2. Pour un opérateur unique en charge de l'influence culturelle française à l'étranger

a) CulturesFrance : des capacités de gestion insuffisantes et un statut inadapté, à l'heure actuelle, pour s'imposer comme opérateur unique de la coopération culturelle

Le CMPP, dans sa recommandation du 11 juin 2008 intitulée « L'action de l'État à l'étranger est mise au service d'une politique d'influence et des nouvelles priorités internationales de la France », a appelé à faire de CulturesFrance un des opérateurs de la diplomatie d'influence intellectuelle de notre pays, aux côtés de l'AEFE et d'une agence pour la mobilité internationale.

La mise en place d'un opérateur unique de la coopération culturelle vise à mieux prendre en compte la dimension interministérielle inhérente à l'action culturelle extérieure de notre pays. En effet, comme le rappelle à très juste titre notre collègue, M. Adrien Gouteyron, dans son rapport sur la crise de notre diplomatie culturelle, « aux sommes que le ministère des affaires étrangères et européennes consacre chaque année au rayonnement culturel de la France à l'étranger, s'ajoute également le soutien public à la création affecté au budget du ministère de la culture et de la communication ».

Néanmoins, votre rapporteur pour avis considère, au regard des consultations qu'il a pu mener dans le cadre de la préparation du présent rapport, que les conditions ne sont pas encore réunies pour que CulturesFrance puisse assumer les responsabilités qui incomberaient à un opérateur unique de la coopération culturelle.

Il importerait, tout d'abord, de mieux associer le ministère de la culture et de la communication à la gestion de cet opérateur . Du fait de la relation privilégiée qu'il entretient avec le monde de la création culturelle, le ministère de la culture est appelé à s'investir davantage dans l'action culturelle extérieure, en particulier afin de favoriser l'exportation de notre production culturelle nationale, pour laquelle il dispose déjà de leviers à vocation internationale : le ministère de la culture soutient, de façon conséquente, plusieurs leviers à l'exportation de la production culturelle, notamment le Bureau export de la musique, le Bureau du livre et Unifrance (pour le cinéma).

Or, la faible participation du ministère de la culture et de la communication au budget de CulturesFrance n'est pas de nature à lui permettre de jouer un rôle déterminant dans son pilotage 12 ( * ) . En effet, le budget de CulturesFrance, d'un montant total de 18,6 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2009, se décompose de la façon suivante :

- une dotation de 6,9 millions d'euros au titre de l'action n° 1 « Animation du réseau » du programme n° 185 ;

- une dotation de 2,9 millions d'euros au titre de l'action n° 2 « Langue et culture françaises, diversité linguistique et culturelle » du programme n° 185 ;

- une dotation de 7,4 millions d'euros au titre de l'action n° 1 « Animation du réseau » du programme n° 209 ;

- une dotation de 1,4 million d'euros, versée par le ministère de la culture et de la communication au titre de l'action « Action culturelle internationale » du programme n° 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ».

Par ailleurs, la nature juridique actuelle de CulturesFrance, association régie par la loi de 1901, ne lui permet pas de s'imposer comme l'opérateur unique de la coopération culturelle . Votre rapporteur pour avis considère indispensable la transformation de l'agence CulturesFrance en établissement public industriel et commercial (EPIC), qui permettrait à la fois de responsabiliser et d'assouplir sa gestion. À cet égard, il regrette que la proposition de loi allant dans ce sens de notre collègue, M. Louis Duvernois, adoptée en 2006 à l'unanimité par le Sénat, n'ait pas encore été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

Il apparaît indispensable, en effet, que l'opérateur unique soit pleinement responsable de la mise en oeuvre de la politique d'action culturelle extérieure qui lui est confiée. L'exemple de l'AEFE à cet égard est intéressant : en tant qu'établissement public opérateur de l'administration, elle est pleinement responsable de sa gestion, et en particulier de la gestion de ses personnels.

Dès lors, la gestion du réseau culturel et, en particulier du personnel sur lequel il s'appuie, est appelée à relever de la compétence de l'opérateur unique, ce qui n'est pas encore le cas aujourd'hui de CulturesFrance, comme le regrette le rapport de la Commission du Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France.

Enfin, CulturesFrance n'a pas la taille et les moyens suffisants pour assumer la responsabilité de la mise en oeuvre de l'action culturelle extérieure. Il est donc indispensable que l'accroissement de ses missions s'accompagne d'un renforcement de ses capacités de gestion. Votre rapporteur pour avis estime que la dotation globale consentie à CulturesFrance est très insuffisante au regard du coût des responsabilités qu'un opérateur unique est appelé à exercer.

Dans ces conditions, votre rapporteur pour avis en vient à s'interroger sur la réelle volonté du ministère de mettre en place un établissement public capable de fédérer les multiples acteurs de notre action culturelle extérieure, tels que les collectivités territoriales, les universités, les industries culturelles et les opérateurs de l'audiovisuel extérieur français. Une véritable réflexion doit être menée de toute urgence sur les moyens et le statut du futur opérateur unique de la coopération culturelle. Faute d'un projet clair et mobilisateur, les agents tant au niveau des services centraux que sur le terrain perdent confiance.

Votre rapporteur pour avis souhaite insister, en particulier, sur la nécessité d'associer de façon très étroite la nouvelle société « Audiovisuel extérieur de la France » (créée en avril 2008 et qui gère notamment les participations de l'État aux sociétés de l'audiovisuel extérieur que sont France 24, TV5 Monde et Radio France Internationale) au futur établissement public en charge de coordonner l'action culturelle extérieure de notre pays . À cet effet, il pourrait être envisagé que la holding Audiovisuel extérieur de la France soit membre du conseil d'administration du futur opérateur unique de l'action culturelle extérieure.

L'AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR DE LA FRANCE : UN ENJEU
POUR NOTRE ACTION CULTURELLE EXTÉRIEURE

L'audiovisuel extérieur français constitue assurément un levier essentiel de notre diplomatie d'influence culturelle. Satisfait du succès rencontré par France 24, votre rapporteur pour avis juge toutefois indispensable que la chaîne d'information internationale française développe sa présence, encore très insuffisante, en Asie et en Amérique latine : elle a tout intérêt à être diffusée dans des métropoles de dimension internationale dans les pays émergents telles que Shanghai.

Enfin, votre rapporteur pour avis estime que les ambitions affichées par notre pays en matière de politique audiovisuelle extérieure sont en décalage avec les moyens encore insuffisants qui lui sont consacrés. Il considère qu'une augmentation de la dotation globale consentie à l'audiovisuel extérieur de + 4 % (soit environ 12 millions d'euros supplémentaires) serait de nature à permettre la mise à niveau de la portée internationale des opérateurs de notre audiovisuel extérieur. Cet effort supplémentaire permettrait également de surmonter le problème de l'endettement considérable de RFI, appelée pourtant à relever le lourd défi du développement de sa diffusion numérique.

* 12 Rapport d'information n° 428 (2007-2008) précité de M. Adrien Gouteyron.

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