C. LA SANTÉ ET L'INSERTION EN 2005 : NOUVEAUX CHANTIERS DE LA POLITIQUE SOCIALE OUTRE-MER ?

1. Les mesures nouvelles en matière sanitaire : la CMU et le financement du ticket modérateur à Mayotte

Le projet de loi de finances pour 2005 prévoit deux types de mesures pour 2005 :

- le financement de la majoration du plafond CMU-C dans les DOM , dont les crédits sont inscrits à l'article 10 du chapitre 46-95, sera assuré à hauteur de 34,4 millions d'euros . Cette mesure est particulièrement importante puisque le taux de couverture de la population dans les DOM par la CMU-C est élevé : 31,3 % en Guadeloupe, 25,3 % en Martinique, 32 % en Guyane et 43,6 % à la Réunion.

Le réajustement des crédits proposé par le Gouvernement en 2005 ne remettra pas en cause, selon les déclarations de Brigitte Girardin 8 ( * ) , les missions du ministère en la matière en raison de « la participation de l'assurance maladie et l'affectation de droits sur les alcools forts au financement de la CMU-C »;

- la prise en charge du ticket modérateur à Mayotte : les crédits correspondant à cette mesure nouvelle sont inscrits à l'article 20 du même chapitre, pour un montant de 600.000 euros .

Au total, ce sont 35 millions d'euros qui participeront à la consolidation de l'accès aux soins outre-mer.

Par ailleurs, craignant qu'il y ait encore à faire en matière sanitaire, votre commission a estimé souhaitable de réfléchir à l'opportunité de lier le relèvement du plafond de la CMU à la hausse des minima sociaux, afin d'éviter les effets de seuil.

De même, elle attire l'attention du Gouvernement sur les questions sanitaires qui ne manqueront pas de se poser dans les années à venir outre-mer : par rapport à la métropole, on y dénombre, en effet, deux fois plus de cirrhoses et six à sept fois plus de morts par psychose alcoolique; l'obésité et le diabète deviennent également des problèmes de santé publique auxquels il devient urgent d'apporter une réponse avant qu'il ne soit trop tard . Paradoxalement, la consommation d'alcool y est inférieure à celle de la métropole et que le nombre d'abstinents y est plus important.

2. L'immigration, un nouveau défi pour l'outre-mer

Votre commission souhaiterait également alerter le Gouvernement sur les enjeux de l'immigration outre-mer qui inquiètent de plus en plus les ultramarins, en particulier à Mayotte, en Guyane mais également à la Réunion.

Entre 1990 et 1999, les soldes migratoires ont été fortement positifs à la Réunion et en Guyane.

L'augmentation moyenne annuelle de la population liée aux flux migratoires est d'environ 1.700 par an à la Réunion et 1.150 par an en Guyane.

Évolution des flux migratoires dans les DOM

DOM

Population 1999

Variation par rapport à 1990

Dont liée à l'excédent naturel

Dont liée aux soldes migratoires

Augmentation moyenne mensuelle

Guadeloupe

421.632

+ 34.700
(+ 9 %)

+ 44.200

- 9.500

+ 1,0 %

Guyane

157.274

+ 42.600
(+ 37 %)

+ 32.250

+ 10.300

+ 3,6 %

Martinique

381.467

+ 22.000
(+ 6 %)

+33.000

- 11.000

+ 0,7 %

Réunion

705 072

+ 107.100
(+ 18 %)

+ 91.750

+ 15.400

+ 1,9 %

TOTAL

1.665.445

+ 206.400
(+ 14 %)

+ 201.200

+ 5.200

+ 1,5 %

Source : ministère de l'outre-mer

A la Réunion, la situation est devenue particulièrement préoccupante, du fait de la croissance de flux d'immigrés venus des Comores. Mayotte est davantage victime de l'immigration clandestine que la Réunion puisque sur 160.000 Mahorais, on compte au moins 50.000 Comoriens.

L'immigration est ainsi devenue le moyen de bénéficier des avantages sociaux et économiques liés à la vie en France.

Selon votre commission, la première solution consisterait à développer à la fois des moyens de police par une surveillance accrue des côtes mahoraises et de l'espace maritime français.

Il conviendrait également de donner un contenu concret à la départementalisation de Mayotte : cela suppose notamment d'aligner le droit applicable en matière d'allocations familiales.

En effet, l'ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l'extension et à la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale met en place un nouveau régime de prestations familiales dans la collectivité départementale.

Contrairement à ce qui se passe dans les DOM, l'article 7 de cette ordonnance limite la majoration de la prestation à trois enfants, par allocataire.

Le décret du 29 mars 2002 d'application de cette ordonnance dispose en outre que le montant des allocations familiales qui sont fixées, en pourcentage de la base mensuelle de calcul des allocations familiales (BMAF) en vigueur en métropole et dans les DOM, s'élève à 38,12 pour un enfant, 61,02 pour deux enfants et 73,19 pour trois enfants. Les naissances supplémentaires ne donnent lieu au versement d'aucune majoration.

Votre commission estime qu'il serait juste d'établir une égalité de traitement entre Mayotte et les autres DOM en matière d'allocations. C'est pourquoi, elle proposera un amendement tendant à déplafonner les allocations familiales à Mayotte.

Au-delà du principe d'égalité constitutionnel devant la loi, Mayotte ayant vocation à devenir un département, il est nécessaire de soutenir financièrement les mères de famille mahoraises.

En effet , l'abrogation, justifiée, de la polygamie à Mayotte ne devait pas, dans un premier temps, concerner les familles en situation de polygamie. Or, de nombreux maris ont profité de cette loi pour répudier leurs épouses « au nom de la loi », de telle sorte que les femmes se sont retrouvées isolées avec de nombreux enfants à charge. La suppression de la polygamie doit donc aller de pair avec une prise en charge financière des femmes ainsi abandonnées , notamment en leur ouvrant la possibilité de bénéficier des allocations familiales sans plafonnement.

*

Après avoir adopté cet amendement, votre commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits sociaux de l'outre-mer inscrits au projet de loi de finances pour 2005.

* 8 Cf. deuxième séance du mardi 9 novembre 2004 relative à la discussion des crédits de l'outre-mer pour 2005 à l'Assemblée nationale.

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