux horaires ciblés, de 20 à 28 minutes. Ces formats permettent, en s'appuyant toujours sur les rédactions des télévisions partenaires, d'approfondir et d'analyser l'actualité internationale, dans une ligne résolument mondiale .

En outre TV5 diffuse partout dans le monde un journal quotidien consacré à l'Afrique, fourni par CFI-AITV.

La réactivité est une caractéristique majeure de la rédaction. C'est ainsi que, pendant 10 jours, pour couvrir la guerre d'Irak, TV5 s'est transformée en une chaîne d'information en continu. La diversité de ses sources d'images et des reportages fournis par les chaînes partenaires l'a clairement démarquée des chaînes plus empreintes d'un parti-pris national, et encore plus de celles qui se livraient à la propagande. De ce fait, au Moyen-Orient, comme à New-York, les informations et les analyses diffusées par TV5 lui ont attiré un auditorat nouveau, pas nécessairement très francophone, mais qui voulait échapper au « matraquage » de Fox News ou de CNN, d'une part, d'Al Jazeera et d'Al Arabiya, de l'autre.

La chaîne a su absorber les surcoûts liés à la couverture du conflit en Irak, qui s'élèvent à environ 300 000 euros, dont 180 millions euros pour la rédaction qui a intégralement conduit l'antenne pendant 11 jours. Le défi méritait d'être relevé puisque TV5 a gagné son image de chaîne d'information de référence à cette occasion, comme le prouve le fait que de nombreuses télévisions étrangères, notamment en Asie, ont demandé à TV5 de pouvoir reprendre ses journaux pour les sous-titrer ou les doubler.

La ligne éditoriale des « regards croisés », rendue possible par la grande diversité des sources d'images et l'ouverture de l'antenne à des intervenants du monde entier rend le message de la chaîne acceptable par un public divers et méfiant envers l'impérialisme culturel des grands médias internationaux. La voix de la francophonie, est la résultante des voix de tous les pays qui y participent, quelle que soit leur puissance économique et politique. C'est une  polyphonie, clairement multiculturelle, capable d'apporter sur le monde des perceptions et des analyses beaucoup plus variées qu'une chaîne purement française ; c'est là que réside son succès.

3. Le témoignage de la diversité du monde

Sous la direction de Frédéric Mitterrand, récemment nommé directeur général délégué chargé des programmes et de l'antenne, TV5 accentue son caractère généraliste, « même si l'information en demeure la colonne vertébrale » ; les nouveaux programmes tendent à accentuer sa diversité culturelle et à atteindre des publics plus diversifiés.

TV5 poursuit sa politique de diffusion de grands événements sportifs. La place des documentaires a été multipliée par trois. Les opérations  « 24 heures à... », dans une grande ville du monde, ont été parfois réalisées en partenariat avec le Figaro Magazine. La mobilisation en faveur des grandes causes telles que le développement durable, les droits de la personne, la santé est aussi une façon de rendre compte de la diversité du monde et de répondre à la diversité des centres d'intérêt des téléspectateurs.

Pour renforcer son identité, TV5 a créé de nouvelles émissions autour du brassage des cultures à Paris (« Soluble dans l'air », en abrégé : SODA ), et de la musique (Acoustic) .

Le site Internet de TV 5 comptabilise trois millions de pages et 630 000 vidéos consultées chaque mois.

Une mention particulière doit être faite de l'organisation de la chaîne à des fins pédagogiques. Avec « Apprendre et enseigner avec TV 5 » les enseignants peuvent trouver sur le site Internet 40 fiches pédagogiques correspondant à quarante émissions. Une méthodologie originale permet d'aborder chacune de celles-ci, via des canevas d'exploitation adaptés aux différents niveaux et objectifs d'apprentissage : la complémentarité entre l'audiovisuel et la diffusion traditionnelle de la langue française est manifeste.

4. L'optimisation du réseau mondial de distribution

Fabriquer une chaîne de télévision internationale diffusant simultanément 7 programmes différents adaptés aux publics résidents dans les fuseaux horaires atteints par le signal n'est pas une mince affaire. Atteindre ce public suppose une politique technique et commerciale particulièrement dynamique, car rien ne sert de produire des émissions si elles ne sont pas diffusées. Quels progrès TV5 a-t-il enregistré sur ce point au cours de la dernière période (2002- 2003) ?

