Avis n° 213 (2006-2007) de Mme Bernadette DUPONT , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 7 février 2007

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N° 213

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 7 février 2007

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, portant réforme de la protection juridique des majeurs ,

Par Mme Bernadette DUPONT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gérard Dériot, Jean-Pierre Godefroy, Mmes Claire-Lise Campion, Valérie Létard, MM. Roland Muzeau, Bernard Seillier, vice-présidents ; MM. François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Anne-Marie Payet, Gisèle Printz, secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, MM. Jean-Paul Amoudry, Gilbert Barbier, Pierre Bernard-Reymond, Daniel Bernardet, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mmes Isabelle Debré, Christiane Demontès, Sylvie Desmarescaux, M. Claude Domeizel, Mme Bernadette Dupont, MM. Michel Esneu, Jean-Claude Etienne, Guy Fischer, Jacques Gillot, Francis Giraud, Mmes Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, Annie Jarraud-Vergnolle, Christiane Kammermann, MM. Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Mme Raymonde Le Texier, MM. Roger Madec, Jean-Pierre Michel, Alain Milon, Georges Mouly, Mme Catherine Procaccia, M. Thierry Repentin, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, Patricia Schillinger, Esther Sittler, MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Vasselle, François Vendasi.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 3462 , 3557 , 3556 et T.A. 653

Sénat : 172 et 212 (2006-2007)

Justice.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La réforme de la protection juridique des majeurs est une réforme attendue de longue date, importante et indispensable pour assurer la dignité d'un grand nombre de nos concitoyens : personnes nées ou devenues handicapées avec une altération irréversible de leurs facultés mentales, personnes victimes de troubles mentaux graves, personnes âgées dont les facultés mentales déclinent. Toutes personnes ayant besoin, par voie de conséquence, que leurs biens et que leur personne soit protégés par la loi.

A celles-ci sont venues s'ajouter ces dernières années des personnes en grande difficulté sociale, en raison de leur prodigalité, d'addictions diverses - au premier rang desquelles l'abus de boisson -, du fait enfin de leur oisiveté, pour reprendre les termes déjà employés par la loi fondatrice du 3 janvier 1968, et pour lesquelles il est souhaitable aujourd'hui de mettre en place un accompagnement social pour les aider à recouvrer, autant que possible, leur autonomie.

On compte aujourd'hui plus de 700 000 personnes sous protection juridique, ce nombre menaçant d'atteindre, voire de dépasser, le million dans les années à venir. Or, placer une personne sous protection juridique n'est pas un acte anodin : même si la vocation d'une telle mesure est naturellement d'assurer la protection de la personne et de ses intérêts, sa mise en oeuvre passe par des restrictions très importantes apportées à sa liberté individuelle. Comment le législateur pourrait-il se satisfaire de constater que près d'un Français sur cent est soumis à une telle restriction de sa capacité juridique ?

Il convenait donc de mieux encadrer l'ouverture des mesures de protection juridique, en réaffirmant un triple principe de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité de celles-ci, tout en mettant en place, avec les conseils généraux, un accompagnement social renforcé pour ceux qui, à l'évidence, doivent être soutenus dans leur gestion du quotidien et protégés de leur inconséquence sans qu'une restriction excessive soit apportée à leur capacité juridique.

Mais s'il convient de désengorger les tribunaux des demandes relevant manifestement de l'accompagnement social, il ne faut pas entretenir l'espoir d'une décroissance spectaculaire du nombre des majeurs protégés. Parmi les multiples conséquences de l'allongement de l'espérance de vie, on compte en effet l'augmentation parallèle du nombre de personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer ou de syndromes équivalents, mettant gravement en cause leurs facultés mentales.

C'est la raison pour laquelle il est également indispensable de renforcer les moyens consacrés aux tribunaux d'instance qui gèrent ces mesures de protection : aujourd'hui, le nombre de juges des tutelles équivaut à quatre-vingts équivalents temps plein, celui des greffiers en chef à quatre-vingt-dix équivalents temps plein et celui des simples greffiers environ quatre cent soixante-dix. La faiblesse de ces effectifs conduit les juges à ne pouvoir consacrer qu'à peine une demi-heure par an et par dossier au contrôle des comptes de tutelle.

*

L'Assemblée nationale a voté en première lecture un texte de qualité, auquel le Sénat souhaite à son tour apporter sa contribution. La commission des lois, par la voix de son rapporteur, Henri de Richemont, sera la cheville ouvrière de cette réflexion. Saisie pour avis, la commission des affaires sociales a souhaité y apporter un regard complémentaire, en se penchant plus particulièrement sur sa dimension humaine et sociale.

La protection des plus faibles est un devoir des familles et un devoir de la société. C'est l'honneur du législateur de l'encadrer dans le respect le plus profond des personnes, de leur humanité et de leur dignité.

I. ADAPTER LA PROTECTION JURIDIQUE DES MAJEURS AUX RÉALITÉS SOCIALES ACTUELLES

A. UN DISPOSITIF DE PROTECTION QUI S'EST PEU À PEU ÉLOIGNÉ DES PRINCIPES FONDATEURS DE LA LOI DE 1968

1. La population des majeurs protégés a changé

Le nombre de personnes placées sous un régime de protection juridique s'élève, en 2005, à plus de 630 000 personnes, auxquelles s'ajoutent les 67 000 personnes relevant d'une mesure de tutelle aux prestations sociales. Au total, la protection des majeurs concerne 1,3 % de la population française majeure.

Selon les projections réalisées par la chancellerie avec l'appui de l'institut national d'études démographiques, en 2010, ce sont plus de 1,1 million de personnes qui pourraient être concernées par des mesures de protection, si celles-ci continuent d'augmenter au rythme actuel.

Évolution du nombre de personnes protégées

1975

85 000

1990

348 000

1995

445 000

2000

562 000

2005

697 000

2010 *

1 126 000

* prévisions

Source : Ined

Ce rythme de croissance est très soutenu : il s'établit à environ 8 % par an. Il est tiré à la fois par l'augmentation du nombre de saisines du juge des tutelles et par celle du nombre de réponses favorables que celui-ci apporte.

Les demandes de protection adressées au juge ont en effet connu une explosion au cours des dernières années : elles ont augmenté en moyenne de 80 % depuis 1990. La croissance des demandes de tutelles aux prestations sociales connaît une dynamique particulièrement forte puisque leur nombre a été multiplié par quarante depuis 1990.

Quant aux décisions favorables des juges, elles ont augmenté de 48 % en quinze ans : leur nombre est passé d'un peu moins de 10 000 en 1970 à un peu plus de 40 000 en 1990, pour enfin atteindre environ 65 000 en 2004.

Cette évolution s'explique naturellement en partie par des facteurs indépendants du dispositif de protection lui-même : le vieillissement de la population, l'augmentation de la pauvreté et de l'exclusion sociale ou encore le choix d'une politique de suivi des malades psychiques en régime ambulatoire pèsent sur les demandes de protection adressées aux juges.

Mais si l'on garde à l'esprit que ces mesures, dont la vocation protectrice est indéniable, sont également privatives de libertés et restrictives de droits, on ne peut que s'interroger sur les raisons de leur augmentation statistique au regard du respect des principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité présidant à leur ouverture.

2. Les principes de la loi du 3 mars 1968 se sont émoussés

a) Les régimes de protection existants

Pour pouvoir adapter la protection de la personne en fonction de ses besoins, le juge dispose aujourd'hui de quatre types de mesures qui se distinguent par le degré de contrainte qu'elles apportent à la liberté du majeur protégé.

? Les mesures de protection prévues par le code civil reposent sur trois principes :

- elles ne peuvent être prononcées qu'en présence d'une altération des facultés personnelles mettant la personne dans l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts, qui doit être constatée par un médecin ;

- la mesure doit être nécessaire et subsidiaire compte tenu de l'incapacité civile qu'elle entraîne et de sa légitimité au regard des libertés individuelles ;

- un rôle central est dévolu à la famille et la priorité doit lui être conférée dans l'attribution de la tutelle.

Trois régimes de protection sont prévus par la loi du 3 janvier 1968 :

- la sauvegarde de justice : il s'agit d'une mesure temporaire, médicale ou judiciaire, dont l'objectif est préventif. Elle permet à la personne de conserver l'exercice de ses droits mais les actes qu'elle passe sont susceptibles de révision a posteriori ;

- la curatelle : elle concerne les personnes qui, sans être hors d'état d'agir par elles-mêmes, ont besoin d'être conseillées ou contrôlées dans les actes de la vie civile. La personne sous curatelle peut accomplir seule les actes d'administration mais ne pourra effectuer d'acte qui engage son patrimoine sans l'assistance de son curateur. La curatelle peut, sur décision du juge des tutelles, être allégée ou aggravée ;

- la tutelle : elle est ouverte lorsque la personne a besoin d'être représentée de manière continue dans les actes de la vie civile. La personne sous tutelle est déchargée de l'exercice de ses droits (y compris le droit de vote) et ne peut plus passer aucun acte seule.

? Complément de ce dispositif, la tutelle aux prestations sociales n'est pas, sur le plan juridique, un régime d'incapacité. Cette mesure temporaire a un caractère éducatif et social : son objectif est l'amélioration, via un accompagnement social adapté, des conditions de vie du majeur. Elle permet de confier à une personne qualifiée la perception de tout ou partie des prestations sociales de l'intéressé, lorsqu'il ne les utilise pas lui-même dans son intérêt ou s'il vit dans des conditions d'alimentation, de logement ou d'hygiène précaires en raison de son état mental ou d'une déficience physique.

b) Des dérives unanimement constatées

Les dérives du dispositif de protection juridique des majeurs font l'objet d'un constat très largement partagé. Elles ont été particulièrement bien synthétisées par le rapport du groupe de travail interministériel présidé par Jean Favard en 2000 1 ( * ) , qui pointait particulièrement trois de ses failles :

? le critère légal d'altération des facultés personnelles de l'intéressé a d'abord été largement perdu de vue : l'obligation de présenter un certificat médical attestant de cette altération n'est pas universellement respecté, puisqu'en cas de saisine d'office du juge des tutelles, celui-ci n'est pas obligé d'en requérir l'établissement. Cette exception est d'ailleurs largement utilisée par les juges pour « repêcher » des saisines familiales qui, en l'absence de certificat, seraient déclarées automatiquement irrecevables.

Par ailleurs, les critères retenus par le juge pour ouvrir une mesure de protection s'éloignent parfois sensiblement de cette seule appréciation médicale. De plus, comme en témoigne le tableau suivant, les pathologies rencontrées sont souvent mal caractérisées.

Critères pris en compte par le juge pour l'ouverture
des mesures de tutelle et curatelle d'Etat

Altération mentale et/ou physique mal caractérisée

39,5 %

Surendettement, prodigalité

21,1 %

Troubles psychiques

15,8 %

Débilité légère ou profonde

15,8 %

Psychoses maniaco-dépressives

7,9 %

Démence sénile

5,3 %

Autres

7,9 %

Remarque : enquête portant sur un échantillon de deux cents dossiers de tutelle ou curatelle d'Etat. Le total dépasse 100 % dans la mesure où un cumul de qualification est possible.

Source : rapport sur le fonctionnement du dispositif de protection des majeurs établi par l'inspection générale des finances, l'inspection des services judiciaires et l'inspection générale des affaires sociales, juillet 1998

Il convient notamment de souligner la forte proportion de mesures pour lesquelles la prodigalité, voire le simple surendettement, sont à l'origine de la demande : d'après cette enquête, une mesure sur cinq serait motivée, à titre principal ou subsidiaire, par ce critère.

? La priorité familiale dans la dévolution des mesures a été battue en brèche : les tutelles confiées à des mandataires professionnels atteignent aujourd'hui plus de 41 % des mesures ouvertes par les juges des tutelles.

Plusieurs motifs peuvent conduire le juge à écarter la famille, même lorsqu'elle existe : celle-ci peut être introuvable, rares étant les juges qui ordonnent des recherches approfondies dans ce but ; l'existence d'un conflit familial peut faire obstacle au bon fonctionnement de la mesure ; le juge peut également estimer que l'influence du milieu familial est nocive ; enfin, la famille elle-même peut refuser d'exercer la mesure.

S'agissant tout particulièrement des malades psychiques, il convient en outre de souligner la grande fréquence des certificats médicaux déconseillant l'exercice de la tutelle ou de la curatelle par la famille, pour des raisons liées à l'efficacité du traitement.

Il reste que, d'après le rapport des trois inspections de 1998, dans 45 % des cas, le juge ne motive pas les raisons qui le poussent à constater la vacance de la tutelle et donc à attribuer la mesure à un tiers.

? Enfin, le non-respect de la gradation des mesures conduit à des mesures mal adaptées aux besoins : cette situation s'explique particulièrement par le fait qu'aujourd'hui, rien n'oblige les juges des tutelles à réviser régulièrement les mesures qu'ils prennent. Plus les mesures sont anciennes, plus elles risquent d'être inadaptées. C'est notamment le cas pour les mesures concernant les jeunes adultes handicapés, dont la situation est susceptible de beaucoup d'évolutions. Le manque d'adaptation des mesures est sans doute l'une des raisons pour lesquelles la protection est mal vécue par les intéressés qui la ressentent comme abusive.

B. UNE RÉFORME AMBITIEUSE ET COMPLÈTE

1. La réaffirmation des principes de nécessité, subsidiarité et de proportionnalité des mesures de protection

Parce qu'elle porte atteinte aux droits de la personne, toute mesure de protection doit être justifiée par des raisons juridiques. C'est la raison pour laquelle le projet de loi s'attache à redonner toute sa rigueur à l'application des principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité des mesures.

? Le principe de nécessité : il en résulte principalement que l'ouverture des mesures de protection juridique se limitera désormais aux cas d'altération des facultés mentales, médicalement constatée par un médecin agréé par le procureur de la République. De ce fait, la prodigalité, l'intempérance ou l'oisiveté ne pourront plus motiver un placement sous curatelle. Votre commission reconnaît le bien-fondé de ce recentrage : pourquoi, en effet, priver de leur capacité juridique des personnes dont les besoins de protection se limitent en réalité à une assistance dans la gestion du quotidien ?

Il convient de préciser qu'aucune exception à la non-présentation du certificat médical ne sera plus recevable, dans la mesure où le projet de loi supprime également la possibilité pour le juge de se saisir d'office. Cette possibilité conduisait en effet jusqu'à présent à une multiplication des mesures prises sur la base de signalements automatiques des services sociaux. La saisine est désormais réservée aux proches et au ministère public qui retrouve ainsi son rôle de filtre.

? Le principe de subsidiarité : le projet de loi s'attache à assurer la subsidiarité des mesures de protection juridique entre elles et vis-à-vis de mesures moins contraignantes, relevant soit de l'accompagnement social, soit des régimes de procuration entre époux.

En conséquence, la gradation des mesures est expressément inscrite dans la loi et les doubles mesures, aujourd'hui autorisées et fréquentes, seront dorénavant interdites.

Afin d'assurer en pratique le respect du principe de subsidiarité, le texte prévoit enfin une procédure plus légère pour lever ou alléger la mesure que pour l'aggraver : ainsi, un simple certificat médical de droit commun suffira dans les deux derniers cas et la levée pourra être prononcée d'office par le juge. A l'inverse, l'aggravation ne pourra résulter que d'une demande de la famille ou de la personne chargée de la protection et sera conditionnée à la présentation d'un nouveau certificat établi par un médecin agréé.

? Le principe de proportionnalité : il ouvre la possibilité au juge d'adapter le contenu de chaque mesure, en ajoutant ou enlevant - dès l'origine de la mesure ou au cas par cas - des actes à la liste de ceux pour lesquels la personne doit être assistée ou représentée.

2. Le retour de la priorité familiale

Le projet de loi fait clairement de la protection juridique des majeurs « un devoir pour les familles et la collectivité publique », en redonnant la priorité aux familles à la fois dans l'ouverture de la mesure de protection, dans sa dévolution et dans son exécution.

Le terme de « priorité familiale » est d'ailleurs devenu trop restrictif, puisqu'il s'agit désormais de confier la mesure en priorité non seulement au père ou à la mère, au conjoint, concubin ou partenaire de pacte civil de solidarité, mais aussi à tout parent, allié, voire proche, dès lors que cette personne entretient avec la personne à protéger des liens étroits et stables.

S'agissant du fonctionnement de la mesure, le projet de loi rend toute liberté au juge pour adapter les organes de la protection à la situation familiale de la personne. Alors qu'aujourd'hui, le choix d'un type de tuteur emporte nécessairement une organisation particulière de la tutelle, le juge pourra prévoir un subrogé tuteur ou un conseil de famille quand il l'estimera utile et possible, compte tenu de la situation familiale de la personne protégée.

Le conseil de famille, qui permet de faire concourir l'ensemble de l'entourage de la personne protégée à la prise en charge, devrait ainsi retrouver sa place dans l'organisation de nombreuses tutelles. Son fonctionnement quotidien devrait également être amélioré, du fait de la possibilité qui lui offre le projet de loi de pouvoir, sous certaines conditions, se réunir en dehors de la présence du juge.

Le texte prend surtout acte des difficultés pour les familles à exercer ces mesures et s'attache à y remédier en mettant en place une information des tuteurs familiaux sur leur rôle. Celle-ci pourrait être dispensée par les associations tutélaires existantes, dans la mesure où elles disposent de toutes les compétences requises. Certaines d'entre elles expérimentent d'ailleurs déjà ce type de service. S'agissant des personnes handicapées, elle pourrait également être mise en place dans le cadre des maisons départementales des personnes handicapées.

3. La personne replacée au coeur du dispositif de protection des majeurs

a) L'extension des mesures de protection à la protection de la personne

Conformément à l'attente des familles, le projet de loi consacre la jurisprudence de la Cour de Cassation du 18 avril 1989, selon laquelle «les régimes civils d'incapacité ont pour objet, d'une façon générale, de pourvoir à la protection de la personne et des biens de l'incapable» . Dorénavant donc, sauf mention expresse contraire, la décision d'ouverture d'une mesure de protection portera à la fois sur la protection des biens et sur la protection de la personne.

Cette consécration se traduit d'abord par l'élaboration d'un statut de la personne protégée, dont les droits sont clairement reconnus : le texte prévoit ainsi l'obligation pour la personne chargée de la protection de rechercher, autant que possible le consentement du majeur protégé à sa propre protection. A cet effet, elle doit l'informer de toutes les décisions qu'elle prend à son endroit et le mettre en mesure d'y consentir, en adaptant l'information dispensée à sa capacité de compréhension.

Le texte reconnaît en outre à la personne protégée la liberté de choisir sa résidence et ses relations. De façon plus concrète, il protège son logement de toute aliénation qui ne soit pas commandée par son intérêt supérieur.

La personne protégée se voit également reconnaître une sorte de « domaine réservé », composé d'actes qui ne peuvent valablement être accomplis que par elle seule. Par ailleurs, pour consentir en lieu et place de la personne protégée pour les actes personnels les plus graves, notamment ceux qui mettent en cause son intégrité corporelle ou l'intimité de sa vie privée, le tuteur devra désormais obtenir une autorisation expresse du juge.

b) La création d'un mandat de protection future

Une mesure nouvelle est emblématique de cette reconnaissance de la responsabilité de la personne dans sa propre protection : la création du mandat de protection future .

Ce mandat, déjà prévu dans le droit de nombreux pays européens 2 ( * ) , doit permettre à toute personne capable d'organiser à l'avance sa propre protection ou celle de ses enfants mineurs ou majeurs handicapés.

S'agissant du mandat pour autrui, le mandat de protection future comporte deux innovations substantielles par rapport au régime, déjà existant, du tuteur testamentaire :

- il permet non seulement de désigner la personne chargée d'assurer la protection mais également de définir l'étendue de ses pouvoirs et de donner des directives anticipées au mandataire, par exemple sur la façon dont les biens confiés devront être gérés ;

- il permet aux parents d'envisager non seulement l'hypothèse de leur décès avant leur enfant handicapé, mais aussi celle d'une incapacité qui les mettrait hors d'état d'assurer eux-mêmes sa protection.

Cette mesure était donc tout particulièrement attendue des parents d'enfants handicapés, que l'allongement de l'espérance de vie avec un handicap place devant la perspective de laisser derrière eux un enfant seul et vulnérable.

4. Une nouvelle ligne de partage entre protection juridique et accompagnement social

L'explosion des mesures de protection juridique au cours de ces dernières années conduit à penser que ces mesures sont en partie venues compenser les insuffisances des dispositifs d'accompagnement social.

C'est pourquoi, après avoir recentré la protection juridique sur les personnes atteintes d'une réelle altération de leurs facultés personnelles, le projet de loi s'attache à redonner toute sa place à la protection sociale des majeurs, à travers la création de deux mesures spécifiques, destinées à rendre possible un parcours d'autonomie pour les personnes en grande difficulté dans la gestion de leurs ressources.

Concrètement, le projet de loi met en place un dispositif gradué pour répondre aux difficultés de ceux qui, par leur incapacité à gérer leur budget, se mettent eux-mêmes en danger :

- le premier échelon de cette protection est administratif : la mesure d'accompagnement social personnalisé (MASP) prend la forme d'un contrat entre la personne et le département. Elle comporte elle-même trois degrés, pour mieux s'adapter aux besoins : une simple aide à l'élaboration du budget familial, une gestion directe des prestations sociales avec l'accord du bénéficiaire et enfin une gestion directe sous contrainte mais visant à permettre la poursuite de l'accompagnement social ;

- le second échelon , actionné en cas d'échec de l'accompagnement social, consiste en réalité en une adaptation de la tutelle aux prestations sociales, désormais intitulée « mesure d'accompagnement judiciaire » (MAJ) : mieux positionnée dans le dispositif de protection, elle est clairement subsidiaire par rapport à l'accompagnement social et devient incompatible avec une mesure de protection juridique.

C. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION

1. Améliorer la qualité des expertises médicales et garantir l'accès de tous à la protection juridique

Votre commission approuve le recentrage, opéré par le projet de loi, de la protection juridique des majeurs sur les seules personnes atteintes d'une altération de leurs facultés mentales. Elle se félicite tout particulièrement qu'aucune exception ne soit plus possible à la présentation du certificat médical d'un médecin expert agréé par le procureur de la République avant l'ouverture de toute mesure de protection.

S'agissant cependant de ce certificat médical, elle regrette la disparition de l'obligation, pour le médecin expert, de consulter le médecin traitant de la personne protégée. Lui seul est en effet à même d'éclairer l'expertise sur les antécédents du majeur et sur sa situation familiale et sociale. Elle vous propose donc de rétablir cette obligation.

Il lui paraît également nécessaire d'assurer le libre accès de tous les citoyens à la protection juridique. Cet accès étant conditionné à la production d'un certificat médical établi par un médecin expert, la question du coût de ce certificat devient cruciale. Or, aujourd'hui, il s'établit en moyenne, d'après le rapport du Conseil économique et social sur la réforme des tutelles 3 ( * ) , à 250 euros, des variations très importantes étant possibles, la facturation de cette expertise relevant en effet des honoraires libres.

Un tel coût peut être considérable pour des familles modestes. C'est la raison pour laquelle votre commission prévoit, par amendement, qu'il puisse être pris en charge au titre de l'aide juridictionnelle pour les personnes dont les ressources sont inférieures à un seuil fixé par décret.

2. Préserver la protection des ressortissants français établis hors de France

Votre commission estime qu'il est légitime, à travers la révision périodique des mesures, de chercher à mettre fin aux nombreuses mesures devenues avec le temps sans objet. Mais dans sa volonté de rationalisation, le projet de loi va trop loin sur un point : celui de la levée de la protection quand la personne protégée fixe sa résidence hors de France.

Cette disposition est en effet contraire à la fois au droit international privé qui prévoit que la protection des personnes relève toujours de leur loi nationale où qu'ils se trouvent et à l'article 3 du code civil qui dispose très précisément que « les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les Français, même résidant en pays étranger » .

Votre commission proposera donc de supprimer cette restriction. Elle observe au passage que c'est à l'Etat, et plus particulièrement au ministère des affaires étrangères, de se donner les moyens d'assurer un suivi de ces mesures au niveau des consulats.

3. Ouvrir la possibilité d'un accompagnement social à toute personne en difficulté, quelles que soient ses ressources

En limitant la mesure d'accompagnement judiciaire aux seules prestations sociales, votre commission regrette que le projet de loi ne fasse en réalité que reprendre l'actuelle tutelle aux prestations sociales adulte (TPSA), dont elle ne se distingue qu'en raison de sa subsidiarité par rapport à la MASP.

S'agissant de la MASP, votre commission remarque par ailleurs qu'il s'agit d'une mesure contractuelle dont le contenu doit être laissé, autant que possible, à la libre appréciation des parties. Si l'intéressé et les services sociaux estiment nécessaire une aide à la gestion portant sur l'ensemble des ressources, y compris pour une personne ne percevant aucune prestation, il n'y a aucune raison d'empêcher la réalisation de ce projet.

Par dessus tout, elle constate que, conjuguée à la disparition de la curatelle pour prodigalité, cette limitation signifie également la disparition de toute protection pour les personnes incapables de gérer leurs ressources dès lors qu'elles ne perçoivent pas de prestation sociale.

On peut naturellement adhérer à l'idée que toute personne est libre de dilapider son patrimoine, si elle n'est pas à la charge de la société. Cette idée est toutefois dangereuse et contre productive. Lorsqu'une personne compromet sa sécurité, sa santé ou encore ses obligations familiales ou conjugales, il serait singulier d'attendre qu'elle se trouve dans le besoin et perçoive alors des prestations pour pouvoir assurer sa protection.

C'est la raison pour laquelle votre commission estime préférable d'étendre la MAJ et la MASP à l'ensemble des revenus.

L'Assemblée nationale a déjà autorisé le juge à étendre la MAJ à d'autres revenus lorsque la gestion directe des seules prestations ne suffit pas à assurer la protection de l'individu. Mais cette solution reste en réalité au milieu du gué, car elle continue d'exiger la perception d'au moins une prestation sociale pour y accéder. C'est la raison pour laquelle votre commission supprime ce dernier verrou, en ouvrant d'emblée, par amendement, la MAJ à toute personne, quel que soit le type de revenu qu'elle perçoit.

II. MIEUX ENCADRER L'ACTIVITÉ DES MANDATAIRES JUDICIAIRES PROFESSIONNELS

Dans la plupart des cas, les mesures de protection judiciaires sont assurées par des proches ou des parents. Toutefois, au cours des dernières années, l'éclatement de la cellule familiale et l'éloignement de ses membres ont entraîné la sollicitation de plus en plus fréquente de l'intervention de personnes extérieures à la famille.

A. DES PRATIQUES HÉTÉROGÈNES ET PEU CONTROLÉES

1. La multiplicité des intervenants tutélaires

A l'heure actuelle, un peu plus de la moitié des mesures de protection judiciaire est confiée à des tiers, qu'il s'agisse de personnes physiques ou de services spécialisés. Ces intervenants recouvrent des réalités souvent très diverses - gérants de tutelle privés, associations tutélaires ou encore préposés d'établissements - et dont les activités varient selon la nature des mesures de protection juridique qui leur sont confiées par le juge.

Les situations dans lesquelles ces mesures sont mises en oeuvre sont aussi extrêmement variables. Ainsi, la tutelle exercée sur une personne accueillie dans une clinique psychiatrique par un préposé à cet établissement prendra une forme très différente de la protection assurée par une association tutélaire en charge d'une personne atteinte d'un handicap mental.

Hormis l'obligation légale d'être inscrit sur une liste établie par le procureur de la République, pour les personnes physiques et morales exerçant des mesures de protection, il n'existe par exemple aucune réglementation contraignante en termes de formation ou de qualification pour les professionnels. Les critères de recrutement dans les associations tutélaires notamment n'obéissent à aucune règle particulière et peuvent varier selon leurs propres exigences, car aucun statut n'encadre ni ne reconnaît les métiers de la protection judiciaire.

2. Des contrôles insuffisants ou défaillants

Les services de tutelles font aujourd'hui l'objet d'un contrôle à la fois judiciaire et administratif.

Depuis la loi du 8 février 1995, le contrôle et le visa des comptes de gestion ont été confiés au greffier en chef du tribunal d'instance, tout en laissant au juge des tutelles la possibilité de l'exercer lui-même. Selon le rapport du Conseil économique et social 4 ( * ) , compte tenu de la faiblesse des moyens dévolus au contrôle, celui-ci se limite bien souvent au simple enregistrement des dossiers. Les chiffres sont éloquents : il existe seulement quatre-vingt juges des tutelles en équivalents temps plein pour plus de 700 000 personnes protégées.

Cela explique par exemple que le contrôle annuel des comptes des personnes protégées ne soit pas toujours réalisé dans de bonnes conditions. Ces comptes sont, en effet, rarement vérifiés, tout au moins de façon approfondie. Par ailleurs, les greffiers en chef, auxquels a été transférée la responsabilité du contrôle, ne possèdent pas véritablement les compétences comptables permettant d'en assurer la réalisation et ne disposent par ailleurs d'aucune assistance extérieure. Ce contrôle est donc souvent lacunaire ou inopérant.

Parallèlement, les Ddass sont en charge du contrôle de 360 services de tutelles essentiellement gérés par des associations, qui traitent les mesures de protection d'environ 230 000 majeurs. L'objet de ces contrôles administratifs varie selon le type de mesures auquel il s'applique (tutelle aux prestations sociales destinées aux adultes, tutelle ou curatelle), mais ils portent principalement sur les comptes des associations. La vérification de leur authenticité est rarement effectuée, les Ddass se contentant souvent, faute de moyens, d'enregistrer ceux qui leur ont été transmis par les associations.

3. Des risques de dérives ou d'abus

Plusieurs pratiques font l'objet de critiques récurrentes de la part des familles ou des associations en charge de personnes âgées ou handicapées :

- d'une part, l'ouverture de « comptes pivots » au nom des associations qui assument la gestion des dépenses et des recettes de plusieurs personnes placées sous protection, alors que celles-ci devraient créer un compte au nom de chaque personne majeure protégée ;

- d'autre part, la tendance à se soucier en premier lieu de la bonne gestion patrimoniale des ressources de la personne protégée au détriment de son confort matériel quotidien.

Au-delà de ces pratiques contestables, on relève des abus particulièrement graves, que seuls des contrôles sur pièces et sur place peuvent déjouer. Il peut s'agir de pratiques frauduleuses (détournements de fonds, abus de confiance, faux et usage de faux, spoliations,...) ou de décisions non respectueuses de l'intégrité de la personne protégée et de ses intérêts sanitaires et sociaux (décision de placement rapide, gestion arbitraire et stricte des revenus...).

Enfin, il existe des risques réels de dérives liées à la mise en oeuvre de mesures de protection judiciaire par des personnes désignées par les établissements au sein de leurs personnels administratifs ou sociaux. En effet, le mandataire préposé étant à la fois juge et partie, il ne peut être impartial dans la relation que la personne protégée entretient avec son établissement d'accueil. Cette question se pose avec d'autant plus d'acuité lorsqu'il s'agit de trancher un litige relatif à sa participation financière aux frais d'hébergement ou à sa prise en charge médicale et sociale.

B. L'HARMONISATION ET L'ENCADREMENT DES CONDITIONS D'EXERCICE DES MANDATAIRES JUDICIAIRES À LA PROTECTION DES MAJEURS

1. La création d'un statut commun à l'ensemble des mandataires judiciaires professionnels

Le projet de loi entend harmoniser les conditions d'exercice des intervenants en charge de la protection des majeurs, extérieurs à la famille, en créant un statut unique pour les professionnels. C'est l'un des objectifs majeurs qu'il propose.

En effet, la moitié des mesures de protection judiciaire est confiée à des tiers, qu'il s'agisse de personnes physiques ou de services spécialisés. On l'a vu, ces intervenants recouvrent des réalités très diverses et sont régis par des textes anciens, qui ne sont plus adaptés aux situations actuelles.

C'est pourquoi l'ensemble des opérateurs tutélaires seront regroupés sous l'appellation commune de « mandataires judiciaires à la protection des majeurs ». Le texte précise également la nature et les spécificités de leur activité : celle-ci est définie comme « la mise en oeuvre, à titre habituel, de mesures judiciaires de protection des majeurs ».

Pour être habilité à exercer, tout opérateur devra respecter des conditions communes d'âge, de moralité, de formation et d'expérience professionnelle, dont l'effectivité sera contrôlée par le préfet et, selon les cas, par le procureur de la République. S'il remplit ces conditions, le mandataire judiciaire sera inscrit sur une liste départementale, désormais centralisée par le préfet.

Pour être inscrit sur cette liste, les mandataires, selon les catégories auxquelles ils appartiennent, devront faire l'objet préalable d'un agrément, d'une autorisation ou d'une déclaration :

- les gérants de tutelle privés devront recevoir un agrément du préfet après avis conforme du procureur de la République ;

- les services tutélaires rattachés à des associations ou à des organismes de sécurité sociale, ayant désormais la qualité de services sociaux et médico-sociaux, seront soumis à une procédure spécifique d'autorisation, nécessitant un avis conforme du procureur de la République ;

- les gérants de tutelle, préposés des établissements sanitaires et sociaux, feront, pour leur part, l'objet d'une simple déclaration auprès du préfet après information du procureur de la République.

L'ensemble des habilitations, qu'il s'agisse des agréments, des déclarations ou des autorisations, seront délivrées dans le cadre du schéma régional d'organisation sociale et médico-sociale, ce qui devrait permettre une meilleure régulation de l'offre de services.

2. La professionnalisation de l'activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs

Le projet de loi exige désormais l'acquisition d'une formation et d'une expérience professionnelle spécifiques pour accéder à la profession de mandataires judiciaires à la protection des majeurs.

Un groupe de travail, animé par la direction générale des affaires sociales (DGAS), a été mis en place à la fin de l'année 2006 pour élaborer de véritables référentiels professionnels en ce domaine. Un décret précisera les diplômes requis pour l'exercice de cette profession et rénovera le certificat national de compétence attestant d'une qualification en cette matière pour l'ouvrir à un plus grand nombre de candidats.

Parallèlement, il conviendra de définir les normes de recrutements applicables aux associations et services tutélaires, susceptibles de faire l'objet d'un contrôle par les services de l'Etat.

Ainsi, la qualité des prestations offertes devrait sensiblement s'améliorer. Les évaluations prévues du dispositif professionnel de protection judiciaire devraient en attester dans les cinq ans à venir.

3. L'uniformisation des droits des majeurs protégés

Afin de garantir les droits et libertés des personnes dont ils assurent la protection, les mandataires judiciaires devront se soumettre à certaines obligations : par exemple, la remise d'une notice d'information sur leur rôle de mandataire et d'une charte des droits de la personne protégée.

Par ailleurs, l'ensemble des libertés et droits applicables aux usagers des services sociaux et médico-sociaux seront étendus aux prestataires des services tutélaires qui se sont vus reconnaître cette qualité. Il s'agit notamment du respect de la personne, du libre choix entre des prestations adaptées, d'une prise en charge et d'un accompagnement individualisé respectant le consentement de la personne, le principe de confidentialité, l'information sur la prise en charge, sur les droits fondamentaux et les voies de recours, ainsi que la participation de la personne, avec l'aide éventuelle du tuteur légal, au projet d'accueil et d'accompagnement qui la concerne.

En outre, pour des raisons de transparence, la pratique des comptes pivots, qui permet aux gérants de tutelle de regrouper sur un compte libellé à leur nom tous les avoirs des personnes dont ils assurent la protection judiciaire et de percevoir les intérêts générés par ce compte, sera définitivement interdite . Toutes les opérations réalisées pour le compte des personnes protégées devront ainsi transiter par des comptes individuels et nominatifs, qui seront annuellement présentés au greffier en chef assortis de toutes les pièces justificatives nécessaires au contrôle.

C. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION

La nouvelle organisation du système de protection judiciaire constitue indéniablement un progrès majeur. L'ensemble de ces dispositions devraient en effet permettre d'harmoniser les pratiques et de garantir une meilleure qualité de service aux personnes protégées.

Toutefois, votre commission estime que des améliorations pourraient être utilement apportées à ces dispositions sur deux points importants.

1. Constituer une liste nationale

Si l'établissement d'une liste départementale unique, rassemblant tous les intervenants, quel que soit leur statut, représente une amélioration significative, votre commission estime toutefois qu'il serait utile d'établir parallèlement un fichier national des opérateurs interdits d'exercice, afin qu'un mandataire judiciaire qui se serait vu retirer son habilitation ne puisse aisément s'inscrire dans un autre département.

Ce fichier, renseigné et tenu à jour par les préfets qui sont en charge des retraits, annulations ou suspensions d'agréments ou de déclarations, serait également consultable par le procureur de la République.

2. Interdire la désignation de mandataires judiciaires à la protection des majeurs préposés d'un établissement social ou médico-social

Pour éviter le risque de dérives observées dans certains établissements accueillant et accompagnant des personnes majeures handicapées ou âgées, votre commission propose de supprimer, pour ces seuls établissements, la faculté de désigner parmi leurs personnels un préposé pour exercer l'activité de mandataire judiciaire. Un tuteur ne saurait en effet être à la fois juge et partie.

Toutefois, selon les informations recueillies par votre rapporteur, le nombre de mesures actuellement prises dans ce cadre s'élèverait à 28 000. Votre commission a donc jugé utile de prévoir une période transitoire de cinq ans, afin de laisser le temps au juge des tutelles de réaffecter l'ensemble de ces mesures à des mandataires indépendants des établissements.

Pour les établissements de santé ou hospitaliers, pour lesquels les séjours sont généralement de plus courte durée, il n'apparaît pas nécessaire d'opter pour le même principe. Aussi, en vertu des nouvelles dispositions du projet de loi, ces établissements devront obligatoirement désigner un préposé, dès lors que leur capacité d'accueil dépassera quatre-vingts lits.

