II. EXAMEN DE L'AVIS

Réunie le mercredi 30 novembre 2005 sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Gilbert Barbier sur le projet de loi de finances pour 2006 (mission « Sécurité sanitaire : programme « Veille et sécurité sanitaires »).

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis , a présenté les grandes lignes de son rapport (cf. exposé général du présent avis).

Indiquant que la nouvelle mission interministérielle « Sécurité sanitaire » recouvre les programmes « Veille et sécurité sanitaires » et « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a rappelé que la commission des affaires sociales a choisi de limiter son avis au premier de ces programmes, dont le budget s'élève à 103,6 millions d'euros pour l'année 2006.

Le montant limité de cette enveloppe doit être relativisé en raison de la participation importante de l'assurance maladie au financement de ces politiques et de l'absence d'inscription de dépenses de personnel sur le programme. Ces dernières sont en effet rattachées au programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » de la mission « Solidarité et intégration » pour un total de 114, millions d'euros et il serait souhaitable, pour la clarté des comptes, qu'elles soient à l'avenir inscrites sur le programme « Veille et sécurité sanitaires ».

L'essentiel des crédits du programme (81 millions d'euros) correspond aux subventions accordées aux agences de sécurité sanitaire : l'Institut de veille sanitaire (InVS), l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale et du travail (Afsset) et l'Agence de la biomédecine (ABM).

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a indiqué que la première action « Veille, surveillance, expertise et alerte » du programme a pour finalité d'identifier, d'évaluer et de gérer les risques sanitaires qui menacent la population, grâce à la collecte et à l'exploitation des données sur les risques sanitaires, aux signalements de pharmacovigilance auprès de l'Afssaps, au déclenchement des alertes par l'InVS et à la promotion de la recherche dans le domaine de la sécurité sanitaire. Cette action constitue le coeur de la politique de sécurité sanitaire et, à ce titre, bénéficie de la moitié des crédits du programme, soit 51,6 millions d'euros, dont 47 millions d'euros sont affectés à la subvention des agences chargées de mettre en oeuvre ces actions.

La deuxième action du programme, consacrée à la gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises, a pour objet de garantir la pertinence des décisions des autorités en cas de crise grâce, notamment, à la mise en oeuvre de plans de réponse aux situations d'urgence sanitaire. Le plan de lutte contre la pandémie grippale et le plan canicule ont été élaborés dans ce cadre, mais l'annexe « Peste-charbon-tularémie » du plan Biotox, la révision du plan variole et le plan contre le syndrome respiratoire aigu sévère (Sras) n'ont pas encore abouti.

Pour 2006, les crédits de l'Etat affectés à cette action s'élèvent à 7,9 millions d'euros, soit 7,6 % des moyens du programme, et sont distribués pour moitié aux agences concernées. Si les crédits sont en baisse de 16,8 %, c'est en raison de la montée en puissance de l'assurance maladie pour le financement des plans d'urgence, notamment les plans grippe aviaire et Biotox, qu'elle prend en charge par le biais d'un fonds de concours de 177,7 millions d'euros attaché à l'action. Le rapporteur s'est interrogé à cet égard sur l'absence de traduction budgétaire de l'annonce faite par M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, concernant l'augmentation de la dotation du programme « Veille et sécurité sanitaires », à hauteur de 177 millions d'euros, pour compléter les moyens disponibles pour la lutte contre l'épidémie de grippe aviaire. Plus largement, et conformément à la position défendue par la commission, il a estimé que l'Etat aurait dû prendre entièrement en charge le financement de ce plan, qui ressort typiquement de ses missions régaliennes.

Par ailleurs, et dans la mesure où les crédits du fonds « Biotox/grippe aviaire » sont fongibles, il s'est inquiété d'une répartition éventuelle des crédits au détriment du plan Biotox, dans un contexte international qui demeure troublé.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis , a indiqué que la troisième action, « Production et mise en oeuvre de règles, de recommandations, de décisions et autres dispositifs » par les agences sanitaires, a pour objet la diffusion de recommandations et de bonnes pratiques d'évitement des dangers, la définition d'une réglementation garantissant un niveau élevé de protection sanitaire et le suivi de l'application de ces décisions par des contrôles réguliers. Les crédits destinés à la mise en oeuvre de cette action représentent 30 % des moyens accordés au programme, soit 32 millions d'euros, pour moitié attribués aux agences sanitaires chargées d'édicter les normes et de délivrer les autorisations. Ce poste de dépenses a fait les frais de la diminution de 25 % des crédits de l'action, conduisant les agences à mobiliser leur fonds de roulement pour financer leurs activités courantes. Il a considéré que ces fonds de roulement doivent toutefois demeurer à un niveau suffisant pour être utilisés en cas de besoin et que l'économie ainsi réalisée sera très ponctuelle, puisque, dès l'an prochain, l'Etat devra doter plus fortement les agences sanitaires.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis , a enfin fait valoir que les actions menées en matière de formation et d'information dans le cadre de la sécurité sanitaire bénéficient d'une meilleure lisibilité grâce à leur regroupement dans une action spécifique. Elles sont destinées à assurer la diffusion d'une information aux professionnels et au grand public sur les facteurs de risque sanitaire et en cas de crise. L'action « Information et formation » dispose de 12 millions d'euros, soit près de 12 % des crédits du programme. Elle bénéficie d'une augmentation sans précédent de 82,7 % par rapport à 2005, qui s'explique principalement par l'intégration des 9,3 millions d'euros de subventions aux agences de sécurité sanitaire au titre de leurs actions de formation et d'information.

