f) Les compétences en matière de recouvrement de la Caisse maritime d'allocation familiale

L'article 32 bis du présent projet de loi, inséré par l'Assemblée nationale sur proposition du gouvernement, vise à clarifier les compétences de la Caisse maritime d'allocations familiales (CMAF) et à procéder à une validation législative des actions de recouvrement qu'elle a mené depuis le 1 er janvier 1999.

La CMAF assure aujourd'hui, pour un montant annuel de 105 millions d'euros, des missions spécifiques de recouvrement de cotisations d'allocations familiales, de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale.

Elle a repris, depuis la fusion de la caisse nationale des marins pêcheurs et de la caisse nationale d'allocations familiales des marins du commerce intervenue en janvier 2002, les droits et obligations de ces deux caisses. Dans ce cadre, elle assure en métropole le service des prestations familiales aux marins ainsi que le recouvrement des cotisations d'allocations familiales, de la CSG et de la CRDS dues par les marins. Pour les départements d'outre-mer, elle n'assure que les opérations de recouvrement.

Le I de cet article vise à renforcer la base légale des compétences exercées actuellement par la CMAF en métropole et dans les départements d'outre-mer. Il permet en particulier, pour les départements d'outre-mer, de clarifier le partage de compétence de la caisse maritime des allocations familiales et des caisses générales de sécurité sociale en inscrivant expressément dans la loi la compétence de la CMAF à recouvrer les cotisations des marins en lieu et place de celles-ci.

Il prévoit donc expressément que cette caisse assure le service des prestations familiales en faveur des personnes affiliées au régime spécial de sécurité sociale des gens de mer, ainsi que le recouvrement des cotisations d'allocations familiales, de la CSG et de la CRDS dues par les marins, de même que le contrôle et le contentieux du recouvrement de ces trois recettes.

Ces précisions visent à assurer la sécurité juridique des recouvrements effectués par la caisse maritime d'allocations familiales, dont la légitimité à assurer le recouvrement des cotisations est mise en cause dans plusieurs contentieux.

C'est la raison pour laquelle le II de cet article procède, sous réserve des décisions juridictionnelles passées en force de chose jugée, à une validation législative des actions de recouvrement des cotisations d'allocations familiales, de la CSG et de la CRDS opérées depuis le 1 er janvier 1999 par les caisses nationales d'allocations familiales de la pêche maritime et des marins du commerce, puis par la caisse maritime d'allocations familiales.

Le tableau suivant rappelle les critères définis par le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) s'agissant de la recevabilité des procédures de validation législative.

Synthèse des critères retenus par le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l'homme en matière de validations législatives

Conseil Constitutionnel

CEDH

La validation ne saurait remettre en cause une décision de justice devenue définitive ou, selon une expression équivalente, passée en force de chose jugée.

La Cour de Strasbourg considère que l'interdiction faite au pouvoir législatif de s'immiscer dans le cours de la justice implique que l'engagement d'une procédure de validation ne soit pas tardif par rapport au déroulement des procédures juridictionnelles.

La validation ne saurait rétroactivement fonder une sanction pénale. Cette interdiction s'étend, au-delà du domaine pénal, à toute sanction ayant le caractère d'une punition.

La validation doit être justifiée par la poursuite d'un « objectif d'intérêt général suffisant » (continuité d'un service public, menace pour la paix publique ...). Un motif purement financier n'est pas recevable à moins que les montants concernés soient tels qu'il y ait une menace économique, sociale ou budgétaire.

La validation doit être justifiée par « d'impérieux motifs d'intérêt général ». En particulier, la volonté de mettre fin à des divergences jurisprudentielles ne saurait constituer une justification. La Cour de Strasbourg exerce comme le juge constitutionnel un contrôle de proportionnalité sur le caractère suffisant du motif financier.

La validation doit avoir une portée limitée : la mesure de validation doit comporter la mention de l'irrégularité sur le fondement de laquelle l'acte ou la procédure concerné ne pourra plus être à l'avenir contesté.

La Cour de Strasbourg prend également en considération l'existence de décisions juridictionnelles majoritairement favorables aux requérants, la bonne foi de ces derniers ainsi que le caractère prévisible du recours à la procédure de validation

Source : Sénat, service des études juridiques, « Le régime juridique des validations législatives »

Le ministre de la santé et de la protection sociale a indiqué, lors du débat à l'Assemblée nationale, que cette validation était nécessaire pour préserver l'intérêt général : « c ompte tenu de l'importance des enjeux financiers attachés aux opérations de recouvrement de la CMAF, l'intérêt général pourrait en effet être remis en cause en cas de décisions judiciaires favorables aux cotisants marins. De telles décisions, qui conduiraient à un non-recouvrement des cotisations et contributions sociales dues par les marins, porteraient atteinte à l'équilibre financier du régime spécial des gens de mer ainsi qu'à l'équilibre financier des branches du régime général concernées. Cinq années de recouvrement, soit plus de 500 millions d'euros, sont en jeu ».

Votre rapporteur pour avis estime que l'enjeu financier est tel qu'il correspond bien à un objectif d'intérêt général suffisant pour justifier l'opération de validation législative ainsi proposée.

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