III. RATIONALISER LE FINANCEMENT DE LA PROTECTION JURIDIQUE DES MAJEURS

Selon l'avis adopté en septembre 2006 par le Conseil économique et social sur le rapport de Rose Boutaric, le coût total du dispositif de protection s'élèverait à 517 millions d'euros, montant qui ne cesse de croître depuis 1992, faute d'une véritable maîtrise des flux. Le nombre des seules mesures de tutelles et curatelles d'État atteignait, au 31 décembre 2004, 178 747, soit une augmentation de 8,5 % par rapport à 2003. Il est estimé pour 2006 à 209 200. Ainsi le rapport du conseil note-t-il que la protection juridique des majeurs coûte « de plus en plus cher à la collectivité, et notamment à l'État, sans réelle amélioration de la qualité du service rendu ».

A. LA GÉNÉRALISATION DU PRINCIPE DE LA PARTICIPATION DES MAJEURS PROTÉGÉS AU FINANCEMENT DES MESURES DE PROTECTION

1. La participation des majeurs protégés au financement des mesures de protection

Les modes actuels de financement des mesures de protection sont disparates et plus ou moins avantageux selon les situations, le type et le mode d'exercice de la mesure prononcée. Le financement peut reposer uniquement sur des prélèvements sur les ressources des majeurs protégés, reposer uniquement sur des financements publics ou résulter d'une combinaison entre les deux sources de financement. Il en résulte des inégalités préjudiciables à l'ensemble des intéressés : aux personnes protégées (régime de prélèvement inéquitable), aux opérateurs (allocation inadaptée des ressources) et aux financeurs publics (absence de maîtrise de la dépense).

En cas de tutelle, la rémunération des gérants est financée par le majeur protégé, le pourcentage du prélèvement variant, selon qu'il s'agit d'actes de gestion des revenus ou d'autres actes, en fonction d'une répartition des revenus par tranches.

En ce qui concerne la TPSA, les mesures sont financées par les organismes débiteurs des prestations mises sous tutelle : essentiellement la caisse nationale d'allocations familiales. Aucun prélèvement n'est effectué sur les ressources de la personne.

En ce qui concerne les tutelles et curatelles d'Etat, la rémunération des tuteurs et curateurs est financée par les majeurs protégés en fonction de leur capacité contributive, l'Etat assumant la différence entre ce prélèvement et un prix plafond fixé au niveau national.

Le tableau suivant indique la répartition du financement des différentes mesures de protection.

En millions d'euros

Coût du dispositif non réformé
(financeurs publics et participation des personnes)

2002

2003

2004

2005

2006 (estimation)

Tutelle
et curatelle d'Etat

Prélèvements

32,0

34,4

37,3

40,8

43,0

Financement public

134,0

146,6

170,2

185,0

206,4

TOTAL

166,0

181,0

207,5

225,8

249,4

TPSA

Prélèvements

Financement public

132,1

135,5

139,0

139,8

137,0

TOTAL

132,1

135,5

139,0

139,8

137,0

Gérance privée

Prélèvements

21,7

23,6

25,5

27,5

30,2

Financement public

TOTAL

21,7

23,6

25,5

27,5

30,2

Gérance hospitalière

Prélèvements

14,9

16,3

17,6

19,0

20,6

Financement public

41,7

47,0

51,5

56,4

61,9

TOTAL

56,6

63,3

69,1

75,4

82,5

Ensemble du dispositif

Prélèvements

68,6

74,3

80,4

87,3

93,8

Financement public

307,8

329,1

360,7

381,2

405,3

TOTAL

376,4

403,4

441,1

468,5

499,1

Le projet de loi unifie ces dispositifs en inscrivant dans l'article L. 461-4 du code de l'action sociale et des familles le principe selon lequel le coût des mesures exercées par les mandataires judiciaires à la protection des majeurs est à la charge totale ou partielle de la personne protégée, en fonction de ses ressources. Le texte précise que lorsqu'il n'est pas intégralement supporté par la personne protégée, c'est-à-dire lorsqu'il excède leur capacité contributive, le coût des mesures est pris en charge par un financement public.

Les modalités de calcul de la participation de la personne protégée seront fixées par décret en Conseil d'Etat en fonction des ressources de l'intéressé. Il est notamment envisagé de ne procéder à aucun prélèvement si ces ressources sont inférieures au minimum vieillesse ou à l'allocation adulte handicapé. D'après les estimations de la direction générale de l'action sociale, les montants perçus au titre de la participation des majeurs protégés avoisineraient 233,6 millions d'euros en 2011. L'accroissement escompté des ressources s'élèverait alors à environ 106,5 millions d'euros.

Par ailleurs, le projet de loi prévoyait la récupération des financements publics sur la succession des majeurs protégés dont les ressources sont insuffisantes pour justifier leur participation au financement de leur protection juridique. L'Assemblée nationale a supprimé cette disposition.

2. Le partage des financements publics complémentaires

En ce qui concerne le partage entre l'Etat, le département et les organismes de sécurité sociale du financement public destiné à compléter le prélèvement sur les ressources du majeur protégé, le projet de loi prévoit des modalités largement calquées sur les solutions en vigueur.

Dans l'hypothèse du mandat spécial, de la curatelle ou de la tutelle, le financement incombera à l'Etat sauf si le bénéficiaire perçoit une prestation sociale (le financement reviendra alors à l'organisme qui verse la prestation, cette charge sera assumée par l'organisme attribuant le montant le plus élevé si plusieurs prestations sont allouées). Dans l'hypothèse d'une mesure d'assistance judiciaire, le financement incombera au département lorsque la personne protégée reçoit une prestation du département, ou bien à l'organisme de protection sociale dont la personne protégée reçoit éventuellement une prestation. En cas de prestations multiples, la prestation la plus importante déterminera la personne à qui incombe le financement du mandat.

B. LE CALCUL DU FINANCEMENT PUBLIC : PASSAGE AU SYSTÈME DE LA DOTATION GLOBALE

1. L'expérimentation de la dotation globale et la généralisation du système

Le second élément important du volet financier du projet de loi est l'instauration du financement public des services tutélaires du secteur associatif sous la forme d'une dotation globale définie annuellement en fonction de critères d'activité et de besoins chiffrés.

Le texte entérine ainsi une expérimentation lancée en 2004 dans dix départements, étendue en 2005 à six autres départements, puis à onze autres en 2006. L'objectif de ce processus était, d'une part, d'apprécier la pertinence et la faisabilité du dispositif, d'autre part, de préparer techniquement les associations, les services déconcentrés de l'Etat et les organismes finançant les tutelles aux prestations sociales adultes (TPSA) à ce mode de financement avant sa généralisation, sachant que la dotation globale a été conçue pour permettre à la puissance publique d'apprécier de manière plus précise les besoins réels des prestataires et d'allouer les ressources de façon équitable sur le territoire.

Les dotations globales ont été versées aux services expérimentateurs respectivement par l'Etat et par l'organisme débiteur principal des prestations sociales. Leurs montants ont été fixés par les Ddass à la suite d'une procédure contradictoire.

Les deux années d'expérimentation ont permis de conclure que ce mode de financement est plus approprié que le financement sous forme de « mois mesures » . Conformément à son objectif, il permet, grâce à la mise en place d'indicateurs, d'allouer les ressources au regard de l'activité de l'association et en tenant compte de ses spécificités.

Lors de la première année d'expérimentation, l'utilisation des indicateurs pour fixer les dotations globales a été jugée insuffisante. Celles-ci ont été fixées essentiellement à partir de l'indicateur relatif au nombre de mesures par établissement.

Lors de la deuxième année d'expérimentation, l'utilisation des indicateurs a été plus satisfaisante, quoique encore insuffisante et très variable selon les départements. Les dotations ont été souvent fixées au regard d'un seul indicateur.

Les indicateurs, en dépit de ces difficultés, ont été jugés pertinents par les Ddass et les associations tutélaires. Les fédérations nationales se sont également, semble-t-il, déclarées globalement satisfaites, tout en souhaitant que trois indicateurs soient retenus pour fixer les dotations : le poids moyen de la mesure par majeur protégé, la valeur du point-service et le nombre moyen de mesures par établissement.

Néanmoins, à l'issue des deux premières années d'expérimentation, il a été jugé nécessaire d'expertiser de nouveaux indicateurs et de fiabiliser ceux déjà mis en place.

Le projet de loi énonce le principe selon lequel le financement des services mandataires judiciaires à la protection des majeurs qui mettent en oeuvre les mesures ordonnées par l'autorité judiciaire au titre du mandat spécial exécuté dans le cadre de la sauvegarde de justice, au titre de la curatelle ou de la tutelle ou au titre de la mesure d'assistance judiciaire du projet de loi est désormais assuré sous la forme d'une dotation globale .

Échappent au principe les centres hospitaliers, les établissements de santé privés à but non lucratif admis à participer au service public hospitalier et les établissements de santé privés à but non lucratif ayant opté pour la dotation globale de financement : déduction faite, bien entendu, des prélèvements effectués sur les ressources de la personne protégée, ces services restent financés par la dotation annuelle de financement de ces établissements.

Echappent aussi au principe de la dotation globale les établissements d'hébergement de personnes âgées ou de personnes handicapées et les établissements dispensant des soins de longue durée : déduction faite, à nouveau, des prélèvements effectués sur les ressources de la personne protégée, ces services restent financés par le budget ou par l'état des prévisions de recettes et de dépenses de l'établissement gestionnaire.

2. L'impact financier de la réforme

Evalué pour 2008 à 458,6 millions d'euros, le coût du dispositif existant pour les financeurs publics s'élèverait en 2013 à 644 millions d'euros en l'absence de réforme, mais à 496 millions d'euros après la mise en oeuvre de celle-ci.

Cette moindre progression de la dépense serait due au ralentissement de la croissance du nombre des mesures judiciaires, résultant de la mise en place du dispositif social confié au département et à la révision des mesures judiciaires prévue dans le code civil. Le nombre de mesures est estimé à 470 377 en 2008. En 2013, à dispositif constant, il serait de 645 978, ce qui représente une augmentation de 37,3 %. Après la réforme, il ne s'élèverait qu'à 545 887, soit une augmentation de 16,1 %.

Le deuxième facteur de maîtrise de la dépense tient à l'augmentation des prélèvements sur les revenus des majeurs protégés. Ce produit est évalué à 83 millions d'euros en 2009 et à 109 millions d'euros en 2013.

Par ailleurs, l'harmonisation de la rémunération, qui consiste à réduire la disparité des coûts afférents à chaque mesure quand la lourdeur de la prise en charge ne la justifie pas, diminuerait la dépense de 39,9 millions d'euros en 2009.

Enfin, la dotation globale doit permettre une plus grande efficacité du dispositif de financement public. L'économie réalisée est évaluée, en 2009, première année de mise en oeuvre de la réforme, à 28,2 millions d'euros.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE PREMIER - DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE CIVIL

Article 5 (art. 414 à 495-9 du code civil) - Organisation de la protection juridique des majeurs

Objet : Cet article propose une nouvelle rédaction du titre du code civil relatif aux majeurs protégés par la loi dont il regroupe les articles en trois chapitres : le premier détermine les dispositions relatives à la capacité et à la responsabilité des majeurs, le deuxième précise les règles applicables à chaque mesure de protection et le dernier crée une nouvelle d'assistance judiciaire.

Cet article, qui réorganise et réécrit entièrement le titre XI du livre premier du code civil consacré aux majeurs protégés par la loi, constitue le coeur du présent projet de loi. Il remplace les quatre chapitres actuels de ce titre, respectivement consacrés aux dispositions applicables à tous les majeurs protégés et à chacune des mesures de protection juridique existantes, par trois chapitres :

- le premier précise les règles générales relatives à la capacité et à la responsabilité des majeurs ;

- le deuxième détaille les règles applicables à chacune des mesures de protection juridique des majeurs. Celles-ci sont désormais au nombre de quatre : aux trois mesures existantes prononcées par le juge (tutelle, curatelle et sauvegarde de justice), s'ajoute désormais une mesure de protection conventionnelle, le mandat de protection future ;

- le dernier crée une nouvelle mesure de protection, judiciaire puisque prononcée par le juge mais non juridique dans la mesure où elle n'entraîne pas d'incapacité : la mesure d'assistance judiciaire .

Au total, cet article réécrit près d'une centaine d'articles du code civil dont l'examen détaillé figure au rapport de la commission des lois, saisie au fond du texte 5 ( * ) .

Saisie pour avis, votre commission se propose d'étudier uniquement les dispositions ayant des conséquences sur les matières qui relèvent de sa compétence.

Chapitre premier - Des dispositions générales (art. 414 à 424 du code civil)

I - Le texte proposé

Le chapitre premier rappelle les règles générales en matière de capacité et de responsabilité des majeurs. Après un article liminaire ( article 414 ) qui fixe l'âge de la majorité à dix-huit ans, ce chapitre est divisé en deux sections :

la section 1 précise d'abord les conditions de validité des actes passés par les majeurs ( article 414-1 ), les règles applicables à la reconnaissance de leur nullité pour insanité d'esprit ( article 414-2 ) et celles relatives à la responsabilité des majeurs pour les actes accomplis sous l'empire d'un état d'insanité ( article 414-3 ). Bien que leur numérotation ait changé, ces dispositions ne sont pas modifiées sur le fond par rapport au droit actuellement en vigueur.

la section 2 regroupe les dispositions communes à tous les majeurs protégés par la loi, quel que soit ce régime de protection : elle couvre donc aussi bien les mesures de protection juridique prononcées par le juge (tutelle, curatelle et sauvegarde de justice) que les mesures de protection juridique conventionnelles (mandat de protection future) ou celles de protection non juridique prononcées par le juge (mesure d'assistance judiciaire).

Cette section précise d'abord les finalités de la protection des majeurs ( article 415 ), puis les pouvoirs du juge en matière de surveillance de l'exécution des mesures ( article 416 ) et, enfin, ses pouvoirs de sanction envers les personnes chargées de la protection des majeurs ( article 417 ). A ce stade, votre commission relève deux nouveautés :

- la mise en lumière des deux finalités des mesures de protection , qui n'apparaissaient pas aussi clairement dans la rédaction actuelle du code civil : il est ainsi expressément précisé que les mesures de protection sont prises dans l'intérêt des personnes et en vue de favoriser, autant que possible, leur autonomie . Ces objectifs s'inscrivent dans la continuité des dispositions de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui a fait des mesures de protection juridique une composante du droit à compensation des conséquences du handicap ;

- la création de nouveaux pouvoirs dévolus au juge des tutelles : le droit en vigueur lui donne trois pouvoirs de contrôle sur l'exécution des mesures de protection, qui vont d'une simple possibilité de faire visiter les personnes protégées à la convocation des personnes chargées de la protection pour leur enjoindre de prendre les mesures qu'ils estiment nécessaires, le non-respect de ces injonctions étant sanctionné par une amende. Le projet de loi ajoute à ces pouvoirs celui de prononcer le dessaisissement et la radiation des mandataires coupables de manquement caractérisé à leur mission de protection.

Cette même section envisage ensuite les différents cas où il peut être mis fin à une mesure de protection judiciaire ( article 418 ) et les obligations des héritiers de la personne chargée de la protection en matière de conservation des comptes en cas de décès de celle-ci ( article 418-1 ).

Elle pose également le principe de la gratuité des fonctions de protection des majeurs, sauf lorsque celle-ci est dévolue à un professionnel . Dans ce second cas, elle précise que le financement de la mesure doit reposer à titre principal sur le majeur protégé et à titre subsidiaire seulement sur la collectivité publique ( article 419 ). La rémunération des mesures de protection par prélèvement sur les ressources des majeurs protégés et par subvention publique doit être exclusive de toute autre forme d'avantage financier ( article 420 ).

Ces deux articles ne font ici que poser les grands principes applicables à la rémunération des mesures de protection des majeurs qui sont développés par les articles 9, 12 et 14 du présent projet de loi. Ceux-ci inscrivent dans le code de l'action sociale et des familles les règles relatives à la tarification des services tutélaires et à leur financement.

Ces nouvelles règles permettent de mettre fin aux disparités observées jusqu'ici dans les règles de prélèvement sur les ressources des majeurs : aujourd'hui en effet, suivant le type de mesure et le type de tuteur choisi par le juge, ces prélèvements varient de rien - pour la tutelle aux prestations sociales - à 100 % du coût de la mesure, pour les mesures confiées à des gérants de tutelle privés. Ce mode de financement particulièrement inéquitable pour les majeurs protégés était également source d'effets pervers, les opérateurs tutélaires tentant d'effectuer un tri parmi les mesures susceptibles de leur être confiées en fonction du montant de leur rémunération.

La section 2 définit enfin les conditions dans lesquelles les organes chargés de la tutelle ( article 421 ), l'autorité judiciaire et le mandataire judiciaire à la protection des majeurs ( article 422 ) et le mandataire de protection future ( article 424 ) engagent leur responsabilité en cas de dommage subi par le majeur protégé. Dans tous les cas excepté celui de la curatelle, il s'agit d'une responsabilité pour faute simple. Le texte précise également les règles de prescription applicables à ces actions en responsabilité : celles-ci se prescrivent par cinq ans à compter de la fin de la mesure ( article 423 ).

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre cinq amendements rédactionnels ou de coordination, l'Assemblée nationale a adopté quatre amendements à ce chapitre :

- conformément au principe de respect des droits de la défense, le premier oblige le juge à entendre le mandataire à la protection des majeurs préalablement à toute décision de dessaisissement ou de radiation de la liste des opérateurs agréés ;

- le deuxième transfère les dispositions relatives aux obligations des héritiers de tout mandataire à la protection des majeurs en matière de conservation des comptes à l'article 6 du présent projet de loi, qui rassemble déjà l'ensemble des dispositions relatives à l'élaboration, à la vérification et à l'approbation des comptes des mandataires ;

- le troisième interdit aux mandataires judiciaires de délivrer un mandat de recherche des héritiers de la personne protégée : il s'agit de mettre un terme à des pratiques que le législateur a dénoncées lors de la réforme du droit des successions et qui consistaient pour les gérants de tutelle à mandater des généalogistes pour retrouver les héritiers des personnes placées sous leur protection et à prélever ensuite une commission sur la succession ;

- le dernier prévoit enfin une exception au régime de responsabilité limitée des curateurs, en cas de curatelle renforcée : dans la curatelle ordinaire, le curateur ne peut jamais agir seul, puisqu'il assiste la personne protégée et ne la représente pas. C'est la raison pour laquelle le texte prévoit qu'il n'est possible d'engager la responsabilité du curateur que pour dol ou faute lourde. En revanche, dans la curatelle renforcée, le curateur reçoit du juge l'autorisation d'accomplir seul certains actes, ce qui rapproche alors ses pouvoirs de ceux d'un tuteur. C'est la raison pour laquelle l'Assemblée nationale a estimé que dans ce cas particulier, la responsabilité du curateur pourrait être recherchée pour faute simple.

III - La position de votre commission

Votre commission se félicite tout particulièrement de l'harmonisation du financement des mesures de protection des majeurs, qui mettent fin à des discriminations difficilement acceptables, tant pour les majeurs protégés - qui ressentaient les prélèvements opérés sur leurs ressources comme particulièrement arbitraires - que pour les opérateurs tutélaires.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter ce chapitre sans modification.

*

Chapitre II - Des mesures de protection juridique des majeurs (art. 425 à 494 du code civil)

Le chapitre II détaille le régime de chaque mesure de protection juridique des majeurs. Il se décompose en cinq sections : la première rassemble les dispositions applicables à l'ensemble des mesures de protection juridique, la deuxième présente celles applicables aux seules mesures prononcées par le juge (par opposition à la mesure de protection conventionnelle que constitue le mandat de protection future), la troisième décrit le régime de la sauvegarde de justice, la quatrième précise celui de la tutelle et de la curatelle et la dernière crée le nouveau mandat de protection future.

Section 1 - Des dispositions générales (art. 425 à 427 du code civil)

I - Le texte proposé

Cette section rassemble, en trois articles, les dispositions relatives à l'ensemble des mesures de protection juridique, c'est-à-dire à la fois à la tutelle, à la curatelle, à la sauvegarde de justice et au mandat de protection future.

L' article 425 réaffirme tout d'abord les grands principes applicables à la protection juridique des majeurs :

- il rappelle le principe de nécessité de la protection : compte tenu des limitations importantes apportées à la liberté des personnes concernées par ces mesures, les motifs pour lesquels une protection juridique peut être demandée sont strictement encadrés. Désormais, seule une altération médicalement constatée des facultés mentales - ou corporelles si celle-ci empêche la personne d'exprimer tout consentement - peut conduire le juge à prononcer une mesure de protection juridique. Disparaît par conséquent la possibilité pour le juge d'ouvrir des mesures pour intempérance, oisiveté ou prodigalité ;

- il étend explicitement la protection juridique à la protection de la personne : mettant fin à la vision exclusivement patrimoniale qui avait prévalu lors du vote de la loi du 3 janvier 1968, il consacre dans la loi un principe qui avait déjà été affirmé par la Cour de Cassation, dans un arrêt de principe du 18 avril 1989. Sur cette base, le projet de loi introduit une série d'articles relatifs aux droits de la personne protégée, prévoyant la préservation de sa sphère d'autonomie et l'obligation de recueillir son consentement dans des formes adaptées à ses capacités.

L' article 426 vise ensuite à garantir la pérennité du cadre de vie du majeur protégé . Il reprend, en les approfondissant, les dispositions aujourd'hui fixées à l'article 490-2 du code civil. Il protège ainsi le logement et les meubles du majeur de toute mesure de disposition définitive, sauf autorisation expresse du juge et sous réserve d'un certain nombre de conditions :

- lorsque la personne est propriétaire de son logement, la personne chargée de la protection peut le mettre en location pour la durée de la prise en charge du majeur par une structure de soins ou une structure médico-sociale. Mais le bail prend la forme d'une « convention de jouissance précaire » , ce qui signifie qu'il prend fin de plein droit dès que la personne est en mesure de revenir chez elle. Le texte écarte ainsi toute application des règles de droit commun relatives au droit au maintien dans les lieux et au renouvellement du bail pour le locataire ;

- s'il devient nécessaire de disposer du logement, c'est-à-dire de le vendre ou de le grever d'une hypothèque dans le cas d'une personne propriétaire, ou de résilier le bail pour une personne locataire, ces actes doivent être autorisés par le juge des tutelles ou le conseil de famille. L'avis préalable du médecin traitant est en outre requis si cet acte est motivé par la nécessité de faire prendre en charge la personne par un établissement spécialisé.

L' article 427 remédie à une critique récurrente adressée aux gérants de tutelle, en leur interdisant de regrouper les fonds des personnes protégées qu'elles suivent sur un compte pivot .

Cette pratique était doublement contestable : elle nuisait d'abord à la transparence de la gestion des fonds par les opérateurs tutélaires et se trouvait à la source de nombreuses irrégularités dues au mieux à des difficultés de comptabilité interne, au pire à des détournements de fonds ; elle était également contraire à l'équité, puisqu'elle conduisait la personne chargée de la mesure de protection à percevoir sur son propre compte les intérêts liés aux fonds de ses pupilles, ce qui constituait une rémunération indue.

Pour y mettre un terme, le projet de loi impose donc au mandataire de conserver l'ensemble des comptes existants de la personne protégée quand elle en a et de lui ouvrir un compte individuel et nominatif lorsqu'elle n'en a pas. Toute modification ultérieure de ces comptes doit recevoir l'assentiment du juge ou du conseil de famille.

En outre, dans certains cas, notamment lorsque le patrimoine de la personne est important, le juge ou le conseil de famille peuvent exiger du mandataire l'ouverture d'un compte au nom de la personne protégée auprès de la Caisse des dépôts et consignation.

Dans tous les cas, l'ensemble des transactions réalisées pour le compte de la personne protégée doit transiter exclusivement par ses comptes. Au besoin, lorsque la personne protégée est interdite bancaire, le mandataire peut recevoir procuration pour les faire fonctionner. Il est également précisé que les intérêts produits par les fonds reviennent exclusivement à la personne protégée.

Une seule exception à la règle des comptes pivots est admise, en faveur des mandataires préposés d'établissements de soins ou d'établissements médico-sociaux soumis à la comptabilité publique : dans ce cas précis, le Gouvernement a estimé que l'application de ses règles à la gestion des fonds des personnes protégées permettait, même en l'absence de comptes individuels, de garantir la transparence des opérations financières réalisées.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre cinq modifications rédactionnelles, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à réparer un oubli : pour assurer le respect total du principe d'interdiction des comptes pivots, elle a précisé que les opérations devant obligatoirement transiter par le compte personnel du majeur protégé sont non seulement les opérations de paiement et de gestion patrimoniale mais aussi les opérations d'encaissement.

III - La position de votre commission

Les dispositions de cette section comptent parmi les plus importantes du présent projet de loi. Votre commission approuve tout particulièrement la disparition des comptes pivots, maintes fois dénoncés. Il était en effet anormal de priver les majeurs protégés de revenus qui leur revenaient de droit et qui pouvaient atteindre des sommes considérables - jusqu'à 300 000 euros par an pour certaines associations tutélaires, selon les chiffres du rapport publié en 1998 par les trois inspections des finances, de la justice et des affaires sociales 6 ( * ) .

Votre commission souhaite également la disparition de la possibilité d'ouvrir une mesure de protection au profit des personnes prodigues, oisives ou intempérantes car il s'agit d'un des points d'équilibre importants de la réforme. Elle devrait conduire à une modification importante du profil des ouvertures de curatelle, pour lesquelles ce motif restait assez fréquemment invoqué : ainsi, le rapport précité des trois inspections indique qu'en 1998, la prodigalité ou une situation de surendettement étaient invoquées dans 21 % des dossiers de protection juridique.

Cette mesure participe à la définition de la nouvelle ligne de partage voulue par le projet de loi entre protection juridique et protection sociale et à laquelle votre commission adhère totalement : il s'agit de réserver la protection juridique, avec les limitations de la liberté individuelle qu'elle entraîne nécessairement, aux personnes qui connaissent une altération réelle de leurs facultés personnelles. La protection des intempérants doit quant à elle relever de l'action sociale, le juge n'intervenant plus que de façon subsidiaire, à travers une mesure de protection judiciaire mais non juridique, c'est-à-dire une mesure non incapacitante du point de vue des droits civils : tel est l'objet de la mesure d'assistance judiciaire créée à la fin du présent article.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cette section sans modification.

Section 2 - Des dispositions communes aux mesures judiciaires (art. 428 à 432 du code civil)

I - Le texte proposé

Cette section, qui rassemble les dispositions communes aux seules mesures de protection juridique prononcées par le juge, réaffirme deux principes fondamentaux de ces mesures : leur subsidiarité par rapport aux mesures moins contraignantes et leur proportionnalité aux besoins réels de protection des individus.

Ainsi, l' article 428 précise que les mesures de protection juridique ne peuvent être prononcées que lorsque les règles de droit commun de la représentation ou la protection assurée dans le cadre du régime matrimonial de la personne sont insuffisantes pour pourvoir à ses intérêts. Le code civil prévoit en effet déjà des mesures visant à pallier momentanément ou durablement les difficultés liées à une incapacité à exprimer un consentement : un conjoint peut ainsi obtenir du juge l'autorisation d'accomplir seul un ou plusieurs actes qui auraient normalement requis l'accord des deux membres du couple, voire de le représenter dans la vie courante.

Cet article demande également au juge, en application du principe de proportionnalité, de déterminer de façon individualisée, l'étendue des actes couverts par la protection : le juge doit donc décider au cas par pas si la mesure s'étend aux biens, à la personne ou aux deux, et s'il est nécessaire d'ajouter ou de soustraire certains actes nécessitant la représentation ou l'assistance du mandataire.

Reprenant à l'identique un article existant du code civil, l' article 429 rappelle ensuite qu'il est possible d'ouvrir une mesure de protection juridique des majeurs pendant la dernière année de la minorité, afin d'assurer une protection continue aux jeunes adultes handicapés.

La présente section prévoit également deux séries de mesures pour assurer un meilleur respect de la nécessité des mesures de protection :

? elle modifie d'abord le champ des personnes susceptibles de demander l'ouverture d'une mesure : ainsi, considérant que leurs relations avec la personne à protéger les rendent capables plus que d'autres de repérer la nécessité d'une protection, l' article 430 élargit le champ des proches fondés à demander l'ouverture d'une mesure.

Sont désormais recevables les demandes introduites non seulement par la personne elle-même, son conjoint, ses parents et ses enfants, mais également celles effectuées par les concubins et partenaires liés par un pacte civil de solidarité, ainsi que par les parents ou alliés sans restriction quant à leur degré de parenté ou d'alliance et toute personne résidant avec la personne à protéger et entretenant avec elle des liens étroits et stables. On peut également ajouter à cette catégorie des proches, le mandataire de protection future - choisi intuitu personnae - constatant l'insuffisance de son mandat.

A l'inverse, le projet de loi supprime la saisine d'office du juge des tutelles. Celle-ci a en effet largement contribué à accroître le nombre des mesures de protection : alors qu'elle devait ne constituer qu'une simple faculté résiduelle, destinée à permettre l'ouverture d'une mesure pour les personnes dépourvues de proches susceptibles d'introduire une demande, cette saisine d'office est vite devenue le principal mode d'ouverture des procédures de protection, au détriment de la priorité conférée aux requêtes d'origine familiale par l'article 493 du code civil. Ainsi, en 2004, 49 % des mesures restaient ouvertes d'office.

Désormais, en dehors de la famille et des proches, seul le procureur de la République sera fondé à demander au juge l'ouverture d'une mesure. Les signalements des établissements et des services sociaux devront donc transiter par le filtre du parquet ;

? elle renforce ensuite l' expertise médicale préalable à l'ouverture de toute mesure de protection : l' article 431 rend ainsi obligatoire la production d'un certificat médical circonstancié, établi par un médecin expert choisi sur une liste établie par le procureur de la République. La production de ce certificat était normalement déjà exigée aujourd'hui, mais la saisine d'office du juge permettait de passer outre et il arrivait fréquemment que le juge sauve ainsi de l'irrecevabilité des requêtes familiales qui en étaient dépourvues.

Le dernier article de cette section ( article 432 ) pose enfin le principe d'une audition de la personne à protéger par le juge. Il n'est possible de déroger à cette audition que sur avis du médecin expert ayant établi le certificat et par décision spécialement motivée. Les raisons qui peuvent pousser à déroger à l'audition sont également limitativement énumérées : celle-ci doit comporter un risque pour la santé de la personne ; elle peut également être écartée lorsque la personne est incapable d'exprimer sa volonté.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre un amendement de coordination, l'Assemblée nationale a adopté huit amendements à cette section :

- le premier précise que le principe de subsidiarité des mesures de protection s'applique non seulement vis-à-vis des dispositifs de droit commun, mais également entre les différentes mesures prononcées par le juge ;

- le deuxième étend la possibilité de prononcer une mesure de protection, pour un mineur émancipé, des seules mesures de protection juridique à l'ensemble des mesures judiciaires, c'est-à-dire également à la mesure d'assistance judiciaire ;

- le troisième supprime l'obligation de justifier d'une résidence commune avec la personne à protéger pour rendre recevable la demande d'ouverture d'une mesure de protection émanant d'un proche non membre de la famille. Cette précision s'avère particulièrement importante dans le cas des personnes accueillies en établissements : lorsque leurs relations avec leur famille sont distendues, aucun proche ne pourrait justifier d'une résidence commune pour demander l'ouverture d'une mesure ;

- le quatrième rétablit la possibilité, pour la personne qui exerce déjà une mesure de protection à l'égard du majeur, de demander l'ouverture d'une autre mesure plus ou moins contraignante : il paraît en effet normal qu'un tuteur ou un curateur puisse saisir le juge pour lui demander de modifier la mesure, afin de l'adapter aux besoins réels de protection de la personne concernée ;

- le cinquième encadre le coût d'établissement du certificat médical exigé à l'appui d'une demande de mise sous protection : l'établissement du certificat par le médecin expert habilité par le procureur de la République n'est pas remboursé par la sécurité sociale et son coût repose aujourd'hui entièrement sur les familles. Les honoraires demandés à l'occasion de ces consultations sont librement fixés par le médecin et leur montant moyen avoisine les 150 euros, avec des variations très importantes d'un professionnel à l'autre. C'est la raison pour laquelle l'Assemblée nationale a décidé de plafonner, par décret, le montant de cette expertise ;

- le sixième rétablit une faculté, pour le médecin expert chargé d'établir le certificat préalable à la demande de mise sous protection, de solliciter l' avis du médecin traitant de la personne à protéger : l'Assemblée nationale a en effet considéré qu'il ne fallait pas entièrement exclure celui-ci de la procédure de mise sous protection car son éclairage est essentiel pour déterminer l'environnement familial et social de la personne à protéger. Il peut également apporter un concours précieux lorsque la personne à protéger refuse de se laisser examiner par le médecin expert ;

- le septième précise que la personne à protéger peut se faire accompagner d'un avocat ou d'une personne de son choix, lors de son audition par le juge : le droit de se faire assister d'un conseil est en effet un droit fondamental, dont le respect est d'autant plus important dans le cas des majeurs vulnérables qu'ils peuvent avoir besoin d'une assistance pour bien comprendre la portée de leur audition ;

- le dernier précise les conditions dans lesquelles le juge peut déroger à son obligation d'auditionner la personne à protéger avant l'ouverture de toute mesure : l'Assemblée nationale a considéré qu'interprétée largement, la disposition du texte qui autorise cette dérogation lorsque la personne « n'est pas apte à exprimer sa volonté » pouvait conduire à faire de l'audition l'exception et non plus la règle, dans la mesure où la demande de mise sous protection vise précisément à protéger les personnes qui ne sont pas aptes à prendre des décisions par elles-mêmes. Elle a donc précisé que l'audition pourra être écartée lorsque l'état de la personne ne lui permet pas d'en comprendre la portée.

III - La position de votre commission

Votre commission ne peut qu'approuver la réaffirmation des principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité des mesures de protection : même si elles visent à assurer la défense des intérêts de la personne protégée, elles restreignent très fortement sa liberté et ne peuvent donc être prononcées que dans les cas où aucune autre solution moins contraignante n'est suffisante et adaptée.

La fin de saisine d'office du juge devrait permettre de mettre un terme à l'inflation des mesures de protection, en infraction parfois avec des formalités substantielles, comme la présentation d'un certificat médical attestant de l'altération des facultés mentales de l'intéressé. Le maintien d'une telle saisine était de toute façon difficilement défendable, car il est contraire aux principes du procès équitable de confier à la même personne le soin de déclencher l'action publique, puis de l'instruire et de la juger.

Votre commission reste toutefois circonspecte quant à l'efficacité du filtre du parquet. A l'heure actuelle, le ministère public peut en effet déjà saisir le juge, sur la base des signalements qu'il reçoit. Or, dans la plupart des cas, il se contente d'apposer son visa et de transmettre le dossier au juge des tutelles. Si l'on souhaite que les parquets civils procèdent à un examen plus approfondi des dossiers, il est indispensable de les doter des moyens humains nécessaires à cette nouvelle mission, faute de quoi ils continueront à saisir systématiquement le juge et la suppression de la saisine d'office n'aura servi qu'à rallonger les procédures pour les demandeurs.

S'agissant du certificat médical indispensable pour demander l'ouverture d'une mesure de protection, votre commission se félicite qu'il devienne enfin universel. Elle s'interroge toutefois sur le soupçon qui semble peser sur le médecin traitant dans la procédure de mise sous protection. S'il lui paraît normal qu'il ne soit pas à même de déclencher lui-même l'ouverture d'une mesure, votre commission considère que l'éclairage qu'il apporte n'est pas redondant avec l'expertise réalisée par le médecin agréé.

Certains professionnels demandent la mise en place d'une expertise médico-sociale préalable à la mise sous protection : votre commission a considéré qu'une telle expertise aurait été très lourde à mettre en place et mobiliserait des moyens considérables, là où le médecin traitant est capable d'apporter toutes les précisions nécessaires sur l'environnement de la personne à protéger. C'est la raison pour laquelle elle vous propose d'aller plus loin que l'Assemblée nationale, par un amendement transformant la simple faculté pour le médecin expert de consulter le médecin traitant de la personne à protéger en une obligation de recueillir son avis.

Votre commission s'inquiète également du coût de l'expertise pour les familles. Son plafonnement proposé par l'Assemblée nationale va dans le bon sens mais il ne résout pas le problème des familles les plus modestes pour lesquelles ce coût pourrait malgré tout rester inabordable. Dans la mesure où cette dépense est afférente à une procédure en justice, votre commission estime qu'il serait normal qu'elle puisse être prise en charge - partielle ou totale, en fonction des ressources des demandeurs - dans le cadre de l'aide juridictionnelle. Elle vous proposera donc d' amender le dispositif dans ce sens.

S'agissant de l'audition de la personne à protéger par le juge, le dispositif voté à l'Assemblée nationale soulève, selon votre commission, deux difficultés :

- la première résulte des risques d'influence liés à la possibilité offerte à la personne concernée de se faire accompagner lors de cette audition par la personne de son choix. Aujourd'hui, le juge est libre d'apprécier, au cas par cas, si l'accompagnant est susceptible ou non d'orienter les propos de la personne vulnérable et donc d'accepter ou non sa présence lors de l'audition. A l'inverse, si le présent projet de loi fait de la présence d'une personne choisie par le majeur lors de l'audition un droit, le juge ne pourra plus l'écarter. Votre commission vous propose donc de supprimer cette précision, étant bien entendu que cette suppression ne signifie pas une interdiction pour la personne d'être accompagnée mais une simple faculté pour le juge d'apprécier l'opportunité de la présence de cet accompagnant particulier ;

- la seconde découle de la restriction apportée au principe d'audition préalable du majeur à protéger : même si la personne n'est pas apte à comprendre la portée de l'audition, il paraît indispensable que le juge la rencontre au moins une fois, pour se rendre compte par lui-même de l'étendue des altérations de ses facultés.