L'optimisation du réseau mondial de TV5 passe par celle de son réseau satellitaire , par l'amélioration des dispositifs techniques de diffusion , par la conclusion de négociations avec les opérateurs de réseaux câblés et de plate-formes numériques et par le renforcement de l'attractivité qui résulte des sous-titrages .

5. La restructuration du réseau satellitaire

Partout où cela est possible, TV5 utilise des signaux numériques pour améliorer sa qualité de réception et sécuriser les signaux de la chaîne. Un succès diplomatique a été enregistré : TV5 est, avec CNN, la seule chaîne à être diffusée au sein du siège des Nations unies à New-York.

Au total, en un an, TV5 a accru sa pénétration mondiale de 20%, pour constituer désormais, avec 145 millions de foyers recevant la chaîne (162 si l'on prend en compte sa diffusion partielle ), le second réseau mondial devant CNN international (hors marché américain) et largement devant BBC ou Deutsche Welle.

Mais, au delà de la distribution, l' enjeu c'est l'audience réelle . Les études menées par TV5 dans 60 pays où l'audience est mesurée, hors Etats-Unis, Amérique latine (sinon Argentine et Brésil) et Asie (sauf l'Inde) créditent la chaîne d'une audience cumulée quotidienne de 12 millions de téléspectateurs, et de 39 millions en couverture hebdomadaire.

En France, TV5 a une part d'audience stable de 2,2 millions de téléspectateurs équipés du câble ou du satellite qui ont passé au moins une minute sur la chaîne au cours d'une semaine moyenne.

En Europe francophone, les parts d'audience sont stabilisées autour de 2 % en Belgique, et de 1,4% en Suisse romande.

Dans les 18 pays d 'Europe non francophone où l'audience peut être mesurée, la situation évolue suivant les heures d'audience. Euronews et BBC World se situent au-dessus de TV5 dans la journée, mais, en Allemagne, TV5 dépasse Euronews. En Pologne , pays très équipé en câble et satellite, TV5 dépasse ses deux concurrents toute la journée. Le public de TV5 appartient à des catégories socio-professionnelles plus élevées et plus jeunes en Europe non francophone (62% d'auditeurs âgés de moins de 50 ans) qu'en Europe francophone (32% seulement de moins de 50 ans) Dans la perspective de l'élargissement de l'Union européenne, une telle caractéristique de l'audience est un signe positif pour les relations que la France saura établir au sein de l'Europe à 25.

Au Maghreb, TV5 jouit d'un niveau de notoriété exceptionnel, mais elle est concurrencée par la réception satellitaire des chaînes généralistes françaises.

En Afrique sub-saharienne, TV5 totalise 2,2 millions de téléspectateurs quotidiens dans 14 pays, l'information est le type d'émission le plus suivi.

Proche et Moyen Orient

En Egypte, TV5 est regardée par 4% des moins de 49 ans équipés en câble ou en satellite soit 250 000 personnes contre 220 000 pour CNN. En Israël, TV5 devance maintenant France 2, avec plus d'1 million d'auditeurs sur une période de trois semaines, et 30 % de ces téléspectateurs regardent la chaîne plus de 20 minutes par jour.

Amérique Latine

TV5 obtient une audience quotidienne cumulée de plus de 500 000 personnes, légèrement inférieure à CNN en Argentine, et légèrement supérieure au Brésil.

Ces chiffres sont faibles au regard des populations, mais les chaînes étrangères ont partout des taux d'audience faibles. C'est le cas en France pour BBC ou CNN.

6. La politique de sous-titrage

Pour augmenter l'audience, il faut, pour TV5 comme pour CFI-pro, sous-titrer. Un programme sous-titré a 4 fois plus d'audience qu'un programme non sous-titré. Depuis 2002, TV5 a lancé un programme de sous-titrage dans plusieurs langues d'émissions de fictions et des magazines des télévisions partenaires. Aux Pays-Bas, 15 heures de programmes sont sous-titrés par semaine. En Suède , le sous-titrage permet à la chaîne de reconquérir des positions perdues. C'est une voie coûteuse, mais prometteuse, d'amélioration de l'audience effective ; elle est essentielle à l'amélioration de la connaissance des cultures francophones pour des publics élargis au-delà des élites polyglottes, et pour les jeunes de catégories socio-professionnelles supérieures, plus souvent anglophones que francophones.

