C. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION POUR ASSURER L'AUGMENTATION RÉGULIÈRE DES RESSOURCES DE L'AUDIOVISUEL PUBLIC

Alors que l'échec relatif de la réforme du recouvrement de la redevance se confirme et que le financement de l'audiovisuel public risque de tomber dans une impasse, votre rapporteur souhaite proposer plusieurs pistes de réflexion susceptibles de redynamiser les ressources de l'audiovisuel public.

1. Ouvrir une réflexion sur la date d'envoi des rôles de la taxe d'habitation afin de garantir une meilleure information du Parlement

Il paraît tout à fait anormal que le Parlement ne dispose, à l'heure où il est appelé à discuter et à voter le montant de la redevance pour 2008, d'aucune information concernant les encaissements de redevance pour l'année 2007. En effet, les rôles relatifs à la taxe d'habitation n'étant adressés aux contribuables qu'en novembre de l'année « n », les données relatives aux encaissements effectifs ne sont connues au plus tôt qu'en janvier de l'année « n+1 », obligeant ainsi le Parlement à se prononcer « à l'aveugle » sur deux exercices consécutifs au moment du vote de la loi de finances.

Dans ces conditions, votre rapporteur en appelle à une véritable réflexion concernant la modification de la date d'envoi des rôles de taxe d'habitation, afin que la représentation nationale dispose des informations lui permettant de se prononcer en connaissance de cause lors de la discussion des lois de finances, comme c'est désormais le cas en Allemagne.

2. Remettre en cause de la doctrine fiscale afin de faire participer l'ensemble des supports de réception au financement de l'audiovisuel public

Enfin, au regard de ces chiffres, votre rapporteur regrette une nouvelle fois que la réforme n'ait pas permis d'adapter le fait générateur de la taxe aux évolutions technologiques en matière audiovisuelle. La nouvelle rédaction de l'article 1605-II 1° du code général des impôts (CGI) issue de la loi de finances pour 2005 précise certes que la redevance est due « par toutes les personnes physiques imposables à la taxe d'habitation au titre d'un local meublé affecté à l'habitation, à la condition de détenir au 1 er janvier de l'année au cours de laquelle la redevance audiovisuelle est due un appareil récepteur de télévision ou un dispositif assimilé permettant la réception de la télévision pour l'usage privatif du foyer. »

Mais la notion de « dispositif assimilé » est interprétée de manière totalement anachronique par l'administration fiscale. Le document d'information sur la redevance audiovisuelle « 2041-GZ » précise en effet « sont notamment considérés comme des dispositifs assimilés, lorsqu'ils sont associés à un écran ou à tout autre support de vision (écran souple accroché au mur par exemple), les magnétoscopes, lecteurs ou lecteurs-enregistreurs de DVD, vidéo-projecteurs équipés d'un tuner. Les micro-ordinateurs munis d'une carte-télévision permettant la réception de la télévision ne sont pas taxables. »

Cette interprétation, incohérente du point de vue intellectuel, technologique et juridique dans la mesure où le principe de neutralité technologique devrait conduire à taxer l'ensemble des récepteurs, réduit considérablement l'assiette de la redevance en laissant volontairement de côté un mode de réception qui ne constitue plus simplement un mode de complément. Cette définition laisse par ailleurs planer des incertitudes concernant l'assujettissement à la redevance des futurs détenteurs de télévision mobile personnelle.

Dans ces conditions, votre rapporteur souhaite une clarification du fait générateur de la redevance audiovisuelle ou du moins une remise en cause de la doctrine fiscale en ce domaine, afin que tous les supports de réception participent désormais au financement de l'audiovisuel public, comme c'est désormais le cas en Allemagne.

3. Réévaluer le montant de la redevance audiovisuelle

Votre rapporteur regrette la décision du Gouvernement de ne pas réévaluer le taux de la redevance audiovisuelle. Il tient à rappeler que, comme le montre le tableau ci-dessous, les taux de redevance en vigueur en métropole (116 euros) et dans les départements d'outre mer (74 euros) n'ont pas été modifiés depuis 2002 (à l'exception de l'ajustement consécutif à la réforme du mode de perception en 2005), dépréciant ainsi, en euros constants, la valeur de la taxe.