Votre commission vous propose en outre deux amendements rédactionnels et vous demande d'adopter cette section ainsi amendée.

Section 3 - De la sauvegarde de justice (art. 433 à 439 du code civil)

I - Le texte proposé

Cette section, composée de sept articles ( articles 433 à 439 ), précise le régime de la sauvegarde de justice, mesure temporaire qui peut être décidée par le juge dans deux cas : d'une part, lorsque la personne a besoin d'une protection juridique pour une durée déterminée ou pour accomplir un ou plusieurs actes précis, d'autre part, pour assurer une protection minimale de la personne pendant la durée de l'instruction nécessaire pour l'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle.

Il subsiste également un troisième cas d'ouverture d'une sauvegarde de justice : cette mesure peut en effet résulter d'une simple déclaration du médecin traitant auprès du procureur de la République, sur avis conforme d'un médecin psychiatre. Cette procédure simplifiée vise à permettre la protection en urgence de la personne dans l'attente de rassembler l'ensemble des pièces nécessaires à une demande de mise sous tutelle ou curatelle.

Ces articles modifient le régime actuel de la sauvegarde de justice sur cinq points principaux :

- en cas d'urgence, le juge est tout d'abord autorisé à déroger à l'obligation d'entendre la personne à protéger préalablement à sa décision. Il est toutefois tenu de régulariser la procédure dans les meilleurs délais, en entendant l'intéressé. Comme pour l'ensemble des mesures de protection juridique, le juge peut en outre toujours déroger à l'obligation d'audition, lorsque celle-ci risque de mettre en danger la santé de la personne ou lorsque la personne n'est pas apte à exprimer sa volonté ;

- lorsqu'une protection supplémentaire est nécessaire pour un ou plusieurs actes déterminés, le juge peut désormais éviter l'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle en confiant simplement la réalisation de ces actes à un mandataire spécial. Ce mandat spécial peut s'étendre aux actes de disposition du patrimoine et à ceux de protection de la personne. Le mandataire spécial peut également être chargé d'exercer les actions en annulation des actes passés par la personne protégée et qui s'avèrent contraires à ses intérêts ;

- si les actes de la personne placée sous sauvegarde de justice peuvent toujours être rescindés (c'est-à-dire annulés) pour simple lésion ou réduits (c'est-à-dire renégociés pour en réduire les conséquences, notamment financières), ils peuvent également être déclarés nuls de plein droit lorsqu'ils entrent dans le champ de ceux confiés par le juge à un mandataire spécial ;

- les personnes autorisées à demander la nullité, la rescision ou la réduction des actes passés par la personne sous sauvegarde de justice sont désormais limitées, de son vivant, à la personne protégée elle-même et, à sa mort, à ses héritiers. Elles doivent introduire leur demande devant le juge avant l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de la fin de la mesure ou du décès de la personne protégée ;

- la durée de la sauvegarde de justice est enfin expressément limitée à un an, renouvelable une fois. En dehors du cas d'expiration de la durée pour laquelle elle a été prononcée, la mesure peut prendre fin de façon anticipée dans trois cas : lorsque le besoin de protection qui l'a motivée cesse, une fois accomplis les actes limitativement énumérés dans la décision initiale, ou à l'ouverture d'une mesure de protection plus contraignante.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre trois amendements de coordination, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements à cette section :

- dans le souci d'assurer le respect des droits de la défense, elle a rendu obligatoire l'audition du mandataire de protection future par le juge, lorsque celui-ci décide de révoquer le mandat pour le remplacer par la mesure de sauvegarde de justice ;

- elle a également réparé un oubli concernant les cas où il peut être mis fin de façon anticipée à la mesure de sauvegarde : les mesures qui résultent d'une déclaration au procureur de la part du médecin traitant peuvent être levées par une déclaration faite dans les mêmes formes, c'est-à-dire sur avis conforme d'un médecin psychiatre.

III - La position de votre commission

Votre commission approuve la reconnaissance des mesures de sauvegarde comme mesures de protection à part entière : elles restaient en effet jusqu'ici cantonnées à un statut de mesure conservatoire dans le cadre de l'instruction d'une mesure de protection plus sévère, alors que leur caractère temporaire permet d'apporter une protection ponctuelle à des personnes pour lesquelles l'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle ne se justifie pas sur le long terme.

Elle s'interroge toutefois sur la limitation apportée aux personnes susceptibles de demander l'annulation des actes passés par la personne sous sauvegarde de justice. Si la législation actuelle est sans doute inutilement extensive, quand elle ouvre cette faculté à l'ensemble des personnes susceptibles de demander l'ouverture d'une mesure de protection, le projet de loi est à l'inverse excessivement restrictif, en la réservant à la seule personne protégée et à ses héritiers après sa mort. Il conviendrait au moins d'élargir le champ des personnes autorisées à introduire une action en annulation aux personnes chargées soit d'un mandat spécial dans le cadre de la mesure de sauvegarde elle-même, soit d'une mesure de tutelle ou de curatelle ouverte à l'issue de cette première mesure. Votre commission vous proposera un amendement dans ce sens, complété par deux amendements rédactionnels et un amendement de coordination .

Votre commission vous propose d'adopter cette section ainsi amendée.

Section 4 - De la curatelle et de la tutelle (art. 440 à 476 du code civil)

I - Le texte proposé

Cette section détaille le régime applicable aux mesures de curatelle et de tutelle. Après un article de principe ( article 440 ) qui précise les cas où il y a lieu de recourir à la tutelle ou à la curatelle et qui rappelle l'obligation de respecter la subsidiarité des mesures les unes par rapport aux autres, cette section est découpée en sept sous-sections, respectivement relatives à la durée des mesures ( sous-section 1 ), à leur publicité ( sous-section 2 ), aux organes de protection ( sous-section 3 ), aux effets des mesures de protection en matière de protection des personnes ( sous-section 4 ), à la régularités des actes effectués pendant la durée des mesures ( sous-section 5 ), les deux dernières sous-sections précisant les règles propres à la curatelle ( sous-section 6 ) et à la tutelle ( sous-section 7 ).

Sous-section 1 : De la durée de la mesure

Composée de trois articles, cette sous-section limite dans le temps la durée des mesures de tutelle et de curatelle ( article 441 ), puis précise les conditions de leur renouvellement ( article 442 ) et les conditions dans lesquelles elles prennent fin ( article 443 ).

L'obligation pour le juge des tutelles de prendre des décisions pour une durée déterminée est une innovation importante : aujourd'hui en effet, la plupart des mesures sont ouvertes pour une durée indéterminée et leur réexamen n'intervient qu'à l'occasion d'une demande de mainlevée ou d'allégement introduite par la famille.

Cette situation est à l'origine de dérives nombreuses, comme en témoigne le rapport précité des trois inspections : « De nombreux juges des tutelles ont indiqué à la mission que l'examen de toutes les mesures en stock auquel ils ont procédé lors de leur prise de fonction leur avait permis de constater que certaines concernaient des personnes décédées, parfois de longue date, que d'autres n'étaient plus exécutées, qu'un nombre élevé n'étaient plus adaptées à la situation du majeur. Un magistrat a même précisé qu'un tel examen lui avait permis de ramener le stock de mesures en cours de 4 000 à 3 000. »

Si le projet de loi fixe à cinq ans la durée maximale des mesures de tutelle et de curatelle, il prévoit néanmoins une exception : pour ne pas surcharger les cabinets des juges de tutelle avec le réexamen systématique de mesures peu susceptibles d'évolution, il conserve une possibilité pour le juge de prononcer des mesures indéterminées pour les personnes dont l'altération des facultés mentales « n'apparaît manifestement pas susceptible de connaître une amélioration selon les données acquises par la science » .

S'agissant du renouvellement des mesures, il convient de souligner l'existence d'exigences différentes selon qu'il s'agit d'une simple reconduction ou d'un allégement de la mesure, d'une part, d'une demande tendant à une aggravation de celle-ci, d'autre part :

- la reconduction et l'allégement font l'objet d'une procédure simplifiée : elles peuvent être décidées sur la base d'un certificat médical de droit commun et le juge peut y procéder d'office ;

- l'aggravation doit en revanche respecter les mêmes formalités que la décision initiale : elle doit donc émaner d'une personne autorisée à introduire une demande de protection et ne peut être décidée d'office par le juge. Par ailleurs, elle ne peut être prononcée que sur présentation d'un certificat médical émanant d'un médecin expert agréé par le procureur de la République.

Enfin, parmi les situations susceptibles de conduire à mettre fin à une mesure de tutelle ou de curatelle, le Gouvernement a souhaité envisager un nouveau cas : celui des personnes protégées qui transfèrent leur résidence hors de France .

Aujourd'hui, si la protection ne cesse pas en droit dans cette hypothèse, elle cesse en fait, compte tenu de l'impossibilité où se trouvent en général le tuteur ou le curateur, d'une part, le juge, d'autre part, de remplir correctement leurs missions auprès de la personne concernée. Les ambassades et consulats sont certes censés apporter leur concours aux juges métropolitains pour assurer un contrôle de ces mesures, mais force est de constater que le nombre de sections consulaires dotées d'un personnel susceptible de remplir effectivement cette tâche est très réduit.

C'est la raison pour laquelle le projet de loi met fin à toute ambiguïté, en prévoyant expressément que la protection cesse en cas de transfert de la résidence du majeur protégé à l'étranger.

Sous-section 2 : De la publicité de la mesure

Cette section, composée d'un article unique ( article 444 ), prévoit comme c'est le cas aujourd'hui que les jugements en matière de tutelle et de curatelle doivent être portés en marge des actes de naissance des personnes concernées, afin de pouvoir être opposables au tiers.

Il s'agit d'assurer par ce biais la publicité de la mesure de protection, indispensable pour permettre à toute personne susceptible de passer un contrat avec la personne protégée de savoir que la conclusion de cet acte est soumis à la procédure particulière qui régit la tutelle ou la curatelle.

La mesure de protection devient ainsi opposable aux tiers, deux mois après l'inscription en marge de l'acte de naissance : au-delà de ce délai, tout acte passé en contravention avec les restrictions de capacité prévues dans le cadre de la mesure de protection pourra être déclaré nul, rescindé ou réduit selon les cas. L'opposabilité est en revanche immédiate pour ceux qui ont personnellement connaissance de l'existence de la mesure de protection.

Sous-section 3 : Des organes de protection

Cette section détaille les règles de désignation, les missions et les pouvoirs des différents organes de protection des majeurs. Ceux-ci sont au nombre de quatre : les tuteurs et curateurs ( paragraphe 1 ), les subrogés tuteurs et curateurs ( paragraphe 2 ), les tuteurs et curateurs ad hoc ( paragraphe 3 ) et le conseil de famille ( paragraphe 4 ).

A titre liminaire, le premier article de cette section ( article 445 ) précise quelles sont les personnes empêchées de remplir ces charges tutélaires et curatélaires : ces empêchements peuvent être liés à la capacité juridique du candidat (mineurs, majeurs protégés), à sa moralité (personnes condamnées à une peine d'interdiction des charges tutélaires par le code pénal), à ses compétences (personnes s'étant déjà vu retirer une mesure pour inaptitude ou négligence) ou à sa relation avec la personne à protéger (personne dont les intérêts sont opposés à ceux du majeur vulnérable).

Le projet de loi modifie surtout les catégories de personnes empêchées d'être tuteurs ou curateurs pour des raisons liées à leurs fonctions :

- il pose une interdiction générale d'exercer quelque charge tutélaire ou curatélaire que ce soit à l'égard de leurs patients pour tous les médecins et auxiliaires médicaux : cette interdiction est plus large que celle prévue actuellement puisque l'article 496-2 actuel du code civil la limite, d'une part, au seul médecin traitant, d'autre part, aux seules charges de tuteur ou de subrogé tuteur, le médecin pouvant donc occuper les fonctions de curateur et participer à un conseil de famille ;

- il supprime en revanche l'interdiction de principe qui s'opposait à ce qu'une mesure de tutelle ou de curatelle soit confiée à l' établissement de traitement du majeur protégé ou à l'un de ses salariés, sauf dans les cas exceptionnels limitativement énumérés où il pouvait y avoir gérance de tutelle par un préposé : l'article 451 fait désormais des préposés d'établissements des mandataires judiciaires à la protection des majeurs de droit commun.

Le paragraphe 1 , composé de huit articles ( articles 446 à 453 ), s'attache au rôle et aux pouvoirs des tuteurs et curateurs. Il ne bouleverse pas les règles déjà prévues par le droit en vigueur mais les reprécise ou les étend. Trois inflexions importantes ressortent cependant de cette réorganisation : la volonté de rendre au juge sa liberté dans l'organisation des mesures de protection, le choix opéré en faveur de la priorité familiale dans la dévolution de celles-ci et le développement du rôle des préposés d'établissements dans l'exercice des mesures.

? Rendre au juge sa liberté dans l'organisation de la protection

Aujourd'hui, la marge de manoeuvre du juge dans l'organisation des mesures de protection est limitée :

- dans le cadre de la curatelle, un seul organe de protection est prévu, le curateur. En cas de conflit d'intérêt, le juge ne peut ni s'appuyer sur un subrogé, ni désigner un curateur ad hoc . Il est donc tenu de procéder au remplacement définitif du curateur, alors même que le conflit d'intérêt pouvait, lui, être temporaire ;

- dans le cadre de la tutelle, la désignation par le juge de tel ou tel type de tuteur est normalement conditionnée non seulement par l'existence ou non de proches susceptibles de l'exercer mais aussi par la consistance du patrimoine à gérer : en effet, en cas de vacance de la tutelle, un patrimoine important devait conduire à une tutelle d'Etat, alors qu'un patrimoine modique orientait le juge vers le choix d'une gérance de tutelle.

Or, ces différents types de tutelle sont rigides : choisir comme tuteur un préposé d'établissement ou un administrateur spécial entraînait l'application du régime de la gérance de tutelle et donc l'impossibilité de constituer un conseil de famille et de nommer un subrogé tuteur. Déférer la tutelle à l'Etat comporte les mêmes conséquences. Seul le choix d'un proche permet au juge d'opter entre deux régimes, celui de l'administration légale sous contrôle judiciaire (sans conseil de famille, ni subrogé tuteur) ou celui de la tutelle dite « complète ». Et comme pour la curatelle, dans tous les cas d'absence de subrogé tuteur, l'apparition d'un conflit d'intérêt entre le tuteur et son pupille entraîne le remplacement définitif du tuteur.

L'unification des régimes de tutelle rend sa liberté d'organisation au juge : quelle que soit la teneur du patrimoine, il sera libre de choisir le type de tuteur et ce choix sera désormais indépendant de l'organisation de la protection , puisqu'il pourra dans tous les cas l'adapter, en dotant le majeur d'un conseil de famille, d'un subrogé tuteur ou de ces deux organes.

Le juge pourra en outre désigner, pour une même personne, plusieurs tuteurs ou curateurs, en vue notamment de séparer - s'il l'estime opportun - les missions de protection des biens et celles de protection de la personne. Le projet de loi précise également que les tuteurs et curateurs eux-mêmes pourront s'adjoindre, sous leur propre responsabilité, le concours d'autres personnes pour assurer leur mission.

? Réaffirmer la priorité familiale dans la dévolution des mesures de protection

La loi du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables majeurs avait posé le principe d'une attribution des mesures de protection en priorité à la famille. Leur dévolution à un tiers ne pouvait normalement résulter que de la vacance de la tutelle ou de la curatelle. Mais ce principe a été largement battu en brèche : à la différence de la tutelle des mineurs, la mobilisation de la solidarité familiale est plus difficile à réaliser autour d'un majeur, la complexité de la gestion de ces mesures a conduit les juges à préférer très souvent se donner des interlocuteurs professionnels. Dans le cas de la maladie mentale, les médecins, enfin, étaient très nombreux à préconiser la désignation d'un tiers, estimant que l'exercice de la tutelle par un proche pouvait nuire au traitement.

Le Gouvernement a tenu à réaffirmer cette priorité familiale dans l'attribution des mesures de tutelle, mais tirant les leçons de la situation actuelle : la transformation de la cellule familiale et la redéfinition de solidarité familiale, en fonction non plus des liens du sang mais bien davantage en fonction de la proximité géographique et affective, conduit à élargir le champ des proches susceptibles de se voir confier une mesure de protection :

- la mesure peut être confiée non seulement au conjoint, mais aussi au concubin ou au partenaire avec qui le majeur a conclu un pacte civil de solidarité ;

- la notion de « proche » est étendue : au-delà des parents et alliés, le projet de loi reconnaît aux personnes résidant avec la personne protégée et justifiant de liens étroits et stables avec elle la possibilité d'être désignées pour exercer la mesure de protection ;

- le texte ne définit plus de façon stricte l'ordre de priorité entre les différents proches de la personne à protéger, mais prévoit que la désignation doit tenir compte des sentiments exprimés par l'intéressé et de l'avis de l'entourage ;

- le projet de loi donne enfin la priorité aux tuteurs et curateurs désignés soit par la personne protégée elle-même alors qu'elle disposait encore de toutes ses facultés, soit par les parents pour leurs enfants mineurs ou majeurs handicapés : en effet, même si la personne désignée n'est pas nécessairement membre de la famille, son élection par la personne protégée ou par ses parents conduit à la ranger parmi les bénéficiaires de la priorité familiale.

C'est donc uniquement dans un second temps que le juge peut envisager de nommer un tiers professionnel, désigné sous le terme générique de « mandataire judiciaire à la protection des majeurs ». Sont regroupés sous ce terme tous les professionnels qui exercent aujourd'hui des mesures de protection juridique : associations tutélaires et gérants de tutelle.

En application du principe solennellement réaffirmé en préambule du projet de loi selon lequel la protection des majeurs est « un devoir des familles et de la collectivité publique » , le texte précise que seule la famille proche et les mandataires professionnels ont l'obligation de conserver la tutelle au-delà de cinq ans, ce maximum étant fixé par référence à la durée maximum de la mesure initiale prise par le juge.

? Elargir le champ des préposés d'établissements susceptibles d'exercer des mesures de protection

Parmi les professionnels susceptibles d'être désignés par le juge pour exercer une mesure de protection, le projet de loi inscrit désormais les préposés ou les services rattachés à un établissement de soins ou à un établissement social ou médico-social.

A l'heure actuelle, si le code civil interdit en principe de confier une mesure de protection à l'établissement de traitement du majeur protégé, il prévoit une exception, lorsque le patrimoine de la personne est peu important et n'exige pas la mise en place d'une tutelle dite « complète », c'est-à-dire la constitution d'un conseil de famille et la désignation d'un subrogé tuteur.

En application du décret du 15 février 1969 7 ( * ) , les établissements fondés à désigner un préposé aux tutelles sont les « établissements d'hospitalisation, de soins ou de cure publics ou privés » , c'est-à-dire les établissements de santé et leurs démembrements (unités de soins de longue durée et établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes adossés à un établissement de santé). Le décret précise que la désignation d'un préposé est obligatoire dans les établissements publics et seulement facultative dans les établissements privés.

La tutelle en gérance hospitalière, qui était destinée à rester tout à fait subsidiaire, s'est en réalité considérablement développée, d'une part en raison de la pénurie de gérants de tutelle privés, d'autre part en raison de la proximité offerte par ce type de tutelle pour les personnes protégées : en 2004, on dénombrait ainsi 92 111 mesures confiées à des préposés d'établissements, dont 70 % relevant d'un établissement sanitaire et 30 % d'un établissement médico-social.

Ces avantages supposés conduisent le Gouvernement à proposer une double extension du champ des préposés d'établissements susceptibles d'être délégués à la tutelle :

- désormais, l'ensemble des établissements sociaux et médico-sociaux publics et privés hébergeant des personnes protégées pourra désigner un préposé aux tutelles. A contrario , en l'absence d'hébergement, la désignation du préposé sera impossible : les personnes prises en charge en accueil de jour ou en services d'aide à domicile ne pourront pas se voir désigner comme tuteur ou curateur un préposé d'établissement ;

- le juge pourra en outre confier la mesure non seulement à une personne physique préposée de l'établissement mais aussi à un de ses services spécifiquement dédiés à cette activité : le projet de loi tire ainsi les conséquences de l'expérimentation, dans certains établissements hospitaliers importants et traitant un grand nombre de majeurs protégés, d'équipes pluridisciplinaires chargées de gérer les dossiers de tutelle.

La dévolution de la mesure de protection à un préposé d'établissement est toutefois entourée de trois précautions :

- le préposé ou le service ne peut se voir confier que les mesures de tutelle et de curatelle qui concernent des personnes soignées ou hébergées dans son propre établissement : la désignation d'un préposé d'établissement répond en effet à une volonté d'assurer une protection de proximité pour la personne, ce qui suppose que préposé et majeur protégé relèvent bien du même établissement ;

- comme tous les autres mandataires professionnels, les préposés d'établissements devront être inscrits sur la liste départementale des mandataires judiciaires à la protection des majeurs dressée par le préfet : ils seront donc soumis aux mêmes exigences de formation, d'expérience et de moralité que celles prévues par le code de l'action sociale et des familles pour les gérants de tutelle privés et pour les salariés des associations tutélaires ;

- enfin, si la mission confiée au préposé de l'établissement d'accueil s'étend, comme pour tout mandataire et sauf mention contraire, à la protection de la personne, un cas particulier est envisagé : celui des actes médicaux graves au sens du code de la santé publique. Dans ce cas, le texte reconnaît l'existence d'un conflit d'intérêt potentiel et prévoit une autorisation préalable du juge, voire le transfert des décisions au subrogé tuteur ou la désignation d'un administrateur ad hoc .

Composés chacun d'un article unique ( articles 454 et 455 ), les paragraphes 2 et 3 précisent les règles de désignation des subrogés tuteurs et curateurs et des tuteurs et curateurs ad hoc .

La possibilité de désigner, d'une part, un subrogé curateur, d'autre part, un tuteur ou un curateur ad hoc constituent des nouveautés introduites par le présent projet de loi. Ces outils doivent permettre au juge de surmonter les éventuels conflits d'intérêts entre la personne protégée et son tuteur ou curateur, sans être obligé de les destituer :

- le subrogé est désigné a priori par le juge, dès l'ouverture de la mesure. Il exerce un rôle général de surveillance des actes passés par le tuteur ou le curateur : il doit ainsi informer le juge lorsqu'il constate une faute dans la gestion du tuteur ou du curateur et solliciter l'autorisation de le suppléer en cas de conflit d'intérêt. Pour lui permettre d'exercer correctement ce rôle de surveillance, le texte prévoit une obligation d'information du subrogé par le tuteur ou le curateur ;

- le tuteur ou le curateur ad hoc remplace quant à lui le tuteur ou le curateur de façon ponctuelle , pour accomplir un acte ou une série d'actes pour lesquels les intérêts de ce dernier sont en opposition avec ceux du majeur protégé. Il est désigné à la demande du tuteur lui-même, du procureur de la République, de tout intéressé ou d'office par le juge.

Il convient en outre de préciser que, contrairement au droit en vigueur, le projet de loi donne toute latitude au juge pour décider de l'opportunité de nommer un subrogé ou un tuteur ad hoc . Il s'agit d'une innovation importante qui permettra notamment d'associer la famille à une mesure exercée par un professionnel.

Le paragraphe 4 reprend, en les précisant, les règles aujourd'hui applicables au conseil de famille. Il est composé de deux articles : le premier détaille les motifs pouvant conduire à la constitution d'un conseil de famille, sa composition et les règles régissant son fonctionnement ( article 456 ) et le second autorise, sous certaines conditions, ce même conseil à délibérer hors de la présence du juge ( article 457 ).

Si la constitution d'un conseil de famille reste réservée aux mesures de tutelle, le projet de loi inverse le principe qui prévalait jusqu'ici et selon lequel la constitution d'un tel conseil était la règle et l'absence de conseil l'exception. Désormais, en effet, le texte laisse l'initiative de sa constitution à la libre appréciation du juge qui doit tenir compte en la matière des besoins de protection de la personne, de la nature de son patrimoine et de l'existence d'un entourage suffisant permettant de faire fonctionner une telle instance.

Il convient toutefois de reconnaître qu'en pratique, les exceptions à la constitution d'un conseil de famille étaient devenues plus nombreuses que la règle : seules 0,3 % des tutelles sont organisées aujourd'hui avec un tel conseil. La liberté donnée au juge de créer ou non ce conseil pourrait même paradoxalement conduire à un accroissement de leur nombre.

La possibilité, ouverte par le projet de loi, de réunir le conseil de famille en dehors de la présence du juge vise d'ailleurs à redonner une impulsion à une institution dont l'objectif est d'associer au mieux l'entourage de la personne protégée à la mesure de protection. Au surplus, cette nouvelle faculté donne un cadre légal à des situations de fait où cet entourage se réunit pour prendre des décisions concernant le quotidien de la personne protégée. Cependant, pour éviter les dérives, le projet de loi la réserve aux cas où la tutelle a été confiée à un professionnel.

Sous-section 4 : Des effets de la curatelle et de la tutelle
sur la protection des personnes

Cette section précise les règles applicables aussi bien à la tutelle qu'à la curatelle en matière de protection des personnes. Il s'agit d'une des grandes innovations de la loi car elle confère un statut personnel au majeur protégé.

Jusqu'à présent, ce statut relevait d'une construction jurisprudentielle, la Cour de Cassation considérant depuis 1989 que la protection juridique s'étend à la protection du majeur lui-même. Elle a également depuis cette date peu à peu précisé les conditions dans lesquelles le tuteur peut assister ou représenter la personne protégée dans ses actes personnels. D'une façon générale, la Cour considère que le tuteur ou le curateur est tenu de respecter la volonté propre de la personne dans la mesure où elle est capable de l'exprimer. Dans le cas contraire, elle estime que les actes personnels doivent être autorisés par le juge.

Consacrant dans la loi cette jurisprudence, la sous-section reconnaît l'existence d'une sphère d'autonomie pour majeur protégé, y compris en matière de tutelle ( articles 458 à 459-1 ) et consacre le rôle de protection du tuteur ( articles 459 et 463 ). Elle actualise en outre les règles relatives au mariage des personnes protégées et à la conclusion par celles-ci d'un pacte civil de solidarité ( articles 460 à 462 ).

? La reconnaissance de la sphère d'autonomie du majeur protégé

Consacrant dans la loi cette extension du champ de la protection juridique, le projet de loi précise d'abord que, même en régime de tutelle, subsiste une sphère d'autonomie personnelle pour le majeur protégé, que le tuteur est tenu de respecter. Il reconnaît ainsi l'existence d' actes strictement personnels que le majeur peut et même doit faire seul sans l'assistance ni la représentation de son mandataire.

Le texte n'énumère pas ces actes, laissant à la jurisprudence le soin de les définir, sauf dans un domaine qui concerne les relations de la personne protégée avec ses enfants : ainsi, la déclaration de naissance d'un enfant, sa reconnaissance, le choix ou le changement de son nom, les actes de l'autorité parentale relativement à sa personne et le consentement à son adoption sont autant d'actes que la personne protégée doit faire seule, à peine de nullité.

Relèvent également de cette catégorie les décisions concernant le choix de sa résidence et de ses relations par le majeur protégé, même si ce principe ne fait naturellement pas obstacle à la mise en oeuvre des décisions d'hospitalisation ou d'accueil en établissement spécialisé, lorsque son état de santé l'exige.

S'agissant des décisions qui, sans être strictement personnelles, sont relatives à sa personne, le projet de loi reconnaît le droit de la personne protégée à les prendre seule, dès lors que son état le lui permet . A cet effet, elle doit recevoir du tuteur ou du curateur les informations nécessaires à une décision éclairée, selon des modalités adaptées à ses capacités.

Lorsque son état lui interdit de prendre seule ses décisions personnelles, le projet de loi s'attache à préserver autant que possible la dignité de la personne, en plaçant ces actes sous le régime de la simple assistance , et ce même si la personne est par ailleurs placée sous tutelle. La représentation doit donc rester exceptionnelle en la matière et ne peut être décidée que par le juge. Elle l'oblige dans tous les cas à placer le majeur, s'il n'y était pas déjà, sous le régime de la tutelle.

? La consécration du rôle de protection du tuteur et du curateur

La traduction concrète du rôle de protection de la personne que le projet de loi confie désormais au tuteur et au curateur réside dans la faculté qui leur est donnée de prendre seuls les décisions qui s'imposent pour assurer la sécurité du majeur protégé, lorsque celui-ci se met lui-même en danger par son comportement. Afin de garantir le respect des droits de la personne protégée, ils doivent toutefois informer le juge sans délai des mesures qu'ils sont amenés à prendre à ce titre.

Compte tenu de leur importance, les actes portant gravement atteinte à l'intégrité corporelle de la personne - comme la décision d'accepter une opération chirurgicale grave, un prélèvement d'organes ou une stérilisation, cette liste n'étant naturellement pas exhaustive - ou à l'intimité de sa vie privée doivent cependant être préalablement autorisés par le juge, sauf en cas d'urgence.

Contrepartie de ses nouveaux pouvoirs en matière de protection de la personne, le tuteur ou le curateur aura enfin l'obligation de rendre compte régulièrement au juge ou au conseil de famille des actions entreprises pour remplir sa mission, dans des conditions définies par ces derniers.

? La modernisation des règles applicables au mariage et au pacte civil de solidarité conclus par des personnes protégées

S'agissant du mariage des personnes protégées, le projet de loi laisse inchangées les règles applicables aux personnes en curatelle : ainsi, leur mariage suppose toujours le consentement du curateur, la personne protégée pouvant passer outre avec l'accord du juge des tutelles.

Il modifie en revanche les dispositions applicables aux majeurs sous tutelle. Le droit en vigueur prévoit en effet l'obligation pour la personne protégée d'obtenir le consentement de ses deux parents ou, en leur absence, du conseil de famille. Il s'agit d'ailleurs de la seule décision relevant exclusivement du conseil de famille, ce qui oblige le juge à en constituer un spécifiquement pour consentir au mariage, dans les différentes hypothèses où la tutelle est organisée sans conseil.

Désormais, en l'absence de conseil de famille, c'est le juge qui autorisera le mariage et le consentement des parents ne sera plus recherché. En revanche, subsiste l'obligation d'auditionner les futurs époux. L'obligation de consulter le médecin traitant disparaît au profit d'un avis des proches de la personne protégée.

Le projet de loi s'attache également aux conditions dans lesquelles une personne protégée peut conclure et rompre un pacte civil de solidarité (Pacs). S'agissant des personnes en curatelle, le code civil actuel ne fixe aucune règle particulière, entraînant une jurisprudence fluctuante sur la capacité ou non de la personne protégée à conclure un tel pacte et sur l'obligation ou non pour elle d'être assistée par son curateur en la matière. En revanche, alors qu'il l'autorise - de façon certes très encadrée  - à se marier, ce même code interdit paradoxalement au majeur protégé de conclure un Pacs.

Le projet de loi s'attache donc à clarifier et à mettre en cohérence les règles applicables à la conclusion d'un tel pacte par les personnes en tutelle ou en curatelle :

- pour les personnes en curatelle , l'assistance du curateur est requise lors de la signature de la convention de Pacs devant le notaire. En revanche, la personne protégée peut sans assistance aller la faire enregistrer au greffe. La décision de rompre le Pacs, de façon conjointe ou unilatérale, est une décision personnelle qui ne requiert pas l'assistance du curateur. Seules les formalités liées à la rupture (signification à l'autre partie, liquidation des droits et obligations du contrat) demandent cette assistance ;

- pour les personnes en tutelle , le projet de loi revient sur l'interdiction absolue qui prévalait jusqu'à présent. Il prévoit, comme pour le mariage, l'autorisation du juge ou du conseil de famille, l'audition des futurs partenaires et l'avis des proches. La signature de la convention requiert l'assistance du tuteur, son enregistrement étant en revanche un acte personnel de la personne protégée. Les autres formalités, notamment celles de signification en cas de rupture, sont faites et reçues par le tuteur. De plus, le pacte peut être rompu à l'initiative du tuteur, sur autorisation du juge ou du conseil de famille et après audition des intéressés.

Sous-section 5 : De la régularité des actes

Cette sous-section rassemble les trois articles du code civil ( articles 464 à 466 ) qui précisent le régime de régularité des actes passés par la personne protégée ou par son mandataire. Ce régime est profondément rénové par le présent projet de loi :

- le texte instaure tout d'abord une « période suspecte » couvrant les deux ans précédant l'ouverture d'une mesure de tutelle ou de curatelle : tous les actes passés pendant cette période pourront désormais être plus facilement annulés ou réduits. Cependant, en raison de l'insécurité juridique qui en résulte pour les tiers qui ont contracté en toute bonne foi avec la personne devenue protégée, les demandes en annulation ou réduction devront être introduites dans les cinq ans qui suivent l'ouverture de la mesure ;

- compte tenu de la reconnaissance par le projet de loi de l'existence de décisions strictement personnelles, relevant uniquement du majeur protégé et ce même en régime de tutelle, le texte met fin au principe de nullité de droit de tous les actes accomplis seuls par des majeurs en tutelle et des actes accomplis par le majeur en curatelle sans l'assistance de son curateur en contravention avec la loi. Il lui substitue un régime d'irrégularité proportionné au degré d'incapacité du majeur .

En conséquence, les actes que la personne protégée peut faire seule, que ce soit en tutelle ou en curatelle, sont soumis au même régime que les actes passés par une personne en sauvegarde de justice : ils peuvent donc être rescindés pour simple lésion et réduits en cas d'excès. Ceux passés par le majeur en tutelle ou en curatelle seul alors que l'assistance de son mandataire était requise peuvent être annulés, mais uniquement s'ils ont conduit à un préjudice pour la personne protégée. Au total, seuls les actes passés par la personne protégée seule alors que sa représentation était requise demeurent nuls de plein droit ;

- autre conséquence de la reconnaissance d'une sphère d'autonomie pour la personne protégée, le texte admet la possibilité d'une irrégularité liée au fait qu'un mandataire a agi seul , alors que l'acte en question devait être accompli par la personne protégée avec l'assistance (et non la représentation) de son mandataire : ces actes sont nuls de plein droit mais ils peuvent toutefois être confirmés a posteriori avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille.

Sous-section 6 : Des dispositions propres à la curatelle

Composée de six articles, cette sous-section détaille les règles applicables à la seule curatelle : elles concernent la définition des actes nécessitant l'assistance du curateur ( article 467 ), notamment en matière financière ( article 468 ), la procédure applicable en cas de désaccord entre le curatélaire et le curateur sur les actes nécessitant l'assistance de ce dernier ( article 469 ), l'encadrement de la capacité du curatélaire à faire des donations et la préservation de sa liberté de tester ( article 470 ), la possibilité offerte au juge d'adapter le contenu de la curatelle ( article 471 ) et le régime applicable à la curatelle renforcée ( article 472 ).

Dans l'ensemble, ces dispositions reprennent, sans grandes modifications, les dispositions existantes du code civil relatives aux mesures de curatelle. Quatre innovations méritent toutefois d'être soulignées :

- si le régime des actes en curatelle est inchangé et repose toujours sur le principe d'assistance du curateur, le projet de loi permet à ce dernier de demander au juge la possibilité de représenter la personne protégée pour accomplir des actes déterminés, lorsque celle-ci compromet manifestement et durablement ses intérêts par son inaction. Le curateur pourra donc dans cas être exceptionnellement autorisé à effectuer seul des actes de disposition ;

- conformément au principe d'interdiction des comptes pivots posé à l'article 427, l'ensemble des opérations financières relatives aux capitaux du curatélaire doivent transiter par le compte personnel et nominatif de celui-ci. S'agissant de l'emploi de ces fonds, les règles sont en revanche inchangées, la personne protégée nécessitant toujours l'assistance de son curateur pour les percevoir et les employer ;

- si la possibilité, pour le juge, d'adapter le contenu de la curatelle aux besoins de protection de la personne est ancienne, la procédure retenue est allégée, puisque le juge pourra en décider seul, sans requérir au préalable l'avis du médecin traitant du majeur protégé ;

- le projet de loi consacre dans la loi le terme de « curatelle renforcée », employé lorsque le juge autorise le curateur à percevoir lui-même les revenus de la personne protégée et à effectuer lui-même les versements nécessaires au règlement de ses charges, seul l'excédent étant alors remis entre ses mains. Si ce régime est globalement inchangé, il convient de souligner la nouveauté qui consiste à donner au curateur la possibilité de passer un bail au nom de la personne protégée pour assurer son logement.

Sous-section 7 : Des dispositions propres à la tutelle

Cette sous-section, composée de quatre articles ( articles 473 à 476 ), rassemble les dispositions spécifiques à la tutelle. Comme pour la curatelle, ils comportent peu de modifications par rapport au doit en vigueur.

Le projet de loi fait d'abord mieux apparaître le pouvoir du juge pour adapter la liste des actes pour lesquels le majeur protégé doit être représenté, en fonction des capacités de la personne : par exception au régime de la représentation qui prévaut dans le cadre de la tutelle, le juge pourra ainsi prévoir des actes que la personne pourra faire seule ou avec la simple assistance du tuteur.

Comme aujourd'hui, le majeur sous tutelle doit être représenté en justice par son tuteur, qui ne peut agir, en demande comme en défense, qu'avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille, lorsqu'il existe.

En revanche, le texte assouplit très nettement les conditions dans lesquelles la personne sous tutelle peut tester ou effectuer des donations. En matière de donation, les actes de la personne protégée ne donnent plus lieu qu'à l'assistance du tuteur, là où la législation actuelle prévoit une stricte représentation. L'exigence d'une autorisation préalable du juge ou du conseil de famille pour ces actes demeure.

L'assouplissement est encore plus net en ce qui concerne le droit de tester : alors que le code civil prévoit actuellement l'obligation pour le majeur d'être assisté dans la rédaction de son testament, le projet de loi soumet cet acte à un simple régime d'autorisation préalable, aucune représentation ni assistance n'est plus recevable pour la rédaction de l'acte lui-même.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre trente et une modifications rédactionnelles ou de coordination, l'Assemblée nationale a adopté quatorze amendements à cette section.