TV5 est désormais une entreprise solide, dotée des capacités éditoriales, techniques et commerciales qui devraient lui permettre, dans les prochaines années, de renforcer ses positions et de conquérir, sur tous les continents, des parts d'audience significatives. La France et les pays francophones se sont ainsi dotés en 20 ans d'un outil de diffusion culturelle et d'influence politique de première importance pour illustrer la langue française et les valeurs dont elle est porteuse.

E. LE PROJET DE CHAINE INTERNATIONALE D'INFORMATION FRANCAISE

A la demande du président de la République, désireux de voir la France se doter d'un outil d'influence politique international dont disposent déjà les Etats-Unis avec CNN, ou la Grande-Bretagne avec BBC World, des études sont en cours sur la création d'une chaîne française d'information internationale. Au cours de cette année 2003, des propositions ont été faites par RFI et par France Télévision. Le rapport de M. Philippe Baudillon, commandé par le ministre de Affaires étrangères, a été remis en mars. Les commissions des Affaires étrangères et des affaires culturelles de l'Assemblée nationale ont constitué, sur ce thème, une mission d'information commune présidée par M. François Rochebloine, qui a publié un rapport d'étape en juin. Enfin, à la demande du Premier ministre, M. Bernard Brochand, député des Alpes-maritimes, a présenté, le 30 septembre, un rapport dont les orientations générales seront complétées par des propositions plus pratiques attendues pour le 8 décembre 2003.

Le sujet de la chaîne internationale d'information (CII « cédeuzi ») est donc évolutif ; les propositions de M. Brochand ont été validées par le Premier ministre ; ses principales dispositions sont les suivantes.

Les propositions du rapport Brochand

La chaîne d'information internationale française serait constituée par une société qui associerait TF1 et France-Télévision, avec un apport de capital à 50% pour les deux partenaires. Aucune des entreprises totalement ou partiellement française présentes à l'international (RFI, Arte, Euronews, TV5) ne serait associée au projet. L'alliance public- privé ainsi réalisée permettrait à la nouvelle chaîne de s'adosser à deux importantes entreprises, actuellement peu ouvertes, il est vrai, à l'international. Mais France-Télévision a une expérience née de sa qualité d'actionnaire et de partenaire de TV5 et d'Euronews. Quant à TF1, elle possède, par sa filiale LCI, l'expérience de l'information en continu et de la présentation de l'information internationale par l'émission quotidienne : « Un jour dans le monde ».

Le rapport Brochand fixe à CII les objectifs suivants :

1- Etre une chaîne de référence, « diffusée dans les salles de rédaction du monde entier et vers lesquelles les télévisions nationales se tournent dans les situations de crise » ;

2- Diffusée en plusieurs langues (anglais et arabe dans un premier stade), sa ligne éditoriale indépendante relèvera d'une logique internationale, tout en pouvant  « être identifiée comme spécifiquement française ». Cette indépendance « suppose que le mode de nomination des dirigeants ne relève pas du gouvernement ».

3- Pour être attractive, cette chaîne devra proposer des images originales, « qui n'ont pas déjà été vues sur d'autres chaînes »

Les moyens

1- Moyens financiers

Aucune chaîne internationale d'information n'étant rentable, le financement sera nécessairement public, l'Etat subventionnant le service rendu par la nouvelle chaîne. Le budget est évalué à 70 millions d'euros, en année moyenne durant les 5 premières années, dont 65 millions d'euros de fonds publics et 5 millions d'euros rassemblés par un club d'entreprises françaises fondatrices.

2- Moyens humains

La présidence devrait être assurée par « un gestionnaire de grande qualité, versé dans l'économie internationale des médias ». « La responsabilité éditoriale (...) serait dévolue à un rédacteur en chef polyglotte, doté d'une grande rigueur et d'une excellente connaissance des affaires internationales ».. Une rédaction de 150 à 200 journalistes est nécessaire.

