N° 100

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006

Annexe au procès-verbal de la séance du 24 novembre 2005

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 2006 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME I

ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT

Par M. David ASSOULINE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Ambroise Dupont, Jacques Legendre, Serge Lagauche, Jean-Léonce Dupont, Ivan Renar, Michel Thiollière, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Pierre Martin, David Assouline, Jean-Marc Todeschini, secrétaires ; M. Jean Besson, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jean-Marie Bockel, Yannick Bodin, Pierre Bordier, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Christian Demuynck, Denis Detcheverry, Mme Muguette Dini, MM. Louis Duvernois, Jean-Paul Émin, Mme Françoise Férat, MM. François Fillon, Bernard Fournier, Hubert Haenel, Jean-François Humbert, Mme Christiane Hummel, MM. Soibahaddine Ibrahim, Alain Journet, André Labarrère, Philippe Labeyrie, Pierre Laffitte, Simon Loueckhote, Mme Lucienne Malovry, MM. Jean Louis Masson, Jean-Luc Mélenchon, Mme Colette Mélot, M. Jean-Luc Miraux, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jean-François Picheral, Jack Ralite, Philippe Richert, René-Pierre Signé, André Vallet, Marcel Vidal, Jean-François Voguet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 2540 , 2568 à 2573 et T.A. 499

Sénat : 98 et 99 (annexe n° 1 ) (2005-2006)

Lois de finances .

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le budget 2006 relatif à l'action culturelle extérieure se caractérise par deux contradictions majeures.

D'une part, alors que la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances aurait pu constituer un levier puissant permettant de rationaliser la présentation des crédits destinés au financement de notre rayonnement international, celle-ci contribue, au contraire, à disperser artificiellement les dotations au sein de programmes voire de missions différents, empêchant ainsi toute vision globale d'un secteur déjà soumis à d'importantes rigidités.

Trois exemples méritent d'être soulignés. Une interprétation littérale de la liste des pays bénéficiaires de l'aide publique au développement a conduit en premier lieu le ministère des affaires étrangères à scinder inopportunément le réseau culturel en deux ensembles distincts, selon la localisation des établissements, au risque de freiner la nécessaire réforme des implantations. Les crédits de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) relèvent, en second lieu, du programme « Français à l'étranger et étrangers en France » alors même que l'Agence et les établissements qu'elle contrôle jouent un rôle essentiel dans la diffusion de notre culture auprès des élèves étrangers. Enfin, les crédits de l'audiovisuel extérieur sont éclatés au sein de trois missions, la future chaîne d'information internationale étant directement rattachée auprès des services du Premier ministre.

D'autre part et surtout, alors que notre pays a été la cheville ouvrière de la convention adoptée par l'UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité culturelle, notre diplomatie culturelle reste privée des moyens de ses ambitions. Le programme « Rayonnement culturel et scientifique » ne représente ainsi que 14 % des crédits alloués à la mission « Action extérieure de l'État » en 2006, en diminution de 4,2 % par rapport à 2005.

En dépit de ces contradictions, votre rapporteur a centré son attention sur l'évolution des principales actions concourant au rayonnement culturel de la France à l'étranger en proposant, le cas échéant, différentes pistes de réformes visant à redynamiser des outils durablement soumis à une importante contrainte budgétaire.

I. AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR

Si l'ancien chapitre 42-14 regroupait les crédits alloués à l'ensemble des opérateurs de notre audiovisuel extérieur, force est de constater que la nouvelle architecture budgétaire en a décidé autrement. Pas moins de trois missions différentes retracent en effet ces crédits, provoquant une véritable dispersion des moyens au sein de divers fascicules budgétaires.

Ainsi, les crédits alloués à TV5 et à RFI sont rassemblés au sein du programme « Rayonnement culturel extérieur » de la mission « Action extérieure de l'État » 1 ( * ) . Le « bleu budgétaire » précise d'ailleurs à ce propos de manière assez curieuse que « les crédits de [ces deux opérateurs], s'ils concernent l'ensemble du monde, sont regroupés sur ce programme car ils ne sont pas reconnus par l'OCDE comme de l'aide publique au développement. » A croire qu'il fut un temps envisagé de rassembler ces crédits au sein de la mission « Aide publique au développement » voire de les répartir entre les missions « Aide publique au développement » et « Action extérieure de l'État » en fonction des zones de diffusion...

Par ailleurs, les crédits de la banque de programme CFI sont inscrits dans le programme « Solidarité à l'égard des pays en développement » de la mission « Aide publique au développement » 2 ( * ) .

