N° 82

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 novembre 2006

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 2007 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME V

SÉCURITÉ SANITAIRE

Par M. Gilbert BARBIER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gérard Dériot, Jean-Pierre Godefroy, Mmes Claire-Lise Campion, Valérie Létard, MM. Roland Muzeau, Bernard Seillier, vice-présidents ; MM. François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Anne-Marie Payet, Gisèle Printz, secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, MM. Jean-Paul Amoudry, Gilbert Barbier, Daniel Bernardet, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mmes Isabelle Debré, Christiane Demontès, Sylvie Desmarescaux, M. Claude Domeizel, MmeBernadette Dupont, MM. Michel Esneu, Jean-Claude Etienne, Guy Fischer, Jacques Gillot, Francis Giraud, Mmes Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, Annie Jarraud-Vergnolle, Christiane Kammermann, MM. Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Raymonde Le Texier, MM. Roger Madec, Jean-Pierre Michel, Alain Milon, Georges Mouly, Mmes Catherine Procaccia, Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, Patricia Schillinger, Esther Sittler, MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Vasselle, François Vendasi, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 3341 , 3363 à 3368 et T.A. 619

Sénat : 77 et 78 (annexe n° 28 ) (2006-2007)

Lois de finances .

Les crédits du programme « veille et sécurité sanitaires »
de la mission « Sécurité sanitaire » pour 2007

Programmes

Crédits de paiement

Variation 2007/2006

(en euros)

(en %)

Veille et sécurité sanitaires

105.251.036

+ 2,1

Veille, surveillance, expertise et alerte

63.824.536

+ 23,9

Gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises

12.299.188

+ 56,1

Production et mises en oeuvre de règles, de recommandations, de décisions et autres dispositifs

18.280.152

- 42,8

Information et formation

10.847.160

- 7,9

AVANT PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La sécurité sanitaire peut être définie comme l'ensemble des actions et des procédures permettant de réduire la probabilité des risques ou la gravité des dangers qui menacent la santé de la population. La responsabilité et la maîtrise de ces risques et dangers échappant à la seule action individuelle, l'intervention des pouvoirs publics est nécessaire.

Progressivement mis en place au cours du XX e siècle, le dispositif de sécurité sanitaire français a été considérablement renforcé depuis une dizaine d'années , les drames du sang contaminé et de l'encéphalopathie spongiforme bovine ayant entraîné une prise de conscience et une demande sociale forte de la population en matière de sécurité sanitaire.

La traduction législative de cette nouvelle préoccupation fut la loi du 1 er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et au contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme, qui a conduit à réorganiser le système français de façon plus cohérente et plus efficace, grâce à la création de trois agences : l'Afssaps, l'Afssa et l'InVS auxquelles se sont ajoutées ensuite l'Afsset et l'ABM 1 ( * ) .

Aujourd'hui, le souvenir de la canicule de 2003 et les risques liés à l'émergence d'une pandémie grippale, au retour du chikungunya et aux menaces bioterroristes réclament une mobilisation accrue des pouvoirs publics en faveur de la sécurité sanitaire.

Les moyens alloués à la politique de sécurité sanitaire sont, depuis la mise en oeuvre effective de la Lolf du 1 er août 2001, séparés du budget de la santé et rassemblés au sein d'une mission interministérielle dédiée. La mission « Sécurité sanitaire » regroupe deux programmes : « veille et sécurité sanitaires », sous l'égide du ministère de la santé et des solidarités, et « sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », piloté par le ministère de l'agriculture et de la pêche.

Seul le premier de ces programmes relève du champ de compétence de votre commission des affaires sociales. Il poursuit cinq objectifs : disposer de systèmes réactifs de veille, d'alerte et d'expertise sur les risques qui menacent la population ; améliorer l'état des connaissances sur ces risques et sur les moyens d'y faire face ; améliorer la maîtrise des risques sanitaires ; renforcer la capacité de répondre aux urgences et de gérer les crises sanitaires ; enfin, développer une culture partagée du risque sanitaire.

Pour les atteindre, 105,2 millions d'euros lui sont alloués pour 2007 . Si cette dotation peut sembler faible, il convient de rappeler que la participation de l'assurance maladie à cette politique est massive et sans cesse croissante et que le programme « veille et sécurité sanitaires » n'inclut pas les dépenses de personnel . Celles-ci sont rattachées, en dépit des dispositions de la Lolf, au programme « conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » de la mission « Solidarité et intégration » pour un total de 127,5 millions d'euros, correspondant à la rémunération de 2.298 emplois équivalents temps plein.