? S'agissant de la durée des mesures de tutelle et de curatelle , elle a d'abord décidé que les décisions initiales d'ouverture prises par le juge devront systématiquement prévoir une durée déterminée, au plus égale à cinq ans. Ce n'est qu'à l'occasion d'un renouvellement que celui-ci pourra décider d'une mesure à durée indéterminée. Il lui a en effet semblé indispensable que le juge s'impose cette période d'évaluation de cinq ans pour vérifier l'adéquation de la mesure aux besoins de la personne protégée.

La mainlevée, la modification ou la substitution d'une mesure par une autre devra en outre être précédée d'un avis du tuteur ou du curateur. La nouvelle mesure éventuellement prise par le juge pourra, comme la mesure initiale, être levée, modifiée ou remplacée à tout moment par lui, dans les mêmes conditions.

L'Assemblée nationale est enfin revenue sur le caractère absolu du principe, posé par le projet de loi, selon lequel la protection cesse lorsque la personne protégée fixe sa résidence à l'étranger : elle a en effet introduit une exception en faveur des personnes accueillies ou soignées dans un établissement situé à l'étranger. Cet amendement vise à tenir compte de la situation d'un grand nombre de personnes handicapées, prises en charge notamment en Belgique faute de places en nombre suffisant en France. L'Assemblée nationale a estimé que le choix des familles de faire prendre en charge leur proche handicapé à l'étranger était suffisamment douloureux, pour ne pas le doubler de la suppression pure et simple de la protection juridique qui leur est due.

? Sur le sujet des organes de protection , l'Assemblée nationale a adopté trois amendements :

- le premier vise à encadrer de façon plus stricte la possibilité, pour les tuteurs et les curateurs, de déléguer une partie de leurs responsabilités à des tiers chargés de les assister : un décret en Conseil d'Etat fixera donc les actes pour lesquels une telle délégation sera autorisée ;

- le deuxième ouvre la possibilité, pour le juge, de désigner comme subrogé tuteur ou curateur, un mandataire professionnel, lorsque aucun proche n'est susceptible de tenir ce rôle : l'Assemblée nationale a en effet souhaité ne pas priver les personnes dépourvues de famille de la garantie que représente la désignation d'un subrogé ;

- le dernier s'attache à garantir la transparence du fonctionnement du conseil de famille, lorsque celui-ci se réunit en dehors de la présence du juge : afin que celui-ci puisse exercer son droit d'opposition de façon satisfaisante, le conseil de famille devra lui communiquer son ordre du jour préalablement à toute réunion tenue sans lui.

? En matière de protection de la personne , l'Assemblée nationale a d'abord encadré les mesures susceptibles d'être prises seul par le tuteur ou le curateur, sans autorisation préalable du juge : elle a ainsi précisé que ces mesures doivent être strictement nécessaires pour faire cesser le danger auquel la personne s'expose par son comportement.

Elle s'est ensuite attachée à coordonner les dispositions du code civil et celles des codes de la santé publique et de l'action sociale et des familles en matière de représentation des personnes protégées.

Ces deux derniers codes prévoient en effet la présence d'un représentant légal pour de nombreux actes. Or, pour le code civil, ces actes relèvent, selon les cas, des actes que la personne peut faire seule, de ceux qu'elle peut faire avec l'assistance de la personne chargée de sa protection ou de ceux pour lesquels elle doit être représentée. Afin d'éviter des conflits de normes, l'Assemblée nationale a donc précisé que la loi spéciale - c'est-à-dire, en l'espèce, le code de l'action sociale et des familles et le code de la santé publique - l'emporte sur la loi générale que constituent les dispositions du code civil en la matière.

Elle a toutefois prévu une exception à ce principe : lorsque la mesure a été confiée à un préposé d'établissement, les actes graves que le code de la santé publique confie normalement au représentant légal ne peuvent être accomplis par le tuteur ou le curateur seuls mais requièrent une autorisation spéciale du juge . Celui-ci peut d'ailleurs décider de confier ces actes au subrogé tuteur ou à un tuteur ad hoc , lorsqu'il estime que les intérêts du tuteur ou du curateur sont en opposition avec ceux de la personne protégée.

L'Assemblée nationale a également apporté une précision au principe de liberté pour la personne protégée de choisir ses relations : ce libre choix s'entend de toute personne, membre de la famille ou non, et emporte la liberté d'être visitée ou hébergée par celle-ci.

Envisageant enfin le cas où le tuteur ou le curateur est lui-même le partenaire de Pacs de la personne protégée, l'Assemblée nationale a prévu une présomption de conflit d'intérêt entre la personne protégée et son mandataire pour tous les actes relatifs à la dissolution de cette union.

? S'agissant des règles applicables à la curatelle , l'Assemblée nationale a étendu la possibilité, pour le curateur, de demander au juge la faculté de représenter son pupille : là où le texte initial prévoyait une telle possibilité dans les seuls cas d'inaction du majeur protégé préjudiciable à ses intérêts, l'Assemblée nationale envisage l'ensemble des cas où la personne compromet gravement ses intérêts, de façon active ou inactive.

Elle a également précisé que le fait pour la personne protégée de projeter une donation en faveur de son curateur fait naître entre eux un conflit d'intérêt : dans un tel cas, le juge peut se saisir d'office pour faire nommer un curateur ad hoc .

? Concernant enfin les règles applicables à la tutelle , l'Assemblée nationale a rétabli la possibilité pour la personne protégée de révoquer seule son testament.

III - La position de votre commission

Votre commission approuve, dans leur ensemble, les dispositions de la présente section. Elle se félicite tout particulièrement de l'obligation faite au juge de limiter dans le temps la durée de ses décisions de protection . S'agissant de mesures qui portent atteinte à la liberté des personnes, il lui semble en effet normal qu'elles soient révisées régulièrement, afin de s'assurer que les motifs qui ont présidé à leur ouverture subsistent.

Elle comprend néanmoins la possibilité, offerte aux juridictions, de prononcer des mesures à durée indéterminée, en présence de personnes dont l'état est manifestement insusceptible de toute amélioration. L'obligation de prévoir une première mesure à caractère temporaire est toutefois nécessaire, non pas pour envisager une levée de la protection, mais pour vérifier l'adaptation de celle-ci aux besoins de la personne.

Votre commission ne saurait en revanche accepter qu'il soit mis fin à la protection des personnes, du seul fait qu'elles ont transféré leur résidence hors de France . Cette disposition est en effet contraire au principe datant des origines de notre droit et inscrit à l'article 3 du code civil 8 ( * ) selon lequel « les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les Français, même résidant en pays étranger. »

Les personnes concernées peuvent en outre avoir conservé des intérêts importants en France, qu'il convient de protéger. L'argument selon lequel les juges sont dans l'incapacité d'assurer le contrôle de l'exécution de ces mesures n'est, pour votre commission, pas recevable : c'est en effet aux agents consulaires d'assister les juridictions métropolitaines dans ce domaine et le fait qu'ils s'acquittent mal de cette tâche aujourd'hui ne doit pas conduire à les en exonérer mais bien plutôt à leur donner les moyens de le faire plus efficacement. Pour toutes ces raisons, votre commission vous propose de supprimer cette restriction.

Votre commission s'étonne également de l'extension, prévue par le présent projet de loi, de la possibilité de désigner comme tuteur ou curateur un préposé d'établissement sanitaire ou médico-social . Cette possibilité n'avait en effet été retenue par le législateur de 1968 que pour traiter de situations marginales et la dérive qui a consisté, par pénurie d'opérateurs tutélaires, à confier un nombre croissant de mesures à des préposés d'établissements ne doit pas servir de justification à la généralisation de ce système.

La présence d'un conflit d'intérêt patent devrait pourtant s'opposer à la désignation d'un préposé de l'établissement d'accueil de la personne protégée. Celui-ci reste un salarié de l'établissement et, de ce fait, il est impossible de garantir son impartialité pour tout ce qui touche aux relations de la personne protégée avec cet établissement.

Le Gouvernement n'en est d'ailleurs pas dupe, puisqu'il prévoit un aménagement conséquent des règles prévues par le code de l'action sociale et des familles en matière de droits des usagers de ces établissements : remise directe du livret d'accueil et du règlement de fonctionnement à la personne protégée, absence d'assistance pour la personne protégée lors de l'élaboration du document individuel de prise en charge, voire élaboration dudit document par le seul représentant de l'établissement lorsque l'état de la personne rend impossible sa collaboration... Comment, dans ces conditions, imaginer qu'il soit possible de réellement garantir à la personne protégée l'exercice effectif de ses droits ?

D'une façon générale, l'ensemble des associations de personnes handicapées insiste sur la nécessité de préserver un regard extérieur à l'établissement sur la prise en charge. C'était également l'une des conclusions fortes de la commission d'enquête du Sénat sur la maltraitance des personnes handicapées accueillies en établissements sociaux et médico-sociaux 9 ( * ) .

Les conclusions de cette commission d'enquête avaient montré la grande difficulté pour le personnel des établissements à surmonter la loi du silence qui entoure la maltraitance institutionnelle. Elles insistaient en conséquence sur le rôle de vigilance et d'alerte des tuteurs. Mais elles précisaient immédiatement également que pour assurer ce rôle, les tuteurs devaient être indépendants des établissements et concluaient à la nécessité d'interdire « à un salarié d'être gérant de tutelle d'une personne accueillie dans l'établissement où il travaille » .

Votre commission reconnaît en revanche l'utilité des gérances de tutelle confiées aux établissements hospitaliers : elles concernent dans leur grande majorité des malades psychiques, pris en charge en ambulatoire, et l'exercice de la tutelle par l'établissement de soins constitue un point de repère et un moyen d'assurer une continuité entre l'hospitalisation et la vie à l'extérieur pour des personnes souvent très désocialisées.

Pour toutes ces raisons, votre commission vous propose de supprimer la possibilité de confier les mesures de protection à un préposé d'établissement médico-social et donc de limiter ce dispositif aux seuls établissements de santé. Cette mesure s'inscrit d'ailleurs dans le même combat que celui qu'elle mène depuis plusieurs année pour voir reconnaître la nécessité de séparer les fonctions de gestionnaire d'établissement et de représentation des personnes handicapées dans les différentes instances qui les concernent.

Au surplus, outre une modification rédactionnelle, votre commission propose l'adoption de six amendements à cet article :

- si elle approuve la possibilité pour le juge de désigner un mandataire professionnel comme subrogé tuteur, elle estime nécessaire de préciser que, dans le cas où le tuteur est lui-même un professionnel, tous deux doivent impérativement être indépendants l'un de l'autre ;

- le projet de loi reste imprécis quant aux personnes susceptibles d'engager les actions en nullité, rescision et réduction des actes de la personne protégée : le texte est en effet muet à ce sujet s'agissant des actes passés au cours de la période suspecte et, pour les actes accomplis pendant la mesure, il ne mentionne expressément que le tuteur et le curateur comme étant susceptibles de demander la sanction de l'irrégularité. Il convient sans doute, dans les deux cas, d'être plus explicite, en ouvrant ces recours à la personne protégée, à ses héritiers et à la personne chargée de la protection. Enfin, quand l'irrégularité a été commise par le mandataire lui-même, il est nécessaire de prévoir la possibilité, pour le juge, de s'en saisir d'office ;

- dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale, le projet de loi semble exclure la possibilité, pour le curateur renforcé, de provisionner des dépenses futures : or, confronté à une personne incapable de se projeter dans l'avenir, il devrait au contraire pouvoir déterminer l'épargne nécessaire pour faire face aux imprévus. Il convient donc de préciser le dispositif dans ce sens ;

- s'agissant des pouvoirs du tuteur en matière d'action en justice, votre commission comprend également mal la raison qui conduit à soumettre l'action en défense à une autorisation préalable du juge ou du conseil de famille. La possibilité de se défendre est en effet un droit fondamental et il apparaît extrêmement restrictif de soumettre l'exercice de cette garantie pour la personne protégée à une autorisation. Votre commission vous propose donc de la supprimer ;

- enfin, compte tenu de la possibilité, désormais ouverte à la personne sous tutelle, de tester seule sur autorisation du conseil de famille, votre commission considère que la faculté qui lui est laissée de révoquer seule son testament est risquée et source vraisemblable de contentieux. C'est pourquoi il lui paraît préférable de soumettre cette révocation à une autorisation du juge.

Pour ces motifs, votre commission vous propose d'adopter cette section ainsi amendée.

Section 5 - Du mandat de protection future (art. 477 à 494 du code civil)

I - Le texte proposé

Cette section met en oeuvre l'une des principales innovations du présent projet de loi, à savoir la création d'un mandat de protection future , destiné à permettre à toute personne capable d'organiser à l'avance sa propre protection ou celle de ses enfants mineurs ou majeurs vulnérables. Elle se décompose en trois sous-sections : la première pose les principes généraux applicables au mandat de protection future, la deuxième les règles spécifiques relatives aux mandats passés devant notaires et la dernière, enfin, celles relatives aux mandats établis sous seing privé.

Sous-section 1 : Des dispositions communes

Composée de treize articles ( articles 477 à 488 ), cette sous-section définit les règles communes à tous les mandats de protection future, quelle que soit leur nature.

? La définition des personnes susceptibles de passer mandat

Le projet de loi distingue les deux situations permettant de recourir au mandat de protection future : le mandant peut d'abord mandater pour lui , en prévision de l'altération de ses propres facultés mentales ; il peut ensuite mandater pour son enfant , mineur ou majeur, à la condition, dans ce dernier cas, que celui-ci soit à sa charge matérielle et affective.

? L'établissement, l'entrée en vigueur, la modification et la fin du mandat

Le texte précise les conditions dans lesquelles le mandat entre en vigueur : il lui est ainsi donné exécution, d'une part, lorsque le mandant n'est plus en mesure d'assurer sa propre protection ou celle de son enfant, d'autre part, lorsque son décès rend nécessaire la mise en place d'une nouvelle protection pour cet enfant. Il convient de noter que si le mandat pour soi-même peut être conclu à la fois par acte authentique et par acte sous seing privé, le mandat pour autrui, lui, ne peut être passé que devant un notaire.

Le projet de loi laisse toute liberté au mandant dans le choix de son mandataire : il peut en effet s'agir de toute personne physique capable ou d'un mandataire professionnel à la protection des majeurs. Une fois le mandat accepté et entré en application, le mandataire ne peut plus être déchargé du mandat qu'avec l'autorisation du juge.

Comme pour les mesures de protection juridique prononcées par le juge, l'incapacité du mandant doit être établie grâce à un certificat médical, rédigé par un médecin expert agréé par le procureur de la République. Mais contrairement à celles-ci, le mandat de protection future entre en vigueur sans intervention du juge : c'est le mandataire qui en déclenche l'exécution en adressant le certificat médical au greffe du tribunal d'instance.

A l'inverse, les situations conduisant à mettre fin au mandat sont au nombre de cinq :

- les trois premières sont automatiques : il s'agit du rétablissement des facultés de l'intéressé, de son décès ou d'un empêchement frappant le mandataire lui-même (décès, mise sous protection juridique ou déconfiture s'il s'agit d'une personne morale) ;

- les deux dernières supposent l'intervention du juge : la personne protégée peut d'abord être placée en tutelle ou en curatelle, ce qui provoque l'extinction du mandat sauf décision contraire du juge. Celui-ci peut également révoquer purement et simplement le mandat, s'il estime qu'il ne satisfait pas aux principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité applicables à toutes les mesures de protection des majeurs.

Le projet de loi précise enfin que toute personne intéressée peut saisir le juge pour contester les conditions de l'exécution du mandat. Le juge a alors la faculté de choisir de mettre fin purement et simplement au mandat, de lui substituer une mesure de protection juridique, d'ouvrir une mesure de protection juridique complémentaire au mandat ou, enfin, d'autoriser le mandataire à accomplir des actes non couverts par le mandat.

? La définition du contenu du mandat de protection future

En matière de protection des biens , les règles de fonctionnement du mandat de protection future sont définies par référence aux règles applicables au mandat de droit commun :

- le mandat peut être soit général, soit spécial : ainsi, comme dans tous les mandats, il permet au mandant de définir exactement l'étendue de la mission de protection qu'il souhaite confier au mandataire. C'est d'ailleurs dans cette adaptabilité que réside la nouveauté du mandat par rapport au tuteur testamentaire, qui permettait simplement aux parents de désigner la personne de leur choix mais non de délimiter ses pouvoirs ;

- le mandat n'est pas un régime d'incapacité, mais un régime de procuration : comme dans tous les mandats, le mandant conserve la possibilité de faire seul les actes qu'il a délégués, concurremment avec le mandataire. Cette caractéristique explique pourquoi le projet de loi ne prévoit pas de donner systématiquement publicité au mandat ;

- en revanche, les possibilités pour le mandataire de se faire assister par une autre personne sont limitées par rapport au droit commun des mandats : une telle substitution n'est possible que pour les actes de gestion du patrimoine et uniquement à titre spécial, c'est-à-dire pour des actes déterminés .

? L'interprétation du mandat

Lorsque la rédaction du mandat est ambiguë sur l'étendue des pouvoirs du mandataire, le projet de loi précise qu'il doit être interprété comme confiant au mandataire les pouvoirs d'un tuteur.

La même règle est retenue en matière de recevabilité des actes passés par le mandant : comme en matière de tutelle, les actes passés par le mandant pendant la « période suspecte » peuvent être plus facilement annulés ou réduits et ceux accomplis sous l'empire du mandat doivent être examinés à la lumière des pouvoirs du mandataire : ils peuvent être annulés pour préjudice lorsque l'acte supposait l'assistance du mandataire, et déclarés nuls de plein droit lorsqu'ils appelaient sa représentation.

? Les obligations comptables du mandataire

Comme les autres personnes chargées d'une mesure de protection, le mandataire est tenu de dresser un inventaire des biens de la personne protégée et d'établir des comptes annuels de sa gestion. Il doit également tenir ces documents à la disposition de la personne qui est amenée à poursuivre sa gestion ou des héritiers si la personne est décédée. En revanche, leur contrôle par le juge reste une simple possibilité.

Sous-section 2 : Du mandat notarié

Composée de trois articles ( articles 489 à 491 ), cette sous-section précise les règles particulières applicables aux mandats de protection future lorsqu'ils sont établis sous la forme d'actes authentiques.

Le mandat notarié offre sans aucun doute les meilleures garanties au mandant, dans la mesure où il est élaboré sous le contrôle d'un spécialiste et où il est ensuite conservé et recensé comme tous les actes notariés, ce qui permet d'assurer son opposabilité aux tiers. Par ailleurs, le projet de loi prévoit que le mandataire doit, dans cette hypothèse, rendre les comptes de sa gestion au notaire, qui signale au juge toute anomalie constatée dans la gestion et tout acte n'entrant pas dans le champ du mandat.

Compte tenu de ces garanties plus fortes, le projet de loi autorise le mandat notarié à couvrir un champ très large : ainsi, par exception au droit commun des mandats, un mandat de protection future passé sous la forme d'un acte authentique autorise le mandataire à faire seul au nom de la personne tous les actes, y compris ceux de disposition. Ses pouvoirs sont donc plus larges que ceux d'un tuteur puisque ce dernier doit demander l'autorisation du juge pour cette dernière catégorie d'actes.

Sous-section 3 : Du mandat sous seing privé

Egalement composée de trois articles ( articles 492 à 494 ), cette sous-section détermine le régime du mandat passé sous la forme d'un acte sous seing privé.

Comme en matière de testament, l'authenticité d'un tel mandat est assurée par le contreseing de deux témoins majeurs. Il doit en outre être écrit de la main du mandant, sauf s'il est contresigné par un avocat et déposé au rang des minutes d'un notaire, auquel cas il peut être dactylographié.

Eu égard aux moindres garanties qu'il offre, son champ est plus limité que celui du mandat notarié : en matière patrimoniale, il ne peut porter que sur des actes conservatoires ou de gestion. Le mandataire peut toutefois obtenir du juge l'autorisation d'effectuer un acte qui ne rentre pas dans ce champ ou qui n'est pas explicitement prévu au mandat, lorsque cet acte est nécessaire dans l'intérêt du mandant.

Comme dans le cadre du mandat notarié, le mandataire qui reçoit ses pouvoirs d'un acte sous seing privé est soumis à des obligations comptables. Mais l'inventaire qu'il dresse des biens de la personne protégée et ses comptes de gestion ne sont pas systématiquement contrôlés.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre dix amendements rédactionnels ou de coordination, l'Assemblée nationale a adopté dix-sept amendements à cette section.

? Elle s'est d'abord attachée à encadrer le contenu du mandat de protection en matière de protection de la personne. A cet effet, elle a soumis le mandat aux nouvelles dispositions du code civil qui régissent cette protection : les pouvoirs du mandataire doivent s'exercer dans le respect du droit du majeur à être informé des décisions qui le concernent et dans le respect de sa sphère d'autonomie personnelle. Sous ces réserves, il est précisé que les pouvoirs du mandataire s'étendent également aux missions dévolues par le code de la santé publique et par le code de l'action sociale et des familles au représentant légal ou à la personne de confiance.

Dans le cadre du mandat notarié, l'Assemblé nationale a également tenu à préciser que les pouvoirs du mandataire en matière de protection de la personne sont plus limités qu'en matière patrimoniale : si pour les actes relatifs aux biens, il peut agir seul, y compris pour les actes de disposition, il n'en ira pas de même pour les actes touchant à la protection de la personne, qui continueront à requérir, selon la même règle de répartition qu'en matière de tutelle, l'autorisation du juge.

Elle a enfin ouvert au juge la possibilité de révoquer le mandat, lorsque celui-ci ne protège pas suffisamment non seulement les intérêts patrimoniaux du mandant mais aussi sa propre personne.

? L'Assemblée nationale a également clarifié le régime du mandat de protection future : la référence multiple, aux règles applicables à la tutelle jetait en effet un doute sur ce régime, en laissant à penser qu'il s'agissait non pas d'un régime de procuration mais d'un régime d'incapacité.

C'est la raison pour laquelle elle a supprimé la règle d'interprétation selon laquelle en cas d'ambiguïté, le mandat doit être compris comme donnant au mandataire les pouvoirs d'un tuteur. Le même motif explique le remplacement de l'application du régime des tutelles par celui de la sauvegarde de justice en matière d'annulation des actes du mandant.

? Elle a également assuré une meilleure insertion du mandat de protection future dans le dispositif global des mesures de protection juridique des majeurs : elle a ainsi prévu explicitement la possibilité, pour le juge, de suspendre le mandat pour la durée d'une mesure de sauvegarde de justice.

Elle a, en outre, précisé que lorsque le juge ouvre une tutelle en complément du mandat de protection future, le mandataire et la personne désignée par le juge restent indépendants et ne sont pas responsables l'un envers l'autre mais ont l'obligation de s'informer mutuellement de leurs décisions.

? S'agissant des différentes formalités entourant la conclusion, l'entrée en vigueur et la fin du mandat, l'Assemblée nationale a d'abord précisé que le mandataire de protection future doit non seulement être capable, mais également ne pas se trouver dans l'une des situations qui conduiraient le juge à le déclarer empêché dans le cadre d'une tutelle ou d'une curatelle.

Afin de renforcer les garanties apportées au majeur vulnérable, les députés ont également prévu d'encadrer la procédure de passation d'un mandat notarié, en rendant obligatoire la présence d'un second notaire désigné par la chambre des notaires. En revanche, pour simplifier la procédure de révocation d'un tel mandat, ils ont remplacé la révocation par un nouvel acte notarié par une simple notification aux deux notaires et au mandataire.

L'Assemblée nationale a, par ailleurs, voulu donner les moyens au juge de contrôler les conditions de la mise à exécution du mandat : à cet effet, elle a prévu l'obligation, pour le mandataire, de remettre au greffe non seulement le certificat médical mais aussi le mandat lui-même. Elle a, en outre, donné la possibilité à tout intéressé non seulement de contester les conditions d'exécution du mandat mais également d'en contester l'entrée en application.

? L'Assemblée nationale s'est ensuite attachée à renforcer les moyens de contrôle de l'exécution du mandat. Pour cela, elle a rendu obligatoire la conservation par le mandataire de l'inventaire et des comptes de la gestion pendant les cinq années suivant la fin du mandat. Elle a également prévu que l'ancien mandataire tient les documents comptables à la disposition non seulement de la personne qui poursuit sa gestion et des héritiers mais aussi de la personne protégée elle-même redevenue capable. D'une façon générale, elle a renvoyé au mandat lui-même la fixation des modalités de sa propre exécution.

? Concernant enfin le mandat sous seing privé, l'Assemblée nationale a procédé à un allégement de leurs règles de forme : elle a ainsi supprimé l'obligation pour le mandat d'être écrit de la main du mandant, tout en conservant deux possibilités pour assurer son authenticité (contreseing par un avocat ou par deux témoins). Elle a, en outre, précisé que le mandat sous seing privé acquiert date certaine contre les tiers que s'il est enregistré chez un notaire. A défaut, il n'acquiert date certaine qu'à la mort du mandant.

III - La position de votre commission

Votre commission approuve la création du mandat de protection future qui constitue un outil particulièrement attendu par les parents d'enfants handicapés. L'allongement de l'espérance de vie des personnes handicapées rend possible le fait qu'elles puissent survivre à leurs parents et soulève chez ces derniers une inquiétude nouvelle, celle de savoir qui prendra soin de leur enfant lorsque eux-mêmes auront disparu ou lorsqu'ils auront eux aussi besoin d'une protection.

Elle soutient également la philosophie de ce dispositif de protection, qui repose sur la volonté contractuelle des parties et ne fait intervenir le juge que de façon subsidiaire. Il permet d'apporter une solution souple et responsabilisante aux personnes qui veulent organiser leur propre protection.

Le dispositif proposé mériterait toutefois d'être clarifié sur plusieurs points : tout d'abord, la notion d'enfant majeur à la charge « matérielle et affective » de ses parents est insuffisamment précise, car elle ne permet pas de viser avec certitude les seuls majeurs handicapés. On peut en effet être à la charge matérielle et affective de ses parents sans pour autant nécessiter une protection juridique si ceux-ci viennent à disparaître. Or, il serait singulier d'autoriser des parents à mandater pour leur enfant majeur capable, alors que lui-même pourrait le faire. De plus, il existe dans ce cas un risque de conflit de mandat , entre celui conclu par les parents et celui passé par l'enfant majeur. A défaut de pouvoir envisager une définition plus claire, votre commission estime nécessaire de régler au minimum ce conflit de normes et vous propose d' amender le dispositif sur ce point.

Votre commission s'interroge ensuite sur les conditions requises pour lever le mandat : le projet de loi prévoit en effet l'obligation de produire un certificat médical établi selon les mêmes règles que celui exigé pour l'ouverture de la mesure, c'est-à-dire un certificat établi par un médecin expert agréé par le procureur de la République. Or, les mesures de protection juridique prononcées par le juge peuvent être levées sur présentation d'un certificat médical de droit commun. Votre commission ne comprend pas les raisons qui poussent à une plus grande sévérité en matière de mandat de protection future et vous propose en conséquence d'aligner, par amendement , les exigences en la matière sur celles prévues pour l'ensemble des autres mesures de protection juridique.

Votre commission regrette également les incertitudes qui entourent le régime du mandat : bien que la référence au droit commun des mandats fasse plutôt pencher pour une telle interprétation, il n'apparaît à aucun moment clairement que le mandant conserve la possibilité de faire tous les actes par lui-même. En supprimant toute référence au régime des tutelles, tant en matière d'interprétation des pouvoirs du mandataire qu'en matière d'annulation des actes du mandant, l'Assemblée nationale a tenté de confirmer cette interprétation. Votre commission estime cependant nécessaire d'aller plus loin et de confirmer expressément, par amendement , le régime de simple procuration du mandat : la solution inverse, qui consisterait à créer sans aucun contrôle du juge un véritable régime d'incapacité, ne lui paraît en effet pas envisageable.

S'il est effectivement nécessaire d'apporter des garanties à la personne protégée par un mandat de protection future, votre commission estime toutefois que l'Assemblée nationale est allée trop loin en exigeant la présence simultanée de deux notaires pour la conclusion d'un mandat par acte authentique. Cette précaution s'inspirait de celle prévue par la loi sur les successions en matière de pacte successoral : dans ce cadre, un deuxième notaire était exigé pour assister l'enfant à qui on demandait de renoncer à l'avance à sa réserve au profit d'un frère ou d'une soeur handicapés. Votre commission considère que la situation est ici bien différente car le client et la personne à protéger sont une seule et même personne : il n'y a donc pas lieu de craindre une quelconque partialité du notaire. Estimant que la présence d'un second notaire est inutile, elle vous propose de la supprimer .

Votre commission estime également excessives certaines limitations apportées par l'Assemblée nationale au champ du mandat notarié : en limitant aux actes patrimoniaux les actes entrant automatiquement dans le mandat rédigé en termes généraux, elle en a de fait exclu tous les actes à caractère personnel , y compris ceux que, dans la même situation, un tuteur pourrait faire sans autorisation. Ainsi, s'agissant de la protection de la personne, un mandat devrait obligatoirement être spécial, c'est-à-dire les inclure de façon expresse. Votre commission considère que les actes de protection de la personne qui, en régime de tutelle, ne demanderaient pas d'autorisation du juge pourraient au contraire être automatiquement inclus dans un mandat rédigé. Il serait également utile de rappeler que le mandataire qui tient son mandat d'un acte authentique peut demander au juge l'autorisation d'accomplir un acte qui n'est pas dans son mandat mais qui est nécessaire pour pourvoir à l'intérêt du mandant. Elle vous propose donc d' amender le dispositif sur ces deux points.

A l'inverse, le texte est insuffisamment précis en la matière, s'agissant du mandat sous seing privé : il convient donc de préciser que celui-ci, lorsqu'il est rédigé en termes généraux, est limité dans tous les domaines - protection des biens et de la personne - aux actes qu'un tuteur pourrait accomplir sans autorisation.

Votre commission vous propose en outre d'adopter à cette section trois amendements rédactionnels ou de coordination.

Elle vous demande d'adopter cette section et l'ensemble du chapitre II, ainsi amendés.

*

Chapitre III - De la mesure d'assistance judiciaire (art. 495 à 495-9 du code civil)

I - Le texte proposé

Ce troisième chapitre, composé de dix articles ( articles 495 à 495-9 ), transforme l'actuelle mesure de tutelle aux prestations sociales adulte (TPSA), prévue par le code de la sécurité sociale en une « mesure d'assistance judiciaire », inscrite parmi les mesures judiciaires de protection des majeurs relevant du code civil.

Créée en 1966, la TPSA visait à protéger les majeurs bénéficiaires de prestations sociales qui ne les utilisent pas dans leur intérêt ou qui, en raison de leur état mental ou d'une déficience physique, vivent « dans des conditions d'alimentation, de logement et d'hygiène manifestement défectueuses » . Elle consistait à autoriser le versement de tout ou partie des prestations sociale à un tuteur aux prestations sociales, chargé de les employer au profit du bénéficiaire.

Or, depuis sa création, si la TPSA a connu un développement important, elle a également connu de nombreuses dérives :

- leur nombre a d'abord crû de façon très rapide : entre 2005 et 2005, elles ont augmenté de 8,2 %, hors doublons avec des mesures de protection juridique. Cette progression est en grande partie liée au développement de la précarité et de l'exclusion sociale : en 2002, 66 % des bénéficiaires d'une TPSA avaient des revenus inférieurs ou égaux au minimum vieillesse ;

- le cumul avec des mesures de protection juridique a pris une ampleur considérable : l'article L. 167-2 du code de la sécurité sociale autorisait le cumul de cette mesure avec une mesure de tutelle ou de curatelle. Mais ce cumul devait se limiter aux cas où une action éducative en vue de la réadaptation de l'intéressé à une gestion normale de ses prestations était envisageable. En réalité, ce critère de cumul a rapidement disparu au profit d'une considération, nettement plus prosaïque, liée à la rémunération des mesures : la prise en charge de la TPSA par les organismes débiteur des prestations en a fait la mesure de protection la mieux rémunérée, ce qui a conduit fréquemment les opérateurs tutélaires à réclamer ces doubles mesures. Ces doublons ont connu une période de très forte de croissance, dans les années quatre-vingt-dix, atteignant plus de 300 % sur l'ensemble de la période. Un recul s'opère toutefois depuis quelques années (- 6 % entre 2002 et 2005).

Un grand nombre de rapports publiés depuis dix ans milite pour une réforme de la tutelle aux prestations sociales, considérant qu'une large partie du public qu'elle concerne relève davantage d'un accompagnement social que d'une mesure de protection prononcée par un juge.

Ainsi, le rapport du groupe de travail interministériel sur le dispositif de protection des majeurs 10 ( * ) , estimait en 2002 qu'il convenait « de substituer à l'actuelle tutelle aux prestations sociales, une mesure de gestion budgétaire et sociale et de lui donner sa place véritable dans le dispositif civil de protection des majeurs: celle d'une gestion limitée aux prestations sociales, sans aucune des incapacités attachées à la tutelle ou à la curatelle. »

C'est ce à quoi s'attache ce chapitre, en coordination avec l'article 8 du présent projet de loi, en mettant en place un dispositif de protection en faveur des personnes en très grande difficulté sociale reposant sur deux mesures successives : une protection administrative et contractuelle gérée par les départements et intitulée « mesure d'accompagnement social personnalisée » (MASP) et une protection contraignante, ouverte par le juge, dénommée « mesure d'assistance judiciaire » (MAJ).

Conformément aux recommandations du rapport Favard, le présent chapitre fait en effet le choix d'une mesure inscrite dans le code civil, n'entraînant aucune incapacité juridique autre que celle de percevoir les prestations visées par le juge. Il met également fin à la pratique des doubles mesures : la mesure d'assistance judiciaire ne peut être instaurée au profit de majeurs déjà placés sous protection juridique et l'ouverture d'une telle mesure met automatiquement fin à la MAJ.

La nouvelle mesure ne peut en outre être ouverte que sous deux conditions cumulatives : lorsque la santé ou la sécurité de la personne est compromise du fait de son incapacité à assurer seule la gestion de ses prestations sociales et que l'accompagnement social contractuel mis en oeuvre par le département a échoué. Son objectif est reprécisé par rapport à l'actuelle TPSA : rétablir l'autonomie de la personne dans la gestion de ses ressources, en mobilisant deux outils, la gestion directe des prestations sociales par un mandataire et un accompagnement social à visée éducative. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le mandataire doit, dans toute la mesure du possible, tenir compte de la situation familiale du majeur et demander son avis à la personne pour décider de l'emploi des prestations.

La mesure d'assistance judiciaire ne peut être ouverte qu'à la demande du procureur de la République : il s'agit, dans ce domaine également, d'assurer la subsidiarité de la protection judiciaire par rapport à l'accompagnement social. Le ministère public ne peut d'ailleurs pas saisir le juge de sa propre initiative, il doit avoir lui-même été saisi en ce sens par les services sociaux qui ont constaté l'échec de la mesure d'accompagnement social personnalisée.

L'ouverture de cette mesure est prononcée par le juge, pour une durée initiale maximum de deux ans . Elle peut être renouvelée, sur décision spécialement motivée et dans la limite d'une durée totale de quatre ans. Contrairement aux autres mesures de protection des majeurs, son exercice n'est pas confié par priorité à la famille mais à un mandataire professionnel , cette particularité s'expliquant par la nécessité d'assurer l'accompagnement éducatif nécessaire pour aider la personne à recouvrer son autonomie dans la gestion de ses prestations.

Comme la TPSA, la gestion directe par un mandataire des ressources du bénéficiaire de la mesure d'assistance judiciaire est limitée aux prestations sociales , dont la liste est fixée par décret. Le projet de loi précise cependant d'ores et déjà que les prestations de retraite ne pourront pas être concernées par une mesure d'assistance judiciaire : leur caractère contributif et leur nature de revenu de remplacement conduisent en effet à aligner leur régime sur celui des salaires, qui ne peuvent pas faire l'objet d'une gestion directe.

Les prestations sociales versées à un foyer peuvent déjà faire l'objet d'une mesure de gestion directe, dans le cadre de la tutelle aux prestations familiale, décidée par le juge des enfants, lorsque les parents n'emploient pas les prestations dans l'intérêt de leurs enfants. Il était donc nécessaire d'assurer la coordination de cette mesure avec la nouvelle MAJ : leur coexistence est autorisée, mais les prestations incluses dans l'une ne peuvent naturellement pas l'être dans l'autre.

Le présent chapitre renforce également les obligations du mandataire chargé de gérer les prestations par rapport à l'actuelle TPSA :

- conformément au principe général d'interdiction des comptes pivots, les prestations placées sous l'empire de la MAJ doivent être déposées sur un compte individuel ouvert au nom du majeur. Cette obligation ne s'impose pas en revanche aux mandataires préposés d'établissements, dans la mesure où les prestations sont alors simplement individualisées sur des lignes budgétaires différentes, dans la comptabilité de l'établissement, l'application des règles de la comptabilité publique imposant un contrôle strict de l'emploi des fonds et une ventilation des produits financiers afférents ;

- il rend également applicables au mandataire de la MAJ les règles applicables à tous les mandataires à la protection des majeurs en matière d'établissement, de vérification et d'approbation des comptes.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre onze amendements rédactionnels ou de coordination, l'Assemblée nationale a adopté quatre amendements à ce chapitre :

- elle a d'abord changé l'intitulé de la mesure d'assistance judiciaire pour le remplacer par celui de « mesure d'accompagnement judiciaire » : elle a en effet estimé que la notion d'assistance doit être strictement réservée au régime de la curatelle ;

- elle a ensuite rendu obligatoire, pour le juge, l'audition préalable de la personne concernée avant l'ouverture d'une mesure d'accompagnement judiciaire : elle a considéré que cette audition constitue une stricte application des droits de la défense, eu égard à une mesure au moins partiellement privative de libertés ;

- elle a surtout prévu la possibilité, pour le juge, d'étendre exceptionnellement la gestion directe prévue dans le cadre de la MAJ à d'autres catégories de ressources que les prestations sociales, lorsque la gestion des seules prestations apparaît comme insuffisante pour rétablir la situation : il lui a en effet semblé que l'efficacité de la mesure est conditionnée à la possibilité, pour le mandataire, d'appréhender l'ensemble des revenus de la personne. Lorsque le bénéficiaire de la MAJ est allocataire d'un minimum social, la limitation de la MAJ aux seules prestations est sans incidence, mais la situation change dès lors que la personne quitte ce statut, ce qui risque de remettre en cause l'accompagnement social sur le long terme ;

- elle a enfin encadré le renouvellement de la MAJ : celui-ci ne peut plus être décidé d'office par le juge mais doit lui être demandé par le procureur, le mandataire ou la personne elle-même.

