B. INDEMNISATION DES VICTIMES : DES DROITS NOUVEAUX OU RENFORCÉS

1. Victimes des essais nucléaires : les premières indemnisations devraient intervenir avant la fin de l'année

Entre 1960 et 1996, la France a procédé à deux cent dix essais nucléaires, atmosphériques ou souterrains, au Sahara algérien d'abord, en Polynésie française ensuite. Or, s'il a rapidement été avéré que certaines pathologies développées par les populations civiles ou militaires atteintes par les retombées radioactives étaient manifestement « radio-induites », aucun dispositif particulier de réparation n'a été mis en place jusqu'à l'adoption, à l'issue d'une large concertation, de la loi du 5 janvier 2010 34 ( * ) .

Complétée par le décret du 11 juin 2010 35 ( * ) , ce texte reconnaît désormais une présomption de causalité entre la contamination et ces maladies sur le modèle du dispositif prévu pour les victimes de l'amiante ou pour celles contaminées par le virus de l'hépatite C : en cas de doute, c'est à l'administration d'apporter la preuve que le risque attribuable aux essais nucléaires est négligeable dans l'apparition de la pathologie cancéreuse. En outre, le système d'indemnisation prévu n'opère plus de distinction de nationalité ou de statut entre populations civiles ou militaires et entend assurer la réparation intégrale des préjudices subis, qu'il s'agisse d'éléments patrimoniaux ou extra-patrimoniaux (importance des troubles d'existence, incidence professionnelle, déficit fonctionnel, etc.).

Les demandes d'indemnisation sont examinées par un comité d'indemnisation constitué de personnalités qualifiées essentiellement dans le milieu médical, sous la présidence d'un membre du Conseil d'Etat 36 ( * ) , qui apprécie le lien de causalité et arrête les modalités de calcul de l'indemnisation en capital allouée par décision du ministre de la défense.

Après avoir ouvert une ligne téléphonique dédiée à l'information des intéressés et défini une méthode de traitement des dossiers, le secrétariat du comité avait adressé, entre la parution du décret et le 28 juillet 2010, trois cent vingt formulaires d'indemnisation et reçu soixante-dix-huit demandes accompagnées de pièces justificatives. Après instruction des dossiers, les premières indemnisations devraient être proposées à la liquidation au cours du dernier trimestre 2010 . Dès lors, la provision de 10 millions d'euros inscrite en loi de finances pour 2010, et reconduite sur la même base cette année, paraît suffisante pour répondre aux demandes ; elle pourrait du reste être abondée en cours de gestion selon les besoins.

Si votre commission se réjouit bien entendu de la mise en oeuvre de ce nouveau droit à réparation, elle regrettera simplement, comme elle l'avait déjà soutenu l'an dernier par voie d'amendement 37 ( * ) , que l'intitulé de l'action retraçant les crédits dédiés à ce dispositif vise la simple « réparation des conséquences sanitaires » 38 ( * ) des essais nucléaires plutôt que la « reconnaissance et l'indemnisation des victimes » symboliquement retenue par la loi du 5 janvier 2010.


* 34 Loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 portant reconnaissance et indemnisation en faveur des victimes des essais nucléaires français.

* 35 Décret n° 2010-653 du 11 juin 2010, qui détermine en particulier les zones du Sahara et de Polynésie française retenues et fixe, sur la base des travaux reconnus par la communauté scientifique internationale, la liste des dix-huit pathologies ouvrant droit à indemnisation.

* 36 Voir l'arrêté du 3 août 2010 relatif à la composition du comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires.

* 37 Amendement finalement déclaré irrecevable par la commission des finances en application de la loi organique relative aux lois de finances, postérieurement à son adoption par la commission des affaires sociales.

* 38 Action 6 du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ».

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