Les méthodes

1- Montée en puissance : un délai de 5 ans est prévu avec, au départ, une diffusion en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient, zones d'influence prioritaires de la France situées sur une fourchette étroite de fuseaux horaires (GMT-1 /GMT+ 3).

2- La diffusion serait assurée sur les satellites numériques, le câble et Internet exclusivement à l'étranger, hors du territoire français.

3- La fourniture d'images et de reportages nécessitera la mise à disposition de la future chaîne d'un réseau de correspondants permanents « assorti d'une capacité de projection rapide ». Il s'y ajouterait l'approvisionnement en images d'agences (AFP par exemple) et « l'utilisation de tout ou partie du réseau de RFI dans des conditions à déterminer ». Enfin, pour la couverture d'événements importants, le choix se porterait plutôt sur des ressources « free-lance » que sur la constitution d'équipes mobiles au sein de la chaîne, option jugée trop coûteuse.

Relations avec le dispositif audiovisuel existant

1- Le financement de la chaîne par le ministère des Affaires étrangères s'effectuerait grâce à un rattachement de RFI à Radio France, ce qui permettrait d'affecter la subvention actuellement versée par ce ministère à RFI à la nouvelle chaîne.

2- « La suppression des  capacités de traitement de l'information propre à TV5 et à Arte » permettrait un « redéploiement de l'ordre de 15 millions d'euros» au profit de CII.

3 - La création de la chaîne entrainerait donc une réorganisation totale du dispositif audio-visuel public, bilatéral( Arte) et multilatéral (TV5 et Euronews), avec un changement de tutelle pour RFI.

1. Les éléments en débat

a) Nécessité d'une information internationale française de référence

Un consensus s'est, semble-t-il, constitué sur cette nécessité. L'aggravation de la situation politique internationale, en particulier au Moyen-Orient, le monopole anglo-saxon sur l'information de source occidentale, et la naissance d'une chaîne arabe Al-Jazeera, l'importance prise par la manière dont l'information est sélectionnée, « traitée », c'est à dire, en réalité, « mise en scène » avec des méthodes de manipulation de l'image qui, dans certains cas, confinent à la propagande, pèsent, depuis la guerre du Golfe de 1991, en faveur d'une prise de conscience : une chaîne d'information internationale est un vecteur puissant d'influence politique. La France, privée de cet outil, n'est-elle pas privée de voix et de visibilité sur la scène du monde ?

b) Une chaîne d'information continue s'impose-t-elle ?

Sur ce point, les opinions sont nuancées. M. Brochand rappelle à plusieurs reprises que « la création de cette chaîne ne répond pas à une demande ou à un besoin » exprimé par un public, mais doit « susciter l'adhésion ». Qu'est-ce à dire ?

Aucune chaîne d'information continue n'a un taux d'audience élevé et toutes sont déficitaires. Ainsi, en France LCI atteint 1,4% des adultes de plus de 15 ans, Euronews 0,4%, CNN environ 0,1% 2 ( * ) et BBC World moins de 0,1%. Leur cible n'est pas, en effet, le grand public, mais les catégories socio-professionnelles élevées (comme en témoignent les sujets des publicités diffusées par LCI), les décideurs, bref, ceux qui font l'opinion. C'est encore plus vrai pour les chaînes internationales telles que CNN dont l'objectif est beaucoup plus la reprise des images et des reportages par toutes les rédactions du monde que la réception directe par le grand public.

Le problème est de savoir si la France obtiendra mieux un résultat de cet ordre par une chaîne consacrée à cet unique objectif qu'elle ne commence à l'obtenir par TV5 ? C'est probable, mais à plusieurs conditions : que la nouvelle chaîne ne tarisse pas les sources de financement du dispositif audio-visuel extérieur actuel, que sa distribution sur les réseaux câblés et satellitaires du monde n'évince pas TV5 de positions durement conquises, et enfin, que sa qualité éditoriale la place rapidement dans le peloton de tête des chaînes d'information en continu qui occupent actuellement le marché.

c) Les menaces sur l'audiovisuel extérieur existant

Ces menaces existent : la capacité de financement public est limitée. RFI et TV5 ont fait du bon travail, avec des budgets raisonnables, et atteignent des taux d'audience inespérés en moins de 10 ans. Des redéploiements sont envisageables mais ils ne produiront pas d'économies immédiates. Par exemple, la fermeture de CFI-TV, effectuée au 31 décembre 2003, ne produira que 2 millions d'euros d'économies, et seulement à partir de 2005, en raison des coûts de fermeture (dénonciations de contrats avec des réseaux satellitaires, par exemple).

