2. La numérisation des contenus

L'intervention du FSN en vue de soutenir la numérisation et l'exploitation des contenus patrimoniaux culturels, éducatifs et scientifiques, qui mobilise une enveloppe de 750 millions d'euros, relève de la compétence de la commission des affaires culturelles et fait l'objet de développements dans le rapport pour avis de cette dernière.

3. Le développement des technologies de base du numérique

Les technologies numériques de base sont les maillons indispensables de la chaîne du numérique permettant d'aboutir à la mise au point des applications du futur, soit les « nouveaux usages numériques » constituant le dernier des quatre axes de l'action 02.

Elles rassemblent des activités aussi diverses que :

- les futures générations de la nanoélectronique afin de répondre aux besoins de filières industrielles porteuses (transports, systèmes sécurisés, énergie, santé, éclairage ...) ;

- les technologies génériques du logiciel (logiciel embarqué, technologies Web génériques ...) ;

- les prochaines générations de technologies pour les réseaux de télécommunications [projet long term evolution (LTE), protocole IP multimedia subsystem (IMS) ...].

L'intervention du FSN en soutien à ces technologies, dont le montant total n'est pas précisé dans le projet de loi mais devrait s'élever, selon les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, à 400 ou 500 millions d'euros, se fera sous forme de subventions à hauteur au plus des trois-quarts de l'enveloppe, et d'avances remboursables pour le solde. Elle visera à financer des partenariats public-privé, autour de projets de recherche et développement ambitieux s'appuyant sur les principaux sites industriels français de production.

4. Le développement de nouveaux usages numériques

Le terme de « nouveaux usages du numérique » recouvre plusieurs réalités technologiques :

- les réseaux d'électricité « intelligents » , ou smart grids . Ces réseaux d'énergie du futur utilisent les technologies informatiques en vue d'optimiser la production et la distribution et de mieux mettre en relation l'offre et la demande entre producteurs et consommateurs d'électricité. Ils ont pour ce faire massivement recours à des capteurs électroniques ultrasensibles, à des interfaces animées par des logiciels spécialisés permettant à des appareils de communiquer entre eux ou encore à des compteurs intelligents.

La gestion rationnelle des réseaux qu'ils permettront sera porteuse de nombreux avantages, tels que la réduction des pics de consommation, la sécurisation des réseaux et l'évitement des pannes dues à leur surcharge, la diminution des émissions de gaz à effet de serre, l'intégration d'un bouquet de sources d'énergies alternatives et durables (éoliennes, hydroliennes, photovoltaïque, petit hydraulique ...), la facilitation du transport d'énergie sur de longues distances ou encore l'abaissement des facturations pour le consommateur.

Diverses études ont conclu à l'efficacité de cette technologie en gestation. Le département d'État américain de l'énergie 37 ( * ) a conclu à une économie d'émission de gaz à effet de serre de 53 millions de voitures et de financements de 46 à 117 milliards de dollars d'ici 2023, dans le cas où les smart grids amélioraient de 5 % seulement le réseau électrique national. Selon une étude européenne 38 ( * ) , les smart grids permettraient même à l'Union de passer dès 2050 à un réseau d'énergie uniquement alimenté par des ressources propres, sûres et renouvelables.

Les États-Unis se sont déjà résolument investis dans le soutien à la filière des réseaux électriques intelligents. En octobre 2009, le président Barack Obama a ainsi annoncé la mise en place d'un plan gouvernemental de 3,4 milliards de dollars en vue de développer des applications industrielles adaptées aux besoins.

Extrêmement prometteuse, la technologie des réseaux électriques intelligents devra toutefois surmonter certains défis en Europe et dans notre pays. Outre ses implications en termes de recueillement de données personnelles, elle requerra la mise au point de normes standard communes à l'ensemble des filières qu'elle irrigue potentiellement (infrastructures réseaux, électroménager, domotique ...).

Une enveloppe de 250 millions est mobilisée dans le cadre du « grand emprunt » pour financer le développement de ces réseaux du futur. Transitant par l'ADEME, ils permettront la conduite d'expérimentations à grande échelle dans les domaines des réseaux de transport et de distribution d'électricité d'une part, des compteurs communicants de l'autre. Il s'agira notamment, selon l'exposé des motifs du projet de loi, de soutenir des projets de démonstration au moyen, tout d'abord, de subventions en recherche et développement pour la mise au point d'un démonstrateur puis, dans un second temps, d'avances remboursables, voire de prises de participation pour sa mise en oeuvre ;

- la « e-santé ». Ce terme désigne l'utilisation d'outils basés sur les technologies de l'information et de la communication (TIC) dans le secteur de la santé, en vue d'améliorer la prévention, le diagnostic, le traitement et le suivi médical ainsi que la gestion de la santé et du mode de vie. Les solutions retenues sont destinées tant aux autorités sanitaires qu'aux professionnels de la santé, aux patients et aux citoyens. Il peut s'agir de réseaux d'information médicale, de dossiers médicaux électroniques, de services de télémédecine ou de portails en ligne sur la santé, de maintien ou d'hospitalisation à domicile.