III - La position de votre commission

Votre commission approuve naturellement la volonté du Gouvernement de clarifier le champ respectif de la protection juridique et de l'accompagnement social. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle elle salue la suppression de la curatelle pour prodigalité, intempérance ou oisiveté qui était source de confusion en matière d'accès à la protection juridique.

De la même façon, elle approuve la subsidiarité instituée entre la mesure d'accompagnement judiciaire, créée par ce chapitre, et la mesure d'accompagnement social personnalisée, introduite par l'article 8 du présent projet de loi : pour un grand nombre de personnes, la mise en place d'une aide contractuelle à la gestion du budget familial, complétée par un accompagnement renforcé - notamment dans le domaine de la santé et du logement - doit permettre d'éviter l'ouverture d'une mesure judiciaire lourde de conséquences.

Votre commission s'interroge toutefois sur la limitation apportée au champ de la MAJ. En restreignant la mesure aux seules prestations sociales, le projet de loi n'innove pas, il s'inscrit dans la ligne de la TPSA, dont elle ne se distingue qu'en raison de sa subsidiarité par rapport à la MASP. La philosophie d'une telle mesure est alors davantage de s'assurer que les prestations, versées par la collectivité, sont réellement employées dans le but pour lequel elles ont été créées.

Mais conjuguée à la disparition de la curatelle pour prodigalité, cette limitation signifie également la disparition de toute protection pour les personnes incapables de gérer leurs ressources dès lors qu'elles ne perçoivent pas de prestation sociale.

On peut naturellement adhérer à l'idée que toute personne est libre de dilapider son patrimoine, dès lors qu'elle n'est pas à la charge de la société. Votre commission considère, quant à elle, que lorsqu'une personne compromet sa sécurité, sa santé ou encore ses obligations familiales ou conjugales, il serait singulier d'attendre qu'elle se trouve dans le besoin et perçoive alors des prestations pour pouvoir assurer sa protection.

C'est la raison pour laquelle votre commission est favorable à une extension possible de la MAJ à l'ensemble des revenus . Elle y voit même un avantage, pour le prodigue désormais exclu de la curatelle : celui d'une protection bien plus adaptée à ses besoins car non assortie d'une incapacité juridique qui ne se justifiait pas dans son cas mais qui lui était imposée par le régime même de la curatelle.

L'Assemblée nationale a fait un premier pas dans cette direction, en autorisant le juge à étendre la MAJ à d'autres revenus lorsque la gestion directe des seules prestations ne suffit pas à assurer la protection de l'individu. Mais cette solution reste en réalité au milieu du gué, car elle continue d'exiger la perception d'au moins une prestation sociale pour y accéder. C'est la raison pour laquelle votre commission vous propose de supprimer ce dernier verrou, en ouvrant d'emblée, par amendement , la MAJ à toute personne, quel que soit le type de revenu qu'elle perçoit.

Votre commission se félicite en revanche de l'affirmation du principe d'interdiction des doubles mesures, source aujourd'hui de nombreuses dérives. Elle s'interroge toutefois sur la nécessité d'y apporter une nuance, dans le cas du cumul entre une MAJ et une mesure de sauvegarde de justice. Cette dernière est en effet temporaire et ne comporte pas d'incapacité : dans ces conditions, la levée de la MAJ, du fait du prononcé d'une mesure de sauvegarde, pourrait compromettre la protection des intérêts financiers de la personne, puisqu'elle recouvrirait brusquement ses facultés de percevoir et de gérer ses ressources. Votre commission vous propose donc de prévoir la faculté, pour le juge, d'apprécier l'opportunité de lever la MAJ quand il prononce une mesure de sauvegarde.

S'agissant de la coexistence d'une MAJ et d'une tutelle aux prestations familiales, désormais intitulée « mesure d'aide à la gestion du budget familial », votre commission l'approuve, dans la mesure où ces deux mesures ne poursuivent pas le même objectif. Il lui paraît en revanche important de prévoir, par amendement , que les mandataires exerçant ces deux mesures pour un même foyer s'informent mutuellement des décisions qu'ils prennent.

Votre commission vous propose en outre dix amendements de rédactionnels ou de coordination et vous demande d'adopter ce chapitre ainsi amendé.

*

Elle vous propose d'adopter l'ensemble de l'article 5 ainsi amendé.

TITRE II - DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE DE L'ACTION SOCIALE ET DES FAMILLES

CHAPITRE PREMIER - L'accompagnement du majeur en matière sociale et budgétaire

Article 8 (art. L. 271-1 à L. 271-8 du code de l'action sociale et des familles) - Création d'une mesure administrative d'accompagnement social personnalisé

Objet : Cet article crée une mesure d'accompagnement social personnalisé confiée aux départements, dont l'objectif est d'aider le bénéficiaire à retrouver son autonomie dans la gestion de ses ressources.

I - Le texte proposé

Cet article procède à la clarification des rôles que souhaite opérer le présent projet de loi entre protection juridique et protection sociale. Cette clarification conduit ainsi à réserver la protection juridique aux personnes souffrant d'une altération de leurs facultés mentales qui ont besoin d'une protection juridique, et à orienter vers l'accompagnement social celles qui sont simplement en difficulté dans la gestion du quotidien.

Pour cette deuxième catégorie de personnes, le texte propose des mesures graduées. Le premier échelon, reposant sur la libre adhésion du bénéficiaire, est créé par cet article, sous la forme d'une mesure d'accompagnement social personnalisé. C'est seulement si cette mesure échoue qu'intervient la mesure judiciaire, pour les personnes qui ont besoin d'une mesure réellement contraignante pour s'en sortir.

Afin de mettre en oeuvre cette nouvelle répartition des compétences, le présent article crée dans le code de l'action sociale et des familles un nouveau titre intitulé « Accompagnement de la personne en matière budgétaire et sociale » , composé d'un chapitre unique consacré à la nouvelle mesure d'accompagnement social personnalisé (MASP).

Aux termes du nouvel article L. 272-1 du code de l'action sociale et des familles, la MASP est destinée aux personnes dont les difficultés à gérer leurs ressources menacent la santé ou la sécurité. Elle mobilise deux types d'actions : une aide à la gestion des prestations sociale, destinée à éviter l'aggravation immédiate de la situation du bénéficiaire, et un accompagnement social personnalisé, plus large, visant à aider les personnes à retrouver une autonomie dans la gestion de leurs ressources. C'est pourquoi, dans la plupart des cas, cette mesure a vocation à être pilotée par des conseillers en économie sociale et familiale.

Afin de responsabiliser les bénéficiaires, le projet de loi prévoit que la MASP prend la forme d'un contrat , passé entre la personne concernée et les services sociaux du département. Comme tout contrat, il repose sur des engagements réciproques : le bénéficiaire doit s'engager à suivre les actions éducatives qui lui sont proposées, le département s'engageant en contrepartie à mobiliser les moyens nécessaires au rétablissement de son autonomie.

La responsabilisation des bénéficiaires passe également par une seconde mesure, à savoir la possibilité ouverte aux départements de leur demander de contribuer au financement de leur propre protection . Cette disposition est d'ailleurs conforme au droit de l'aide sociale qui prévoit une participation des usagers à proportion de leurs facultés contributives. Elle se justifie d'autant plus que les personnes visées par la MASP ne sont pas nécessairement démunies : percevoir des prestations sociales ne signifie pas forcément ne vivre que de ces prestations.

Le montant de la contribution sera fixé par le président du conseil général. Celui-ci aura toutefois compétence liée en la matière, puisqu'il devra le faire dans les limites prévues par le règlement départemental d'aide sociale, arrêté par l'assemblée départementale. Le barème retenu par ce règlement pourra notamment tenir compte des ressources des intéressés et, pour éviter des disparités territoriales trop importantes, son montant sera plafonné par décret.

La durée de la mesure est également encadrée : si sa durée initiale ne peut être inférieure à six mois, durée minimum pour mettre en place un accompagnement social de qualité, elle ne peut en revanche être renouvelée au-delà de quatre ans : le Gouvernement considère qu'une mesure inefficace au bout de quatre ans exige qu'on envisage la poursuite de la protection par d'autres moyens, la MAJ ayant naturellement vocation à prendre le relais mais n'excluant pas la possibilité d'une mesure de protection juridique plus contraignante. D'une façon générale, tout renouvellement de la MASP devra être précédé d'une évaluation de l'efficacité de la mesure antérieure.

La mise en oeuvre de la MASP ne doit pas conduire à un report de charge entre cette mesure et l'accompagnement social de droit commun dont l'intéressé peut par ailleurs bénéficier, que ce soit dans le cadre d'un contrat d'insertion lié au RMI, de l'appui social individualisé ou de l'intervention d'une travailleuse familiale des caisses d'allocations familiales. C'est la raison pour laquelle le projet de loi prévoit explicitement que les services sociaux chargés de la MASP ont une mission de coordination entre les actions prévues dans ce cadre et les mesures d'action sociale générale.

Afin d'adapter au mieux le contenu de la MASP aux besoins du bénéficiaire, le projet de loi prévoit, à l'intérieur même de la mesure, une gradation dans les outils mis en oeuvre :

- le contrat peut d'abord prévoir une simple aide à la gestion des prestations, sous la forme de conseils, d'assistance à la réalisation d'un budget prévisionnel ou, le cas échant, d'aide aux démarches pour sortir du surendettement ;

- si cette aide se révèle insuffisante, le contrat peut prévoir, avec l'accord du bénéficiaire, une gestion directe des prestations par le département, celui-ci ayant l'obligation d'affecter les sommes correspondantes à la couverture des dépenses de logement du bénéficiaire ;

- en cas de difficultés à recueillir l'accord du bénéficiaire ou si celui-ci ne respecte pas les engagements contractés dans le cadre de la mesure, le président du conseil général peut demander l'assistance du juge pour pouvoir poursuivre l'accompagnement social : le juge peut alors décider d'autoriser le versement direct au bailleur des prestations sociales de l'intéressé, dans la limite du montant du loyer et des charges locatives. Compte tenu de son caractère contraignant, cette possibilité ne pourra être envisagée que lorsque le bénéficiaire aura manqué à ses obligations locatives pendant au moins deux mois et ne saurait au total excéder quatre ans. Elle ne peut par ailleurs conduire à priver l'intéressé des ressources nécessaires à sa subsistance ;

- enfin, lorsque malgré ces différents outils, la MASP s'avère insuffisante à protéger les intérêts de la personne, le président du conseil général déclenche le processus judiciaire , en transmettant au procureur de la République un rapport circonstancié sur la situation sociale, médicale et financière de la personne et les mesures mises en oeuvre, leurs résultats ou leur absence de résultat. Il s'agit d'informer le plus complètement possible le procureur afin que celui établisse l'opportunité de saisir le juge des tutelles en vue de l'ouverture d'une mesure plus contraignante.

Cet article prévoit enfin deux dispositions finales :

- la possibilité, pour le département, de déléguer par convention la mise en oeuvre de ces mesures à un centre communal d'action sociale (CCAS), à une association ou à une Caf, ces dernières ayant été au préalable agréées par lui pour assurer cette mission ;

- l'obligation, pour les conseils généraux, de transmettre à l'Etat des données agrégées concernant la mise en oeuvre de la MASP, à des fins statistiques. Les résultats de ces études seront naturellement retransmis aux départements, afin de leur permettre d'évaluer leurs pratiques. La nature de ces données et les modalités de leur transmission sont fixées par décret.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre sept amendements rédactionnels et de coordination, l'Assemblée nationale a modifié cet article sur six points principaux.

Comme pour la MAJ, elle a d'abord étendu le champ de la MASP des seules prestations sociales à l'ensemble des revenus. Elle a en effet estimé que, comme pour la MAJ, l'efficacité de la mesure suppose de pouvoir inclure l'ensemble des revenus de l'individu : les prestations sociales peuvent représenter une proportion plus ou moins importante des ressources de la personne et, pour éviter la mise en cause de la sécurité ou de la santé de la personne, il peut être indispensable d'offrir une assistance qui aille au-delà de la gestion des seules prestations.

Elle a également voulu donner plus de liberté au président du conseil général pour fixer la durée de la MASP : là où le projet du Gouvernement exigeait un renouvellement tous les six ois, elle a prévu la possibilité d'une mesure initiale pouvant être comprise entre six mois et deux ans, selon les besoins de l'intéressé.

Elle a ensuite précisé que le contrat d'accompagnement peut être modifié par avenant et supprimé le caractère facultatif de la modulation du barème de la contribution des bénéficiaires au financement de la MASP.

S'agissant enfin du signalement effectué par le président du conseil général auprès du procureur en cas d'échec de la mesure, l'Assemblée nationale a précisé que les informations médicales éventuellement transmises doivent l'être sous pli cacheté et que le procureur a l'obligation d'informer le président du conseil général de la suite donnée à son signalement.

III - La position de votre commission

Comme pour la mesure d'assistance judiciaire, votre commission s'est interrogée sur la limitation de la MASP aux seules prestations sociales, d'autant que la limitation apportée ici est d'autant plus difficile à comprendre qu'il s'agit d'une mesure contractuelle et qu'il ne semble pas nécessaire d'encadrer à ce point la volonté des parties en la matière.

Votre commission reconnaît toutefois que, s'agissant d'une mesure purement administrative, il paraît difficile de passer outre la volonté du bénéficiaire en matière de versement direct. Elle estime donc qu'une solution équilibrée consisterait à autoriser l'extension de la MASP à tous les revenus, en continuant de limiter la possibilité d'un versement direct au bailleur aux seules prestations sociales. Cette solution permettrait d'ailleurs d'opérer une gradation avec la MAJ, puisque en cas d'insuffisance du versement direct des seules prestations, une mesure entièrement judiciaire pourrait être envisagée, autorisant, elle, une gestion de l'ensemble des revenus. Votre commission vous propose donc d' amender le dispositif dans ce sens.

Votre commission approuve par ailleurs entièrement la possibilité ouverte au département de déléguer la mise en oeuvre de la MASP à d'autres institutions capables d'assurer un accompagnement social de qualité. Elle s'étonne en revanche de la lourdeur de la procédure envisagée pour pouvoir y procéder : les conseils généraux devraient ainsi préalablement agréer les opérateurs avant de pouvoir passer convention avec eux. Votre commission considère que cet agrément préalable n'est pas nécessaire, dès lors que le département est, en tout état de cause, toujours libre de choisir ses partenaires contractuels. Elle vous propose donc de le supprimer .

Une ambiguïté subsiste également en ce qui concerne la fixation du montant de la contribution qui peut être demandée aux bénéficiaires de MASP : tel qu'il est rédigé, le projet de loi ne permet pas de déterminer clairement qui, du président du conseil général ou de l'assemblée départementale - compétente pour arrêter le règlement départemental d'aide sociale - fixe ce montant. Votre commission considère que ce rôle revient au président du conseil général, comme c'est le cas d'une façon générale pour la détermination de la participation des bénéficiaires de l'aide sociale. Elle vous propose donc de le préciser, par amendement .

Votre commission vous propose enfin cinq modifications rédactionnelles ou de coordination et vous demande d'adopter cet article ainsi amendé.

CHAPITRE II - La protection judiciaire du majeur

Le projet de loi distingue les nouvelles mesures d'accompagnement social personnalisé (MASP) et la protection judiciaire, qui inclut les nouvelles mesures d'accompagnement judiciaire (MAJ), qui remplacent l'actuelle tutelle aux prestations sociales aux adultes (TPSA).

Le présent chapitre vise à réorganiser le système de protection judiciaire des personnes majeures en grandes difficultés sociales, afin en améliorer la cohérence et la transparence.

Section 1 - Dispositions communes

La protection judiciaire des majeurs est souvent déléguée à des membres de la famille ou des proches de la personne concernée. Lorsque ce n'est pas le cas, elle est confiée :

- soit à des services médico-sociaux ou à des services relevant d'associations ou d'organismes de sécurité sociale ;

- soit à des gérants de tutelle privée exerçant à titre individuel ;

- soit à des personnes exerçant dans un cadre institutionnel, au sein d'établissements pour personnes handicapées ou âgées (préposées à ces établissements).

La présente section tend à harmoniser les obligations et les règles de fonctionnement qui s'appliquent à ces trois catégories d'intervenants, en établissant des dispositions communes à l'exercice de leur activité professionnelle.

Article 9 (art. L. 461-1 à L. 461-8 [nouveaux] du code de l'action sociale et des familles) - Régime juridique de l'activité des mandataires judiciaires à la protection des majeurs

Objet : Cet article insère huit nouveaux articles dans le code de l'action sociale et des familles visant à créer des dispositions communes régissant l'activité des mandataires judiciaires à la protection des majeurs.

I - Le texte proposé

Dans le droit actuel, les personnes habilitées à exercer une protection judiciaire sur une personne majeure sont mentionnées par l'article 499 du code civil pour les tutelles et par l'article 509-1 pour les curatelles. Dans les deux cas, ces personnes sont désignées par le juge des tutelles et peuvent être extérieures à la famille.

Dans le cas des tutelles , il peut s'agir d'un « préposé appartenant au personnel administratif de l'établissement de traitement [ou] d'un administrateur spécial, choisis dans les conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat ». Le décret n° 69-195 du 15 février 1969, modifié par le décret n° 72-284 du 11 avril 1972, précise que le juge des tutelles peut désigner comme gérant de tutelle :

- les personnes qualifiées figurant sur une liste établie, chaque année, par le procureur de la République ;

- les associations reconnues d'utilité publique, les associations déclarées et les fondations ayant une vocation sociale et figurant sur une liste établie, chaque année, par le procureur de la République ;

- les personnes physiques ou morales agréées comme tuteurs aux prestations sociales ;

- les personnes préposées, désignées par les établissements d'hospitalisation, de soins ou de cure, publics ou privés.

Pour les curatelles , il s'agit en priorité du conjoint ou, à défaut, de toute autre personne nommée par le juge des tutelles.

Le présent article harmonise les obligations et conditions d'exercice des opérateurs tutélaires actuels en les regroupant sous l'appellation unique de « mandataires judiciaires à la protection des majeurs » .

A cette fin, cet article complète le livre quatrième du code de l'action sociale et des familles par un titre VI, intitulé « Mandataires judiciaires à la protection des majeurs », qui comprend trois chapitres I er , II et III, dont les titres respectifs sont : « Dispositions communes », « Personnes physiques mandataires judiciaires à la protection des majeurs » et « Dispositions pénales ». Les dispositions du premier chapitre sont détaillées dans le présent article, celles des deuxième et troisième chapitres faisant respectivement l'objet des articles 14 et 15 du projet de loi. Conséquence de cet ajout, le titre du livre quatrième relatif aux professions et aux activités d'accueil est modifié et couvre un champ plus large relatif aux « Professions et activités sociales ».

Les huit articles que cet article vise à insérer dans le code de l'action sociale et des familles précisent les missions des mandataires judiciaires à la protection des majeurs, les compétences requises en vue de leur inscription sur la liste départementale établie par le préfet, les modalités de prise en charge financière de leur activité, ainsi que leurs obligations vis-à-vis des personnes majeures dont ils assurent la protection juridique.

? Le nouvel article L. 461-1 définit les missions des mandataires judiciaires à la protection des majeurs . Celles-ci varient en fonction de la nature de la mesure de protection judiciaire que leur confie le juge des tutelles. Ce dernier leur délègue un mandat spécial dans le cadre de la sauvegarde de justice, de la curatelle ou de la tutelle ou encore de la mesure d'accompagnement judiciaire. Les mandataires se trouvent ainsi clairement placés dans un lien de subordination par rapport au juge des tutelles et doivent exercer leur activité « à titre habituel », ce qui suppose à la fois une certaine continuité dans le temps et dans la nature des missions exercées.

? L' article L. 461-2 prévoit l'inscription préfectorale des mandataires judiciaires sur une liste départementale unique . Actuellement, les opérateurs dont l'activité est subventionnée par l'Etat (les associations, notamment) font l'objet d'une liste élaborée par le préfet, tandis que les gérants de tutelle privés ou les services dont l'activité n'est pas subventionnée sont répertoriés auprès du procureur de la République. La création d'une liste unique, centralisée par le préfet du département, permettra ainsi d'harmoniser les conditions d'octroi des agréments ou autorisations d'exercice et d'améliorer le contrôle administratif de l'ensemble des demandes. Celles-ci seront désormais toutes instruites par les Ddass, alors que jusqu'à présent leur contrôle ne s'exerçait que sur les seules structures bénéficiant de subventions publiques.

Cette liste regroupera ainsi trois catégories de personnes ou services :

- les services mentionnés au 14° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, qui recouvrent, selon les termes de l'article 10 du projet de loi, « les services mettant en oeuvre les mesures de protection des majeurs ordonnées par l'autorité judiciaire au titre du mandat spécial auquel il peut être recouru dans le cadre de la sauvegarde de justice ou au titre de la curatelle, de la tutelle ou de la mesure d'accompagnement judiciaire ». Il s'agit concrètement des établissements ou services hospitaliers et établissements ou services médico-sociaux d'accueil ou d'accompagnement des personnes majeures handicapées, âgées ou socialement fragilisées, mettant en oeuvre des mesures de protection judiciaire et dont la création est soumise à la procédure d'autorisation qui s'applique à tout service social et médico-social et qui doit recevoir, en sus, l'avis conforme du procureur de la République ;

- des personnes physiques exerçant une activité tutélaire à titre individuel , dont l'activité est conditionnée par l'octroi d'un agrément ;

- des gérants de tutelle, préposés , exerçant dans les établissements ou services sociaux et médico-sociaux qui accueillent ou accompagnent des personnes majeures handicapées ou âgées 11 ( * ) .

? L' article L. 461-3 fixe les conditions professionnelles d'exercice des mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Quelle que soit la catégorie à laquelle il appartient, le mandataire devra remplir des conditions d'âge, de moralité et de formation spécifique qui seront définies par décret. Cette harmonisation apparaît aujourd'hui indispensable, car elle constitue une garantie de professionnalisme des intervenants tutélaires quel que soit leur mode d'exercice.

Cela suppose que les formations et qualifications en ce domaine soient intégralement repensées et réorganisées et que de nouvelles filières spécialisées soient développées. Une réflexion est en cours au sein du ministère de la santé et des solidarités, qui devrait déboucher sur la création d'un certificat national de compétence attestant des qualifications requises pour exercer le métier de mandataire judiciaire à la protection des majeurs.

Il faudra également que les capacités de contrôle des Ddass soient développées afin qu'elles puissent effectivement vérifier que les personnes ou services souhaitant exercer la fonction de mandataires judiciaires aient les qualifications et la moralité requises.

? L' article L. 461-4 détermine les modalités de prise en charge du coût des mesures de protection des majeurs .

Actuellement, le financement des mesures de protection judiciaire obéit aux principes suivants :

- les frais de la TPSA sont à la charge des organismes débiteurs des prestations placées sous tutelle ;

- la gérance de tutelle est intégralement financée par un prélèvement sur les ressources de la personne protégée ;

- les tutelles et curatelles d'Etat sont couvertes par un prélèvement sur les ressources de la personne protégée, à moins qu'elle ne dispose de ressources inférieures au minimum vieillesse, auquel cas l'Etat les prend intégralement à sa charge.

Le rapport de Jean Favard 12 ( * ) a critiqué la disparité des réglementations en ce domaine et le caractère fortement inégalitaire du système.

Le nouvel article inséré unifie les conditions de prise en charge des différentes prestations tutélaires et pose le principe de la prise en charge partielle ou totale par la personne protégée du coût des mesures dont elle bénéficie en fonction de ses ressources. Lorsque la prise en charge est partielle, elle est complétée par un financement public dont les modalités de calcul et de versement sont définies par l'article 12 du projet de loi.

L'article prévoit en outre, à titre exceptionnel, la possibilité pour le juge des tutelles, après avoir recueilli l'avis du procureur de la République, d'allouer au mandataire judiciaire à la protection des majeurs une indemnité supplémentaire à la charge de la personne protégée, dont le montant est fixé en application d'un barème national établi par décret. Son versement doit être justifié par l'accomplissement d'actes supplémentaires par le mandataire, résultant notamment de la complexité de la situation de la personne protégée.

Le dispositif initialement proposé prévoyait également la possibilité pour l'Etat, l'organisme ou la collectivité concernée, d'exercer un recours en récupération sur la succession du majeur protégé et sur les donations qu'il aura effectuées de son vivant. Les conditions et les modalités de ces recours, définies en référence à l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles, doivent être fixées par un décret en Conseil d'Etat.

? Les articles L. 461-5, L. 461-6 et L. 461-7 précisent les obligations du mandataire judiciaire et les droits de la personne protégée.

L' article L. 461-5 vise à prévenir les risques de dérives de la protection judiciaire, voire de maltraitance, en informant le majeur protégé du rôle du mandataire judiciaire, du contenu des mesures de protection juridique et des droits qu'il possède. Cette information lui est transmise par le mandataire judiciaire sous la forme d'une notice écrite et d'une charte des droits de la personne protégée qui lui est annexée, à condition que son état, notamment mental, lui permette d'en apprécier le contenu.

Les articles L. 461-6 et L. 461-7 précisent les obligations des établissements sociaux et médico-sociaux vis-à-vis des personnes bénéficiant d'une protection juridique, en prévoyant des dispositions particulières pour ceux qui disposent d'un préposé.

Les majeurs placés sous protection juridique au sein de ces établissements doivent bénéficier des droits garantis par les articles L. 311-3 à L. 311-9 du code de l'action sociale et des familles :

- l'article L. 311-3 prévoit le respect de la personne, le libre choix entre des prestations adaptées, une prise en charge et un accompagnement individualisé respectant le consentement de la personne, la confidentialité des informations, l'information sur la prise en charge, sur les droits fondamentaux et les voies de recours ainsi que la participation de la personne, avec l'aide éventuelle du tuteur légal, au projet d'accueil et d'accompagnement qui la concerne ;

- l'article L. 311-4 impose la remise de divers documents à la personne concernée ou, à défaut, à son représentant légal. Il s'agit d'un livret d'accueil, auquel est annexée une charte des droits et libertés, d'un règlement de fonctionnement de l'établissement ou du service et d'un contrat de séjour ou d'un document de prise en charge individuel élaboré avec la participation de la personne accueillie si elle en a la faculté ;

- l'article L. 311-5 prévoit la possibilité pour tout usager pris en charge par un établissement ou un service social ou médico-social de faire appel à une personne qualifiée (c'est-à-dire un conseil juridique) pour l'aider à faire valoir ses droits ;

- l'article L. 311-6 tend à associer les personnes protégées au fonctionnement du service ou de l'établissement par leur participation directe au conseil de la vie sociale ou aux autres formes de participation prévues par cet article ;

- les articles L. 311-7, L. 311-8 et L. 311-9 concernent respectivement le règlement de fonctionnement des établissements, les projets de service et la préservation de l'unité familiale.

L' article L. 461-6 traite du cas des majeurs protégés admis dans un établissement ou un service social ou médico-social, dont le représentant légal est soit un agent préposé à la protection des majeurs au sein de cet établissement, soit un service tutélaire dépendant de l'établissement. Les personnes protégées dans ce cadre bénéficient de l'ensemble des droits précédemment énoncés.

L' article L. 461-7 concerne les personnes protégées prises en charge par des établissements sociaux ou médico-sociaux qui ne disposent pas de préposé tutélaire, soit plus de 50 % des établissements d'accueil.

Pour ces dernières structures, des dispositions particulières s'appliquent :

- la notice d'information mentionnée à l'article L. 461-5 se substitue au livret d'accueil prévu par l'article L. 311-4 du code de l'action sociale et des familles ;

- le contrat de séjour est remplacé par un document individuel, dont une copie sera automatiquement remise au majeur protégé. Ce document doit préciser les objectifs et la nature de la mesure de protection, en rappelant les principes déontologiques et éthiques auxquels le mandataire doit se soumettre ainsi que les recommandations de bonnes pratiques professionnelles et le projet de service qu'il doit suivre. Il doit également fournir le détail des prestations offertes ainsi que le montant de la contribution de la personne protégée, le contenu minimal de ce document devant être complémentairement fixé par décret ;

- enfin, la participation de l'usager au fonctionnement du service prend ici la forme particulière d'enquêtes de satisfaction auprès du majeur protégé et de sa famille.

? L' article L. 461-8 renvoie à un décret simple le soin de préciser les modalités d'application du présent article, à l'exception des dispositions insérées par le nouvel article L. 461-4 pour lequel un décret en Conseil d'Etat est exigé.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

A l' article L. 461-1 , l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel visant à remplacer le mot « assistance » par le mot « accompagnement » pour qualifier la nouvelle mesure de protection judiciaire (MAJ).

A l' article L. 461-2 , elle a adopté deux amendements , l'un ayant pour objet de préciser que les listes de mandataires judiciaires à la protection des majeurs seront non pas établies mais dressées et tenues à jour par le représentant de l'Etat dans le département, l'autre prévoyant que les personnes inscrites sur cette liste prêtent serment dans des conditions définies en Conseil d'Etat.

A l' article L. 461-3 , elle a adopté deux amendements : le premier précise que les mandataires judiciaires doivent attester d'une formation « spécifique », certifiée dans des conditions fixées par décret, ainsi que d'une certaine expérience professionnelle ; le second tend à imposer aux associations tutélaires la mise au point de procédures de contrôle interne, en prévoyant la transmission au représentant de l'Etat dans le département d'un document exposant leurs méthodes de recrutement et les règles de contrôle de leurs salariés dans l'exercice de leur mission.

A l' article L. 461-4 , outre un amendement de coordination rédactionnelle , elle a adopté trois amendements : le premier prévoit que soit établi par décret un barème national des indemnités supplémentaires pouvant être allouées à titre exceptionnel aux mandataires judiciaires, le deuxième vise à supprimer le recours en récupération sur l'actif net successoral du majeur protégé dont la mesure a été financée par l'Etat, un département ou un organisme public, et le troisième renvoie à l'article L. 461-8 les précisions relatives aux modalités d'application de l'article L. 461-4.

A l' article L. 461-5 , un amendement précise que lorsque la personne protégée n'est pas en mesure d'apprécier la portée d'une information qui doit lui être transmise, celle-ci doit être communiquée à un parent, un allié ou une personne de son entourage, qui soit connu du mandataire. A l' article L. 461-6 , elle a adopté par cohérence le même amendement, tandis qu'à l' article L. 461-7 , elle a adopté trois amendements de clarification rédactionnelle.

A l' article L. 461-8 , un amendement précise que les modalités d'application des articles L. 461-4 et L. 461-6 seront fixées par décret en Conseil d'Etat.

III - La position de votre commission

Votre commission approuve la réforme de fond proposée par cet article, qui permet de créer un véritable statut professionnel de mandataire judiciaire à la protection des majeurs. Cette réorganisation d'ensemble devrait contribuer à donner plus de cohérence et de transparence au système de protection judiciaire et garantir le professionnalisme des différents intervenants qui participent à son fonctionnement.

La création de listes départementales recensant les différents opérateurs habilités à exercer constitue un indéniable progrès. Toutefois, votre commission estime qu'il est parallèlement indispensable de créer une liste nationale des mandataires judiciaires interdits d'exercice, afin d'assurer un meilleur contrôle du dispositif d'ensemble. Elle vous proposera d'adopter un amendement en ce sens.

Outre un amendement rédactionnel , elle présentera également un amendement de coordination visant à supprimer les dispositions relatives aux droits et libertés des personnes protégées hébergées dans des établissements pour personnes âgées ou handicapées. Votre commission a en effet considéré qu'il n'était pas souhaitable de pouvoir désigner un mandataire judiciaire préposé parmi leurs personnels administratifs et sociaux.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Section 2- Les services mandataires judiciaires à la protection des majeurs

Article 10 (art. L. 312-1, L. 312-5 et L. 313-3 du code de l'action sociale et des familles) - Insertion des services tutélaires dans la catégorie des établissements et services sociaux et médico-sociaux

Objet : Cet article vise à insérer les services tutélaires dans la nomenclature des établissements et services sociaux et médico-sociaux figurant à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, leur conférant ainsi un véritable statut juridique.

I - Le texte proposé

Les services tutélaires recouvrent des réalités différentes et n'ont donc pas de statut unifié. Le présent article vise à leur conférer un statut commun en leur reconnaissant la qualité juridique d'établissement ou service social et médico-social telle qu'elle est définie par l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles. Dans sa version actuelle, cet article recense treize catégories d'établissements et services ayant cette même qualité, soit environ 32 000 structures de nature très diverse qui accueillent des personnes âgées ou handicapées, des jeunes ou des familles en difficultés sociales, ainsi que des personnes relevant du réseau de l'hébergement d'urgence.

Le paragraphe I du présent article ajoute deux nouvelles catégories à cette liste :

- les services mandataires judiciaires à la protection des majeurs mettant en oeuvre les mesures de protection des majeurs ordonnées par l'autorité judiciaire au titre du mandat spécial délivré dans le cadre d'une sauvegarde de justice, d'une curatelle, d'une tutelle ou d'une mesure d'accompagnement judiciaire (quatorzième catégorie) ;

- les services chargés de mettre en oeuvre les mesures de tutelle sur les prestations familiales ou sociales des enfants mineurs, selon les termes respectifs des articles L. 755-4 et L. 552-6 du code de la sécurité sociale (quinzième catégorie).

Globalement, sous réserve de certaines dispositions qui leur seront spécifiques, il en résulte pour ces services de nombreux droits et obligations identiques, en matière de financement, de tarification, de coopération et de coordination entre établissements et services sociaux et médico-sociaux, ainsi qu'en matière de procédures d'autorisation, de contrôle administratif et d'évaluation de la qualité de service.

Le paragraphe II prévoit ainsi que leur création et leur extension devront s'inscrire dans les schémas régionaux d'organisation sociale et médico-sociale. Il en est de même des personnes physiques agréées exerçant à titre individuel la profession de mandataires judiciaires à la protection des majeurs (article L. 462-1 inséré par l'article 9 du projet de loi) ou de celles désignées par un établissement hébergeant des personnes âgées ou des adultes handicapés (article L. 462-5 inséré par l'article 14 du projet de loi).

Depuis la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale, il existe trois niveaux de schémas d'organisation sociale et médico-sociale :

- le niveau départemental, pour la plupart des catégories d'établissements ou de services ;

- le niveau régional, qui regroupe les informations relatives aux schémas départementaux, pour les seuls établissements ou services relevant de la compétence de l'Etat ;

- le niveau national pour les établissements et services dont l'existence est rare étant donné leur objet et dont la répartition doit être envisagée au-delà du département ou de la région.

Certaines catégories d'établissements relèvent également d'un schéma régional spécifique. Tel sera le cas pour les mandataires judiciaires à la protection des majeurs (service et personnes physiques), ce qui semble être pertinent compte tenu de leur faible nombre et du caractère particulier de leur activité.

Le paragraphe III précise les modalités d'autorisation, de création ou d'extension des services tutélaires. En leur qualité d'établissement ou service social et médico-social, on pourrait penser qu'ils sont soumis à la même procédure d'autorisation que les autres services ou établissements recensés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles.

En réalité, celle-ci varie en fonction du champ d'intervention des établissements ou services considérés. En effet, selon les cas, l'autorisation peut être délivrée par le préfet, par le président du conseil général ou conjointement par ces deux autorités.

Les services tutélaires relevant de la quatorzième catégorie seront soumis à une procédure particulière prévoyant que le préfet de région ne délivre l'autorisation qu'après avis conforme du procureur de la République, tandis que ceux relevant de la quinzième catégorie sont dispensés de cet avis.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre un amendement rédactionnel et un amendement visant à corriger une erreur de référence, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de coordination, précisant que l'avis conforme du procureur de la République est également requis pour les services tutélaires relevant de la quinzième catégorie.

III - La position de votre commission

La reconnaissance de la qualité de service social et médico-social aux services tutélaires chargés de mettre en oeuvre les mesures de protection judiciaire en faveur des personnes majeures et des enfants mineurs a le mérite premier de donner statutairement une dimension sociale à ces services, soulignant ainsi leur rôle d'accompagnement vers l'autonomie.

Ce nouveau statut constitue une réelle garantie pour les usagers, car il soumet les services tutélaires, au même titre que les services sociaux et médico-sociaux, à un encadrement et un contrôle bien plus rigoureux de leur fonctionnement et de leurs activités par les services de l'Etat.

Enfin, leur création (ou leur extension) devant s'inscrire dans le cadre des objectifs et besoins fixés par les schémas régionaux d'organisation sociale et médico-sociale, cela devrait permettre d'améliorer la régulation de l'offre de services.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 11 (art. L. 314-1, L. 314-4 et L. 315-5 du code de l'action sociale et des familles) - Compétences en matière de tarification des services mandataires à la protection des majeurs

Objet : Cet article désigne l'autorité compétente pour fixer la tarification des services mandataires judiciaires à la protection des majeurs et des services délégués aux prestations familiales. Il opère en outre au sein du code de l'action sociale et des familles les coordinations rendues nécessaires par la modification de la nomenclature des services sociaux et médico-sociaux.