Par ailleurs, la France, même si elle est majoritaire dans le capital et si la rédaction est basée en France, ne peut pas décider de la politique des chaînes bilatérales (Arte, franco-allemande) et multilatérales (Euronews, partenaires européens, et TV5, partenaires francophones). Enfin on ne voit pas comment RFI pourrait être écartée du dispositif alors que l'époque est à l'imbrication des modes de diffusion et des modes de réception de l'information en raison du développement d'Internet et du téléphone mobile.

Les possibilités de financer une chaîne internationale supplémentaire, sur fonds publics, puisque son caractère déficitaire structurel est admis d'emblée, dépendent d'une analyse stratégique et de choix politiques qui dicteront une dépense supplémentaire pour la France. Mieux vaut reconnaître que le redéploiement est une option irréaliste car ses bénéfices seraient très inférieurs aux besoins en capital de la nouvelle chaîne . Le risque est de mettre en danger le dispositif existant, à l'efficacité reconnue et mesurée, au profit d'une chaîne qui restera largement virtuelle pendant les cinq années de son lancement.

d) Le problème de la distribution

C'est un problème crucial, qui n'est pas évoqué dans le rapport Brochand. Le marché du câble et du satellite est très concurrentiel. Obtenir quelques heures de canal, lorsque l'audience potentielle de la chaîne paraît faible à l'opérateur et semble sans intérêt commercial pour lui, relève de l'exploit. Deux exemples : le budget de TV5 est absorbé à hauteur d'un tiers par les coûts de distribution et les coûts techniques engendrés par la diffusion simultanée de 7 programmes différents (sinon, les émissions ne sont pas reçues au bon moment dans chaque fuseau horaire). Le câblo-opérateur qui diffuse TV5 à New-York exige un supplément d'abonnement de 10 dollars par mois car la diffusion de cette chaîne reste insuffisante à ses yeux pour être rentable. Ce qui est vrai pour TV5 l'est pour Euronews et pour toutes les chaînes qui tentent l'aventure de la diffusion internationale. Comment savoir si la présence de deux chaînes en français ou d'origine française renforcera ou affaiblira la position de chacune d'elle face aux distributeurs ? Les opinions des spécialistes sont divergentes : selon les uns, deux chaînes, une généraliste et l'autre d'information peuvent s'épauler ; selon les autres, il sera impossible de placer deux chaînes sur de nombreux marchés où le pouvoir d'achat du téléspectateur est limité.

2. La qualité éditoriale de la future CII

a) Capacités des chaînes fondatrices

Les deux grandes entreprises sélectionnées disposent d'un grand capital de savoir-faire, et peuvent donc réussir ce projet novateur. Leur premier handicap, qu'elles peuvent surmonter sans grande difficulté, est qu'elles donnent actuellement une importance insuffisante à l'international dans leurs journaux quotidiens destinés au grand public. Les faits divers nationaux se taillent la part du lion et, quand il s'agit de l'étranger, on aborde plus volontiers des « sujets de société » sur le 13 heures que des problèmes stratégiques et diplomatiques sur le 20 heures. Par ailleurs, le style « TGV » des informations sur les grandes chaînes nationales rend impossible l'exposé de sujets sérieux et complexes.

De ce fait, elles négligent l'international et ont trop peu de bureaux et de correspondants à l'étranger. Il leur est évidemment tout à fait possible d'acquérir le savoir-faire qu'elles n'ont pas dans le domaine international, tant pour la collecte de l'image que pour un traitement de l'information adapté aux attentes du public international exigeant qui est la cible de la future chaîne.

b) Le budget prévisionnel

C'est le point le plus inquiétant du projet Brochand. C'est le 8 décembre prochain, avec la publication du rapport de préfiguration de la future chaîne, que nous saurons comment sera bâtie cette chaîne avec 150 à 200 journalistes, des correspondants à l'étranger, des journalistes en free-lance, des rédactions en deux ou trois langues, une distribution sur trois fuseaux horaires -pour commencer-, dont le Moyen-Orient où la concurrence (Al Jazeera, Al Arabiya, radio Sawa, les chaînes nationales et anglo-saxonnes...) rend les droits d'entrée sur les réseaux particulièrement élevés.