Il est attendu du FSN qu'il favorise la constitution d'une filière industrielle dans ce domaine. A cette fin, et aux termes de l'exposé des motifs du projet de loi, il soutiendra les PME innovantes par des avances remboursables, des prêts, des appels à projets en recherche et développement et des investissements en capital. L'effet de levier escompté doit être du double de celui des investissements réalisés.

Les secteurs qui feront l'objet d'action privilégiés seront ceux répondant à des besoins sociaux prioritaires :

- en termes d'accès aux soins pour compenser le déclin de la démographie médicale et le fort accroissement des maladies chroniques (téléradiologie ; téléconsultations spécialisées dans quelques domaines prioritaires comme les maladies cardiovasculaires, via de nouveaux dispositifs de permanence des soins comme les « boxes » de téléconsultation en officine ; capteurs pour la télésanté ...) ;

- ou bien en termes de qualité des soins et d'accompagnement de la dépendance (services de télésurveillance et solutions alternatives à l'hospitalisation) ;

- la sécurité et la résilience des réseaux .

L'indisponibilité de certains réseaux ou sites provoquée récemment par des cyber-attaques de la part de « pirates » de l'Internet, voire d'organisations étatiques, est devenue une problématique importante en tant qu'elle affecte l'économie de l'Union, la sécurité de ses États membres et la vie privée de ses citoyens. Elle a mis en avant la nécessité de sécuriser lesdits réseaux et d'améliorer leur résilience, c'est-à-dire leur capacité à résister à des manipulations volontaires ou accidentelle nuisant à leur fonctionnement normal. En effet, et comme le souligne un rapport de 2007 sur la question 39 ( * ) , « la vulnérabilité de notre société en cas de dysfonctionnement de ces réseaux reste mal mesurée et la préparation pour y faire face encore laborieuse ».

Afin que soient mises au point des solutions technologiques permettant d'anticiper et de contrer ces risques d'un nouveau type, il est attendu du FSN le lancement de plusieurs appels à projets. Ils viseront à soutenir la recherche et le développement par le biais de subventions, d'avances remboursables auprès de PME ou de prises de participation dans des démonstrateurs.

Gérés par des consortiums public/privé, ces derniers se rémunéreront en prestations de service visant au renforcement des infrastructures critiques de l'Internet. Les solutions techniques proposées devraient permettre la sécurisation physique des sites sensibles (points d'échanges du web, centrales de stockages ...) et la sécurisation de bout en bout des usages professionnels d'Internet (protocoles sécurisés, virtualisation de serveurs, techniques matérielles et logicielles ...) ;

- les systèmes de transport intelligents .

Ce terme recouvre l'ensemble des applications des TIC au domaine des transports en vue d'en optimiser le rendement, la sécurité, la fiabilité, la mobilité, l'interopérabilité ou encore la consommation énergétique. Leur fonctionnement repose sur des technologies reproduisant les aptitudes liées à l'intelligence humaine (capacités sensorielles, mémoire, communication, traitement de l'information et comportement adaptatif). Ils font appel pour ce faire à des instruments et procédés électroniques extrêmement sophistiqués (technologies de capteurs, de localisation, de calcul, de communication sans fil ...).

En fixant comme objectif à la politique des transports de contribuer au développement durable et de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 % d'ici à 2020, afin de les ramener au niveau atteint en 1990, la loi de programmation du 3 août 2009 relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement a redonné une actualité et une utilité prééminentes à ces technologies. Leur usage permettra en effet d'optimiser l'utilisation des modes de transport collectifs (pour les voyageurs) ou « massifiés » (pour les marchandises), sources de très importantes économies d'énergie.

L'intervention du FSN dans ce cadre se ferait au travers de subventions en recherche et développement, d'avances remboursables ou de prises de participation au développement. Ses actions viseraient à favoriser l'équipement du réseau routier national ou du réseau ferroviaire par des systèmes d'exploitation dynamiques permettant d'améliorer l'information des usagers et la gestion et la régulation des trafics. Pour le réseau ferré, il consisterait à soutenir le développement du système GSM-R, standard de communication sans fil basé sur le GSM et développé spécifiquement pour le rail.