Années

Départements d'outre-mer

Evolution

Métropole

Evolution

1/01/2001

73,02 €

-

114,49 €

-

1/01/2002

74,31 €

+ 1,76 %

116,50 €

+ 1,76 %

1/01/2003

74,31 €

-

116,50 €

-

1/01/2004

74,31 €

-

116,50 €

-

1/01/2005

74 €

- 0,41 %

116 €

- 0,43 %

1/01/2006

74 €

-

116 €

-

1/01/2007

74 €

-

116 €

-

PLF 2008

74 €

-

116 €

-

Il tient par ailleurs, une fois n'est pas coutume, à rappeler les ordres de grandeur constatés dans les autres pays d'Europe se caractérisant par un mode de financement identique. Le tableau ci-après permet ainsi de constater que notre pays :

- est loin d'être celui qui impose le plus lourdement ses citoyens pour le financement de ses sociétés nationales de programmes puisque seule l'Italie dispose désormais d'un taux de redevance inférieur au nôtre ;

- est celui qui a fait le moins progresser le taux de sa redevance audiovisuelle depuis 2002.

Pays

Evolution

2002/2006

Montant de la redevance (2002)

Montant de la redevance (2006)

Autriche

+ 43,5 %

226,32 €

324,8 €

Allemagne

+ 5,4 %

193,8 €

204,3 €

Wallonie

+ 8,4 %

138 €

149,6 €

Finlande

+ 21,5 %

165,1 €

200,7 €

Irlande

+ 44,91 %

106,9 €

155 €

Italie

+ 6,2 %

93,8 €

99,6 €

Royaume-Uni

+ 8,6 %

180 €

195,6 €

Suède

+ 9,6 %

191,5 €

210 €

Dans ces conditions, et à l'heure où les différentes sociétés de l'audiovisuel public sont appelées à entrer dans l'ère numérique conformément aux différentes missions assignées par la tutelle dans les contrats d'objectifs et de moyens, votre rapporteur souhaite présenter deux amendements tendant à réévaluer le taux de la redevance audiovisuelle.

Le premier tend à faire passer le taux de la redevance de 116 à 120 euros en métropole et de 74 à 78 euros dans les départements d'outre-mer afin de rattraper partiellement le retard accumulé au cours des années passées.

En prenant comme référence les recouvrements bruts de première année de la redevance adossée à la taxe d'habitation en exécution 2005 et toutes choses étant égales par ailleurs, ces quatre points d'augmentation de redevance pour les particuliers devraient permettre approximativement un recouvrement brut supplémentaire d'environ 68 millions d'euros.

Le second tend à instaurer un mécanisme d'indexation de l'évolution de la redevance audiovisuelle sur l'indice d'évolution des prix afin de garantir aux organismes de l'audiovisuel une progression régulière et constante de leurs ressources.

Ces ressources supplémentaires donneront ainsi aux sociétés de télévision les moyens de faire face aux défis qui les attendent et dont les modalités de financement n'ont pas été définies par les différents contrats d'objectifs et de moyens à savoir :

- le financement de la double diffusion des programmes des chaînes publiques en numérique et en analogique jusqu'à l'extinction complète de ce dernier signal. Ce complément sera d'autant plus nécessaire si, comme il est probable, le calendrier d'extinction défini par la loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur ne peut être tenu ;

- le financement de la diffusion des programmes des chaînes publiques sur la télévision mobile personnelle . Estimés à 8 millions d'euros par chaîne, les coûts de diffusion devraient être théoriquement assumés par les recettes publicitaires accumulées sur ce support. Ceci est d'autant plus illusoire qu'aucun opérateur n'est à l'heure actuelle en mesure de connaître le modèle économique de ce nouveau support ;

- le financement du passage à la haute définition , qui bien qu'échelonné dans le temps, conduira dans un premier temps à des surcoûts importants tant en matière de production qu'en matière d'achat de droits.

Ces ressources supplémentaires permettront également, à France Télévisions notamment, de poursuivre le virage éditorial mis en oeuvre depuis la rentrée 2006. Ce virage remporte certes un succès d'estime. Mais il comporte un impact publicitaire non négligeable. Auditionné par la commission, M. Patrick de Carolis, président-directeur général de France Télévisions a ainsi, rappelé que la diffusion de l'opéra le Trouvère cet été en prime time sur France 2, avait représenté un manque à gagner de 500 000 euros en termes de recettes de recettes publicitaires.

Il est fort à parier que la multiplication de ce type d'initiatives, qui permet au service public de se démarquer de ses concurrents privés et d'asseoir sa légitimité dans le paysage audiovisuel français, aura évidemment un impact sur les équilibres financiers.

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