Rappelons quelques ordres de grandeur : TV5, qui est adossée à cinq chaînes publiques , a un budget de 82,2 millions d'euros. BBC World, adossé au conglomérat BBC (5,1 milliards d'euros de ressources) et éditée par BBC news qui lui fournit ses équipes de journalistes, a un budget de 60 millions d'euros. Le point de comparaison le plus significatif est probablement Al Jazeera, qui a débuté avec un budget d'investissement de 200 millions de dollars, et dont le budget annuel de fonctionnement s'élève à 120 millions de dollars. Pour devenir la chaîne de référence diffusée dans toutes les salles de rédaction du monde, ambition politiquement légitime, il faut en prendre les moyens. L'information télévisée professionnelle se paie cher, et, avec 70 millions d'euros, on fait le tiers de RFO, pas une chaîne mondiale.

En attendant la seconde partie du rapport de M. Brochand, il semble à votre rapporteur que les ambitions que le gouvernement se fixera pour son nouveau dispositif audio culturel extérieur doivent être en rapport avec les moyens qu'il jugera bon d'y affecter. Il serait dommageable pour notre pays de sacrifier ce qu'il a construit au lieu de bâtir sur ce qu'il a déjà.

De plus, il est surprenant de vouloir construire une chaîne d'information internationale en excluant les sociétés et les professionnels les plus aguerris du secteur.

Il est également choquant, tout comme pour RFI, que le contribuable doive financer par sa redevance audiovisuelle une chaîne destinée à une information internationale à laquelle il n'aura pas accès puisqu'elle ne sera pas diffusée en France. Les Français ont besoin de cette information internationale qu'ils vont payer ; la France aussi : comment défendra-t-elle ses positions internationales avec une population aussi mal informée des enjeux européens et internationaux qu'elle l'est aujourd'hui ?

Enfin, il est difficile de réclamer un financement public pour une entreprise privée en prétendant s'affranchir de la tutelle du CSA et du légitime contrôle de l'utilisation des fonds publics. La Cour des Comptes ne pourrait-elle accuser un jour l'Etat d'avoir financé le déficit de LCI au moyen du budget alloué à CII ?

Oui, il faut certainement que la France participe plus et mieux à l'information du monde qu'elle ne le fait aujourd'hui ; mais cela implique qu'elle en définisse précisément les moyens statutaires et techniques, adaptés aux financements qu'elle y affectera.

CONCLUSION

La création de la DGCID a permis de rassembler, à Paris et à l'étranger, nos efforts en matière d'action culturelle et d'aide au développement. Cela rend difficile l'étude distincte de l'action culturelle. mais simultanément, la création de la DGCID rend son unité à la diplomatie d'influence dans laquelle assistance technique, coopération et diffusion culturelle et linguistique s'imbriquent étroitement et se démultiplient mutuellement.

La future structuration de la loi de finances en missions réparties elles-mêmes en programmes, dont le Parlement sera appelé à évaluer l'efficacité au regard des moyens qui leur seront affectés, fait poindre une interrogation sur la pérennité de ce regroupement.

Cette évolution de la répartition des financements publics aura, cependant, le mérite de susciter un débat sur l'organisation et les missions de nos actions culturelles dans le monde. Cette question doit être clairement posée ; rien ne serait plus pernicieux, en effet, qu'un désengagement larvé et silencieux, comme celui qui se pratique aujourd'hui, se poursuive au gré des contingences budgétaires.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent rapport pour avis lors de sa séance du 19 novembre 2003.

A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, un débat s'est instauré au sein de la commission.