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I de cet article confie au préfet du département le soin de fixer la tarification, d'une part, des prestations fournies par les services mandataires judiciaires à la protection des majeurs, d'autre part, de celles fournies par les services mandataires délégués aux prestations familiales, c'est-à-dire chargés d'une mesure de tutelle à ces prestations.

Sont exclues de ce dispositif les prestations fournies par les services ayant la qualité soit d'établissements de soins dispensant des soins psychiatriques, soit d'établissements hébergeant des personnes âgées ou des personnes handicapées, soit d'établissements dispensant des soins de longue durée. Les prestations fournies par ces structures sont en effet financées par leur dotation annuelle de financement de droit commun.

Le paragraphe II modifie l'article L. 314-4 du code de l'action sociale et des familles afin d'inclure les services mandataires à la protection des majeurs dans la liste des structures dont le montant limitatif annuel des dépenses est inscrit dans les lois de finances.

Le paragraphe III modifie les articles L. 314-4 et L. 314-5 du code afin de substituer la notion de « dépenses à la charge de l'Etat » à celle de « dépenses imputables aux prestations prises en charge par l'aide sociale de l'Etat », qui ne couvre pas la protection judiciaire des majeurs.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté à cet article, outre deux amendements rédactionnels et un amendement de coordination, deux amendements prévoyant que le préfet fixera la tarification après avis des principaux organismes financeurs.

III - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 12 (art. L. 361-1 à L. 361-3 du code de l'action sociale et des familles) - Financement de la protection judiciaire des majeurs

Objet : Cet article fixe la répartition des compétences en matière de financement des services tutélaires et prévoit la fixation des modalités d'application de ce dispositif par un décret en Conseil d'Etat.

I - Le dispositif proposé

L'article 12 insère dans le livre III du code de l'action sociale et des familles un titre VI consacré au financement des mesures de protection judiciaire des majeurs et composé de trois articles.

L' article L. 361-1 fixe les modalités du financement des services mandataires judiciaires à la protection des majeurs mentionnés au 14° du I de l'article L. 312-1 du même code : il s'agit des services chargés de gérer les mesures judiciaires de protection des majeurs (sauvegarde de justice, curatelle, tutelle, mesure d'accompagnement judiciaire).

Son paragraphe I régit le financement de ces services à l'exception de ceux gérés par des établissements de santé ou des établissements sociaux et médico-sociaux : ces derniers font l'objet de dispositions spécifiques détaillées aux paragraphes III et IV du même article.

Deux hypothèses sont envisagées :

- le financement des mesures de protection juridique - sauvegarde de justice, curatelle et tutelle - incombe à l'Etat sauf si le bénéficiaire perçoit une prestation sociale. Dans ce cas, le financement incombe à l'organisme qui verse ladite prestation. Si le bénéficiaire perçoit plusieurs prestations, cette charge incombe à l'organisme versant la prestation dont le montant est le plus élevé ;

- le financement des mesures d'assistance judiciaire incombe à la collectivité publique débitrice ou à l'organisme qui verse la prestation soumise à la mesure : il s'agira donc du département lorsque la personne protégée reçoit une prestation relevant de la compétence de ce dernier (RMI, allocation personnalisée d'autonomie ou prestation de compensation du handicap). Dans tous les autres cas, il s'agira de l'organisme de protection sociale liquidant la prestation dont la personne protégée reçoit éventuellement une prestation. En cas de prestations multiples, la prestation la plus importante détermine la personne à qui incombe le financement de la mesure.

Le paragraphe II de cet article prévoit que le financement des mesures de protection judiciaire prennent la forme d'une dotation globale (DGF) calculée après déduction des prélèvements effectués sur les ressources de la personne protégée conformément à l'article L. 461-4 du code de l'action sociale et des familles.

Le projet de loi généralise en effet à l'ensemble des mesures de protection le principe de la participation à leur financement des majeurs dont les ressources personnelles le permettent . Les financements publics, qu'ils émanent de l'Etat, des départements ou des organismes de sécurité sociale, revêtent ainsi dans l'ensemble un caractère subsidiaire.

En réalité, le texte entérine une expérimentation lancée en 2004 dans dix départements, étendue en 2005 à six nouveaux départements, puis à onze autres en 2006. Son objectif était d'apprécier la pertinence et la faisabilité du passage d'un système de financement public indexé sur le nombre de mesures, appelé « mois mesure », à un financement public des services tutélaires par dotation globale calculée en fonction d'indicateurs d'activité et de qualité de service rendu. Les DGF ont été versées aux services expérimentateurs respectivement par l'Etat et par l'organisme débiteur principal des prestations sociales.

L'expérimentation a permis de constater l'intérêt de ce mode de financement qui permet, grâce à la mise en place d'indicateurs, de faire correspondre les ressources à l'activité du service. En revanche, le système « mois mesure », en attribuant des compensations financières aux mandataires judiciaires en fonction du nombre de mesures gérées, incite à privilégier la quantité par rapport à la qualité. La détermination des indicateurs est cruciale pour l'efficacité du mécanisme de la DGF. A l'issue des deux premières années d'expérimentation, il a été jugé nécessaire d'expertiser de nouveaux indicateurs et de fiabiliser ceux déjà mis en place, la collecte de l'information s'étant révélée difficile.

Le paragraphe III de cet article régit le financement des mêmes services mandataires judiciaires quand ils sont gérés par des centres hospitaliers, des établissements de santé privés à but non lucratif admis à participer au service public hospitalier ou des établissements de santé privés à but non lucratif ayant opté pour la dotation globale de financement. Déduction faite, à nouveau, des prélèvements effectués sur les ressources de la personne protégée, ces services sont financés par la dotation annuelle de financement versée à ces établissements pour l'ensemble de leur activité.

Le paragraphe IV aborde le cas des mêmes services mandataires judiciaires quand il s'agit de services gérés par des établissements d'hébergement de personnes âgées ou de personnes handicapées, ou par des établissements dispensant des soins de longue durée : ces services sont financés sur le budget général de l'établissement, les charges et les recettes résultant de l'activité tutélaire étant inscrits à l'état des prévisions de recettes et de dépenses de l'établissement gestionnaire.

L' article L. 361-2 fixe les modalités du financement des mandataires judiciaires délégués aux prestations familiales. Le financement, qui prend la forme d'une dotation globale, incombe à l'organisme versant la prestation placée sous tutelle, le plus souvent la caisse d'allocations familiales.

L' article L. 361-3 , enfin, renvoie les mesures d'application des deux articles précédents à un décret en Conseil d'Etat.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Outre un amendement rédactionnel, l'Assemblée nationale a adopté à cet article deux amendements précisant que la dotation globale versée aux services mandataires judiciaires à la protection des majeurs et aux services mandataires sera fixée à partir d'indicateurs déterminés à raison notamment de la charge de travail liée à l'exécution des mesures judiciaires en cause et de l'état des personnes bénéficiaires.

III - La position de votre commission

Votre commission est favorable au passage à un financement par dotation globale des services tutélaires. Elle était déjà convaincue du bien-fondé de ce mode de financement, lorsqu'elle avait donné son accord à l'expérimentation prévue par la loi du 2 janvier 2004 relative à l'accueil et à la protection de l'enfance. Les résultats de cette expérimentation lui ont donné raison.

Elle approuve également le choix, fait par le Gouvernement, d'organiser la répartition des financements en fonction de l'organisme débiteur de la prestation sociale la plus élevée. Elle constate toutefois que cette clé de répartition comporte plusieurs exceptions, plus ou moins justifiées :

- la prise en charge par l'Etat des frais de tutelle, curatelle et sauvegarde de justice des titulaires du RMI, de l'Apa et de la PCH, en lieu et place des départements, constitue la contrepartie de la création de la mesure d'accompagnement personnalisé, mise à la charge des conseils généraux. Votre commission ne peut que prendre acte de l'accord intervenu en la matière entre le Gouvernement et les présidents de conseils généraux ;

- la prise en charge par les caisses d'allocations familiales des frais de mesures d'accompagnement judiciaire qui concernent les titulaires de l'AAH et de l'API ne répond, en revanche, à aucune autre considération que celle de faire faire des économies au budget de l'Etat. Il est vrai cependant que les Caf prenaient déjà en charge ces frais sous le régime de la tutelle aux prestations sociales. Votre commission regrette malgré tout que le présent projet de loi n'ait pas été l'occasion de mettre fin à ce transfert de charge indu vers la branche famille.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a prévu que les indicateurs permettant le calcul de la DGF seraient « déterminés à raison notamment de la charge de travail liée à l'exécution des mesures judiciaires en cause et de l'état des personnes bénéficiaires ». L'idée de tenir compte de la charge de travail pour le calcul de la dotation globale est parfaitement justifiée et se trouve d'ailleurs amplement prise en compte dans la définition des critères utilisés dans le cadre de l'expérimentation en cours. Chaque mesure est en effet cotée en fonction de la lourdeur de la prise en charge correspondante. En revanche, le critère relatif à l'état des personnes n'a pas fait l'objet d'une expérimentation de terrain et son applicabilité pratique est trop hypothétique pour qu'il soit envisageable de l'introduire dans la loi. Votre commission observe en outre que ce critère n'est, en tout état de cause, susceptible de constituer un critère légitime de fixation de la DGF qu'en raison de la charge de travail supplémentaire que l'état des personnes bénéficiaires pourrait éventuellement représenter pour le mandataire judiciaire, pour autant qu'il soit possible d'établir une corrélation objective entre l'un et l'autre. Votre commission estime donc nécessaire de supprimer la référence à l'état des personnes bénéficiaires.

Votre commission vous propose en outre d'adopter à cet article un amendement de coordination avec l'amendement qu'elle propose à l'article 5 afin de supprimer la faculté de désigner comme mandataire judiciaire un préposé dans les établissements ou services sociaux et médico-sociaux accueillant ou accompagnant des personnes âgées ou handicapées.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé .

Article 13 (art. L. 311-3, L. 311-4 et L. 311-10 (nouveau) du code de l'action sociale et des familles) - Dispositions de coordination en matière de droits des usagers

Objet : Cet article adapte les dispositions relatives aux droits des usagers s'appliquant aux établissements et services sociaux et médico-sociaux aux services tutélaires.

I - Le texte proposé

Le présent article modifie les articles L. 311-3 et L. 311-4 du code de l'action sociale et des familles relatifs aux droits des usagers des établissements ou services sociaux et médico-sociaux, afin de tenir compte des spécificités des services de protection judiciaire, auxquels doivent désormais s'appliquer également ces droits du fait de leur nouveau statut.

Son paragraphe I aménage le principe de libre choix des prestations garanti par l'article L. 311-3, pour tenir compte du pouvoir d'appréciation et de décision du juge des tutelles à l'égard des majeurs protégés. Cette réserve est déjà prise en compte pour les mineurs en danger : elle est donc étendue aux nécessités liées à la protection des majeurs protégés.

Le paragraphe II adapte la rédaction de l'article L. 311-4 du même code afin qu'il puisse également s'appliquer aux services tutélaires. Il s'agit des obligations mentionnées à l'article 9 du projet de loi concernant l'établissement d'un contrat de séjour et d'un document individuel de prise en charge lors de l'accueil dans un établissement ou un service social et médico-social.

Enfin, le paragraphe III insère un nouvel article L. 311-10 qui renvoie aux articles L. 461-5 à L. 461-7 créés par l'article 9 du projet de loi, pour connaître les modalités particulières d'application aux majeurs protégés des droits et libertés définis par les articles L. 311-1 à L. 311-9 du même code.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à corriger une erreur de référence.

III - La position de votre commission

Si la reconnaissance de la qualité de service social et médico-social aux services tutélaires constitue un indéniable progrès pour les personnes protégées, qui jouiront de fait des mêmes droits que les usagers des services ayant le même statut, il semble pourtant indispensable d'adapter ces dispositions générales aux spécificités de la situation des personnes majeures bénéficiaires de mesures de protection judiciaire.

Votre commission est très attachée à la reconnaissance et au respect de ces droits et libertés, surtout lorsque la personne concernée n'est plus en mesure d'en apprécier toute la portée. Par ses qualités propres (moralité, professionnalisme), le mandataire doit en effet être en mesure de les garantir et de prendre, le cas échéant, les mesures nécessaires à leur respect.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Section 3 - Les personnes physiques mandataires judiciaires à la protection des majeurs

Article 14 (art. L. 462-1 à L. 462-10 du code de l'action sociale et des familles) - Conditions d'exercice des personnes physiques mandataires judiciaires à la protection des majeurs

Objet : Cet article précise les conditions d'exercice des personnes physiques exerçant à titre individuel ou en tant que préposé d'un établissement ou d'un service social et médico-social.

I - Le texte proposé

Le présent article vise à insérer un chapitre II dans le titre VI du livre IV du code de l'action sociale et des familles, qui se décompose en trois sections :

- la première concerne l'activité des mandataires judiciaires à la protection des majeurs exercée à titre individuel (articles L. 462-1 à L. 462-4) ;

- la deuxième traite de l'activité des mandataires judiciaires qui exercent en qualité de préposé d'un établissement accueillant et accompagnant des majeurs âgés ou handicapés (articles L. 462-5 à L. 462-9) ;

- la dernière prévoit des dispositions communes à ces deux catégories de mandataires (article L. 462-10).

Section 1
L'activité des mandataires judiciaires
à la protection des majeurs qui exercent à titre individuel

? L' article L. 462-1 prévoit que, pour exercer à titre habituel l'activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs, il faudra être inscrit sur la liste dressée et tenue à jour par le préfet du département. Pour les personnes physiques exerçant à titre individuel, l'inscription sur cette liste nécessite au préalable l'octroi d'un agrément auprès du préfet du département, après avis conforme du procureur de la République. Ces deux autorités devront ainsi vérifier que les conditions de moralité, d'âge, de formation et d'expérience professionnelle, prévues par l'article L. 461-3 inséré par l'article 9 du projet de loi, et les garanties financières, mentionnées par l'article L. 462-2 créé par l'article 14 du même texte, seront remplies.

Comme dans le cas des autorisations accordées par le préfet aux services mandataires ayant la qualité d'un établissement ou service social et médico-social (article 10 du projet de loi), la délivrance de ces agréments est soumise aux objectifs des schémas régionaux d'organisation sociale et médico-sociale. Cela permettra ainsi de mieux gérer et appréhender les besoins d'interventions en faveur de la protection judiciaire des personnes majeures. Toutefois, cela supposera, dès le 1 er janvier 2009, une adaptation des schémas régionaux et des Ddass, qui ne possèdent pas une connaissance très précise des activités des gérants de tutelle privés.

? Outre les garanties professionnelles exigées des mandataires judiciaires à la protection des majeurs pour obtenir l'agrément, l' article L. 462-2 précise que les personnes physiques exerçant à titre individuel et habituel cette activité doivent présenter des garanties financières. Cela signifie concrètement que l'exercice de cette activité rend obligatoire la souscription d'un contrat d'assurance, permettant de couvrir les conséquences pécuniaires d'un éventuel engagement de la responsabilité civile du mandataire en raison d'un dommage subi par une personne dont il exerce la protection judiciaire.

? L' article L. 462-3 pourvoit au financement des mesures de protection judiciaire prises par les mandataires judiciaires exerçant à titre individuel. Selon cet article, elles sont financées selon des modalités identiques à celles qui prévalent pour les services mandataires. Ces modalités sont détaillées par le I de l'article L. 361-1 nouveau inséré par l'article 12 du projet de loi. Il prévoit, selon les cas, la participation financière de l'Etat, de l'organisme créditeur des prestations sociales ou du département.

? L' article L. 462-4 prévoit que les modalités d'application des articles L. 462-1 à L. 462-3 sont renvoyées à un décret en Conseil d'Etat.

Section 2
L'activité des mandataires judiciaires à la protection des majeurs
qui exercent en qualité de préposé d'établissement hébergeant des majeurs

? L' article L. 462-5 organise les conditions de désignation des mandataires judiciaires préposés d'établissement accueillant ou accompagnant des personnes âgées ou handicapées majeures.

Le décret n° 69-195 du 15 février 1969 pris pour l'application de l'article 499 du code civil prévoit que « les établissements d'hospitalisation, de soins ou de cure publics ou privés choisissent parmi leurs préposés la personne la plus qualifiée désignée, le cas échéant, comme gérant de la tutelle. » . Ainsi, selon le droit en vigueur, cette désignation est actuellement obligatoire pour tous les établissements.

Pourtant, cette obligation n'est pas respectée. En effet, le nombre estimé de préposés d'établissement représente environ 1 200 équivalents temps plein (ETP), en charge de plus de 92 000 mesures de protection judiciaires. Sur l'ensemble, 30 % sont rattachés à des établissements sociaux et médico-sociaux et gèrent près de 28 000 mesures de protection, les 70 % restant étant rattachés à des établissements sanitaires de santé. La plupart des établissements n'ont donc pas procédé à la désignation d'un préposé.

Le projet de loi prévoit que cette désignation sera obligatoire pour les seuls établissements et services qui hébergent et accompagnent les personnes âgées ou handicapées majeures 13 ( * ) et dont la capacité d'accueil est supérieure à un seuil défini par décret. Selon les informations communiquées à votre rapporteur, ce seuil serait fixé à quatre-vingts lits. Or, la majorité des établissements ont une capacité moyenne comprise entre quarante et soixante lits. Ainsi, cette disposition ne toucherait qu'un nombre limité d'établissements.

C'est pourquoi, à défaut d'une telle désignation, les établissements concernés pourront faire appel à un service tutélaire qui leur serait rattaché. Il peut s'agir soit d'un service rattaché directement à l'établissement lui-même, soit d'un service commun à plusieurs établissements géré par un groupement d'intérêt public, un syndicat interhospitalier ou un groupement de coopération sanitaire ou de coopération sociale ou médico-sociale, dont l'établissement serait membre et dont les conditions de fonctionnement devraient être fixées par décret.

Par ailleurs, à défaut de préposé ou de service mandataire commun, un établissement peut également recourir aux prestations d'un autre établissement. Ainsi, certains établissements de petite taille qui ne disposent pas de personnels qualifiés en nombre suffisant pourront bénéficier des mesures de protection judiciaire d'un service ou d'un mandataire judiciaire préposé à un autre établissement. Cela suppose la signature d'une convention entre les deux établissements concernés.

? L' article L. 462-6 précise les modalités de la procédure de déclaration des mandataires judiciaires préposés d'établissement accueillant ou accompagnant des personnes âgées ou handicapées majeures. L'établissement concerné doit en premier lieu s'assurer que l'agent qu'il désigne respecte les conditions de moralité et de professionnalisme prévues par l'article L. 461-3 créé par l'article 9 du projet de loi.

Puis, selon des modalités fixées par décret, il déclare cette désignation au préfet du département, qui en informe sans délai le procureur de la République. Alors, conformément aux dispositions de l'article L. 461-2 créé par le même article 9, les personnes ainsi déclarées sont inscrites sur la liste départementale des mandataires judiciaires à la protection des majeurs.

? L' article L. 462-7 prévoit que toute modification des éléments mentionnés dans une déclaration entraîne l'obligation de présenter une nouvelle déclaration dans les formes prévues par l'article L. 462-6 pour la déclaration initiale. Ces modifications peuvent concerner le type de mesure de protection judiciaire que le mandataire est amené à prendre dans l'exercice de ces fonctions, celui-ci pouvant n'être habilité à prendre que certaines d'entre elles.

? L' article L. 462-8 envisage les cas qui pourraient conduire le préfet du département à s'opposer à la déclaration d'un préposé désigné par un établissement accueillant ou accompagnant des personnes âgées ou des adultes handicapés. Celle-ci doit être motivée par l'existence de conditions d'exercice du mandat ne permettant pas de garantir le respect de la santé, de la sécurité et du bien-être physique et mental de la personne protégée. Cette opposition ne peut advenir qu'après un avis conforme du procureur de la République et dans un délai fixé par décret, vraisemblablement de deux mois selon les informations recueillies par votre rapporteur.

? L' article L. 462-9 précise les modes de financement des mesures judiciaires prises par les mandataires judiciaires préposés des établissements médico-sociaux ou de santé. Il prévoit que s'appliquent les dispositions des II et IV de l'article L. 361-1 nouveau créé par l'article 12 du présent texte.

Il s'agit de distinguer :

- les préposés relevant des établissements de soins (c'est-à-dire les hôpitaux, les unités hospitalières et les cliniques psychiatriques), dont les activités de mandataires judiciaires sont financées dans les conditions prévues par le III de l'article L. 361-1 ;

- les préposés rattachés aux établissements accueillant ou accompagnant des personnes âgées ou handicapées majeures, dont les activités sont rétribuées dans les conditions définies par le IV du même article.

Un décret en Conseil d'Etat déterminera les modalités d'application de ces deux modes de financement.

? L' article L. 462-10 prévoit les sanctions administratives applicables par le préfet aux mandataires judiciaires à la protection des majeurs exerçant à titre individuel ou en tant que préposé d'établissement d'hébergement de personnes majeures handicapées ou âgées.

Le contrôle exercé par le préfet sur les mandataires judiciaires ne fait toutefois pas obstacle aux pouvoirs du juge des tutelles et du procureur de la République, qui, selon les termes des articles 416 et 417 du code civil (article 5 du projet de loi), assurent la surveillance générale des mesures judiciaires de protection des majeurs. Le juge des tutelles peut ainsi adresser des injonctions et dessaisir les mandataires de leur mission, tandis que le procureur de la République peut radier des mandataires de la liste départementale.

En cas de violation de la loi ou des règlements ou « lorsque la santé, la sécurité ou le bien-être physique ou moral de la personne protégée est menacé ou compromis par les conditions d'exercice de la mesure de protection judiciaire », le préfet du département doit, d'office ou à la demande du procureur de la République, adresser une injonction au mandataire judiciaire concerné. Cette injonction doit intervenir préalablement à toute sanction administrative, mais doit être assortie d'un délai dans lequel le mandataire est tenu d'y répondre.

S'il n'est pas satisfait à l'injonction dans le délai fixé, le préfet procède, sur avis du procureur de la République ou à sa demande :

- soit au retrait de l'agrément lorsque le mandataire est une personne exerçant à titre individuel ;

- soit à l'annulation de la déclaration, lorsque le mandataire exerce en tant que préposé d'un établissement hébergeant des personnes âgées ou des adultes handicapés.

Toutefois, en cas d'urgence, l'agrément ou la déclaration peuvent être suspendus dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.

Dans tous les cas, le procureur de la République est informé des suspensions, retraits ou annulations éventuellement prononcés par le préfet.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

A l' article L. 462-1 , l'Assemblée nationale a adopté quatre amendements : le premier d'ordre rédactionnel, le deuxième visant à rétablir l'ordre chronologique de l'habilitation des mandataires exerçant à titre privé, le troisième précisant que le schéma d'organisation sociale et médico-sociale visé par le texte est le schéma régional et le dernier spécifiant les cas pour lesquels une modification des conditions d'exercice justifie la révision de l'agrément.

A l' article L. 462-5 , elle a adopté cinq amendements : le premier réduit le champ d'application de l'obligation de désignation d'un préposé aux établissements hébergeant des personnes majeures handicapées ou âgées qui sont publics ; les trois suivants sont d'ordre rédactionnel et le dernier vise à prévoir la possibilité pour les établissements de recourir, par voie de convention, aux prestations d'un agent ou d'un service rattaché à un autre établissement.

A l' article L. 462-7 , elle a adopté un amendement de précision visant à définir les conditions dans lesquelles les préposés d'établissements doivent faire de nouveau l'objet d'une déclaration auprès du préfet, notamment à la suite d'une modification des conditions d'exercice du mandataire ou de la nature des mesures qu'il exerce.

A l' article L. 462-8 , elle a adopté trois amendements : l'un précise que le préfet dispose d'un délai de deux mois pour s'opposer à la déclaration par tout établissement d'un mandataire judiciaire préposé, les deux autres sont d'ordre rédactionnel.

A l' article L. 462-9 , elle a adopté deux amendements du Gouvernement visant à corriger deux erreurs de référence par coordination avec l'article 12.

A l' article L. 462-10 , elle a adopté deux amendements d'ordre rédactionnel.

III - La position de votre commission

Cet article est essentiel car il définit les règles spécifiques applicables aux personnes physiques exerçant l'activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs, que ce soit à titre individuel ou en tant que préposé d'établissement. Il est en effet indispensable que l'exercice de ces professions soit encadré et soumis à des règles d'habilitation stricte, pour éviter toute dérive et pour donner une réelle crédibilité professionnelle à cette catégorie de mandataires qui suscitent parfois une certaine méfiance.

Votre commission est tout particulièrement attentive au statut ambigu de préposé d'établissement, surtout lorsqu'il s'agit d'un établissement accueillant ou accompagnant des personnes majeures handicapées ou âgées.

Pour cette raison, elle vous demande d'adopter un amendement de coordination qui vise à limiter aux seuls établissements de santé et hôpitaux locaux dont la capacité d'accueil dépasse quatre-vingts lits, l'obligation de désigner un mandataire judiciaire qui leur soit préposé. Par conséquent, votre commission propose d'exonérer de cette obligation les établissements et services sociaux et médico-sociaux, accueillant ou accompagnant des personnes majeures handicapées ou âgées.

A son sens, le majeur protégé doit bénéficier d'un regard extérieur à l'établissement d'hébergement. Il est vrai que le préposé d'établissement présente l'avantage de la proximité. Mais son statut de salarié de l'établissement empêche de garantir son impartialité et son indépendance. Il s'agit donc d'éviter ainsi toute confusion entre le rôle de mandataire et la fonction administrative ou sociale que l'agent préposé exerce en tant que salarié de l'établissement.

En revanche, il paraît utile de maintenir l'obligation de désignation pour les établissements de santé et les structures hospitalières disposant d'une capacité d'accueil importante. La durée de séjour y étant moins longue, le risque d'occurrence d'un réel conflit d'intérêt est moins fort.

Pour ces motifs, votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 15 (art. L. 462-11 à L. 462-14 du code de l'action sociale et des familles) - Dispositions pénales applicables aux mandataires judiciaires à la protection des majeurs

Objet : Cet article prévoit les sanctions applicables aux mandataires judiciaires à la protection des majeurs en cas de manquement aux conditions légales d'exercice de leur profession.

I - Le texte proposé

Dans le titre VI du livre IV du code de l'action sociale et des familles, cet article crée un chapitre III, qui définit les dispositions pénales applicables aux personnes physiques et aux services exerçant à titre habituel l'activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs

Ce nouveau chapitre se décline en quatre nouveaux articles (L. 462-11 à L. 462-14) :

? L' article L. 462-11 prévoit une peine d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende applicable au mandataire judiciaire dans trois cas :

- lorsque, exerçant à titre individuel ou en tant que préposé d'un établissement, il n'a pas été préalablement agréé ou déclaré ;

- lorsque son agrément ou sa déclaration a fait l'objet d'une suspension, d'un retrait ou d'une annulation, par le préfet dans les conditions fixées par l'article L. 462-10 inséré à l'article 14 du projet de loi ;

- lorsque, en tant que service social et médico-social, l'autorisation du service tutélaire a été retirée comme le prévoit l'article L. 313-18 du code de l'action sociale et des familles, du fait de sa fermeture définitive à la suite de mesures de contrôle de son activité.

? L' article L. 462-12 prévoit de punir de 30 000 euros d'amende les établissements sociaux et médico-sociaux qui accueillent ou accompagnent des personnes âgées ou des adultes handicapés :

- s'ils désignent un agent comme mandataire judiciaire à la protection des majeurs sans effectuer la déclaration auprès du préfet ainsi que le prévoit l'article L.. 462-6 inséré par l'article14 du projet de loi  ;

- s'ils maintiennent un préposé d'établissement dans l'exercice de ses fonctions malgré l'opposition du préfet à sa déclaration ou dans les cas de la suspension ou de l'annulation de celle-ci, ainsi que le prévoient les articles L. 462-8 et L. 462-10 insérés par l'article 14 ;

- s'ils modifient l'activité du préposé sans effectuer une nouvelle déclaration, ainsi que l'envisage l'article L. 462-7 inséré par le même article.

? L' article L. 462-13 ajoute que les personnes physiques exerçant à titre habituel l'activité de mandataire judiciaire et passibles des sanctions pénales prévues par l'article L. 462-11 susmentionné encourent deux peines complémentaires :

- l'interdiction, à titre définitif ou temporaire, selon les termes de l'article 131-37 du code pénal, soit d'exploiter ou de diriger un établissement social et médico-social accueillant et accompagnant des personnes âgées ou des adultes handicapés, soit d'exercer l'activité de mandataire judiciaire ;

- l'affichage ou la diffusion de la décision de justice aux frais du condamné dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal.

? L' article L. 462-14 prévoit également que des peines complémentaires seront appliquées aux établissements employeurs de préposés qui auraient commis des infractions. Elles se traduisent pour ces établissements par :

- le quintuplement du taux maximal de l'amende prévu pour les personnes physiques à l'article 131-38 du code pénal ;

- l'interdiction pour les associations ou les organismes gestionnaires d'établissements d'exploiter ou de diriger un établissement social et médico-social qui accueille ou accompagne des personnes âgées ou des adultes handicapés, pour une durée maximale de cinq ans ;

- l'affichage ou la diffusion de la décision de justice.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté quatre amendements visant à corriger une erreur de référence. Les articles L. 462-11 à L. 462-14 insérés doivent en effet porter les numéros L. 463-1 à L. 463-4, ceux-ci étant insérés dans le chapitre III du titre VI du livre IV du code de l'action sociale et des familles.

III - La position de votre commission

Cet article permet d'encadrer strictement les conditions d'exercice des mandataires judiciaires à la protection des majeurs en sanctionnant ceux qui exerceraient leur activité sans y être habilités ou ayant cessé de l'être à la suite d'une décision de retrait, d'annulation ou de suspension du préfet. Cela donne ainsi une véritable portée aux conditions de moralité et de formation requises pour l'exercice de cette profession à l'article L. 461-3 inséré à l'article 9 du projet de loi.

Toutefois, votre commission déplore que les sanctions prévues à l'encontre des personnes physiques et morales soient près de quatre fois supérieures à celles qui devront être appliquées aux services tutélaires. Ainsi que l'a rappelé Emile Blessig, rapporteur de ce projet de loi au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, selon les termes de l'article L. 313-22 du code de l'action sociale et des familles, les services tutélaires ayant commis des infractions comparables s'exposent à seulement trois mois d'emprisonnement et 3 750 euros d'amende.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 16 (art. L. 3211-6 et L. 6111-3-1 du code de la santé publique) - Dispositions applicables aux mandataires judiciaires relevant d'un établissement de santé

Objet : Cet article prévoit que les dispositions relatives aux modalités de désignation des personnes ou services rattachés exerçant l'activité de mandataires judiciaires dans le cadre d'un établissement en charge des personnes âgées ou handicapées s'appliquent également aux établissements de santé et hospitaliers ayant la même obligation de désignation.

I - Le texte proposé

Cet article applique aux établissements de santé les mesures de réforme définies pour les établissements sociaux et médico-sociaux, à savoir les dispositions relatives au régime des mandataires judiciaires à la protection des majeurs (articles L. 461-1 à L. 461-8, résultant de l'article 9 du projet de loi), celles relatives aux préposés d'établissement déclarés en tant que mandataires judiciaires (articles L. 462-5 à L. 462-10, créés par l'article 14 du projet de loi) et celles définissant le régime pénal des mandataires judiciaires (articles L. 462-11 à L. 462-14, insérés par l'article 15 du projet de loi).

Selon les termes du paragraphe I , les établissements auxquels ces dispositions sont applicables sont les centres hospitaliers, les établissements de santé privés à but non lucratif admis à participer au service public hospitalier, les établissements de santé privés à but non lucratif ayant opté pour la dotation globale de financement ainsi que les hôpitaux locaux.

Ils doivent dispenser des soins de longue durée destinés à des personnes n'ayant pas d'autonomie de vie et dont l'état nécessite une surveillance médicale constante et des traitements d'entretien ou des soins psychiatriques ou de lutte contre les maladies mentales. En outre, leur capacité d'accueil doit être supérieure à un seuil qui doit être fixé par décret. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, ce seuil devrait être de quatre-vingts lits.

Toutefois, le présent article précise que, par dérogation aux dispositions de l'article 9 du projet de loi, les droits des usagers applicables sont ceux prévus par le code de la santé publique. Son article L. 1112-2 prévoit par exemple, qu'un livret d'accueil doit être remis aux patients, ainsi qu'une charte du patient hospitalisé.

Enfin, le paragraphe II tirant les conséquences des nouvelles dispositions insérées dans le code civil par le présent texte, remplace, dans l'article L. 3211-6 du code de la santé publique, la référence à l'article 490 de ce code par la référence à l'article 425.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre deux amendements visant à corriger des erreurs de référence, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de précision rédactionnelle.

III - La position de votre commission

Votre commission est convaincue de la nécessité d'appliquer aux établissements de santé l'ensemble des conditions d'exercice régissant les services et les agents tutélaires qui leur sont rattachés.

Toutefois, elle vous propose d'adopter un amendement de coordination, qui résulte des modifications suggérées aux articles 5, 9 et 14, visant à supprimer la possibilité pour les établissements hébergeant des personnes âgées ou handicapées de désigner, parmi leurs personnels, des mandataires judiciaires.

C'est pourquoi, elle vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 16 bis (nouveau) - Conditions d'exercice de l'activité de tuteur aux prestations sociales

Objet : Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, étend les dispositions s'appliquant aux mandataires judiciaires à la protection des majeurs aux tuteurs aux prestations sociales des mineurs.

I - Le texte proposé par l'Assemblée nationale

Le projet de loi réformant la protection de l'enfance, en cours de navette entre les deux assemblées, transforme également les modalités de tutelles aux prestations sociales des enfants mineurs en se fondant sur des principes qui se rapprochent de ceux qui inspirent les mesures proposées par le présent projet de loi.

Pourtant, le Gouvernement n'a pas prévu une harmonisation globale des conditions d'exercice des mandataires judiciaires à la protection des majeurs et des personnes ou services agissant en qualité de tuteur aux prestations sociales des enfants.

Le présent projet de loi ne prévoit que deux dispositions de convergence :

- à l'article 10, la reconnaissance de la qualité de service social et médico-social aux services en charge des tutelles sur les prestations familiales destinées aux enfants ;

- à l'article 11, l'adaptation des modalités de tarification des services concernés.

En revanche, aucune mesure n'est envisagée concernant le contrôle de ces services par le préfet et le procureur de la République, ainsi qu'en matière de sanctions.

Le présent article vise à combler cette lacune en alignant de façon globale le régime des tuteurs aux prestations sociales sur celui des mandataires judiciaires à la protection des majeurs.

Il prévoit notamment l'inscription des tuteurs sur la liste départementale, le respect de conditions de moralité, de formation et d'expérience professionnelle, ainsi que les cas de suspension, de retrait ou d'annulation des agréments ou déclarations des tuteurs et les sanctions applicables le cas échéant.

II - La position de votre commission

Votre commission ne peut qu'approuver la coordination des mesures applicables aux tuteurs des prestations sociales destinées aux enfants avec celles prévues dans le présent projet de loi pour les mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Elle contribue à améliorer la cohérence du système de protection judiciaire et à en simplifier l'appréhension.

Votre commission vous demande d'adopter deux amendements : les premier vise à corriger des erreurs de référence, tandis que le second remplace, par coordination avec le projet de loi relatif à la protection de l'enfance, l'appellation « tuteur aux prestations familiales » par celle de « délégué aux prestations familiales ». Cette dernière dénomination paraît en effet mieux adaptée étant donné que la gestion des prestations par une personne déléguée ne s'explique pas ici par l'incapacité juridique avérée de la personne protégée.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 16 ter (nouveau) (art. L. 481-1 du code de l'action sociale et des familles) - Assistance aux tuteurs et curateurs familiaux

Objet : Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, vise à assurer une meilleure information des mandataires familiaux à la protection juridique des majeurs sur leur mission, leurs compétences et leurs obligations.

I - Le texte proposé par l'Assemblée nationale

Le présent projet de loi réaffirme, à juste titre, la priorité familiale dans la dévolution des mesures de protection juridique. Or, les personnes désignées sont souvent démunies devant l'ampleur de la tâche. Leurs obligations en matière d'élaboration des comptes sont importantes et engagent leur responsabilité, mais le plus souvent elles n'en ont pas conscience et même quand c'est le cas, elles n'ont pas nécessairement les compétences pour les remplir. Beaucoup ont également une mauvaise connaissance des procédures et des formalités satisfaisantes pour pouvoir accomplir les différents types d'actes et s'interrogent sur les pouvoirs d'un tuteur dans différentes situations de la vie quotidienne. De nombreuses erreurs sont d'ailleurs commises faute d'information : on saisit le juge pour faire autoriser des actes qui n'ont pas besoin de l'être et inversement.

Compte tenu de l'extension explicite de la protection juridique à la protection de la personne, il est primordial d'informer les tuteurs et curateurs familiaux des droits du majeur protégé, des limites de sa sphère d'autonomie et des cas où il y a lieu à représentation ou assistance en la matière.

Consciente de cette nécessité de mieux informer les mandataires familiaux sur leur rôle, les limites de leurs compétences et leurs obligations, l'Assemblée nationale a introduit cet article additionnel, qui crée un nouveau titre VIII au sein du livre IV du code de l'action sociale et des familles, intitulé « Non-mandataires judiciaires à la protection des majeurs exerçant une mesure de protection juridique » , composé d'un chapitre unique « Information dispensée aux personnes physiques exerçant une mesure de protection juridique à la protection des majeurs » .

Son article unique (article L. 481-1) renvoie à un décret en Conseil d'Etat la définition des modalités de l'information qui sera dispensée aux tuteurs et futurs tuteurs familiaux.

II - La position de votre commission

Votre commission est très favorable à cette initiative qui lui semble indispensable pour améliorer la qualité des mesures de tutelle et pour lever les inhibitions des familles à exercer ces missions. Elle observe à ce sujet que pour les personnes handicapées, il serait nécessaire que le décret prévoie l'intégration de cette information au sein des maisons départementales des personnes handicapées.