Enfin, il favoriserait l'envol des solutions de communication embarquée, à la fois entre véhicules, mais également entre véhicules et infrastructures, dites de « route intelligente » 40 ( * ) . Le LAVIA (Limiteur s'adaptant à la vitesse autorisée) en est l'exemple le plus connu aujourd'hui. Mais le projet de « route intelligente » intègre aussi les recherches sur les équipements automobiles et les voiries routières capables de s'auto-diagnostiquer ou encore équipées de capteurs capables de détecter des incidents météorologiques nécessitant une modification du mode de conduite ;

- la « ville numérique ».

La concentration dans les centres urbains d'une partie largement majoritaire (75 %) de la population française, la multiplication des réseaux de télécommunication, le dynamisme du web 2.0 et la prise de conscience progressive des élus incitent au développement de la « ville numérique », soit un ensemble ouvert et fluide au centre duquel l'usager-habitant interagirait avec son environnement grâce aux technologies d'information et de communication les plus modernes.

Plusieurs systèmes en ce sens sont déjà en cours de développement. La possibilité d'utiliser les fonds de carte urbains (de type Google earth ) et de les combiner avec d'autres données (ce que l'on appelle le mashup ) donne naissance à de la « réalité augmentée », que l'on peut consulter notamment sur son écran de téléphone portable. Ainsi, un appareil appelé city scan , qui permet la collecte d'un maximum de données possibles (pollution, données météo, trafic routier, images issues de caméras de vidéosurveillance ...) pour créer des applications cartographiques à forte valeurs ajoutées, est en cours d'expérimentation.

Dans ce cadre, le projet de loi fait référence, dans son exposé des motifs, à un appel à projet pour le développement d'usages innovants numériques liés à la ville de demain. Il renvoie également à un appel à manifestations d'intérêt qui serait lancé auprès des collectivités territoriales et des acteurs privés sur la réalisation d'un projet ambitieux (ville ou quartier de grande ville) préfigurant la ville de demain dans toutes ses dimensions (utilisation du numérique pour les infrastructures de transport, de commerce, de tourisme, de loisirs ; prise en compte de l'environnement ; nouveaux services mobiles sans contact ...). Les projets retenus feront l'objet d'un investissement partagé entre l'État, les collectivités et les acteurs privés, en ciblant des réalisations qui pourraient servir de vitrine et de plate-forme d'expérimentation ;

- la « e-éducation ». L'utilisation de l'effet de levier du numérique dans le développement de méthodes et contenus pédagogiques, qui relève davantage de la compétence de la commission des affaires culturelles, pourrait faire l'objet d'un soutien du FSN au travers de subventions ou d'avances remboursables et d'appels à projets ciblés. Seraient prioritairement financés des projets concernant l'enseignement des langues, la lutte contre l'illettrisme et l'accompagnement individuel.

On notera que l'Assemblée nationale, sur proposition du rapporteur général au nom de la commission des finances, M. Gilles Carrez, et de M. Patrice Martin-Lalande, a inséré un article additionnel avant l'article 1 er réduisant à 100 000 euros, au lieu de 150 000 actuellement, le montant minimum des budgets de production requis pour l'éligibilité des projets au crédit d'impôt jeux vidéos (CIJV). Ceci, selon ses auteurs, afin de tenir compte de l'évolution structurelle du marché du jeu vidéo vers le jeu en ligne et de rétablir une égalité de traitement entre la forme ancienne du jeu vidéo sur support physique et cette nouvelle forme du jeu vidéo.

* 37 Exploring the imperative of revitalizing America's electric infrastructure : how a smarter grid works as an enabling engine for our economy, our environment and our future ; préparé pour le département d'État américain de l'énergie par Litos strategic communication, 2009.

* 38 Développement durable, changement global et écosystèmes ; thématiques prioritaires du sixième programme communautaire de recherche pour la période 2002-2006, septembre 2002.

* 39 Rapport sur la résilience des réseaux de télécommunications ; fait par le Conseil général des ponts et chaussées, le Conseil général des technologies de l'information, le Contrôle général des armées, le Conseil général des mines, l'Inspection générale de l'administration et l'Inspection générale des finances ; juin 2007.

* 40 La route de cinquième génération, dite « route intelligente », capable de dialoguer avec les véhicules, devrait voir le jour d'ici dix à vingt ans. Elle fait appel à des capteurs et émetteurs placés le long de la chaussée, qui envoient des informations au véhicule pour l'informer de sa position exacte mais aussi lui recommander une vitesse adaptée à l'état du revêtement et aux conditions météos.

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