M. Robert Del Picchia a exprimé son désaccord sur les perspectives évoquées par le rapporteur en matière d'audiovisuel extérieur. Il a estimé que le problème de l'information internationale était primordial pour l'image de la France à l'étranger, et que notre pays devait impérativement remédier à la carence constatée dans ce domaine. Il a estimé que TV 5 Monde, chaîne essentiellement dirigée vers les pays francophones, ne permettait pas de la combler. Il a également souligné que, pour être crédible, cette future chaîne d'information internationale devrait s'appuyer sur des images qu'elle aurait elle-même tournées, alors que TV5 Monde les achetait aux grandes chaînes internationales existantes.

M. Xavier de Villepin s'est félicité de la progression du nombre d'étudiants étrangers en France, mais a déploré que notre pays n'offre pas de solutions concrètes à ceux-ci en matière de logement. Il a souligné, par ailleurs, la nécessité d'accroître sensiblement le nombre d'étudiants originaires du continent asiatique, et particulièrement de Chine. Evoquant ensuite le sous-financement de l'AEFE, il a exprimé le souhait que, dans ce domaine, le budget de l'Etat soit relayé par des financements issus de fondations ou d'entreprises privées. Puis, il s'est déclaré favorable au projet de création d'une chaîne d'information internationale, rappelant qu'à l'occasion du conflit en Irak, la voix de la France n'ait pas été suffisamment entendue dans le monde.

En réponse Mme Monique Cerisier-ben Guigua, rapporteur pour avis, a approuvé les réserves soulevées par M. Xavier de Villepin sur les conditions de logement des étudiants étrangers, et a précisé que son rapport écrit développait ce point. Elle a par ailleurs rappelé que le mécénat, qui serait nécessaire à un meilleur financement de l'AEFE, n'était pas encore entré dans la tradition des entreprises françaises.

Evoquant ensuite la future chaîne d'information internationale, elle a déploré que les journaux des deux grandes chaînes pressenties pour constituer la base de la future CII -TF1 et France-Télévisions- accordent une place très réduite aux informations internationales, et elle a regretté que cette future chaîne ne pourrait pas être captée en France.

*

* *

A l'issue de l'examen de l'ensemble des rapports pour avis, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable à l'adoption des crédits des affaires étrangères pour 2004, le groupe socialiste se prononçant contre et le groupe communiste, républicain et citoyen s'abstenant.

PERSONNALITÉS ENTENDUES DANS LE CADRE
DE LA PRÉPARATION DE CE RAPPORT

______

M. Serge ADDA

Président de TV5 Monde

Mme Elisabeth BETON-DELEGUE
(6 octobre 2003)

Directrice de la coopération scolaire, universitaire et de recherche (MAE)

M. Claude BLANCHEMAISON

Directeur de la coopération internationale et du développement (MAE)

Mme Michèle BLOCH

Fédération des associations de parents d'élèves de l'étranger (FAPEE)

M. Richard BOIDIN

Directeur de l'audiovisuel extérieur et des techniques de communication (MAE)

Mme Maryse BOSSIERE

Directrice de l'Agence pour l'Enseignement français à l'étranger (AEFE)

M. Jean-Paul CLUZEL

Directeur de Radio France Internationale

M. Philippe ESNAULT

UNSA - Education

M. Roger FERRARI

SNES-FSU

M. Jean-Claude JACQ

Secrétaire général de l'Alliance française de Paris

M. François NEUVILLE

Directeur de l'Association pour la diffusion de la pensée française

M. Xavier NORTH

Directeur de la coopération culturelle et du français (MAE)

M. Yves SAINT-GEOURS
(20 juin 2003)

Directeur adjoint de la DGCID (MAE)

Mme Marie-Christine SARAGOSSE

Directrice générale de TV5-Monde

* (1) Direction de l'audiovisuel et des techniques de communication

* (2) Direction de la Coopération culturelle et du français

* (3) Direction du Développement et de la Coopération technique

* (4) Direction de la Coopération scientifique, universitaire et de recherche

* 1 La SOFIRAD a été mise en liquidation le 9 avril 2001. En 2003, elle emploie encore trois personnes, soit une masse salariale de 400 KE alors qu'il ne reste que deux avoirs à liquider : les actions dans Radio Méditerranée Internationale et dans AFRICA n° 1. En ces temps de rigueur budgétaire, cette liquidation paraît bien longue et donc bien coûteuse.

* 2 Source MediaCabSat, 5 juillet 2003.

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