En définitive, la nouvelle nomenclature budgétaire confirme le rôle prépondérant des agences dans la politique de sécurité sanitaire, même si cette organisation institutionnelle, issue de la loi du 1 er juillet 1998, n'est pas exempte de critiques, notamment en raison du chevauchement des compétences entre les différentes agences, ce qui doit encore être clarifié. Ceci est particulièrement vrai pour la nouvelle Afsset qui éprouve des difficultés à trouver ses marques, face aux autres organismes existants, l'InVS, l'Institut national de l'environnement et des risques (Ineris) et l'Office de protection contre les rayonnements ionisants (Opri). Des mesures sont prises pour fortifier sa situation, notamment la création de dix emplois supplémentaires entre 2005 et 2010. Toutefois, le rapporteur s'est étonné qu'aucun de ces recrutements ne concerne des personnels d'encadrement administratif et de secrétariat, pourtant indispensables à la montée en puissance de l'agence. En outre, il semble que l'Afsset rencontre des difficultés pour recruter des toxicologues et des médecins du travail, en raison d'une grille statutaire peu attractive par rapport aux rémunérations proposées par les entreprises privées et les centres antipoison. Il a donc souhaité un recentrage de l'expertise en matière de santé environnementale et de santé au travail sur l'Afsset, en rendant sa saisie obligatoire pour toutes les demandes d'études sur ces sujets.

Concernant l'article 87 du projet de loi de finances, rattaché à la mission « Sécurité sanitaire », M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis , a indiqué qu'il vise à instaurer une nouvelle taxe pour financer les comités et la conférence nationale de protection des personnes, qui doivent donner un avis favorable à toute recherche biomédicale, en vertu de la loi du 20 décembre 1998 relative à la protection des personnes qui se prêtent à des recherches biomédicales.

Leur financement est actuellement assuré par un fonds de concours, alimenté par les droits versés par les promoteurs de recherche, ce qui n'est plus possible en application de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). L'article 87 institue, en conséquence, une taxe additionnelle, dont le recouvrement est effectué par l'Afssaps, destinée aux comités de protection des personnes et due pour toute demande d'avis qui leur est adressée. Le montant total de la taxe versée à l'Afssaps pour les recherches biomédicales et de la taxe additionnelle due aux comités de protection des personnes était à l'origine de 8.000 euros ; l'Assemblée nationale l'a ramené à 6.000 euros. M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis , s'est déclaré très favorable à cette modification, afin de moins pénaliser l'attractivité de la France en matière de recherche : en effet, la moyenne du plafond des redevances versées par les promoteurs de recherches dans les autres Etats de l'Union européenne est de l'ordre de 3.000 euros.

M. Alain Vasselle a déploré que, comme dans le cas du fonds de financement des prestations sociales agricoles (Ffipsa), les annonces du Gouvernement pour le financement du plan de lutte contre la grippe aviaire ne soient pas suivies d'une inscription budgétaire claire. Il a observé que l'assurance maladie est de plus en plus souvent mise à contribution pour le financement d'actions de sécurité sanitaire qui relèvent des missions régaliennes de l'Etat. Il a appelé de ses voeux une diminution des dépenses de l'Etat pour éviter à celui-ci de grever le budget de l'assurance maladie et celui des collectivités territoriales. Il a enfin demandé si le dispositif proposé par l'article 87 du projet de loi de finances crée de nouvelles charges par rapport au système actuel de fonds de concours.

M. Alain Gournac s'est inquiété des difficultés croissantes que rencontrent les agences sanitaires pour recruter des médecins et des scientifiques et, plus particulièrement, de la situation de l'Afsset. Il a par ailleurs jugé trop complexe le dispositif prévu par l'article 87 du projet de loi de finances.

M. François Autain a estimé que l'Etat se désengage progressivement du domaine de la sécurité sanitaire et laisse le champ libre aux laboratoires pharmaceutiques et à l'assurance maladie. Il a regretté que les prélèvements effectués sur les fonds de roulement diminuent d'autant les subventions de l'Etat aux agences, citant le cas de l'Afssaps, pour laquelle la part du financement de l'Etat s'est élevé à seulement 8 % en 2003.

Il a considéré que les difficultés rencontrées par l'Afsset sont la conséquence logique du refus d'intégrer à l'Afsse, lors de sa création, l'Ineris et l'Opri, comme le proposait à l'époque M. Claude Huriet. Il a estimé que l'Afsse aurait dû être rattachée à l'Afssa, comme le préconise M. Claude Saunier, au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), opération qui serait désormais difficile à mener avec la création de l'Afsset.

En réponse aux intervenants, M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a indiqué que l'article 87 ne crée pas de charges supplémentaires pour les promoteurs de recherche, mais modifie seulement le mode de financement des comités de protection des personnes.

Concernant le budget de l'Afssaps en 2003, il a rappelé que le compte administratif pour l'année 2002 faisait état d'un fonds de concours équivalent au montant de la subvention annuelle de l'Etat à l'agence, ce qui explique la moindre participation de l'Etat l'année suivante.

Il a estimé que l'Afsset pâtit également du nombre trop important de ses ministères de tutelle (travail, santé, environnement, industrie), dont les champs de compétences sont eux-mêmes mal définis en matière sanitaire. Il a indiqué que l'Afsse, qui dépend également du ministère de l'agriculture, connaît des difficultés identiques.

M. François Autain a rappelé que, lors de la création de l'Afssa, le Centre national d'études vétérinaires et alimentaires (CNEMA) y a été intégré.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis , a considéré que l'Afsset souffre surtout de l'absence d'un pouvoir de police sanitaire, ce dont les autres agences disposent.

Enfin la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurité sanitaire » : programme « Veille et sécurité sanitaires ».

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