Surtout, les crédits attribués à la future chaîne internationale sont retracés dans le programme 116 de la mission « Médias » placée sous l'autorité du Premier ministre.

Votre rapporteur estime que cette situation est extrêmement regrettable. En fractionnant ainsi l'analyse du secteur de l'audiovisuel extérieur, elle complexifie en effet considérablement la compréhension des enjeux de ce dernier pour les rapporteurs des deux assemblées. Alors que le reproche récurrent adressé à notre audiovisuel extérieur est l'absence flagrante de stratégie d'ensemble et de synergie, il aurait été au contraire avisé de rassembler les crédits des opérateurs présents et à venir au sein d'un même programme.

Enfin, votre rapporteur s'interroge sur le rôle joué par France Télévisions dans le domaine de l'audiovisuel extérieur. Contribuant largement au financement du secteur par l'intermédiaire des participations majoritaires qu'elle détient au capital de CFI à hauteur de 75 % et au capital de TV5 à hauteur de 51,4 %, la holding France Télévisions semble peiner à faire entendre sa voix. Or, comme l'observait la Cour des comptes dans son rapport annuel pour 2004, « [s']il appartient aux autorités politiques et notamment au ministère des affaires étrangères de fixer des objectifs de présence et d'action extérieures et de s'assurer de la bonne allocation des moyens budgétaires consentis [aux organismes de l'audiovisuel extérieur, ces derniers] devraient être contrôlés par leur actionnaire principal » . Cette évolution, souhaitable et généralement souhaitée par les tutelles de la télévision publique, améliorerait la gouvernance des organismes de l'audiovisuel extérieur et rendrait d'autant plus utile le regroupement des crédits qui leur sont alloués dans un programme unique.

A. UN DÉCROCHAGE PERSISTANT DES RESSOURCES DE L'AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR VIS-À-VIS DE L'AUDIOVISUEL NATIONAL

Pour la seconde année consécutive, votre rapporteur observe pour 2006 un décrochage significatif 3 ( * ) entre l'évolution des ressources publiques de l'audiovisuel extérieur, qui au mieux seront reconduites à l'identique en valeur, et celles de l'audiovisuel national, qui connaîtront une progression de 2,9 %.

Sachant que les dotations à TV5 et RFI, les deux structures demeurant dans le champ de la présente mission, passent de 141,4 millions d'euros en 2005 à 141,97 millions d'euros en 2006, on peut considérer que les moyens consacrés par le ministère des affaires étrangères à l'ensemble de l'action audiovisuelle extérieure 4 ( * ) seront sensiblement les mêmes (en valeur) d'une année sur l'autre.

Pour leur part, les ressources publiques allouées par le ministère de la culture et de la communication en 2006 au secteur public de l'audiovisuel sont arrêtées à 2,736 milliards d'euros, en progression de 2,9 % par rapport à la loi de finances pour 2005. Ce total inclut une dotation à RFI de 55,86 millions d'euros sur la redevance, en hausse de 4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2005. A travers France Télévisions, les moyens du ministère de la culture et de la communication contribuent également au financement de TV5 à hauteur de 3,99 millions d'euros et d'Euronews à hauteur de 2,35 millions d'euros.

Votre rapporteur tient à souligner que l'existence d'un écart croissant entre les ressources allouées aux opérateurs audiovisuels extérieurs et celles dévolues à l'audiovisuel public national, elles-mêmes très inférieures à la progression du chiffre d'affaires des opérateurs privés, ne sera pas sans conséquence sur l'efficacité de notre dispositif.

Alors que les coûts du secteur sont tirés à la hausse, cette perte de pouvoir d'achat des opérateurs extérieurs ne pourra pas être éternellement compensée par des gains de productivité et des redéploiements. Nos opérateurs devront donc malheureusement 5 ( * ) renoncer à moyen terme à certaines ambitions en matière de diffusion, de langues et de programmes, ce qui ne facilitera pas leur tâche sur des marchés de plus en plus concurrentiels.

* 1 Action n° 3 « Audiovisuel extérieur ».

* 2 Action n° 2 « Affirmation de la dimension culturelle du développement ».

* 3 Ces données ne prennent pas en compte le financement de la future chaîne française d'information internationale, pour laquelle 65 millions d'euros ont été inscrits sur les crédits du Premier ministre, mais qui correspondent à un projet nouveau construit ex nihilo , qui n'aura pas, au moins à court terme, d'incidence budgétaire sur les autres opérateurs.

* 4 Programmes 185 « Rayonnement culturel et scientifique » et 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement ».

* 5 Certains opérateurs doivent déjà réaliser de tels choix, comme par exemple le sous-titrage pour TV5.

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