Il s'agit essentiellement des personnels des agences de sécurité sanitaire, qui constituent les opérateurs du programme et qui, à ce titre, sont destinataires de l'essentiel des crédits du programme : l'InVS, l'Afssaps, l'Afssa, l'Afsset, l'ABM, l'EFS et l'INTS 2 ( * ) .

I. RÉPONDRE AUX NOUVEAUX ENJEUX DE LA SÉCURITÉ SANITAIRE

Le programme « veille et sécurité sanitaires » se propose d'apporter des réponses efficaces à l'émergence de nouveaux défis et d'une demande sociale forte en matière de sécurité sanitaire, au travers de ses quatre actions d'importance inégale : « veille, surveillance, expertise et alerte », « gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises », « production et mise en oeuvre de règles, de recommandations, de décisions et autres dispositifs » et « information et formation ».

Les crédits du programme « veille et sécurité sanitaires » pour 2007

Actions

Crédits de paiement (en millions d'euros)

Variation 2007/2006 (en %)

Veille, surveillance, expertise et alerte

63,8

+ 23,9

Gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises

12,3

+ 55,7

Production et mise en oeuvre de règles, de recommandations, de décisions et autres dispositifs

18,3

- 42,8

Information et formation

10,8

- 8,5

Total

105,2

+ 2,1

Source : Direction générale de la santé

Ce programme est conduit sous la responsabilité de la direction générale de la santé (DGS), en lien étroit les directeurs des agences sanitaires et des structures en charge de l'application de la politique de santé publique et de sécurité sanitaire. Pour son application effective, les moyens dont il dispose sont ventilés entre un budget opérationnel de programme (Bop) d'administration centrale, qui comprend essentiellement les subventions de l'Etat aux agences, et vingt-six Bop régionaux pour le niveau déconcentré des mesures mises en oeuvre en métropole et en outre-mer.

A. DE LA VEILLE À L'ALERTE, UNE MOBILISATION CONSTANTE DES POUVOIRS PUBLICS

L'action « veille, surveillance, expertise et alerte » a pour finalité d'identifier et d'évaluer les risques sanitaires qui menacent la population, de rassembler les connaissances nécessaires pour les gérer, mais aussi d'entretenir et de développer les dispositifs d'alerte.

Pour atteindre ces objectifs, les actions menées dans ce cadre concernent le recueil et l'exploitation des données relatives aux risques sanitaires, le repérage et le signalement des dangers, ainsi que la mobilisation de tous les acteurs pour y faire face.

1. Les quatre étapes de la prévention

La prévention des risques sanitaires passe donc par quatre moyens d'intervention successifs, qui ont tous été renforcés après la canicule meurtrière de l'été 2003.


Un exemple de prévention d'un risque sanitaire : le plan canicule

Le plan canicule organise les actions de prévention des conséquences sanitaires des vagues de chaleur, ainsi que l'alerte et la gestion de crise. Sa première version a été arrêtée par le ministère de la santé le 5 mai 2004. Il a été plusieurs fois activé depuis, notamment au cours de l'été 2006, et a fait régulièrement l'objet d'une actualisation pour répondre aux besoins.

Il repose, à l'origine, sur cinq types d'actions : la mise en oeuvre de mesures de protection des personnes hébergées en institutions et en établissements de soins, le repérage par les mairies des personnes isolées, l'alerte par le ministre de la santé sur avis de l'InVS, la mobilisation des associations et services d'aide à domicile et la communication nationale et locale à partir de supports préparés par l'institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes).

Les déclenchements du plan canicule à l'été 2005 et les exercices nationaux de juin 2005 à Orléans et de juin 2006 à Poitiers ont été à l'origine de deux modifications : la décision de déclencher le plan départemental de gestion d'une canicule est dorénavant confiée au préfet et les niveaux d'alerte du plan canicule et les cartes de vigilance météorologique publiées par Météo France sont désormais concordants.

Ces changements ont permis de faire face, avec des résultats satisfaisants, à la vague de chaleur du mois de juillet dernier . Le plan canicule a ainsi été déclenché du 7 juillet au 1 er août dans soixante-neuf départements. L'InVS a rapporté 133 cas de décès directement liés à la chaleur, dont quatre-vingts concernaient des personnes âgées et vingt-neuf des personnes avec des pathologies sous-jacentes. Il a également constaté une surmortalité globale de 6 % pendant la période (soit 1.388 décès), mais sans corrélation géographique avec la canicule. En outre, les services d'urgence ont enregistré une augmentation de leur niveau d'activité de l'ordre de 10 %.

Le plan canicule a notamment permis aux établissements accueillant des personnes âgées de se préparer (équipement en systèmes de climatisation et définition d'un « plan bleu »), de sensibiliser la population grâce aux campagnes de l'Inpes et à la réquisition des médias et d'améliorer la réactivité du système sanitaire sollicité en urgence (« plan blanc », « hôpital en tension », appel aux élèves des facultés de médecine et aux médecins retraités).