Au-delà de la simple information, votre commission souhaite la mise en place d'un véritable conseil aux familles dans l'exercice de leur mission de protection. Ce conseil pourrait d'ailleurs utilement être dispensé par les associations tutélaires qui disposent déjà en leur sein des compétences nécessaires. Des expériences en ce sens ont d'ores et déjà été menées par les grandes fédérations d'associations tutélaires, qui ont prouvé qu'un tel conseil répondait à une vraie attente des familles.

Votre commission vous propose donc d'amender le dispositif dans ce sens. Elle vous propose également un amendement rédactionnel, visant à remplacer la notion de « non-mandataires judiciaires à la protection des majeurs exerçant une mesure de protection juridique », par celle, plus parlante, de « mandataires non professionnels à la protection juridique des majeurs ».

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 17 (art. L. 133-2 du code de l'action sociale et des familles) - Coordination

Objet : Cet article de coordination tire les conséquences des modifications apportées par le projet de loi aux règles de contrôle des établissements et services sociaux et médico-sociaux par le projet de loi.

I - Le dispositif proposé

L'article 18 du projet de loi apporte à plusieurs articles de la section 4 « contrôle » du chapitre III « droits et obligations des établissements et services sociaux et médico-sociaux » du titre I « Etablissements et services soumis à autorisation » du livre III du code de l'action sociale et des familles des modifications dont il convient de tirer la conséquence à l'article L. 133-2 du même code. Tel est l'objet du présent article.

L'article L. 133-2 fixe les compétences des agents départementaux habilités par le président du conseil général à effectuer des contrôles dans les établissements d'hébergement social et médico-social dont il a autorisé l'ouverture. Le présent article précise donc que les agents départementaux habilités exercent leur pouvoir de contrôle sans préjudice des dispositions figurant dans la section 4 du chapitre III du titre I er du livre III.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 18 (art. L. 313-13 et L. 313-18 du code de l'action sociale et des familles) - Contrôle administratif des établissements et services sociaux et médico-sociaux

Objet : Cet article étend aux lieux de vie et d'accueil le contrôle administratif exercé sur les établissements sociaux et médico-sociaux, précise les règles applicables aux visites d'inspection des établissements, opère une coordination entre les contrôles opérés par les agents de l'Etat et ceux du département et complète les motifs de fermeture administrative des structures concernées.

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I de cet article propose une réécriture de l'article L. 313-13 du code de l'action sociale et des familles, qui régit le contrôle administratif des établissements sociaux et médico-sociaux.

Tout d'abord, la formule restrictive visant le « contrôle de l'activité » fait place à la simple mention du « contrôle », dont le champ est étendu aux « lieux de vie et d'accueil ». Ces structures vouées à l'hébergement et non aux soins sont chargées de l'accompagnement et de l'insertion sociale des personnes prises en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance ou par l'autorité judiciaire, soit que ces personnes présentent des troubles psychiques, soit qu'il s'agisse de personnes handicapées ou présentant des difficultés d'adaptation, soit qu'il s'agisse de personnes en situation de précarité ou d'exclusion sociale. Sont ainsi englobés dans le champ du contrôle tous les établissements sociaux et médico-sociaux dont la liste figure à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles.

Par ailleurs les visites, actuellement effectuées par un médecin inspecteur de santé publique et par un inspecteur de l'action sanitaire et sociale, pourront être faites par l'un d'eux en fonction de la nature du contrôle. Cet allégement permettra d'accroître le nombre des visites d'inspection. L'inspecteur de l'action sanitaire et sociale pourra désormais recueillir les témoignages des usagers et des familles, concurremment avec le médecin inspecteur de santé publique, tout en demeurant seul compétent pour dresser procès-verbal des infractions constatées par lui et effectuer des saisies.

Enfin, le texte apporte une précision nouvelle : dans les établissements et services autorisés par le président du conseil général, les contrôles, effectués en principe par les agents départementaux habilités à cet effet par le président du conseil général, pourront être réalisés de façon séparée ou conjointe avec ces agents par les inspecteurs de l'action sanitaire et sociale et les médecins inspecteurs de santé publique. L'objectif est de permettre aux personnels de l'Etat de pallier l'éventuelle carence des services départementaux.

Le paragraphe II étend les motifs de fermeture définitive du service ou de l'établissement, valant retrait de l'autorisation. Entreront désormais en ligne de compte d'une part, les menaces que les conditions d'installation, d'organisation ou de fonctionnement de l'établissement font peser sur la santé, la sécurité ou le bien-être moral ou physique des personnes hébergées, d'autre part, dans les structures pour mineurs, la violation des dispositions relatives à l'obligation scolaire ou à l'emploi des jeunes.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 18 bis (nouveau) (art. L. 321-4 et L. 322-8 du code de l'action sociale et des familles) - Coordination au sein du code de l'action sociale et des familles

Objet : Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, effectue une coordination résultant d'un changement terminologique adopté à l'article 19.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, effectue aux articles L. 321-4 et L. 322-8 du code de l'action sociale et des familles, relatifs aux sanctions encourues par les établissements sociaux et médico-sociaux d'hébergement soumis à déclaration en cas de refus de se soumettre aux contrôles des agents mentionnés à l'article L. 331-1, une coordination nécessitée par le remplacement dans cet article de la notion de « surveillance » par celle de « contrôle » opéré au paragraphe I de l'article 19.

II - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 19 (art. L. 331-1, L. 331-3, L. 331-4, L. 331-5 et L. 331-6 du code de l'action sociale et des familles) - Approfondissement du contrôle des établissements sociaux et médico-sociaux

Objet : Cet article adapte plusieurs règles de contrôle des établissements sociaux et médico-sociaux, modifie certaines références et étend les cas d'interdiction de recevoir des dons et legs de la part des personnes hébergées.

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I réécrit l'article L. 331-1 du code de l'action sociale et des familles en apportant des précisions :

- sur les établissements contrôlés, qui comprennent les établissements sociaux et médico-sociaux, les services agréés dans les conditions prévues par le code de l'action sociale et des familles (à savoir les personnes physiques exerçant à titre individuel et habituel l'activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs régies par l'article L. 462-1) et les lieux de vie ou d'accueil ;

- sur les personnels en charge du contrôle sous l'autorité du ministre chargé de l'action sociale et du représentant de l'Etat, qui comprennent les agents de l'inspection générale des affaires sociales et l'ensemble des agents qualifiés statutairement des directions des affaires sanitaires et sociales ;

- sur la finalité poursuivie, qui est d'assurer la sécurité des personnes accueillies, cette expression désignant la sécurité physique et non le respect des droits, qui relève des contrôles prévus aux articles L. 313-13 à L. 313-20 du code de l'action sociale et des familles.

Le paragraphe II substitue, selon la terminologie adoptée pour l'article L. 331-1, la notion de « contrôle » à celle de « surveillance » à l'article L. 331-3 du code de l'action sociale et des familles.

Le paragraphe III modifie l'article L. 331-4 du code de l'action sociale et des familles, interdisant aux propriétaires, administrateurs, employés et aux établissements de profiter des dispositions entre vifs ou de clauses testamentaires faites en leur faveur par des personnes hébergées, sauf dans les conditions prévues par l'article 909 du code civil, en l'occurrence dans le cas de rémunérations faites à titre particulier eu égard aux services rendus et dispositions universelles. Les bénévoles intervenant dans ces établissements et les associations auxquelles ils adhèrent seront soumis à cette interdiction.

Le paragraphe IV retire de l'article L. 313-5 du code de l'action sociale et des familles la référence à la saisine obligatoire pour avis d'une commission supprimée. L'article L. 313-5 fixe les conditions dans lesquelles le représentant de l'Etat organise le contrôle des conditions d'installation, d'organisation et de fonctionnement des établissements d'hébergement. En cas d'urgence ou de refus de se soumettre à une mesure de surveillance, le représentant de l'Etat peut, par arrêté motivé et à titre provisoire, prononcer sans injonction préalable une mesure de fermeture immédiate.

Le paragraphe V insère, dans le code de l'action sociale et des familles, un nouvel article L. 331-6-1 disposant que les établissements, services, lieux de vie ou d'accueil soumis aux dispositions du titre III du livre III de ce code, relatives aux contrôles sanitaires à des fins de sécurité des personnes hébergées (articles L. 331-1 à L. 331-9), ne peuvent se soustraire aux contrôles administratifs prévus aux articles L. 313-13 à L. 313-20 du même code, relatifs à l'intégrité et au bien-être physique ou moral des usagers, au respect de leurs droits et à l'application des prescriptions législatives et réglementaires en matière de prise en charge.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Outre deux amendements de coordination et un amendement rédactionnel, l'Assemblée nationale a adopté à cet article un amendement étendant aux personnes morales propriétaires des établissements d'hébergement l'interdiction de recevoir des dons et legs.

III - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

TITRE III - DISPOSITIONS DIVERSES ET TRANSITOIRES

Article 21 bis (nouveau) (art. L. 1122-2 du code de la santé publique) - Participation des majeurs protégés à des recherches biomédicales

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, modifie la procédure applicable pour autoriser un majeur, non protégé, hors d'état d'exprimer son consentement, à participer à une recherche biomédicale.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

De nouvelles règles d'encadrement de la recherche biomédicale ont été définies par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.

Cette réforme avait pour objet de transposer en droit interne la directive 2001/20 du 4 avril 2001 relative aux essais cliniques de médicaments et de remédier aux insuffisances du dispositif issu de la loi dite « Huriet-Sérusclat 14 ( * ) ».

Ces mesures nouvelles, entrées en vigueur le 17 août 2006, à la suite de la parution du décret n° 2006-477 du 27 avril 2006, poursuivent un double objectif : respecter et défendre le droit des personnes sans entraver la recherche. Pour ce faire, la loi organise l'intervention des comités de protection des personnes dont la mission est d'autoriser les projets de recherche biomédicale et elle offre des protections renforcées aux personnes participant à ces recherches.

Ces règles de protection sont organisées autour de deux axes :

le programme de recherche doit apporter à la personne concernée un bénéfice de nature à justifier le risque encouru ou se justifier au regard du bénéfice escompté pour d'autres personnes se trouvant dans la même situation ;

le recueil du consentement des personnes sollicitées pour participer à une recherche fait l'objet d'un encadrement rigoureux. Il doit être libre et éclairé et ne peut être recueilli qu'après que la personne sollicitée aura été informée de l'objectif de la recherche, des bénéfices attendus et des risques prévisibles. Des règles particulières sont prévues pour les personnes les plus vulnérables. A ce titre, l'article L. 1112-2 du code de la santé publique dispose que :

- pour les personnes mineures ou majeures sous tutelle, l'autorisation est donnée par le représentant légal et, si le comité de protection des personnes (CPP) considère que la recherche comporte un risque sérieux d'atteinte à la vie privée ou à l'intégrité du corps humain, par le conseil de famille, s'il a été institué, ou par le juge des tutelles ;

- pour les personnes majeures sous curatelle, le consentement est donné par l'intéressé assisté par son curateur. Si le CPP considère que la recherche comporte un risque sérieux d'atteinte à la vie privée ou à l'intégrité du corps humain, le juge des tutelles est saisi aux fins d'assurer l'aptitude à consentir du majeur. En cas d'inaptitude, le juge prend la décision d'autoriser ou non la recherche biomédicale ;

- pour les personnes majeures hors d'état d'exprimer leur consentement et ne faisant pas l'objet d'une mesure de protection juridique, l'autorisation est donnée par la personne de confiance, à défaut par la famille ou par une personne entretenant avec l'intéressé des liens étroits et stables. Si le CPP considère que la recherche comporte un risque sérieux d'atteinte à la vie privée ou à l'intégrité du corps humain, l'autorisation est donnée par le juge des tutelles.

Ces trois catégories de personnes bénéficient donc d'une protection renforcée. Leur consentement peut être recueilli par l'intermédiaire d'un tiers ou, dans certaines circonstances, être remplacé par l'accord du juge des tutelles qui délivre l'autorisation de procéder à la recherche.

Le présent article propose de supprimer la possibilité de faire intervenir le juge des tutelles pour autoriser la participation de personnes majeures, hors d'état d'exprimer leur consentement et ne bénéficiant pas d'une protection juridique, à une recherche biomédicale.

Cette initiative est motivée par le souci de permettre à ces malades de bénéficier le plus rapidement possible des avancées de la recherche. Les auteurs de l'amendement considèrent que la disposition visée de l'article L. 1122-1 est « inutile, inapplicable et finalement néfaste 15 ( * ) » et que la protection des personnes visées est garantie, en tout état de cause, par l'accord de la famille ou de la personne de confiance qui autorisent l'intégration du malade dans le programme de recherche ainsi que par l'intervention du comité de protection des personnes qui valide le projet de recherche.

Cet amendement a été adopté par l'Assemblée nationale malgré l'avis défavorable du Gouvernement et de la commission des lois.

II - La position de votre commission

Votre commission, sous l'impulsion de notre ancien collègue, Claude Huriet, a largement contribué, par ses travaux, à la mise en oeuvre et au suivi de la législation relative à la protection des personnes participant à des recherches biomédicales.

Elle a, en ce domaine, toujours exprimé sa volonté d'assurer la protection des personnes, préoccupation prise en compte par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique qui dispose que « l'intérêt des personnes qui se prêtent à une recherche biomédicale prime toujours sur les seuls intérêts de la science et de la société 16 ( * ) . »

Or, les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale ne semblent pas de nature à assurer une protection optimale des personnes concernées.

Votre commission souligne que, déjà, le recours au juge des tutelles, dont l'intérêt est remis en cause par l'Assemblée nationale, n'est pas systématique. L'intervention du juge destiné à autoriser une personne majeure, hors d'état d'exprimer son consentement et ne bénéficiant pas d'une protection juridique, à participer à une recherche biomédicale, est encadrée par des règles précises. Cette intervention n'est pas requise lorsque :

- la recherche porte sur des soins courants (article L. 1121-1 du code de la santé publique) ;

- la recherche doit être mise en oeuvre dans une situation d'urgence (article L. 1122-1-2). L'argument selon lequel l'intervention du juge des tutelles est de nature à empêcher l'insertion d'un patient pris en charge par un service d'urgences dans un programme de recherche biomédicale n'est donc pas fondé ;

- la recherche ne présente pas de risque sérieux d'atteinte à la vie privée ou l'intégrité du corps humain (article L. 1122-2).

Le recours au juge des tutelles n'a donc lieu que dans des circonstances exceptionnelles, c'est-à-dire lorsque le CPP estime que « la recherche comporte par l'importance des contraintes ou par la spécificité des interventions auxquelles elle conduit, un risque sérieux d'atteinte à la vie privée ou à l'intégrité du corps humain ».

Par ailleurs, selon les informations recueillies, aucune demande d'intervention du juge des tutelles n'a encore été demandée par un comité de protection des personnes. Il importe donc d'évaluer sur une période plus longue l'efficacité des dispositions adoptées en 2004 avant d'envisager de les réformer.

Dans ces conditions, votre commission considère que les dispositions introduites par l'Assemblée nationale sont de nature à remettre en cause les protections offertes par le législateur aux majeurs hors d'état d'exprimer leur consentement, d'une part, et qu'elle risque d'une manière plus générale de porter atteinte à la légitimité des règles applicables aux personnes vulnérables, d'autre part. Elle ne souhaite pas que l'équilibre trouvé en 2004 pour les mineurs, les majeurs incapables et les majeurs hors d'état d'exprimer leur consentement, toutes catégories pour lesquelles l'intervention du juge des tutelles est prévue, soit remis en cause.

Elle estime que les majeurs hors d'état d'exprimer leur consentement doivent pouvoir continuer à bénéficier, dans le cas prévu par la législation en vigueur, d'une protection renforcée, une telle mesure ne constitue pas, à son sens, une restriction à la recherche biomédicale.

En conséquence, votre commission vous propose de supprimer cet article.

Article 22 (art. L. 232-26, L. 245-8 et L. 262-45 du code de l'action sociale et des familles et L. 167-1 à L. 167-5 et L. 821-5 du code de la sécurité sociale) - Dispositions de coordination dans le code de l'action sociale et des familles et dans le code de la sécurité sociale

Objet : Cet article supprime du code de la sécurité sociale et du code de l'action sociale et des familles des dispositions devenues sans objet du fait de la suppression de la tutelle aux prestations sociales destinées aux adultes.

I - Le texte proposé

L'article 8 du présent projet de loi remplace l'actuelle tutelle aux prestations sociales des adultes par la mesure d'assistance judiciaire. Pour mieux signifier son inscription parmi les mesures de protection judiciaire des majeurs, cette mesure figure par ailleurs désormais dans le code civil.

C'est la raison pour laquelle le présent article supprime le chapitre VII du titre VI du livre premier du code de la sécurité sociale consacré à la TPSA, ainsi que :

- le premier alinéa de l'article L. 232-26 du code de l'action sociale et des familles, qui fait actuellement référence à cette tutelle pour les bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (Apa) ;

- le dernier alinéa de l'article L. 245-8 du même code, qui rend également applicable la TPSA aux bénéficiaires de la prestation de compensation du handicap (PCH) ;

- l'article L. 262-45 du même code, qui fait de même pour les titulaires du RMI ;

- le quatrième alinéa de l'article L. 821-5 du même code qui soumet les bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) à cette même tutelle.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 23 (article 17 de la loi n° 2004-1 du 2 janvier 2004) - Prorogation de l'échéancier d'expérimentation du financement par dotation globale

Objet : Cet article reporte à la date d'entrée en vigueur du présent texte la fin de l'expérimentation du financement par dotations globales de la protection juridique des majeurs et fixe la date de présentation au Parlement du bilan de cette expérimentation.

I - Le dispositif proposé

L'article 17 de la loi du 2 janvier 2004, relative à la protection de l'enfance, avait autorisé l'expérimentation du financement par dotations globales pour une durée de deux ans, prolongée de deux nouvelles années par l'article 11 de la loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

La nouvelle échéance a ainsi été fixée au 2 janvier 2008, alors que les principales dispositions du projet de loi n'entreront en vigueur que le 1 er janvier 2009. Il s'agit donc de faire coïncider la fin de la période d'expérimentation et l'entrée en vigueur des dispositions correspondantes de la loi portant réforme de la protection juridique des majeurs.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté à cet article un amendement de cohérence rédactionnelle et a fixé au 1 er juillet 2008 au plus tard la date de présentation par le Gouvernement du bilan d'expérimentation mentionné au dernier alinéa de l'article 17 de la loi du 2 janvier 2004.

III - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 25 - Délai de mise en conformité des mandataires judiciaires à la protection des majeurs avec les nouvelles dispositions en matière d'agrément, d'autorisation et de déclaration

Objet : Cet article impose aux personnes physiques et morales actuellement habilitées à exercer des mesures de protection judiciaire, ainsi qu'aux établissements sociaux et médico-sociaux disposant à ce jour d'un préposé désigné comme gérant de tutelle, à se conformer, avant le 31 décembre 2010, aux dispositions du projet de loi relatives respectivement à l'agrément, à l'autorisation et à la déclaration des mandataires judiciaires à la protection des majeurs.

I - Le texte proposé

Cet article précise les conditions d'entrée en vigueur des dispositions en matière d'agrément, d'autorisation et de déclaration des mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Il distingue trois cas :

- le paragraphe I prévoit que les personnes morales précédemment habilitées à exercer la tutelle ou la curatelle d'Etat, la tutelle aux prestations sociales ou la gérance de tutelle en qualité d'administrateur spécial, se conforment, avant le 31 décembre 2010, aux dispositions du code de l'action sociale et des familles organisant la procédure d'autorisation qui s'applique aux établissements et services sociaux et médico-sociaux. En effet, en vertu des dispositions de l'article 10 du projet de loi, ces personnes morales ont acquis la qualité de service social et médico-social relevant de l'article L. 312-1 du même code ;

- le paragraphe II impose également aux personnes physiques précédemment habilitées à exercer, à titre individuel, la tutelle ou la curatelle d'Etat, la tutelle aux prestations sociales ou la gérance de tutelle en qualité d'administrateur spécial, de se conformer aux obligations définies par le nouvel article L. 462-1 du code de l'action sociale et des familles créé par l'article 14 du projet de loi et conditionnant l'octroi des agréments pour exercer l'activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs, dans un délai de deux ans avant l'entrée en vigueur du décret prévu pour son application ;

- enfin, le paragraphe III prescrit aux établissements sociaux et médico-sociaux, disposant jusqu'alors d'un préposé désigné comme gérant de tutelle, d'appliquer, dans un délai de deux ans à compter de l'entrée en vigueur de son décret d'application, l'article L. 462-5 du même code créé par l'article 14 précité, organisant les modalités de déclaration de ces personnes par le préfet. Les établissements n'ayant pas désigné de préposé peuvent toutefois opter pour le régime d'autorisation d'un service mandataire à la protection des majeurs, à condition qu'ils s'y conforment dans les délais prévus au paragraphe I.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de précision, visant à reporter la date d'entrée en vigueur des dispositions qui dépendent de décrets d'application au 1 er janvier 2011.

III - La position de votre commission

Votre commission est favorable à ce que cette réforme très attendue s'applique sans tarder. Toutefois, il convient de laisser aux services sociaux du département et aux services de l'Etat un délai raisonnable, leur permettant de mobiliser les moyens nécessaires à sa mise en oeuvre. La date du 1 er janvier 2011 retenue par l'Assemblée nationale répond à cette double préoccupation. Elle permettra de limiter les retards de mise en oeuvre de cette réforme qui auraient pu être occasionnés par une publication tardive des décrets d'application relatifs aux procédures d'agréments et de déclarations. Ces retards éventuels auraient en effet créé une rupture préjudiciable d'égalité devant la loi des différents intervenants tutélaires, alors que le présent projet de loi vise précisément à harmoniser leurs conditions d'exercice.

Par ailleurs, votre commission estime qu'il est opportun de prévoir une période de transition pour permettre aux établissements et services sociaux et médico-sociaux accueillant ou accompagnant des personnes âgées ou handicapées majeures et disposant à ce jour de préposés désignés comme gérant de tutelle, de trouver des solutions alternatives. Elle propose un amendement prévoyant que cette période transitoire s'étende jusqu'au 1 er janvier 2012, soit un an après l'entrée en vigueur des dispositions du projet de loi relatives aux nouvelles modalités d'agrément, de déclaration et d'autorisation des services et personnes en charge de la protection judiciaire des personnes majeures.

En revanche, il va de soi que la suppression de la faculté de désigner des personnes ou services préposés des établissements accueillant ou accompagnant des personnes âgées ou handicapées majeures s'applique à compter de la date de promulgation de la présente loi. Elle vous demande d'adopter un amendement de coordination en ce sens.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

*

* *

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de l'ensemble du projet de loi, sous réserve des amendements qu'elle propose.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DU MINISTRE

Réunie le mardi 6 février 2007 , sous la présidence de M. Bernard Seillier, vice-président, la commission a procédé, en commun avec la commission des lois, à l' audition de MM. Pascal Clément , garde des sceaux, ministre de la justice, et Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, sur le projet de loi n° 172 (2006-2007), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant réforme de la protection juridique des majeurs (Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis).

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice , a déclaré que ce projet de loi complétait une série de réformes du droit civil de la famille engagées depuis quatre ans : droit du divorce, de la filiation et des successions et libéralités.

Il a rappelé que, depuis une dizaine d'années, de nombreux rapports avaient dénoncé les dysfonctionnements et les dérives du système actuel de protection des majeurs : les lois en vigueur de 1966 et 1968 ne permettent plus de protéger correctement les personnes les plus fragiles, ces textes ayant été conçus pour s'appliquer à quelques milliers d'individus, quand aujourd'hui plus de 700 000 personnes soit, plus de 1 % de la population, sont concernées. Il a ajouté qu'au rythme actuel, ce nombre pourrait atteindre un million en 2010.

Il a expliqué cette croissance de deux façons :

- l'allongement de l'espérance de vie ;

- une application de la loi progressivement détournée de son objet, de nombreuses mesures judiciaires étant prononcées pour des considérations sociales, qui ne justifient en rien la diminution ou la suppression de la capacité juridique des personnes.

Estimant que la protection judiciaire des personnes vulnérables ne devait être envisagée qu'en dernier recours et être limitée au strict nécessaire, il a indiqué que le projet de loi s'attachait à satisfaire ces exigences.

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, a expliqué que ce texte répondait à un triple enjeu :

- le vieillissement de la société ;

- la plus grande vulnérabilité sociale des personnes dans les sociétés modernes, qui exige de mieux les protéger, sans les déresponsabiliser ;

- l'implication des familles, qui sont aujourd'hui souvent éclatées et éloignées et qui revendiquent d'être mieux informées et plus écoutées.

Il a rappelé que cette réforme, longuement préparée, faisait l'objet d'un consensus auprès des familles et des professionnels concernés.

Il a ensuite présenté le dispositif de droit civil, en indiquant que M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille présenterait le volet social et financier de la réforme.

Il a indiqué que le projet de loi poursuivait trois objectifs :

- recentrer la protection juridique sur ceux qui sont atteints d'une réelle altération de leurs facultés ;

- renforcer et mieux définir leurs droits et leur protection ;

- professionnaliser les intervenants extérieurs à la famille qui exercent la protection juridique.

Concernant le premier objectif, M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, a souligné que, conformément au principe de nécessité des mesures, la mise sous curatelle ou tutelle d'un majeur ne devait être possible qu'en cas d'altération de ses facultés personnelles, le plus souvent mentales, ou parfois corporelles, cette altération devant être constatée par un certificat médical circonstancié établi par un médecin expert.

En conséquence, il a indiqué que la possibilité de placer une personne sous un régime de protection pour « prodigalité, intempérance ou oisiveté » serait supprimée et qu'à la place, des dispositifs d'accompagnement social adaptés et rénovés seraient mis en oeuvre.

Par ailleurs, il a indiqué que le juge des tutelles ne pourrait plus se saisir d'office, sur le simple signalement d'un tiers, intervenant social ou professionnel médical et que les possibilités de saisine seraient réservées aux membres de la famille, aux proches, ou au procureur.

Il a précisé qu'en proscrivant la saisine d'office du juge, ce projet de loi tendait à favoriser les solutions alternatives à la tutelle.

Il a en effet rappelé que pour protéger une personne vulnérable des solutions juridiques moins contraignantes et moins attentatoires à ses droits existaient ou étaient créées :

- la procuration ;

- le mandat de protection future ;

- l'accompagnement social ;

- la sauvegarde de justice, pouvant être utilisée pour un besoin ponctuel ;

- les règles d'habilitation propres aux régimes matrimoniaux qui permettent la désignation d'un époux pour représenter son conjoint, lorsque celui-ci est hors d'état de manifester sa volonté à la suite d'un accident ou d'une maladie.

Enfin, il a indiqué que la subsidiarité impliquait qu'avant de recourir à la collectivité publique, on se tourne vers la famille, laquelle doit être davantage associée aux procédures judiciaires.

Concernant le deuxième objectif de la réforme, renforcer et mieux définir les droits des personnes protégées, M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, a tout d'abord mis en exergue la création d'un nouveau dispositif inspiré de certaines législations étrangères, en particulier de celle du Québec : le mandat de protection future.

Il a expliqué que ce dispositif intermédiaire entre la liberté civile et la privation des droits ordonnée par le juge donnerait à chacun le pouvoir d'organiser lui-même sa protection future de manière libre et personnalisée.

Il a précisé que chacun pourrait désormais devancer l'organisation de sa propre protection :

- en désignant un tiers de son choix pour veiller sur sa personne et ses intérêts le moment venu ;

- en définissant, par acte sous seing privé ou par acte notarié, la mission du mandataire et l'étendue de ses pouvoirs.

Il a précisé que la prise d'effet du mandat serait conditionnée à sa présentation au greffe du tribunal d'instance, accompagnée du certificat médical attestant l'altération des facultés personnelles du mandant.

Il a souligné que les parents d'un enfant handicapé pourraient passer un tel mandat pour le jour où ils ne seraient plus en état d'assumer eux-mêmes la protection de leur enfant.

Enfin, il a expliqué que ce mandat de protection future créait un régime de représentation sans entraîner l'incapacité de la personne représentée.

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, a ensuite souligné que le projet de loi était inspiré par la volonté de protection de la personne, et non plus seulement de son patrimoine.

Il a indiqué que ce principe se traduisait :

- dans le déroulement de la procédure judiciaire, à travers son caractère pleinement contradictoire, la personne étant systématiquement entendue, et pouvant se faire assister d'un avocat ;

- à travers l'obligation faite au juge de choisir la mesure de protection proportionnée à la vulnérabilité et aux besoins de la personne, afin de bannir les mesures de protection trop uniformisées ;

- à travers l'obligation pour le tuteur d'associer la personne protégée, dans la limite de ses capacités, à la gestion de ses intérêts ; en cas de conflit, le juge serait saisi et déciderait après audition de la personne concernée, et exclusivement en considération de son intérêt ;

- à travers le renforcement des modalités de contrôle de l'exécution de la mesure de protection (examen obligatoire tous les cinq ans, comptes rendus des actes et actions effectués pour le compte de la personne protégée, contrôle annuel personnalisé).

Concernant le troisième objectif de la réforme, c'est-à-dire la professionnalisation des tuteurs et curateurs extérieurs à la famille, M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, a observé que le régime actuel des gérants de tutelle, mandataires spéciaux, tuteurs d'Etat ou encore préposés à la tutelle, était hétérogène et injuste.

Il a indiqué que le projet de loi regroupait ces professionnels sous le régime nouveau des « mandataires judiciaires à la protection des majeurs », qui devraient obéir désormais à des règles communes, organisant leur formation et leur compétence, leur évaluation et leur contrôle, leur responsabilité et leur rémunération.

Il a expliqué que, conformément au droit commun de l'action sociale et médico-sociale, ces professionnels :

- seraient soumis à des procédures d'agrément ou d'autorisation selon qu'ils exercent à titre individuel ou dans un cadre associatif ou institutionnel ;

- devraient satisfaire à des conditions précises et strictes pour obtenir l'agrément par le préfet, en concertation avec le procureur de la République ;

- seraient soumis à un contrôle de leur activité, sous l'autorité du préfet et du procureur de la République, pouvant donner lieu, le cas échéant, à des sanctions.

Enfin, il a indiqué que le financement de l'activité de ces professionnels serait unifié et défini selon des critères plus équitables, plus précis et plus clairs, la personne protégée participant aux frais résultant de sa protection dans la mesure de ses moyens ; en l'absence de ressources suffisantes, un financement public subsidiaire assurerait la rémunération des mandataires.

Après avoir rappelé que le projet de loi constituait une réforme tant sociale que judiciaire, M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a expliqué que la tutelle, privative de droits et pratiquement jamais révoquée une fois décidée, était actuellement trop souvent utilisée à des fins sociales, à défaut d'autres instruments plus adaptés.

Souhaitant, par conséquent, réserver cette mesure de protection à des situations d'altération grave et permanente des facultés mentales, il a expliqué qu'il convenait de ne plus l'utiliser à des fins d'accompagnement social et de l'encadrer davantage, tout en soulignant que le nombre de majeurs protégés ne cessait d'augmenter du fait des dérives actuelles, ainsi que de la progression de la maladie d'Alzheimer, précisant notamment que 220 000 nouveaux cas étaient ainsi diagnostiqués pour cette maladie chaque année.

Il a indiqué qu'avec le projet de loi, le gouvernement s'engageait à créer et développer des alternatives à la tutelle, à adapter la protection des personnes à l'évolution de leurs capacités, en créant un véritable parcours d'autonomie, à apporter des garanties nouvelles pour les personnes comme pour les familles, afin qu'elles aient toute confiance dans les mesures de protection, et à garantir un financement qui ne pénalise pas les départements.

Il a expliqué que des alternatives à la tutelle étaient indispensables pour les personnes dont les facultés mentales ne sont pas durablement altérées. Il a exposé que le projet de loi prévoyait à cet effet la création d'une mesure d'accompagnement social personnalisé, en amont du dispositif judiciaire, qui prendrait la forme d'un contrat passé avec le président du conseil général et qui comporterait, en vertu du texte adopté par l'Assemblée nationale, une aide à la gestion de l'ensemble de leurs ressources, et pas seulement de leurs prestations sociales.

Il a précisé qu'une mesure judiciaire ne pourrait être envisagée sans qu'un rapport soit établi par le président du conseil général afin d'informer le juge de la situation de la personne et des mesures déjà prises, puis a réaffirmé la nécessité de mettre en place un parcours progressif permettant de prononcer d'abord les mesures les moins contraignantes et, le cas échéant, de les modifier ensuite en fonction de la situation et des possibilités d'évolution de la personne.

Il a ajouté que les familles et les personnes concernées devraient également être mieux associées et mieux entendues au cours de la procédure, expliquant notamment que l'individu placé sous tutelle serait accompagné, écouté et responsabilisé, afin qu'il puisse, à terme, retrouver son autonomie.

S'agissant de la création d'un parcours vers l'autonomie, M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a estimé qu'afin de protéger la personne et ses intérêts, il convenait de prévoir un placement sous protection judiciaire, tout en tenant compte de ses droits légitimes et en lui garantissant, autant que possible, l'exercice de ses libertés.

Il a indiqué que la mesure d'accompagnement social personnalisé était destinée à répondre à cet objectif, ajoutant qu'en cas d'échec, elle serait remplacée par une mesure d'accompagnement judiciaire, cette mesure d'autorité exercée sous le contrôle du juge offrant une dernière chance à l'action sociale. Il a précisé que, tout en conservant ses droits civiques et patrimoniaux, la personne protégée verrait ainsi ses prestations sociales gérées par un tiers.

Il a ajouté que la curatelle et la tutelle seraient désormais réservées aux personnes les plus vulnérables et ayant généralement une altération définitive de leurs facultés mentales.

Il s'est également félicité de la création du mandat de protection future, ce dispositif innovant devant permettre à toute personne d'organiser à l'avance, par la conclusion d'un contrat, sa prise en charge en prévision d'une éventuelle altération de ses facultés.

Après avoir rappelé que les familles assumaient directement plus de la moitié des tutelles, M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a indiqué que l'Assemblée nationale avait prévu la mise en place d'un dispositif d'aide et d'information leur permettant de trouver plus facilement des solutions aux difficultés rencontrées.

Il a constaté que, si les associations tutélaires, les mandataires ou les établissements accueillant des personnes sous tutelle s'acquittaient généralement bien de leurs responsabilités, trop d'abus ou de négligences perduraient.

Il a indiqué que le projet de loi prévoyait en conséquence un meilleur encadrement et une formation plus adaptée des mandataires judiciaires à la protection des majeurs, en professionnalisant cette fonction et en renforçant les contrôles, par la création d'un certificat national de compétences, par l'inscription obligatoire d'une liste tenue par le préfet sur avis conforme du procureur de la République et par un contrôle de l'Etat.

Réaffirmant la volonté du Gouvernement d'assurer le financement de cette réforme sans pénaliser les départements, il a indiqué qu'afin de répondre aux inquiétudes de ces derniers, le projet de loi prévoyait que l'Etat prendrait en charge le coût des tutelles des bénéficiaires des prestations sociales des départements. Il a précisé que ces collectivités devraient ainsi économiser 77 millions d'euros en 2009, la prise en charge financière de l'Etat représentant plus de 92 millions d'euros en 2013.

Il a estimé que les charges nouvelles induites par la création d'une mesure d'accompagnement social personnalisé devraient être inférieures aux économies ainsi réalisées par les départements. Enfin, il a ajouté que l'Assemblé nationale avait introduit une « clause de revoyure », obligeant à faire le bilan financier de la réforme.

Il a déclaré que la réforme n'entrerait intégralement en vigueur qu'au 1 er janvier 2009, afin de laisser du temps aux départements pour la mettre en place, ces derniers ayant récemment dû assumer un nombre important de nouvelles compétences. Il a précisé que les dispositions n'affectant pas leur charge de travail, telles que la professionnalisation des mandataires, le renforcement des contrôles ou la création du mandat de protection future, seraient immédiatement mises en oeuvre.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a précisé que le projet de loi autorisait les départements à mettre en oeuvre les mesures d'accompagnement social personnalisé, soit en s'appuyant sur leurs services d'action sociale, soit en faisant appel à des associations, celles-ci continuant comme aujourd'hui à assurer le suivi des personnes protégées.

En conclusion, il a qualifié le projet de loi de « réforme de citoyenneté », au même titre que la loi du 11 février 2005 sur l'égalité des droits et des chances, la citoyenneté et la participation des personnes handicapées.

S'exprimant au nom de M. Henri de Richemont, rapporteur, empêché, M. Jean-Jacques Hyest, président, a demandé au garde des sceaux si des moyens matériels et humains suffisants seraient alloués aux parquets pour leur permettre d'assumer leur rôle nouveau dans la mise en place et le suivi des mesures de protection, en observant que le parquet civil disposait traditionnellement d'effectifs très limités. Il a également jugé nécessaire de renforcer les greffes, compte tenu des tâches nouvelles qu'ils auront à assumer.

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, a marqué sa volonté de mettre en oeuvre les moyens nécessaires à la réussite de la réforme de la protection juridique des majeurs. Après avoir rappelé que l'effectif actuel des juges des tutelles atteignait quatre-vingts emplois équivalent temps plein travaillé (ETPT), il a annoncé une augmentation du nombre de magistrats et de fonctionnaires, qui se traduirait par la création de vingt-deux ETPT de juges des tutelles, sept ETPT de magistrats du parquet, cinquante et un ETPT de greffiers et cinq ETPT de greffiers en chef.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a noté qu'une des avancées du projet de loi consistait à différencier plus strictement le champ de l'accompagnement social de celui de l'accompagnement judiciaire, en remplaçant la tutelle aux prestations sociales adultes par la mesure d'accompagnement judiciaire et en créant, en amont, une mesure d'accompagnement social personnalisé. Après avoir demandé au garde des sceaux si cette réforme permettrait de diminuer effectivement le nombre de placements sous une mesure de protection juridique, il s'est interrogé sur le champ d'application de la mesure d'accompagnement judiciaire, notamment sur l'opportunité de la limiter aux seules prestations sociales ou de l'étendre à tout type de ressources.