En 2007, il a été décidé d'améliorer encore le dispositif en :

- inscrivant le maximum de personnes vulnérables sur les registres communaux grâce à l'aide apportée par les associations d'aide à domicile ;

- améliorant l'organisation d'« hôpital en tension » avec un nouveau guide de la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) et des remontées en continu des données sanitaires en situation de crise ;

- réglementant l' appel aux volontaires médecins étudiants ou retraités avec un arrêté relatif à leurs conditions d'emploi et de rémunération ;

- accélérant la signature de conventions tripartites avec les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (Ehpad) pour recruter du personnel supplémentaire. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 prévoit 159 millions d'euros pour ces conventionnements, représentant 90.000 places et 9.000 emplois créés.

La veille prospective et scientifique

Cette première étape consiste à repérer, de la manière la plus précoce et exhaustive possible, l'existence de risques sanitaires liés à de nouveaux produits et technologies de santé. Pour cela, il s'agit d' améliorer la collecte et l'exploitation des données existantes , la connaissance d'un risque facilitant son identification.

En 2007, plusieurs actions seront mises en oeuvre à ce niveau : le développement de l'observatoire des pesticides, une étude des seuils sanitaires bactériologiques pour les plans d'eau et les bassins récréatifs dans le cadre de la transposition de la directive européenne « baignade » et un inventaire de l'état des milieux de vie au regard des principales sources de contamination.

La surveillance

L'objectif est ici d'organiser et de traiter les informations recueillies à l'étape précédente, afin d'en évaluer avec précision la probabilité de réalisation et l'impact sanitaire , ainsi que les populations susceptibles d'être touchées.

Il s'agit donc essentiellement de procédures de vigilance définies au niveau législatif ou réglementaire pour certaines catégories de produits et de technologies de santé, dont elles visent à garantir la sécurité d'emploi après la mise sur le marché. Elles reposent sur le signalement des professionnels de santé, des industriels et des victimes d'effets secondaires indésirables. Les informations ainsi collectées sont ensuite analysées pour déterminer l'origine et le degré de dangerosité du risque et prendre en conséquence les mesures de prévention qui s'imposent.

L'Afssaps assure la plupart des missions de vigilance. Elle a ainsi enregistré, en 2005, plus de 24.000 signalements au titre de la pharmacovigilance, de l'hémovigilance et de la matériovigilance. Par ailleurs, les centres antipoison, dont le développement sera prochainement assuré grâce à la mise en place de nouveaux outils informatiques et méthodologiques en lien avec l'InVS, instruisent chaque année environ 170.000 dossiers au titre de la toxicovigilance. Enfin, les centres de coordination de lutte contre les infections nosocomiales (CCLIN) ont en charge le recueil des déclarations des infections nosocomiales et des évènements indésirables graves liés aux soins.

En 2007, sont plus particulièrement prévues des actions dans le domaine de la surveillance de l'air intérieur, des pollens, des légionelles et de la présence de pesticides et de résidus médicamenteux et phytopharmaceutiques dans les eaux de boisson.

L'alerte

Cette troisième étape vise à signaler aussi rapidement que possible la réalité du risque aux personnes chargées de sa gestion . Les procédures prévues en la matière ont donc pour objet de garantir le repérage, le traitement et la transmission fiables et précoces de l'information aux décisionnaires.

Dans ce cadre, soixante-six alertes ont ainsi été notifiées au bulletin quotidien de l'InVS en 2005, dont quarante-huit concernant des maladies infectieuses.

L'expertise, l'évaluation et la recherche

Le dernier levier de la prévention du risque sanitaire a pour objet d' améliorer la disponibilité des connaissances scientifiques et des compétences en cas de risque avéré grâce à la mobilisation de l'ensemble des experts appartenant à l'administration, aux agences et aux laboratoires pharmaceutiques.

Il s'agit également de garantir que les autorisations de mise sur le marché et les mesures de police sanitaire reposent sur un fondement scientifique pertinent, permettant d'évaluer convenablement le rapport bénéfice-risque, la qualité et la sécurité d'emploi, ainsi que l'intérêt thérapeutique et de santé publique des produits et technologies de santé.

* 1 Afssaps : agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ; Afssa : agence française de sécurité sanitaire des aliments ; InVS : institut de veille sanitaire ; Afsset : agence française de sécurité sanitaire environnementale ; ABM : agence de la biomédecine.

* 2 EFS : Etablissement français du sang ; INTS : institut national de la transfusion sanguine.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page