Après avoir souligné que la frontière entre ce qui doit relever de la sphère sociale et ce qui a trait à la sphère judiciaire était délicate à tracer, M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, a rappelé le constat unanime dressé dans de nombreux rapports, selon lequel une grande part des mesures de tutelle ou de curatelle concernait des personnes en grande difficulté sociale, ce qui prouvait une certaine dérive par rapport à l'objectif initial de la loi du 3 janvier 1968 dédiée à la protection des personnes souffrant d'une altération de leurs facultés mentales. Il a estimé à environ 20 % la part des mesures de tutelle ou de curatelle prononcées sans qu'il y ait altération des facultés personnelles des intéressés, tout en reconnaissant qu'il était difficile de la quantifier précisément. Il a fait valoir que la réforme proposée permettrait la prise en charge des personnes connaissant des difficultés sociales dans le cadre du nouveau dispositif d'accompagnement social personnalisé, qui présentait le double avantage, par rapport à la curatelle, d'offrir une réponse mieux adaptée à leurs besoins et de préserver leurs droits.

Marquant son opposition à l'extension à l'ensemble des ressources de la mesure d'accompagnement judiciaire, votée par les députés, le garde des sceaux a estimé que cette initiative était en contradiction avec la philosophie du projet de loi. Il lui a paru logique et cohérent de confier à la collectivité publique le soin de gérer, y compris de façon contraignante, les prestations sociales pour garantir leur emploi à bon escient. Il a jugé a contrario qu'aucun argument valable ne justifiait d'étendre la portée de ce dispositif à l'ensemble des ressources. Il a souhaité que les travaux du Sénat puissent permettre de revenir à la rédaction initiale du projet de loi en limitant aux seules prestations sociales l'application de la mesure d'accompagnement judiciaire.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a pris acte des indications apportées par le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille sur le financement de la réforme.

Puis il a interrogé le garde des sceaux sur les suites qu'il comptait réserver à l'expérimentation, concluante, tendant à faire intervenir des agents du Trésor public aux côtés des greffiers en chef des tribunaux d'instance pour contrôler plus rigoureusement les comptes de tutelle.

M. Pascal Clément, garde des sceaux, a précisé que si l'expérimentation avait été bien accueillie dans les cours d'appel où elle avait été mise en place, le coût déraisonnable au regard du bénéfice attendu en matière de contrôle des comptes de tutelle rendait sa généralisation peu opportune.

Reconnaissant la difficulté pour les greffiers en chef, compte tenu de leur charge de travail, de contrôler l'ensemble des comptes déposés au greffe des tribunaux d'instance, il a indiqué que la réforme comportait une avancée en ce domaine, en permettant au juge de moduler la nature du contrôle des comptes en fonction de l'étendue du patrimoine et de la situation familiale et permettait de confier à un commissaire aux comptes la vérification des patrimoines les plus importants. A l'inverse, il a expliqué que, dans certaines hypothèses, le contrôle pourrait être allégé. Il a estimé qu'une telle souplesse permettrait de mieux contrôler les comptes des personnes faisant l'objet d'une mesure de protection.

Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis, s'est inquiétée de ce que certaines personnes, parce qu'elles ne perçoivent pas de prestations sociales, ne se trouvent exclues du dispositif de la mesure d'accompagnement judiciaire. Tel pourrait être le cas, a t elle observé, des personnes âgées percevant une très faible retraite.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a fait valoir que l'accompagnement social de ces personnes interviendrait en amont et qu'en cas d'incapacité, celles-ci pourraient bénéficier d'une mesure de protection judiciaire.

Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis, a estimé qu'il pourrait être opportun d'établir un fichier national des mandataires judiciaires à la protection des majeurs interdits d'exercice, afin que ceux qui se seraient vu retirer leur habilitation n'aient pas la possibilité de s'installer dans un autre département.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a reconnu que ce problème pouvait se poser, mais qu'il était difficile, à ce stade, d'en mesurer l'ampleur. L'inscription sur la liste départementale nécessitant la vérification préalable par le préfet du respect de l'ensemble des conditions de moralité et de professionnalisme, il a estimé que l'occurrence de tels phénomènes serait limitée.

Il a indiqué au rapporteur pour avis qu'il était déjà possible d'établir des statistiques sur le nombre des mesures de protection prises en charge par les familles.

Puis Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis, a émis des réserves sur la possibilité donnée au juge de désigner comme tuteur ou curateur un préposé d'établissement social et médico-social. Cette situation lui a semblé être généralement source de conflits d'intérêts, notamment lorsqu'il s'agit de traiter des litiges entre la personne protégée et l'établissement qui l'accueille.

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, a dit ne pas partager ces inquiétudes. Il a rappelé que la possibilité de confier une mesure de protection au préposé d'un établissement de santé ou de cure existait depuis un décret du 15 février 1969, le nombre de mesures ainsi exercées étant actuellement supérieur à 90 000. Il a ajouté que cette solution avait l'avantage d'offrir un service de proximité aux personnes protégées. Enfin, il a souligné que le projet de loi encadrait l'activité des préposés, notamment en exigeant l'intervention systématique du juge pour les actes sensibles qui concernent la situation médicale de la personne protégée.

Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis, s'est également interrogée sur la nature du régime du mandat de protection future, souhaitant que soit précisé si le mandant conserve la possibilité d'agir par lui-même ou si la délégation des actes au mandataire judiciaire entraîne l'impossibilité pour le mandant d'agir seul. Dans la mesure où il s'agirait d'un régime d'incapacité, elle a évoqué la possibilité de prévoir l'homologation du mandat par le juge.

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que le mandat de protection future était destiné à permettre à toute personne d'organiser elle-même sa protection sans intervention judiciaire. Il a précisé qu'il s'agissait d'un régime de représentation, et non d'un régime d'incapacité : le mandataire représente la personne protégée dans les limites du mandat qui lui est confié et le mandant conserve en droit sa capacité juridique. Il a souligné que l'intervention a priori du juge n'était donc pas nécessaire et serait même contraire au principe du mandat. Pour la même raison, il a estimé que l'homologation du mandat par le juge réduirait à néant sa portée, puisqu'en définitive l'ouverture de la mesure serait décidée par le magistrat.

Il a exposé que l'intention du Gouvernement était au contraire de favoriser le développement de mesures conventionnelles de protection, sur le modèle de celles qui existent en Allemagne, en Angleterre ou au Québec. Il a ajouté que des garanties importantes étaient prévues, telles que :

- la mise en oeuvre du mandat à la diligence du mandataire, qui doit produire au greffe du tribunal d'instance le mandat et le certificat médical attestant l'altération des facultés de la personne protégée ;

- la notification du mandat au mandant ;

- la possibilité de saisir le juge des tutelles pour contester les conditions d'exécution du mandat ;

- le pouvoir du juge de compléter le mandat par une mesure judiciaire ou d'y mettre fin, s'il estime que son exécution ne présente plus d'utilité ou ne protège pas correctement la personne concernée.

M. Alain Vasselle a souligné que les personnes morales chargées des mesures de protection juridique bénéficiaient souvent d'aides, prenant la forme de subventions ou de facilités, telles que la mise à disposition de locaux, alors que tel n'était pas le cas des gérants de tutelles, personnes physiques. Il a jugé cette situation discriminatoire.

Il s'est interrogé sur la possibilité d'utiliser les mesures de protection définies par le projet de loi à l'égard d'adolescents ayant échappé à l'autorité de leurs parents et dilapidant les ressources de la famille. Dès lors que celles-ci sont constituées par des prestations sociales, il s'est interrogé sur la possibilité, pour le président du conseil général, de signaler une telle situation au procureur de la République.

M. Jean-Pierre Sueur s'est fait l'écho des préoccupations exprimées par les associations représentées dans le cadre de l'Union nationale des associations des parents et amis de personnes handicapées mentales, tenant à l'absence de prise en compte, dans le cadre du projet de loi, du principe de la compensation du handicap posé par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a estimé qu'il importait moins de multiplier les subventions aux mandataires judiciaires à la protection des majeurs que de leur garantir une rémunération satisfaisante, ce qui serait désormais possible grâce au projet de loi.

Il a par ailleurs estimé que les dispositifs de protection des majeurs ne pouvaient constituer une solution au cas des adolescents évoqué par M. Alain Vasselle.

S'agissant de l'application du principe de la compensation prévu par la loi du 11 février 2005 aux frais de tutelle, il a estimé que ces éléments constitueraient une discrimination injustifiée entre les personnes protégées souffrant d'un handicap mental ou corporel et celles souffrant d'une altération de leurs facultés non liée à un handicap, par exemple dans le cas de la maladie d'Alzheimer.

II. EXAMEN DU RAPPORT POUR AVIS

Réunie le mercredi 7 février 2007 , sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de Mme Bernadette Dupont sur le projet de loi n° 172 (2006-2007), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant réforme de la protection juridique des majeurs .

Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis, a présenté les grandes lignes de son rapport (cf. exposé général du présent avis).

Mme Sylvie Desmarescaux a rappelé que M. Jean-Paul Delevoye, Médiateur de la République, a inspiré certaines dispositions de ce projet de loi. Elle a soutenu l'idée consistant à prendre en compte l'ensemble des ressources de la personne protégée en matière d'accompagnement judiciaire, ainsi que celle visant à interdire de confier aux membres du personnel des établissements sociaux et médico-sociaux le rôle de préposé. Elle a également jugé nécessaire de distinguer clairement le domaine de la protection des majeurs de celui de la protection de l'enfance et appelé à un renforcement des moyens de la justice, en particulier en ce qui concerne les effectifs des greffiers.

M. Guy Fischer a souligné l'intérêt de ce rapport, tout en déplorant que les contraintes d'un calendrier législatif surchargé ne laissent que peu de temps aux sénateurs pour examiner ces questions importantes. Sur le fond, les dispositions du projet de loi apparaissent d'autant plus nécessaires que le vieillissement de la population, le développement de la précarité, de l'exclusion et du chômage tendent à accroître le nombre des majeurs protégés. La France compte ainsi sept millions de travailleurs pauvres et le nombre des personnes âgées augmente au rythme de 4 % par an.

Dans ce contexte, il a jugé nécessaire tout à la fois de préciser les statuts des personnels exerçant la protection juridique des majeurs, d'améliorer leurs qualifications et d'augmenter les moyens à la disposition de la justice. Faisant référence aux travaux de la commission sur la maltraitance des personnes handicapées, il s'est prononcé à son tour en faveur de la suppression de la possibilité pour les personnels des établissements sanitaires et sociaux d'exercer une protection judiciaire sur les personnes handicapées dont ils ont la charge. S'agissant du financement de ces dispositifs, il a noté que l'Etat, la sécurité sociale ainsi que les conseils généraux seront sollicités pour la mise en oeuvre de ces nouveaux dispositifs.

Après avoir pris connaissance des amendements proposés par le rapporteur pour avis, il a formulé au nom du groupe communiste républicain et citoyen, à ce stade de la procédure, une appréciation plutôt favorable sur ces dispositions, qui mérite toutefois d'être corroborée par des précisions en séance publique.

M. Paul Blanc a fait part de sa grande satisfaction à voir l'actuelle majorité mener à bien cette réforme attendue de longue date par les familles et les professionnels du secteur. Confirmant les propositions du rapporteur, il a jugé également nécessaire de supprimer la possibilité de désigner un préposé parmi le personnel des établissements sanitaires et sociaux. Sur la question du financement, il a rappelé que l'actuelle majorité avait veillé à accompagner la création de l'allocation dépendance par la mise en place de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), ce que n'avaient pas fait les précédents gouvernement, le RMI et l'Apa ayant été tous deux institués sans que ne soit élaboré un schéma de financement durable.

M. Jean-Pierre Michel s'est dit en désaccord avec ces affirmations, dont il a regretté le caractère polémique au moment où la commission examine un texte de nature consensuelle. Sur le fond, il a considéré que ce projet de loi présente un grand intérêt et représente l'aboutissement de plusieurs années de travail, engagé aussi bien par les services du ministère des affaires sociales que par ceux du ministère de la justice. Il s'est ainsi félicité de la distinction nette à laquelle il est procédé entre les personnes nécessitant une protection judiciaire, d'une part, et celles qui doivent faire l'objet d'une simple protection sociale, d'autre part.

Après avoir observé que l'implication croissante des départements dans la gestion des dispositifs de protection juridique des majeurs est cohérente avec leurs compétences juridiques, il a néanmoins estimé indispensable que de véritables négociations aient lieu entre l'Etat et l'association des départements de France sur la question des financements.

Il a ensuite attiré l'attention du rapporteur pour avis sur le cas particulier de certains établissements psychiatriques qui assurent également des services médico-sociaux et considéré que ces structures ne doivent pas être privées de la possibilité de désigner des préposés pour les personnes dont ils ont la charge.

Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis , a précisé que les amendements présentés ne visent pas ces établissements.

Bien que se disant réticent au principe de prévoir le recours à un avocat dans l'ensemble des procédures administratives, M. Jean-Pierre Michel a jugé opportun en l'espèce de prévoir son intervention lorsqu'il s'agit de déterminer si une personne doit faire l'objet d'une mesure de protection. Faisant référence à sa propre expérience professionnelle de juge des tutelles, il a souligné la difficulté extrême à apprécier le consentement de ces personnes et le risque qu'il y a de s'en remettre exclusivement aux membres des familles.

Il a également approuvé le dispositif du mandat de protection future, tout en jugeant nécessaire que la rédaction de ce document puisse avoir lieu sous seing privé. A ce sujet, il a fait part de son désaccord avec la position des députés socialistes qui se sont prononcés a contrario en faveur de l'obligation d'un document notarié. Puis il a indiqué, d'une façon générale, que le groupe socialiste aborde l'examen des dispositions de ce projet de loi sous un angle globalement favorable.

M. Alain Vasselle a attiré l'attention de la commission sur plusieurs points spécifiques de ce projet de loi. Il s'est inquiété tout d'abord du texte proposé pour l'article 411 du code civil qui ne prévoit plus l'intervention du conseil de famille lorsque la tutelle est exercée par une collectivité publique. Il a également jugé que les dispositions sur la rémunération des personnes physiques assurant la protection juridique des majeurs mériteraient d'être améliorées : toutes les familles ne sont pas suffisamment fortunées pour que l'un de leurs membres assume ce rôle de façon bénévole.

Sur la question du financement, il a appelé à une grande vigilance pour s'assurer que la sécurité sociale ne sera pas sollicitée pour compenser un éventuel désengagement financier de l'Etat ou des départements : les caisses de sécurité sociale ne peuvent, à son sens, intervenir que par le biais de leur fonds d'action sociale. Il s'est enfin inquiété de l'interprétation restrictive qui pourrait être faite des modalités de calcul du plafond de ressources en dessous duquel les personnes protégées seront exemptées de l'obligation de contribuer au financement des mesures dont elles font l'objet. A titre d'illustration, il a rappelé que les titulaires de l'AAH ne bénéficient pas de la CMU complémentaire en raison d'un effet de seuil de quelques dizaines d'euros.

En réponse à Alain Vasselle, M. Nicolas About, président , a précisé que la commission ne s'est pas saisie des dispositions du projet de loi modifiant l'article 411 du code civil. Il a toutefois invité les commissaires à déposer, s'ils le jugent utile, des amendements en leur nom personnel et à les défendre en séance publique.

En réponse à l'ensemble des intervenants, Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis, a indiqué que le renforcement des personnels judiciaires affectés à la protection des majeurs devrait intervenir à partir de 2007 et que les besoins les plus urgents concernent les huissiers. En ce qui concerne la croissance attendue, au cours des prochaines décennies, du nombre des personnes protégées, elle a souligné que si le phénomène du vieillissement de la population apparaît effectivement inéluctable, l'amélioration de la situation économique et sociale et la réduction du chômage demeurent possibles.

Après avoir jugé nécessaire d'actualiser les dispositions réglementaires sur la qualification des personnels protégeant les majeurs, Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis, s'est prononcée en faveur, d'une part, de la rédaction sous seing privé des mandats de protection future, d'autre part, de l'indemnisation des frais engagés par les membres des familles protégeant les personnes majeures.

Se félicitant du large accord qui semble se dessiner au Parlement sur les dispositions du présent projet de loi, elle a estimé nécessaire de veiller à ce que ces mesurent soient effectivement mises en oeuvre.

Puis la commission a examiné les amendements proposés par le rapporteur.

A l'article 5 (organisation de la protection juridique des majeurs), elle a adopté plusieurs amendements pour :

- prévoir la prise en charge du coût d'établissement du certificat médical par l'aide juridictionnelle pour les personnes à faibles ressources;

- rendre obligatoire la consultation du médecin traitant par le médecin expert chargé d'établir ce certificat ;

- laisser au juge la faculté d'apprécier l'opportunité de la présence d'un tiers lors de l'audition de la personne à protéger ;

- supprimer les restrictions apportées à l'obligation, pour le juge, de l'auditionner ;

- préciser les personnes susceptibles d'engager des actions en annulation des actes passés par une personne placée sous sauvegarde de justice ;

- supprimer la restriction selon laquelle la protection juridique du majeur cesse dès lors qu'il établit sa résidence hors de France ;

- supprimer la faculté pour le juge de désigner comme tuteur ou curateur un préposé de l'établissement médico-social où la personne protégée est hébergée ;

- préciser l'obligation d'indépendance du tuteur et du subrogé tuteur lorsque tous les deux sont des mandataires professionnels ;

- préciser les personnes susceptibles de demander la réduction ou la rescision des actes de la personne sous tutelle ou curatelle ;

- permettre l'établissement d'un budget prévisionnel dans le cadre de la curatelle renforcée ;

- supprimer l'autorisation préalable du juge pour défendre en justice le majeur sous tutelle ;

- soumettre à une autorisation du juge la révocation de son testament par la personne sous tutelle ;

- faire prévaloir le mandat de protection future conclu par un majeur pour lui-même sur celui passé en sa faveur par ses parents ;

- remplacer l'obligation de produire un certificat médical rédigé par un médecin expert agréé par le procureur de la République par celle, moins contraignante, de produire un certificat de droit commun pour mettre fin au mandat ;

- préciser que le mandat de protection future est un régime de procuration, et non d'incapacité ;

- supprimer l'obligation de la présence simultanée de deux notaires pour la conclusion d'un mandat de protection future par acte authentique ;

- préciser le champ du mandat notarié lorsqu'il est rédigé en termes généraux ;

- autoriser le mandataire à demander au juge l'autorisation d'accomplir un acte non prévu par le mandat ;

- préciser le champ du mandat lorsque celui-ci est conclu sous seing privé ;

- étendre la mesure d'accompagnement judiciaire à toute personne, quel que soit le type de revenu qu'elle perçoit ;

- autoriser, à titre exceptionnel, le cumul d'une mesure d'accompagnement judiciaire avec une mesure de sauvegarde de justice ;

- obliger les personnes chargées d'une mesure d'accompagnement judiciaire et d'une mesure d'aide à la gestion du budget familial pour un même foyer à s'informer mutuellement des décisions qu'elles prennent.

Elle a enfin adopté six amendements rédactionnels, onze amendements de coordination et un amendement de précision.

A l'article 8 (création d'une mesure administrative d'accompagnement social personnalisé), la commission a adopté trois amendements visant respectivement :

- à déconnecter l'accès à la mesure d'accompagnement social personnalisé de la perception d'une ou plusieurs prestations sociales :

- à supprimer l'agrément préalable des partenaires choisis par le département pour mettre en oeuvre la mesure d'accompagnement social personnalisé ;

- à clarifier les conditions de fixation de la participation des bénéficiaires de la mesure d'accompagnement social personnalisé.

Elle a enfin adopté un amendement rédactionnel et quatre amendements de coordination.

A l'article 9 (régime juridique de l'activité des mandataires judiciaires à la protection des majeurs), elle a adopté un amendement créant une liste nationale des mandataires judiciaires à la protection des majeurs interdits d'exercice dans leur département d'origine. Elle a adopté, par coordination avec l'article 5, un amendement supprimant les modalités de désignation des préposés d'établissements ou services sociaux et médico-sociaux comme mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Elle a enfin adopté un amendement rédactionnel.

La commission a adopté conformes les articles 10 (insertion des services tutélaires dans la catégorie des établissements et services sociaux et médico-sociaux) et 11 (compétences en matière de tarification des services mandataires à la protection des majeurs).

A l'article 12 (financement de la protection judiciaire des majeurs), elle a adopté un amendement supprimant le critère d'état des personnes des indicateurs retenus pour le calcul de la dotation globale de financement des services tutélaires, ainsi qu'un amendement de coordination.

A l'article 13 (dispositions de coordination en matière de droits des usagers), elle a adopté, par coordination avec l'article 5, un amendement limitant aux seuls établissements de santé l'obligation de désigner parmi leur personnel un préposé à la tutelle.

La commission a adopté conformes les articles 14 (conditions d'exercice des personnes physiques mandataires judiciaires à la protection des majeurs) et 15 (dispositions pénales applicables aux mandataires judiciaires à la protection des majeurs).

A l'article 16 (dispositions applicables aux mandataires judiciaires relevant d'un établissement de santé), elle a adopté un amendement de coordination.

A l'article 16 bis (conditions d'exercice de l'activité de tuteur aux prestations sociales), elle a adopté deux amendements de coordination avec les dispositions du projet de loi relatif à la protection de l'enfance.

A l'article 16 ter (assistance aux tuteurs et curateurs familiaux), elle a adopté un amendement prévoyant la mise en place d'actions de conseil pour les tuteurs familiaux, ainsi qu'un amendement rédactionnel.

La commission a adopté conformes les articles 17 (coordination), 18 (contrôle administratif des établissements et services sociaux et médico-sociaux), 18 bis (coordination au sein du code de l'action sociale et des familles) et 19 (approfondissement du contrôle des établissements sociaux et médico-sociaux).

Elle a adopté un amendement supprimant l'article 21 bis (participation des majeurs protégés à des recherches biomédicales).

La commission a adopté conformes les articles 22 (dispositions de coordination dans le code de l'action sociale et des familles et dans le code de la sécurité sociale) et 23 (prorogation de l'échéancier d'expérimentation du financement par dotation globale).

A l'article 25 (délai de mise en conformité des mandataires judiciaires à la protection des majeurs avec les nouvelles dispositions en matière d'agrément, d'autorisation et de déclaration), elle a adopté un amendement prévoyant une période transitoire de cinq ans pour mettre fin aux mesures de tutelle confiées à des préposés d'établissements sociaux et médico-sociaux, ainsi qu'un amendement de coordination.

La commission a émis un avis favorable à l'adoption du projet de loi ainsi amendé.

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article 5
(art. 428 du code civil)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 428 du code civil, après les mots :

protection judiciaire

insérer les mots :

moins contraignante

Article 5
(art. 430 du code civil)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 430 du code civil, avant les mots :

mesure de protection juridique

insérer le mot :

autre

Article 5
(art. 431 du code civil)

Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 431 du code civil par une phrase ainsi rédigée :

Il est pris en charge au titre de l'aide juridictionnelle pour les personnes dont les ressources sont inférieures à un plafond fixé par ce même décret.

Article 5
(art. 431-1 du code civil)

Dans le texte proposé par cet article pour l'article 431-1 du code civil, remplacer le mot :

peut solliciter

par le mot :

sollicite

Article 5
(art. 432 du code civil)

Après le mot :

avocat

supprimer la fin du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 432 du code civil.

Article 5
(art. 432 du code civil)

Après les mots :

à sa santé

supprimer la fin du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 432 du code civil.

Article 5
(art. 435 du code civil)

Dans la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 435 du code civil, après les mots :

personne protégée

insérer les mots :

, à la personne qui exerce à son égard une mesure de protection juridique

Article 5
(art. 436 du code civil)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 436 du code civil, remplacer les mots :

soit révoqué

par les mots :

ne soit suspendu

Article 5
(art. 439 du code civil)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 439 du code civil, après les mots :

dans les conditions

insérer les mots :

fixées au quatrième alinéa

Article 5
(art. 442 du code civil)

Supprimer le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 442 du code civil.

Article 5
(art. 443 du code civil)

Supprimer le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 443 du code civil.

Article 5
(art. 451 du code civil)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 451 du code civil, supprimer les mots :

hébergée ou

et les mots :

ou dans un établissement social ou médico-social

Article 5
(art. 454 du code civil)

Après le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 454 du code civil, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le curateur ou le tuteur est lui-même un mandataire judiciaire à la protection des majeurs inscrit sur la liste prévue à l'article L. 461-2 du code de l'action sociale et des familles, le subrogé curateur ou le subrogé tuteur désigné en application du précédent alinéa doit être choisi de façon à garantir son indépendance par rapport à celui-ci.

Article 5
(art. 464 du code civil)

Après le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 464 du code civil, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L'action en réduction et en rescision n'appartient qu'à la personne protégée, à la personne exerçant à son égard une mesure de protection juridique et, à sa mort, à ses héritiers.

Article 5
(art. 472 du code civil)

Dans la troisième phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 472 du code civil, après les mots :

auprès des tiers

insérer les mots :

, détermine l'épargne nécessaire aux besoins de la personne

Article 5
(art. 475 du code civil)

Dans la première phrase du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 475 du code civil, supprimer les mots :

ou en défense

Article 5
(art. 476 du code civil)

Rédiger comme suit le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 476 du code civil :

« Avec l'autorisation du juge, elle peut révoquer le testament fait avant ou après l'ouverture de la tutelle.

Article 5
(art. 477 du code civil)

Après le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 477 du code civil, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de concurrence entre deux mandats conclus respectivement au titre du premier et du troisième alinéa, le mandat conclu au titre du premier alinéa l'emporte. »

Article 5
(art. 483 du code civil)

Après les mots :

du mandataire

rédiger comme suit la fin du deuxième alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article 483 du code civil :

par un certificat médical ;

Article 5
(art. 487 du code civil)

Dans le texte proposé par cet article pour l'article 487 du code civil, remplacer les mots :

à la personne protégée si elle a recouvré ses facultés ou à

par les mots :

de la personne protégée si elle a recouvré ses facultés ou de

Article 5
(article additionnel avant l'article 476 du code civil)

Avant le texte proposé par cet article pour l'article 488 du code civil, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. 488 A. - Sous réserve des dispositions de l'article 488, le mandant conserve la faculté d'accomplir seul les actes entrant dans le champ du mandat. »

Article 5
(art. 489 du code civil)

Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 489 du code civil :

Lorsque le mandat est passé devant notaire, l'acceptation du mandataire est faite dans les mêmes formes.

Article 5
(art. 489 du code civil)

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 489 du code civil, remplacer (deux fois) les mots :

aux notaires

par les mots :

au notaire

Article 5
(art. 490 du code civil)

Après les mots :

actes patrimoniaux

rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 490 du code civil :

qu'un tuteur a le pouvoir d'accomplir seul ou avec autorisation et les actes de protection de la personne que le tuteur a le pouvoir d'accomplir seul.

Article 5
(art. 490 du code civil)

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 490 du code civil par un alinéa ainsi rédigé :

« Si l'accomplissement d'un acte qui est soumis à autorisation ou qui n'est pas prévu par le mandat s'avère nécessaire dans l'intérêt du mandant, le mandataire saisit le juge des tutelles pour le voir ordonner.

Article 5
(art. 492 du code civil)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 492 du code civil, après les mots :

deux témoins majeurs

insérer les mots :

et capables

Article 5
(art. 493 du code civil)

Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 493 du code civil :

Le mandat, même rédigé en termes généraux, est limité aux actes qu'un tuteur peut faire sans autorisation.

Article 5
(art. 495 du code civil)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 495 du code civil, remplacer les mots :

ses prestations sociales

par les mots :

ses ressources

Article 5
(art. 495 du code civil)

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 495 du code civil, remplacer les mots :

des prestations sociales

par les mots :

des ressources

Article 5
(art. 495-1 du code civil)

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 495-1 du code civil par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, le juge peut, à titre exceptionnel, autoriser le cumul d'une mesure d'accompagnement judiciaire avec une mesure de sauvegarde de justice.

Article 5
(art. 495-4 du code civil)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 495-4 du code civil, remplacer les mots :

des prestations sociales, à l'exception des prestations de retraite,

par les mots :

des ressources

Article 5
(art. 495-4 du code civil)

Après les mots :

celle-ci

supprimer la fin du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 495-4 du code civil.

Article 5
(art. 495-4 du code civil)

Supprimer le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 495-4 du code civil.

Article 5
(art. 495-5 du code civil)

Dans le texte proposé par cet article pour l'article 495-5 du code civil, remplacer les mots :

de tutelle aux prestations sociales ordonnée en application des articles L. 552-6 et L. 755-4 du code de la sécurité sociale

par les mots :

judiciaire d'aide à la gestion du budget familial ordonnée en application de l'article 375-9-1

Article 5
(art. 495-5 du code civil)

Dans le texte proposé par cet article pour l'article 495-5 du code civil, remplacer les mots :

versées du chef

par les mots :

entrant dans le champ

Article 5
(art. 495-5 du code civil)

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 495-5 du code civil par un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes chargées de l'exécution de ces mesures s'informent mutuellement des décisions qu'elles prennent.

Article 5
(art. 495-7 du code civil)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 495-7 du code civil, remplacer le mot :

prestations

par le mot :

ressources

Article 5
(art. 495-7 du code civil)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 495-7 du code civil, supprimer les mots :

et des établissements sociaux ou médico-sociaux

Article 5
(art. 495-7 du code civil)

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 495-7 du code civil, remplacer le mot :

prestations

par le mot :

ressources

Article 5
(art. 495-7 du code civil)

Après les mots :

gestion autonome

rédiger comme suit la fin du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 495-7 du code civil :

des ressources

Article 8
(art. L. 271-1 du code de l'action sociale et des familles)

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 271-1 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots :

des prestations sociales et/ou d'autres ressources

par les mots :

des ressources

Article 8
(art. L. 271-1 du code de l'action sociale et des familles)

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 271-1 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots :

fait l'objet

par les mots :

prend la forme

Article 8
(art. L. 271-2 du code de l'action sociale et des familles)

Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 271-2 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots :

prestations sociales

par le mot :

ressources

Article 8
(art. L. 271-2 du code de l'action sociale et des familles)

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 271-2 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots :

prestations sociales

par le mot :

ressources

Article 8
(art. L. 271-2-1 du code de l'action sociale et des familles)

Après les mots :

prestations sociales

supprimer la fin du texte proposé par cet article pour l'article L. 271-2-1 du code de l'action sociale et des familles.

Article 8
(art. L. 271-3 du code de l'action sociale et des familles)

Dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 271-3 du code de l'action sociale et des familles, supprimer les mots :

, dans les conditions prévues par le règlement départemental d'aide sociale,

Article 8
(art. L. 271-6 du code de l'action sociale et des familles)

Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 271-6 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots :

les prestations sociales dont il est bénéficiaire

par les mots :

ses ressources

Article 8
(art. L. 271-8 du code de l'action sociale et des familles)

Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 271-8 du code de l'action sociale et des familles, supprimer les mots :

d'une mesure d'aide à la gestion prévue par l'article L. 271-1 et

Article 9
(article additionnel après l'article L. 461-1
du code de l'action sociale et des familles)

Après le texte proposé par cet article pour l'article L.461-1 du code de l'action sociale et des familles, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. 461-2-1 .- Les services mentionnés au 14° et au 15° de l'article L. 312-1, dont l'autorisation fait l'objet d'un retrait en application de l'article L. 313-18, ainsi que les mandataires judiciaires à la protection des majeurs, dont l'agrément prévu à l'article L. 462-1, ou selon les cas, la déclaration prévue à l'article L. 462-6, fait l'objet d'une suspension, d'un retrait ou d'une annulation sont répertoriés dans une liste nationale, tenue à jour par les représentants de l'Etat dans le département. Outre le représentant de l'Etat dans le département, cette liste peut être consultée par le procureur de la République.

Article 9
(art. L. 461-6 du code de l'action sociale et des familles)

Supprimer le texte proposé par cet article pour l'article L. 461-6 du code de l'action sociale et des familles.

Article 9
(art. L. 461-7 du code de l'action sociale et des familles)

Rédiger comme suit le dernier alinéa (4°) du texte proposé par cet article pour l'article L.461-7 du code de l'action sociale et des familles :

« 4° Les personnes protégées sont associées au fonctionnement de l'établissement ou du service par leur participation directe au conseil de la vie sociale prévu à l'article L. 311-6 ou, lorsque leur état ne le leur permet pas, par d'autres formes de participation prévues par le même article. »

Article 12
(art. L. 361-1 du code de l'action sociale et des familles)

I - A la fin du sixième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 361-1 du code de l'action sociale et des familles, supprimer les mots :

et de l'état des personnes bénéficiaires

II - A la fin du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 361-2 du code de l'action sociale et des familles, supprimer les mots :

et de l'état des personnes bénéficiaires

Article 12
(art. L. 361-1 du code de l'action sociale et des familles)

Supprimer le deuxième alinéa du III du texte proposé par cet article pour l'article L. 361-1 du code de l'action sociale et des familles.

Article 14
(art. L. 462-5 du code de l'action sociale et des familles)

Rédiger comme suit le début du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L.462-5 du code de l'action sociale et des familles :

Les établissements de santé publics ou privés mentionnés aux a , b et c de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale et les hôpitaux locaux mentionnés à l'article L. 6141-2 du même code qui dispensent, avec hébergement, les soins mentionnés au 2° de l'article L. 6111-2 et à l'article L. 3221-1 du même code dont la capacité... (le reste sans changement)

Article 16

Remplacer les trois derniers alinéas du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6111 4 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, pour leur application à ces établissements, les droits des usagers sont ceux prévus par les dispositions du titre I er du livre I er de la première partie du présent code.

Article 16 bis

I.- Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'intitulé du titre VII du livre IV du code de l'action sociale et des familles :

Délégués aux prestations familiales

II.- En conséquence, rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'intitulé du chapitre unique du titre VII du livre IV du même code :

Conditions d'exercice de l'activité de délégué aux prestations familiales

Article 16 bis

I.- Après les mots :

en application

rédiger comme suit la fin du texte proposé par cet article pour l'article L. 471-1 du code de l'action sociale et des familles :

de l'article 375-9-1 du code civil.

II.- Dans le texte proposé par cet article pour l'article L.471-2 du même code, remplacer les mots :

L. 434-12, L. 552-6 et L. 755-4 du code de la sécurité sociale

par les mots :

L. 434-12 du code de la sécurité sociale et 375-9-1 du code civil

Article 16 ter
(Titre VIII du livre IV du code de l'action sociale et des familles)

Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'intitulé du titre VIII du livre IV du code de l'action sociale et des familles :

Mandataires non professionnels à la protection juridique des majeurs

Article 16 ter

Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 481-1 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots :

qui peut être dispensée

par les mots :

et du conseil qui peuvent être dispensés, à leur demande,

Article 21 bis

Supprimer cet article.

Article 25

Dans le III de cet article, remplacer les mots :

sociaux ou médico-sociaux

par les mots :

publics ou privés et les hôpitaux locaux mentionnés à cet article

Article 25

Compléter le III de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

A compter du 1er janvier 2012, les préposés désignés avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi comme gérant de tutelle par les établissements mentionnés aux 6° et 7° du I de l'article L. 312-1du code de l'action sociale et des familles ne sont plus habilités à exercer ces fonctions.

* 1 Rapport définitif du groupe de travail interministériel sur le dispositif de protection des majeurs présidé par Jean Favard, remis au ministre de l'emploi et de la solidarité, au ministre de la justice et au ministre de l'économie et des finances, avril 2000.

* 2 Allemagne, Italie, Espagne, Royaume-Uni (Angleterre, Pays-de-Galles).

* 3 « Réformer les tutelles », Conseil économique et social, rapport présenté par Rose Boutaric, septembre 2006.

* 4 « Réformer les tutelles », rapport présenté par Rose Boutaric - septembre 2006.

* 5 Rapport n° 212 (2006-2007) de M. Henri de Richemont, rapporteur, fait au nom de la commission des lois, 7 février 2007.

* 6 Rapport d'enquête sur le fonctionnement du dispositif de protection des majeurs, fait par Jean-Baptiste de Foucault (Inspection générale des finances), Blandine Froment (Inspection des services judiciaires et Michel Trémois (Inspection générale des affaires sociales).

* 7 Décret n° 65-195 du 15 février 1969 pris pour l'application de l'article 499 du code civil.

* 8 Article introduit dans le code civil par une loi du 5 mars 1803.

* 9 « Maltraitance envers les personnes handicapées : briser la loi du silence », rapport n° 339 (2002-2003) de Paul Blanc, président, et Jean-Marc Juilhard, rapporteur, fait au nom de la commission d'enquête du Sénat sur la maltraitance des personnes handicapées accueillies en établissements et services sociaux et médico-sociaux et les moyens de la prévenir, publié le 6 juin 2003.

* 10 Rapport définitif du groupe de travail interministériel sur le dispositif de protection des majeurs, remis par Jean Favard, président, au ministre de l'emploi et de la solidarité, au ministre de la justice et au ministre de l'économie et des finances, avril 2000.

* 11 Etablissements et services mentionnés aux 6° et 7° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles.

* 12 Rapport définitif du groupe de travail interministériel sur le dispositif de protection des majeurs présidé par Jean Favard (avril 2000), précité.

* 13 Etablissements et services mentionnés au 6° et 7° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles.

* 14 Loi n° 88-1138 du 20 décembre 1988 relative à la protection des personnes qui se prêtent aux recherches biomédicales.

* 15 Exposé sommaire de l'amendement n° 197 présenté à l'Assemblée nationale.

* 16 Article L. 1121-1 du code de la santé publique.

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